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PLACE BETHLEEM_______________ ___________________________Saint-Gilles
01. Situation
La Place Bethleem est une place triangulaire située au croisement de la rue Théodore Verhaegen et de la chaussée de Forest. A quelques minutes de la gare du midi, cette place accueille une série d’équipement autour d’elle, notamment des restaurants et des commerces. Elle constitue une articulation entres les habitations autour, et devient un point de rendez-vous multiculturel.
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02. Historique
Anciennement, au milieu du XVIe siècle, se dressait à la place Bethleem le château ferme de Bethléem. Le château, et son domaine, complétement démembré en 1827, seront mis en vente. C’est alors qu’une des granges sera réhabilitée en cabaret dénommé “A Bethléem”. Au milieu du XIXe siècle, le château-ferme est appelé “Enclos Bethléem et sera utilisé comme logements. A la fin du XIXe siècle, le château est détruit pour laisser place à la construction d’une école au style éclectique, bâtie selon les plans de l’architecte Edmond Quétin142 La place va connaître de nombreux changements urbanistiques. D’une simple place en 1953, on lui accordera une attention particulière et plus minutieuse dans les années 50 afin de la revaloriser.
142 ST GILLES BRUSSELS. « La place de Bethleem ». Syndicat d’initiative de Saint-Gilles. Disponible à l’adresse : https://stgilles.brussels/wp-content/uploads/2019/10/Totem-Betheem_v7bis.pdf
En effet, grâce à l’outils BruCiel, j’ai pu avoir accès aux vues aériennes de la place Bethléem depuis 1944, ce qui m’a donné une indication sur son évolution. En 1953, la place s’accorde une position de distribution en accentuant la forme du rond qui s’apparente à celui du rond-point. On ressent visuellement que cette place était utilisée à titre de passage et non pour de détentes. En 1971, le cercle central devient plein, et rend impossible cette notion de traverser. En 1996, on voit enfin se dessiner une place, et non plus un endroit à utilisation momentanée L'estrade épouse cette forme arrondie, et donne accès à une place généreuse. Au centre de cette dernière, on y aperçoit le tracé d’un terrain de foot143, qui sera effacé dans les années 2000. Cette typologie vient épouser son contexte, et non s’en éloigné, ce qui donne une certaine harmonie à l’ensemble.



03. Configuration de la place Bethléem
Au cœur d’un îlot commercial, la place Bethléem est réputée pour être un endroit plein de vie à SaintGilles. Les voiries qui encerclent la place, viennent la former spatialement tout en gardant un rôle mineur dans la dynamique de ce lieu. Certaines routes sont condamnées pour accueillir les terrasses des restaurants qui viennent, alors s’étendre jusqu’à la place centrale et véhicule une sensation d’unité. La place est d’une certaine manière encadrée par plusieurs moyens, notamment avec le mobilier urbain très présent sur celle-ci. Il joue un rôle majeur en termes de spatialisation, puisqu’il donne un rythme à suivre et un périmètre à la place. Par soucis de sécurité, les bancs sont placés entre l’espace central, et la voirie.

Du point de vue de sa morphologie, la place Bethléem respecte le terrain légèrement en dénivelé, en proposant une estrade en demi-cercle. Cette estrade vient rompre l’espace en deux zones distinctes : la partie haute et la partie basse. La partie haute comprend plusieurs bancs protégés par une végétation plus dense, en surplombant le deuxième espace de la place. Ce dernier, en contrebas de l’estrade, propose un espace spacieux pour une appropriation de l’espace libre.



Le parc Gaucheret prend place dans la commune de Schaerbeek. Proche de la gare du Nord, il se situe au cœur du quartier des affaires. Il est au cœur du projet par Bruxelles Environnement, qui vise à redynamiser le quartier nord. Il a été construit à partir des années 2000 sur une zone longtemps laissée en friche.
01. Situation 02. Historique
Pour écrire cette partie et la suivante, je me suis inspirée de la fiche-info144 déjà réalisée sur le parc Gaucheret par Bruxelles Environnement. Je vais donc expliquer brièvement la partie historique.

Non loin du canal, la zone de ce quartier était autrefois très exploitée industriellement. Néanmoins avec l’installation portuaire au Nord, l’activité se doit de se déplacer, laissant derrière lui un quartier à l’abandon. Pour remédier à cela, les pouvoirs publics veulent rénover et réorganiser le quartier, et présenteront le plan Manhattan. Soit, « un projet mégalomane inspiré du modèle américain prévoyant la construction d’une soixantaine de tours sur une vaste dalle artificielle sous laquelle s’organiseront toutes les circulations automobiles »145. Ce projet, jugé trop cher, sera laissé en suspens pendant 20 ans, et la zone étudiée sera donc non investie pendant ce laps de temps. Dans les années 1990, la situation économique étant favorable, le plan voit enfin le jour. C’est alors que la commune de Schaerbeek et la région bruxelloise porte une attention particulière à l’espace du parc Gaucheret, qui est classé comme « zone d’intérêt régional ». De leur point de vue : « L’objectif, sur les quelques 7 hectares du site, est d’en faire une zone tampon permettant d’articuler dans un contexte de cohésion territoriale et sociale, deux quartiers très différents : celui des affaires implantées autour de la gare du
144 BRUXELLES ENVIRONNEMENT. « L’espace Gaucheret ». Bruxelles Environnement, Janvier 2011, page 2 Disponible sur internet : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/IF%20EV%20ESPACE%20GAUCHERET%20FR
145 Ibid., page1.
Nord avec ses tours et son apport journalier de travailleurs et le quartier populaire et résidentiel Masui avec son habitat traditionnel et sa population multiculturelle. Sont ainsi prévus des logements moyens, des commerces, des équipements d’intérêt collectif (crèche, maison des citoyens), un parc et le réaménagement des voiries et de la place Gaucheret146»
03. Configuration du parc Gaucheret
Je reprécise que les propos repris dans cette partie s’inspirent également de la fiche espace vert réalisé par Bruxelles Environnement. Dans celle-ci, ils décrivent les différentes étapes dans le réaménagement de la place Gaucheret, ainsi que leur priorité dans ce projet. C’est alors que dans un premier temps, la place a été pensé de sorte à expulser le camion, qui était trop présent à cet endroit-là. En termes de morphologie, Bruxelles Environnement explique que : « Implanté là où autrefois s’érigeait un îlot résidentiel, l’espace Gaucheret hérite de sa forme étroite et allongée. Dans pareille configuration, il est important d’agrandir l’espace, de l’étirer au maximum jusqu’aux façades des fronts bâtis qui l’environnent et d’éliminer tout ce qui pourrait l’enfermer dans ses propres dimensions147 ». Ils ont fait de la forme de l’espace leur force, faisant en sorte que l’espace recouvre un maximum de surface au sol. Le parc Gaucheret s’accorde avec son contexte, tout en proposant une diversité d’espaces tous reliés par un réseau de chemins. Ce qu’il explique également, c’est de cette volonté de rendre les usages et les espaces progressifs. C’est la raison pour laquelle, à travers le plan, il y a des sections, des dilatations et des compressions à certains endroits. « Cet aménagement par phases successives présente l’avantage indéniable de pouvoir tester les installations en fonction de l’usage que les




146 BRUXELLES ENVIRONNEMENT. « L’espace Gaucheret ». Bruxelles Environnement, Janvier 2011, page 2. Disponible sur internet : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/IF%20EV%20ESPACE%20GAUCHERET%20FR habitants en font pour ensuite, éventuellement, rectifier le tir148». Ils prennent en compte et analyse l’utilisation de leur espace, pour l’améliorer par la suite. Dans le cadre de mes observations, j’ai décidé de nommer les parties du parc en fonction de leur spécificité, afin de faciliter le travail de description. Cela commence par la zone du parc, avec tous les espaces verts composé de manière linéaire, avec un côté marqué par une topographie appuyée. Au centre du parc, une place est créée, et semble être le noyau distributeur de l’espace. Il donne accès, à l’aire de jeux des plus de six ans, aux terrains de sport, aux espaces verts, et aux espaces minéraux.
147 Ibid.
148 BRUXELLES ENVIRONNEMENT. « L’espace Gaucheret ». Bruxelles Environnement, Janvier 2011, page 2. Disponible sur internet : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/IF%20EV%20ESPACE%20GAUCHERET%20FR

Place minérale n°1
Place minérale n°2
Aires de jeux + 6 ans
Terrains de sport
Topographie
Aires de jeux – 6 ans
Espace transitoire
01. Situation
Le parc de la Senne est situé en plein cœur du quartier Masui à Schaerbeek. Il porte ce nom, car il prend place sur un ancien lit de bras de la Senne. Il part du parc Gaucheret et se termine trois îlots plus loin, à la rue des Palais. Le parc se compose en trois sections avec des ambiances différentes.
02. Historique
Le parc de la Senne se situe à l’endroit, où autrefois le fleuve de la Senne passait. Le voutement de la Senne a été un gros changement dans la morphologie de la capitale. La création des boulevards, et la contamination du fleuve ont été les deux raisons qui ont amené à ce que la Senne soit comblée149

Pour le parc de la Senne, grâce à l’outils Bruciel, le fleuve était encore à l’air libre dans les années 1960. Une dizaine d’années plus tard, la situation est tout autre, et l’eau est complétement recouverte d’une voirie. En 1987, une volonté d’aménager l’espace, et des prémices de parcs sont visibles. Néanmoins, visuellement, cela s’apparente plus à des espaces laissés en friche qu’à un parc entretenu. C’est seulement en 2015, qu’un projet est lancé pour revaloriser le parc. Il contribue à renforcer la trame végétale dans la capitale et s’inscrit dans le maillage vert régional de BruxellesCapitale.
149 A.B. « La vallée de la Senne ». Dans mes malles… Disponible sur internet : http://chemin.eklablog.net/2-lavallee-de-la-senne-a117739916.
03. Configuration du parc de la Senne


Comme nous l’avons évoqué, le parc de la Senne se sectionne en trois parties. Nous allons, dans ce mémoire, nous saisir d’une partie de la deuxième et de la troisième. Cela comprend, le parc de Reine, et l’espace avec les équipements sportifs. Le premier, est le reflet d’un dilatement dans un des îlots. Il accueille un espace minéral, type place, bordé par de la végétation. Il s’inscrit tout en longueur, et est interrompu par la rue de l’Eclusier Cogge, en lui donnant un accès. Cette place (numéro 1 sur le croquis), rejoint alors l’avenue de la reine et notre espace continu en face de celle-ci. De l’autre côté, des infrastructures sportives (numéro 2 sur le croquis), ont été placées, ainsi que deux demi-terrains de basket. Le mobilier est fortement présent dans ce parc, puisqu’il est parsemé de part et d’autre du sentier.


01. Situation
Le parc de la Jeunesse se situe dans la commune de Jette, dans le nord de Bruxelles. Juste à côté de la gare de Jette, le parc se déploie longitudinalement, et crée une continuité paysagère avec le parc roi Baudoin. Mais aussi avec le bois de Dieleghem, plus vers le nord, qui constitue le poumon vert de la commune.
02. Historique
D’un point de vue historique, il était difficile de trouver des informations sur le parc de la Jeunesse. Pour en comprendre son évolution à travers le temps, j’ai utilisé l’outils Bruciel. Le parc a commencé à être aménagé dans les années 50. Autrefois des champs agricoles, le parc prend forme avec des terrains de tennis, et des aires de jeux pour enfants. Par la suite, des terrains de sport viennent compléter le complexe de tennis. En effet dans les années 60, six terrains sont ajoutés. Aujourd’hui, il y a toujours le club de tennis, ainsi que des terrains dédiés aux sports autour d’une grande plaine verte.



03. Configuration du parc de la Jeunesse


Le parc de la Jeunesse se constitue de plusieurs pôles d’activités autour d’un grand espace central. Ces activités sont tous étroitement liés aux sports, tels qu’une rampe de skate, un terrain de basket, des équipements sportifs, qui sont tous sont ouverts et gratuits aux publics. Deux aires de jeux, pour les plus et les moins de 6 ans, viennent refermer le cercle autour de la plaine verte. Cette dernière est l’élément majeur, qui lie tous ces éléments. Un espace, où deux buts de football prennent place, sans pour autant retrouver un terrain marqué au sol. Le parc est entouré d’une végétation dense, tandis que le centre de celui-ci est complétement aéré. Une couronne d’arbres délimite le parc, et permet de créer deux ambiances.
Voiries encadrent le parc Continuité paysagère Plusieurs pôles d’activités Centralité distributive
Terrain de basket
Espace vert
Terrain de tennis
Aires de jeux -6
Rampe de Skate
Equipements
Sportifs
Aires de jeux 6
01. Situation
Le parc roi Baudoin se situe dans la commune de Jette, au nord de Bruxelles. Il s’étire d’ouest en est dans la vallée de Molenbeek, constituant une barrière végétale dans le paysage. Cette étendue est constituée d’une végétation abondante et diverse. Entre bois, étangs et plaines, le parc roi Baudoin s’inscrit dans les parcs les plus emblématiques de Bruxelles.
02. Historique
Une fois de plus, Bruxelles Environnement, a établi une fiche150 de cet espace public. Je m’en suis donc saisie pour récolter les informations essentielles.
En 1977, la commune de Jette se mobilise pour préserver ce qui considérait comme une des « dernières enclaves du paysage brabançon naturel dans l’agglomération bruxelloise »151. La décision est alors portée sur la possibilité d’y créer un parc. Cette idée voulant aller jusqu’à reprendre les codes des plus grands parcs de la capitale, tels que le bois de la Cambre, ou encore le parc de Woluwe. Ce projet de réaménagement s’est déroulé en trois phases, sur trois parties différentes du parc. Notre cas d’étude se porte sur la première, réalisé en 1981. Avant le renouvellement de cette zone, elle était investie par un îlot de maisons, ainsi que des potagers. Entre 1977, et 1987, l’îlot est détruit, et un parc se dessine. Ce dernier était aménagé de sorte à créer un lien avec la rue Eugène Toussaint. L’aménagement de l’époque amène un réseau de sentiers, ainsi qu’un espace dédié pour un terrain de football et une place minéralisée.
150 BRUXELLES ENVIRONNEMENT. « Parc Roi Baudoin ». Environnement brussels. Disponible sur internet : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/IF_EV_Parcs_Parc_Roi_Baudouin_FR.PDF?langtype =2060
151 Ibid., page 1.

Dans les années 2010, le parc attire l’attention, et l’Institut Bruxellois pour la Gestion de l’Environnement désigne le bureau BUUR pour réaménager cette partie du parc.152 Dans un article du journal DHnet, la ministre en charge de l’Environnement, Céline Fremault, déclare que « L’objectif était d’améliorer l’accessibilité du site pour les cyclistes les piétons et les PMR, d’offrir une plus grande diversité d’espaces de jeux et d’améliorer de manière générale la qualité paysagère153 ».



03. Configuration de la phase 1 du parc roi Baudoin
La partie qui m’intéresse dans cette phase du projet, est la partie la plus à l’ouest, entre la voirie et la zone boisée. La charge du projet a été confiée au bureau d’urbanistes BUUR qui s’est associé avec le bureau Dees & Lepage. Leur volonté est alors d’« harmoniser les différents espaces de façon à créer un parc vivant où la nature aura une place prépondérante154» Pour ce faire, ils vont intégrer l’îlot existant dans la continuité du parc, et ainsi supprimer une voirie. La voiture est mise de côté en devenant mineure dans l’espace.
La place de la mobilité douce, est désormais mise à l’honneur. Chacune ayant leur propre accès, en blanc pour le vélo sur le plan (cf. Fig 40), et le reste pour les piétons. L’eau est également une notion importante dans l’aménagement du parc. Le sentier suit le ruisseau, et redonne une visibilité au Molenbeek. Autour de celui-ci des gradins intégrés dans le sol donne la possibilité aux utilisateurs de s’y attarder. Près de cela, un pôle sportif est aménagé avec un city-stade, et un demi-terrain de basket. Des balançoires et des structures de jeux viennent alimenter l’espace, avec des espaces verts à proximité. Pour finir, près de la route une place se dessine avec en son centre un jeu de fontaine
152 CG. CONCEPT. « Jette / Parc Roi Baudoin ». Septembre 2015. Disponible sur internet : https://cgconcept.fr/jette-parc-roi-baudoin/
153 GONZE Nathan. « Le parc Roi Baudouin plus beau que jamais ». DH Sports, septembre 2015. Disponible sur internet : https://www.dhnet.be/regions/bruxelles/2015/09/21/le-parc-roi-baudouin-plus-beau-que-jamaisXZZESU2CEVH75HRR3CNIORTHLM/
154 CG. CONCEPT. « Jette / Parc Roi Baudoin ». Septembre 2015. Disponible sur internet : https://cgconcept.fr/jette-parc-roi-baudoin/
1983 1983



Le terrain de sport
« Terrain, intérieur ou extérieur, aménagé en vue de la pratique des sports d'équipe. »155 155
Comme l’a montré Edith Maruéjouls156 à propos des cours de récréation, le terrain de football, principalement masculin, prend souvent 80% de l’espace central. Cette position exclut les autres élèves, bien souvent des filles, reléguées aux espaces périphériques Ce mémoire a débuté en se demandant si ce comportement genré était également visible dans d’autres espaces ludiques, et particulièrement dans nos espaces publics. Partant de l’étude de la cour de récréation157, c’est tout naturellement, que j’ai voulu m’intéresser à la dynamique des terrains de sport dans les espaces urbains. Cependant, cette comparaison est à nuancer avec l’étude d’Edith Maruéjouls. La cour de récréation est un espace consacré aux enfants, tandis que les espaces publics sont accessibles à tous, que ce soient les adultes, les personnes âgées, les adolescent/es, et les enfants. Il faudra donc composer avec cette mixité et cette cohabitation, en comprenant comment les enfants s’imposent, ou non dans ces espaces. De plus, la cour de récréation reste un vaste espace, généralement sans infrastructure sportif physique. Dans nos cas d’étude, cela sera plus varié, avec parfois la présence de city-stade, ou de zones dédiées à la pratique d’un sport
Pour finir, mes observations s’adaptent aussi aux terrains choisis, c’est pourquoi le foot ne sera pas le seul sport sur lequel je porterai de l’attention. Il y aura également le basket, le skate et la pratique sportive dans les aménagements urbains à cet effet.
Sur les sept lieux observés, six proposent un espace dédié à une pratique sportive. Le tableau, ci-dessous, reprend toutes les infrastructures liées au sport dans les espaces publics choisis :
Espaces Publics Terrain de football Terrain de basket Aménagement sportif urbain Skate parc
Parc Gaucheret
Parc de la Senne
Place Morichar
Place Bethleem
Parc roi Baudoin
Parc de la Jeunesse a. Les différentes typologies
156 MARUEJOULS Edith. (2014) « Mixité, égalité et genre dans les espaces du loisir des jeunes : pertinence d’un paradigme féministe ». [Thèse de doctorat en géographie]. Université Bordeaux Montaigne.
157 Ibid.
Le travail pour cette thématique se divise en deux temps. Le premier étant dédié à la typologie des terrains qui semble déterminé leur appropriation genrée. Le second portera sur les usager/ères présent/es qui laissent entrevoir la possibilité ou non de participer ou de s’approprier le terrain.
Tout comme je l’ai évoqué, la typologie des terrains de sport varie en fonction des espaces publics. Au cours des observations, j’ai pu déterminer des différences de comportement relative à la configuration, selon s’il est tracé au sol, fermé, ouvert, ou suggéré.
La configuration de la place Morichar divise l’espace en trois plateaux distincts (cf. Livret page 76). L’un d’eux est entièrement dédié au sport, avec un terrain de football et de basket. Deux terrains distincts, simplement tracés au sol, recouvrant la quasi-entièreté de la surface et séparé par une zone d’herbe.
Extrait de carnet de terrain, 16 juin 2022 à 15h50, place Morichar :
« L’ensemble des usagers et des usagères semblent se contenter du 1er et du 2em plateau. Le 3em, celui destiné au sport, est évité, ou contourné. Seuls, des adolescents l’investissent pour jouer au football et au basket. Deux filles regardent le groupe de garçons jouant au basket, du haut des escaliers, sans pour autant se rapprocher. »
Extrait de carnet de terrain, 16 juin 2022 à 16h, place Morichar :
« Une jeune fille traverse la place Morichar. Elle arrive du 1er plateau, descends sur le deuxième et ne continue pas. Au lieu de passer par le troisième, elle préfère directement récupérer la rue, pour longer l’espace sportif. »
Au fil des mois, je constate, un comportement d’évitement vis-à-vis de cet espace. Les autres utilisateur/trices ne passent pas par ce plateau pour aller d’un point A à un point B, et s’avère être infranchissable. Au cours des cinq mois d’enquête, j’ai constaté une sorte de barrière mentale chez les autres utilisateur/trices qui ne se légitiment pas dans l’espace s’ils n’y vont pas pour pratiquer du sport. Cette barrière mentale est parfois accompagnée d’une barrière physique. Le city-stade du roi Baudoin, est une structure entièrement fermée, et tout comme la place Morichar, il est utilisé uniquement par des hommes et des adolescents. Audelà d’un espace ouvert, l’espace fermé ajoute une frontière à dépasser pour la gent féminine. Une spatialisation limitée alors dans les deux cas qui dissuadent les jeunes filles d’investir et d’exploiter ces espaces.



Ces deux barrières que j’évoque, je les retrouve aussi sur les terrains de sport tracés au sol tel que le parc Gaucheret (Cf. Fig. 45) et le parc de la Senne (Cf. Fig. 44) Toutefois, le premier est tracé au sol surélevé d’une dalle en béton, tandis que le second est tracé, mais dans la continuité du sol. Extrait de carnet de terrain, 30 avril 2022 à 13h20, parc Gaucheret :
« Ce jour-là, trois garçons sont sur le terrain de foot en train de jouer, accompagnés de deux filles en rollers sur le terrain de basket. Je relève le passage de ceux qui traversent le terrain ou pas :
Traverse
Un jeune garçon avec un ballon
Ne traverse pas
Deux hommes
Une femme avec poussette
Une femme
Une adolescente
Un homme
Une femme et ses deux enfants
Cet extrait de terrain illustre bien que même en ayant la possibilité, les personnes ne franchissent pas les terrains de sport. Quand bien même si celui-ci est dans le passage et donc accessible par tous (à contrario de la place Morichar et du city-stade du roi Baudoin), cet endroit reste privilégié.
Pour Edith Maruéjouls, cela s’explique de la façon suivante : « Quand le terrain est dessiné au sol, c’est radical : légitimement, c’est là où l’on fait du foot. A partir du moment où vous légitimez une pratique, vous allez prescrire un usage et vous allez proscrire tous les autres»158 . Cette affirmation semble bien s’appliquer aux cas du parc Gaucheret et de la place Morichar, mais reste plus nuancer pour le parc de la Senne.
Extrait de carnet de terrain, 15 avril 2022 à 14h30, parc de la Senne : « Deux jeunes filles jouent au basket sur le terrain de basket du parc de la Senne. A côté d’elles, deux autres filles jouent au football, avec l’une qui défend le but matérialisé par le mur et l’autre qui tire. »
158 BROUZE Emilie. « Comprendre les inégalités dans la cour d’école par Edith Maruéjouls ». Genre et ville, février 2017. Disponible en ligne : http://www.genre-et-ville.org/comprendre-les-inegalites-dans-la-cour-decolepar-edith-maruejouls/
Plus précisément, dans le parc de la Senne, les équipements sportifs et le terrain de basket sont dans la continuité de la balade. La configuration tout en longueur de ce parc en intra-îlot conduit à avoir des espaces étriqués. Les bâtiments autour et la végétation abondante font que l’ambiance du parc se fait plus intimiste. En effet, ce sont les seuls terrains où j’y ai vu plus de filles que de garçons pendant la période d’observation. Par conséquent, cette mise à distance, incite les jeunes filles à plus se l’approprier (Cf. Fig 47).
Jusqu’à présent, j’ai évoqué les terrains de sport visibles, c’est-à-dire soit tracés au sol, soit encadré d’une structure. La configuration y est toute autre au parc de la Jeunesse, où le terrain de foot n’est pas marqué au sol, mais suggéré avec deux buts au centre d’une étendue verte.
Extrait de carnet de terrain, 9 juillet 2022 à 17h15, Parc la Jeunesse :
« La plaine verte investie par deux buts (en noir sur le schéma), est fortement occupée aujourd’hui. En violet pour les garçons, et en orange pour les filles, le schéma illustre l’utilisation mixte de l’espace. Le cercle vert représente l’endroit où le ballon y est présent. Ce jour-là, le ratio filles/garçons est presque égalitaire. Aux alentours les gens se réunissent en petit groupe, en famille, pour jouer au molkky159 (cercle bleu sur le schéma) et jouir du grand espace végétal. »

Le terrain peu défini du parc de la Jeunesse n’entraîne pas de forme de contournement ou d’exclusion comme il a pu être évoqué avec les cas d’études précédents. Au contraire, il est ouvert à tous et à d’autres usages moins genrés
Ainsi, le fait que le terrain de sport soit clairement délimité ou non dans l'espace, soit par un marquage au sol, soit par des barrières, semble avoir une importance dans les formes d'appropriation ou non La conclusion que j’émets, grâce au travail d’observation est que le terrain qu’il soit ouvert ou fermé sera exclusivement masculin. Là, où la tendance change, c’est lors du tracé au sol, sans tracé l’espace est plus mixte, avec des jeunes filles qui s’intègrent beaucoup plus facilement. Les limites physiques semblent, donc, réfuter les filles dans l’appropriation de certains espaces, qui vont les éviter.
b. Les usages
Auparavant, je me suis intéressée à l’aspect matériel des terrains de sport, qui comme on l’a vu détermine une certaine appropriation genrée. Dans cette sous partie, je vais m’intéresser à la pratique même du sport sur le terrain existant.
Extrait de carnet de terrain, 12 avril 2022 à 15h11, place Morichar :
« Ce jour-là, le plateau sportif est occupé par une trentaine de jeunes. Sur le terrain de football, je compte dix garçons qui s’adonnent à la pratique de leur sport. A deux pas de là, le terrain de basket est, lui aussi, occupé par douze garçons. Tout autour, j’aperçois des groupes de deux/trois adolescents qui regardent les matchs se dérouler devant eux. On a l’impression qu’ils attendent leur tour, sans pour autant s’y imposer. Deux d’entre eux, jouent malgré tout au foot, mais à côté du terrain. De la même manière que deux autres garçons se font des passes avec un ballon de basket. Au bout de 15 minutes d’observation, une jeune fille (plus ou moins 8 ans) arrive avec un de ses amis, pour jouer au ballon, mais sur l’espace gazonné. »
Extrait de carnet de terrain, 17 juin 2022 à 16h, parc de la Jeunesse :
« Un groupe de 10 garçons fait un match sur une partie du terrain de basket. Pendant 30 minutes, une jeune fille observe les joueurs, en tentant quelques fois d’intégrer le jeu, mais sans succès. Véritablement, les garçons ignorent sa présence ce qui l’incite à se rasseoir sur le bord. »
Extrait de carnet de terrain, 17 juin 2022 à 15h30, parc roi Baudoin :
« Au sein du city-stade, quatre garçons jouent au foot ensemble. Quinze minutes après mon arrivée, un homme avec deux garçons (environ 9/10 ans) arrivent ballon en main. Les garçons se dirigent vers le terrain et intègrent le jeu. »
Ces observations montrent que, quels que soient les cas d’étude de ce mémoire les individus qui se donnent le droit de se rendre et d’investir les espaces de sports sans barrière mentale et physique, appartiennent au genre masculin. Les filles ont du mal à intégrer le terrain (cf. extrait de terrain du 17 juin au parc de la Jeunesse), et deviennent invisibles dans ce type de lieu. Pourtant, pratiquer du sport est un droit pour tous, tout le monde devrait y avoir le droit sans s’imposer de barrière160
Malgré tout, ces extraits de terrains illustrent que les filles ne sont pas les seules à avoir du mal à s’imposer ou à s’interdire ces espaces. La description des abords dans l’extrait du 12 avril à la place Morichar, démontre qu’ils sont investis aussi par des garçons en attente de jouer. Ainsi, il ne suffit pas d’être un garçon pour avoir officiellement une place sur le terrain. Les garçons sur le terrain dominent l’espace, ils prennent de la place et imposent parfois sans le vouloir, une situation d’écartement des autres.


Une manière de remédier à l'exclusion des filles des terrains de sport serait alors d'agir activement sur leur présence, d'en favoriser l'accès. A Vienne par exemple des démarches161 ont été conçu pour privatiser des terrains de sports pendant un laps de temps défini pour les femmes et les jeunes filles. C’était le moyen pour elles de pratiquer du sport comme quiconque voudrait en faire, mais aussi de se faire une place dans cet espace privilégié. Au fil du temps, les utilisatrices avaient de moins en moins besoin d’encadrement, et venaient toujours à la même heure pour s’approprier le terrain sans problème. En Belgique, l’ASBL Garance tente de proposer des solutions similaires sous forme des séances de sport, de danse, d’initiation en plein air spécialement pour les femmes et les jeunes filles162 . Les séances de foot rencontrent – du point de vue de l’ASBL - beaucoup de succès : les filles s’autorisaient en effet à intégrer la partie de foot car « si c’est que des filles on peut y aller », elles ont osé jouer car il n’y avait pas de garçon sur le terrain.
Extrait de carnet de terrain, 9 juin 2022 à 17h35, Parc la Jeunesse :
« Deux enfants arrivent dans le parc, un petit garçon et une petite fille avec leur trottinette. Ils se dirigent tout deux vers la rampe de skate. La fille s’adresse alors au garçon : La fille : « On peut aller là-bas ? »
Le garçon : « Oui il y a des enfants ! » »
Cette observation au parc de la Jeunesse fait étroitement écho à l’anecdote énoncé par Laura Chaumont de l’ASBL Garance, avec cette idée d’appartenance à un groupe et plus spécifiquement à un groupe entres des personnes de même sexe. L’absence d’individu sur les terrains de sports incitent les enfants et les jeunes filles à se les approprier. Je l’ai notamment remarqué avec les aménagements sportifs urbains. Dans le cas où ils ne sont pas utilisés par des utilisateur/trices sérieux, les enfants s’autorisent à s’y amuser en grimpant sur les modules.
Ce que je peux émettre comme conclusion pour cette partie, c’est qu’au-delà de la typologie des terrains de sports qui amènent une segmentation spatiale genrée, l’usage qu’en font les gens véhiculent les mêmes conséquences. Les limites que s’imposent les enfants, et particulièrement les jeunes filles, sont induites par un comportement dominant d’un groupe, souvent masculin, sur un espace. Les seuls moments où les filles s’autorisent à investir les lieux, tout comme les enfants en général, c’est quand elles se reconnaissent dans les usager/ères déjà présent/es.
161 KAIL Eva. (Mardi 26 avril 2022) Espaces publics sensibles à la dimension de genre : parcs, terrains de jeux et places [Conférence] Bruxelles, BSI-citydev.brussels.
162 Selon Laura Chaumont (Communication personnelle, 16 juin 2022)

Les espaces minéraux
Les espaces minéraux planes ont la capacité, à priori, d’accueillir de multiples usages. Cependant, au fil de mes observations, ceux-ci se trouvent parfois monopolisés par une appropriation dominante Cette thématique portera une attention sur ces espaces que nous nommons communément « place » pour les définir.
Dans son article Emmanuelle Lenel163 , évoque le Plan Canal, soit un plan de restructuration d’un territoire. Dans celui-ci, il est question d’espace public qu’il qualifie de « scénique »164 lorsque :
« Des espaces composés d’une large scène centrale, sans coulisses, entourée de bancs ou d’autres types d’assise (comme des podiums) et d’éléments de décor valorisés dans l’architecture des façades qui l’encadrent ou encore placés sur la scène centrale (comme du mobilier dit ludique) (…) Les espaces publics scéniques se présentent ainsi comme des espaces à saisir pour inventer collectivement les modalités de l’être-ensemble dans la diversité. Le dégagement spatial doit aussi fournir des occasions de rencontre heureuse avec l’étranger, en multipliant les liens faibles et occasionnels autour des appropriations spontanées de l’espace. »165
Cette notion d’espace public scénique correspond expressément au cas d’étude de ce mémoire. Néanmoins, cette comparaison s’arrête à la configuration spatiale de l’espace, qui coïncide avec ce « dégagement spatial » encadré de banc et d’estrade que l’article évoque. En effet, les espaces minéraux libres considérés comme "multifonction" en fait, profitent à certaines catégories d'usagers qui ont la capacité de se l'approprier. Ces usager/ères seront défini/es, par la suite, par le terme de dominant/e
Extrait de carnet de terrain, 16 juillet 2022 à 11h, parc Gaucheret « Deux espaces minéraux existent dans le parc Gaucheret, l’un est au cœur du parc, l’autre à l’extérieur en relation directe avec la voirie qui le contourne (Cf. fig 51). Dans ce dernier, je note un nombre conséquent de passant/es, en voici la liste :
- Trois femmes
- Une femme
- Une femme
- Une femme
- Une femme
- Deux femmes
- Un homme avec un petit garçons
- Une femme avec son bébé en écharpe
- Une femme et un homme
- Deux hommes
- Une femme »
163 LENNEL Emmanuelle. « Une architecture de revitalisation urbaine : production et appropriation des nouveaux espaces publics bruxellois ». L’espace des Sociologues (2018), pages 89 à 112. Disponible en ligne : https://www.cairn.info/l-espace-des-sociologues 9782749258126-page-89.htm
164 Ibid.
165 Ibid


Extrait de carnet de terrain, 15 avril 2022 à 15h, parc de la Senne, zone de la place de la reine
« Arrivée sur place, 8 hommes seuls sont chacun assis sur un banc. Ils resteront pendant les 30 minutes de mon observation. Lors de ce délai, je note le passage :
- Une femme
- Une femme avec son chien
- Un homme âgé
- Deux adolescentes
- Un homme
- Trois femmes avec une poussette
- Deux femmes
- Groupe de 3 femmes et deux hommes »
Extrait de carnet de terrain, 30 avril 2022 à 12h, parc Gaucheret, zone intitulée Place n°2 dans le livret page 85
« La fréquentation du lieu est calme aujourd’hui. Une petite fille avec sa trottinette déambule sur la place surveillée par son papa, assis sur l’un des bancs présents. Quelques, minutes plus tard, deux garçons avec leur vélo arrivent. Plus tard, un pré-adolescent avec une trottinette électrique arrive en criant, rigolant tout en essayant de faire des dérapages devant ses copains qui le suivent derrière lui. Les deux petits garçons s’arrêtent pour le regarder. La petite fille retourne auprès de son papa. »
Bien que les espaces publics aient des bienfaits sociaux166 , souvent les utilisateurs/trices ne s’y attardent pas, et passent leur chemin. L’espace n’est plus un espace de loisir, de détente et de rencontre, mais un espace fonctionnel utilisé, en l’occurrence ici, comme des lieux de passage. L’espace public est oublié, invisible aux yeux de certain/es qui le traversent. En fonction, des heures de la journée (sortie d’école, de travail, pause déjeuner…), les lieux de passage peuvent être plus ou moins fréquentés Lorsque c’est le cas, l’espace est moins propice au jeu (réf. Extrait de terrain du 15 avril du parc de la Senne), constat qui sera nuancé par la partie avec le rapport à l’eau. Toutefois, il arrive que l’espace soit investi de manière ludique (réf. Extrait de terrain du 30 avril du parc Gaucheret). La surface lisse et plane permet aux enfants de pouvoir rouler à vélo, à trottinette ou en rollers plus facilement. Les bancs autour de cet espace le délimitent, et permettent aux parents de s’asseoir entre la place et la voirie. Une manière de contrôler facilement le jeu de l’enfant à distance. Par ailleurs, ces activités sportives, pratiquées par les enfants, comme le vélo, ou la trottinette, sont souvent l’usage ludique principal de ces places minérales qui facilitent la déambulation avec ces véhicules
166 RIVIERE Clément. « Les enfants, révélateurs de nos rapports aux espaces publics » [En ligne]. 2012. Revue métropolitiques, mis en ligne le 18 juin 2012 [consulté le 10 janvier 2021]. Disponible sur internet à l’adresse : www.metropolitiques.eu
A la place Bethleem, la place circulaire est abordée d’une estrade en demi-cercle, qui est interrompu par un toboggan (Cf. Fig. 53). La place est délimitée par le mobilier urbain qui l’entoure, et qui permet de la mettre à distance de la voirie. L’espace central est, à contrario du parc Gaucheret et de la Senne, un espace actif dominé par une caractéristique ludique. C’est-à-dire, que pour chaque observation, les enfants étaient les seul/es à investir l’espace
Extrait de carnet de terrain, 12 avril 2022 à 15h41, place Bethleem
« Deux jeunes filles (environ 10 ans) font du roller sur l’espace central. Une petite fille de 6 ans est à vélo accompagnée de sa sœur un peu plus vieille. Une maman joue avec ses deux filles en leur jetant un ballon de foot qu’elles doivent aller récupérer le plus rapidement possible. Pendant ce temps, autour du toboggan, trois jeunes garçons s’amusent avec une jeune fille à glisser ensemble. Sur l’estrade, les parents (plus de mamans que de papas) attendent et regardent leurs enfants jouer. »
Extrait de carnet de terrain, 24 avril 2022 à 15h31, place Bethleem
« En plein milieu de l’après-midi ce dimanche, la place Bethleem est remplie d’enfants. Six enfants (4 filles et 2 garçons) sont au toboggan. Deux garçons jouent au ballon entre eux. Un groupe de trois filles (environ 9 ans) joue ensemble, deux d’entre elles sont en rollers. Un père et son fils se font des passes avec un ballon. Deux adolescents, font des tirs au but au niveau de l’estrade. »
Malgré une multitude d’usages, chacun/es trouvent leur place. Aucun groupe ne nuit à un autre, et tous cohabitent La place Bethleem amène un jeu varié, et mixte. Des événements qui ne sont pas systématiques à tous mes cas d’études. Pour autant, cette mixité d’usages, je la retrouve partiellement, dans le second espace minéral du parc Gaucheret (Cf. Fig. 54). Elle est néanmoins à nuancer sur la mixité du genre des usager/ères.


Extrait de carnet de terrain,11 avril, 13h30, parc Gaucheret :
« Une mère et son fils arrivent pour jouer au badminton. A côté d’eux, un garçon joue au football tandis que deux filles assisent sur le banc discutant. Les filles vont inclure le jeu une fois que les garçons leur proposent de faire le jeu de 1,2,3 soleils »
Ce que je constate, c’est que les jeunes filles investissent l’espace une fois que le jeu du ballon est écarté, et qu’une autre activité est proposée. Par manque d’intérêt certainement pour le sport, les filles préfèrent jouer à autre chose, ou de discuter entres elles. Cet extrait montre également que l’espace minéral est capable d’apporter d’autres possibilités de jeu et d’appropriation. Elle n’est pas figée sur un usage comme les terrains de sport, et permettent de varier le jeu en le rendant plus égalitaire.
Extrait de carnet de terrain, 12 avril 2022 à 14H26, place Morichar
« La place minérale (cf. Fig. 55), est une fois de plus investie par le skateboard. Cinq adolescents, et une adolescente roulent sur l’espace sans se soucier réellement des autres. Une petite fille en roller, un petit garçon à trottinette et un autre à vélo, tentent de se faire une place. Un père avec une poussette fait le tour de l’espace minéral sans s’y hasarder. Il finit par le traverser pour y retrouver sa fille en roller au centre de la place. Il lui conseille de faire attention, pour finalement la restreindre à une zone proche de lui. »
Ce qui est habituel, pour la place Morichar, c’est la présence du skate sur la place minérale. Pour toute observation réalisée à cet endroit, l’espace est à chaque fois dominé par ce sport. D’autant plus, que cette domination est constamment représentée par le genre masculin.
C’est alors que la cohabitation avec d’autres usages devient difficile. Les skateur/euses non aguerri/es parfois, se jettent sur l’espace et essayent de réaliser des figures. Si ces dernières ne fonctionnent pas, le risque de chute est élevé et la planche propulsée quelques mètres plus loin. Non seulement, l’appropriation couvre la totalité de la surface, mais elle est aussi instable et imprévisible. Ce constat amène l’hypothèse sur la raison pour laquelle les individu/es ne traversent pas l’espace, sûrement par peur de se faire heurter. Le jeu des enfants en est alors impacté d’une certaine façon. L’extrait du 12 avril à la place Morichar dépeint un contrôle et une peur des parents face à leurs enfants qui jouent dans cet espace, si bien qu’ils préfèrent quelquefois les rappeler ou les suivre. L’appropriation est moins spontanée, à cause de cette occupation dominante qui entraîne un contrôle parental sur le jeu de l’enfant plus conséquent.

Extrait de carnet de terrain, 12 juillet 2022 à 18h, place Morichar
« Ce jour-là je compte une dizaine de skateurs sur la place. Avec eux, deux petits garçons à trottinette, ainsi qu’une fille avec un garçon chacun sur leur vélo. Deux jeunes filles arrivent sur l’espace munies de leur roller, et s’installent sur les marches pour se préparer. Une fois prêtes, elles regardent l’espace et hésitent à se lancer. C’est qu’au bout de 5/10 minutes, qu’elles prennent finalement la décision de se lever. Non loin de là, deux jeunes garçons de 11/12 ans arrivent sur l’espace avec un ballon. Ils se mettent immédiatement à jouer dans une petite zone, pour finalement prendre de plus en plus de place. Tandis que les skateurs s’adaptent à eux et se restreignent à une partie réduite de l’espace »
Extrait de carnet de terrain, 12 mai 2022 à 14h30, Place
Morichar :
« Un groupe de 16 enfants, encadrés par un professeur d’école, est venu sur la place Morichar pour y faire du vélo. Ils recouvrent alors l’entièreté de l’espace. Le skate perd de plus en plus son espace, malgré quelques skateurs encore sur le terrain. Au bout de 10 minutes, le skate n’avait plus sa place. Un garçon arrive pour rejoindre ses amis, déjà sur place. En voyant tous les vélos, il s’écrie : « Hey quoi, c’est pris par les vélos aujourd’hui ?? » »
Bien que le skate soit continuellement l’usage dominant, celui-ci peut s’adapter ou s’effacer face à d’autres utilisations L’extrait du 12 mai de la place Morichar démontre que la seule façon de casser un groupe dominant et de le remplacer par un autre. Je peux alors faire le lien avec l’interview de Laura Chaumont qui travaille à l’ASBL Garance, qui a déclaré pendant celle-ci que « la non-mixité c’est le seul moyen d’arriver à l’égalité, sans la nonmixité on n’y arrivera pas »167. Selon elle, il faut être catégorique, et dédié une zone de l’espace public pour une activité réservée aux filles. Or dans ce cas-là, l’espace n’est jamais réellement rendue mixte. Certes le travail est long et rigoureux, mais n’existe-t-il pas d’autres manière plus nuancée ?
Dans ce travail d’analyse certains espaces minéraux, notamment celui de la place Morichar, ne sont pas tout public, ni multifonction, ni égalitaire en termes de genre. Cependant, cette conclusion ne s’applique pas pour tous, car d’autres sont plus diversifié en termes d’usages et d’usager/ères. La place Bethleem est un bon exemple pour illustrer la possibilité d’un espace minéral mixte, et égalitaire dans l’intégration des enfants dans l’espace. Le jeu prend place et forme dans un espace minérale sécuritaire, sans groupe dominant pour évincer cela.

Les espaces verts
La définition d’« espace vert » est assez vaste. Elle se réfère, comme le définit la Cellule Paysage et Nature du Service Public de Wallonie (SPW), à :
« Un espace vert public est un espace non construit à dominante végétale pouvant inclure un ou plusieurs points d’eau, accessible et ouvert à tous, situé sur le domaine public. Cet espace ne doit pas faire l’objet d’appropriation par un groupe social et doit s’adapter à la diversité des usages que l’on peut en faire (loisir, récréatif, détente, pédagogie, espace structurant, cadre de vie, etc.). »168
Les espaces verts urbains sont souvent envisagés comme des lieux calmes, opposés au bruit de la ville, favorisant la relaxation et la détente169. Ainsi Long et Tonini identifient que les citadin/es utilisent souvent ces espaces pour fuir, se cacher ou oublier la ville.170 Dans le cadre de mes observations, il a été intéressant de se pencher sur ces espaces et comprendre leur utilisation ainsi que leur fonctionnement. Dans ce mémoire, j’utilise cette notion d’espaces vert pour qualifier les grandes étendues vertes des parcs observés, c’est-à-dire les pelouses En effet, quatre des cas d’études disposent d’un espace gazonné : le parc Gaucheret, la place Morichar, le parc de le Jeunesse et le parc roi Baudoin.

168 CAP RURALITE. « Espaces verts et verdunisation des espaces ». Wallonie. [Consulté le 3 août 2022]. Disponible sur internet : http://www.capru.be/espaces-verts-et-verdurisation-des-espaces
169 LONG Nathalie et TONINI Brice. « Les espaces verts urbains : étude exploratoire des pratiques et du ressenti des usagers ». Natures et Métropoles, n°2, volume 12, (2012).
170 Annexe n°4.



Extrait de carnet de terrain, 16 juin 2022 à 16h46, place Morichar :
« L’espace vert est investi par un bon nombre d’usager/ères. Le beau temps incite les gens à se poser. Aujourd’hui ; deux jeunes hommes font une partie de molkky, près d’eux deux amies partagent une bière. Une femme seule est allongée par terre et écoute de la musique. Peu de temps après une famille s’installe pour pique-niquer. »
Extrait de carnet de terrain, 9 juillet 2022 à 17h25, parc de la Jeunesse :
« Journée de canicule. Dans le parc de la Jeunesse, un couple joue au mollky, tandis qu’un autre est posé à l’ombre sur des chaises de camping. Deux hommes bronzent en plein soleil eu centre de l’espace vert. Non loin d’eux, une femme fait de même avec un livre en main. »
Extrait de carnet de terrain, 24 avril 2022 à 15h58, parc Gaucheret :
« Deux familles se sont rejointes pour pique-niquer ensemble, dans les espaces ombragés de l’espace vert. En plein soleil, deux hommes discutent assis sur l’herbe. Une femme arrive sur le parc Gaucheret et s’installe directement au pied d’un arbre, elle semble faire une pause dans sa balade. »
D’une manière générale, cette diversité d’occupation chez les adultes était souvent observable pour les espaces verts de la place Morichar, du parc Gaucheret et du parc de la Jeunesse. Pour les enfants, cette diversité était plus compliquée à observer. La première partie de ce mémoire a fait l’état des bienfaits des espaces aux formes organiques pour les enfants, en leur suscitant une liberté de jeu171. Qu’en est-il réellement des cas d’étude choisis ?
Extrait de carnet de terrain, 30 avril 2022 à 12h15, parc Gaucheret : « Dans l’espace vert du parc Gaucheret, deux structures/sculptures (Cf. Fig. : 60) sont positionnées l’une en face de l’autre. Une fille et un garçon jouent à grimper dessus. Derrière eux, deux garçons jouent au foot. »
Extrait de carnet de terrain, 1er juin 2022 à 18h30, place Morichar : « Un petit garçon à vélo circule autour de la plaine verte sur la partie minérale. D’autres enfants, deux garçons et trois filles s’amusent à escalader les grandes pierres qui sont sur place. (Cf. Fig. 61). Pendant ce temps, un garçon avec un ballon regarde le terrain de foot en contrebas, il semble attendre son tour. »
171 BRUXELLES ENVIRONNEMENT. « Le jeu dans la ville-Pour un maillage jeux à Bruxelles » [En ligne]. Environnement. Brussels, 2015, p 115. [Consulté le 14 décembre 2020]. Disponible sur internet à l’adresse : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/BRO_JeuDansVille_FR.pdf



Les enfants s’approprient l’espace à leur manière tout en découvrant ce que celui-ci leur propose. Notamment ici, des structures sur lesquelles ils peuvent grimper et jouer. Toutefois, les enfants ne s’y attardent généralement pas longtemps, car rappelés par les parents accompagnant/es qui poursuivent leur chemin Les espaces verts ne semblent pas avoir d’intérêt pour les parents, qui préfèrent aller à l’aire de jeux. Le jeu de l’enfant est donc dirigé et encadré par l’autorité parentale qui décide où et quand celui-ci se fera. Ce non-intérêt peut s’expliquer par la présence de la voirie accolé à l’espace, mais aussi par la facilité de l’encadrement dans les aires de jeux.
Extrait de carnet de terrain, 9 juillet 2022 à 17h10, parc de la Jeunesse :
« Deux mamans arrivent sur l’espace, avec trois enfants, deux garçons et une fille (respectivement 5-8-10 ans environ). Une fois installés, les enfants s’éloignent en courant, et jouent à ce que je crois comprendre être le jeu du loup172, au bout de quelques minutes, une des mamans leur crie : « Hey, revenez là !! ». Les enfants rebroussent chemin et jouent plus proche des mamans. » à l’extrait de terrain du 9 juillet du parc de la Jeunesse Les points orange représentent les mamans, les croix les enfants. Retour des enfants vers les mamans, du cercle noir au cercle rouge.
Pour autant, lorsque les parents décident quand même de s’installer dans l’espace vert, les enfants sont assignés à une zone de jeu, de laquelle il ne faut pas s’éloigner. Ce comportement peut s’expliquer par l’étendue du parc de la Jeunesse qui dissuade les parents de laisser autonomes leurs enfants (Cf. Extrait de terrain du 9 juillet au parc de la Jeunesse) Dans le sens contraire, l’espace vert de la place Morichar rend les parents plus souples avec les enfants, grâce à sa taille relativement petite qui se rapporte à celle d’un square.
D’une manière contraire, l’espace vert du parc roi Baudoin est plus nuancé. En effet, ce parc est fragmenté en petits espaces, dans lesquels on retrouve des bouts de surface verte disperser, parfois avec des bosses (Cf. Partie sur la topographie page 130). Néanmoins, cela n’empêche pas les gens de s’y poser entres amis ou seuls. La différence notable avec les trois premiers espaces verts énoncés, c’est que les usages en rapport avec le sport et le loisir, étaient rare à observer. Les espaces étriqués et bossus ne leur permettant pas de jouir d’un espace confortable pour ces accommodations. J’ai donc émis l’hypothèse que la surface de l’espace vert était un élément à prendre en compte dans l’attractivité de celui-ci. Malgré tout, il est à noter, qu’au cours de mes observations dans les espaces verts, en général, j’ai relevé plus d’adulte que d’enfant. En se penchant sur leur aménagement, je constate que, pour le parc Gaucheret, roi Baudoin, et de la Jeunesse, une aire de jeux se situe non loin des plaines vertes. Par conséquent, lorsque le choix entre un espace vert et un espace de jeu dédié est possible, les parents vont opter pour le deuxième. Je reviens alors à ce qui a été dit dans le cadre théorique avec cette idée que les enfants sont cloisonné/es dans des aires de jeux, provoquant leur exclusion des espaces publics173
172 Jeu où un enfant est désigné « loup » et doit toucher un des autres joueurs pour lui transmettre le rôle du loup.

Finalement, les espaces verts planes présentent une diversité d’occupations, moyennant une échelle suffisante. Outre cette multitude d’usages, ces espaces sont surtout accessibles pour tous sans inégalité de genre, à l’inverse des terrains de sport. C’est-à-dire qu’aucune règle n’est fixée et que c’est au bon vouloir des utilisateur/trices. Cependant, cette dynamique ne se retrouve pas auprès de l’utilisation qu’en fait les enfants. Dans la mesure où les parents assignent un périmètre défini aux jeux de l’enfant, lorsque l’espace est trop vaste et sans possibilité d’une large visibilité.
173 PAQUOT T. « La ville récréative : enfants joueurs et écoles buissonnières ». Infolo, 2015 [consulté le 10 janvier 2021]. Disponible sur internet à l’adresse :http://www.barricade.be/publications/analyses-etudes/penserune-ville-enfants-admis-une-proposition-un-espace-urbain-plus
A présent, prenons le cas de la topographie présent dans deux des cas d’étude. Cette thématique est ressortie à la suite des observations du parc Gaucheret et du parc roi Baudoin, en raison de son appropriation en jeu par les enfants. Tout d’abord, dans le développement qui va suivre, le terme de topographie renvoie à un relief accidenté du terrain, relatif à des bosses174 soit végétales, soit minérales.


Plus précisément, le parc Gaucheret est conçu avec un relief assumé dans la composition des espaces. Il se manifeste particulièrement au centre du parc, près du terrain de foot (Cf. Fig 63 et Livret page 85). Mes observations se sont donc concentrées sur cet espace. A contrario, le parc roi Baudoin propose deux espaces où les bosses présentes (Cf. Fig 64) sont à une échelle plus petite. En revanche, deux revêtements différents sont à noter dans ce parc, à savoir un en minéral, et l’autre en végétal. Autrement dit, cette différence permettra d’observer s’il y a une distinction notable sur l’appropriation par le jeu.
Zone avec relief végétal
Zone avec relief végétal
Zone avec relief minéral


Extrait de carnet de terrain, 15 mai 2022 à 14h, parc Gaucheret :
« En ce dimanche, le temps est plutôt couvert, mais quelques enfants sont présent/es dans le parc. Deux garçons âgés plus ou moins de 10 ans se bousculent sur la pointe de la bosse. Jusqu’à ce que l’un d’entre eux descende en faisant des roulades. Peu de temps après l’autre le suit. »
Extrait de carnet de terrain, 29 mars 2022 à 17h30, parc Gaucheret :
« Une petite fille (environ 6 ans) tente de monter la bosse. Une fois arrivée en haut, elle regarde sa mère plus loin en levant les bras au ciel, signe de victoire. »
Extrait de carnet de terrain, 2 juillet à 13h, parc roi Baudoin :
« Un père et son fils à trottinette arrivent sur l’espace. Ce dernier se lance sur la place où se situent les bosses minérales. Il s’établit alors un circuit, et fait en boucle le même trajet en s’amusant avec les ondulations. »
Ces trois extraits de terrain démontrent une appropriation par le jeu de ces espaces. Les bosses donnent aux enfants la possibilité de se l’attribuer de la manière qu’ils désirent, mais surtout, en explorant et donnant de la valeur ludique à cette configuration. De sorte que, ces bosses deviennent un espace qui stimule l’imaginaire et le corps des enfants. Comme l’illustre l’extrait de carnet du 15 mai au parc Gaucheret, les enfants sur place, roulent, grimpent, d’autant plus, qu’il y a aussi une idée de dépassement de soi, avec cette volonté d’atteindre le sommet en se challengeant. En conséquence, ces bosses amènent une diversité dans le jeu, ainsi qu’une place à ce dernier dans l’espace public. Par ailleurs, il est à noter qu’à aucun moment, lors de mes observations, des inégalités de genre ont été relevé. L’espace mixte, et égalitaire est partagé par tous les enfants sans qu’il n’y ait de mise à l’écart en fonction du genre.

Au-delà de cette appropriation de l’espace par le jeu, j’ai pu observer un autre phénomène avec cette configuration. Extrait de carnet de terrain, 18 avril 2022 à 14h, parc roi Baudoin : « L’espace ensoleillé accueille aujourd’hui de nombreux groupes d’enfants et d’adolescent/es. L’espace vert en relief n’est pas investi. Peu de temps après mon arrivé, je vois quatre jeunes adolescents arriver dans le parc avec des raquettes et un filet de badminton. Le relief du terrain ne leur permet pas de jouer, et avec la présence de grands arbres aux alentours, ils viennent s’installer sur un bout d’herbe entre la place minérale et la balançoire » (Cf. Fig. 68)
Comme je l’ai énoncé dans la partie des espaces verts, les surfaces planes avec un gazon entretenu amènent une plus grande diversité et facilité d’utilisation. Ces bosses limitent les possibilités d’usages « classiques » liées au sport tel que le football, le badminton (Cf. extrait de terrain du 18 avril du parc roi Baudoin). Il est vrai que pendant mes cinq mois d’observation, aucune appropriation dominante175 n’a pris le dessus à ces endroits. Par conséquent, cela permet de susciter d’autres types d’usages que j’ai énoncé juste avant, et de décaler les usages sportifs sur leur périphérie ou dans les lieux dédiés.
175 Ce terme fait référence au phénomène que j’ai pu apercevoir à la place Morichar, avec la place du skate qui domine l’espace.
Le rapport à l’eau

Pendant mes enquêtes de terrain, j’ai compris que certaines configurations des espaces publics peuvent bloquer le jeu des enfants. Des espaces, comme le parc de la Senne ou le parc roi Baudoin sont des lieux de passage (cf. parti sur les espaces minéraux), où l’abondance des gens qui circulent entrave cette appropriation par le jeu. Les enfants, investissent, alors, que très rarement ces zones. Néanmoins, cette situation change, lorsque les fontaines placées à ces endroits, sont activées. L’espace se transforme en terrain de jeu, complétement investi par des enfants.
Extrait de carnet de terrain, 24 juin, 14h, parc de la Senne
« En début d’après-midi, je suis surprise de voir le parc de la Senne investi par le jeu. La place de la reine (cf. Livret page 88) est occupée par 3 filles et 5 garçons qui jouent avec l’eau des fontaines. Ces dernières étant placées au milieu du passage (Cf. Figure 69), les passants, doivent éviter cette zone afin de ne pas se faire arroser ».
Extrait de carnet de terrain, 9 juillet, 16h30, parc roi Baudoin
« L’espace minéralisé (cf. Livret page 97) est en plein soleil ce jour-là. Les enfants sur place sont tenus de rester à l’ombre par leur parent, et les observations sont devenues peu intéressantes. Puis, l’eau s’active, et une petite dizaine d’enfants courent pour aller se mouiller. La place, jusque-là déserte, devient rapidement une zone de jeu. Les parents ne trouvant rien à redire au vu de la chaleur étouffante à cette heure-là.»
Les enfants ne se soucient pas du reste des utilisateur/trices (cf. extrait de terrain du 24 juin), mais s’adonnent à leur amusement Pour le parc de la Senne, les enfants arrivent, à ce moment-là, à occuper une grande partie de l’espace, et à légitimer leur présence. Les gens s’adaptent au jeu de l’enfant, en le contournant pour pouvoir continuer leur chemin (Cf.
Figure 69) D’après les observations, la place minérale du parc roi Baudoin, n’est pas un endroit propice au jeu, qui s’explique par son utilisation de passage. Pour autant, des fontaines sont aussi installées sur la place, et comme pour le parc de la Senne, l’engouement autour de celle-ci souvent par les enfants, entraîne une appropriation ludique du lieu Qu’en est-il lorsque l’eau intervient dans un espace où le jeu est déjà affirmé par les enfants ?



L’eau intervient aussi dans un autre cas d’étude, c’est celui de la place Bethleem. D’après mes observations précédentes à son sujet, cette place propose deux ambiances sur deux espaces différents. L’un d’entre eux, que je nomme d’espace inférieur (Cf. Livret page 81), est souvent investi par le jeu des enfants. L’engouement de ce dernier prend de l’ampleur lorsque les fontaines sont activées.
Extrait de carnet de terrain, 29 juin, 19h, place Bethleem « Ce soir-là, les fontaines sont activées (Cf. Fig. 71). Une vingtaine d’enfants, d’environ 7/8 ans, s’amusent avec l’eau en s’éclaboussant, et en se mouillant de la tête au pied. Je compte 7 filles et 9 garçons sur l’espace, tous prêt à jouer de bon cœur. Les parents, hommes et femmes, les regardent depuis les bancs placés autour. »
La présence de l’eau dans les espaces publics a donc plusieurs bienfaits. Au niveau de l’appropriation spatiale, les enfants se sentent plus légitimes et s’affirment d’autant plus lorsque des fontaines sont incluses dans l’espace. Dans le rapport Jeu dans la ville176, il soulève également les bienfaits de l’eau dans l’espace public en écrivant : « La présence de l’eau, surtout si elle permet de jouer et d’interagir, est un des éléments les plus attractifs d’un espace public177». De plus, il précommande d’intégrer, systématiquement, l’eau dans les projets urbains, quand celui-ci le permet. Par ailleurs, mes observations me permettent d’affirmer que l’eau amène un jeu sans inégalités de genre. Le jeu est mixte et égal entres les enfants, sans qu’il y ait un genre plus exclu qu’un autre. Il est donc intéressant d’envisager la mise en place de ce type de dispositif dans la conception de nos espaces publics pour le rendre plus inclusif envers les enfants. Cependant, il y a des limites à prendre en compte pour ce critère. C’est son côté aléatoire vis-à-vis de la météo, car si le temps ou la période de l’année ne le permettent pas, les fontaines ne seront pas activées, et donc les enfants seront privés de cet aspect ludique.
176 BRUXELLES ENVIRONNEMENT. « Le jeu dans la ville-Pour un maillage jeux à Bruxelles » [En ligne]. Environnement. Brussels, 2015. [Consulté le 14 décembre 2020]. Disponible sur internet à l’adresse : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/BRO_JeuDansVille_FR.pdf
177 Ibid., page 115.


178 ASBL GARANCE. « Femmes au parc ! Améliorer l’accés des femmes aux espaces verts ». [En ligne] Garance ASBL, septembre 2017 [consulté le 15 avril 2022]. Disponible sur internet à l’adresse : http://www.garance.be/docs/17FAPRapportfinalRegion.pdf
Cette thématique a été découverte dans le rapport Femmes au parc !179 de l’ASBL Garance, qui évoque les études de la ville de Vienne sur l’intégration de genre dans les espaces publics. Le rapport reprend alors le terme de « lieux de retrait » qui correspond aux espaces plus intimistes et reculés de parc dans lesquels les jeunes filles/adolescentes se rassemblent. « Dans des espaces de retrait, elles peuvent rester entre elles pour communiquer et faire communauté, loin de regards désapprobateurs d'adultes ou de provocations de garçons »180. En prenant connaissance de cette notion, je me suis demandée si ce genre d’espace existait dans les cas d’études choisis.
Comme le souligne, l’ASBL Garance, ces espaces de retraits sont spécifiques aux adolescentes. Des adolescentes qui ont souvent été absentes de mes observations. Certains auteurs181 dévoilent que cet absentéisme est issu de la surprotection des parents vis-à-vis de leur fille, en considérant la ville comme trop dangereuse pour elle. Dans certains cas d’étude, notamment au parc roi Baudoin, et à la place Bethleem, à aucun moment, des adolescentes ont investi l’espace. Pour premier, cela peut s’expliquer à la part de la population des 12/17 ans faible (cf. Tableau 1) Au sujet du deuxième, l’espace en hauteur aménagé par du mobilier urbain est souvent investie par des hommes qui ont une vue sur tout l’espace en contrebas. Cette configuration donne l’impression d’une domination sur le reste, et peut rebuter les jeunes filles en pleine puberté.
Au sujet du parc de la Jeunesse, de la place Morichar, du parc de la Senne et du parc Gaucheret les espaces sont plus variés et donnent peut-être la possibilité aux adolescentes d’être davantage présente, de manière dissimulée.
Extrait de carnet de terrain, 13 juillet, 11h15, parc de la Jeunesse
« Non loin de l’espace central, qu’est l’espace vert, deux adolescentes sont installées au pied d’un arbre. Une autre est sur les abords du terrain de basket et attend. Sur un banc proche du chemin principal, deux jeunes filles discutent entres elles. Le reste des adolescentes que je vois, traversent le parc, mais ne s’y arrêtent pas. »
179 ASBL GARANCE. « Femmes au parc ! Améliorer l’accés des femmes aux espaces verts ». [En ligne] Garance ASBL, septembre 2017 [consulté le 15 avril 2022]. Disponible sur internet à l’adresse : http://www.garance.be/docs/17FAPRapportfinalRegion.pdf
180 Ibid., page 29.
181 RIVIERE Clément. « Les enfants, révélateurs de nos rapports aux espaces publics » [En ligne]. 2012. Revue métropolitiques, mis en ligne le 18 juin 2012 [consulté le 10 janvier 2021]. Disponible sur internet à l’adresse : www.metropolitiques.eu
Extrait de carnet de terrain, 12 juin, 14h, parc de la Senne
« En ce jour assez fréquenté, avec la présence des fontaines, je m’attarde sur les usager/ères présent/es. Un groupe de dix enfants joue surveillés par les parents justes à côté. Sur les bancs, deux adolescents discutent et rigolent. Une famille est posée sur un banc non loin de là. Un groupe de 3 adolescentes passe, mais continue leur chemin. Plus tard, une adolescente cette fois-ci seule traverse aussi le parc ».
Ce qui est commun à ces deux extraits, c’est le passage des adolescentes dans les espaces publics sans pour autant l’investir. Ceci démontre le peu d’intérêts qu’elles accordent à ce qui les entoure. Au parc de la Jeunesse, l’espace vert est quant à lui investi de manière périphérique (Cf. Fig. 73) par les adolescentes. A l’inverse des enfants, elles ne vont pas s’autoriser à se poser au centre du parc, préférant l’utiliser de manière fonctionnelle en le traversant.

Sur la place Morichar, il y a un espace qui fait le lien entre la place minérale et l’espace vert, je la nomme dans mon livret : l’espace de transition. Tout en longueur, l’espace est caché par deux talus de végétation, en proposant une variété d’assises avec des transats et des bancs (Cf. Fig 74)
Extrait de carnet de terrain,12 avril, 15h11, Place Morichar : Croquis de l’espace de transition, avec en orange les adolescentes, et en violet les adolescents.

Le comptage genré du 12 avril de la place Morichar fixé sur la zone de transition indique qu’elle est investie principalement par les jeunes adolescents et adolescentes. Et plus particulièrement, ce jour-là, par des adolescentes, qui se rejoignent pour discuter à l’abri des regards. La situation de cette observation, n’est pas systématique, car les adolescents y sont globalement plus présents. Cet espace, se rapprochant le plus à cette notion d’espace de retrait, évoqué au début, se voit investir, occasionnellement, par des jeunes filles qui y trouvent leur place.
Dans le même style que l’espace de transition de la place Morichar, il y a la première place minérale du parc Gaucheret (Cf. Fig. 75). Tout comme la description précédente, cette zone est aménagée d’une série de bancs, positionnés de manière parallèle les uns par rapport aux autres. Séparé du reste du parc par un bâtiment, l’espace est à l’écart avec un aspect intimiste. Il n’était donc pas rare de voir des adolescentes se l’approprier.
La notion d’espace de retrait se retrouve également dans nos espaces publics bruxellois. Néanmoins, à l’inverse de la définition préconisée par le rapport de l’ASBL Garance, ces espaces sont moins cachés dans nos observations. Au vu de tous, ces espaces ne sont pas dissimulés, et peuvent être utilisés par tout le monde. Pour autant, leur placement n’est pas central dans l’espace public et reste à l’écart des autres. Par conséquent, les adolescentes se sentent probablement moins regardées et plus tranquilles. Comme je pouvais m’y attendre, ces zones n’existent pas pour les plus jeunes filles dans l’éventualité où je n’ai pas déterminé d’espace à cet effet. Dans l’état actuel des choses, et grâce aux autres thématiques, je peux affirmer que les jeunes filles investissent encore l’espace public partiellement (étant donné que les terrains de sport sont encore des espaces masculins).
Le travail d’observation à Bruxelles et le développement de ces thématiques me permettent d’affirmer plusieurs éléments sur l’usage genré des espaces publics.
Premièrement, l’usage des espaces peut amener une segmentation spatiale genrée. La place du jeu est parfois induite par un groupe dominant présent sur l’espace, c’est alors que les enfants, filles et garçons, ne s’autorisent parfois pas un terrain, car ils ne se reconnaissent pas dans l’usage et dans les usager/ères. Les enfants vont préférer s’approprier des endroits là où d’autres enfants jouent déjà
Pour autant, la configuration, ou la mise en place de certains éléments dans l’espace favorise le jeu des enfants. Je pense alors aux thématiques de l’eau et de la topographie, qui permettent d’apporter à l’espace un aspect ludique à leurs yeux. A contrario des espaces verts qui ne sont pas forcément utilisés par les enfants du fait de leur manque de module ludique, de sécurité, ou parce qu’ils sont placés trop près d’une aire de jeux, qui sera le choix favori des parents.
Pour finir, les observations m’ont permis de déterminer des espaces de retrait parmi les cas d’étude, des espaces intimistes appréciés des adolescentes. Pour autant, elles restent une minorité dans l’espace qu’elles investissent beaucoup moins que les jeunes filles.