Notre-Dame de Paris sample

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SENIORS

VICTOR HUGO NOTRE-DAME DE PARIS

NIVEAU 4

Victor Hugo Paris, 6 janvier 1482. Au cours des festivités qui accompagnent traditionnellement le jour de l’Épiphanie, le belle Esmeralda danse sur la place de Grève où flambe un grand feu de joie. Parmi les mille visages rougis par le reflet des flammes, il y en a un qui semble plus que tous les autres absorbés par la contemplation de la danseuse. Et tandis que la jeune bohémienne danse et voltige au plaisir de tous, la rêverie de l’homme semble devenir de plus en plus sombre ... La bohémienne se retourne soudain, le voit, tressaille : « Oh ! le vilain homme ! » dit-elle.

NOTRE-DAME DE PARIS

Notre-Dame de Paris

VICTOR HUGO

Les lectures ELI sont une collection de récits gradués superbement illustrés où les adaptations des grands classiques de la littérature française voisinent avec des créations originales, spécialement écrites pour les apprenants de Français Langue Étrangère.

NIVEAU 4

LECTURES

Dans cet ouvrage : - Des dossiers culturels ; - Un glossaire des mots et expressions difficiles ; - Des exercices DELF ; - Des activités ludiques très variées. Thèmes Paris au Moyen Âge

L’amour

La fatalité

600 mots

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1800 mots

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2500 mots

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texte intégral

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Classique de la littérature française

IS

www.eligradedreaders.com

FLE B 2

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CD audio + lecture intégrale version MP3 téléchargeable

LECTURES ELI SENIORS

NIVEAU 1

FLE B2

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LECTURES

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Les Lectures ELI présentent une gamme complète de publications allant des histoires contemporaines et captivantes aux émotions éternelles des grands classiques. Elles s’adressent aux lecteurs de tout âge et sont divisées en trois collections : Lectures ELI Poussins, Lectures ELI Juniors, Lectures ELI Seniors. En dehors de la qualité éditoriale, les Lectures ELI fournissent un support didactique facile à gérer et capturent l’attention des lecteurs avec des illustrations ayant un fort impact artistique et visuel.

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Victor Hugo

Notre-Dame de Paris Adaptation libre et activités Pierre Hauzy Illustrations de Alberto Macone

LECTURES

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Victor Hugo Notre-Dame de Paris Adaptation libre et activités : Pierre Hauzy Illustrations : Alberto Macone Lectures ELI Création de la collection et coordination éditoriale Paola Accattoli, Grazia Ancillani, Daniele Garbuglia (Directeur artistique) Conception graphique Airone Comunicazione - Sergio Elisei Mise en page Airone Comunicazione Responsable de production Francesco Capitano Crédits photographiques Archivio ELI © 2015 ELI S.r.l. B.P. 6 - 62019 Recanati - Italie Tél. +39 071 750701 Fax +39 071 977851 info@elionline.com www.elionline.com Police d’écriture utilisée 13 / 18 points Monotype Dante Achevé d’imprimer en Italie par Tecnostampa Recanati Pigini Group Printing Division, Loreto - Trevi ERA 419.01 ISBN 978-88-536-2033-0

Première édition Mars 2015 www.elireaders.com


Sommaire 6

Les personnages principaux

8

Activités

10 Chapitre 1

La FĂŞte des Fous

18 Activités 22 Chapitre 2 Esmeralda 30 Activités 34 Chapitre 3

La Cour des Miracles

42 Activités 46 Chapitre 4

Dom Claude Frollo

54 Activités 58 Chapitre 5

Ă€ boire !

66 Activités 70 Chapitre 6

Phœbus et Fleur-de-Lys

78 Activités 82 Chapitre 7

Le rendez-vous

90 Activités 94 Chapitre 8

L'enlèvement

102 Activités 106 Chapitre 9

L'attaque Ă  Notre-Dame

116 Épilogue 118 Gros plan

Victor Hugo

122 Grand angle

Le printemps des cathédrales

126 Bilan

Les épisodes enregistrés sur cédé sont signalés par les symboles qui suivent : Début

Fin


LES PERSONNAGES PRINCIPAUX

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ACTIVITÉS DE PRÉ-LECTURE

Repères 1 Vrai ou faux ? En 1482 ...

V F

1 Le roi de France est Louis XI. 2 La Guerre de Cent ans n'est pas terminée. 3 Johannes Gutenberg n'a pas encore inventé l'imprimerie. 4 Les Roms sont appelés égyptiens ou bohémiens. 5 Le royaume de France est plus grand que la France actuelle. 6 L'art gothique est apparu trois siècles plus tôt. 7 La plupart des cathédrales gothiques ont déjà été construites.

Compréhension 2 Le dernier mot. Lis la préface du roman écrite par l'auteur en 1831 puis cherche dans la grille seize mots: quinze sont tirés de la préface, le dernier est la traduction du mystérieux mot grec «ANANKÊ». A

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PRÉFACE

Il y a quelques années qu'en visitant, ou, pour mieux dire, en furetant Notre-Dame, l'auteur de ce livre trouva, dans un recoin obscur de l'une des tours ce mot, gravé à la main sur le mur:

ANANKÊ Ces majuscules grecques, noires de vétusté et assez profondément entaillées dans la pierre, je ne sais quels signes propres à la calligraphie gothique empreints dans leurs formes et dans leurs attitudes, comme pour révéler que c’était une main du moyen âge qui les avait écrites là, surtout le sens lugubre et fatal qu’elles renferment, frappèrent vivement l’auteur. Il se demanda, il chercha à deviner quelle pouvait être l’âme en peine qui n’avait pas voulu quitter ce monde sans laisser ce stigmate de crime ou de malheur au front de la vieille église. Depuis, on a badigeonné ou gratté (je ne sais plus lequel) le mur, et l’inscription a disparu. Car c’est ainsi qu’on agit depuis tantôt deux cents ans avec les merveilleuses églises du moyen âge. Les mutilations leur viennent de toutes parts, du dedans comme du dehors. Le prêtre les badigeonne, l’architecte les gratte, puis le peuple survient, qui les démolit. Ainsi, hormis le fragile souvenir que lui consacre ici l’auteur de ce livre, il ne reste plus rien aujourd’hui du mot mystérieux gravé dans la sombre tour de Notre-Dame, rien de la destinée inconnue qu’il résumait si mélancoliquement. L’homme qui a écrit ce mot sur ce mur s’est effacé, il y a plusieurs siècles, du milieu des générations, le mot s’est à son tour effacé du mur de l’église, l’église elle-même s’effacera bientôt peut-être de la terre.

C’est sur ce mot qu’on a fait ce livre. Février 1831.

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Chapitre 1

La FĂŞte des Fous

2 Ce 6 janvier 1482 toutes les maisons et les boutiques de Paris Ă©taient

fermées. Comme chaque année le peuple de la capitale était en émoi* pour la double solennité du jour des Rois et de la Fête des Fous. La foule des bourgeois et des bourgeoises avait occupé dès le matin l’île de la Cité où devaient se tenir les deux réjouissances principales: Le bon jugement de madame la Vierge Marie, mystère du poète Pierre Gringoire au Palais de Justice et, juste après, l’élection du pape des fous, laquelle devait également se faire dans la grand-salle du tribunal. Aux fenêtres, aux lucarnes*, sur les toits, fourmillaient des milliers de bonnes figures bourgeoises, calmes et honnêtes. N’ayant pu ou n’ayant voulu prendre place à l’intérieur, tous ces spectateurs improvisés regardaient la cohue* en bas, tendaient l’oreille pour essayer de comprendre ce qui s’y disait à travers les cris, les rires, les exclamations, s’attendant d’une minute à l’autre à voir sortir le pape des fous, suivi de toute la cour des Miracles. Sauf qu’à l’intérieur le temps passait … à attendre. On attendait les ambassadeurs flamands qui se trouvaient à Paris pour conclure le mariage entre le dauphin* et Marguerite de Flandre, on attendait le émoi effervescence, vive agitation. lucarnes petites fenêtres parfois directement appliquées sur un toit

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cohue tumulte, confusion dauphin héritier au trône de France


notre-dame de paris

cardinal de Bourbon forcé, pour plaire au roi, de faire bonne mine* à tous ces gros bourgeois rustiques* en les invitant à la fête ; on attendait que la grande horloge du Palais sonne les douze coups de midi pour que la pièce commence : c’était bien tard sans doute pour une représentation théâtrale, mais il avait fallu prendre l’heure des ambassadeurs. Or le public attendait depuis le matin. La plupart de ces honnêtes gens étaient arrivés transis* dès le point du jour et avaient attendu grelottant de froid devant la grille du Palais ; certains affirmaient même y avoir passé la nuit pour être sûrs de trouver une place. À onze heures toutes les places étaient prises, et la gêne*, l’impatience, l’ennui, les disputes qui éclataient à tout propos pour un rien, ajoutés à la fatigue d’une longue attente, donnaient un accent aigre et amer à la clameur de ce peuple enfermé depuis trop longtemps et qui commençait à réclamer ses ambassadeurs. Finalement midi sonna. Tous les yeux se tournèrent vers les places réservées aux envoyés flamands. La porte restait fermée, et les places vides. C’était trop fort. Cette foule attendait depuis le matin trois choses : midi, l’ambassade de Flandre, le mystère. Midi seul était arrivé à l’heure. Sans compter que ce retard allait se répercuter sur l’événement de la journée, l’élection du pape des fous et le joyeux charivari* qui s’ensuivrait dans les rues de la capitale. La tempête grondait. « Le mystère, et au diable les Flamands ! » cria quelqu’un dans la foule. Ce fut l’étincelle qui mit le feu aux poudres* ; la foule battit des mains. « Le mystère, répéta-t-elle, et la Flandre à tous les diables ! » Le moment était critique. La foule s’ébranlait vers l’estrade où devait se tenir le mystère. faire bonne mine réserver un bon accueil rustiques grossiers transis engourdis par le froid

gêne ici, malaise physique dû au manque d’espace charivari tapage, vacarme qui mit le feu aux poudres qui déclencha la protestation

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victor hugo

« Commencez, commencez sur-le-champ* ! » criait-on de toutes parts. En cet instant, la tapisserie qui servait de rideau de scène se souleva et l’on vit apparaître un personnage tremblant de peur qui brandissait un éclair blanc censé* représenter la foudre. À sa vue la foule s’arrêta subitement, et changea comme par enchantement sa colère en curiosité. « Messieurs les bourgeois, dit l’homme, et mesdemoiselles les bourgeoises, nous allons avoir l’honneur de représenter devant son éminence monsieur le cardinal une très belle moralité*, intitulée : Le bon jugement de madame la Vierge Marie. C’est moi qui fais Jupiter. Son Éminence accompagne en ce moment les ambassadeurs de Flandre qui sont retenus, à l’heure qu’il est, à écouter le discours de monsieur le recteur de l’Université. Dès que l’éminentissime cardinal sera arrivé, nous commencerons. » Le costume de Jupiter était fort beau, et n’avait pas peu contribué à calmer la foule en attirant toute son attention. Cependant, quand l’acteur arriva à cette conclusion malencontreuse* : « Dès que l’éminentissime cardinal sera arrivé, nous commencerons », sa voix se perdit dans un tonnerre de huées*. « Commencez tout de suite ! Le mystère ! le mystère tout de suite ! criait le peuple. Tout de suite la moralité ! répétait la foule. Sur-le-champ ! tout de suite ! Ou la potence et la corde aux comédiens et au cardinal ! » Le pauvre Jupiter, effaré, avait laissé tomber sa foudre, et restait hagard, ne sachant que dire devant la foule en colère. Au fond, il avait peur d’être pendu. Pendu par la populace pour attendre, pendu par le cardinal pour n’avoir pas attendu, il ne voyait des deux côtés qu’un abîme, c’est-à-dire une potence. Heureusement quelqu’un vint le tirer d’embarras*. Le risur-le-champ immédiatement censé supposé moralité représentation théâtre qui se termine par un enseignement moral

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malencontreuse maladroite huées cris, vociférations le tirer d’embarras à son secours


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deau de scène se souleva à nouveau et un individu apparut : c’était le poète Pierre Gringoire, l’auteur du mystère. Il s’approcha de l’acteur et lui dit : « Jupiter ! mon cher Jupiter ! Commencez tout de suite. N’ayez crainte, je me charge d’apaiser* monsieur le cardinal ». Jupiter respira. « Messeigneurs les bourgeois, cria-t-il de toute la force de ses poumons à la foule qui continuait de le huer, nous allons commencer tout de suite. » Malheureusement, à peine les acteurs avaient-ils pris place sur scène que l’huissier* annonça d’une voix sonore : « Son Éminence Monseigneur le cardinal de Bourbon et Messieurs les ambassadeurs de Flandre ». La présentation des quarante-huit envoyés de Maximilien d’Autriche dura une demi-heure. Et ce n’est que lorsqu’ils eurent tous pris place que le cardinal fit signe aux acteurs qu’ils pouvaient commencer. « La charité, s’il vous plaît ! » Dans le silence qui précédait le début du mystère, cette phrase provenant des tribunes où avaient pris place les ambassadeurs provoqua un immense éclat de rire dans l’assemblée. Le cardinal se retourna vivement : « Gardes, jetez-moi ce drôle* à la rivière ! » cria-t-il en apercevant un mendiant en guenilles* qui semblait tendre la main vers un ambassadeur. Le drôle en question n’était autre que Clopin Trouillefou, l’un des mendiants les plus célèbres de Paris, roi disait-on de la Cour des Miracles, cette société secrète dont faisaient partie tous les brigands de la capitale. « Monseigneur le cardinal, ne lui faites pas de mal, dit l’ambassadeur qui avait pris la main de Clopin, cet homme est un de mes amis. » Le cardinal de Bourbon, toutes les autorités dans les tribunes d’honneur, le public restèrent bouche bée*. Un ambassadeur ami d’un mend’apaiser de calmer huissier gardien d’une entrée drôle ici, mauvais sujet

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en guenilles habillé de vêtements en lambeaux bouche bée la bouche ouverte sans pouvoir prononcer un son


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diant ? Comment ces deux hommes si différents s’étaient-ils connus ? Mystère. Mais, comme le soi-disant ami du mendiant, Maître Jacques Coppenole, clerc des échevins de la ville de Gand, s'était déjà fait remarquer à l'entrée en faisant rire le public de ses bons mots, tout le monde crut à une nouvelle plaisanterie, à l'exception des invités d'honneur et du cardinal que cette amitié monstrueuse scandalisait. En attendant, Gringoire avait profité de ce silence inattendu pour encourager ses acteurs « Commencez ! Mais commencez donc ! leur criait-il ». Les acteurs remontèrent sur scène et se représentèrent devant le public. Peine perdue. Tous les yeux étaient tournés vers le mendiant et l’ambassadeur qui parlaient à voix basse* sans se soucier le moins du monde des spectateurs. Tout à coup, l’ambassadeur flamand se leva et dit en échangeant un sourire d’entente avec le dénommé Clopin. « Messieurs les bourgeois et nobles de Paris, je me demande ce que nous faisons ici. Je vois bien là-bas dans ce coin*, sur ce tréteau, des gens qui ont l’air de vouloir parler. J’ignore si c’est là ce que vous appelez un mystère ; mais ce n’est pas amusant. On m’avait promis une fête des fous, avec élection du pape. Nous avons aussi notre pape des fous à Gand, mais chez nous c’est plus amusant. On se rassemble comme ici, puis chacun à son tour va passer sa tête par un trou et fait une grimace* aux autres. Celui qui fait la plus laide*, à l’acclamation de tous, est élu pape. Voilà. C’est fort divertissant. Voulez-vous que nous fassions votre pape à la mode de mon pays ? Ce sera toujours moins fastidieux* que d’écouter ces bavards. Qu’en dites-vous, Messieurs les bourgeois ? Gringoire aurait voulu répondre. La stupéfaction, la colère, l’indignation lui ôtèrent la parole. D’ailleurs la motion de l’ambassadeur avait été accueillie avec un tel enthousiasme que toute résistance était inutile. Et puis tout était déjà prêt pour le spectacle des grimaces. Une vitre brisée* à la à voix basse sans élever le ton pour ne pas se faire entendre coin angle grimace déformation du visage

laide désagréable à voir fastidieux ennuyeux brisée cassée

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jolie rosace au-dessus de la porte de la chapelle laissa libre un cercle de pierre par lequel il fut convenu que les concurrents passeraient la tête. En moins d’un instant la chapelle fut remplie de concurrents. Et les grimaces commencèrent. Chaque figure qui apparaissait à la lucarne faisait éclater de rire le public qui trépignait* de joie. Qu’on se figure une série de visages présentant successivement toutes les formes géométriques, triangles, cônes, trapèzes … toutes les expressions humaines, de la colère à la luxure* ; tous les âges, tous les profils d’animaux, tous les masques du carnaval : en un mot, qu’on se figure un kaléidoscope humain. Tout à coup … « Noël* ! Noël ! Noël ! » cria le peuple de toutes parts : le pape des fous venait d’être élu. C’était une merveilleuse grimace, en effet, que celle qui rayonnait en ce moment au trou de la rosace. Après toutes les grimaces qui s’étaient succédé à cette lucarne, celle qui venait d’éblouir l’assemblée était tout simplement sublime. L’ambassadeur flamand lui-même applaudit. L’acclamation fut unanime. On se précipita vers la chapelle. On en fit sortir en triomphe le bienheureux pape des fous. Mais c’est alors que la surprise et l’admiration furent à leur comble*. La grimace était son visage. Ou plutôt toute sa personne était une grimace. Une grosse tête hérissée de cheveux roux ; entre les deux épaules une bosse énorme qui ressortait inversée par devant ; et, avec toute cette difformité, je ne sais quelle allure redoutable de vigueur, d’agilité et de courage. Tel était le pape que l’assemblée venait de se donner. Quand cette espèce de cyclope parut sur le seuil de la chapelle, immobile, trapu*, et presque aussi large que haut, la populace le reconnut sur-le-champ, et s’écria d’une voix: « C’est Quasimodo, le trépignait frappait des pieds sur place luxure sensualité lascive, concupiscence, débauche Noël Au Moyen Âge cri de joie du peuple pour saluer un événement heureux

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Ă  leur comble au maximum trapu physique petit et large donnant une impression de force, de vigueur


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sonneur de cloches ! c’est Quasimodo, le bossu* de Notre-Dame ! Quasimodo le borgne* ! Quasimodo le bancal* ! Noël ! Noël ! » Cependant quelqu’un était allé chercher la tiare* de carton et la simarre dérisoire du pape des fous. Quasimodo s’en laissa revêtir sans sourciller et avec une sorte de docilité orgueilleuse. On le fit asseoir sur un brancard bariolé*. Douze officiers de la confrérie des fous l’enlevèrent sur leurs épaules. Puis la procession hurlante et déguenillée se mit en marche pour faire, selon l’usage, la tournée intérieure des galeries du Palais, avant la promenade des rues et des carrefours.

bossu qui a dans le dos une protubérance en forme de bosse borgne qui n’a qu’un œil bancal qui a les jambes tordues

tiare coiffure ornée de trois couronnes que portaient les papes bariolé multicolore

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ACTIVITÉS DE POST-LECTURE

Compréhension 1 Remets les phrases dans l’ordre en indiquant la ponctuation et en rétablissant la chronologie du récit. 1 1482 • et les boutiques • une grande pièce • étaient fermées • de Paris • Le 6 janvier • toutes les maisons Le 6 janvier 1482 toutes les maisons et les boutiques de Paris _____________________________________________________ étaient fermées. _____________________________________________________ Alors • l’un des ambassadeurs • au concours • au spectacle • et proposa • qui assistaient • immédiatement • prit la parole • que l’on passe • de grimaces • flamands _____________________________________________________ _____________________________________________________ Comme • les Rois • chaque • le peuple • fous • année • de Paris • fêtait • et ses _____________________________________________________ _____________________________________________________ L'auteur • ne les écoutait plus • fatigué d’attendre • de les faire revenir • plusieurs fois • mais la foule • essaya bien _____________________________________________________ _____________________________________________________ La motion • de la chapelle fut accueillie • l'un après l’autre • et les concurrents • avec • enthousiasme • passèrent leur tête • de l’ambassadeur • dans un trou de la rosace • grimaçante • au-dessus de la porte • de les faire revenir • plusieurs fois • mais la foule • essaya bien _____________________________________________________ _____________________________________________________ _____________________________________________________ Lorsque • le monstrueux • qui cachait • la porte • sortit de derrière • le vainqueur • tout le monde • reconnut le reste de sa personne • Quasimodo • sonneur de cloches de Notre-Dame _____________________________________________________ _____________________________________________________ _____________________________________________________

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Plus • le public • grondait • plus • la colère • passait • le temps • les renvoya • sur scène • les acteurs • et quand finalement • montèrent • dans les coulisses • exaspéré _____________________________________________________ _____________________________________________________ Sauf • le mystère • du poète • de justice • s’impatientait • Pierre Gringoire • qu’à midi • qui se pressait • dans le palais • et la foule • n’avait pas encore commencé _____________________________________________________ _____________________________________________________ Tout • à coup • une grimace • venait • prodigieuse • d’être élu • une acclamation • le pape des Fous • formidable • accueillit _____________________________________________________ _____________________________________________________ Toutes • qu'un nouveau visage • devant le public • les expressions humaines • dans la lucarne • défilèrent • aux éclats • qui riait • ainsi • chaque fois • apparaissait _____________________________________________________ _____________________________________________________ Un grand • du pape • de bon matin • nombre de Parisiens • où devaient avoir lieu • s’étaient rendus • des Fous • sur l’Île de la Cité • une représentation • et l’élection • théâtrale _____________________________________________________ _____________________________________________________

Vocabulaire et production écrite 2a Associe correctement les syllabes contenues dans la grille afin de reconstituer vingt mots tirés du chapitre ; utilise ensuite ces mêmes mots pour résumer l’essentiel du premier chapitre. jan-vier jan jus tion pa car

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mys diant clo su sion

janvier.

ambas teurs ac teur mace

neur ma geois ches vier

gri pe prome Ă©lec pa

sur riage dinal tice prise

au bos proces bour sadeurs

lais son tère nade men

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2b En te basant sur les coupures syllabiques du tableau précédent, comment couperais-tu les mots suivants en fin de ligne ? mai sons • boutiques • jugement • Vierge • tribunal • Miracles • dauphin • Flandres • spectateurs • ennui • disputes • étincelle • foudre • curiosité • messieurs • mesdemoiselles • costume • tonnerre • comédiens • divertissant

Grammaire du texte 3a Accent aigu, accent grave, accent circonflexe, pas d’accent ? Place correctement les accents qui manquent sur les « e » du texte. Pendant tout le spectacle des grimaces, l’auteur de la piece et les acteurs avaient tenu bon. Ses acteurs, talonnes par lui, n'avaient pas discontinue de debiter sa comedie, et lui n'avait pas discontinue de l'ecouter. Il avait pris son parti du vacarme, et était determine à aller jusqu'au bout, ne desesperant pas d'un retour d'attention de la part du public. Cette lueur d'esperance se ranima quand il vit Quasimodo, Coppenole et le cortege assourdissant du pape des fous sortir à grand bruit de la salle. La foule se precipita avidement à leur suite. En un clin d'œil la salle fut vide. À vrai dire, il restait encore quelques spectateurs, les uns épars, les autres groupes autour des piliers, femmes, vieillards ou enfants, en ayant assez du brouhaha et du tumulte. Quelques ecoliers etaient demeures à cheval sur l'entablement des fenetres et regardaient la place. Gringoire pensa que cela valait tout de meme la peine de continuer, et il ordonna aux acteurs de rester sur scene ; le public n’etait pas nombreux, certes, mais c’etait un public d’elite, un public de lettres. Hélas ! Tout à coup une voix cria : « La Esmeralda ! La Esmeralda ! et les derniers spectateurs sortirent en courant, au grand desespoir de Pierre Gringoire.

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3b Place correctement les accents qui manquent sur les « e » des mots suivants: electricite • exercice • fermeture • acheter • nous achetons • ils achetent • je precede • nous precedons • necessaire • fenetre • pretre • bohemienne • honnete • estrade • comedien • colere • charite • messieurs • stupefaction • expression

ACTIVITÉ DE PRÉ-LECTURE

Gramaire du texte 4 Lis le texte en choisissant chaque fois l'adjectif qui convient en fonction du contexte. La procession du pape des fous, après avoir parcouru de long en large l’Île de la Cité déboucha dans la place de Grève, avec toutes ses torches et toute sa rumeur. La mascarade sérieuse grotesque s'était organisée chemin faisant, et avait recruté tout ce qu'il y avait à Paris de marauds, de voleurs, de boiteux, de manchots, d’estropiés. Au centre de cette foule, les grands gros officiers de la confrérie des fous portaient sur leurs épaules un brancard surchargé décoré de cierges. Et sur ce brancard resplendissait, crossé, chapé et mitré, le nouveau dernier pape des fous, le sonneur de cloches de Notre-Dame, Quasimodo le Bossu. Il est difficile facile de donner une idée du degré d'épanouissement orgueilleux modeste où le triste joyeux et beau hideux visage de Quasimodo était parvenu dans le trajet du Palais à la Grève. C'était la première seule jouissance d'amour-propre de sa superbe misérable existence. Il n'avait connu jusque-là que l'humiliation, le dédain pour sa condition, le dégoût pour sa personne. Aussi, tout sourd qu'il était, savouraitil en véritable pape les acclamations de cette foule qui le haïssait d’habitude . Que son peuple fût un rassemblement de fous, de perclus, de voleurs, de mendiants, qu'importe ! C'était toujours un peuple, et lui un souverain. Et il prenait au sérieux tous ces applaudissements fébriles ironiques, tous ce respect dérisoire, sincère auxquels nous devons dire qu'il se mêlait pourtant dans la foule un peu de crainte réelle absurde. Car le bossu était robuste faible ; car le bancal était agile maladroit ; car le sourd était gentil méchant : trois qualités qui tempèrent le ridicule.

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Chapitre 2

Esmeralda

La tête basse, mais le dernier, comme un général qui s’est bien battu, Gringoire avait salué ses comédiens malchanceux et s’était engouffré dans la première ruelle pour cacher sa peine et méditer à son aise. « Belle cohue d’ânes et de butors* que ces Parisiens ! grommelait-il entre ses dents ; ils viennent pour entendre un mystère, et n’en écoutent rien ! Ils se sont occupés de tout le monde, de ce Clopin Trouillefou, du cardinal, de l’ambassadeur, de Quasimodo, du diable ! mais de madame la Vierge Marie, point. » La nuit arrive de bonne heure en janvier. Les rues étaient déjà sombres quand Gringoire avait quitté Palais. Où allait-il dormir cette nuit ? Il n’osait rentrer dans le logis* qu’il occupait, ayant compté sur son mystère et sur l’avance qu’on devait lui donner pour payer à son propriétaire les six mois de loyer* qu’il lui devait ; mais comme personne n’avait assisté à la représentation … Au premier carrefour, il tomba sur la procession du pape des fous qui se dirigeait vers la place de Grève à grands cris, avec musique et une foule de torches allumées. Cette vue raviva les écorchures* de son amour-propre ; Maudite fête ! le poursuivra-t-elle partout ? butors personnes stupides et grossières logis logement

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loyer somme d’argent versée à un propriétaire en échange de l’usage d’un logement écorchures petites blessures ; ici, emploi figuré


notre-dame de paris

Il allait s’enfuir, mais se ravisa* au dernier moment : puisqu’il était condamné au pape des fous et au défilé des imbéciles qui avaient démoli sa pièce, il décida de se perdre dans cette marée gesticulante et d’aller avec eux à la place de Grève. Au moins y trouverait-il la chaleur d’un bon feu et quelque chose à manger. Lorsque Pierre Gringoire arriva sur la place de Grève, il était transi. Mais impossible de s’approcher du feu de joie qui brûlait magnifiquement au milieu de la place. Une foule considérable faisait cercle tout autour. Il se haussa sur la pointe des pieds et s’aperçut en regardant par-dessus les têtes et les épaules que dans l’espace laissé libre entre la foule et le feu, une jeune fille dansait. Elle n’était pas grande, mais elle le semblait, tant sa fine taille s’élançait hardiment. Elle dansait, elle tournait, elle tourbillonnait sur un vieux tapis de Perse, jeté négligemment* sous ses pieds; et chaque fois qu’en tournoyant sa rayonnante figure passait devant vous, ses grands yeux noirs vous jetaient un éclair. Autour d’elle tous les regards étaient fixes, toutes les bouches ouvertes. Gringoire avait entendu parler d’une bohémienne d’un exceptionnelle beauté nommée Esmeralda. C’était elle. Parmi les mille visages que la lueur du feu rougissait, il y en avait un qui semblait plus encore que tous les autres absorbé dans la contemplation de la danseuse. C’était une figure d’homme, austère*, calme et sombre. Cet homme, dont le costume était caché par la foule qui l’entourait, ne paraissait pas avoir plus de trente-cinq ans ; cependant il était chauve*; à peine avait-il aux tempes quelques touffes de cheveux rares et déjà gris ; son front large et haut commençait à se creuser de rides ; mais dans ses yeux enfoncés éclatait une jeunesse exse ravisa changea d’avis négligemment avec désinvolture, sans mise en scène particulière

austère sévère chauve sans cheveux

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traordinaire, une vie ardente, une passion profonde. Il les tenait sans cesse attachés sur la bohémienne, et tandis que la folle jeune fille de seize ans dansait et voltigeait au plaisir de tous, sa rêverie, à lui, semblait devenir de plus en plus sombre. De temps en temps* un sourire et un soupir se rencontraient sur ses lèvres, mais le sourire était plus douloureux que le soupir. La jeune fille, essoufflée, s’arrêta enfin, et le peuple l’applaudit avec amour. « Djali », dit la bohémienne. Alors on vit arriver une jolie petite chèvre blanche, alerte, éveillée, lustrée*, avec des cornes dorées, avec des pieds dorés, avec un collier doré, qui jusque-là était restée accroupie sur un coin du tapis à regarder danser sa maîtresse. — Djali, dit la danseuse, à votre tour*. Et s’asseyant, elle présenta gracieusement à la chèvre son tambour de basque. — Djali, continua-t-elle, à quel mois sommes-nous de l’année ? La chèvre leva son pied de devant et frappa un coup sur le tambour. On était en effet au premier mois. La foule applaudit. — Djali, reprit la jeune fille en tournant son tambour de basque d’un autre côté, à quel jour du mois sommes-nous ? Djali leva son petit pied d’or et frappa six coups sur le tambour. — Djali, poursuivit l’égyptienne, à quelle heure du jour sommesnous ? Djali frappa sept coups sur le tambour. Au même moment l’horloge de la Maison-aux-Piliers sonna sept heures. Le peuple était émerveillé. — Il y a de la sorcellerie là-dessous, dit une voix sinistre* dans la foule. C’était celle de l’homme chauve qui ne quittait pas la bohéde temps en temps à intervalles plus ou moins réguliers lustrée brossée

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à votre tour c’est à vous (de montrer ce que vous savez faire) sinistre funeste


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mienne des yeux. Elle tressaillit, se détourna; mais les applaudissements éclatèrent et couvrirent la morose* exclamation. — Sacrilège ! Profanation ! reprit la voix de l’homme chauve. La bohémienne se retourna encore une fois. « Ah ! dit-elle, c’est ce vilain homme ! » puis elle fit une pirouette* et se mit à recueillir dans son tambour les dons des spectateurs. Sur son brancard, Quasimodo le bossu n’avait pas perdu une miette* du spectacle de la danseuse. Le nouveau pape des fous se rendait-il compte des sentiments qu’il éprouvait et des sentiments qu’il inspirait ? Toujours est-il que cette sombre et malheureuse figure rayonnait : il y avait comme un émerveillement d’enfant dans son œil de borgne. Ce ne fut donc pas sans surprise et sans effroi* que l’on vit tout à coup un homme s’élancer à travers la foule et lui arracher des mains, avec un geste de colère, sa crosse de bois doré, insigne de sa folle papauté. Cet homme, ce téméraire, c’était le personnage au front chauve qui, le moment auparavant, mêlé au groupe de la bohémienne, avait glacé la pauvre fille de ses paroles de menace et de haine. Il était revêtu du costume ecclésiastique. Au moment où il sortit de la foule, Gringoire, qui ne l’avait point remarqué jusqu’alors, le reconnut : « Tiens ! dit-il, avec un cri d’étonnement, c’est dom Claude Frollo, l’archidiacre ! Que diable veut-il à ce vilain borgne ? Il va se faire dévorer. » Un cri de terreur s’éleva en effet. Le formidable Quasimodo s’était précipité à bas du brancard, et les femmes détournaient les yeux pour ne pas le voir déchirer l’archidiacre. Il fit un bond jusqu’au prêtre, le regarda, et tomba à genoux. Le prêtre lui arracha sa tiare, lui brisa sa crosse, lui lacéra* sa chape de clinquant*. Quasimodo resta à genoux, baissa la tête et joignit les mains. Puis il s’établit entre eux un étrange dialogue de signes et de morose personne triste et toujours mécontente pirouette tour complet sur soi-même n’avait pas perdu une miette avait suivi avec beaucoup d’intérêt

effroi épouvante lacéra déchira clinquant ornement brillant doré ou argenté

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gestes, car ni l’un ni l’autre ne parlait. Le prêtre, debout, irrité, menaçant, impérieux; Quasimodo, prosterné*, humble, suppliant, alors qu’il aurait pu l’écraser avec le pouce. Enfin l’archidiacre lui fit signe de se lever et de le suivre. Quasimodo se leva. Alors la confrérie des fous, la première stupeur passée, voulut défendre son pape si brusquement détrôné. Toute la Cour des Miracles s’élança menaçante contre l’homme chauve. Quasimodo se plaça devant le prêtre, fit jouer les muscles de ses poings athlétiques, et regarda les assaillants* avec le grincement de dents d’un tigre fâché. Le prêtre reprit sa gravité sombre, fit un signe à Quasimodo, et se retira en silence. Quasimodo marchait devant lui, éparpillant* la foule à son passage. On les laissa s’enfoncer tous deux dans une rue étroite et ténébreuse, où nul n’osa se risquer après eux. De son côté, Gringoire s’était mis à suivre la bohémienne. À tout hasard*. Il lui avait vu prendre, avec sa chèvre, la rue de la Coutellerie; il avait pris la rue de la Coutellerie. « Pourquoi pas ? » s’était-il dit. Il marchait donc tout pensif derrière la jeune fille qui hâtait le pas et faisait trotter sa jolie chèvre en voyant rentrer les bourgeois et se fermer les tavernes. Après tout, il fallait bien qu’elle loge quelque part, cette bohémienne ; on dit qu’ils ont bon cœur*. Qui sait ? ... Les rues cependant devenaient à tout moment plus noires et plus désertes. Le couvre-feu* était sonné depuis longtemps, et l’on commençait à ne plus rencontrer qu’à de rares intervalles un passant sur le pavé, une lumière aux fenêtres. Depuis quelques instants, il avait attiré l'attention de la jeune fille ; elle avait à plusieurs reprises tourné la tête vers lui avec inquiétude ; elle s'était même une fois arrêtée tout court, avait profité d'un rayon de lumière qui s'échappait d'une bouprosterné le corps incliné vers la terre en signe de respect assaillants attaquants éparpillant faisant se dissiper

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à tout hasard à toutes fins utiles qu’ils ont bon cœur qu’ils sont généreux couvre-feu interdiction de sortir de chez soi à partir d’une certaine heure


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langerie entr'ouverte pour le regarder fixement du haut en bas; puis, ce coup d'œil jeté, Gringoire lui avait vu faire cette petite moue qu'il avait déjà remarquée, et elle avait passé outre. Cette petite moue donna à penser à Gringoire. Il y avait certainement du dédain et de la moquerie dans cette gracieuse grimace. Aussi commençait-il à baisser la tête, à compter les pavés, et à suivre la jeune fille d'un peu plus loin, lorsque, au tournant d'une rue qui venait de la lui faire perdre de vue, il l'entendit pousser un cri perçant. Il hâta le pas*. La rue était pleine de ténèbres. Pourtant une petite lampe à huile, qui brûlait dans une cage de fer aux pieds de la Sainte-Vierge du coin de la rue, permit à Gringoire de distinguer la bohémienne se débattant dans les bras de deux hommes qui s’efforçaient d’étouffer ses cris. La pauvre petite chèvre, tout effarée, baissait les cornes et bêlait. « À nous, Messieurs du guet* », cria Gringoire, et il s’avança bravement. L’un des hommes qui tenaient la jeune fille se tourna vers lui. C’était la formidable figure de Quasimodo. Gringoire ne prit pas la fuite, mais il ne fit point un pas de plus. Quasimodo vint à lui, le jeta quatre pas plus loin sur le pavé d’un revers de la main, et s’enfonça rapidement dans l’ombre, emportant la jeune fille ployée* sur un de ses bras comme une écharpe de soie. Son compagnon le suivait, et la pauvre chèvre courait après tous, avec son bêlement plaintif. « Au meurtre ! au meurtre ! criait la malheureuse bohémienne. » — Halte-là, misérables, et lâchez-moi cette ribaude* ! dit tout à coup d’une voix de tonnerre un cavalier qui déboucha* brusquement du il hâta le pas il marcha plus rapidement Messieurs du guet Messieurs les gendarmes, les gardes ployée pliée en deux

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ribaude anciennement femme de mauvaise vie, prostituée déboucha arriva


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carrefour voisin. C’était un capitaine des archers de l’ordonnance du roi qui, alerté par les cris de Gringoire, s’était précipité sur les lieux. Il arracha la bohémienne des bras de Quasimodo stupéfait, la mit en travers sur sa selle, et, au moment où le redoutable bossu, revenu de sa surprise*, se précipitait sur lui pour reprendre sa proie, quinze ou seize archers*, qui suivaient de près leur capitaine, parurent. Quasimodo fut enveloppé, saisi, garrotté. Il rugissait, il écumait, il mordait, se débattait tant qu’il pouvait, les gardes finirent néanmoins par le ligoter, mais son compagnon en avait profité pour disparaître. La bohémienne se dressa gracieusement sur la selle de l’officier, elle appuya ses deux mains sur les deux épaules du jeune homme, et le regarda fixement quelques secondes, comme ravie de sa bonne mine et du bon secours qu’il venait de lui porter. Puis, rompant le silence* la première, elle lui dit, en faisant plus douce encore sa douce voix : — Comment vous appelez-vous, Monsieur le gendarme ? — Le capitaine Phoebus de Châteaupers, pour vous servir, ma belle ! répondit l’officier en se redressant. — Merci. Et, pendant que le capitaine Phoebus retroussait sa moustache à la bourguignonne*, elle se laissa glisser à bas du cheval, comme une flèche qui tombe à terre, et s’enfuit.

revenu de sa surprise qui s’était resaisi archers soldats munis d’arcs et de flèches

rompant le silence parlant Ă  la bourguignonne comme on la porte en Bourgogne

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ACTIVITÉS DE POST-LECTURE

Compréhension 1 Claude Frollo l'archidiacre.

Place correctement à l’intérieur du texte les parties de phrases suivantes en rétablissant le cas échéant les majuscules.

1

1482 à dix-huit ans à seize ans à trente-six ans à vingt ans cent soixante-quatorze c’était d’ailleurs un enfant triste il étudia la science des herbes les yeux et à parler bas. par ses parents

Claude Frollo n’était pas un personnage vulgaire. Il avait été destiné dès l’enfance 1 à l’état ecclésiastique. On lui avait appris à lire dans du latin. Il avait été élevé à baisser 2 . Tout enfant, son père l’avait cloîtré au collège de l’université. C’est là qu’il avait grandi. 3 , grave, sérieux, qui étudiait ardemment et apprenait vite. Aussi, 4 , le jeune clerc aurait pu tenir tête en théologie à un père de l’église. La théologie dépassée, il s’était précipité sur le droit. Puis il se jeta sur la médecine, 5 , la science des onguents. Il étudia encore les langues, le latin, le grec, l’hébreu. 6 , il semblait au jeune homme que la vie avait un but unique: savoir. Son mérite, sa science, lui ouvraient toutes grandes les portes de l’église. 7 , il était ordonné prêtre, et nommé chapelain de Notre-Dame. Là, plus que jamais plongé dans ses chers livres, ce mélange de savoir et d’austérité, si rare à son âge, lui avait valu le respect et l’admiration du cloître. Du cloître, sa réputation de savant avait été au peuple, où elle avait un peu tourné, chose fréquente alors, au renom de sorcier.

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Toujours est-il qu’en 8 , Claude Frollo était devenu, 9 , monsieur l’archidiacre de Josas, le second assistant de l’évêque, responsable de 10 curés des paroisses autour de Paris. C’était un personnage imposant et sombre devant lequel tremblaient les enfants de chœur, quand il passait lentement sous les hautes ogives du chœur, majestueux, pensif, les bras croisés et la tête tellement ployée sur la poitrine qu’on ne voyait de sa face que son grand front chauve.

2 Énigme. En 1482 Frollo et son fils adoptif totalisaient 56 ans. Frollo avait 16 ans de plus que Quasimodo. Quel âge avaient-ils l’un et l’autre ? _______________________________________________________

Grammaire du texte 3 Quasimodo, enfant trouvé.

Complète avec l’adjectif possessif ou démonstratif adéquat. C’est au moment où il revenait, le jour de la Quasimodo, de dire sa messe, que l’attention de Claude Frollo avait été éveillée par ___ un groupe de commères en cercle autour du lit des enfantstrouvés. Que regardaient (1) ___ vieilles femmes ? Il s’était approché et avait vu un nouveau-né qui pleurait si fort que (2) ___ détresse remua en lui une grande pitié, et il avait emporté l’enfant. Quand il le tira du sac, il le trouva bien difforme. Le pauvre petit diable avait une verrue sur l’œil gauche, la tête dans les épaules, la colonne vertébrale arquée, le sternum proéminent, les jambes torses. La compassion de Claude s’accrut de (3) ___ laideur; et il fit vœu dans (4) ___cœur d’élever (5) ___enfant. Il baptisa (6) ___ fils adoptif, et le nomma Quasimodo, autant pour marquer ainsi le jour où il l’avait trouvé, autant pour caractériser par (7) ___ nom à quel point la pauvre petite créature était incomplète et à peine ébauchée. En effet, Quasimodo, avec (8) ___ œil de cyclope, (9) ___bosse et (10) ___ jambes tordues n’était guère qu’un à peu près.

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4 Quasimodo carillonneur de Notre-Dame. Complète le texte

en choisissant chaque fois parmi les indicateurs temporels ci-dessous celui qui convient. à jamais • à toute heure • au fur et à mesure • avec le temps • dans • depuis • dès • en • il y a • jusqu'à ce que • lorsque • pendant • peu à peu • pour • quand • tandis que • tant que • toujours (1)________ 1482, Quasimodo avait grandi. Il était devenu, (2) ________ plusieurs années, sonneur de cloches de Notre-Dame. (3)________, une étrange intimité avait fini par unir le sonneur à l’église. Séparé du monde (4) ________ sa naissance par la double fatalité de sa naissance inconnue et de sa nature difforme, emprisonné dès l’enfance dans ce double cercle infranchissable, le pauvre malheureux s’était accoutumé à ne rien voir d’autre que les murs qui l’avaient recueilli et protégé. Notre-Dame avait été successivement pour lui, (5) ________ qu’il grandissait et se développait, l’œuf, le nid, la maison, la patrie, l’univers. Et il y avait incontestablement une sorte d’harmonie mystérieuse entre cette créature et cet édifice. (6) ________, tout petit encore, il se traînait tortueusement sous les ténèbres de ses voûtes, il semblait, avec sa face humaine et son corps monstrueux, le reptile naturel de ces dalles humides et sombres sur laquelle l’ombre des chapiteaux projetait tant de formes bizarres. (7)________, la première fois qu’il s’accrocha machinalement à la corde des tours, et qu’il s’y pendit, et qu’il mit la cloche en branle, cela fit à Claude, son père adoptif, l’effet d’un enfant dont la langue se délie et qui commence à parler. Quasimodo était né borgne, bossu, boiteux. C’est à grande peine et à grande patience que Claude Frollo était parvenu à lui apprendre à parler. Mais une fatalité était attachée au pauvre enfant trouvé. Sonneur de Notre-Dame (8)________ l’âge de quatorze ans, une nouvelle infirmité était venue s’ajouter aux autres ; les cloches lui avaient brisé le tympan ; il était devenu sourd. La seule porte que la nature lui avait laissée toute grande ouverte sur le monde s’était brusquement fermée (9) ________. C’est ainsi que (10) ________, se développant (11) ________ à l’ombre de la cathédrale, y vivant, y dormant, n’en sortant presque jamais, en subissant (12) ________ la pression mystérieuse, il arriva à lui ressembler, à s’y incruster, pour ainsi dire, à en faire partie intégrante.

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ACTIVITÉ DE PRÉ-LECTURE

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La Cour des Miracles. Complète les mots avec les plaquettes de lettres ci-dessous. V

A

U B

I

L

R

L

P

M E

U

R

I

R

O

O

N

E

N

N

B

O

N

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S

S

R

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N D

I

C

E

Le pauvre poète jeta les yeux autour de lui. Il était en effet dans cette redoutable Cour des Miracles, où jamais h o n n ête homme n’avait pénétré à pareille heure; cercle magique où les officiers du Châtelet et les sergents de la prévôté qui s’y aventuraient disparaissaient en miettes; cité des vol s et des ass ins, égout d’où s’échappait chaque matin, et où revenait croupir chaque nuit ce ruisseau de v s, de m icité et de vaga dage toujours débordé dans les rues des capitales ; ruche monstrueuse où rentraient le soir avec leur butin tous les frelons de l’ordre social ; hôpital teur où le bohémien, le moine défroqué, l’écolier perdu, les riens de toutes les nations, espagnols, italiens, allemands, de toutes les religions, juifs, chrétiens, mahométans, idolâtres, couverts de plaies fardées, mendiants le jour, se transfiguraient la nuit en gands ; immense vestiaire, en un mot, où s’habillaient et se déshabillaient à cette époque tous les acteurs de cette comédie éternelle que le p age, la stitution et le meu e jouent sur le pavé de Paris.

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GROS PLAN

VICTOR HUGO L'écrivain universel Poète, romancier, auteur dramatique, académicien, homme politique et grand voyageur, Victor Hugo est en effet le plus grand écrivain français, en même temps qu’il est le créateur de personnages universels qui sont devenus les mythes du monde moderne : Fantine, Jean Valjean, Gavroche, Cosette, ou Quasimodo, tous porteurs d’une condition sociale qui les opprime, les martyrise ou les exclut.

« J’aime l’araignée et j’aime l’ortie, Parce qu’on les hait. »

Une vocation précoce

Notre-Dame de Paris (1831)

Troisième enfant de Léopold Hugo, général d’Empire, et de Sophie Trébuchet issue de la bourgeoisie nantaise, Victor Hugo est né à Besançon le 26 février 1802. Après une enfance relativement heureuse passée entre Paris, l’Italie et l’Espagne où son père est l’aide de camp de Joseph Bonaparte, frère de l’empereur et roi d’Espagne, Victor Hugo souffre très tôt de la mésentente entre ses parents puis de leur séparation en 1815. Envoyé avec ses frères au collège Louis-le-Grand à Paris, il fait preuve d’un talent précoce pour la littérature et prend conscience de sa vocation poétique. C’est à cette même époque que l’auteur des Misérables annonce dans son journal sa volonté d’être le plus grand : « Je veux être Chateaubriand ou rien » y écrit-il.

Lorsqu’il se lance dans la rédaction de NotreDame de Paris, Victor Hugo est déjà un écrivain célèbre. Poète et auteur dramatique reconnu, voire admiré pour avoir fait triompher le romantisme contre les vieux classiques et leurs règles désuètes, il lui reste à écrire un roman. La mode, depuis Ivanohé de Walter Scott (1819) étant au roman historique, Victor Hugo se tourne presque spontanément vers le monument phare de Paris, sa cathédrale, mémoire de pierre et symbole de l’histoire de France.

Les parents de Victor Hugo: son père, le général Léopold Hugo, et sa mère Sophie Trébuchet.

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Le roman historique L’intérêt du XIXe siècle pour le roman historique n’est pas nouveau dans la littérature française et Victor Hugo, pas plus que Walter Scott au Royaume-Uni, ne sont les inventeurs du genre. Au XVIIe siècle, La princesse de Clèves de Madame de La Fayette dont l’action se situe sous Henri II peut déjà être considéré comme tel. Plus avant, c’est Chrétien de Troyes, l’inventeur du roman médiéval et des chevaliers de la table ronde, Érec, Lancelot, Yvain, Perceval, qui fait vivre à ses héros des aventures extraordinaires censées se passer sous le règne du légendaire roi Arthur à la fin du Ve siècle. Et si l’on remonte aux origines mêmes de la littérature française, on trouve le premier Lancelot sur le pont de L'épée. vrai roman

Qui a Ă©crit ...

La mort de Roland Ă  Roncevaux.

français, La Chanson de Roland, écrite au XIIe siècle, mais relatant des faits survenus à la fin du VIIIe siècle. Cette épopée guerrière fut traduite et circula dans ses différentes versions dans toute l’Europe chrétienne avec la bénédiction de l’Église. Celle-ci se servit d'aillleurs des exploits militaires de Charlemagne pour prêcher la reconquête des pays européens en partie occupés par l’Islam, l’Espagne notamment, mais aussi pour inciter rois et seigneurs à venir en aide aux chrétiens d’Orient et à délivrer le tombeau du Christ à Jérusalem. a. La Reine Margot b. Le Colonel Chabert c. Salammbô d. Les Trois mousquetaires e. Les Chouans f. Cinq-Mars g. Le Bossu h. La Chronique du règne de Charles IX

De nombreux romans français du XIXe appartiennent au genre historique. Qui a écrit quoi ? Associe chaque titre à son auteur.

1. Alfred de Vigny 2. Honoré de Balzac 3. Paul Féval 4. Gustave Flaubert 5. Prosper Mérimée 6. Alexandre Dumas

Solution

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Alfred de Vigny, Cinq-Mars, 1826 Honoré de Balzac, Les Chouans, 1829 ; Le Colonel Chabert, 1844 Paul Féval, Le Bossu 1857 Gustave Flaubert, Salammbô, 1862 Prosper Mérimée, La Chronique du règne de Charles IX, 1829 Alexandre Dumas, Les Trois mousquetaires, 1844 ; La Reine Margot, 1845


GROS PLAN

Biographie express 1802 – Naissance de Victor Hugo à Besançon le 26 février. 1815 – Les parents de Victor Hugo se séparent, il est mis en pension avec ses frères au collège Louis-le-Grand à Paris. 1816 – « Je veux être Chateaubriand ou rien ». 1822 – Victor Hugo épouse Adèle Foucher, une amie d’enfance. Cinq enfants naissent de cette union: Léopold (1823) mort prématurément, Léopoldine (1824), Charles (1826), François (1828), Adèle (1830).

1831 – Notre-Dame de Paris et Les Feuilles d’Automne. 1833 – Début de la liaison du poète avec l’actrice Juliette Drouet. Juliette Drouet

Adèle Foucher

1827 – Cromwell, drame romantique dont la préface constitue le manifeste du romantisme. 1829 – Les Orientales , premier recueil de poésies et Le Dernier jour d’un condamné, roman-réquisitoire contre la peine de mort. 1830 – Hernani, drame qui consacre Victor Hugo chef de file incontesté du mouvement romantique. 120

1838 – Ruy Blas, drame romantique. 1841 – Victor Hugo est reçu à l’Académie française. 1843 – Sa fille Léopoldine se noie dans la Seine avec son mari pendant leur voyage de noces. Profondément affecté par la mort de sa fille, Victor Hugo s’enferme chez lui et cesse d’écrire pendant trois ans. Léopoldine


1848 – Après la proclamation de la République, Victor Hugo est élu député le 4 juin. 1849 – Le 9 juillet juillet, Victor Hugo prononce à l’Assemblée un discours sur la misère qui commence par ces mots désormais célèbres : « Je ne suis pas, messieurs, de ceux qui croient qu’on peut supprimer la souffrance en ce monde ; la souffrance est une loi divine ; mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu’on peut détruire la misère ». 1851 – Fermement opposé au coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte, le 2 décembre, Victor Hugo s’enfuit à Bruxelles avant de s’installer sur l’île anglo-normande de Jersey d’abord puis de Guernesey ensuite d’où il peut voir la France, et qu’il ne quittera qu’à la chute de Napoléon III, en 1870. 1853 – Publication du recueil de poésie Les Châtiments. Outre la séparation de ses parents qui l’affectera durablement, la vie de Victor Hugo est une longue suite de drames familiaux. Son frère aîné Eugène, amoureux d’Adèle, devient fou le soir même des noces du poète avec celle-ci et doit être interné. Sa fille Léopoldine se noie dans la Seine en 1843 avec son mari quelques mois à peine après leur mariage. Sa seconde fille, Adèle, perd définitivement la raison en 1872 suite à une déception amoureuse.

1856 – Publication du recueil de poésie Les Contemplations. 1862 – Publication du roman Les Misérables. 1866 – Les Travailleurs de la mer. 1869 – Publication du roman L’Homme qui rit. 1871 – Acclamé à son retour en France, Victor Hugo est élu député aux élections législatives. Son fils Charles meurt subitement d’apoplexie. 1872 – Sa fille Adèle est internée suite à une déception amoureuse. 1873 – Son second fils François meurt de tuberculose. 1874 – Publication du dernier roman de Victor Hugo, Quatrevingt-treize. 1876 – Hugo est élu sénateur de Paris 1883 – Publication du dernier tome de la La Légende des Siècles (1859-1883). 1885 – Le vendredi 22 mai mort de Victor Hugo. 2 millions de personnes rendent hommage à son cercueil exposé sous l’Arc de Triomphe à Paris.

Isabelle Adjani dans le film “L'histoire d'Adèle H.” de Francois Truffaut (1975).

Le poète verra également mourir prématurément ses deux fils, Charles en 1871, puis François-Victor en 1873. Lorsqu’il meurt, en 1885, Adèle est la seule de ses enfants encore en vie ; elle s’éteindra dans un asile de la région parisienne en 1915 à l’âge de 85 ans. 121


GROS PLAN

La cathédrale Notre-Dame de Strasbourg (XIIe siècle).

Le printemps des cathédrales L’argent des marchands du Moyen Âge et le génie des bâtisseurs ont édifié des hymnes de pierre à la gloire du Créateur.

Comprendre les cathédrales

La cathédrale Notre-Dame de Rouen (XIIe siècle).

Symboles d'un art total au service de la foi En trois siècles, de 1050 à 1350, 80 cathédrales ont été construites en France. Pour leur réalisation, les bâtisseurs du Moyen Âge ont extrait, taillé, empilé plus de pierres que l’ancienne Égypte au cours de son histoire. Symboles d’un art total, les cathédrales témoigent d’abord d’une foi à toute épreuve, car si le Moyen Âge n’avait pas été un âge pieux, le génie des bâtisseurs et l’argent des marchands auraient été employés autrement. C’est donc dans la foi médiévale qu’il faut chercher le véritable point de départ de cette croisade des cathédrales. 122

“Ceci tuera cela” di l’archidiacre Frollo en opposant le livre imprimé au livre de pierre. Les cathédrales gothiques sont des livres sculptés, des gigantesques bibles dont la signification échappe aujourd’hui au plus grand nombre. Et pourtant … Chaque cathédrale est la représentation terrestre de la Jérusalem céleste. Dans une cathédrale, tout invite à la transcendance et à la lecture, les pierres, les vitraux, les piliers ornés de statues : une cathédrale est un acte foi monumental, c’est, gravée dans la pierre, la pensée de saint Augustin pour qui Dieu est la lumière qui éclaire l’âme et lui fait voir clairement les choses.

L'adoration des Mages. Vitrail de la cathédrale Notre-Dame de Paris.


Face à face L'art roman et l'art gothique Alors que les églises romanes du haut Moyen Age (Xe-XIIe siècle) sont généralement petites, basses et sombres, les cathédrales gothiques (XIIe-XVe siècle) sont vastes, hautes et lumineuses. L’art roman est un art du silence, l’art gothique au contraire parle aux fidèles à travers ses statues et ses vitraux chargés d’enseigner les fondements de la religion à des fidèles généralement analphabètes.

Le portail colorisé de la cathédrale d'Amiens.

Amiens La cathédrale prend des couleurs

À l’origine, les façades des cathédrales, les statues, les décorations étaient peintes de couleurs vives. C’est en 1992, lors de la restauration de la cathédrale d’Amiens, que les chercheurs ont fait cette découverte exceptionnelle. Des vestiges de l’ancienne polychromie étaient en effet visibles sur les

Le sacre de Napoléon par Jacques-Louis David (1807)

Sous le signe de la Vierge Marie De toutes les cathédrales élevées en France, Notre-Dame de Paris est sans conteste la plus célèbre. Construite entre le milieu du XIIe et la fin du XIVe siècle, ce chef-d’œuvre mondialement connu de l’art gothique est un symbole à la fois religieux et historique. Tous les grands moments de l’histoire de France ont eu pour cadre sa nef centrale: de la conversion d’Henri IV au sacre de Napoléon, de la libération de Paris aux obsèques du général de Gaulle, le héros de la Résistance. De son emplacement stratégique, au cœur même de Paris, elle continue de veiller sur le territoire national: sur le parvis de Notre-Dame, une étoile de bronze marque le point zéro à partir duquel sont calculées les distances routières de Paris à toutes les villes de France. pierres après leur nettoyage au laser. Au prix d’un long et patient travail de recherche, ils ont pu restituer à la cathédrale son chromatisme d’origine. Chaque été et pendant les fêtes de fin d’année, le grand portail de la cathédrale retrouve, à la nuit tombante, ses couleurs d’origine grâce à des projections lumineuses. 123


Activité 1 – Douze étoiles sur fond bleu Pourquoi le drapeau européen est-il bleu? C’est la couleur des mers qui délimitent l’Europe. C’est la couleur du manteau de la Vierge dans un vitrail de la cathédrale de Strasbourg. C’est la couleur préférée des Français. C’est l’une des couleurs de la plupart des drapeaux des pays d’Europe. Il a toujours douze étoiles, indépendamment du nombre des États membres de l'Union, car c'est le nombre des pays fondateurs de la Communauté Européenne.

VRAI

FAUX

Activité 2 – Des noms et des chiffres Entre cathédrales romanes et gothiques, un grand nombre d’édifices religieux ont été construits dans toute la France. Pour en savoir plus, deux questions. Combien de cathédrales y a-t-il en France? Moins de cent Plus de cent Plusieurs centaines

Des noms et des chiffres Sur 187 cathédrales élevées en France, une majorité (74) est dédiée à Notre-Dame. L'unique cathédrale construite au XXe siècle, à Evry (région parisienne), est placée sous l'invocation de la Résurrection.

Solution

Quel nom portent-elles le plus souvent? Saint-Etienne Notre-Dame Saint-Pierre

Douze étoiles sur fond bleu C’est la couleur du manteau de la «Vierge de l’Apocalypse» qui figure dans un vitrail de la cathédrale de Strasbourg et dont la tête est entourée d’une couronne de douze étoiles sur fond bleu (FAUX : les pays fondateurs de l’Union Européenne étaient au nombre de six).

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GROS PLAN

Le parvis des Mystères Le théâtre tel que nous le connaissons encore aujourd’hui est né en Grèce au Ve siècle avant Jésus-Christ. Comédies ou tragédies, les deux genres qui existent alors ont un rôle éducatif et moral. Au Moyen Age, l’Église qui contrôle toute la vie sociale: les mœurs, le travail et le temps libre, la pensée et la parole, proscrit le théâtre païen ainsi que toutes les formes de représentations dramatiques profanes ; les acteurs, jongleurs, histrions (comme on les appelle aussi) sont taxés d’infamie et généralement excommuniés. À partir du XIIe siècle se produit un changement important qui va permettre la re-naissance de l’art dramatique. Dans un souci d’évangélisation du peuple, le clergé autorise la représentation de spectacles religieux sur le parvis des églises et des cathédrales au moment des grandes fêtes du calendrier liturgique. Ces représentations pouvaient durer plusieurs jours et nécessiter

Une représentation théâtrale au Moyen Âge

un grand nombre d’acteurs et de figurants. On distingue d’une part Les Mystères dont le sujet est tiré de l’Ancien ou du Nouveau Testament (essentiellement La Nativité et la Passion du Christ), et les Miracles qui, eux, racontent des événements édifiants de la vie d’une saint ou d’une sainte. Un siècle plus tard, avec le développement du commerce, l’Église tolère, les jours de foire, la représentation de petites pièces comiques, appelées farces ou moralités, qui tout en conservant leur rôle éducatif et moral mettaient en scène des personnages de la vie courante dans des situations tirées de la vie courante. Des comédiens semi-professionnels installent leurs tréteaux sur les champs de foire et jouent leur pièce. Les thèmes sont tirés du quotidien des spectateurs; ici une dispute entre un mari et sa femme (Le Cuvier) , là un avocat qui invente un stratagème pour ne pas payer ses dettes (La Farce de maître Pathelin), ou encore les mauvais tours joués par le jeune serviteur d’un aveugle avare à son maître (Le Garçon et l’Aveugle).

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BILAN

Trois questions pour conclure. 1 Qui sont les trois personnages principaux du premier chapitre ; quel rôle joueront-ils par la suite ? ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ 2 Phœbus, Quasimodo, Frollo : trois hommes éblouis par la beauté d’Esmeralda ; elle n’en aimera qu’un seul, lequel ? Cet homme méritait-il son amour ? Pourquoi ? ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ 3

Esmeralda, Fleur-de-Lys, Frollo, Quasimodo, Phœbus, Clopin ou Gringoire : Qui a gravé le mot « ANANKÊ » sur un mur de l’une des tours de Notre-Dame ? Pourquoi cette fatalité concerne-t-elle finalement tous les principaux personnages du roman ? ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________ ________________________________________________________

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CONTENUS Contenu lexical - Le portrait physique et moral. - Paris au Moyen Âge - l'architecture gothique - L'amour - La fatalité Contenu grammatical - Les déterminants du nom. - Le féminin et le pluriel des noms et des adjectifs. - Les adjectifs et les pronoms indéfinis. - Les pronoms personnels sujets et compléments. - Le comparatif et le superlatif. - Les pronoms relatifs, simples et composés. - Les conjonctions. - Les adverbes et les prépositions. - Le système verbal. - L’emploi des temps et des modes. - La concordance des temps. - L’accord du participe passé. - La voix passive. - La phrase simple et complexe. Compétences communicatives - Repérer les informations essentielles d’un texte narratif et/ou argumentatif. - Repérer les indices lexicaux, d’énonciation et d’organisation d’un énoncé. - Résumer un texte narratif et/ou argumentatif en respectant le schéma du texte source. - Planifier puis rédiger un texte narratif, descriptif ou argumentatif à partir d’un sujet donné.

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LECTURES

SENIORS

NIVEAU 1 Molière, Le malade imaginaire Jules Verne, Le tour du monde en 80 jours NIVEAU 2 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac Voltaire, Candide Guy de Maupassant, Bel-Ami Abbé Prévost, Manon Lescaut NIVEAU 3 Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo Alain Fournier, Le Grand Meaulnes Jules Verne, Vingt Mille Lieues sous les mers Stendhal, Le Rouge et le Noir Émile Zola, Germinal Prosper Mérimée, Carmen NIVEAU 4

Gustave Flaubert, Madame Bovary Victor Hugo, Les Misérables Honoré de Balzac, Le Père Goriot Gustave Flaubert, L’Éducation sentimentale Victor Hugo, Notre-Dame de Paris


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