LA QUESTON DES BARRAGES SUR MUNZUR

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Dr Ali KILIÇ Geneve,21 Janvier 2010 L’ANNEE NTERNATONALE DE LA BODIVERSTE 2010 ET LA QUESTON DES BARRAGES SUR MUNZUR

LA MANFESTATON CONTRE LA CONSTRUCTION DES BARRAGES SUR MUNZUR A DERSM

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L’ANNEE NTERNATONALE DE LA BODIVERSTE 2010 L'ONU a proclamé 2010 "Année internationale de la biodiversité", afin de renforcer la prise de conscience quant à la nécessité de préserver la diversité des organismes vivants de notre planète. Un moyen également de s'assurer que "la conservation soit une priorité" dans les agendas 2010 des gouvernements. Mais la Turquie membre du Conseil de Sécurité de l’ONU menace l’environnement du Kurdıstan Nord. et le Département de Dersim 31 % de nos terres sont restées sous les eaux des barrages. Un consortium international vient d'accorder à la Turquie un prêt d'1,2 milliard d'euros pour la construction d'un barrage controversé, le barrage d'Ilisu au Kurdistan Nord ainsi qu’ à Dersim.

Le consortium est composé de sociétés turques, allemandes, autrichiennes et suisses - dont les entreprises Stucky Ltd, Alstom, Maggia Engineering et

Codenco Power Engineering.. 2


La construction de 8 barrages, sur le fleuve Munzur à Dersim ainsi que à Dargeçit (sur le Tigre, à 45 km de la frontière syrienne), a débuté en août 2006 et devrait être achevé en 2014. Il générera annuellement 3,8 milliards de kWh et pourrait créer 10.000 emplois. C’est une politique mensongère comme le Projet GAP qui a chassé 9000 000 Kurdes de leur sans créer un emploi. L'ouvrage risque cependant d'engloutir un site archéologique majeur, le site millénaire d'Hasankeyf, et de déplacer plusieurs milliers de Kurdes. Les autorités turques assurent que 80% des monuments du site historique resteront au-dessus de la surface et que les monuments engloutis seront préservés en étant relocalisés dans un musée de plein air de la région. Les 8 barrages sur Munzur à Dersim font partie d'un projet plus ample de développement régional, le projet d'Anatolie du Sud-Est du gouvernement turc (projet GAP, Guneydogu Anadolu Projesi). Ce projet, concernant les bassins du Tigre et de l'Euphrate, comporte 22 barrages (dont le plus grand, le barrage Atatürk, localisé sur l'Euphrate, a été mis en service en 1992) et 19 centrales Hydroélectriques. A terme, il permettra à la Turquie d'augmenter de 35% sa production d'électricité et de plus de 50% sa surface irriguée. C'est un projet politiquement important pour la Turquie car il concerne le Kurdistan Nord, une zone à majorité kurde ; c'est aussi une source importante de tension au Moyen-Orient où l'eau est une ressource disputée entre la Turquie, la Syrie et l'Irak. La vérité c’est que la bataille de l’eau est un enjeu majeur au Proche-Orient, notamment entre la Syrie, la Turquie et l’Irak. Deux fleuves principaux sont au centre de cette bataille : le Tigre et l’Euphrate. Dans cette région considérée par les historiens comme le berceau de la civilisation se côtoient des dispositifs d’exploitation des ressources naturelles d’échelle industrielle et des méthodes d’irrigation agricole ancestrale. Cause de conflits politiques, moyen de pressions inter-étatiques mais aussi ressource fondamentale pour la vie locale, l’eau cristallise des enjeux qui permettent de saisir les difficultés auxquelles peuvent être confrontées des populations rurales prises dans la course de la productivité. C'est à Berlin, le 11 janvier, Année internationale de la biodiversité a été célébrée le lancement officiel de cette année orientée autour du thème : "La biodiversité, c'est la vie".Alors que la menace qui pèse sur la biodiversité est aujourd'hui une préoccupation internationale, l'Onu a fait de 2010 l'année de la mobilisation en faveur de cette richesse fragilisée par la pollution, la déforestation, l'agriculture intensive ou l'urbanisation."Il est temps que les gouvernements envisagent sérieusement de sauver des espèces et s'assurent que la conservation soit une priorité de leur agenda l'an prochain, dans la mesure où nous manquons réellement de temps" estime Jane Smart, spécialiste de la biodiversité à l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).

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Les espèces menacées, qu’il s’agisse d’ours polaires, de salamandres géantes, de requins blancs ou de baleines belugas ou encore l’aloe dichotoma de Namibie (une espèce d’arbre), seront célébrées tout au long de l’année 2010 sur Internet et une journée entière sera consacrée à chaque espèce.

La diversité biologique - ou biodiversité - est souvent comprise comme la variété des plantes, des animaux et des micro-organismes. Jusqu'à présent, environ 1,75 millions d'espèces ont été identifiées, pour la plupart des petits organismes comme des insectes. Les scientifiques estiment qu'il existe

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effectivement environ 13 millions d'espèces, mais les estimations varient fortement (entre 3 à 100 millions d'espèces). La biodiversité s'étend également aux différences génétiques au sein de chaque espèce - par exemple entre les variétés de plantes cultivées et entre les races d’animaux domestiques. Les chromosomes, les gènes et l'ADN - les éléments constitutifs de la vie - déterminent le caractère unique de chaque individu et de chaque espèce. Un autre aspect de la biodiversité est la variété des écosystèmes comme les déserts, les forêts, les zones humides, les montagnes, les lacs, les rivières et les milieux cultivés. Dans chaque écosystème, les organismes vivants, y compris les êtres humains, forment une communauté. Ils interagissent les uns avec les autres et avec l'air, l'eau et le sol qui les entoure. Alors que les forces les forces armées turques bombardent et détruisent les forets de notre pays depuis 1925 date à laquelle elles ont bombardé 350 heures et ont lancé 750 bombes.

Aviation turque bomabrde les forets de Dersim

Alors que Les forêts présentent pour la société une valeur économique, patrimoniale, paysagère, mais aussi écologique avec la reconnaissance croissante de leurs fonctions et services pour la biodiversité, les cycles du carbone, de l’azote, de l’eau ou encore les sols. Les attentes de la société vis-àvis de la forêt ont ainsi évolué. L’exigence d’une gestion durable des forêts et d’une répartition équitable de leurs ressources s’est imposée. Les forêts sont également devenues un enjeu majeur dans les discussions et les conventions internationales, en particulier concernant les problématiques du changement climatique, de la conservation de la diversité biologique et de la lutte contre la 5


désertification. C'est la combinaison des formes de vie et de leurs interactions réciproques et avec le reste de l'environnement qui a transformé la terre en un milieu unique et habitable pour l'Homme. La biodiversité fournit un grand nombre de biens et de services dont dépend notre existence.

En 1992, les dirigeants du monde se sont réunis à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement à Rio de Janeiro, au Brésil. Une série d'accords historiques a été signé lors du «Sommet de la Terre», dont deux accords contraignants, la Convention sur les changements climatiques et la Convention sur la diversité biologique, premier accord mondial sur la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique. Le traité sur la biodiversité s’est rapidement propagé et a acquis une large adhésion. Plus de 150 gouvernements ont signé le document à la conférence de Rio, et depuis, plus de 180 pays ont ratifié l'accord. La Convention a trois objectifs principaux: • • •

la conservation de la biodiversité, l'utilisation durable des éléments de la biodiversité, et le partage juste et équitable des bénéfices découlant d’une utilisation commerciale ou autre des ressources génétiques.

La Convention comporte des objectifs globaux et traite d'un sujet si vital pour l'avenir de l'humanité, qu'elle marque une étape dans le droit international. Elle reconnaît, pour la première fois, que la conservation de la diversité biologique est «une préoccupation commune à l'humanité» et qu’elle fait partie 6


intégrante du processus de développement. L'accord couvre tout à la fois: les écosystèmes, les espèces et les ressources génétiques. Elle relie les efforts de conservation traditionnels aux objectifs économiques d’une utilisation durable des ressources biologiques. Elle définit des principes pour le partage juste et équitable des bénéfices découlant de l'utilisation des ressources génétiques. Elle couvre également le domaine en rapide expansion de la biotechnologie, portant sur le développement technologique, le transfert, le partage des bénéfices et la biosécurité. Surtout, la Convention est juridiquement contraignante, les pays qui y adhèrent sont tenus d'appliquer ses dispositions, parmi elles, la mise en place d’une stratégie en matière de biodiversité, comprenant un plan d'action et une surveillance de la biodiversité nationale. La Convention rappelle aux décideurs et à l'humanité que les ressources naturelles ne sont pas infinies et expose une nouvelle philosophie pour le 21ème siècle, celle de l'utilisation durable. La Convention offre également aux décideurs des conseils fondés sur le principe de précaution, c'est-à-dire des conseils sur les menaces engendrant une réduction sensible ou une perte de la diversité biologique. L'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas être utilisée pour différer des mesures permettant d’éviter ou de minimiser de telles menaces. La Convention reconnaît que des investissements importants sont nécessaires pour conserver la diversité biologique. Cependant, elle fait valoir que la conservation de la biodiversité nous assure de nombreux avantages environnementaux, économiques et sociaux. Parmi les nombreux points abordées par la convention, on peut citer: • • • • • • • •

Les mesures et les incitations à la conservation et à l'utilisation durable de la diversité biologique La réglementation de l'accès aux ressources génétiques L'accès et le transfert de technologie, y compris la biotechnologie La coopération scientifique et technique L’analyse d'impact L'éducation et la sensibilisation du public La garantie de ressources financières L'établissement de rapports nationaux sur les efforts visant à mettre en œuvre les engagements du traité et la Turquie n’a jamais respecté.

Je pense que l'homme est à la fois créature et créateur de son environnement, qui assure sa subsistance physique et lui offre la possibilité d'un développement intellectuel, moral, social et spirituel. Dans la longue et laborieuse évolution de la race humaine sur la terre, le moment est venu où, grâce aux progrès toujours plus rapides de la science et de la technique, l'homme a acquis le pouvoir de transformer son environnement d'innombrables manières 7


et à une échelle sans précédent. Les deux éléments de son environnement, l'élément naturel et celui qu'il a lui-même créé, sont indispensables à son bienêtre et à la pleine jouissance de ses droits fondamentaux, y compris le droit à la vie même. Et la a protection et l'amélioration de l'environnement est une question d'importance majeure qui affecte le bien-être des populations et le développement économique dans le monde entier ; elle correspond au vœu ardent des peuples du monde entier, et constitue un devoir pour tous les gouvernements.

L'homme doit constamment faire le point de son expérience et continuer à découvrir, à inventer, à créer et à avancer. Aujourd'hui, ce pouvoir qu'a l'homme de transformer le milieu dans lequel il vit, s'il est utilisé avec discernement, peut apporter à tous les peuples les bien-faits du développement et la possibilité d'améliorer la qualité de la vie. Utilisé abusivement ou inconsidérément, ce même pouvoir peut causer un mal incalculable aux êtres humains et à l'environnement. Les exemples de dommages, de destruction et de dévastation provoqués par l'homme se multiplient sous nos yeux en de nombreuses régions du globe : on constate des niveaux dangereux de pollution de l'eau, de l'air, de la terre et des êtres vivants ; des perturbations profondes et regrettables de l'équilibre écologique de la biosphère ; la destruction et l'épuisement de ressources irremplaçables ; enfin de graves déficiences qui sont dangereuses pour la santé physique, mentale et sociale de l'homme, dans l'environnement qu'il crée, et en particulier dans son milieu de vie et de travail.

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A ce sujet, lors du Colloque de l’Académie des Sciences Gilles Escarguel1 a déclaré que « La biodiversité n’est pas un long fleuve tranquille ! » . Mais avant que Héraclite avait interprété le Mythe de Kora Moré( la serpente noire aveugle » notre fleuve sacré n’était jamais tranquille. « Sur les continents, comme dans les océans, les êtres vivants se répartissent en communautés de reproduction – les espèces – au sein desquelles ils partagent divers attributs, (génétiques, physiologiques, écologiques, éthologiques…) » explique Gilles Escargue « qui forgent leur identité biologique et leur singularité historique. À l’échelle de la biosphère, ces êtres vivants ne sont pas distribués de façon homogène et uniforme ; l’environnement physico-chimique, et notamment le climat, jouent ici un rôle central, via les caractéristiques biologiques de chaque espèce, fruit de leur évolution, déterminant leur degré d’adaptation au milieu. Ce constat, posé dès la fin du XVIII ème siècle, a donné naissance à un des concepts les plus féconds que la science contemporaine ait développés : la biodiversité. Loin d’être figée, la biodiversité a considérablement fluctué au cours du temps. Temps « court » de la naissance, vie et mort des individus, mais aussi temps « profond » de l’apparition, évolution et extinction des espèces peuplant notre planète. La biodiversité a une histoire ; la biodiversité est une Histoire, longue de près de 4 milliards d’années, mouvementée, faite de crises et de reconquêtes, sur fond de catastrophes naturelles et de changements globaux – une Histoire dont l’Humanité, par ses activités, s’apprête aujourd’hui à écrire une nouvelle page. » Bien que « de près de 4 milliards d’années, mouvementée » nous avons seulement des connaissances sur les espèces qui vont disparaître avec les barrages sur Munzur. Nous savons que ans les pays en voie de développement, la plupart des problèmes de l'environnement sont causés par le sousdéveloppement. Des millions d'hommes continuent à vivre bien au-dessous des niveaux les plus bas compatibles avec une vie humaine décente, privés du nécessaire en ce qui concerne l'alimentation, le vêtement, le logement, l'éducation, la santé et l'hygiène. En conséquence, les pays en voie de développement doivent orienter leurs efforts vers le développement, en tenant compte de leurs priorités et de la nécessité de préserver et d'améliorer l'environnement. Dans les pays industrialisés, les problèmes de l'environnement sont généralement liés à l'industrialisation et au développement des techniques. Dans le même but, les pays industrialisés doivent s'efforcer de réduire l'écart entre eux et les pays en voie de développement. 1

Gilles Escarguel,Université Claude Bernard Lyon 1, Villeurbanne

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L'augmentation naturelle de la population pose sans cesse de nouveaux problèmes pour la préservation de l'environnement et il faudrait adopter, selon que de besoin, des politiques et des mesures appropriées pour régler ces problèmes. Les hommes sont ce qu'il y a de plus précieux au monde. C'est le peuple qui anime le progrès social et crée la richesse de la société, qui développe la science et la technique et, par son dur travail, transforme sans cesse l'environnement. Avec le progrès social et l'évolution de la production, de la science et de la technique, l'aptitude de l'homme à améliorer son environnement se renforce chaque jour. Nous sommes à un moment de l'histoire où nous devons orienter nos actions dans le monde entier en songeant davantage à leurs répercussions sur l'environnement. Nous pouvons, par ignorance ou par négligence, causer des dommages considérables et irréversibles à l'environnement terrestre dont dépendent notre vie et notre bien-être. En revanche, en approfondissant nos connaissances et en agissant plus sagement, nous pouvons assurer, à nousmêmes et à notre postérité, des conditions de vie meilleures dans un environnement mieux adapté aux besoins et aux aspirations de l'humanité. Il existe de larges perspectives pour l'amélioration de la qualité de l'environnement et la création d'une vie heureuse. II faut de l'enthousiasme, mais aussi du sangfroid ; des efforts intenses, mais aussi une action ordonnée. Pour jouir librement des bienfaits de la nature, l'homme doit tirer parti de ses connaissances en vue de créer, en coopération avec elle, un environnement meilleur. Défendre et améliorer l'environnement pour les générations présentes et à venir est devenu pour l'humanité un objectif primordial, une tâche dont il faudra coordonner et harmoniser la réalisation avec celle des objectifs fondamentaux déjà fixés de paix et de développement économique et social dans le monde entier. Pour que ce but puisse être atteint, il faudra que tous, citoyens et collectivités, entreprises et institutions, à quelque niveau que ce soit, assument leurs responsabilités et se partagent équitablement les tâches. Les hommes de toutes conditions et les organisations les plus diverses peuvent, par les valeurs qu'ils admettent et par l'ensemble de leurs actes, déterminer l'environnement de demain. Les autorités locales et les gouvernements auront la responsabilité principale des politiques et de l'action à mener en matière d'environnement dans les limites de leur juridiction. Une coopération internationale n'est pas moins nécessaire pour réunir les ressources nécessaires afin d'aider les pays en voie de développement à s'acquitter de leurs responsabilités dans ce domaine. Un nombre toujours plus élevé de problèmes d'environnement, de portée régionale ou mondiale ou touchant au domaine international commun, exigeront une coopération étendue entre les pays et une action de la part des organisations internationales dans l'intérêt de tous. La Conférence demande aux

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gouvernements et aux peuples d'unir leurs efforts pour préserver et améliorer l'environnement, dans l'intérêt des peuples et des générations futures. La question qui se pose, est savoir sur quels principes nous devons agir pour renverser la logique colonialiste de l’Etat occupant turc au Kurdistan Nord et à Dersim, alors que la Turquie est membre du Consei de Sécurité de l’ONU et Etat colonialiste occupant le Kurdistan Nord ? Je pense que l'homme a un droit fondamental à la liberté, à l'égalité et à des conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être. Il a le devoir solennel de protéger et d'améliorer l'environnement pour les générations présentes et futures. A cet égard, les politiques qui encouragent ou qui perpétuent l'apartheid, la ségrégation raciale, la discrimination, les formes, coloniales et autres, d'oppression et de domination étrangères sont condamnées et doivent être éliminées. Les ressources naturelles du globe, y compris l'air, l'eau, la terre, la flore et la faune, et particulièrement les échantillons représentatifs des écosystèmes naturels, doivent être préservés dans l'intérêt des générations présentes et à venir par une planification ou une gestion attentive selon que de besoin. Pour comprendre comment la population vit ces futurs barrages, il faut remonter la source du Munzur. Direction Ovacık, second pôle du département par sa population, où la rivière jaillit des montagnes. Contrairement à Dersim où le taux chômage en 2008 était presque deux fois supérieur à la moyenne nationale, la bourgade est en plein essor économique. Située sur la rive du Munzur, une entreprise spécialisée dans l’élevage de poisson est menacée d’immersion par la montée des eaux. Mais les patrons « préfèrent penser que l’avenir leur portera chance » : soixante dix nouvelles cuves sont en construction pour développer l’entreprise. La vérité c’est que cette politique colonialiste de l’Etat turc menace à Dersim comme dans les autres colonies dans le monde. Selon Denis Couvet2 « des espèces mondialement menacées sont présentes en France, surtout dans les DOM-TOM. La dynamique des espèces communes, qui constituent le « corps » des écosystèmes, a été caractérisée essentiellement chez les oiseaux, en dénombrant chaque année, depuis 1989 en France, l’abondance de chaque espèce, sur quelques 10 000 sites choisis aléatoirement. On observe un déclin général, touchant préférentiellement les espèces spécialistes d'un habitat, 2

Muséum National d’Histoire Naturelle Paris

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entraînant une homogénéisation des communautés, dont les conséquences fonctionnelles restent à évaluer. On constate par ailleurs un déplacement des aires de distribution vers le Nord, de 100 km en 20 ans, soit la moitié de l’attendu, en réponse au réchauffement constaté. Les aires de distribution des espèces devraient se contracter en réponse au réchauffement climatique, augmentant les risques d’extinction des espèces. Cette prédiction est appuyée par les observations des deux dernières décennies en Europe : les espèces dont l’aire de distribution devrait se réduire sont plus nombreuses (75 %) et déclinent, alors que celles dont l’aire devrait s’accroître (25 %) sont stables, la différence de dynamique entre ces deux groupes d’oiseaux étant corrélée à l’intensité du réchauffement. La généralisation à d’autres groupes de ce dispositif d’observation des oiseaux, selon des méthodes scientifiques rigoureuses, sur des sites couvrant l’ensemble du territoire, est nécessaire afin de caractériser l’état des chaînes trophiques, des écosystèmes, des services écosystémiques. ». Par conséquence nous voyons l’Etat de Santé de Munzur causé par les barrages/ ; La question qui se pose est de savoir comment « Dynamique du vivant, « la diversité biologique et transmission de maladies infectieuses » produira des conséquences terribles pour la santé de notre Peuple face à cette transformation forcé de la nature de Munzur ? Je pense les idées scientifiques de Jean-François Guégan3 sont très importentes pour l’avenir de Munzur et pour notre pays Dersim. Jean François

Guégan pense que « Comme souvent en biologie, la forme et la taille des organismes les plus grands, et donc les plus visibles, conditionnent les modes de 3

Institut de Recherche pour le Développement, Montpellier et École des Hautes Études en Santé Publique, Paris

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pensée et les actions de recherche qui en découlent. Les micro-organismes, dont certains peuvent se révéler être de redoutables envahisseurs responsables de maladies infectieuses chez leurs hôtes, occupent pourtant une place essentielle, sinon majeure, dans la dynamique du vivant. A l’aide d’exemples empruntés à la littérature récente, je montrerai, dans un premier temps, quelle peut être l’importance des organismes parasites sensu lato dans l’organisation des communautés locales. Constituants à part entière des écosystèmes, les organismes parasites sont, en dehors de leur extraordinaire diversité spécifique, essentiels au maintien des équilibres dynamiques du vivant. Je discuterai, ensuite, du rôle fonctionnel joué par la diversité biologique dans la transmission d’organismes infectieux en l’illustrant de quelques exemples de maladies émergentes comme la fièvre du Nil occidental, la maladie de Lyme ou de pathologies virales moins connues. Pourvoyeuse de nouveaux agents pathogènes émergents, la diversité biologique peut aussi se rendre utile en fournissant aux écosystèmes une plus grande protection contre l’invasion infectieuse. Je conclurai cette présentation en abordant le sujet d’une meilleure articulation souhaitable entre la veille, la surveillance et la recherche pour comprendre et donc mieux anticiper les nouveaux risques sanitaires infectieux. » Ce n’est pas seulement rôle fonctionnel joué par la diversité biologique dans la transmission d’organismes infectieux, mais le changement radical dans la vie économique de Dersim. A Ovacık, il y a aussi une fabrique d’eau potable, celle du Munzur, une nouvelle entreprise spécialisée dans le fromage de chèvre et bientôt… une route pour relier la ville à Sivas, dans le département voisin. Une nouvelle voie commerciale en prévision des futurs barrages ? Le journaliste de Dersim Hayat n’hésite pas à faire le rapprochement : « La montée des eaux couperait l’unique voie routière, au bord de la rivière Munzur, reliant Dersim centre à Ovacık ». Et il rappelle des faits similaires passés : « Dans les années 1990, l’état major de l’armée turque avait annoncé que les voies de communications entre Dersim et les autre villes de la province seraient submergées par l’eau des barrages. » Une réponse aux affrontements dans les années 1990 entre l’armée turque et l’organisation kurde PKK. Les acteurs associatifs remontent même jusqu’en 1931, quand l’armée turque soumet un rapport au gouvernement central suggérant que « les vallées soient inondées afin de liquider et d’effacer Dersim ». En cause : la résistance de Dersim , à l’Etat turc. Le journaliste raconte : « La “turquisation” n’a pas fonctionné à Dersim. Les langues et les cultures vivaient. La population n’a accepté aucune oppression de la République turque. »

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La résistance du peuple de Dersim contre l’ Etat colonialiste turc de 1907 à 1938, entraînant de centaines de milliers de morts, seulement de guerre depuis les années 1980 entre l’Etat et le PKK, 45000 morts qui a forcé a la déportation les trois quarts de la population de la province, de Dersim est aujourd’hui une région en état de traumatisme. Selon Marie Le Ray, chercheuse à European journal of turkish studies (EJTS), l’ampleur de la lutte contre les barrages n’est donc pas étonnante : « Ce projet de construction des barrages est présenté par les associations de pays comme la dernière tentative en date visant à l’anéantissement de Dersim. Cette grille de lecture s’appuie sur un discours pré-existant, Dersim aussi bien que parmi les migrants, et a, de fait, une large résonance. » Je pense que l'homme a une responsabilité particulière dans la sauvegarde et le sage gestion du patrimoine constitué par la flore et la faune sauvages et leur habitat, qui sont aujourd'hui gravement menacés par un concours de facteurs défavorables. La conservation de la nature, et notamment de la flore et de la faune sauvages, doit donc tenir une place importante dans la planification pour le développement économique. En travaillant sur « La biodiversité des environnements extrêmes » Yvon Le Maho4 pense que « L’un des aspects les plus fascinants de la biodiversité est la multiplicité des adaptations des organismes vivants à des conditions environnementales les plus variées, souvent extrêmes comme pour la faune et la 4

Membre de l’Académie des sciences, Département d’Écologie, Physiologie et ÉthologieInstitut pluridisciplinaire Hubert Curien CNRS et Université de Strasbourg

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flore des fosses abyssales, les bactéries des sources d’eau à très haute température, la végétation et la faune des zones arides. Les phases du cycle annuel de nombreuses espèces impliquent une remarquable capacité à faire face à des contraintes extrêmes, telles que celles des oiseaux et mammifères marins plongeant à de grandes profondeurs, entreprenant de très longs jeûnes pour se reproduire ou migrer ou encore migrant au dessus des plus hauts sommets de notre planète. La variabilité dans la capacité des animaux ou des plantes à faire face à des contraintes extrêmes dépend évidemment de nombreux facteurs. Il en est ainsi de la taille. Ainsi, en raison d’un métabolisme par unité de masse corporelle environ 25 plus élevé, un oiseau mouche incapable de s’alimenter ne peut survivre à 24 heures de jeûne sans entrer en hypothermie alors qu’un manchot empereur est capable de jeûner pendant 120 jours pour mener à bien l’incubation de son oeuf. En outre, la notion d’environnement extrême est souvent d’essence anthropocentrique. Il en est ainsi pour la vision de pauvre animal arrivant à peine à survivre à des conditions de froid extrême véhiculée par le film à grand succès « La Marche de l’Empereur ». Ce qui menace le plus cette espèce bien adaptée au froid, c’est au contraire les conséquences des activités humaines à travers la surexploitation des ressources marines à la base de son alimentation et/ou bien un réchauffement de la mer de quelques dixièmes de degrés qui suffirait à réduire la production de ces ressources. » Sans doute les ressources non renouvelables du globe doivent être exploitées de telle façon qu'elles ne risquent pas de s'épuiser et que les avantages retirés de leur utilisation soient partagés par toute l'humanité. Alors « Quelle biodiversité pour quel fonctionnement des écosystèmes ? » pose la question essentielle Stephan Hättenschwiler5 Pour lui « Les processus écologiques comme la production de biomasse ou la minéralisation des, nutriments reposent sur l’activité de la multitude d’organismes qui constitue les écosystèmes. Ces processus sont à l’origine de services écosystémiques comme la productivité primaire ou la fertilité des sols, qui sont fondamentaux pour les sociétés humaines. Le taux de perte actuel des espèces, le plus élevé dans l’histoire de la Terre, peut avoir des conséquences négatives sur le fonctionnement des écosystèmes et les services qu’ils rendent à l’humanité. De nombreuses recherches réalisées en écologie ces dernières années ont pu mettre en évidence un effet positif du nombre d’espèces sur le fonctionnement de l’écosystème, mais les mécanismes sousjacents sont encore mal connus. Il semble cependant que, plus que le nombre d’espèces, ce soit l’identité des espèces et leurs caractéristiques fonctionnelles qui jouent un rôle prédominant. Dans la forêt amazonienne par exemple, le recyclage du carbone et des nutriments est 5

Centre d’Écologie Fonctionnelle et ÉvolutiveMontpellier

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fortement lié à certaines caractéristiques spécifiques des espèces d’arbre et à eurs effets sur les organismes du sol. Comprendre au travers de quelles caractéristiques, et par quelles voies des espèces influencent les processus à l’échelle de l’écosystème est une question de recherche cruciale pour la société. Ce type d’étude permet (1) d’établir les bases mécanistiques de l’effet de la biodiversité sur le fonctionnement des écosystèmes et (2) de modéliser et prédire les conséquences de l’érosion de la biodiversité sur les services des cosystèmes. » Les rejets de matières toxiques ou d'autres matières et les dégagements de chaleur en des quantités ou sous des concentrations telles que l'environnement ne puisse plus en neutraliser les effets doivent être interrompus de façon à éviter que les écosystèmes ne subissent des dommages graves ou irréversibles. La lutte légitime des peuples de tous les pays contre la pollution doit être encouragée. Mon peuple résıste pour sauver Munzur qui est tres sacré pour nous, il est si propre, si calme dans son chemin.

Les Etats devront prendre toutes les mesures possibles pour empêcher non seulement la pollution des mers par des substances qui risquent de mettre en danger la santé de l'homme, de nuire aux ressources biologiques et à la vie des organismes marins, de porter atteinte aux agréments naturels ou de nuire à d'autres utilisations légitimes de la mer, mais aussi pour sauver Munzur Sacré Le développement économique et social est indispensable si l'on veut assurer un environnement propice à l'existence et au travail de l'homme et créer 16


sur la terre des conditions nécessaires à l'amélioration de la qualité de la vie. Au cœur de la région se situe la chaîne des montagnes de Munzur dont le sommet le plus élevé atteint une altitude de 3462 mètres. La rivière qui traverse la région porte le même nom. Dersim présente une bio-diversité exceptionnelle. Vu la richesse de la région, le 21 décembre 1971 l’Etat turc déclare la Vallée de la rivière Munzur « premier parc nationale de la Turquie » et il est actuellement le plus grand du pays. La vallée a une longueur de 80 kilomètres. Avec les Montagnes de Munzur elle abrite 1518 espèces de plantes dont 227 n’existent qu’en Turquie et 43 uniquement dans la vallée de Munzur. La richesse naturelle de la région est comparable à celle d’un pays entier.. Dans la Vallée et sur la chaîne des Montagnes de Munzur nous trouvons également une faune très riche. On y trouve les animaux en voie de disparition comme l’ours brun, le chat sauvage, le mouton sauvage, la chèvre de montagne aux cornes crocs ; dans la rivière il existe des truites dont la particularité est d’avoir des écailles rouges. Dersim est certes une région très riche, mais sa richesse ne la met pas à l’abri d’une éventuelle catastrophe. La région est cette fois-ci menacée d’une catastrophe écologique. Car l’Etat turc projette de construire dans la Vallée de Munzur huit barrages et des centrales hydroélectriques. Que peut apporter la construction de ces barrages à la région? Ils fourniront 0,97 % de la production totale d’électricité de la Turquie. Quelles seront les conséquences?

Premièrement, 84 villages seront noyés sous les eaux des barrages et cela causera des dommages irréparables à la région qui a déjà perdu une grande partie de sa population à cause de la politique de dépeuplement pratiquée par l’Etat turc pendant sa guerre contre les maquisards kurdes qui s’est intensifiée dans les années 1990. Deuxièmement, la région sera divisée en deux et donc 17


perdra son unité géographique; au risque de créer de nombreux problèmes économiques et culturels. Troisièmement, les changements climatiques radicaux se produiront et les plantes endémiques, les animaux rares perdront leur habitat, donc disparaîtront. Finalement, la Vallée de Munzur qui s’est formée en 42 millions d’années, selon les spécialistes, sera complètement détruite. D’après les opinions des experts un barrage a une vie moyenne de 70 ans et au bout de cette durée il ne nous restera que des ruines en lieu et place de la beauté paradisiaque de la vallée.

Les déficiences de l'environnement imputables à des conditions de sousdéveloppement et à des catastrophes naturelles posent des problèmes graves, et le meilleur moyen d'y remédier est d'accélérer le développement par le transfert d'une aide financière et technique substantielle pour compléter l'effort national des pays en voie de développement et l'assistance fournie en tant que de besoin. Pour les pays en voie de développement, la stabilité des prix et une rémunération adéquate pour les produits de base et les matières premières sont essentielles pour la gestion de l'environnement, les facteurs économiques devant être retenus au même titre que les processus écologiques.

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Les politiques nationales d'environnement devraient renforcer le potentiel de progrès actuel et futur des pays en voie de développement, et non l'affaiblir ou faire obstacle à l'instauration de meilleures conditions de vie pour tous. Les Etats et les organisations internationales devraient prendre les mesures voulues pour s'entendre sur les moyens de parer aux conséquences économiques que peut avoir, au niveau national et international, l'application de mesures de protection de l'environnement.

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II faudrait dégager des ressources pour préserver et améliorer l'environnement, compte tenu de la situation et des besoins particuliers des pays en voie de développement et des dépenses que peut entraîner l'intégration de mesures de préservation dé l'environnement dans la planification de leur développement, et aussi de la nécessité de mettre à leur disposition à cette fin, sur leur amande, une assistance internationale supplémentaire, aussi bien technique que financière. Afin de rationaliser la gestion des ressources et ainsi d'améliorer l'environnement, les Etats devraient adopter une conception intégrée et coordonnée de leur planification du développement, de façon que leur développement soit compatible avec la nécessité de protéger et d'améliorer l'environnement dans l'intérêt de leur population.

Une planification rationnelle est un instrument essentiel si l'on veut concilier les impératifs du développement et la nécessité de préserver et d'améliorer l'environnement. II convient de recourir à la science et à la technique, dans le cadre de leur contribution au développement économique et social, pour déceler, éviter ou limiter les dangers qui menacent l'environnement et résoudre les problèmes qu'il pose, et d'une manière générale pour le bien de l’humanité.Il est essentiel de dispenser un enseignement sur les questions 20


d'environnement aux jeunes générations aussi bien qu'aux adultes, en tenant dûment compte des moins favorisés, afin de développer les bases nécessaires pour éclairer l'opinion publique et donner aux individus, aux entreprises et aux collectivités le sens de leurs irresponsabilités en ce qui concerne la protection et l'amélioration de l'environnement dans toute sa dimension humaine. Il est essentiel aussi que les moyens d'information de masse évitent de contribuer à la dégradation de l'environnement et, au contraire, diffusent des informations de caractère éducatif sur la nécessité de protéger et d'améliorer l'environnement afin de permettre à l'homme de se développer à tous égards.

Les questions internationales se rapportant à la protection et à l'amélioration de l'environnement devraient être abordées dans un esprit de coopération par tous les pays, grands ou petits sur un pied d'égalité. Une coopération par voie d'accords multilatéraux ou bilatéraux ou par d'autres moyens appropriés est indispensable pour limiter efficacement, prévenir, réduire et éliminer les atteintes à l'environnement résultant d'activités exercées dans tous les domaines, et ce dans le respect de la souveraineté et des intérêts de tous les Etats. Les scientifiques du réseau international IBISCA (Inventaire de la biodiversité du sol à la canopée), lancé par l'association Pro Natura International, regroupe 12 pays dont la France, le Canada, l'Australie ou encore 21


le Brésil. La Comté abrite en effet une grande richesse floristique avec, par exemple, le lys martagon (espèce protégée), la céphalanthère rouge, orchidée beaucoup plus rare et les géraniums noueux, espèce montagnarde qui atteint dans cette forêt, sa limite nord de répartition sur le territoire national. Zone de refuge pour la grande faune sauvage (chevreuils et sangliers), la forêt de Comté est aussi un espace de nidification pour l'avifaune (bondrée apivore, milan royal...), ou encore un lieu d'abri pour les rongeurs, les batraciens tels que le crapaud sonneur à ventre jaune, espèce rare en France et plus généralement menacée en Europe.

L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) a déclaré qu’il publierait tout au long de l’année 2010 un portrait exhaustif de chacune des 365 espèces animales, végétales ou d’oiseaux les plus menacées de disparition. « Il est temps que les gouvernements envisagent sérieusement de sauver des espèces et s’assurent que la conservation soit une priorité de leur agenda l’an prochain, dans la mesure où nous manquons réellement de temps » a déclaré Jane Smart, un expert en biodiversité pour l’UICN.

« Les preuves scientifiques d’une crise grave d’extinction d’espèces sont de plus en plus nombreuses » ajouté Jane Smart. Un tiers des 1,8 millions espèces animales et végétales identifiées dans le monde sont confrontées à une menace croissante d’extinction. Les experts estiment que près de 6 à 12 millions d’espèces supplémentaires sont encore inconnues de la science. Depuis le 1er Janvier 2010, cette nouvelle année ayant été déclarée Année de la Biodiversité par les Nations Unies, l’UICN s’appuiera sur les dernières études scientifiques réalisées pour sa Liste Rouge annuelle des espèces menacées de la

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faune et de la flore, pour faire un portrait détaillé des espèces du jour potentiellement condamnées. .

« Nous commencerons avec certaines des espèces les plus connues avant de nous intéresser aux plantes, aux champignons, aux invertébrés et dont certaines espèces moins charismatiques » que les ours polaires, indique le groupe intergouvernemental.

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L’ours polaire, dont le destin est lié à la mer de glace Arctique qui fond de plus en plus chaque été, sera la première espèce décrite de l’année 2010 et aura son jour le 1er Janvier.

Ainsi, le manchot empereur, le renard arctique, le poisson rouge, le koala d’Australie et presque toutes les espèces de saumons sont menacées de disparaître prochainement.

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D’après l’UICN, « les êtres humains font partie intégrante de la biodiversité et ont le pouvoir de la protéger ou de la détruire. Actuellement, nos activités détruisent le monde naturel à un taux sans précédent à travers le changement climatique, la destruction de l’habitat, la surproduction agricole, la pollution et bien d’autres activités. Nous nous dirigeons vers une crise mondiale d’extinction des espèces ».

« Mais il est de plus en plus reconnu que la diversité biologique est la base d’un développement durable et du bien-être humain. Des ressources naturelles correctement gérées rendent service aux communautés, encouragent la croissance économique et aident à réduire la pauvreté. Une biodiversité en bonne santé est essentielle pour nous aider à nous adapter à des conditions changeantes dont le changement climatique. Cette reconnaissance doit rapidement se transformer en actions de conservation ». « La perte de la biodiversité n’est pas comme le changement climatique dont nous pouvons voir et sentir les impacts : l’augmentation du niveau de la mer et des tempêtes. Dans le monde occidental, nous sommes devenus si éloignés de la biodiversité que nous avons oublié à quel point nous l’utilisons dans nos vies quotidiennes, depuis la nourriture que nous mangeons jusqu’aux vêtements que nous portons, en passant pas les médicaments que nous utilisons » Alors que la menace qui pèse sur la biodiversité est aujourd'hui une préoccupation internationale, l'Onu a fait de 2010 l'année de la mobilisation en faveur de cette richesse fragilisée par la pollution, la déforestation, l'agriculture intensive ou l'urbanisation, plus particulièrement sur les barrages quı ont été

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construıts sur Munzur au moment ou L'Organisation des Nations unies a officiellement lancé le 11 janvier l'Année internationale de la biodiversité pour souligner la dévastation des espèces du monde. "Au cours du demi-siècle passé, les activités humaines ont provoqué un déclin sans précédent de la diversité biologique", a affirmé le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (ONU), Ban Ki-moon, dans un message rendu public à cette occasion. "Une grande variété de produits et de services environnementaux que nous considérons comme admis sont menacés, avec des conséquences profondes et nuisibles pour les écosystèmes, les économies et la vie", a-t-il indiqué. Déjà en 2002, les dirigeants du monde s'étaient engagés à ralentir à l'horizon 2010 le déclin alarmant de la diversité biologique sur la Terre constaté depuis une cinquantaine d'années, a rappelé M. Ban. Cette promesse, prise en compte dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), "ne sera pas atteinte", a-t-il constaté. Mais l’ONU, n’a pas fait le nécessaire sur la disparition de 31% de nos terres qui sont restées sous les eaux des barrages. Malgré cela M. Ban Ki Moon, a appelé dans son message à des mesures telles qu'une gestion améliorée en faveur de la durabilité des forêts qui peuvent stocker le carbone et protéger les bassins hydrographiques, et la préservation améliorée des récifs de corail pour qu'ils continuent à atténuer l'impact des tempêtes sur les littoraux.

C'est pour faire prendre conscience de "la crise imminente et presser le monde d'agir" que l'Assemblée générale de l'ONU a désigné 2010 comme l'Année internationale de la biodiversité, a expliqué le responsable en chef de l'ONU. En septembre 2010, a révélé M. Ban, Ki Moon, l'Assemblée générale tiendra une réunion spéciale de haut niveau pour préparer le Sommet sur la biodiversité à Nagoya (Japon), prévu en octobre, et chargé d'adopter un nouveau plan

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stratégique pour la mise en oeuvre de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique. La Convention, entrée en vigueur fin 1993, a été ratifiée par tous les États représentés à l'ONU. "Nous devons aller à l'encontre de la perception selon laquelle les gens sont déconnectés de notre environnement naturel, a-t-il poursuivi, nous devons approfondir la compréhension de l'importance de la perte de la biodiversité". "En 2010, j'appelle chaque pays et chaque citoyen de notre planète à s'engager dans une alliance mondiale pour protéger la vie sur la Terre", a-t-il lancé. "La biodiversité, c'est la vie, la biodiversité, c'est notre vie", a rappelé M. Ban. La chancelière allemande Angela Merkel, pour sa part, a donné lundi le coup d'envoi à "l'Année internationale de la biodiversité", appelant à des mesures immédiates pour éviter l'extinction de nombreuses espèces animales et végétales.

"Nous avons besoin d'un changement radical, avec effet immédiat, pas un jour ou l'autre", a déclaré la chancelière dans un discours à Berlin marquant 2010 comme année de l'ONU de la biodiversité.

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Les activités humaines provoquent "un taux de disparition des espèces de 100 à 1.000 fois supérieur au taux naturel, qui a des conséquences sérieuses pour nous tous", a affirmé Mme Merkel. Lors du sommet de la Terre de Johannesburg, en 2002, les dirigeants de la planète s'étaient engagés à "ralentir significativement" d'ici 2010 l'érosion de la biodiversité. Mais, a reconnu Mme Merkel, "nous ne parviendrons pas à respecter cet objectif".

Nous pensons que malgré le projet de déclaration politique présenté par le Président du Sommet Déclaration de Johannesburg sur le développement durable* la crise du système capitaliste et impérialiste a bouleversé l’évolution des choses d’une part et les firmes allemandes ont continué a renversé la logique du développement dit durable :

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« 1. Nous, représentants des peuples du monde, réunis à l’occasion du Sommet Mondial pour le développement durable à Johannesburg (Afrique du Sud) du 2 au4 septembre 2002, réaffirmons notre engagement en faveur du développement durable. 2. Nous nous engageons à rendre la société mondiale plus humaine, plus secourable et plus respectueuse de la dignité de chacun. 3. Au début du présent Sommet, les enfants du monde nous ont expliqué avec simplicité et clarté que l’avenir leur appartenait et nous ont tous mis au défi de leur léguer, grâce à notre action, un monde débarrassé des fléaux que sont la pauvreté, la dégradation environnementale et les modes de développement non viables. 4. Après avoir écouté ces enfants qui représentent notre avenir collectif, nous qui sommes venus des quatre coins de la planète, riches d’expériences diverses, nous nous sommes sentis unis et mus par le sentiment profond qu’il nous appartenait de leur redonner des raisons d’espérer. 5. À ce titre, nous assumons notre responsabilité collective, qui est de faire progresser, aux niveaux local, national, régional et mondial, le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement, piliers interdépendants et complémentaires du développement durable. 6. Depuis le continent africain, berceau de l’humanité, nous assumons, au moyen du Plan d’application du Sommet mondial pour le développement durable et de la présente Déclaration, notre responsabilité les uns envers les autres, envers tous les êtres vivants et envers les générations futures. »

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Contrairement aux déclarations vides « Une délégation d’hommes d’affaires allemands, représentant 15 entreprises allemandes du land de BadenWertemberg se rendront en Azerbaïdjan du 25 au 27 septembre 2005. La délégation, composée de représentants des entreprises (entre autres) Fischer”, “Protek”, “Sauter”, “Eyring”, “HiTecTrade”, ““Vacono”, “Barit”, “Dürr”, “Layher”, “Wöhr” sera accompagnée de Horst Mehrlender, ministre délégué à l’économie du land de Baden-Wertemberg. Classée 20ème plus grande économie au monde par la banque mondiale par ses revenus et avec un poids démographique de 72 millions et une position géographique lui donnant accès à un marché de presque 1 milliard de consommateur, la Turquie offre de nombreux atouts grâce à une base industrielle solide et des perspectives de croissance dans de nombreux domaines. Sa position géographique en fait un pays de transit pour les projets internationaux dans le domaine du pétrole et le gaz et le pays sont devenu un « hub énergétique ». Grâce à de nombreux projets de construction d’oléoduc et de gazoducs entre les différents pays de la région, la Turquie pourrait devenir la quatrième plus grande source d'énergie d’Europe après la Norvège, la Russie et l'Afghanistan. Plusieurs secteurs ont été libéralisés (transports, électricité, transport aérien domestique, télécoms) et des autorités indépendantes de régulation ont été créées (télécoms, énergie, marchés publics). Ces réformes ont amorcé un processus de modernisation en profondeur de l'économie. La réforme du secteur bancaire et financier est en cours avec la restructuration des principaux établissements (788 filiales de banques publiques ont été fermées), la recapitalisation des deux plus grosses banques publiques et de certaines banques privées, et l’application des normes prudentielles internationales notamment pour les ratios de solvabilité. Bien que l'intervention de l'État dans le monde des affaires se soit considérablement réduite depuis 1985, les entreprises publiques représentent encore 5% du secteur non agricole. La Turquie s'est engagée dans un plan destiné à privatiser une grande partie de son secteur public, mais les progrès ont été lents en raison principalement des obstacles juridiques. Entre 1986 et octobre 2003, les privatisations ont procuré à l'État des recettes d'environ 11,2 milliards de dollars, dont 1,3 milliard provenant d'investisseurs étrangers, et les recettes totales (telles que les transferts aux sociétés et au Trésor et les augmentations de capital) ont atteint 11 milliards de dollars.

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Selon les chiffres de la Chambre allemande du commerce et de l'industrie (DIHK), 75 % des entreprises allemandes actives dans les nouveaux États membres prévoient d'y étendre leurs activités, tandis que 25 % de celles qui n'étaient pas présentes dans ces pays en mai 2004 ont soit établi des relations commerciales, soit investi ou prévu de le faire. 2 Alors que la taille de l'Allemagne tend à attirer l'attention, c'est l'Autriche qui a bénéficié le plus de l'arrivée des nouveaux États membres. Selon une étude publiée en 2006 par l'Institut autrichien de recherche économique (WIFO) , l'ouverture des pays de l'ex "bloc de l'Est" a contribué pour 3,5 % à l'augmentation du produit intérieur brut (PIB) en termes réels de l'Autriche entre 1989 et 2006. Selon l'étude, cette impulsion a contribué à créer quelque 77 000 nouveaux emplois en Autriche. Pour l'avenir, l'étude de WIFO3 indique que l'Autriche continuera à bénéficier de la poursuite de l'intégration : son PIB devrait croître à un taux supplémentaire de 31


0,2 % par an au cours des 10 prochaines années. À la suite de l'adhésion à l'UE des pays de l'Europe centrale et orientale, l'Autriche devrait pouvoir se réjouir de la création de quelque 3 000 emplois supplémentaires par an au cours de cette période. Ce taux de croissance est essentiellement alimenté par un appétit pour les produits autrichiens qui ne cesse de croîtres dans les nouveaux États membres. Les exportations autrichiennes en République tchèque, en Hongrie, en Slovaquie, en Slovénie et en Pologne ont quasi quadruplé entre 1993 et 2005, passant de 3 à 11,96 milliards d'euros. L'un des secteurs qui a connu un taux de croissance particulièrement élevé est l'agriculture et les produits alimentaires. En 2005, les exportations autrichiennes de produits agricoles et de produits alimentaires vers les nouveaux États membres ont augmenté de 20 %. D'autres branches de l'activité économique en Autriche ont directement bénéficié d'un accès aux marchés des nouveaux États membres : les banques autrichiennes, par exemple, ont une part de marché de 30 % en Europe centrale et orientale. Des 2,5 milliards d'euros que les banques autrichiennes ont réalisés à l'étranger en 2005, 1,4 milliard d'euros l'a été dans ces pays. Selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), organisation de référence en matière de biodiversité, près d'un quart de toutes les espèces vivantes, animales et végétales, pourrait disparaître d'ici le milieu du siècle sous la pression des activités humaines. Deux grandes conférences de l'ONU concernant la biodiversité sont programmées en 2010, la CITES, qui publie la "liste rouge" des espèces menacées interdites de commercialisation en mars à Doha (Qatar) et la 10e conférence de la Convention sur la diversité biologique (CBD) en octobre à Nagoya (Japon). L'Allemagne exerce actuellement la présidence de la CBD.

Alors Pourquoi parler de la biodiversité ?

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Oui, la biodiversité c’est la nature vivante, toute la nature, sur terre et sur mer, dans les villes et dans les champs, hommes et femmes compris. Avec leurs chiens, bassets ou colleys, leurs chats, persans ou de gouttière, leurs champs de blé, de riz ou de maïs.

Oui, la biodiversité c’est nous, êtres humains, cousins des chimpanzés, aussi nombreux que divers. Nous qui avons appelé biodiversité ce tissu vivant qui couvre et anime la planète, cette biosphère dont nous sommes l’un des fruits et dont nous dépendons, comme le petit enfant dépend de sa mère, la puce de son rat, la vache du paysan qui l’élève. La biodiversité, c’est aussi, c’est surtout un réseau d’interactions et d’interdépendances entre des milliards d’êtres vivants, des dizaines de millions d’espèces. Abeilles et bourdons qui, butinant les fleurs des champs et des vergers, les pollinisent, assurant ainsi la reproduction de ces espèces et, pour nous, une riche production de fruits; bactéries, protozoaires et quantité de petits mollusques ou crustacés qui, sur terre et dans les mers, décomposent les déchets 33


que produit la vie, dépolluant ainsi sols et eaux et contribuant à nourrir d’autres organismes, algues, plantes ou poissons. Dans ce réseau d’interactions, les uns mangent les autres car c’est ainsi que la vie procède pour se maintenir. Mais il y a aussi de la coopération, de l’entraide entre individus et espèces. Ainsi, les récifs coralliens qui abritent une grande diversité de mollusques, de crustacés et de poissons sont eux-mêmes constitués par une association intime, une symbiose, entre des polypes, sortes de méduses, et des microalgues. Et nous autres, êtres humains, ne sommes-nous pas une espèce sociale? Une espèce qui s’est développée grâce à son association durable avec nombre d’animaux et de plantes, grâce à cette biodiversité domestiquée à l’origine de la révolution agricole et de toute notre civilisation. Au cours des dernières décennies, le développement[1], source d'enrichissement, a largement bénéficié à l'humanité. Mais il s'est souvent fait au détriment de la diversité et de l'étendue des systèmes naturels ou, autrement dit, de la biodiversité[2]. Cette diminution de la biodiversité, qui concerne les écosystèmes, les espèces et les gènes, est préoccupante non seulement en raison de la valeur intrinsèque de la nature, mais aussi parce qu'elle engendre un déclin des "services écosystémiques" fournis par les systèmes naturels. Ces services sont la production de nourriture, de carburant, de fibres et de médicaments, la régulation du cycle de l'eau, de la composition de l'air et du climat, le maintien de la fertilité des sols et le cycle des éléments nutritifs. Ainsi, la préoccupation pour la biodiversité fait partie intégrante du développement durable. Elle soustend la compétitivité, la croissance et l'emploi et améliore les conditions de vie. La récente évaluation des écosystèmes pour le millénaire (EM)[3], lancée par le secrétaire général des Nations unies, souligne que la plupart de ces services sont en déclin, tant dans l'Union européenne que dans le monde. Le problème fondamental est qu'en exploitant le capital naturel de la Terre, nous mettons en péril la capacité des écosystèmes à pourvoir à la subsistance des générations futures. Nous pouvons inverser la tendance, mais uniquement en modifiant radicalement les politiques et les pratiques. L'Union européenne a pris des engagements significatifs à cet égard. Les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne ont convenu en 2001 de "mettre un terme à l'appauvrissement de la biodiversité [dans l'UE], objectif qui devrait être atteint d'ici 2010"[4] et de "remettre en état les habitats et les écosystèmes"[5]. En 2002, ils ont rejoint 130 dirigeants mondiaux en s'engageant en faveur d'une "réduction significative du pourcentage de perte de biodiversité [mondiale] d’ici 2010"[6]. Selon les sondages d'opinion, ces

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préoccupations pour la nature et la biodiversité sont largement partagées par les citoyens de l'Union européenne[7]. Au niveau communautaire, le cadre politique visant à enrayer la diminution de la biodiversité dans l'Union européenne est désormais largement en place. Les objectifs en matière de biodiversité sont, par exemple, intégrés dans la Stratégie en faveur du développement durable[8] et dans le partenariat de Lisbonne pour la croissance et l'emploi, ainsi que dans de nombreuses politiques environnementales et sectorielles. Une stratégie communautaire en faveur de la diversité biologique[9] a été adoptée en 1998, suivie en 2001 par des plans d'action[10]. La plupart des États membres ont également élaboré ou sont en train d'élaborer des stratégies et/ou plans d'action de ce type. Si d'importants progrès ont été réalisés et que les taux de diminution de la biodiversité présentent des premiers signes de ralentissement, le rythme et l'étendue de la mise en œuvre ont été insuffisants. Une grande partie de la biodiversité demeure fortement appauvrie et continue de décliner. Il est toujours possible d'atteindre l'objectif de 2010, mais à condition que l'Union européenne et les États membres en accélèrent la mise en œuvre.

La biodiversité dans l'Union européenne est soumise à deux menaces en particulier. Premièrement, celle de l'utilisation et du développement inconsidérés des sols. Les États membres ont notamment la responsabilité de concilier, par une meilleure planification, l'utilisation et le développement des sols avec la conservation de la biodiversité et le maintien des services écosystémiques. Deuxièmement, l'impact grandissant du changement climatique sur la biodiversité. Il renforce la nécessité impérieuse de prendre des mesures efficaces contre les émissions de gaz à effet de serre, au-delà des objectifs du protocole de Kyoto. Nous devons également soutenir l'adaptation de la biodiversité au changement climatique, tout en veillant à ce que cette adaptation et les mesures d'atténuation du changement climatique ne nuisent pas elles-mêmes à la biodiversité.

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À l'échelle planétaire, l'évolution n'est pas encourageante. Le risque de ne pas atteindre l'objectif global de 2010 est réel. L'Union européenne est coresponsable de cette situation. Notre style de vie repose pour une grande part sur les biens importés des pays en développement, dont la production et le transport accélèrent souvent la diminution de la biodiversité. Si nous voulons obtenir des résultats, nous devons asseoir notre crédibilité en protégeant la diversité biologique dans l'Union européenne tout en redoublant nos efforts pour protéger la biodiversité dans le monde par l'aide au développement, les relations commerciales et la gouvernance internationale. La présente communication décrit l'étendue du problème et analyse l'adéquation de la réponse apportée par l'Union européenne à ce jour. Elle passe ensuite en revue les principaux domaines d’intervention politique ainsi que les objectifs et les mesures permettant d'atteindre les objectifs de 2010 et de rétablir la biodiversité. Ceux-ci figurent sous la forme d'objectifs et de mesures spécifiques dans le "Plan d'action communautaire à l'horizon 2010 et au-delà" ci-joint. Ce plan s'adresse à la fois aux institutions communautaires et aux États membres, dont il définit les responsabilités respectives en vue de la coordination des mesures à prendre. Il est solidement étayé par une consultation des experts et du public, qui s'y sont montrés largement favorables. Enfin, enrayer la diminution de la biodiversité à l'horizon 2010 n'est pas une fin en soi. La Commission a l'intention de lancer un débat sur une vision à plus long terme du futur cadre politique: quel type de nature voulons-nous dans l'Union européenne et quel doit être le rôle de l'Union dans la préservation de la nature à l'échelon mondial ?

Pourquoi la biodiversité est-elle importante ? Quelle importance si nous provoquons l'extinction d'un nombre croissant d'espèces ? Le génie humain et la technologie ne peuvent-ils se substituer aux services écosystémiques perdus? La perte d'espèces et d'habitats naturels préoccupe de nombreuses personnes qui défendent le point de vue éthique selon lequel nous n'avons pas le droit d'agir sur le devenir de la nature. Plus concrètement, la nature est appréciée en tant que source de plaisir et d'inspiration. Bien que difficile à quantifier, cette appréciation est à la base d'une grande partie des activités touristiques et récréatives. D'un point de vue économique, la biodiversité bénéficie aux générations présentes et futures par l'intermédiaire des services écosystémiques. Ces services sont la production de nourriture, de carburant, de fibres et de médicaments, la régulation du cycle de l'eau, de la composition de l'air et du climat, le maintien 36


de la fertilité des sols et le cycle des éléments nutritifs. Il est malaisé d'attribuer une valeur monétaire précise à ces services partout dans le monde, mais on estime qu'ils représentent plusieurs centaines de milliards d'euros par an. Ils sous-tendent la croissance, l'emploi et le bien-être dans l'Union européenne. Dans les pays en développement, ils sont indispensables à la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. Pourtant, selon l'EM, environ deux tiers des écosystèmes du globe sont en déclin à cause de leur surexploitation et de la diminution de la diversité des espèces, qui garantit leur stabilité. Ce déclin se traduit notamment par la chute des ressources halieutiques, la diminution généralisée de la fertilité des sols, l'effondrement des populations de pollinisateurs et la réduction de la capacité de nos cours d'eau à retenir les inondations. Il y a une limite à la mesure dans laquelle le génie humain et la technologie peuvent se substituer à ces services naturels et, même lorsque c'est le cas, cette substitution coûte souvent plus cher que le maintien de la biodiversité. Une fois franchi un certain cap, il est souvent très difficile, voire impossible, de rétablir les écosystèmes. L'extinction est définitive. À terme, l’humanité ne peut pas survivre sans ces systèmes naturels. Qu'arrive-t-il à la biodiversité et pourquoi? Selon l'EM, les écosystèmes ont davantage souffert du morcellement dû aux hommes en Europe que sur les autres continents. Par exemple, 1 % à 3 % seulement des forêts d'Europe occidentale peuvent être considérées comme "non modifiées par l'homme". Depuis les années 1950, l'Europe a perdu plus de la moitié de ses zones humides et la plupart de ses terres agricoles à haute valeur naturelle. De nombreux écosystèmes marins de l'Union européenne sont dégradés. En ce qui concerne les espèces européennes, 42 % des mammifères indigènes, 43 % des oiseaux, 45 % des papillons, 30 % des amphibiens, 45 % des reptiles et 52 % des poissons d'eau douce sont menacés d'extinction. La plupart des grands stocks halieutiques marins se situent sous les limites biologiques de sécurité. Quelque 800 espèces végétales d'Europe sont menacées d'extinction totale. En outre, la diversité des formes de vie inférieures, notamment les invertébrés et les microbes, subit des modifications méconnues mais potentiellement significatives. De plus, des espèces autrefois courantes voient leur population décliner. Cette disparition d'espèces et ce déclin des populations s'accompagnent d'une diminution importante de la diversité génétique. La diminution de la biodiversité est encore plus alarmante au niveau planétaire[11]. Depuis la fin des années 1970, une partie de la forêt tropicale humide plus étendue que l'Union européenne a été détruite, principalement pour son bois, ses produits tels que l'huile de palme et les graines de soja, et pour 37


l'élevage de bétail. Une partie de la forêt d'une superficie équivalente à la France est détruite tous les trois ou quatre ans. D'autres écosystèmes, tels que les zones humides, les terres arides, les îles, les forêts tempérées, les mangroves et les récifs coralliens, subissent des pertes proportionnelles. Les taux d'extinction des espèces sont aujourd'hui environ 100 fois plus élevés que dans les enregistrements fossiles et cette tendance devrait encore s'accélérer, ce qui risque de provoquer une nouvelle "extinction massive" d'une ampleur inédite depuis la disparition des dinosaures. Pressions et facteurs causant la diminution de la biodiversité Les principaux facteurs et pressions sont bien connus. La principale pression est la fragmentation, la dégradation et la destruction de l'habitat, dues à un changement dans l'utilisation des sols découlant, entre autres, de la conversion et de l'intensification des systèmes de production, de l'abandon des pratiques traditionnelles (souvent favorables à la biodiversité), des constructions et des catastrophes, telles que les incendies. D'autres pressions importantes sont la surexploitation, la diffusion d'espèces allogènes envahissantes et la pollution. L'importance relative de ces pressions varie d'un endroit à l'autre et, bien souvent, plusieurs pressions agissent ensemble. À l'échelle de la planète, deux grands facteurs sont à l'origine de ces pressions: la croissance démographique et l'augmentation de la consommation par habitant. Ces facteurs devraient s'intensifier considérablement et renforcer ainsi les pressions qui s'exercent notamment sur les forêts tropicales, les autres écosystèmes tropicaux et les écosystèmes montagneux. Si ces facteurs pèsent moins fortement sur la diminution de la biodiversité dans l'Union européenne, diverses pressions devraient augmenter en Europe, par exemple les besoins en infrastructures de logement et de transport. À l'échelle planétaire, la mauvaise gouvernance et l'incapacité des économies traditionnelles à reconnaître la valeur économique du capital naturel et des services écosystémiques constituent d'autres facteurs importants. À ces facteurs s'ajoute le changement climatique, dont les effets sur la biodiversité sont déjà observables (modification de la répartition et des comportements migratoires et reproducteurs, par exemple). En Europe, les températures moyennes devraient connaître d'ici à 2010 une augmentation comprise entre 2°C et 6,3°C par rapport aux températures de 1990, ce qui aurait de profonds effets sur la biodiversité. Enfin, la mondialisation, y compris les relations commerciales européennes, intensifie la pression sur la biodiversité et les services écosystémiques dans les pays en développement et l'Union européenne, notamment en augmentant la 38


demande de ressources naturelles, en contribuant aux émissions de gaz à effet de serre et en facilitant la propagation des espèces allogènes envahissantes. Quelles mesures avons-nous déjà prises et quelle a été leur efficacité ? Ce chapitre fait le point sur la mise en œuvre de la stratégie communautaire et des plans d'action en faveur de la biodiversité. Ce faisant, il remplit l'obligation de faire rapport au Conseil et au Parlement. Il se fonde sur une évaluation de la politique en matière de biodiversité menée en 2003-2004[12] et prend en compte les développements ultérieurs. La politique communautaire en matière de biodiversité À travers sa politique, l'Union reconnaît que la répartition de la biodiversité n'est pas uniforme et que certains habitats et espèces sont plus menacés que d'autres. C'est pourquoi elle accorde une attention particulière à la création et à la protection d'un réseau important de sites à très haute valeur naturelle: Natura 2000. Elle admet toutefois qu'une grande partie de la biodiversité se situe en dehors de ces sites. Des mesures concernant l'environnement en dehors des zones Natura 2000 sont prévues par les politiques environnementales (par exemples, des mesures en faveur des espèces menacées et en faveur de la connectivité du réseau Natura 2000); elles passent en outre par la prise en compte de la biodiversité dans les politiques agricole, de la pêche et autres. Sur la scène internationale, l'Union européenne s'est attachée à renforcer la Convention sur la diversité biologique (CDB) et d'autres accords portant sur la biodiversité, à les mettre en œuvre et à favoriser la biodiversité par une aide extérieure. L'Union européenne a contribué activement à la réglementation du commerce non durable des espèces menacées et a encouragé les synergies entre l'Organisation mondiale du commerce et les accords multilatéraux sur l'environnement. À ce jour, une attention relativement limitée a été accordée à la biodiversité dans les accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux. La biodiversité dans la politique interne de l'Union européenne Préserver les principaux habitats et espèces L'action de l'Union européenne dans cette matière se fonde sur les directives "oiseaux"[13] et "habitats"[14] (les "directives sur la nature"). Si celles-ci n'ont pas encore été pleinement appliquées dans tous les États membres, la désignation des sites Natura 2000 a bien progressé. Le réseau Natura 2000 est constitué de sites représentant une superficie "suffisante" des 200 principaux types d'habitat de l'Union européenne. Il couvre aujourd'hui environ 18 % du territoire de l'UE-15. Son extension aux 10 nouveaux États membres est en 39


bonne voie. Les plans d'action consacrés à une seule espèce s'avèrent bénéfiques pour certaines des espèces européennes les plus menacées. Les autres problèmes concernent l'absence, à ce jour, de réseau Natura 2000 dans l'environnement marin, l'impact négatif des activités de développement sur les sites Natura 2000 et la disponibilité limitée de fonds pour une gestion efficace du réseau et les mesures d'appui y afférentes. Les effets bénéfiques du réseau sur la biodiversité et les services écosystémiques ne se feront pleinement sentir que lorsque ces problèmes auront été totalement résolus. Alors que les régions ultrapériphériques et les pays et territoires d'outre-mer des États membres sont d'une importance internationale pour la biodiversité, la plupart de ces zones ne sont pas couvertes par les directives sur la nature[15]. Intégration de la biodiversité dans la Stratégie en faveur du développement durable, le partenariat de Lisbonne pour la croissance et l'emploi et la politique environnementale La conservation de la biodiversité constitue un objectif clé de la Stratégie en faveur du développement durable et du 6e programme d'action pour l'environnement[16]. Elle est également considérée comme un objectif important en vue de contribuer à la croissance et à l'emploi dans l'Union européenne (deux tiers des États membres l'ont incluse dans leurs programmes de réforme nationaux de Lisbonne). Les progrès significatifs en matière de politique environnementale bénéficient à la biodiversité. Les succès les plus éclatants ont été la réduction des effets des polluants ponctuels, tels que ceux des eaux usées urbaines sur le statut écologique des cours d'eau. Cependant, les polluants diffus, tels que les agents aériens d'eutrophisation, continuent d'exercer une pression importante. Les récentes directives-cadres et stratégies thématiques sur l'eau, l'atmosphère, les milieux marins, les sols, les ressources naturelles, les zones urbaines et les pesticides (à venir) devraient assurer de nouvelles avancées lorsqu'elles seront mises en œuvre. Prise en compte de la biodiversité dans les politiques agricoles et de développement rural Parce qu'elle gère une grande partie du territoire de l'Union européenne, l'agriculture assure la conservation des gènes, des espèces et des habitats. Cependant, au cours des dernières décennies, l'intensification et la spécialisation, ainsi que, dans le même temps, l'abandon progressif (marginalisation) et la sousexploitation des terres, ont provoqué une diminution significative de la biodiversité. La politique agricole commune (PAC) a été, avec l'évolution plus globale du secteur agricole, l'un des moteurs de ces processus. Depuis 1992, elle a toutefois été adaptée afin de mieux prendre en compte la diversité biologique. 40


La multiplication des mesures agro-environnementales, les bonnes pratiques agricoles, l'agriculture biologique et le soutien apporté aux zones moins favorisées ont amélioré la biodiversité agricole. La réforme de la PAC de 2003 encourage ces mesures et d'autres encore en faveur de la biodiversité. Les mesures d'application de la politique des marchés et des revenus, y compris l'éco-condition obligatoire, le régime découplé de paiement unique par exploitation et la modulation, devraient bénéficier indirectement à la biodiversité. Le nouveau règlement sur le développement rural[17] prévoit notamment un soutien renforcé à Natura 2000, le maintien des mesures et paiements agroenvironnementaux pour les zones à handicap ainsi qu'une série de mesures d'aide à la gestion durable des forêts (dont certaines visent plus particulièrement à en améliorer la valeur écologique), telles que les paiements sylvoenvironnementaux. Cependant, les effets bénéfiques de ces mesures dépendront de leur mise en œuvre par les États membres et du budget disponible. Prise en compte dans la politique de la pêche Dans l'Union européenne, la pêche et l'aquaculture ont eu des effets néfastes tant sur les stocks de poisson exploités commercialement que sur les espèces et les habitats non ciblés. Si la biodiversité a été de mieux en mieux prise en compte dans la politique de la pêche au cours des dernières années, il est trop tôt pour juger des effets. Néanmoins, lorsqu'elle sera pleinement mise en oeuvre[18], la réforme de la politique commune de la pêche réduira la pression exercée par la pêche, améliorera le statut des stocks exploités et protégera mieux les espèces et habitats non ciblés. Prise en compte de la biodiversité dans les politiques de développement régional et territorial Les directives sur la nature et la directive concernant l'évaluation des incidences sur l'environnement[19] exigent que les effets potentiels de certaines politiques de développement régional et territorial soient pris en compte. Il s'agit notamment d'envisager des solutions de rechange et de concevoir des mesures de prévention et de réduction des effets négatifs. Des évaluations prudentes menées à un stade précoce du processus décisionnel se sont avérées utiles. Pourtant, il arrive souvent qu'elles soient effectuées trop tardivement ou soient de mauvaise qualité. La récente introduction des évaluations environnementales stratégiques[20] applicables à certains plans et programmes devrait permettre de mieux concilier préservation et développement en garantissant la prise en compte des incidences beaucoup plus tôt dans le processus de planification. Contrôle des espèces allogènes 41


Le 6e programme d'action pour l'environnement reconnaît comme prioritaires les mesures à prendre contre les espèces allogènes envahissantes. Si le financement LIFE a permis de soutenir certains programmes locaux d'éradication, il reste encore à l'Union à élaborer une stratégie globale permettant de résoudre ce problème. Les travaux en ce sens ont désormais commencé. La biodiversité dans la politique extérieure de l'Union européenne Gouvernance internationale L'Union européenne joue un rôle actif dans la gouvernance internationale en matière de biodiversité. La Commission et les États membres estiment toutefois qu'il convient de renforcer drastiquement la mise en oeuvre de la Convention sur la diversité biologique (CDB). En outre, l'Union européenne applique activement une série d'autres accords internationaux sur la biodiversité et encourage les synergies entre ceux-ci. Assistance externe Les États membres sont des donateurs importants du Fonds pour l'environnement mondial, qui soutient des projets liés à la biodiversité. Cependant, ces fonds représentent moins de 1 % du total des budgets annuels d'aide au développement de l'Union et des États membres. Les progrès effectués dans la prise en compte de la biodiversité par ces budgets ont été décevants, en raison de la faible priorité souvent accordée à la biodiversité par rapport à d'autres besoins pressants. La communication de la Commission sur la cohérence des politiques au service du développement[21] précise: "L'UE devrait augmenter les crédits consacrés à la biodiversité et renforcer les mesures visant à intégrer la biodiversité dans l'aide au développement." Cette ambition est poursuivie dans la nouvelle politique de développement de l'Union européenne[22] (le "consensus européen sur la coopération au développement) et dans la politique de voisinage[23]. Commerce international Des efforts ont été entrepris pour lutter contre les effets du commerce du bois sur les forêts tropicales[24], mais peu de mesures ont été prises pour s'attaquer aux autres causes de la déforestation liées au commerce. Quelques progrès ont été enregistrés dans le commerce d'espèces sauvages, grâce à un engagement actif dans la convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction. Plus généralement, l'Union européenne a encouragé la prise en compte de la dimension environnementale dans le commerce international (par 42


exemple, par ses travaux relatifs aux évaluations de l'incidence du commerce sur le développement durable) et dans les mesures visant à freiner les modes de production et de consommation non durables, mais avec peu de résultats concrets pour la biodiversité à ce jour. Mesures de soutien .Connaissances Le 6e programme-cadre[25], complété par les fonds pour la recherche des États membres, a permis de renforcer la stratégie européenne en matière de recherche sur la biodiversité, l'utilisation des sols et le changement climatique et d'intensifier le soutien aux politiques de l'Union européenne et de ses régions partenaires, notamment celles en développement. Il reste toutefois beaucoup à faire pour combler les lacunes critiques dans les connaissances. La plate-forme européenne pour la stratégie de recherche sur la biodiversité a produit une évaluation utile sur les besoins en recherche. La récente proposition de 7e programme-cadre[26] prévoit la possibilité de répondre à ces besoins par la coopération, de nouvelles infrastructures et le renforcement des capacités. L'EM a joué un rôle clé en attirant l'attention des décideurs politiques et du public sur la situation et l'évolution de la biodiversité et des services écosystémiques dans le monde. Aussi importante que soit cette évaluation, il n'existe actuellement aucun mécanisme garantissant sa révision et sa mise à jour régulières. Sensibilisation et engagement du public Les institutions communautaires, les États membres et la société civile ont pris de nombreuses initiatives en la matière, y compris l'adoption de directives sur la Convention d'Århus et l'initiative Countdown 2010 qui regroupe plusieurs acteurs. Les objectifs de 2010 ont utilement contribué à la prise de conscience politique. On note des progrès dans l'élaboration et l'harmonisation des indicateurs, du suivi et des rapports. Un indicateur sur l'état de la biodiversité a été sélectionné à la fois comme indicateur structurel en 2004 et comme grand indicateur du développement durable en 2005. En outre, la Commission élabore, en collaboration avec l'Agence européenne pour l'environnement, une série de grands indicateurs sur la biodiversité, fondés sur ceux adoptés par la CDB. Des travaux sont en cours pour élaborer des méthodes et des instruments de suivi et pour harmoniser les rapports relatifs aux directives sur la nature. Quelles sont les autres mesures à prendre ? Plan d'action communautaire à l'horizon 2010 et au-delà 43


L'examen politique 2003-2004 s'est conclu par une importante conférence des parties intéressées qui a eu lieu sous la présidence irlandaise, à Malahide, en mai 2004. Cette conférence a permis d'atteindre un large consensus sur les objectifs prioritaires menant à la réalisation des engagements de 2010, comme l'expose le "message de Malahide"27 Se fondant sur ce consensus et sur l'analyse présentée aux chapitres 2 à 4 cidessus, la Commission a défini quatre grands domaines d’intervention politique et dix objectifs prioritaires y afférents. Elle a en outre défini quatre grandes mesures de soutien. Ces objectifs et mesures de soutien s'inspirent directement des résultats d'une récente consultation publique-28 Les objectifs et mesures de soutien reposent sur des actions spécifiques qui sont exposées, avec leurs objectifs propres, dans un "Plan d'action communautaire à l'horizon 2010 et au-delà" joint à la présente communication. Ce plan d'action détaille également les mesures et objectifs relatifs au suivi, à l'évaluation et aux rapports. Le plan d'action constitue une nouvelle approche importante pour la politique communautaire en faveur de la biodiversité, en ce sens qu'il s'adresse tant à l'Union européenne qu'aux États membres, précise les rôles de chacun pour chaque action et contient un plan global relatif aux actions prioritaires permettant d'atteindre dans les délais les objectifs fixés. Son succès dépendra de la qualité du dialogue et du partenariat entre la Commission et les États membres ainsi que de sa mise en oeuvre commune. Ce plan apporte une réponse au récent appel de la CDB à prendre des mesures d'ici à 2010[29] et se veut complémentaire à la stratégie et aux plans d'action communautaires en faveur de la biodiversité. Les États membres sont invités à aligner sur lui leurs propres stratégies et plans d'action. La Commission propose que, suivant l'avis du Conseil et du Parlement, la mise en œuvre du plan d'action soit supervisée par le groupe d'experts en biodiversité. Ce groupe devrait également assurer la coordination et la complémentarité entre les actions menées au niveau de l'Union et des États membres. Les quatre grands domaines politiques et les dix objectifs prioritaires Ce chapitre présente les quatre grands domaines politiques et les dix objectifs prioritaires, explique leur portée et met en évidence certaines actions clés prévues par le plan d'action. 1: La biodiversité dans l'Union européenne

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1. Préserver les principaux habitats et espèces de l'Union européenne Il est indispensable de prendre des mesures en faveur des principaux habitats et espèces de l'Union européenne pour enrayer la diminution de la biodiversité d'ici à 2010 et favoriser son rétablissement. Pour maintenir ces habitats, il est nécessaire que les États membres s'engagent plus concrètement à proposer, désigner, protéger et gérer efficacement les sites Natura 2000. Ils devront en outre renforcer la cohérence, la connectivité et la capacité de résistance du réseau, notamment en soutenant les zones nationales, régionales et locales protégées. Il convient d'étendre l'application des plans d'action pour le rétablissement des espèces de l'Union européenne les plus menacées. Des mesures comparables en faveur des habitats et des espèces doivent être prises dans les régions ultrapériphériques de l'Union européenne non couvertes par les directives sur la nature[30]. 2 . Préserver et rétablir la biodiversité et les services écosystémiques dans les zones rurales de l'Union européenne non protégées. 3 . Préserver et rétablir la biodiversité et les services écosystémiques dans l'environnement marin de l'Union européenne non protégé. Natura 2000 et la conservation des espèces menacées ne seront pas viables à long terme sans un plus large environnement terrestre, marin et d'eau douce favorable à la biodiversité. Les principales actions sont les suivantes: optimiser l'utilisation des mesures disponibles dans le cadre de la réforme de la PAC, notamment pour prévenir l'intensification ou l'abandon des terres agricoles à haute valeur naturelle et des forêts, et contribuer à leur remise en état; appliquer le prochain plan d'action pour les forêts qui contient des mesures visant à prévenir et combattre les incendies de forêt; optimiser l'utilisation des mesures disponibles dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche, notamment pour rétablir les stocks de poisson, et réduire l'impact sur les espèces non ciblées et les dommages causés aux habitats marins; poursuivre la mise en œuvre des principales directives-cadres sur l'environnement et des stratégies thématiques visant à réduire les pressions sur la biodiversité, notamment en améliorant la qualité de l'eau douce, de l'environnement marin et des sols, et en réduisant la pression exercée par les polluants diffus (tels que les agents acidifiants et eutrophisants aériens, les nitrates d'origine agricole et les pesticides). 4. Renforcer la compatibilité du développement régional et territorial avec la biodiversité dans l'Union européenne. Une meilleure planification au niveau national, régional et local est la clé de la prévention, de la réduction et de la suppression des effets négatifs du 45


développement régional et territorial, ce qui renforce la compatibilité avec la biodiversité. Pour cela, il convient de prendre en compte la biodiversité plus tôt dans le processus décisionnel. Les principales actions sont les suivantes: tenir réellement compte de la biodiversité dans les évaluations environnementales stratégiques et l'évaluation des incidences sur l'environnement; veiller à ce que les fonds communautaires pour le développement régional bénéficient à la biodiversité au lieu d'y nuire; établir des partenariats entre les responsables de la planification et du développement en faveur de la biodiversité. 5. Réduire sensiblement les effets des espèces allogènes envahissantes et des génotypes allogènes sur la biodiversité dans l'Union européenne. Bien que différentes mesures de prévention et de contrôle des espèces allogènes envahissantes soient en place, un certain nombre de lacunes politiques demeurent; il conviendrait d'élaborer une stratégie communautaire globale ainsi que des mesures particulières telles qu'un système d'alerte rapide. 6. Renforcer sensiblement l'efficacité de la gouvernance internationale en faveur de la biodiversité et des services écosystémiques. 7. Renforcer sensiblement le soutien à la biodiversité et aux services écosystémiques dans l'aide extérieure de l'Union européenne . 8. Réduire sensiblement les effets du commerce international sur la biodiversité et les services écosystémiques dans le monde. Une nouvelle impulsion devra être donnée à l'action de l'Union européenne et des États membres si nous voulons respecter l'engagement consistant à réduire significativement le pourcentage de perte de biodiversité mondiale d’ici 2010. La méthode communautaire doit être plus cohérente pour assurer des synergies entre les mesures relatives à la gouvernance, au commerce (y compris les accord bilatéraux) et à la coopération au développement. En ce qui concerne la gouvernance, l'Union européenne devrait se concentrer sur une application plus efficace de la CDB et des accords connexes. Pour ce qui est de l'aide extérieure, l'Union européenne devrait augmenter les crédits consacrés à la biodiversité et renforcer la prise en compte de la biodiversité dans les programmes sectoriels et géographiques. Quant au commerce, il est particulièrement urgent de prendre des mesures de lutte contre la déforestation tropicale, y compris contre le commerce des matières premières favorisant la déforestation. Une mise en œuvre rapide du programme "Application des réglementations forestières, gouvernance et échanges commerciaux"[31] pourrait apporter une contribution importante en cette matière. Il est indispensable de prendre des mesures dans les pays et territoires d'outre-mer des États membres, si riches en biodiversité, afin d'assurer la crédibilité de l'Union sur la scène internationale. 46


9. Soutenir l'adaptation de la biodiversité au changement climatique. Les milieux scientifiques et politiques s'accordent à dire que nous sommes entrés inéluctablement dans une période de changement climatique sans précédent. Ses effets sur la biodiversité sont déjà mesurables dans l'Union européenne. Ce changement a la capacité, en quelques décennies, de saper nos efforts de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité. Une réduction drastique des émissions mondiales de gaz à effet de serre s'impose pour atténuer les menaces qui pèsent à long terme sur la biodiversité. Nous devons honorer nos engagements de Kyoto, à l'heure où il est nécessaire de se fixer des objectifs plus ambitieux concernant les émissions globales pour l'après 2012 afin de limiter à 2°C maximum au-delà des niveaux préindustriels l'augmentation de la température annuelle moyenne dans le monde. La protection de la biodiversité peut contribuer à limiter les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, puisque les forêts, les tourbières et autres habitats emmagasinent le carbone. Les politiques devront également favoriser l'adaptation de la biodiversité aux changements de température et de cycle hydrologique. Pour cela, il est nécessaire de garantir la cohérence du réseau Natura 2000. Il convient également de prévenir, minimiser et supprimer les dommages pouvant être causés à la biodiversité par les mesures d'atténuation et d'adaptation au changement climatique. 10. Renforcer sensiblement la base de connaissances pour la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité, dans l'Union européenne et dans le monde La compréhension de la biodiversité est un des plus grands défis scientifiques que l’humanité va devoir relever. Il est indispensable d'améliorer nos connaissances sur la biodiversité et les services écosystémiques si nous voulons, à l'avenir, affiner notre réponse politique. Il convient à cette fin de renforcer (par le 7e programme-cadre et les programmes nationaux de recherche) l'espace européen de la recherche, sa dimension internationale, les infrastructures de recherche, l'interface science-politique et l'interopérabilité des données pour la biodiversité. Cela suppose l'exploitation des nouvelles technologies de l’information et des communications. Sous réserve de financements trouvés dans les ressources existantes, la Commission mettra en place un mécanisme communautaire pour recueillir des avis scientifiques indépendants et autorisés, afin de faciliter la mise en œuvre des dispositions existantes et la formulation des orientations pour l'avenir. Sur le plan international, il convient que l’Union européenne trouve les moyens de renforcer les activités de conseil scientifique indépendant auprès des responsables mondiaux de l'élaboration des politiques, notamment en contribuant activement à l’évaluation 2007 de l’EM, dans le cadre 47


de la Convention sur la biodiversité, ainsi qu’aux consultations en cours sur la nécessité d'améliorer les mécanismes internationaux de conseil scientifique sur la diversité biologique. Les quatre grandes mesures de soutien 1. Assurer un financement adéquat Un financement adéquat de Natura 2000 et de la biodiversité en dehors de Natura 2000 est essentiel. Les nouvelles perspectives financières pour la période 2007-2013 permettent de cofinancer la biodiversité et Natura 2000 au titre du fonds de développement rural[32], des fonds de cohésion et des fonds structurels[33], de Life+[34] et du 7e programme-cadre. Cependant, la réduction du budget prévue par le Conseil européen de décembre[35] aura certainement une influence sur les possibilités de financer la biodiversité au moyen de ces instruments. Par conséquent, les choix nationaux de mise en œuvre seront cruciaux. L'Union européenne et les États membres devront garantir, par le cofinancement communautaire et les ressources propres des États membres, le financement adéquat du plan d'action, notamment en ce qui concerne Natura 2000, les terres agricoles et forêts à haute valeur naturelle, la biodiversité marine, la biodiversité mondiale, ainsi que l'étude, le suivi et l'inventaire de la biodiversité. De toute manière, l'allocation de ressources financières communautaires devrait prendre en considération les contraintes budgétaires et être dans les limites des nouvelles perspectives financières. 2. Renforcer le processus décisionnel communautaire Il s'agit d'améliorer la coordination et la complémentarité entre l'Union et les États membres, notamment par l'intermédiaire du groupe d'experts en biodiversité; de veiller à ce que les politiques et budgets actuels et futurs (y compris ceux élaborés dans les programmes de réforme nationaux de Lisbonne) prennent dûment en compte la biodiversité; de tenir compte du coût environnemental (notamment la diminution du capital naturel et des services écosystémiques) dans le processus décisionnel; d'améliorer la cohérence au niveau national entre les divers plans et programmes relatifs à la biodiversité; de veiller à ce que le processus décisionnel à l'échelon régional et local soit cohérent avec les engagements pris à haut niveau en faveur de la biodiversité. 3. Création de partenariats Il s'agit d'établir progressivement des partenariats entre les pouvoirs publics, les universités, les professionnels de la conservation, les propriétaires et les usagers des terrains concernés, les secteurs privé, financier et éducatif et les médias afin de mettre en place des solutions. Il convient pour ce faire de se fonder sur les 48


dispositions en vigueur (par exemple dans la PAC et la politique commune de la pêche) et d'établir de nouveaux partenariats, notamment en dehors de l'Union européenne. 4. Améliorer l'éducation, la sensibilisation et la participation du public Cette mesure consiste à élaborer et appliquer une stratégie de communication au service du plan d'action, en collaboration étroite avec l'initiative Countdown 2010, et à mettre en œuvre la convention d'Århus et les directives y afférentes[36]. Suivi, évaluation et réexamen La Commission fera rapport annuellement au Conseil et au Parlement sur l'état d'avancement de la mise en œuvre du plan d'action pour la période s'étendant de l'adoption de la présente communication jusqu'à la fin 2007. Le deuxième rapport (à soumettre fin 2008) comprendra une brève évaluation à mi-parcours des avancées vers les objectifs de 2010. Le quatrième rapport annuel (fin 2010) évaluera dans quelle mesure l'Union européenne a respecté ses engagements de 2010. Il contiendra une évaluation qualitative de la mise en œuvre des mesures du plan d'action et du respect des objectifs, tenant compte des principes sous-jacents et des éventuelles mesures manquantes. L'évaluation reposera également sur des données quantitatives relatives à une série de grands indicateurs sur la biodiversité (annexe 2). Un indice de la biodiversité servant d'indicateur structurel et du développement durable sera élaboré en 2007. La Commission élaborera et mettra en œuvre ces indicateurs et en assurera le suivi en partenariat avec les États membres et la société civile. Le septième rapport (fin 2013) comprendra une évaluation similaire concernant, en outre, tous les objectifs du plan d'action postérieurs à 2010. Ces évaluations seront à la base de l'évaluation finale du 6e programme d'action pour l'environnement, du réexamen des politiques et budgets sectoriels au cours de la période 2007-2013 ainsi que des politiques et budgets pour la période s'étendant au-delà de 2013. Une vision à plus long terme de la biodiversité comme cadre politique communautaire Enfin, enrayer la diminution de la biodiversité et tendre vers son rétablissement constituent des enjeux importants. Il est toutefois nécessaire de porter le regard

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au-delà de 2010, vers une vision à plus long terme qui servira de cadre politique. Cette vision devrait reconnaître notre interdépendance vis-à-vis de la nature et la nécessité d'un nouvel équilibre entre le développement de l'humanité et la conservation de la nature. L'inventaire des espèces La systématique explore la biodiversité dans sa capacité à distinguer un organisme ou un taxon d'un autre. Elle est confrontée aux problèmes de temps et de nombre : 1,75 million d'espèces ont été décrites, alors les estimations vont de 3,6 à plus de 100 millions d'espèces. La systématique n'est qu'un des aspects de la biodiversité, néanmoins utile à la compréhension des écosystèmes, de la biosphère et de leurs fonctions et interactions. Tableau 1. Quelques études estimant le nombre d'espèces WCMC, 1992). Mayr et al. Barnes May May Groupe (1953) (1989) (1988) (1990) [7] Protozoaires — — 260 000 32 000 Porifères 4 500 5 00 10 000 — Cnidaires 9 000 9 000 10 000 9 600 Platyhelminthes 6 000 12 700 – – Rotifères 1 500 1 500 – – 1 000 Nématodes 10 000 12 000 – [8] 000 Ectoproctes 3 300 4 000 4 000 – Echinodermatas 4 000 6 000 6 000 6 000 Urochordata 1 600 1 250 – 1 600 Vertébrés 37 790 49 933 43 300 42 900 Chélicérates 35 000 68 000 63 000 – Crustacés 25 000 42 000 39 000 – [9] Myriapodes 13 000 10 500 – – 1 000 Hexapodes 850 000 751 012 790 000 [10] 000 Mollusques 80 000 50 000 100 000 45 000 Annélides 7 000 8 700 15 000 –

décrites (d’après Brusca & Brusca (1990) 35 000 9 000 9 000 20 000 1 800 12 000 4 500 6 000 3 000 47 000 65 000 32 000 13 120 +827 175 100 000[11] 15 000

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Graphique 2 : comparaison de l'importance des différents taxons entre ce que nous savons (à gauche) et ce qui existe probablement (à droite) (D'après WCMC, 1992). Estimations du nombre d'espèces Certains groupes (virus, bactéries, pico et nano-plancton, micro-invertébrés..) sont très mal connus. Faire des estimations, même prudentes, est alors très délicat. Tableau 2. Estimation du nombre d'espèces des principaux groupes taxinomiques (d’après WCMC, 1992). Espèces déjà Groupe Espèces à décrire décrites estimation la plus estimation haute[12] probable[13] Virus 5 000 500 000 500 000 51


Bactéries Champignons Protozoaires Végétaux Vertébrés Nématodes Mollusques Crustacés Arachnides Insectes

4 000 70 000 40 000 250 000 45 000 15 000 70 000 40 000 75 000 950 000

3 000 000 1 500 000 100 000 500 000 50 000 1 000 000 200 000 150 000 1 000 000 100 000 000

400 000[14] 1 000 000 200 000 300 000 50 000 500 000 180 000 150 000 750 000 8 000 000

Le rythme des découvertes

Nombre d'espèces restent donc à découvrir, à un rythme qui différera selon les groupes zoologiques. Ainsi, chez les oiseaux (graphique 3, voir ci-dessous), il a fallu 87 ans pour découvrir la moitié des espèces aujourd'hui connues et 125 ans pour l'autre moitié. Ce qui indique que les espèces sont de plus en plus difficiles à découvrir. Dans le cas des arachnides et des crustacés (graphique 4, voir cidessous), on a découvert en seulement dix ans (de 1960 à 1970), autant d'espèces que depuis 1758, soit 202 ans. Cela indique qu'il existe encore de nombreuses espèces communes encore inconnues mais aussi qu'en découvrir de nouvelles sera de plus en plus difficile.

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Graphique 4 : rythme des découvertes Graphique 3 : rythme des découvertes d'espèces d'arachnides et de mollusques d'espèces d'oiseaux (d'après WCMC, (d'après WCMC, 1992, May, 1990, et 1992, May, 1990, et Simon, 1983) Simon, 1983) État de la biodiversité dans le monde L'évaluation du millénaire, après la conférence de Rio a réattiré l'attention du monde sur le rapide déclin de la biodiversité. Ce déclin s'est encore accru de 2005 à 2008 selon le rapport de mi-étape d'une étude consacrée à l’économie des écosystèmes et de la biodiversité [15] qui conclut que sans actions fortes, la perte associée de services écosystémiques s’accélérera. Au rythme du début des années 2000, 11 % seulement des espaces naturels existant en 2000 auront disparu avant 2050 et près de 40 % des sols actuellement exploités extensivement (ce qui permet la survie d'une partie significative de la biodiversité ordinaire) seront converties à l'agriculture intensive. La surpêche, la pollution, les maladies, les espèces invasives et le blanchissement des coraux pourraient causer la disparition de 60 % des récifs coralliens d'ici 2030. Ceci menace le fonctionnement de la planète et les économies et sociétés humaines conclue ce même rapport qui évalue qu'un scenario de statut-quo conduira à une « perte annuelle de bien-être due à la disparition de services écosystémiques » pouvant atteindre 6 % du PIB mondial d’ici 2050. La biodiversité est la source première des services rendus par les écosystèmes. Elle est aussi le moteur de la résilience écologique car c'est une ressource 53


naturelle auto-entretenue (à certaines conditions). Elle fournit tout l'oxygène, vital, que nous consommons, tout ce que nous mangeons (cultures vivrières, bétail, poissons...); elle contribue à l'épuration et au cycle de l'eau, ainsi qu'aux grands cycles biogéochimiques et à la régulation climatique. Elle fournit des fibres pour l'habillement, du bois-énergie pour le chauffage, la construction d'habitations, la papeterie. Elle produit ou inspire des médicaments. L'agrobiodiversité désigne les usages de la biodiversité associés à l'agroalimentaire. La biodiversité a contribué de nombreuses façons au développement des cultures humaines. Et inversement, l'homme a joué un rôle majeur en termes d'évolution de la diversité aux niveaux génétiques, spécifiques et écosystémiques. Parmi les exemples de l'utilité de la diversité face à l'homogénéisation génétique des variétés de plantes cultivées, on peut en citer deux [20]: •

En 1970, 85 % du maïs cultivé aux États-Unis était quasiment homogène. La résistance de cette plante à l'helminthosporiose, maladie cryptogamique, fut surmontée par le champignon et l'épidémie provoqua des dégâts considérables. En 1980, pour la même raison, 90 % de la récolte cubaine de tabac fut détruite par le mildiou.

On voit ainsi que la diversité génétique des populations naturelles d'animaux et de plantes apparaît comme une stratégie promue par la sélection naturelle, en réponse aux pressions continuelles des parasites évoluant rapidement. Les écosystèmes fournissent également des « supports de production » (fertilité du sol, des sédiments, fonctions des prédateurs, décomposition et recyclage des déchets organiques et de la nécromasse, etc.) et des « services » inestimables tels que la production et purification de l'air, l'épuration de l'eau, la stabilisation et la modération du climat, la diminution des conséquences des sécheresses, inondations et autres désastres environnementaux. Si les ressources biologiques représentent un intérêt écologique pour la communauté, la valeur économique de la biodiversité est également de plus en plus mise en avant. De nouveaux produits sont développés grâce aux biotechnologies, et de nouveaux marchés créés. Pour la société, la biodiversité est aussi un secteur d'activité et de profit, et demande une gestion appropriée des ressources. La biodiversité est aussi devenue un « miroir de nos relations avec les autres espèces vivantes », une vue éthique avec des droits, des devoirs, et une nécessité éducative. L'aspect éducatif est souvent assuré par l'école (lors de sorties 54


d'éducation à l'environnement par exemple), par des associations d'éducation à l'environnement (telles que les CPN, les CPIE, les GRAINE, le Réseau Ecole et Nature...) ou par des organisations de protection de la nature, telles que le WWF La biodiversité, patrimoine naturel vital pour chaque peuple et pays, est fortement liée aux besoins de l’homme et à sa santé, son alimentation… et sa richesse. Car elle a aussi un aspect économique : elle peut être utilisé pour fabriquer des produits agro-alimentaires, pharmaceutiques, cosmétiques… La biodiversité est-elle menacée ? La biodiversité est plus que menacée, elle est en voie de régression rapide. L'installation de l'Homme et de ses moyens de production et réseaux de transport dans une grande partie des territoires facilement accessibles a bouleversé les équilibres écologiques existants. Les fluctuations climatiques naturelles ont toujours eu un impact sur la répartition des espèces, mais depuis l'ère industrielle les amplitudes de ces modifications et surtout leur rapidité, alors que la pollution et la fragmentation des écosystèmes augmentaient également rapidement, a conduit à une situation sans équivalent dans le passé. Ces dernières décennies, une érosion de la biodiversité a été observée presque partout, et plus de la moitié de la surface habitable de la planète a été modifiée de façon significative par l'espèce humaine[22]. S'il y a désaccord sur les chiffres et les délais, la plupart des scientifiques pensent que le taux actuel d'extinction est plus élevé et rapide qu'il ne l'a jamais été dans les temps passés. La majorité des experts en écologie estiment même qu'une extinction massive est déjà en cours. Plusieurs études montrent qu'environ une espèce sur huit des plantes connues est menacée d'extinction. Chaque année, entre 17 000 et 100 000 espèces disparaissent de notre planète, et un cinquième de toutes les espèces vivantes pourrait disparaître en 2030. Il y a consensus sur le fait que l'homme en soit la cause, en particulier par la fragmentation des habitats et/ou la destruction des écosystèmes abritant ces espèces. Sans négliger l'évolution même des espèces ni leur mise en place au cours du temps dans des espaces donnés, on ne peut que constater en termes de bilan que les pertes quantitatives et surtout qualitatives sont énormes, et qu'à l'échelle planétaire ces dernières s'effectuent de manière régulière et pernicieuse. Mers et océans : une étude statistique publiée en 2006 s'appuyant sur l'analyse durant quatre ans de données couvrant une période de mille ans, pour 48 zones de pêche dans le monde montre que les espèces actuellement pêchées (poissons et crustacés) pourraient quasiment toutes disparaître en 2048 sans mesure supplémentaire de préservation. En 2006, 29 % des espèces pêchées sont déjà sur le point de disparaître, imposant un appel plus important aux piscicultures dont certaines dégradent l'environnement. La perte importante de biodiversité 55


marine fragilise les écosystèmes marins et par voie de conséquence le climat et ceux de la planète entière, car les mers et océans sont essentiels aux cycles biogéochimiques, dont celui de l'oxygène. Certains estiment que la conversion d'écosystèmes anciens (ou de substitution, tels que prairies, bocage...) en écosystèmes « standardisés » (e.g. par exemple, déforestation suivie de monoculture intensive) a des effets encore plus négatifs sur la biodiversité que la surexploitation d'espèces ou la dégradation d'écosystèmes primaires. D'autres pensent que c'est l'absence de droits de propriété ou de règles d'accès aux ressources qui ont conduit à l'exploitation anarchique des ressources naturelles. Parmi ces détracteurs, quelques-uns affirment que des « extrapolations abusives » sont faites et que le rythme actuel de disparition des espèces ou de destruction des forêts tropicales, des récifs coralliens ou des mangroves (trois sortes d'habitat riche en biodiversité) n'est pas suffisant pour parler d'« extinction de masse ». Ainsi, la majorité des extinctions ou les extinctions les plus importantes ont été observées sur des îles. Néanmoins, outre que les théories de l'écologie du paysage prédisent que c'est effectivement d'abord sur les îles que les espèces doivent disparaître, c'est justement un phénomène d'insularisation écopaysagère que les scientifiques observent sur les continents. De plus, les inventaires montrent pour une grande quantité d'espèces, que si celles-ci n'ont pas tout à fait disparu, elles ont souvent, en quelques décennies, vu fondre ou disparaître leurs populations de l'essentiel de leur ancienne aire de répartition, ce qui a nécessairement réduit leurs diversités génétiques. Enfin, l'accélération de la quasi-disparition de ressources halieutiques autrefois communes est flagrante, avec par exemple la quasidisparition de plus de 200 espèces de poissons dans le lac Victoria (à comparer à 129 espèces d'eau douce seulement pour toute l'Europe), suite à l'introduction de la perche du Nil en 1954) laisse craindre la possibilité, dans un temps bref, d'une extinction de masse d'origine humaine. Le film documentaire Le Cauchemar de Darwin (2005) illustre également cet aspect. Outre la surpêche et la surexploitation des forêts, la déforestation et la destruction des forêts anciennes par la sylviculture, des phénomènes sociaux aussi divers la collection (d'animaux, de plantes, d'invertébrés, de coquilles, etc. ou l'élevage domestique d'espèces rares prélevées dans la nature, ou l'intérêt pour l'or (cf orpaillage destructeur en Amazonie par exemple), ou l'intérêt pour des sous-produits animaux rares (caviar, fourrure)[24], voire l'impact de certaines médecines traditionnelles prélevant leurs ressources dans la nature noncultivée), du tourisme de nature ou encore de la pêche ou de la chasse de loisir... aggravent la situation. 56


Enfin, la vitesse et le taux de régression des espèces nocturnes sont mal suivis et peu étudiés, mais le phénomène dit de pollution lumineuse pourrait avoir été sous-estimé dans ses impacts en termes de fragmentation écologique de l'Environnement nocturne; or il est en progression constante et rapide depuis les années 1950[25]. Les 4 derniers rhinocéros blancs de Sumatra ne sont pas menacés par la pollution, mais par la valeur que certains accordent à leurs cornes devenues rarissimes, ce qui montre que donner une valeur commerciale à une espèce ou un animal, ne suffit pas à le protéger. Actions de gestion, restauration et protection de la biodiversité La biodiversité est devenue un motif de préoccupation mondiale. Tout le monde n'est pas d'accord sur le fait qu'une extinction massive est ou non en cours, mais la plupart des observateurs admettent la disparition accélérée de nombreuses espèces, et considèrent essentiel que cette diversité soit préservée, selon le principe de précaution. La présence de l'homme, mais surtout l'intensivité de ses actions perturbent les équilibres écologiques avec, notamment dans les plaines, une destruction et fragmentation croissante des habitats, devenus deux des principaux facteurs de la perte d’un haut niveau de richesse biologique, l'autre étant les invastions biologiques. Une grande partie des activités humaines semblent compatibles avec le maintien d’une biodiversité importante à condition que certaines règles de gestion et d’aménagement soient respectées. Certaines demandent de profonds changements, sociaux, politiques et économiques. Deux types d'options de conservation de la biodiversité émergent : la conservation in situ (dans le milieu naturel), et ex situ (hors du milieu naturel). La conservation in situ est souvent vue comme la stratégie idéale, mais est rarement possible. De nombreux cas de destruction d'habitats d'espèces rares ou d'espèces en voie de disparition requièrent la mise en place de stratégies de conservation ex situ. Certains estiment que les deux types de conservation sont complémentaires.. De manière générale, la préservation de la biodiversité implique la préservation des grands équilibres écologiques, à quelque échelle que ce soit : habitat, forêt, région, monde... Équilibres qui, s’ils sont rompus, entraînent de graves dysfonctionnements biologiques aux conséquences souvent désastreuses, parfois imprévisibles, sur les sociétés humaines en général et leur fondement économique en particulier.

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La biodiversité urbaine, et celle de la nature banale sont aussi des préoccupations émergentes, avec quelques expérimentations d'intégration dans la gestion urbaine et l'architecture (Construction à biodiversité positive, quinzième cible HQE, etc.). Perspectives pour une bonne gouvernance de la Biodiversité : L'ONU a mis en place la FAO pour répondre aux questions d'agriculture et d'élevage et l'OMS pour les questions de santé, mais il n'y a pas d'Agence mondiale pour la Biodiversité.

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Une démarche consultative de 2006 à 2008(IMoSEB qui signifie « International Mechanism Of Scientific Expertise on Biodiversity ») a défini les contours d'un organisme scientifique de type IPCC sur le thème de la biodiversité, en s'appuyant sur une série,d'étude et de consultations comme le recommandations d'un groupe de travail international (Leipzig workshop) sur les interfaces Science-Décideurs pour une bonne gouvernance de la biodiversité (International Science-Policy Interfaces for Biodiversity Governance). En février 2007 à Paris, le président Jacques Chirac a apporté le soutien de la France à l'idée de création d'une Agence mondiale de l'Environnement. À la suite du processus IMoSEB et de la Stratégie de poursuite de l'Évaluation des écosystèmes pour le millénaire, l'intiative IPBES (Intergovernmental Science Policy Platform on Biodiveristy and Ecosystem Services) a été lancée par l'UNEP pour l'établissement d'un tel mécanisme d'interface sur la biodiversité.

Dr Ali KILIÇ Geneve,21 Janvier 2010

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