1909. L'Alsace à Nancy

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LE VILLAGE

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INTRODUCTION

Le 1er mai 1909, l’Exposition internationale de l’Est de la France ouvre ses portes à Nancy, une ville devenue capitale régionale à la suite de l’annexion de l’Alsace et de la Moselle par l’Empire allemand, quelque quarante ans plus tôt. Si l’événement est d’envergure, il n’en est pas pour autant inédit. Il s’inscrit dans le sillage des grandes expositions universelles, apparues au milieu du xix e siècle en Europe. À partir des années 1880, les villes et leurs acteurs économiques déclinent ces temps forts à l’échelle de leurs territoires. C’est ainsi que Strasbourg accueille en 1895, dans le parc de l’Orangerie, une exposition industrielle et artisanale qui met en exergue les régions du Reichsland ElsassLothringen, du Bade, du Palatinat et de la Hesse. En France, de l’autre côté de la frontière, la municipalité de Nancy est sollicitée dès les premières années de 1900 pour accueillir une foire similaire, calquée sur le modèle de l’Exposition du Nord de la France 1. Très vite, les acteurs politiques et économiques nancéiens prennent la main sur l’organisation, dans un contexte particulièrement favorable. La ville connaît alors une croissance sans précédent, portée par le boom de la sidérurgie lorraine et par l’apport des populations venues des zones annexées, les Mosellans et Alsaciens ayant « opté » pour la France. Cette effervescence, tant économique qu’intellectuelle, connaît son développement le plus significatif avec un mouvement artistique dont la renommée dépassera bientôt les frontières régionales : l’École de Nancy. À partir de 1905 2, les Nancéiens se lancent dans la préparation d’une manifestation aux forts accents régionalistes. Leur projet est celui d’une exposition « universelle, régionale et interfrontière », « action glorieuse de décentralisation et du I

« Exposition de Nancy. Village alsacien. Costume. Danse. Musique » . Affiche de Charles Spindler. Strasbourg, Musée alsacien

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JEAN-NOËL GRANDHOMME

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L‘AlsaceLorraine et la question des nationalités « Croyez que personne ne vous oublie… Croyez que non seulement en France, mais dans tous les pays où battent des cœurs humains on pense à vous. » 1 Cette citation de l’écrivain lorrain Erckmann-Chatrian 2 est révélatrice d’une réalité : après leur annexion par ­l’Allemagne, l’Alsace-Lorraine et ses habitants ont pris une dimension mythi­que et emblématique [   I ]. Dans une Europe où la question des nationalités est omni­­présente, seuls la Pologne et les Polonais peuvent r­ ivaliser avec eux dans ce rôle d’étendard des r­ evendications nationales. Depuis les trois partages de 1772, 1793 et 1795, la Pologne, répartie entre la Russie, la Prusse et l’Autriche, est en effet l’incarnation du mépris des grandes puissances pour les aspirations des peuples. Quand, en 1915, deux ans après la seconde guerre balkanique, un journal de Sofia, L’Opinion libre, se fait l’écho du sentiment géné­ral en Bulgarie, il explique que, si « le partage de la Macédoine entre Grecs et Serbes créa une Pologne balkanique, l’annexion de la Dobroudja par la Roumanie donna le jour à une Alsace balkanique » 3. Les termes Pologne et Alsace sont donc souvent employés comme des noms communs, synonymes ­d’injustice et d’oppression.

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LES COULISSES ALSACIENNES DE L‘EXPOSITION

Une coopération amicale Deux hommes, Louis Laffitte (1873-1914) 3 du côté lorrain, et Hugo Haug (1865-1948) du côté alsacien, jouent un rôle clé dans la création du village alsacien et des manifestations qui s’y déroulent durant l’été 1909. Le rôle du premier, tout à fait officiel, est facile à cerner. Celui de Hugo Haug est plus difficilement lisible 4. Plutôt qu’un organisateur, il est un « facilitateur » qui, pour bien continuer à jouer son rôle, renonce souvent à endosser publiquement la paternité des projets qu’il initie ou qu’il soutient. Originaire de Pau, géographe de formation, Laffitte [   IV ] commence sa carrière comme professeur à l’école de commerce de Nantes. En 1898, il est nommé enquêteur auprès de la Société de la Loire navigable. Fondée en 1896, soutenue par le ministère des Travaux publics, l’association animait une campa­ gne très active auprès des chambres de commerce et du patronat afin de promouvoir l’idée d’une régularisation du fleuve dans une optique commerciale. Au début de 1907, Laffitte accède au secrétariat général de la chambre de commerce de Nancy et prend également la tête de l’office économique de Meurthe-et-Moselle. Dès lors, son nom apparaît dans le comité d’organisa­tion de l’exposition. En gestation depuis 1904, le projet est à cette date menacé par une crise interne qui oppose la Ville, secondée par la chambre de commerce, à l’entrepreneur Eugène Oscar Lami, qui avait déjà organisé des manifestations identiques dans d’autres villes françaises. La « crise de l’exposition », comme la dénomme Laffitte, se dénouera peu après son arrivée à Nancy, lorsque, après l’éviction de Lami, Laffitte est nommé directeur général de l’exposition : « Jusqu’ici le projet d’exposition a revêtu le caractère d’une entreprise privée ; à mesure qu’il prend corps, l’exposition tend à devenir municipale » 5, résume-t-il dans le rapport rétrospectif qu’il publie en 1912. Fils de notable (son père était notaire et ­conseiller général), Haug [   V ] appartient à la première génération ­d’Alsaciens qui ont grandi dans le cadre du nouvel État allemand, et dont les engagements, à partir des années 1890, vont renou­ veler le combat francophile en l’orientant vers un régionalisme assumé. Délaissant une protestation jugée stérile, cette génération

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La fête alsacienne de Nancy. L’Illustration, 3 juillet 1890

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LORRAINE MENGUY-DAVAL

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Le village alsacien et ses cartes postales En ce début du xxe siècle, la carte postale connaît son âge d’or. « Tout ce qui peut se photographier peut se reproduire par la phototypie », peut-on lire dans un cahier spécimen de l’impri­ meur nancéien Royer en 1896. C’est en effet en partie grâce au développement de la phototypie, un nouveau procédé d’impres­­ sion, que des éditeurs peuvent imprimer en de nombreux exemplaires des cartes postales. Ce procédé permet des reproductions fidèles, rapides et des impressions bon ­­marché. Monuments, villages, scènes de la vie quotidienne, mises en scène, événements… les sujets sont multiples et les cartes postales connaissent alors un véritable succès populaire. Un événement aussi exceptionnel pour Nancy que l’Expo­sition internationale de 1909 et son village alsacien se doit d’être illustré par l’utilisation de ce nouveau média pour lequel Nancy est le principal centre de production dans l’Est de la France 1. On estime à plus de 10 millions le nombre de cartes postales publiées à l’occasion de l’exposition de 1909. La plupart sont issues des Imprimeries réunies de Nancy fondées par Albert Bergeret en 1905, en association avec les imprimeurs Humblot et Helmlinger. Albert Bergeret (Gray, 1859 - Nancy, 1932)

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L’HÉRITAGE MUSÉOGRAPHIQUE

coiffe au grand nœud d’étoffe noire, qui semble si bien caractériser l’Alsace, « ne s’est jamais portée que dans une région limitée du Bas-Rhin, équivalent au huitième à peine de la surface totale de l’Alsace » 22.

Une étape importante dans l’histoire des collections d’ethnologie régionale à Nancy et Strasbourg Le 2 novembre 1909, l’Exposition internationale de l’Est de la France ferme ses portes au public. L’heure est au bilan, jugé très positif, et au démontage des pavillons. Du village alsacien, seule subsiste la maison alsacienne, qui, non sans difficultés 23, intégrera le patrimoine de la Ville de Nancy aprèsguerre. Cependant, par-delà le sort de la maison de Zutzendorf, l’expérience régionaliste nancéienne paraît avoir durablement marqué l’histoire du Musée alsacien et du Musée lorrain. À Strasbourg, le projet des tenants francophiles du Musée alsacien paraît renforcé par le succès de l’exposition de 1909, auquel ils ont largement participé. Ouvert au public deux ans plus tôt, le musée va dès lors poursuivre son développement en reprenant certaines scénographies tant appréciées à Nancy. C’est ainsi que certaines formes de présentations significatives, toujours visibles aujourd’hui dans le musée du quai Saint-Nicolas, à l’instar de la Stùb de Wintzenheim ou encore de l’accrochage des dégorgeoirs de moulins, doivent beaucoup aux restitutions de la maison alsacienne du parc Sainte-Marie. [   X ] À Nancy, l’expérience de la « chambre lorraine » constitue un jalon important dans le développement des collections du Musée lorrain. Fondé en 1850 par un petit groupe d’érudits férus d’histoire ducale, le musée comptait déjà dans ses VII « Exposition de Nancy. Maison alsacienne. Cuisine ». Carte postale,

Imprimeries réunies de Nancy, 1909. Strasbourg, Musée alsacien VIII « Exposition de Nancy. Maison alsacienne. La belle chambre ». Carte postale, Imprimeries réunies de Nancy, 1909. Strasbourg, Musée alsacien IX Fauteuil de guérisseur, extrait du rapport Laffitte. Nancy, palais des ducs de Lorraine - Musée lorrain X « Musée alsacien. La chambre paysanne ». Carte postale, 1909 Strasbourg, Musée alsacien XI Reconstitution d‘une chambre lorraine, salle d‘art populaire du Musée lorrain. Photographie, vers 1912. Nancy, palais des ducs de Lorraine - Musée lorrain

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MISES EN SCÈNE ET SOUVENIRS

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TABLE DES MATIÈRES

10 Le Village – cartes postales 13 Préfaces 21 Introduction Marie Pottecher et Sophie Mouton 31 L‘Alsace-Lorraine et la question des nationalités Jean-Noël Grandhomme 47 La contribution des optants à l’essor de Nancy Hélène Lenattier 61 Les coulisses alsaciennes de l’exposition Anne-Doris Meyer 77 Le village alsacien et ses cartes postales Lorraine Menguy-Daval 85 De Zutzendorf à Nancy : d’une maison à un symbole Hervé Doucet 101 L’héritage muséographique Sophie Mouton 117

Une fête folklorique Daniel Peter

129 Exposer l’Alsace, 1871-1918 Marie Pottecher 141 Nancy-Strasbourg : une Alsace des artistes ? Christine Peltre 155 Mettre en scène les régions – culture et politique Jean El Gammal 165 Mises en scène et souvenirs ­­­­­– cartes postales

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