azerty 13 (FR)

Page 1


RECHERCHE & DÉVELOPPEMENT

VALEO

Libérer le potentiel de l’IA en France

Comment l’intelligence artificielle peut contribuer à renforcer la compétitivité

Le défi de l’infrastructure

PAGE 07

Valeo : l’IA moteur de l’innovation

PAGE 10

Pourquoi la formation est clé

PAGE 17

RÉALISÉ PAR

Sébastien Missoffe

DIRECTEUR GÉNÉRAL

GOOGLE FRANCE

L’IA représente une chance unique de renforcer la compétitivité européenne et de soutenir une croissance durable.”

L’Europe est à un tournant. Face aux convulsions géopolitiques et à l’urgence de revitaliser son économie, elle doit réinventer son modèle pour rester une force à la fois majeure et inspirante sur l'échiquier mondial.

L’intelligence artificielle peut être un catalyseur. Elle représente une chance unique de renforcer la compétitivité européenne et de soutenir une croissance durable. Saisir cette opportunité exige un effort collectif afin de développer une IA audacieuse et responsable. La France, forte de son excellence scientifique, de sa vitalité entrepreneuriale et de ses infrastructures, possède tous les atouts pour être à l’avant-garde de cette transformation.

Chez Google, nous sommes fiers de jouer un rôle moteur dans cette dynamique à travers nos investissements en France comme en Europe depuis plus de vingt ans. Centres de données (voir page 7), câbles sous-marins (page 10), partenariats avec des champions tricolores comme Valeo ou Pigment (voir page 12), formation aux compétences numériques d’un million de français avec les Google Ateliers Numériques (page 19) : notre engagement profond, concret et durable.

Je suis convaincu qu’en unissant nos forces, nous pourrons faire de l’IA un levier de progrès partagé.

Google Ireland Limited, Gordon House, Barrow Street, Dublin 4, Irlande — Numéro d’enregistrement : 368047 – Numéro de TVA : IE6388047V.
Ceci est une communication de Google. — Conception et réalisation : Edelman — Directeur de la publication : Paul Manicle — Comité de pilotage : Hélène Marlaud, Charles Alf Lafon, Yoann Duperthuy — Direction artistique : Marion Comte, Anthony Teixeira / DotStudio — Crédits iconographiques : Pierre Morel, William Lacalmontie, Scott Kershaw, Arnaud Bouissou, Ministère de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, DR — Fabrication :

Libérer le potentiel de l’IA en Europe et en France

Antonin Bergeaud

PROFESSEUR ASSOCIÉ

HEC PARIS

Résumé avec Gemini

Confrontée à des défis majeurs, l'économie européenne peut utiliser l’intelligence artificielle comme opportunité pour renforcer sa compétitivité.

Pour ce faire, l'Europe doit investir dans les infrastructures, augmenter les dépenses de R&D et favoriser la collaboration entre recherche publique et entreprises.

La France est une figure de proue pour l'Europe, grâce à ses talents et ses entreprises de pointe.

Le 9 septembre 2024, l’ancien premier ministre italien et président de la banque centrale européenne, Mario Draghi, publie un rapport sur la compétitivité et l’avenir de l’UE. 73 pages qui tirent la sonnette d’alarme : l’économie européenne décroche progressivement par rapport à celle des États-Unis, tandis que la Chine la rattrape peu à peu. Un constat causé par trois défis structurels majeurs : le vieillissement de la population (d’ici à 2040, l’Europe devrait perdre deux millions d’actifs par an), une concurrence féroce à l’exportation sur des marchés mondiaux de plus en plus restreints et enfin un manque de compétitivité dans le domaine des technologies de pointe. Mais sur ce dernier point, l’Europe a une carte à jouer : celle de l’intelligence artificielle.

Fabien Curto Millet

CHIEF ECONOMIST GOOGLE

De nombreux experts et responsables politiques considèrent ainsi l’IA comme la principale opportunité à saisir pour renforcer la compétitivité européenne. Et selon Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne, la course à l'IA est loin d'être terminée : « Nous n'en sommes qu'au début », a-t-elle déclaré lors du Sommet pour l’action sur l’Intelligence Artificielle, organisé à Paris en février dernier. «Lafrontièrenecessedese déplacer.Leleadershipmondialpeutencore êtresaisi.»

Il est vrai que l’impact économique potentiel de cette nouvelle technologie sur la zone Euro est impressionnant. Selon une étude menée par le cabinet Implement Consulting1, un scénario impliquant une adoption généralisée de l’IA et un accès aux meilleurs modèles pourrait engendrer une augmentation de 8 % du PIB annuel de l'Union Européenne en seulement 10 ans, soit l'équivalent de 1 200 à 1 400 milliards d'euros.

Le champ des possibles

D’après Antonin Bergeaud, professeur associé à HEC Paris et lauréat du Prix du meilleur jeune économiste 2025, trois scénarios se dessinent à moyen terme. Le premier suppose une Europe dans laquelle la croissance ne décolle pas car l’adoption de l’IA reste finalement assez limitée. «C’est lepluspessimiste,maisjepensequ’onadéjà un peu dépassé ce stade », rassure-t-il. Le second est celui d’un scénario fermé dans lequel une poignée d’entreprises développent des outils verrouillés pour asseoir leur domination et endiguer toute concurrence. Les gains de productivité restent alors limités, contrairement au troisième scénario, qui décrit une adoption ouverte de l’IA, avec une mise en concurrence permanente entre les différents acteurs et de jeunes entreprises qui viennent challenger sans cesse les modèles et les produits existants. «Celaobligeraittoutlemondeà innover continuellement, ce qui créerait évidemment beaucoup de croissance », décrypte Antonin Bergeaud. « Une telle projectiontransformeraitl’économieeuropéenneenprofondeur», pose Fabien Curto Millet, Chief Economist de Google. «Lavraie question est de savoir comment les structures vont se réorganiser à l’échelle européenne pour bien utiliser l’IA », complète Antonin Bergeaud.

Les forces vives

Premier prérequis : les infrastructures, qui occupent un rôle majeur dans le rapport Draghi. Et l’Europe peut se targuer d’investir dans le domaine, alors qu’elle opère déjà, selon Implement Consulting, 26 % des 500 meilleurs superordinateurs mondiaux et se classe deuxième en matière de brevets sur l'informatique quantique. Le 9 avril dernier, la Commission européenne a ainsi lancé un plan d’action baptisé « Continent de l’IA2 », qui prévoit notamment une enveloppe de 20 milliards d’euros pour développer cinq gigafactories, des centres de calcul haute performance équipés d'environ 100 000 puces IA de pointe, soit quatre fois la capacité des usines actuelles. « C'est important que l'Europe soitambitieuse.Nousdevonsoptimiserles ressourcespubliquesetinvestircollectivementpouravoirdesinfrastructureslesplus

+8 %

une approche ouverte du marché pourrait booster l’impact de l’IA à + 8 % du PIB annuel européen, soit environ 1 200 à 1 400 milliards d’euros, d’ici 10 ans.1

performantes possibles », appuie Antonin Bergeaud, qui salue l’initiative mais regrette que les infrastructures nécessaires au développement de l’IA à grande échelle soient encore trop souvent fragmentées. «Chaque paysveutavoirsondatacenterlocalement, pourcréersonpropreécosystème.C’estce quifaitquenousmanquonsdedatacenters detaillevraimentimposante».

Outre l'infrastructure physique, la R&D (recherche et développement) est vitale pour le développement d’un écosystème IA prospère. « Si on se concentre sur la partie publique, les dépenses de R&D en Europe sont comparables à celles des États-Unis - avec des trajectoires opposées, avec une tendance à la baisse outre-Atlantique », explique Antonin Bergeaud. « Mais si on prend la sphèreprivée,en2023,l'Unioneuropéenne aconsacré2,2%desonPIBàlaR&D,soitun totalde386milliardsd'euros,tandisqueles États-Unisyontconsacré3,5%(correspondantà884milliardsd'euros)etquelaChine a rapidement augmenté ses dépenses et se situe désormais au niveau de l'Europe en pourcentage du PIB. Il faut combler ce déficit et multiplier les passerelles entre le

Nous devons optimiser les ressources publiques et investir collectivement pour avoir des infrastructures les plus performantes possibles ”
Antonin Bergeaud

200

milliards d’euros vont être investis pour stimuler le développement de l’IA en Europe.2

Une adoption ouverte et généralisée de l’IA transformerait l’économie européenne en profondeur ”

mondedelarecherche,quiestessentiellementpubliqueenEurope,etlemondedes entreprises». Car les forces vives sont bien présentes en Europe. « Il y a un véritable vivier de talents », souligne Fabien Curto Millet. « La proportion de diplômés STEM (acronyme de science, technology, engineering and mathematics, NDLR) estaumême niveauquelesÉtats-Unisparmilliond’habitants.Nousavonsunerecherchedequalitéindiscutable»

Enfin, l’Europe est dotée d’une régulation exigeante, notamment sur les enjeux éthiques, à l’image de l’EU AI Act entré en vigueur le 13 mars 2024, qui évalue les différents niveaux de risques associés à l’IA, classés selon les types d'applications. «Chez Google, on considère que l'IA est une technologie trop importante pour ne pas être réguléeetégalementtropimportantepour ne pas être bien régulée », reprend Fabien Curto Millet. «Ilexistenéanmoinslerisque qu’uncadretroprigidelimiteunetechnologieenpleindéveloppement».

La locomotive française

Pour parvenir à son objectif, l’Europe peut aussi compter sur l’un de ses meilleurs atouts : la France. « Par rapport à d’autres pays européens, la France a vraiment pris la mesure de l’enjeudel’IA,quiestpresqueunequestion de survie économique », confirme Antonin Bergeaud. « Malgré les difficultés budgétaires, des efforts d’investissement ont été faits. On peut aussi citer notre formation - reconnue comme étant de très grande qualité - et des facilités au niveau administratif pour entreprendre, ce qui aboutit à la création d’entreprises innovantes qui montrent la voie » (voir page 12). Selon une étude menée par la Fondation Concorde en 2024, le déploiement de l’IA générative dans les secteurs clés de l’économie française pourrait engendrer d’ici dix ans une augmentation de 9 % du PIB annuel national, soit un gain de 220-240 milliards d’euros. 3

Dans cette optique, Fabien Curto Millet recommande un plan d’action en trois phases : «D’abordl’activation,pour laquelle nous devons nous assurer que larégulationvoulueparl’UEn’estpasde nature à brider l’innovation, mais aussi agir sur le prix de l’énergie qui coûte deux à trois fois plus cher en Europe qu’aux États-Unis. Ensuite l’accompagnement,quiconsisteàfairedesefforts dans les domaines de l’éducation et de la formation pour s’assurer que notre main-d'œuvre puisse tirer tous les bénéfices de l’IA. Et enfin l’amplification, pour faire en sorte que l’IA soit bien diffusée dans l’économie, notamment au niveau des PME où l’adoption est parfois plus complexe ». Des obstacles finalement surmontables pour éviter la « lente agonie » crainte par le rapport Draghi. Attention au virage.

1 “The economic opportunity of generative AI”, Google Implement (2024)”

2 “The European Commission AI continent action plan”, Commission européenne (2025)

3 “Intelligence Artificielle & Emploi : comment faire de l’IA une opportunité pour la France”, Fondation Concorde (2024)

Fabien Curto Millet

Endamus es que pe exererf erferrum ea vellaut occae volorro mos quis nesto et eos nonectur a si ommoluptae mo blaces sam eum

“ La France peut devenir un hub scientifique mondial ”

Si l’intelligence artificielle est un enjeu stratégique, c’est aussi un défi opérationnel : supercalculateurs, cloud, financement des startups et des filières industrielles… Éléments de réponse.

Quelle est votre vision de l’état des capacités françaises en matière d’IA ?

Clément Beaune

HAUT-COMMISSAIRE À LA STRATÉGIE ET AU PLAN

Clément Beaune La France dispose d’un écosystème riche : chercheurs de pointe, startups dynamiques et projets open source comme Hugging Face, Mistral ou scikit-learn. Nos capacités de calcul progressent avec le supercalculateur Jean Zay (CNRS) et bientôt Alice Recoque, futur calculateur exaflopique français hébergé au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), le second en Europe. Malgré ces atouts, nous devons accélérer face aux États-Unis et à la Chine. Notre stratégie nationale et européenne vise à investir massivement et innover, tout en restant fidèles à notre modèle éthique et à l’idée d’une IA au service de l’humain.

La France et l’Europe ont-elles les moyens de développer cette stratégie ?

C.B. L’Europe dispose d’un puissant levier financier si elle coordonne ses forces. Le plan InvestAI mobilise ainsi 200 Md€ (50 Md€ publics, 150 Md€ privés). En parallèle, chaque pays renforce son effort : nous consacrons par exemple 2,5 milliards d’euros du plan France 2030 au développement de l’IA. Mais nous devons casser les barrières du marché des capitaux pour renforcer le financement privé et soutenir les projets les plus risqués.

Quels projets prioritaires en matière d’infrastructures doivent être lancés ?

C.B _En premier lieu, la France investit afin de doter l’Europe d’une puissance de calcul capable de rivaliser à l’international. Ensuite, nous soutenons les offres européennes de confiance pour que nos données et nos modèles soient hébergés sous juridiction européenne. Enfin, nous renforçons les infrastructures d’accueil et de connectivité : 35 sites en France sont prêts à héberger des

centres de données dédiés à l’IA, alimentés par une énergie décarbonée abondante et dotés d’une connexion très haut débit. Déjà 6e au monde en nombre de data centers, nous visons à devenir le carrefour européen des capacités de calcul, un lieu où convergent investissements étrangers et expertise locale pour bâtir l’IA de demain.

Peut-on imaginer des “gigafactories” de l’IA en France ?

C.B. L’Union européenne prévoit d’en financer quatre via le plan InvestAI, à hauteur de 20 milliards €, et la France a vocation à en accueillir une partie. À l’image des “gigafactories” de batteries installées dans le nord pour la filière électrique, nous n’avons aucune raison de ne pas réussir aussi pour l’intelligence artificielle. La question qui se pose cependant est celle de la construction juste et durable, pour nos territoires, d’un modèle productif adapté aux réalités sociales et environnementales.

Comment convaincre davantage d’acteurs d’investir ?

C.B. En rappelant que l’IA est un impératif stratégique. Le plan «Osezl’IA»vise à ce que 100 % des grandes entreprises, 80 % des ETI et 50 % des TPE l’intègrent d’ici 2030. Nous travaillons aussi à attirer les talents. La situation géopolitique américaine crée une opportunité inédite : des milliers de chercheurs, doctorants, ingénieurs vont chercher un nouvel ancrage. La France doit être prête à les accueillir. C’est pourquoi nous avons lancé, avec nos partenaires européens, l’initiative Choose Europe for Science (600 M€), qui vise à faire de l’Europe un espace de stabilité et d’investissement. Mais il faut aller plus loin en simplifiant les procédures et en mobilisant davantage de financements privés. La France peut devenir un hub scientifique mondial si elle en a la volonté. Et nous l’avons.

L’opportunité IA repose sur l’infrastructure et l’ouverture ”

Anthony Cirot plaide pour des investissements sur le long terme et des partenariats solides et multiples, à rebours de tout enfermement logiciel, afin de poser dès aujourd’hui les fondations d’une IA au service de l’innovation européenne.

Pourquoi l’infrastructure est-elle si importante en matière d’IA ?

Anthony Cirot_ Le potentiel de l’intelligence artificielle pour transformer l’économie européenne et renforcer sa compétitivité est immense. Mais ce potentiel repose sur des fondations solides : l’infrastructure. Les avancées de l’IA ne sont possibles qu’avec une puissance de calcul considérable. Cette infrastructure dite « matérielle » inclut les technologies de calcul haute performance, les centres de données et un système énergétique décarboné, appuyé par un réseau électrique modernisé. Évidemment, l’aspect logiciel est tout aussi essentiel, car pour exploiter l’IA, les entreprises et les développeurs ont besoin d’outils et d’applications adaptés.

La consommation énergétique est souvent pointée du doigt quand on parle d’IA. Comment Google agit-il pour une infrastructure plus durable ?

A.C._ L’IA peut nous aider à relever les défis climatiques, mais il est vrai que les centres de données consomment beaucoup d’énergie. Nous innovons en permanence pour réduire notre empreinte environnementale. En moyenne, un centre de données Google délivre aujourd’hui six fois plus de puissance de calcul par unité d’électricité qu’il y a cinq ans. Notre ambition est claire : d’ici 2030, tous nos centres de données devront fonctionner 24h/24 à l’énergie sans carbone.

Comment l’Europe se positionne-t-elle en matière d’infrastructure IA par rapport aux États-Unis ou à d’autres régions ?

A.C._ La qualité et la disponibilité de l’infrastructure varient considérablement en Europe, souvent en lien avec les stratégies numériques nationales et les investissements passés. Si l’Europe a progressé sur la recherche en IA, elle doit encore investir massivement dans les infrastructures fondamentales pour rester dans la course face aux leaders mondiaux que sont les États-Unis ou la Chine. Google a investi de manière significative en Europe ces dernières années et nous continuerons à le faire pour contribuer à combler cet écart.

À quoi ressemblent concrètement ces investissements ?

A.C._ Entre 2018 et 2024, Google a investi plus de 9 milliards de dollars dans les infrastructures européennes. Nous exploitons aujourd’hui des centres de données en activité en Allemagne, en France, en Espagne, Italie, en Irlande, aux Pays-Bas, au Danemark, en Finlande et en Belgique. Ces sites sont essentiels pour répondre à la demande croissante en IA et services cloud, en offrant la puissance de calcul nécessaire aux entreprises européennes. De nouveaux sites sont également prévus, notamment à Waltham Cross au Royaume-Uni et à Skien en Norvège.

Quel rôle joue Google dans le déploiement de l’infrastructure IA en Europe ?

A.C._ Google joue un rôle clé dans la mise à disposition de l’infrastructure nécessaire à une IA véritablement démocratisée en Europe.

L’infrastructure Cloud de Google permet notamment aux entreprises européennes de toutes tailles, des startups aux grands groupes, de mettre en place leur stratégie d’IA sans immobiliser de capital informatique. Cette infrastructure passe du reste par les investissements de Google dans les câbles sous-marins : dix d’entre eux relient les côtes européennes à différents points du globe. Mais l’infrastructure n’est qu’une brique d’un ensemble qui comprend quatre couches : l’infrastructure matérielle, la recherche, les outils et enfin les produits et agents. Et Google propose aujourd’hui cette chaîne complète.

Cela ne relève-t-il pas justement d’un enfermement technologique ?

A.C._ Au contraire. Depuis nos initiatives en open source jusqu’à la proposition de standards d’IA agentique commun, en passant par les premières solutions multi cloud, la multitude de modèles d’IA proposés ou encore la suppression des frais de sortie dans le cloud, Google prône clairement l’ouverture technologique, contre tout enfermement logiciel.

Comment ces investissements contribuent-ils à la compétitivité européenne ?

A.C._ Nos investissements dans le cloud permettent d’installer une base numérique évolutive, facilitant l’accès à l’innovation et l’agilité des entreprises. Le cloud est essentiel pour les usages de l’IA : il permet aux entreprises de personnaliser des modèles d’IA sur leurs propres données, tout en s’appuyant sur nos modèles fondamentaux. Résultat : un gain de compétitivité et un coup d’accélérateur à l’innovation européenne.

Quel est le rôle des partenariats dans cet impact ?

A.C._ Les partenariats sont essentiels, surtout en matière de R&D. L’impact commence par la recherche. Google collabore activement avec de nombreuses institutions, universités et startups européennes. Un bon exemple : l’ouverture en 2024 d’un centre de recherche en IA à Paris, regroupant plus de 300 chercheurs et ingénieurs, principalement issus de Google DeepMind et des équipes de développement de YouTube et Chrome. Dans le domaine de la santé aussi, les collaborations sont prometteuses : nous avons, par exemple, lancé cette année un partenariat avec l’Institut Curie et l’Université Paris Sciences & Lettres autour de l’IA appliquée à la recherche contre les cancers féminins.

Google joue un rôle clé dans la mise à disposition de l’infrastructure nécessaire à une IA véritablement démocratisée en Europe”
Anthony Cirot

Comment percevez-vous la démarche européenne en faveur d’une plus grande souveraineté numérique ?

A.C._ Comme elle l’a fait pour la protection des données, l’Europe a su tracer une voie claire pour affirmer sa souveraineté numérique. Nous respectons ce chemin et participons activement aux discussions sur l’évolution de l’écosystème technologique en Europe. Le rapport Draghi est très clair : la souveraineté ne doit pas devenir de l’autarcie, elle repose aussi sur des partenariats solides. Pour nous, c’est une opportunité - et non une contrainte - pour innover et renforcer la confiance, d’une part en créant des solutions qui répondent aux plus hauts standards de sécurité, de transparence et de contrôle local, d’autre part en nouant des partenariats clés dans toute l’Europe pour fournir ces solutions de confiance : Minsait en Espagne, Telecom Italia en Italie, Clarence en Belgique et au Luxembourg, Schwarz Group et T-Systems en Allemagne, et bien sûr S3NS, avec Thales, en France (voir page 9).

“ La souveraineté numérique concerne toutes les entreprises ”

Lancée en 2022, S3NS est une coentreprise, filiale de Thales bénéficiant de la technologie Google Cloud, qui entend établir le standard du cloud de confiance en France en devenant le premier hyperscaler européen. Alors que la demande pour des infrastructures numériques souveraines explose, notamment dans le secteur public et les industries sensibles, comment S3NS tente de concilier innovation et sécurité des données ?

À quels enjeux répond la création de S3NS ?

Nos clients veulent mettre une partie de leurs données dans un cloud sécurisé, hébergé en France. S3NS, société de droit français entièrement contrôlée par Thales, a l’avantage de combiner la puissance d’innovation de Google Cloud et l’expertise en sécurité de Thales, un leader mondial des hautes technologies.

La complexité du cloud est souvent sous-estimée : on estime par exemple qu'il faudrait plusieurs dizaines voire centaines de milliards d'euros pour reconstruire un service équivalent à celui de Google Cloud.

Qui sont les premiers bénéficiaires de votre offre ?

Tous les secteurs sont concernés. Nos clients viennent des secteurs de la finance, des assurances, de l’aéronautique, de la défense, de la santé…

Bien qu’on évoque beaucoup le secteur public, en réalité le sujet de la souveraineté concerne toutes les entreprises, qui ont toutes des

Cyprien Falque

données à protéger. La définition de ce qui est sensible varie d'un client à l'autre : données de propriété intellectuelle, données stratégiques, données financières ou données citoyennes…

En quoi le modèle S3NS se distingue-t-il des autres offres cloud ?

Aujourd’hui, nous avons trois data centers opérés et supervisés par des équipes françaises, auxquels seuls des opérateurs de S3NS peuvent accéder. Nous avons une première solution disponible depuis deux ans, qui apporte un premier niveau de sécurité, avec une cinquantaine de clients. Et depuis janvier, la version auditable de notre Cloud de confiance est en production. Nous visons la qualification SecNumCloud de l’ANSSI à l’automne (cet entretien a été réalisé pendant l’été, NDLR).

La qualification SecNumCloud est l’une des plus exigeantes au monde en termes de sécurité. Qu'est-ce que ce label va changer concrètement ?

L'obtention de la qualification permettra à nos clients pour des données qu'ils gardaient auparavant on prem (sur leurs propres serveurs) de bénéficier de la puissance du cloud de Google, notamment pour simuler des pics de consommation ou développer de nouveaux usages d'IA. Par exemple, certaines mutuelles santé nous ont rapporté que la mise en production d’un projet pouvait prendre de neuf mois à un an, mais avec l’offre S3NS, le délai se réduisait à moins d’une semaine.

Comment envisagez-vous l’évolution du cloud en Europe ?

Chez S3NS, nous estimons que d’ici cinq à dix ans, l'utilisation des solutions de cloud de confiance s'imposera comme une évidence. Un des enjeux majeurs est l'uniformisation des normes au niveau européen, l'objectif étant de simplifier la gestion des exigences de conformité pour les clients entre les différents états membres de l’Union Européenne.

Projet Humboldt : La Polynésie française connecte le Pacifique sud

Résumé avec Gemini

Le projet de câble sous-marin Humboldt va relier Sydney, Tahiti et Valparaíso, transformant ainsi la Polynésie française en un point de connexion stratégique de l'océan Pacifique.

Cette initiative vise à apporter plus de connectivité en Polynésie française, où une grande partie de la population a une qualité de service Internet décevante ou inexistante.

Elle devrait dynamiser l'économie locale, augmentant potentiellement la production économique, tout en soutenant plus de 2 200 emplois.

Dans le bureau de Moetai Brotherson, Président de la Polynésie française, une carte s’étend sur plusieurs mètres de mur, représentant un peu plus de 4 000 km2 de terres émergées, réparties sur 118 îles dispersées dans 5,5 millions de km2 d’océan. «LaPolynésieestgrandecomme l’Europe.Dunordausud, c’estunSuède-Sicile.Etd’estenouest, unRoumanie-Portugal», situe son président. Le pays le plus proche, la Nouvelle-Zélande, est à 5 heures 30 d’avion. La côte ouest des États-Unis, à neuf heures. En observant cette carte, on comprend mieux pourquoi les questions de connectivité revêtent un enjeu crucial.En Polynésie française, le temps de latence - c’est-àdire le délai pour que les données soient reçues à destination - est particulièrement important. Et dans les archipels les plus reculés, 84 % de la population est actuellement privée d’accès à Internet. «Certaines îlesn’ontmêmepasla2Getlesbureauxde postefontencoreofficedelienavec l’extérieur», souligne Moetai Brotherson. «Nousaimerionséquilibrerl’activitéentre lesarchipelsmais,pourcela,ilnousfaut uneconnectivitéadaptée».

Nous sommes ravis de collaborer au projet Humboldt pour poursuivre la croissance de l’économie digitale en Polynésie française ”

Moetai Brotherson

Câble Humboldt
Polynésie française
Chili
Australie

VICE-PRÉSIDENT

Un déficit structurel

Sortir son territoire de l’enclave numérique, le président polynésien y songe depuis longtemps. Logique pour cet ingénieur informatique et télécommunication de formation, ayant travaillé au Japon, en Allemagne et aux États-Unis.

Pour cela, les câbles sous-marins s’imposent comme la solution la plus efficace, offrant des débits beaucoup plus élevés et une latence bien plus faible, donc de meilleure qualité. «Pourl’instant,lescâbles danslePacifiquepassentparlenordet délaissentlapartiesud.Cemaillageausud estprimordialtantlefonctionnementde nossociétésmoderness’appuiesurl'accès àuneconnectivitéoptimale.Pourlatélémédecine,l’éducation,lesservicespublics oulesplateformesdepaiementetc.».

De fait, lorsque le dossier «Humboldt» est arrivé sur son bureau quelques mois après son élection en mai 2023, Moetai Brotherson n’a pas ménagé ses efforts pour le concrétiser.

Relier les continents

Initié par Google, le gouvernement chilien et l’Office des postes et télécommunications de Polynésie française (OPT), le câble sous-marin Humboldt pourrait transformer radicalement l’accès au numérique de la collectivité polynésienne. «L’idéederelierl’Amériquedusudàla zoneAsie-Pacifiqueenpassantparla Polynésiefrançaiseremonteàplusde dixans,sansjamaisavoirpuseréaliserjusqu’ici», explique Brian Quigley, vice-président chargé de l'infrastructure réseau chez Google Cloud.

«C’estunprojetuniqueencesensetqui vabénéficieràtous». Mais relier le Chili à l’Australie via Valparaíso et Sydney, sur plus de 14 000 kilomètres ne va pas sans son lot de contraintes et de responsabilités. «Nousmenonsdesétudespourêtretrès prudentsquantauxconséquencessurla fauneetlaflore.Ilfautensuitedéciderquel genredecâblesseraleplusadapté», précise Brian Quigley. «Dansleseaux peuprofondes,ilyadesrisquesqu’ilsoit endommagéparl’activitémarine;ilfaut fabriqueruncâbleplusépaisetdonc pluscher.Dansleseauxprofondes,en revanche,lecâbleestalorsnaturellement mieuxprotégé,maissoninstallationprend plusdetemps.C’estaussipluscompliqué àréparerencasdeproblème». Actuellement en cours d’installation, Humboldt devrait être opérationnel en 2027.

Dynamiser l’économie locale

Une fois livré, Humboldt devrait réduire le temps de latence de 14,2 % entre 2026 et 2030. Ce qui, à son tour, pourrait entraîner une augmentation du trafic Internet pouvant aller jusqu’à 8,7 % en 2030, selon une étude du cabinet Access Partnership1. De quoi intéresser les grandes entreprises internationales, dont certaines ont déjà pris contact avec Papeete. «Ellessontattiréesparlefaitque nousavonsdouzeheuresdedécalageavec l’Europe.AvoiruneéquipeàTahitilorsque l’Europedort,c’estl’assurancedepouvoir fairedu24h/24.Jepensequecelava s’accélérerquandnousauronsune connexionefficace», confirme Moetai Brotherson, qui cite le BTP, les activités de maintenance ou encore l’installation de data centers comme autres investisse-

ments liés directement au projet. D’après les chiffres d’Access Partnership, les nouvelles infrastructures de câbles devraient augmenter la production économique annuelle de 493 millions USD cumulés sur cinq ans, tout en soutenant plus de 2 200 emplois. « Nous aurons besoind’engagerdesgenssurplace, destechniciens,desmanagers… Nousallonsd’ailleurscommenceràen discuterdansquelquesmoisavecles universitéslocales», abonde Brian Quigley. En attendant, le Président polynésien voit déjà grand : «Monobjectifestclairet ambitieux:j’aimeraisquedanshuitans, lesecteurdunumériqueetdel’audiovisuel représentelequartdenotrePIB».

Modifier la carte de la connectivité mondiale

Avec les câbles Tabua et Honomoana, qui relieront bientôt les États-Unis à l’Australie, en passant respectivement par les Fidji et la Polynésie française, c’est aussi la carte de la connectivité mondiale que Google est en train de redessiner. Et pour Brian Quigley, cela pourrait tout changer : «Améliorerlescapacitésdel’hémisphère sudpourlesrendreéquivalentesàcelles dunordpourraitmodifierdrastiquementla dynamiquedeséchangesmondiaux». De quoi donner des ailes à une jeunesse polynésienne très technophile. «Ilya parfoisuneimagefausséedelaPolynésie», regrette le Président Brotherson. « Mais nousavonsdesjeunesquifontdeschoses extraordinairesdanslenumériqueet l’audiovisuel.Etj’aimeraisqu’ilspuissent lefairedepuisleurjardin,leurplage,leur vallée.C’estlerêvequepermetlaconnectivité ».

1 “Connecting French Polynesia: The Opportunity for Growth and Innovation”, Access Partnership (2025)

Améliorer les capacités numériques de l’hémisphère sud pourrait modifier drastiquement la dynamique des échanges mondiaux ”
Brian Quigley

Pigment : la française haute en couleurs

Fondée par deux Français, Pigment entend dynamiser la planification d’entreprise grâce à l’intelligence artificielle. Et son succès à l’international témoigne de la capacité des startups hexagonales à innover pour conquérir des marchés stratégiques.

n 2019, Éléonore Crespo s’associe à Romain Niccoli, ex-CTO de Criteo, pour fonder Pigment. « Au fil de nos carrières respectives, nous avons pris conscience qu’il manquait une plateforme suffisamment puissante pour gérer la complexité des grandes entreprises, mais aussi suffisamment intuitive pour être utilisée facilement par les équipes ». Finance, RH, supply chain, ventes et opérations, Pigment permet de connecter les données et les plans de l'ensemble d’une organisation en temps réel, pour que les entreprises puissent planifier, s’adapter et décider. « Les dirigeants ne peuvent plus attendre des semaines, voire des mois, pour prendre des décisions critiques. Qu’il s’agisse de décisions proactives telles que combien de personnes embaucher, comment fixer le prix de certains produits, quels objectifs donner aux commerciaux, ou de décisions réactives telles que comment réagir face à l’inflation ou aux droits de douane, etc... », détaille cette ancienne analyste passée par Google.

De trois jours à quelques minutes Ces décisions sont désormais accélérées par l’intelligence artificielle. « Partout dans le monde, nous observons que de nombreuses

Éléonore Crespo

Partout dans le monde, les entreprises reconnaissent l’avantage stratégique apporté par l’IA

entreprises reconnaissent l’avantage stratégique que l’IA peut leur apporter, précise la cofondatrice. Nous avons récemment lancé notre premier agent IA, qui automatise les tâches de reporting répétitives et chronophages. Les premiers retours clients sont excellents. Un directeur financier nous a confié que son équipe mettait auparavant trois jours à comprendre pourquoi les chiffres réels ne correspondaient pas au budget.

Désormais, l’agent identifie ces écarts en quelques minutes, et fournit en plus des recommandations pour corriger le tir ». D’autres agents suivront bientôt, pour la planification et la modélisation, tout en restant vigilant sur la sécurité : les agents IA ne sont jamais entraînés sur les données clients. Pour développer ses capacités, la société a noué un partenariat stratégique avec Google Cloud, annoncé en mai 2025 afin de tirer parti de la puissance des solutions infrastructure, data, collaboratives et d'accéder à l’ensemble des capacités d’IA de Google. « Ce partenariat va permettre à nos clients de tirer encore plus de valeur de leurs données. Il contribue également à réduire la dette technique au sein des organisations, à combler le fossé entre les métiers et l’IT, et à renforcer l’alignement global des entreprises », explique Éléonore Crespo.

Porter haut les couleurs de l’Europe

Après plusieurs levées de fonds, dont la dernière a atteint les 145 millions de dollars en 2024, Pigment s’impose comme une pépite française particulièrement prometteuse, travaille avec des entreprises comme Unilever, Snowflake et Siemens, et se développe aux États-Unis, d’où provient à présent la majeure partie de ses revenus. Mais Éléonore Crespo se méfie des contes de fées et des baguettes magiques, et prévient ses pairs : « Utiliser l’IA ne fera pas de vous un leader mondial. Comme pour toute entreprise, le succès à long terme dépend de l'adoption et de l'impact. Ainsi, les entreprises IA les plus performantes seront celles qui créeront une valeur tangible pour les utilisateurs et la société ».

En revanche, elle croit à quelques prérequis pour que les entreprises européennes s’imposent sur la scène internationale : « Il est crucial de penser dès le premier jour au-delà des frontières de l'Europe, en combinant notre force en matière de régulation et d'éthique numérique avec les capacités américaines en termes d'échelle et d'innovation. La véritable souveraineté signifie que nous ne sommes pas seulement des consommateurs d'innovation, mais des bâtisseurs. Pour y parvenir, je pense que trois éléments clés sont nécessaires. Premièrement, équilibrer régulation et innovation. La fragmentation réglementaire entre les pays ralentit tout le monde. Deuxièmement, nous avons une culture de recherche et des talents de classe mondiale, mais nous devons aller au-delà de la simple création de pôles de recherche. Notre objectif devrait être d'exporter l'excellence, et non la dépendance. Enfin, nous devons faciliter une culture qui nous permette d'évoluer à la même vitesse que le reste du monde ». Et chez Pigment, on s’y connaît en pilotage à grande vitesse.

Avec l'IA, Valeo accélère vers la voiture de demain

Dans un secteur automobile en pleine évolution, Valeo doit faire face à un double défi : l’accélération technologique et une concurrence toujours plus féroce. Pour y répondre, le partenaire technologique des constructeurs automobiles mise sur l’intelligence artificielle afin de transformer ses méthodes de développement.

« Sur quel challenge l’IA pourrait-elle vous aider ? »

Cette question, Valeo, leader mondial des assistances à la conduite, l’a posée à ses ingénieurs lors d’un hackathon organisé avec Google Cloud axé sur l’IA générative en 2023. Résultat : plus de 600 projets proposés pour 240 retenus. Une démarche qui témoigne de la priorité donnée à l’innovation par l’équipementier automobile français : Valeo a alloué en 2024 un budget de 2,5 milliards d’euros à la R&D, soit 12 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. « Parce que c’est notre ADN, nous sommes le premier déposeur de brevets français dans le monde », ajoute Christophe

Le Ligné, vice-président Recherche & Développement. Le groupe compte aujourd’hui 24 000 ingénieurs en R&D et 9 000 ingénieurs logiciels, dont un peu plus de 200 se consacrent entièrement à l’IA. Un engagement qui ne date pas d’hier. « Nous avons vu le potentiel très rapidement : je crois que notre premier produit intégrant l’IA était une caméra de recul en 2002 », se souvient l’ingénieur de formation. En 2017, Valeo va plus loin et lance Valeo.ai, un centre de recherche en IA appliquée à l’automobile, doté d’une équipe d’une trentaine de chercheurs experts en machine learning.

Nous utilisons l'intelligence artificielle comme une véritable aide à la conception, mais avec toujours un ingénieur aux commandes ”

Christophe Le Ligné, VP R&D Valeo

Penser la voiture du futur

Depuis, Valeo, qui se positionne désormais comme une « tech company » et non plus seulement un équipementier automobile, ne cesse d’intégrer l’IA dans sa transformation. « Il existe de nombreuses questions autour de son utilisation », décrypte Christophe Le Ligné. « Et surtout une opposition claire : est-ce que cette technologie va tuer l’industrie ou au contraire lui permettre de se développer ? Chez Valeo, nous partons du principe que c’est un prérequis à notre compétitivité. Avec l’IA, nous pouvons accélérer : nous avons ainsi pu développer un produit en sept mois, alors que cela prenait trois ans auparavant ».

Pour autant, Valeo n’en oublie pas de considérer l’intelligence artificielle pour ce qu’elle est. « Nous utilisons l'intelligence artificielle comme une véritable aide à la conception, mais avec toujours un ingénieur aux commandes », reprend Christophe Le Ligné. « Et parce que l’IA générative nous propose des solutions de plus en plus pointues, nous avons besoin de pousser toujours plus loin l’expertise de nos ingénieurs. Notre objectif, c’est vraiment de créer des ingénieurs augmentés, pas de les remplacer ». Thibault Buhet est l’un d’eux. Son métier ? Penser la voiture de demain, dont l’IA fait dès aujourd’hui partie intégrante. « C’est simple, je me sers de l’IA pour tout », confie-t-il. « Nous travaillons avec de gros volumes de données, notamment

celles enregistrées par les capteurs du véhicule. Si j’ai besoin d’analyser un scénario précis, par exemple celui d’un passage piéton, je peux regarder des centaines d’heures de vidéo en notant tous les passages piétons, mais cela va me prendre un temps fou… L’IA, elle, peut trouver ces passages-là en dix minutes ». Particulièrement utile pour développer la conduite autonome, l’un des axes de recherche majeurs de Valeo, dont l’enjeu repose sur deux questions : comment percevoir correctement son environnement ?

Et comment prendre la bonne décision au bon moment ?

« L’IA générative nous sert à simuler rapidement des scénarios complexes. Je peux, par exemple, créer une situation avec de la neige ou faire surgir un animal à côté de la route ».

Dans cette optique, Valeo s’est rapproché de Google dès 2007, qui lui permet de tester les solutions en avance et à grande échelle. L’objectif affiché : concevoir mieux et plus vite les composants logiciels du véhicule de demain, tout en gardant un

contrôle strict sur la qualité, la sécurité et la confidentialité des données. « Google nous apporte énormément de savoir et de savoirfaire en matière d'IA », précise Christophe Le Ligné. « Aujourd’hui, toutes nos solutions IA sont sur Vertex AI Studio. De notre côté, nous leur apportons cette expérience industrielle qui leur permet de développer des solutions adaptées. »

Depuis peu, l’entreprise française s’est dotée de Gemini Code Assist, une technologie d’assistance dans l’écriture de code. « C’est complètement intégré à nos outils de développement, ce qui est très pratique », témoigne Thibault Buhet. « Le système se décline en deux outils. D’abord, l’autocomplétion du code. Un peu comme quand on rédige un SMS, le logiciel suggère une suite de code », détaille l’ingénieur. « Mais comme le système n’a que peu d’informations sur ma démarche, c’est là que le deuxième outil - un chatbot qui peut répondre aux problématiques que

Christophe Le Ligné, VP R&D Valeo et son équipe

nous lui soumettons - devient utile. Non seulement le code généré est généralement de bonne qualité, mais l’outil nous donne également une explication sourcée et argumentée pour chaque suggestion ». Les premiers utilisateurs sont en tout cas convaincus : « C’est vraiment très stimulant pour tout le monde. On en discute ensemble, on fait des tests, on se montre nos découvertes », décrit Thibault Buhet.

L’IA propose, l’ingénieur dispose

Au-delà du développement pur, l’IA a également réservé quelques petites surprises aux équipes de Valeo en termes d’optimisation produit. Notamment pour une problématique sur laquelle l’entreprise travaille depuis plusieurs années : la gestion thermique des batteries dédiées aux véhicules électriques. « Ce sont des produits très sensibles aux

Chez Valeo, nous partons du principe que l’IA est un prérequis à notre compétitivité ”
Christophe

Le Ligné

de nos ingénieurs a permis d'évaluer des solutions d'écoulements alternatives avec des résultats allant au-delà de nos attentes. D'autant plus que nous avons toujours un délai limité pour le développement d’un véhicule, nous n’avons pas le temps de modéliser des dizaines de solutions alternatives, ce que fait l'IA en quelques minutes » Concrètement, la solution trouvée par l’IA utilise 20 % d’aluminium en moins, permettant la fabrication d’un produit plus léger, plus économique et surtout plus durable. Une porte ouverte pour la voiture du futur, qui sera «sûre, respectueusedel’environnementet hyperconnectée». Pas besoin non plus d’attendre des années pour y goûter, à en croire Christophe Le Ligné : « C’est déjà le quotidien de Valeo ! » changements de température, qui fonctionnent moins bien quand il fait très froid ou très chaud, explique Christophe Le Ligné. Chaque cellule de batterie doit être maintenue à une température optimale en fonction du besoin. Tout se passe grâce à un écoulement du fluide dans la plaque de refroidissement. La mise en œuvre d'outils d’IA génératifs associée au savoir-faire

En savoir plus >

Prolongez votre découverte de l'utilisation de l'IA chez Valeo en vidéo

Thibault Buhet, responsable du développement de l’IA

Pub en ligne : générer plus de valeur avec l’IA

La publicité personnalisée, déjà essentielle à la compétitivité des entreprises, gagne encore en efficacité grâce à l'intelligence artificielle générative.

Adrien Robert

DIRECTEUR MARKETING

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon une étude menée par Implement Consulting en 2025 1 , la publicité personnalisée a généré 100 milliards d’euros de ventes supplémentaires pour les entreprises de l’Union européenne et a contribué à hauteur de 25 milliards d’euros au PIB de l’UE, contribuant ainsi à soutenir près de 600 000 emplois. Ce sont les petites et moyennes entreprises (PME) et les startups qui en tirent le plus grand parti, avec 80 milliards d’euros de revenus supplémentaires. Pour 75 % des PME, il serait d’ailleurs difficile, voire impossible, de trouver des clients sans elle. Un constat d’autant plus vivace en France, où 83 % des PME ont déclaré que la croissance de leur revenu global l'année passée peut lui être directement attribuée2

« Un levier incontournable »

En effet, la publicité personnalisée maximise le retour sur investissement. Chez alinea, enseigne française de mobilier et décoration aux 36 magasins et 1 500 collaborateurs, son efficacité n’est plus à démontrer, comme l’atteste Adrien Robert, son directeur marketing : « Alors que Google Ads représente 28 % de notre budget média, ce canal est responsable de 39 % de nos commandes digitales et 41 % de notre

revenu digital. En outre, il nous permet de toucher un nouveau public, avec jusqu’à 67 % de nouveaux clients. C’est un levier incontournable, notamment dans des zones où nous ne sommes pas implantés physiquement ».

Si la publicité personnalisée est déjà si efficace, c'est grâce à l'IA qui opère en coulisses pour la segmentation de l'audience, les enchères en temps réel et l'optimisation des performances. Mais l'IA générative promet une transformation encore plus radicale. D'ici 2030, elle pourrait générer 250 milliards d’euros de ventes supplémentaires pour les entreprises de l'UE et contribuer à 60 milliards d’euros supplémentaires au PIB de l'UE, soutenant 1,4 million d’emplois.

Au-delà du ciblage de l'audience, l'IA générative permet de personnaliser le contenu créatif de l'annonce elle-même. Elle peut générer instantanément des variations (images, titres, appels à l'action, langues) adaptées à des micro-segments ou individus, augmentant ainsi considérablement la pertinence et l'efficacité. Cependant, selon l’étude, la pleine réalisation de ce potentiel de 250 milliards d'euros dépend d'un effort concerté sur la technologie, l'adoption par les entreprises et l'environnement réglementaire, alors que l'Europe est déjà dotée de nombreuses régulations en la matière. L'enjeu est de taille : concilier innovation et protection des données pour permettre à l'Europe de tirer pleinement parti de cette révolution.

François Rebsamen

MINISTRE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE LA DÉCENTRALISATION

Défenseur d’une IA « utile, éthique et accessible à tous les territoires », François Rebsamen présente cette technologie comme un outil à même de répondre aux besoins concrets des citoyens, des entreprises et des collectivités.

Le gouvernement français a lancé cet été un plan, “Osez l’IA”, qui vise à accélérer la diffusion de l’intelligence artificielle dans toutes les entreprises françaises et en particulier les TPE/PME. En quoi l’IA peut-elle stimuler l’activité économique et renforcer l’attractivité des territoires ?

François Rebsamen_ C’est un levier de transformation économique. Bien utilisée, elle permet d’optimiser les chaînes de production, de faciliter l’innovation et de créer de nouveaux services adaptés aux besoins locaux. Elle génère aussi des opportunités d’emplois qualifiés et attire des entreprises porteuses de valeur ajoutée. Si nous savons la territorialiser intelligemment, l’IA peut devenir un facteur de relocalisation d’activités, de montée en gamme et donc d’attractivité pour nos territoires.

Peut-elle aussi aider à anticiper et accompagner les grandes transformations du tissu économique local ?

F. R._ L’un des grands atouts de l’IA est sa capacité à analyser des données massives pour mieux comprendre les dy-

L'IA est un levier de transformation économique puissant pour les territoires”

namiques à l’œuvre : par exemple, l’évolution des filières, les vulnérabilités face au changement climatique, les nouvelles opportunités pour éclairer la décision des élus ou des entreprises. Très concrètement, l’IA peut aider à modéliser l’impact d’un changement climatique sur une filière agricole, à prévoir l’évolution de la fréquentation touristique ou à identifier les secteurs industriels en tension ou en transition.

Dans un contexte de réindustrialisation et de transition écologique, l’IA peut-elle devenir un moteur de planification territoriale anticipatrice ?

F. R._ Elle peut, mais surtout elle le doit. Pour planifier la transition écologique, adapter les infrastructures, gérer le foncier, anticiper les changements, mieux gérer les ressources, l’IA peut enrichir nos outils de planification. Elle ne remplace pas la décision politique, mais elle l’éclaire, la rend plus réactive, plus juste. Elle est un outil au service de la cohérence territoriale.

“Osez l’IA” prévoit de former 15 millions de professionnels d’ici 2030. En quoi la formation est-elle, selon vous, la clé pour que chacun puisse bénéficier des opportunités offertes par l’IA ?

F. R._ Parce qu’il ne peut y avoir d’accès juste à l’IA sans montée en compétences. Une technologie aussi puissante que l’IA ne doit pas rester dans les mains d’experts ou de développeurs. Elle doit devenir un outil citoyen, maîtrisé et partagé. La formation, c’est le pont entre les promesses technologiques et les réalités humaines.

Quel message souhaiteriez-vous faire passer aux élus locaux, aux agents de terrain et aux citoyens ?

F. R._L’IA n’est pas une menace, elle est une opportunité, à condition de la construire collectivement. La vraie menace, c’est de rester en retard et de prendre le risque de creuser les écarts avec les régions européennes qui s’en saisissent. Chaque maire, chaque agent territorial, chaque citoyen a un rôle à jouer pour s’en emparer intelligemment. Il n’y a pas de fatalité technologique. Il y a un choix politique : celui de faire de l’IA un bien commun au service des citoyens et des territoires.

Pour toutes les entreprises

Alors que seulement 13 % des TPE/PME utilisent des outils d'IA, la diffusion de cette

Morgane Robin, fondatrice de Bleu Clémentine.

Aujourd'hui, l'IA est un levier de croissance puissant, offrant des solutions tangibles pour gagner en compétitivité. Parfois perçue comme l'apanage des grandes entreprises, l'intelligence artificielle est une opportunité concrète et accessible pour l'ensemble du tissu économique français, avec un gain attendu de 20 % de productivité*. Pourtant, de nombreuses entreprises hésitent encore à se lancer : seulement 13 % des TPE/PME utilisent des outils d'IA*. Un décalage qui s'explique souvent par un manque de clarté sur les applications pratiques et un sentiment d'incertitude quant aux premières étapes à suivre. Le défi est donc de taille : démystifier l'IA et accompagner les entreprises dans cette transition.

Se concentrer sur l’essentiel

Morgane Robin, fondatrice de Bleu Clémentine, un atelier de poterie et céramique artisanale, a bénéficié d'un tel accompagnement. Pour apprendre à gérer plus efficacement son entreprise, la céramiste s’est rapprochée de Google Ateliers Numériques. « Avec l’IA, j’ai pu activer des leviers que je n’aurai pas envisagés faute de temps et de compétences. Je retiens aussi la partie humaine, la bienveillance des coachs qui m’ont accompagnée et le fait de se sentir soutenue par une véritable expertise ». Au programme : création d’une plateforme de vente, automatisation des process, aide à la production de contenus réseaux sociaux, dont des voix off pour les vidéos… Résultat : des contenus plus pertinents, un trafic en hausse, une activité en pleine croissance. Et la possibilité de se concentrer sur la création de ses pièces, poétiques et inspirées.

* “La transformation numérique des TPE et PME françaises”, Baromètre France Num (2024)

Se former à l’IA avec les Ateliers Numériques

Depuis ses débuts en 2012, le programme Google Ateliers Numériques a pour objectif de donner à chacun les compétences pour concrétiser ses objectifs et projets professionnels. Près d'un million de personnes ont déjà été formées en France aux côtés de nos partenaires clés, comme France Travail et le réseau des CCI et CMA. Aujourd'hui, alors que l'intelligence artificielle redéfinit la croissance, l’ambition est claire : démystifier cette technologie, l’expliquer et

former pour que chacun, quel que soit son parcours, ait la confiance nécessaire pour profiter de cette opportunité.

Afin d’aider les commerçants, artisans et entrepreneurs à intégrer l'IA dans leur quotidien, Google Ateliers Numériques propose de nombreuses solutions : 50 coachs qui sillonnent la France, des ateliers collectifs, des accompagnements individuels, des formations en ligne certifiantes, des tutoriels sur YouTube (voir ci-contre)…

>

Découvrez en vidéo comment NotebookLM peut vous aider à booster votre productivité

Comment l’intelligence artificielle peut-elle renforcer la compétitivité européenne et française ? C’est la question au cœur de ce treizième numéro d’Azerty. D’abord à travers les Regards p.03 des économistes Antonin Bergeaud et Fabien Curto Millet, puis grâce à la Perspective  p.06 de Clément Beaune, Haut-commissaire à la Stratégie et au Plan. Un défi qui se joue en grande partie sur le Terrain  p.07 des infrastructures, comme le détaille Anthony Cirot, Vice-président EMEA Sud de Google Cloud, qui plaide en faveur d’investissements et de partenariats aussi solides que multiples.

C’est le cas notamment de S3NS, filiale de Thales bénéficiant de la technologie Google Cloud, à découvrir en Focus  p.09

Cap ensuite sur l’océan Pacifique, à la découverte d’un autre exemple de coopération autour du projet Humboldt p.10, un câble sous-marin qui reliera le Chili à l’Australie via la Polynésie française. Puis partons à la découverte de Pigment et Valeo, deux Pionniers p.12 qui misent sur l'IA pour innover. D’autres entreprises l’utilisent comme levier de croissance, à l’instar d’alinea qui se Focus  p.17 sur la publicité personnalisée. Pour conclure, François Rebsamen, Ministre de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation, met en Perspective p.18 l’impact pour le tissu économique français, à condition d’en maîtriser les usages. Une mission de formation que les Ateliers Numériques @Google  p.19 accomplissent partout en France pour accompagner l’adoption par les entreprises de toutes tailles.

Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.