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The Remnant Chronicles T3 : The Beauty of Darkness Mary E. Pearson

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Abusive Constitutional Borrowing: Legal globalization and the subversion of liberal democracy 1st Edition Rosalind Dixon

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Déjà parus :

DanceofThieves

2020

VowofThieves

2020

TheRemnantChronicles,

Livre I : TheKissofDeception 2021

Livre II : TheHeartofBetrayal 2022

Couverture : Clémence Courot

Édition originale publiée par Henry Holt and Company, une marque de Macmillan Publishing Group, LLC.

© Mary E. Pearson, 2016

Pour la traduction française :

© 2023, La Martinière Jeunesse, une marque des Éditions de La Martinière, 57, rue Gaston Tessier, 75019 Paris

ISBN : 978-2-7324-9913-0

www.editionsdelamartiniere.fr

Ce document numérique a étéréalisépar NordCompo.

Pour Rosemary Stimola qui fait des rêves une réalité.

Titre

Déjà parus

Copyright

Dédicace

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

TABLE DES MATIÈRES

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Chapitre 39

Chapitre 40

Chapitre 41

Chapitre 42

Chapitre 43

Chapitre 44

Chapitre 45

Chapitre 46

Chapitre 47

Chapitre 48

Chapitre 49

Chapitre 50

Chapitre 51

Chapitre 52

Chapitre 53

Chapitre 54

Chapitre 55

Chapitre 56

Chapitre 57

Chapitre 58

Chapitre 59

Chapitre 60

Chapitre 61

Chapitre 62

Chapitre 63

Chapitre 64

Chapitre 65

Chapitre 66

Chapitre 67

Chapitre 68

Chapitre 69

Chapitre 70

Chapitre 71

Chapitre 72

Chapitre 73

Chapitre 74

Chapitre 75

Chapitre 76

Chapitre 77

Chapitre 78

Chapitre 79

Chapitre 80

Chapitre 81

Chapitre 82

Chapitre 83

Chapitre 84

Chapitre 85

Chapitre 86

Chapitre 87

Chapitre 88

Chapitre 89

Chapitre 90

Remerciements

LA FIN DU VOYAGE. LA PROMESSE. L’ESPOIR.

Un endroit où s’établir.

Mais il n’est toujours pas en vue, et la nuit est froide.

Sorsdesténèbres,petite.

Sors,quejetevoie.

J’aiquelquechosepourtoi.

Je la retiens en secouant la tête.

Son cœur palpite sous ma main.

Il promet du repos. De la nourriture.

Or elle est fatiguée et affamée.

Viens.

Mais elle n’est pas dupe et reste à mes côtés.

Les ténèbres sont tout ce qui nous protège.

LesDerniersTestamentsdeGaudrel

CHAPITRE 1

RIEN N’ÉTAIT PLUS BEAU que les ténèbres. La caresse de l’obscurité, aussi douce que le clair de lune, avait toujours été mon refuge quand je sortais en douce sur le toit éclairé d’étoiles ou quand je me faufilais dans une ruelle sombre avec mes frères. L’obscurité était mon alliée. Grâce à elle, j’oubliais ma réalité et je rêvais d’un monde meilleur.

Je m’y enfonçai encore plus confortablement. Des murmures de voix parvinrent à mes oreilles. Seul un éclat de lune doré perçait à travers les ténèbres, flottant, mouvant, sans cesse hors de ma portée. Sa lumière dansante illumina une prairie. Je sentis mon cœur se réchauffer en voyant Walther danser avec Greta. Juste derrière eux, Aster tournoyait sur une musique que je ne parvenais pas tout à fait à entendre, ses longs cheveux cascadant sur ses épaules. Était-ce déjà le festival de la Délivrance ? Aster me lança : Hâtezvous, miss. Des couleurs intenses virevoltaient dans l’air ; une pluie d’étoiles vira au violet ; la lune commença à se dissoudre comme du sucre mouillé dans le ciel noir d’encre ; les ténèbres s’épaissirent. Chaudes. Douces. Accueillantes.

À l’exception des secousses.

Rythmées, elles continuaient encore et encore. Pressantes. Resteavecmoi.

La voix refusait de se taire. Froide, tranchante, sonore.

Tiensbon.

Un torse solide, un souffle glacial quand mes paupières s’ouvrirent, une voix qui ne cessait de déchirer ma couverture, puis une douleur, si abrutissante que j’en perdis le souffle. Un éclat terrible, aveuglant, qui finit par s’estomper alors qu’il devenait insoutenable.

Et de nouveau, l’obscurité. Qui m’invitait à rester. Plus de souffle. Plus rien.

À mi-chemin entre un monde et l’autre, j’eus un bref instant de lucidité.

C’était donc ça, mourir.

LIA!

On m’arracha encore une fois à l’étreinte réconfortante des ténèbres. La douce chaleur se transforma en brasier. De nouvelles voix surgirent. Trop de voix. Plus graves. Sèches. Des cris.

Le Sanctuaire. J’étais de retour au Sanctuaire. Les soldats, les gouverneurs… le Komizar.

Ma peau était en feu, brûlante, humide de fièvre.

Lia,ouvrelesyeux.Maintenant.

Des ordres.

Ils m’avaient retrouvée.

— Lia !

J’ouvris brusquement les paupières. La pièce tournoyait de flammes, d’ombres, de corps et de visages. J’étais encerclée. Je tentai de me dégager, mais une douleur terrible me coupa le souffle. Ma vision vacilla.

Lia, ne bouge pas.

Puis un tumulte de voix. Elle est revenue àelle. Tenez-la. Ne la laissezpasseredresser.

Je me forçai à emplir tant bien que mal mes poumons et à fixer mon regard sur les visages penchés vers moi. Le gouverneur Obraun et son garde. Ce n’était pas un rêve. Ils m’avaient capturée. C’est alors qu’une main me tourna doucement le menton.

Rafe.

Agenouillé à mes côtés.

Je levai les yeux vers les autres, et des souvenirs remontèrent à la surface. Le gouverneur Obraun et son garde s’étaient battus à nos côtés. Ils nous avaient aidés à fuir. Pourquoi ? À côté d’eux se trouvaient Jeb et Tavish.

Gouverneur, murmurai-je, trop faible pour ajouter quoi que ce soit d’autre.

Sven, Votre Altesse, dit-il en posant un genou à terre. Appelez-moi Sven.

Le prénom m’était familier, je l’avais entendu dans la bouche de Rafe en pleine tourmente. Je regardai autour de moi pour trouver mes repères. J’étais allongée par terre, sur un sac de couchage, couverte d’une pile de lourdes couvertures qui sentaient le cheval.

Des tapis de selle.

Je tentai de me redresser sur un bras, et la douleur me transperça de nouveau. Je retombai, la pièce tournoyant autour de moi.

Ilfautqu’onretirelespointes.

Elleesttropfaible.

Elleestbrûlantedefièvre.Ellevacontinueràs’affaiblir .

Lesplaiesdoiventêtrenettoyéesetrecousues.

Jen’aijamaisrecousuunefille.

Uneblessureestuneblessure.

En les écoutant débattre, je retrouvai peu à peu la mémoire.

Malich m’avait tirée dessus. Une flèche dans la cuisse et une autre dans le dos. Je me revis sur la rive avec Rafe qui me serrait dans ses bras, ses lèvres froides contre les miennes. Combien de temps s’était-il écoulé depuis ? Où étions-nous à présent ?

Elleestforte,elletiendralecoup.Fais-le,Tavish.

Rafe me prit le visage entre ses mains et se pencha tout contre moi.

Lia, les pointes se sont enfoncées profondément dans ta chair. Il faut qu’on rouvre les plaies pour les extraire.

Je hochai la tête.

Ses yeux brillaient.

Tu ne dois pas bouger. Je vais devoir te tenir.

— Ça va aller, chuchotai-je. Je suis forte. Tu l’as dit.

Mon filet de voix contredisait mes propres mots. Sven grimaça.

— J’aurais aimé avoir de la liqueur à lui donner, dit-il en tendant quelque chose à Rafe. Mets-lui ça dans la bouche pour qu’elle puisse mordre.

Pour étouffer mes cris. L’ennemi était-il proche ?

Rafe plaça un fourreau en cuir entre mes dents. Un souffle d’air frais caressa ma jambe nue quand Tavish replia la couverture pour dévoiler ma cuisse, et je pris conscience que j’étais vêtue d’une simple camisole. Ils avaient dû retirer ma robe trempée.

Tavish marmonna des excuses, mais ne tergiversa pas davantage. Rafe me plaqua les bras contre le sol et quelqu’un d’autre me maintint les jambes. Le couteau s’enfonça dans ma cuisse. Ma poitrine frémit, des gémissements s’échappèrent de mes lèvres. Instinctivement, mon corps se rebella et Rafe m’agrippa de plus belle.

— Regarde-moi, Lia. Ne détourne pas les yeux. C’est presque fini.

Je plongeai mon regard dans le sien, d’un bleu étincelant, aussi brûlant que des flammes. De la sueur dégoulinait sur son front. Le couteau continua son travail, et je fus bientôt incapable de me concentrer. Des bruits gutturaux résonnaient au fond de ma gorge.

Regarde-moi,Lia.

Il fouillait, il tranchait.

Je l’ai ! s’écria enfin Tavish.

Je déglutis à toute peine. Jeb m’essuya le visage avec un linge frais.

Bravo,princesse, dit une voix.

Par comparaison, les points de suture furent une partie de plaisir. Je comptai chaque piqûre de l’aiguille qui plongeait dans ma chair.

Quatorze, en tout.

— Maintenant, le dos, annonça Tavish. Ça va être un peu plus difficile.

Lorsque je repris connaissance, je découvris Rafe endormi à mes côtés, son bras reposant lourdement sur mon ventre. Je ne me souvenais pas de grand-chose, juste de Tavish m’expliquant que la flèche dans mon dos s’était fichée dans une côte, ce qui m’avait probablement sauvé la vie. J’avais senti son couteau s’enfoncer de nouveau dans ma chair, puis une douleur si vive que j’en avais perdu la vue. Enfin, d’une voix qui semblait provenir de très loin, Rafe avait murmuré à mon oreille : C’estfini.

Un petit feu brûlait au milieu d’un cercle de pierres non loin de moi. Il illuminait un mur voisin, mais le reste de notre abri, une sorte de grotte, restait plongé dans l’ombre. J’entendis le hennissement

des chevaux. Ils étaient avec nous à l’intérieur. De l’autre côté du feu, je distinguai Jeb, Tavish et Orrin, endormis dans leurs sacs de couchage, et juste à ma gauche, assis contre le mur, le gouverneur Obraun. Sven.

Pour la première fois, je pris véritablement conscience de leur identité. Il s’agissait des quatre compagnons de Rafe, ceux en qui je n’avais pas cru une seule seconde. Gouverneur, garde, balayeur et constructeur de radeau. Je ne savais pas où nous nous trouvions, mais contre toute attente, nous avions traversé la rivière. Et nous étions tous en vie. Tous, sauf…

Malgré un mal de tête lancinant, je tentai de démêler ce qui s’était passé. Notre liberté avait coûté cher à plusieurs personnes. Qui était mort et qui avait survécu au carnage ?

J’essayai de repousser le bras de Rafe pour m’asseoir, mais ce simple mouvement suffit à envoyer des décharges de douleur dans mon dos. Aussitôt, Sven se redressa et murmura :

N’essayez pas de vous lever, Votre Altesse. Il est encore trop tôt.

Je hochai la tête et me concentrai sur ma respiration jusqu’à ce que la douleur s’estompe.

L’impact de la flèche a probablement cassé l’une de vos côtes. Et il est possible que vous ayez fêlé d’autres os dans la rivière. Reposez-vous.

— Où sommes-nous ? demandai-je.

Une petite cachette que j’ai découverte il y a de nombreuses années. J’ai heureusement réussi à la retrouver. Combien de temps suis-je restée inconsciente ?

— Deux jours. C’est un miracle que vous soyez encore en vie.

Je me revis sombrer dans la rivière. Me débattre, refaire surface, prendre une rapide bouffée d’air avant de couler encore. Et encore.

M’agripper à des rochers, à des rondins qui me glissaient des mains. Puis le souvenir trouble de Rafe penché sur moi. Je tournai la tête vers Sven.

— Rafe m’a trouvée sur la rive.

— Il vous a portée pendant vingt kilomètres avant qu’on le retrouve. C’est la première fois qu’il dort depuis.

Je regardai le visage émacié et meurtri de Rafe, orné d’une entaille au-dessus du sourcil gauche. La rivière l’avait malmené, lui aussi. Sven m’expliqua que Jeb, Orrin et lui avaient manœuvré le radeau jusqu’à la destination prévue. Ils y avaient laissé dans un enclos de fortune leurs montures et une demi-douzaine de chevaux vendains attrapés au cours d’une bataille, mais nombre d’entre eux s’étaient échappés. Ils avaient rassemblé ceux qui restaient, ainsi que les provisions et les selles qu’ils avaient cachées dans des ruines voisines, puis avaient rebroussé chemin pour partir à notre recherche, fouillant les berges et la forêt jusqu’à trouver enfin une piste qu’ils avaient remontée jusqu’à nous. Après nous avoir retrouvés, ils avaient chevauché toute la nuit pour rejoindre cet abri. Si vous avez réussi à suivre nos traces, alors…

— Ne vous inquiétez pas, Votre Altesse. Écoutez.

Il tendit l’oreille.

Un sifflement strident vibrait à travers la grotte.

Le blizzard, dit-il. Il ne restera aucune trace de notre passage.

Je ne savais pas si c’était une bonne nouvelle ou non, car le mauvais temps nous empêcherait nous aussi d’avancer. Je me souvenais de ma tante Bernette qui nous parlait, à mes frères et à moi, des grandes tempêtes de son pays natal qui bouchaient le ciel et déposaient au sol une telle couche de neige qu’elle et ses sœurs ne pouvaient sortir qu’en passant par les fenêtres de l’étage de leur

forteresse. Elles se déplaçaient ensuite sur un traîneau tiré par des chiens aux pieds palmés.

— Les Vendains vont quand même essayer de nous suivre, dis-je. Après.

Sven hocha la tête.

J’avais tué le Komizar. Griz avait levé mon bras pour saluer les clans de Venda, et m’avait proclamée reine. Les clans m’avaient acclamée. Ma dépouille serait nécessaire pour qu’un successeur puisse accéder au trône. Successeur qui serait probablement Malich. Je tentai de ne pas penser à ce qui avait dû arriver à Kaden, mais son expression trahie flottait encore devant mes yeux. Avait-il été pourfendu par Malich ? Ou par un autre de ses compatriotes ? Il s’était battu contre eux pour moi. En fin de compte, il m’avait choisie plutôt que le Komizar. Était-ce la vue du corps sans vie d’une enfant dans la neige qui l’avait poussé à bout, comme pour moi ?

J’avais tué le Komizar. Ça avait été si facile. Je n’avais éprouvé aucune hésitation, aucun remords. Que penserait ma mère si elle l’apprenait ? Me traiterait-elle d’animal ? Je n’avais rien senti en plongeant ma lame dans son corps. Ni la première fois, ni la seconde. Rien d’autre que la légère résistance de la chair et des entrailles. Rien non plus quand j’avais tué trois autres Vendains après lui. Ou bien cinq ? Leurs visages choqués se confondaient dans ma mémoire.

Mais rien de tout cela n’avait suffi à sauver Aster.

C’était à présent le visage de la fillette qui flottait dans mon esprit, une image insoutenable.

Sven décréta qu’il me fallait reprendre des forces et porta une tasse de bouillon à mes lèvres, mais je sentais déjà les ténèbres se refermer sur moi, et je m’y abandonnai avec gratitude.

CHAPITRE 2

À MON RÉVEIL, le silence m’accueillit. Le rugissement de la tempête s’était tu.

Des mèches de cheveux collaient sur mon front moite de sueur. J’espérais que c’était un signe que ma fièvre baissait. Puis j’entendis des murmures furieux. J’entrouvris prudemment les paupières. La grotte était baignée d’une douce lumière, et je vis les quatre hommes agglutinés dans un coin. Que mijotaient-ils à présent ?

Tavish secouait la tête.

— Maintenant que la tempête est finie, ils vont se mettre en route. Il faut qu’on parte.

— Elle est trop faible pour monter à cheval, répondit Rafe à voix basse. De toute façon, le pont est endommagé, ils ne pourront pas l’emprunter. On a le temps.

C’est vrai, dit Sven, mais ils traverseront en aval de la rivière.

— Ce qui est à une bonne semaine à cheval du Sanctuaire, rétorqua Jeb.

Rafe prit une gorgée de sa tasse fumante. Et avec la neige, il leur faudra deux fois plus de temps.

— Mais elle va nous ralentir nous aussi, fit remarquer Tavish. Ils nous croient probablement morts, ajouta Orrin. À leur place, c’est ce que je penserais. Personne n’aurait dû survivre à cette traversée.

Rafe se frotta la nuque et secoua la tête.

La preuve que si. Et s’ils ne trouvent aucun corps échoué sur la berge, ils sauront que nous sommes encore en vie.

— Mais même une fois de ce côté, ils n’auront aucun moyen de savoir où nous sommes, déclara Jeb. On aurait pu accoster n’importe où. Ils vont devoir chercher sur des centaines de kilomètres, sans aucune piste.

— Sans aucune piste pour le moment, prévint Tavish.

Sven se détourna et s’approcha du feu. Je fermai les yeux, l’entendis prendre la bouilloire et verser quelque chose dans sa tasse, puis je le sentis se pencher sur moi. Savait-il que j’étais réveillée ? Je gardai les paupières closes jusqu’à ce qu’il rejoigne les autres.

Ils continuèrent à débattre des options qui s’offraient à eux. Rafe insistait pour attendre que je reprenne des forces. Mettait-il sa vie et celle des autres en danger à cause de moi ?

Je fis alors mine de me réveiller et marmonnai :

— Bonjour, Rafe. Peux-tu m’aider à me lever ?

Aussitôt, ils se tournèrent tous vers moi avec empressement.

Rafe vint s’agenouiller à mes côtés et pressa une main contre mon front.

— Tu as encore de la fièvre. Il est trop tôt pour…

Je me sens mieux. Je…

Il continua de résister, appuyant contre mes épaules pour m’empêcher de me redresser.

— Je dois aller faire pipi, Rafe, dis-je d’un ton ferme qui l’arrêta net.

Il lança un regard embarrassé aux trois autres par-dessus son épaule. Sven haussa les épaules comme s’il ne savait que dire.

— Je n’ose même pas imaginer quelles indignités j’ai dû subir au cours des derniers jours, déclarai-je, mais à présent que je suis éveillée, je compte bien me soulager en privé.

Rafe hocha la tête et m’aida prudemment à me mettre debout. Je fis de mon mieux pour réprimer une grimace. Le processus fut long et douloureux : ma jambe blessée était incapable de supporter le moindre poids sans envoyer des salves de douleur dans ma cuisse jusqu’à mon entrejambe. Je m’appuyai lourdement sur Rafe. Ma tête me tournait et de la sueur perlait au-dessus de ma lèvre supérieure, mais je savais qu’ils me regardaient tous pour tenter de jauger mon état, si bien que je me forçai à sourire.

— Voilà qui est mieux, dis-je en m’enroulant dans la couverture pour préserver ma pudeur.

— Ta robe est sèche, annonça Rafe. Je peux t’aider à la remettre.

Je fixai la robe de mariée étendue sur un rocher, les teintes cramoisies des différents tissus se fondant les unes dans les autres. Son poids m’avait entraînée au fond de la rivière et avait failli me tuer. Tout ce qu’elle m’évoquait, c’étaient les mains du Komizar glissant le long de mes bras, tentant de prendre possession de moi.

Je savais qu’ils percevaient ma réticence à l’idée de renfiler cette robe, mais ils ne pouvaient rien y faire. Nous nous étions tous échappés avec pour seuls vêtements ceux que nous portions.

J’ai un pantalon de rechange dans ma sacoche, annonça alors Jeb.

Orrin le regarda, incrédule.

— Un pantalon de rechange ?

Sven leva les yeux au ciel.

— Évidemment.

On peut découper le bas de la robe pour que le haut fasse office de chemise, proposa Tavish.

Ils semblaient désireux de trouver une occupation qui les distrairait de ce que je m’apprêtais à faire.

— Attendez, lançai-je alors qu’ils commençaient à s’éloigner. Merci. Rafe m’a dit que vous étiez les meilleurs soldats de Dalbreck. Je sais à présent qu’il n’exagérait pas.

Je me tournai vers Sven.

— Et je suis désolée de vous avoir menacé de vous arracher la peau du visage à mains nues pour la faire avaler aux cochons. Sven sourit.

— Je n’ai fait que mon travail, Votre Altesse. Puis il s’inclina.

J’étais assise entre les jambes de Rafe, adossée contre son torse. Ses bras m’encerclaient et une couverture nous recouvrait tous les deux. Nous étions installés près de l’entrée de la grotte et nous regardions le soleil disparaître derrière une chaîne de montagnes. Ce n’était pas un beau coucher de soleil – le ciel était gris, brumeux et couvert de lugubres nuages – mais c’était la direction de chez moi.

J’étais plus faible que je ne l’avais cru, et après quelques pas seule jusqu’à un recoin de la grotte pour trouver un peu d’intimité, j’avais été obligée de m’appuyer contre la paroi pour ne pas tomber. J’avais fait ce que j’avais à faire, mais j’avais ensuite dû appeler Rafe pour qu’il vienne me chercher. Il m’avait soulevée dans ses bras comme si je ne pesais rien, puis m’avait amenée jusqu’ici quand j’avais demandé à voir où nous nous trouvions. Devant mes yeux s’étendait à perte de vue une immensité blanche, le paysage transformé par une nuit de neige.

Ma gorge se serra lorsque le soleil disparut tout à fait ; je n’avais plus rien pour me distraire et d’autres images surgirent alors derrière

mes paupières. Je vis mon propre visage, mon expression terrifiée. Comment était-ce possible ? C’était comme si je m’observais vue d’en haut, tel un dieu qui aurait pu intervenir. Je me repassai chaque seconde, tentant de voir ce que j’aurais pu ou dû faire différemment.

— Ce n’est pas ta faute, Lia, dit Rafe comme s’il voyait, lui aussi, le visage d’Aster dans mes pensées. Sven se tenait sur le chemin de ronde en surplomb et a tout vu. Tu n’aurais rien pu faire.

Je ravalai un sanglot. Je n’avais même pas eu le temps de pleurer sa mort. Juste de pousser un cri d’horreur incrédule avant de poignarder le Komizar. Puis tout avait dérapé.

Les doigts de Rafe s’entrelacèrent aux miens sous la couverture.

— Tu veux en parler ? murmura-t-il contre ma joue.

Je ne savais pas par où commencer. Trop d’émotions se bousculaient dans mon esprit. Culpabilité, rage et même soulagement. Un soulagement total et absolu d’avoir survécu. D’être dans les bras de Rafe. D’avoir une seconde chance de vivre la fin heureuse qu’il m’avait promise. Mais une seconde plus tard, une vague de culpabilité me submergea. Comment osais-je être soulagée alors qu’Aster était morte ?

Puis la rage à l’encontre du Komizar fit de nouveau surface. Ilest mort.Jel’aitué. Et j’aurais aimé pouvoir le tuer de nouveau.

— Mes pensées tournent en boucle, Rafe, répondis-je. Comme un oiseau piégé dans une cage. Je n’ai aucune échappatoire. Aucun moyen d’arranger les choses. Si seulement j’avais…

Qu’étais-tu censée faire ? Rester à Venda ? Épouser le Komizar ? Devenir sa marionnette ? Répéter ses mensonges à Aster jusqu’à ce qu’elle soit aussi corrompue que tous les autres ? À supposer que tu aies survécu assez longtemps pour ça. Aster travaillait au Sanctuaire. Elle côtoyait le danger bien avant que tu arrives.

Je revis Aster m’affirmer que le danger était partout. C’était la raison pour laquelle elle connaissait si bien tous les tunnels secrets du Sanctuaire. Afin de pouvoir prendre la poudre d’escampette en cas de besoin. Sauf que cette fois, elle n’avait pas pu, trop occupée à veiller sur moi.

Bonsang,j’auraisdûm’endouter!

J’aurais dû me douter qu’elle ne m’écouterait pas. Je lui avais ordonné de rentrer chez elle, mais les mots n’avaient pas suffi. Aster voulait tellement se rendre utile. Me faire plaisir. Que ce soit en me présentant fièrement mes bottes cirées, en récupérant un livre abandonné dans les cavernes, en me guidant à travers les tunnels ou en cachant mon couteau dans un pot de chambre, elle cherchait toujours à m’aider. Je sais siffler fort, avait-elle supplié pour que je l’autorise à rester. Aster voulait simplement…

Une chance. Elle voulait simplement une chance. Une porte de sortie, une histoire plus belle que celle qui avait été écrite pour elle. Ditesàmonbapaquej’aiessayé,miss.Une chance de contrôler sa propre destinée, comme moi. Mais elle n’avait pas pu échapper à la sienne.

— C’est elle qui m’a apporté la clé, Rafe. Elle est allée la prendre dans la chambre du Komizar. Si je ne lui avais pas demandé…

— Lia, tu n’es pas la seule à remettre en question tes décisions. J’ai marché pendant des kilomètres en te portant à moitié morte dans mes bras. Et à chaque pas, j’ai réfléchi à ce que j’aurais pu faire autrement. Je me suis demandé une centaine de fois pourquoi j’avais ignoré ton message. Tout aurait pu tourner différemment si j’avais pris deux minutes pour te répondre. Mais j’ai fini par me forcer à arrêter. Ressasser le passé ne nous mènera nulle part.

Je reposai ma tête contre sa poitrine.

— C’est exactement où j’en suis, Rafe. Nulle part.

Il leva la main pour tracer doucement la ligne de ma mâchoire.

Lia, quand on perd une bataille, il faut s’adapter et aller de l’avant. Choisir un autre chemin, si nécessaire. Mais s’appesantir sur chaque décision qu’on a prise ne fera que nous paralyser et nous empêcher d’avancer.

— Tu parles comme un soldat.

— C’est ce que je suis, Lia. Un soldat.

Et un prince. Un prince sur lequel le Conseil devait vouloir mettre la main presque autant que sur la princesse qui avait poignardé le Komizar.

Je ne pouvais qu’espérer que le bain de sang qui s’était ensuivi avait éliminé le pire du lot. Il avait déjà pris le meilleur.

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