Le Rhône Fantastique Une pièce de théâtre adaptée du roman Silmée, fille du Rhône écrite par Julie Palmier, Elsa Hellemans et Pierre Jegou
Scène d'exposition Sur l'écran apparaît une illustration fixe du Rhône avec les berges, qui traverse l'écran en diagonale. L'eau et les arbres bougent à peine. La lumière éclaire progressivement la scène et dévoile Silmée seule sur scène, en train de se déguiser en homme. Musique d'ambiance avec de l'eau l'ouverture Sons pendant le discours de silmée (rats, canards, mouettes, port, l'eau qui coule...) Silmée : Ça y est, je sais comment apaiser le Rhône ! Ma tante Zélie adore me raconter des histoires sur le fleuve, ses légendes... je vais souvent dans sa boutique sur les quais et elle m'a parlé d'une algue aux propriétés purificatrices qui pourrait être le remède aux maux de mon ami. C'est une plante rare et difficile à trouver mais, puisqu'elle ne viendra pas à moi... Une idée totalement incongrue a germé dans mon esprit torturé. On m’a souvent prise pour une enfant différente, un peu « dérangée » ou « fada » comme ont dit chez moi. Depuis toute petite, je vis à Pont Saint Esprit et je vais sur les berges du Rhône pour passer du temps avec lui. J'aime sa compagnie plus que celle des autres. Sa voix m'est plus familière que celle d'une mère. J’aime le regarder courir quand le soleil arase son eau, plonger mes yeux sur les étoiles éphémères qui illuminent sa surface avant de se brouiller puis se dissoudre dans le courant. J'aime l’entendre couler, respirer... discuter avec lui sur ce que nous vivons ensemble : les libellules à la belle saison, les martins pêcheurs, les écureuils, les rats, les chats qui poursuivent les rats... Je sais aussi qu’il aime ma présence tout près de lui. Si on ne fait que le regarder, il vous renvoie votre regard. Il faut le pénétrer pour savoir qui il est, autrement il se déguise en ciel, en nuage, en colline, en arbre, en homme, il a le visage de tout le monde et de personne. Pourtant en dessous, caché par cette peau qu'il est inutile de gratter, parce qu'elle se referme aussitôt, il y a tout un monde. Un monde qu'il ne livre qu'à moi ! C'est mon meilleur ami. Mais depuis quelque temps, je ne le reconnais plus et il ne se reconnaît plus non plus. Sa part sombre et imprévisible surgit de plus en plus souvent comme quelqu'un qui d'un coup changerait d'humeur et prendrait un regard noir et inquiétant. Silmée finit de s'attacher les cheveux et met son sac sur le dos En discutant avec les mariniers, j'ai compris pourquoi il était si mal en point ; en un siècle à peine, les hommes ont tellement transformé les berges, qu'ils ont dévié le cours du fleuve ! Mon oncle, qui est pêcheur m'a même dit que certains poissons disparaissaient ! L'activité humaine et les aménagements sont incessants, les eaux ne dorment jamais. De puissants