TOUTE LA LIRE, cahier N°1

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C a h i e r N o. 1

revue de poégraphie

TO U T E L A L I R E

é d i t i o n s TE R R ACO L



S O M M A I R E

Déclaration

page 8

Eloi Ficquet

Ethiopie ligne sud

page 12

Chantal Neveu

De Fer

page 15

Frank Smith

Résolution des faits

page 22

Tomas Tranströmer

L’homme de Bénin

page 37

Alexandre Friederich

Cassations

page 41

Alain Borer

Noèmes

page 107

Yves Stranger

Confessions of an English Chatt Eater

page 111

Jesper Svenbro

Les valises

page 117

Jean-Marie Gleize

Et vers la fin du chant

page 121

Nathalie Léger-Cresson

Cantique des cailloutes

page 127

Nadezhda Teffi

La Femme Fatale

page 143

Christian Désagulier

Hölderlin en Afrique

page 149

Pascale Petit

Petits reflets

page 156


L e c œ u r n ’e s t p a s u n g e n o u p o u r q u ’o n l e p l i e . proverbe

Peul


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D*CL ARATI ON

de jour de plus i ntense obscurité encore, lunes, étoi les en fuite

Toute la l i re voudrait produi re de ces figures d’i nterférences sur les l ignes desquel les on pourrait voi r se dessi ner une carte de poégraph ie

Des gui des dans cette galerie de tunnels où nous sommes, dont les bouts i ncandescents sont derrière nous, devant les pics de lumière creusantes qui obéissent aux lois des quasi -cristaux de l ’i magi nation

Le poème est une question de poi nt de vue, selon qu’on se place au niveau de la mer ou de la rivière, aux sommets de massifs de toutes ères, vifs ou érodés ou des vagues aux mi l le doigts feui l letants

L’i nachevé, l ’hypothèse, l ’observation banale ou i ntri guante, énigmati que, espérée, attendue s’y consigne

Cai l loux jetés à l ’eau du lac ou d’océan, y coulent ou ricochent, provoquent de l ’onde i ntense ou plate, courte ou s’éti re, dure sous l ’effet du frottement au poi nt que l ’on pourrait y marcher presque, si pas couri r là où se passent l ’assemblage des mots

Le tube à essai voisi ne avec l ’accélérateur de particules, les aci des forts et les isotopes avec l ’eau de mémoi re, le spectromètre de masse et le microcope électroni que avec l ’ordi nateur logué sur le site du télescope Hubble, les i nstruments d’observations et d’écoute avec le cah ier de laboratoi re

Exploration est expérience, le poème ses traces d’herbes froissées aux passages d’éléphants, de pattes d’ombrette à la boue avant que la sécheresse et ses polygones aux fai l les i nsondables

On y parle de ce que l ’on sait, devi ne, voit à travers, qu’i mporte le sujet pourvu que les mots y soient blutés, les grai ns de lumière ferti les, le noyau de la fatale dual ité éclaté en trois, quatre, moultes ondes et particules pourvu que de la musi que, c’est à di re une certai ne organisation de la matière

Les moyens et les fi ns qui sont dans ses moyens, dans ses risques, à savoi r qu’i l ne se décrète pas, ne s’éti quète pas dans un rayon, se parque, mais demande un réglage de nos yeux, nos orei l les, nos sens sur la fréquence du poème-monde, avec ses vastes graves et ses mi nuscule aigus, qu’i mporte d’où ni quand Il y aurait des textes qui sont des torches de nuit et

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Les sciences et les techni ques s’y racontent poéti quement, sciemment et téléologi quement la poésie, toutes exactes et humai nes, c’est à di re fai l l ibles, i ndescri ptibles

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En phrases comme en phase ou déphrasés, l ’enregistrement de ces petites secousses que le choc des plaques de pensées engendre du fond de soi, de ces tracés d’arch ives ai nsi que les pulsations d’astres, les rapprochements de leurs ondes de choc

Qu’on se tienne en équi l ibre sur ses l ignes de crêtes ou que l ’on marche sur ses eaux, les l ignes du poème sont des courbes de niveaux

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totalement, avec de ces combi naisons de mots récurrentes et particul ières qui lui confère une probabi l ité d’occurence, même faible, mi racle de la statisti que, notre semoule quoti dienne

paume de la Terre

La science et la techni que, ce couple d’amoureux qui marchent mai n dans la mai n, font halte de baisers, poursuivent leur chemi n en laissant derrière eux ces phrases de pas, la trace bouleversée des l ieux de leurs embrassements

De la grammai re appl i quée à la lettre : les aigles fémi ni nes au pluriel

La science c’est l ’action et la techni que la pensée, question d’euphonie : sciences et techni ques sont d’abord et avant tout un assemblage de mots dans un certai n ordre, des poèmes en marche

Toute la l i re, la l i re toute et partout

Des geysers de balei nes, des souffles de répits, à l ’encre de vi ngt mi l le l ieux dessous la mer écrits sont

Les mots auront leurs dessi ns et leurs photograph ies à di re et réci proquement : mi roi rs hapti ques

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La science et ses conséquences techni ques: on a touché à la lune et mars, après avoi r été un dieu, une raci ne lati ne, une planète rouge, sera bientôt une vi l légiature grâce au moteur à propulsion plasmi que La science change le sens des mots, l ’approche de la fi n de la vie sur terre obl ige à reconsi dérer les enjeux de sa diction: qu’au moi ns, nous ne soyons pas seuls au moment du ne plus pouvoi r rien di re, que la compréhension de ce qui a été et de ce qui advient nous submerge de gratitude Dans les romans d’Hugo la pression de poésie est tel le qu’i l s’en faut de peu qu’i ls riment en blocs Un almanach de carbone et de cel lulose, cousu coton pour le transport à dos d’éléphant : ses emprei ntes nous rappel lent le chemi n du Lac, calque de ciels dans la

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1. ETHIOPIE LIGNE SUD / Eloi Ficquet

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ETH I OP I E L I GN E SUD / E l o i F i cquet Je suis parti de Mojo à pied. Je suis parti de Mojo pour travai ller. Pas moyen de grimper en voiture. Les wagons sont bondés. Cahier No. 1 / toute la lire

Cahier No. 1 / toute la lire

Je ne jouerai pas des coudes, j ’ai mon crincrin à l ’épaule. Le train déchargera à Nazreth ses messieurs en chapeaux, ses grosses dames et leurs ballots. Je suis parti de Mojo le crincrin à l ’épaule. J’irai voir du pays, prendre la nouvelle voie. Les chapeautés et les emballotées l ’ont déjà inaugurée. Le nabot des nabots s’est déplacé pour cela. Ses jambes sont rai des comme des ciseaux. Des rubans à trois couleurs ont été coupés. Ca s’est promulgué dans les gazettes. Ca se propagande dans les campagnes à la corne, au tambour. Oyé. L’embranchement est à Nazreth. Le terminus n’est pas la mer. C’est un lac, Awassa. Terres ferti les en promesses. J’ai gardé mon Mojo dans ma poche,j ’ai mon crincrin à l ’épaule. Quelques poignées de grain suffisent à mon trajet.

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2. DE FER / Chantal Neveu

1. ETHIOPIE LIGNE SUD / Eloi Ficquet

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15 DE FER / Ch ant al Neveu

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le sol nous i mporte / la Terre \ ai re de combat / un carré dans un carré \ le regard de nos yeux / nous dissolvons l ’adversité \ toute tentative d’agressivité / nos paumes nos torses \ talons légers / poi ds réparti \ sous la plante des pieds / ci ls flottants \ magenta / en une fraction de seconde \ une détente

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3. RESOLUTION DES FAITS / Frank Smith

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3. RESOLUTION DES FAITS / Frank Smith

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RE SOLUTI ON DE S FAITS / Fran k Sm i th 1

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Comment les choses ne seraient pas ce qu’el les sont si la question n’était pas cel le-ci ? Car i l y a, déci dée, cette i nterrogation qui serait tel le qu’une fois posée el le contiendrait la règle de toutes les réponses possibles. El le démantèlerait les pri nci pes qui ne servi raient pas à la résolution des faits. Le chant, ce serait lui même un vent. 3 Une résolution est un anéantissement rétroactif, est une décision à caractère i mpératif ou prise dans son si mple apparei l ou approuvée ou votée, est une tech ni que d’harmonie classi que, est une mesure de la fi nesse d’un affichage ou de la capture d’une i mage, est un procédé qui isole, est le relâchement total d’une tension, est le retour progressif d’un organe tuméfi é à son état normal, est la détermi nation des raci nes d’une équation, est le dessei n que l ’on prend ou le projet que l ’on arrête, est le mélange homogène de deux ou

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4. L’HOMME DE BENIN / Tomas Tranströmer

4. L’HOMME DE BENIN / Tomas Tranströmer

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37 L’ HOMME DE BEN I N / Toma s Tranströ mer Quand la nuit tomba j ’étai s cal me quand une ombre tambouri na sur la peau tendue du désespoi r. Cahier No. 1 / toute la lire

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Quand les frappes cessèrent je vi s l ’i mage d’une i mage d’un homme en rel ief à la surface de la page du l ivre grand ouvert. Comme passant devant une mai son abandonnée depui s longtemps quel qu’un apparaît à la fenêtre. Un étranger. I l était le p i lote. Vigi lant. Qui se rapproche i nsensi blement. Coi ffé d’un chapeau rond en forme d’hémi sphère à bord relevé autour de l ’équateur. Une tête avec des nageoi res sur le côté. Portant barbe boucl ée autour de sa bouche éloquente.

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5. CASSATIONS / Alexandre Friederich

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41 CASSATI ONS / Al exan d re Fr i e der i ch 1 Un homme gît sur la route. Un groupe l ’entoure, i mmob i le, penché. Je remarque le vélomoteur écrasé, je resp i re le parfum de feui l les - c’est encore la nuit. Du côté du pont retentit une si rène. Cahier No. 1 / toute la lire

Cahier No. 1 / toute la lire

Un fourgon survient, approche, frei ne. Sa porte coul i sse, la si rène se tait. Le gyrophare bleu balaie les platanes tandi s que les agents gri ffonnent des renseignements. Quand je traverse la scène, les agents me demandent mon ai de. Nous sai si ssons l ’homme et nous le déposons dans le fourgon, pui s les vivants saluent et s’en vont. Le fourgon s’i mmob i l i se au carrefour. I l déclenche sa si rène et redémarre. Le jour commence. I l y a un problème : on ne peut décri re le problème. Pei ndre une orange ou la photograph ier, mesurer un enfant au mètre, di re je t’ai me à l ’être ai mé, mai s pas décri re le problème, bri ser son enveloppe extérieur, répandre ses rouages. L’esprit ne peut sorti r du corps ni le corps du problème. Je fai s partie de ce que je veux di re. Pourtant je prends la parole, je prends le stylo et je note. S l ’énergie me favori se, je m’acharnerai . Je m’éloigne du l ieu de l ’acci dent, b i furque à gauche et monte sur le pont Daladier. Depui s deux semai nes les eaux fouettent les murai l les d’Avignon. Ce mati n, le pont est fermé au trafic. Je croi se d’autres p i étons. La marche est l ’état nati f, c’est le rythme des phases ; j ’ai merai s déposer mes organes, décharger l ’électricité,

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6. NOEMES / Alain Borer

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NOE ME S / Al ai n Borer Ai -je dormi ? chaises blanches en plastic ti rées tard dans le soi r

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vacuité de la nuit à résonnance d’amphore tourni quets des jets d’eau du mati n

L’aube citron épée sifflante à travers d’obl i ques boulaies déci me la montagne

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7. CONFESSIONS OF AN ENGLISH CHATT EATER / Yves Stranger

5. CASSATIONS / Alexandre Friederich

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A Russian Antonov takes off

on the torri d city.

every day from the runway of

Chatt (cata edul i s) i s Eth iop ia’s

Di re Dawa, i n eastern Eth iop ia.

fourth b iggest export (after

The V. I . P carried on th i s spe-

coffee, leather and oi l seeds)

cial ly chartered plane i s eagerly

and one that i s growi ng every

expected i n Dj i bouti, l i ke some

year. The traditional narcotic i s

august personage, and tremors

exported mai nly to Somal ia and

of suppressed pleasure flutter

Dj i bouti, but also to the United

through the arteries of the

Ki ngdom (73 tons last year) and

town. A hush of expectation

a recent article i n The Ti mes

descends and the town awaits

of London poi nted out that

Her with a dry mouth and a

the consumption of chatt was

gl i nt i n its dusty eye. When

becomi ng a concern among the

the chartered Antonov lands,

youth of… Bi rmi ngham.

Cahier No. 1 / toute la lire

Cahier No. 1 / toute la lire

CONFE SS I ONS OF AN ENGL I SH CHATT E ATER / Yves Stranger

di sgorgi ng its precious cargo, a

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green wave surges out i nto the

Closer to home, the leader of

l i mp arteries of the town. Fi rst,

the new sharia courts i n Soma-

there i s a voci feration, then as

l ia has been quoted as sayi ng

mouths fi l l with cud, cal m i n the

that he woul d "ban the leaf.“

gui se of an emeral d vei l desends

But as Mohammed Seyi d, a So-

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8. LES VALISES / Jesper Svenbro

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LE S VAL I SE S / J esp er Sven b ro Aux yeux de Vi chy, ton p è re ét a i t u n "b o l ch év i q ue“, ce q u i ava i t d û e nt rer e n compte l ors q u ’ i l fut s é l ect i on n é p ou r êt re e nvoyé t rava i l l er e n Al l emagne na z i e . En cet te b e l l e j ou r n ée d ’octob re de 1942 aux confi ns d ’Al ger i l ét a i t, q uo i q u ’ i l e n so i t, e n t ra i n de bal ayer dans l a ca ser ne Cahier No. 1 / toute la lire

Cahier No. 1 / toute la lire

où i l ét a i t i nter n é j us q u ’à nouve l ord re, — l ors q ue sou da i n i l ap erçut u n h aut grad é q u i, avec deux l ou rdes val i ses, se d i r i gea i t vers l a sor t i e . Dans l e souve n i r, c’est touj ou rs l e mat i n . Dans l a cou r de l a ca ser ne, i l fa i t fra i s . Ton p è re, âgé de d i x-sept ans, p ose son bal a i et deman de p o l i me nt au co l one l s’ i l n’a pa s b eso i n d ’a i de avec ses bagages . I l re ço i t u ne ré p onse v i veme nt recon na i ssante sa i s i t l es val i ses de cu i r l ust ré et sor t ap rè s l ’offi c i er, — devant l a se nt i ne l l e . Que l l e h eu re est- i l ? Peut- êt re d i x h eu res et dem i . Deh ors i l fa i t d éj à ch au d . L’ i nte nse so l e i l nord -afr i ca i n b r i l l e su r l e paysage où i l s avance nt e nsemb l e su r u n ch em i n de grav i l l ons l e l ong d ’u n ch amp gran d comme u n ter ra i n de foot . Que de p ouss i è re est sou l evée par l eu rs ch aussu res ! Un p eu p l us l o i n, u n t rou p eau de moutons at te n d . Les p e ns ées du co l one l sont a i l l eu rs

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9. ET VERS LA FIN DU CHANT / Jean-Marie Gleize

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un objectif : Jonas sort de la ville et se fait là une hutte (ou cabane) et vient dessous et se couche à l’ombre et l’arbre commence à pousser au-dessus de lui

averse à réaliser c’est-à dire : "pluie continue en temps réel“ un point d’arrêt à "la pierre“ (mais confusément) il suffit de continuer la route elle continue comme la pluie en continu en temps réel

le ralenti est le temps réel est la vraie monotonie de l’averse en biais sur les mots et le goudron je voulais simplement quitter le mot "cendre“ j’ouvrais les mains pour faire tomber le reste des mots et le mot

cendre avec, je secouais les paumes entre la pierre et la surface de l’eau il y avait le mot averse à réaliser mais confusément

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Cahier No. 1 / toute la lire

Cahier No. 1 / toute la lire

ET VERS L A F I N DU CHANT / J ean -Mar i e G l e i ze


10. CANTIQUE DES CAILLOUTES / Nathalie Léger-Cresson

10. CANTIQUE DES CAILLOUTES / Nathalie Léger-Cresson

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CANTI QUE DE S CAI L LOUTE S / Nath al i e Léger-Cresson I : Déser t, un so i r. Rose : Sans répit, sans répit. Blanche : Tu dis, Rose ? R : Le jour, la nuit alternent sans répit. Et chaque soir je me sens disparaître, chaque soir l’inquiétude… B : Tu t’assombris si brusquement, d’un coup tu sombres du rose au noir. R : Alors que tu deviens radieuse. Te voir me réconforte un peu, ton blanc rayonne, tu n’es jamais aussi lumineuse qu’au crépuscule, crayeuse comme le lait des brebis sous la lune. B : Et me viennent des idées légères, des souvenirs aériens… Nous avons eu un papillon un matin, tu t’en souviens ? Du temps où l’on entendait parfois une eau couler, vers le nord. R : En entrant dans la nuit, tes aspérités te font un ombrage délicat, une dentelle, de plus en plus fine, d’ailleurs. B : L’ouvrage du temps. Mes calcaires se creusent, le reste reste. Je me décharne. R : Tu t’épures. Le changement est presque imperceptible mais je t’assure que tu es encore plus jolie qu’il y a… enfin à l’époque de tu sais quoi.

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Cahier No. 1 / toute la lire

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Deux cailloutes dans un désert


11. LA FEMME FATALE / Nadezhda Teffi

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L A FE MME FATALE / Nadezh da Teffi Cahier No. 1 / toute la lire

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La Femme Fatale diffère essentiel lement de la Femme Ordi nai re par la façon qu’el le a de s’hab i l ler. El le porte cape de velours noi r, col l ier de front, bague à poison dont le cyanure lui sera l ivré sans faute mardi prochai n, un stylet autour du cou et le portrait d’Oscar Wi l de brodé sur la jarreti ère gauche. Ces femmes ont en commun de porter des accessoi res ai l leurs que prévu. Par exemple une boucle d’orei l le sur le front, un anneau au pouce et une montre autour de la chevi l le. La Femme Fatale ne mange jamais à table. En général, el le ne mange jamais. - Pourquoi fai re ? El le parle avec un fort accent ital ien et peut occuper les positions sociales les plus diverses, mais surtout, surtout, c’est une actrice. Mari ée, la Femme Fatale vient parfois de divorcer. Mais el le a toujours un secret, une blessure i nti me, i nexpri mable, i navouable. - Pourquoi fai re ? Au caval ier qui la raccompagne du bal et qui lui tient des propos d’esthète à connotation éroti que, el le répond tout à coup, tremblante jusqu’aux plumes de son chapeau :

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12. HOLDERLIN EN AFRIQUE / Christian Désagulier

11. LA FEMME FATALE / Nadezhda Teffi

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Abordons

Höl -

Et poursuivant, ma lancée me

derl i n qui les cents pas sur le

demande si cette absence, ce

Port de la Lune, port où de si

trou annulai re, ne serait pas ré-

nombreux navi res accostent du

vélatrice d’une hypertroph ie de

Nord, d’Améri ques, chargés de

sa macula, qui aurait fait tout

café, coton, sucre et d’ép ices et

di sparaître autour, dans l ’obses-

pui s repartent,

sion de voi r de la Grèce partout

?

De

à

Bordeaux

d’où vers où Haïti -Sai nt

– ou b ien d’une sorte d’i nnocence

Domi ngue où Toussai nt Louver-

Guadeloupe,

– contami né qu’i l aurait pu être

ture, et pui s aussi certai nement

par la Phénoménologie de l ’Esprit

vers le golfe de Gui née pour

du camarade de classe.

fai re un plei n d’esclaves…

Et que ce pourrait être aus-

Höl derl i n ignorait-i l ce commerce,

si par une autocensure à ai les

au moment où Bonaparte réta-

d’aigle qui aurait nom d’Hegel,

bl it l ’esclavage le 20 mai 1802, dont

en

le numéro de l ’Echo du Journal

dévastatrices au regard de l ’uni -

de Bordeaux ne se manque pas

versal ité revendi quée – ou une

de fai re, mai s pas celui du 21 où

i nconséquence, que ce trafic lui

Toussai nt est vi l i pendé

?

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prévi sion

de

contradictions

échappât.

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Cahier No. 1 / toute la lire

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HOLDERL I N EN AFRI QUE / Ch r i st i an Désagu l i er


13. PETITS REFLETS QU’ON S’AMUSE A FAIRE SUR LES VISAGES / Pascale Petit

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PETITS REFLETS QU’ON S’AMUSE A FAIRE SUR LES VISAGES / Pa scal e Pet i t

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12. HOLDERLIN EN AFRIQUE / Christian Désagulier

i ci peti ts reflets qu’on s’amuse à fai re sur les vi sages

i ci comme un accroc à la doub l ure

i ci on est accul é à la passi on par un fi let de senti ments dans un n i d d’amour

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i M P R E S S U M

Cahier No.1 de T O U T E revue de poégraphie 300 Exemplaires format: 175 x 230 mm 30 photos 182 pages

LA

LIRE

Typographie de titrage: Filigran carbon Typographie de labeur: Filigran new Ce Cahier constitue le premier numéro de la revue T O U T E L A L I R E codirigée par Christian Désagulier & Julia Tabakhova pour les éditions TERRACOL. directeur de revue: Christian Désagulier http://www.toute-la-lire.fr a été achevé d’imprimer en .... sur les presses de SNEL dépôt légal: décembre 2013 ISBN: 978-2-9535218-2-5 Publié par les éditions T E R R A C O L 50 rue Nicolas Poussin 75016 Paris - France http://www.editions-terracol.fr Photographies d’Afriques de Christian Désagulier Photos d’Éthiopie p. 13, 14, 23, 29, 30, 40, 60, 61, 62, 73, 74, 94, 105, 106, 110, 116, 126, 141, 142, 148, 157, 171 (Mission Stendhal / Institut Français 2012) Photos du Burkina Faso p. 24; Sénégal p.35, 118, 120 ; Bénin p. 36, 39; Afrique du Sud p. 147; Togo p. 159.. tous droits réservés ©Christian Désagulier Typographie & Design: Julia Tabakhova tous droits réservés ©Julia Tabakhova http://www.j ulia-tabakhova.com


Paru aux éditions T E R R A C O L : Christian Désagulier - L’Almanach des Muses, 2009 - Aube, Neige, Blok: Concordances, traduction combinatoire de trois poèmes d’Alexandre Blok, 2011 - Tribulations africaines, roman noir (à paraître)



ISBN 978-2-9535218-2-5

euros

B N : 9 7 8 - 2 -521825 9535218-2-5 9 I S782953 12


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