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Paroles Suivantes

Paroles Suivantes II michel lombardo Clair Charpentier

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s minette s’insurge — coup de patte sur le nez du minet pressant le jupon des nues statues sur un fil deux ramiers au regard grave pèsent mon travail

un pas en arrière — ce matin le chat hésite à franchir la porte mes vieilles épaules — le vent grince dans les branches des chênes ridés

moquentombrer

réveil sidéré — je reste comme orphelin d’une nuit sans rêve

je ne l’ai rema fait si vitesd

leuparfum s’évadje reste immobile — depuis les branches d’un chêne le geai me surveille

il fait déjà chaud et la vapeur du café brouille mon regard

le’est levé sur la vallée embrumée — silence confus

le chant d’un oiseau couvre le bruit de la ville d’un dais de duvet

comme une rayure qui égratigne son chant le cri du loriot

mille bruissements dans le jardin qui s’éveille — les arbres complotent

plumes rebroussées tous les oiseaux se sont tus sous l’assaut du vent

une libellule au-dessus de la piscine froisse le soleil

le loriot reprend ses longues palabres où il les avait laissées

dans le cerisier un frelon de bon matin se paie du bon temps

dans la nuit de mai au ciel les étoiles ont l’odeur d’herbe coupée

très haut sur le ciel les hirondelles burinent des runes fugaces

au milieu du lierre le jasmin a accroché des étoiles blanches

le soleil disperse une brume parée d’or — murmure de l’aube

« de longs crissements « le vent d’un doigt coléreux « feuillette l’automne

les ombres tranchantes sans cruauté cependant morcellent le pré

chaud matin de mai — sur le pré l’herbe transpire une odeur de foin

sous la surveillance d’un troupeaux de nues laiteuses déjà je m’essouffle

le ciel s’est couvert — même les coquelicots paraissent surpris

le volet poussé 152


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un ciel de flammes brulantes inonde la chambre

les lauriers se redressent larmoyants encore

l’odeur des cerises fait sourire la maison — jour des confitures.

contre la lueur de l’éclair l’ombre du chat est toute hérissée

midi au jardin — le chat promène son ombre à l’ombre chênes

l’orage oublié il reste dans le verger un parfum de pluie

la journée commence sous l’écrasante chaleur d’un été précoce

la vallée se tait — même les oiseaux respectent un profond silence

des filets de sueur débordent de mes sourcils — la journée s’embrase

odeur du verger au soleil après la pluie — qui s’en lasserait

vacillant sur l’eau des miroirs d’argent ardents incendient mes yeux

deux papillons blancs dessinent des cœurs sous l’œil d’un papillon noir

la fenêtre ouverte sur la fraicheur de la nuit va vomir des flammes

les papillons mêmes abandonnent leurs dessins — le vent se renforce

sur le pré jauni les derniers coquelicots ont baissé les armes

les abricotiers à la couleur du soleil se sont parés d’or

la lumière jaune déchiquète les contours des ombres malades

une lassitude flottant dans le vent léger plisse ses paupières

odeur du matin après la pluie le jardin est semé de perles

à l’ombre des chênes le chat écoute songeur le chant du loriot

face à face un chat et un écureuil dissertent du monde flottant

un trait affuté tranche la terrasse en deux — même l’ombre brûle

la vallée s’engouffre monstre écumant de colère par la vitre ouverte

éclat du matin dans une fraicheur où brille le chant du loriot

l’orage en colère bouscule et met à l’épreuve le flegme des chênes

heure du dragon — l’air se remplit du silence brûlant des cigales

battus par l’orage 153


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à l’ombre des chênes le chat plisse des paupières — paisible il s’endort

dès la première heure l’été pèse sur le souffle crissant des cigales

le café tiédit à l’ombre déjà brûlante de l’auvent futile

dans le ciel venteux un gros bourdon jaune et rouge tournoie et vrombit

les fourmis pas sottes contraintes à un dur labeur font le tour par l’ombre

le vent a cessé la fournaise est revenue l’été plie l’échine

la mue de cigale entre les rides du pin — costume de scène

frisson à six heures — je voudrais le conserver jusqu’après midi

des vapeurs torrides serpentent de la vallée jusqu’à l’ombre inquiète

le ventilateur ahane d’un souffle moite — la journée s’étire

les fleurs de troène délient leur parfum gravé de chaleur pesante

le soleil domine à midi dans les collines l’horreur des cigales

matin encore frais — les ombres sont à l’affut des taches solaires

dans le ciel violent ils tournent-tournent sans cesse les gros bourdons lents

un geai sans frayeur glane dans la trace-même des lames grondantes

les ombres s’estompent — farouchement les nuages vaincus par le ciel

pas le moindre souffle pour rider la peau épaisse de la canicule

encore timide le soleil semble hésiter à franchir la butte

la scie des cigales brise le bourdonnement du ventilateur

lent labeur du temps — la fraicheur du matin même n’arase mes rides

le chemin ondoie sous la caresse brûlante d’un soleil féroce

pour la déplacer le moindre geste m’épuise — mon ombre est pesante

d’une aile nerveuse le loriot change de chêne pour se mettre à l’ombre

glissant sur les tuiles pour capturer les étoiles le chat vit sa nuit

un peu moins timide un loriot sur l’olivier près de la piscine

un flux de fournaise force la fenêtre ouverte sur l’été féroce 154


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surpris par le chat l’écureuil saute dans l’arbre — il boira plus tard

il cherche pourquoi je verse de l’eau dans l’herbe d’un œil ténébreux

du ciel sans merci déjà les éclats cuisants nous forcent vers l’ombre

le ciel qui se voile efface toutes les ombres des murailles grises

clémence du vent qui d’une caresse fraiche soulage mon front retenant son souffle la colline incandescente craint l’embrasement

le soleil se lève — déjà des parfums subtils courent les collines il n’est rien de plus cruel que le regard d’un oiseau qui vous transperce d’un bec sec comme l’acier

odeur du café matin tôt sur la terrasse — sommeil en tartine

le soleil se voile — sur la ville qui s’éveille il a explosé

d’un regard blasé il observe les ramiers qui glanent sans hâte

le cri des cigales sèchement siffle la fin des réjouissances

ombre sur le mur — la lanterne chantournée mime une chimère

le soleil déverse une pluie de cuivre ardent — le ciel en fusion

été apaisé — les cigales ont repris leur scie sans cris de colère

la première averse — une odeur de foin mouillé salue le matin

le vent sur ma peau libère de ma cervelle un nœud de corbeaux

accrochées aux aiguilles brillent encor quelques perles d’une pluie fugace

le chant du loriot couvrant le cri des cigales prolonge l’été

la fraicheur surprend agréablement ma peau — cadeau du mois d’août

nuit en pointillés — au matin il n’en demeure qu’une ou deux virgules

l’odeur de foin sec succède au parfum humide de l’aube d’été

le ciel s’est voilé quelques gouttes sont tombées désespérées presque

après la nuit grise de mille endormissements tous mes muscles grincent

devenu limpide le ciel règne sur les pins bruissant de cigales

secoué encore — les ornières de la nuit n’ont pas été tendres 155


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lasses de l’été

il ne reste rien pas même le moindre éclat d’une goutte d’eau

je me lève tard fatigué d’avoir coupé une nuit en tranche

la lente paresse coule épaisse dans mes veines et m’endolorit

un grain est tombé identique au précédent dans le sablier

le matin se gonfle d’un concert de tronçonneuses — les arbres frémissent

aux derniers jours d’août un brin de mélancolie — un ciel pourtant bleu

un soleil timide s’efforce à travers le ciel de croire en l’été

toujours aussi vide la boite de déception creuse le néant

aucun son m’en monte — ce soir la vallée timide se donne au néant

toc-toc qui est là les moustaches du vieux chat brusquement frémissent

la nuit se retire et dépose sur ses rives des rêves râpés

toc-toc qui est là ce n’est qu’un vieux souvenir qui toque à la porte

le jour lui aussi s’écoule jusqu’au moment où l’ombre s’allonge

en arrosant ce matin j’ai ouvert la fabrique d’arcs-en-ciel

un ronronnement — ce matin la vallée bruisse comme une rivière

la vallée bruissait ce matin de la tension d’un jour de rentrée

de petits nuages dissimulent le soleil par intermittence

tombée cette nuit une averse a dévoilé l’odeur d’herbe sèche

une brève averse puis un rayon de soleil brille dans les flaques

une feuille sèche aiguillonnée par le vent s’exerce à l’automne

le lundi matin la vallée grogne et se hâte — fourmi besogneuse

silence du soir la lune se lève à peine — demain est si loin

un frisson me prend — serait-ce déjà la fin de l’été

la fraîcheur soyeuse serpente entre mes frissons — matin de septembre

sur le mur les ombres des pins glissent lentement

matin engourdi — 156


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mes yeux plissent la lumière d’une fin d’été

pare les feuilles roussies de joyaux humides

douceur du pelage — pour les plumes de l’oiseau un chat reste un chat

trois quatre hirondelles se balancent sur un fil — elles tergiversent

le chat queue nerveuse au pied d’un pin à l’affut de deux sillons roux

le matin s’étire en lentes ondulations jusqu’après midi

une nuit houleuse à tanguer entre les rêves — la gueule de bois

malgré la lumière des derniers jours de l’été les matins frissonnent

trainée que le ciel désagrège lentement — un rêve s’abîme

matin d’équinoxe — la nuit dépasse l’été d’un éclat de rire

longue hésitation — le fauteuil se met à geindre de mes flottements

lumière insolente les pins dansent dans le vent premier jour d’automne

un nuage escorte Garlaban coiffé de brume jusqu’au bord du ciel

l’automne déploie un premier matin de laine — le soleil frissonne

sur les carreaux sales la première pluie d’automne grave la poussière

un vol de corneilles dans les frissons du matin grince sur le ciel

des grondements graves comme une toux de titan hérissent le chat

douceur du matin — les yeux fermés je respire l’odeur du café

je traine après moi une ombre lourde et humide — même elle transpire

un pâle soleil franchit difficilement le seuil du matin

un tapis d’aiguilles amortit ma promenade — silence insondable

la lune d’argent au sourire énigmatique se voile et rougit

les mouches s’abreuvent de la transpiration moite qui suinte des feuilles

les brins de fenouil coupés après les averses parfument l’auvent

le ciel de zinc moite frôle la cime des pins — ouate irrespirable

des ombres furtives frôlent les tuiles du toit qui tremblent soucieuses

le soleil naissant

sous le ciel voilé 157


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les glands toquent sur les dalles je sursaute un peu

les feuillages tremblent voilà le vent qui se lève de la nuit inquiète

sur les vitres sales la pluie a creusé la couche de vieilles poussières

le jour apparaît noué aux cordons du ciel comme un linge humide

le tonnerre gronde au loin Garlaban se cache au loin dans la brume

le vieux banc et moi nous nous sommes entendus à l’ombre des chênes

le soleil se lève sur les couleurs saturées de perles de pluie

le mistral sauvage chasse même les rayons d’un soleil vaincu

la fenêtre ouverte invite les grondements à sonder mon crâne

le vent est dompté — finalement le soleil a repris la main

le matin délivre enfin mes yeux de la nuit blanche et pourtant sombre

les paupières closes éclaboussées de lumière un matin d’octobre

le mistral s’enroule autour des perles humides semées par l’orage

une journée grise le ciel pèse sur mon crâne envie de dormir

la fenêtre vibre et la vallée qui s’éveille entre dans la chambre

sur les brins de brume effrangée comme un vieux linge cligne un nouveau jour

tombée d’un ciel morne un halo sans force glisse sur les murs sans ombre

l’ombre des branchages sur l’herbe maintenant mate glisse ténébreuse

l’air est si léger que les rayons du soleil glissent sur les feuilles

le soleil s’étire dans le ciel d’octobre pâle — douceur du matin

le soleil caresse l’herbe humide de rosée — du coup je frissonne

je me réjouis d’en avoir chaussé deux paires — pure laine vierge

d’un ciel barbouillé fendu de trainées livides sourd la pluie malade

les lambeaux de brume se sont dispersés — le matin respire enfin

de longs filaments de brume livide et sale peinent sur les pentes

du tas de compost au soleil une vapeur imite la brume 158


Paroles Suivantes

une heure de plus pourtant cela semble peu pour braver l’hiver

paresseusement novembre s’étire et bâille sur l’herbe glissante

jouir du soleil avant que l’hiver n’enfouisse l’espoir d’un printemps

un soleil rieur m’attendait sur la terrasse — jolie promenade

gris sous mes paupières — des pensées mélancoliques de vieilles pensées

à la haie s’accroche une brume lumineuse — clair matin d’automne

la vallée murmure dans ce doux soir d’octobre — nostalgie pansée

un rai de lumière traverse les feuilles rousses noyées dans la brume

le soleil caresse les nuages paresseux qu’un vent gris houspille

sous le ciel blafard ma lassitude disperse quelques feuilles mortes

un nuage pare les rayons de lune pâles d’un manteau de gaze

une lueur sombre sourd à travers les nuages — les ombres s’effacent

un soleil fripon invite les pâquerettes à ouvrir leur jupe

aux bas de mes chausses les pâquerettes flétries ont laissé un vœu

dans ce soir d’octobre qu’aucun souffle ne traverse la vallée grommelle

douceur du printemps dans la grisaille d’automne — novembre indécis

contre le ciel bleu les feuilles d’automne claires paraissent bien sombres

roulé sous la lampe son sommeil tient compagnie à ma rêverie

un air aiguisé me mord au seuil du verger — l’automne est bien là

le front dans la paume la nuit interrompue pèse sur mes cils brouillés

un soleil espiègle fait de l’ombre aux pots de fleurs posés sur les tombes

estomac brûlant d’une rage réprimée — la nuit a pris feu

la rosée s’efface sous la caresse du vent — et le jour parait

un matin confus dans les rousseurs de novembre succède à la nuit

la pluie insistante accable les feuilles rousses — le jardin s’embrume

dans le laurier-tin comme des fruits étincellent les yeux d’un oiseau 159


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la vallée brumeuse après une nuit confuse lentement s’éveille

sur le bord des heures j’observe le temps qui coule avec embarras

l’odeur du café se mêle aux parfums d’automne — soleil dans les yeux

sur les herbes froides dans les branches tourmentées les ombres vacillent

pousse le volet vieux voyageur fatigué sur un jour nouveau

le soleil bâillant s’abandonne et se dilue dans un lit de nuages

le jour est entré illuminer la maison au saut de la nuit

un frisson m’a pris en repoussant le volet — ce n’est que le froid

printemps en novembre — les feuilles ne savent pas quelle couleur prendre

j’ouvre le volet — un oiseau raye le ciel gris de droite à gauche

novembre s’impose à notre mélancolie — le ciel gris frissonne

la lueur diffuse dans la vapeur du café d’un soleil brouillé

les feuilles se pressent aux recoins de la maison — le vent fait ménage

sur l’auvent de verre la pluie doucement pianote — le café tiédit

héraut de l’hiver le rouge-gorge plastronne dans le laurier-tin

derrière la vitre la pluie qui vernit les feuilles parait presque hilare

soleil dans les yeux je souffle sur le café pour chauffer mes mains

un vol de corbeaux au-dessus de la vallée figée et muette

il est tard déjà — une grasse matinée glisse sur novembre

au-dessus des arbres effeuillés et immobiles le linceul du ciel

l’air vif du matin d’une lame lumineuse trouble mes paupières

par-dessus le ciel serein encore se trame un temps à l’orage

les feuilles craintives fuient devant le vent méchant — larmes et frissons

le ciel acéré comme une lame d’acier disperse ses nues

le matin passé à trainer à la surface d’une mer sans ride

les jours sont bien courts— la lumière de décembre devient plus intense 160


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j’ai usé la nuit le long de corridors noirs — fourbu je suffoque

quand le jour parait la nuit encore est présente après le volet

un voile gris couvre les masques figés de ceux qui gardent l’urne

une aube coupante vient de franchir les collines — le froid devient rouge

lumineux et pur après la nuit tourmentée le jour s’est levé

une brume froide déroule ses filaments sur la vallée figée

surprenant le froid ce matin brouille mes yeux de larmes brumeuses

voici l’aube lente — les collines noires surgissent d’un linceul de brume

les oiseaux picorent les fruits noirs comme leurs yeux dans les lauriers-tins

d’un ciel de lait sale ruisselle une humidité poisseuse et morne

silencieux il veille sur ma présence et la couve d’un sommeil profond

enfin dans le ciel un parure dorée orne les nuages

marbré d’ouate terne le ciel délavé recouvre le verger sans feuille

peu à peu l’hiver prend la place abandonnée d’un soupir discret

les couleurs se cachent derrière un pan de grisaille que les yeux devinent

premier jour de l’an — un bouquet de fleurs des prés me saute au visage

pris dans les branchages de longs filaments de brume voilent mon regard

sous la brume le jour d’hier saigne encore à l’aube du nouvel an

la pluie de la nuit ne freine pas les ardeurs de mon chat curieux

rempli d’espérance la nouvelle année s’éveille sans gueule de bois

un soleil timide a dépassé les collines — solstice d’hiver

plic-ploc sur l’auvent la pluie doucement pianote une valse triste

une valse lente pianotée sur la verrière — la pluie musicienne

le signe du vent glisse de nue en nuage sur l’aurore en feu

dans la nuit profonde un convoi a traversé la plaine endormie

volet repoussé sur la nuit régnant encore pesante et poisseuse 161


Paroles Suivantes

il pleut faiblement le soir a poussé la nuit sous mes yeux humides

un bal de nuage se prolonge à l’horizon — la pluie s’impatiente

petit à petit l’hiver hache le matin en copeaux de froid

les rats de la nuit ont grignoté dans mes rêves la part la plus douce

il l’a traversée le brin d’herbe fier de lui la flaque impassable

Garlaban déchire des lambeaux de brume blême sur les arbres raides

rentré au matin il me raconte sa nuit de chat vagabond

le soleil apaise d’une caresses de miel les plaies de la nuit

sous un ciel d’oxyde la promenade haletante— janvier sans l’hiver

nerveux dans les viornes les sansonnets se dépêchent d’en voler les fruits

la brume escalade insensiblement les pentes transies de janvier

d’une main de plomb j’écarte de mes paupières des copeaux de ciel

la pluie d’hiver a plaqué sur les carreaux ma paresse immense

du ciel lumineux s’élancent des dards d’argent brefs comme le givre

l’ombre de la viorne époussète l’herbe humide — clair matin d’hiver

silence du ciel— seul un corbeau le traverse d’un cri de rocaille

l’hiver et ses lames de mistral acéré tranchent les ombres raidies

dans l’air de janvier une douceur équivoque trompe les bourgeons

puis la pluie succède avec force à un vent aigre — janvier se rassure

le ciel a le blues qui alourdit mes paupières du fard de la nuit.

impétueux et froid le vent m’a tranché les jambes — balade annulée

quelle lassitude gluante et lente limace me cloue les paupières

ce matin le vent se cuirasse de glaçons — café déjà froid

le ciel mou et gris déroule des boules d’ouate sur mes yeux brumeux

le soleil domine ce matin la vallée — ma nuit s’éclaircit

une trainée blanche a rayé la porcelaine légère de l’aube 162


Paroles Suivantes

une gaze fine posée sur le paysage figé dans le froid

silence de l’aube— des lames de sang tranquilles tranchent l’horizon

quelques fleurs écloses — le printemps frappe à la porte hésitant encore

la journée s’étire depuis l’aube ennuagée sous un ciel brouillé

avec de l’audace le printemps oppose un pied dans l’huis de l’hiver

le nez sur la vitre je fais de compte des ronds qui troublent la flaque

toutes ces olives répandues sous l’olivier — bonheur des oiseaux

embrumé je lève le voile de mes paupières sur le ciel brumeux

instant éphémère où le soleil pose un doigt sur le bord de l’aube

une seule étoile par-dessus le crépuscule pleure dans le ciel

le ciel dégagé a repris sa position sans la moindre ride

les lames du vent ont lacéré les nuages— les arbres s’inclinent

deux pies se poursuivent entre les branches du cèdre — le printemps jacasse

d’une cime à l’autre dans le contre-jour de l’aube une pie bondit

une toile noire dissimulent les jupons roses de l’aurore

sans bruit la vallée dans son manteau de brouillard traverse l’hiver

espérée pourtant la pluie arrive toujours au mauvais moment

une nue distraite se hâte vers l’horizon — le vent la harcèle

la nuit dans la gare — au bord du quai je ne croise que des ombres molles

un matin paisible comme décor enchanté aux chants des oiseaux

un ciel peu profond embarrassé de brouillards lourds comme des bornes

les rayons caressent d’une tournure de miel mes joues endormies

au fond du panier il vit son rêve de chat détaché du monde

repoussant la porte comme du sable rugueux grince la grisaille

une seule étoile brille au-dessus de la ville— la nuit s’évapore

effeuillées les branches malmenées dans le mistral supplient le soleil 163


Paroles Suivantes

capturer la lune par le bout de la lentille tâche délicate

le vent se renforce — je résiste cependant grâce aux pieds glacés

un brin de nuage s’est pris dans la chevelure des arbres rêveurs

je reste ébahi devant l’ampleur de la nuit — silence insolent

hier soir dans le ciel un invisible dragon a mordu la lune

l’instant le plus froid — la nuit grosse d’une aurore la libère à contrecœur

des nues ténébreuses montées sur un vent rugueux assiègent le ciel

une brume rousse crépite sur l’horizon — le soleil s’ébroue

par-dessus les nues qui fuient devant le mistral le ciel reprend vie

le volet qui grince dans le matin embrumé meurtrit le silence

le soleil s’essouffle — il peine à franchir les nues de coton souillé

un rayon traverse la fenêtre empoussiérée danse sur mes cils

un mistral glacé charriant de la banquise lustre les feuillages

lenteur du matin — le soleil à petits pas muse vers midi

petit à petit l’ombre a envahi le mur — le soleil se rend

sur le béton gris l’ombre des chênes charbonne de sombres fantômes

le soleil d’hiver est parvenu à chasser la glue des rêves

mes poings pressent les paupières — sous mes yeux mille galaxies explosent

le ciel balafré par un geai qui le traverse dans le mauvais sens

la vieille lanterne — sur le mur sa silhouette s’émousse en silence

le chant des oiseaux a eu raison de la pluie qui boude en sourdine

plus noir que la nuit le jour pleure sans lumière sous de noirs nuages

à travers la vitre je regarde le soleil plier dans le vent

des lambeaux noirâtres que les corbeaux déchiquètent effilent le ciel

engourdi encore immobile dans le vent — des larmes salées

le vent aux branchages — ils se disputent âprement les dernières feuilles mortes 164


Paroles Suivantes

un rayon espiègle s’attarde sur mes paupières — voir une hirondelle

le soleil halète étouffé par l’insolent bâillon de nuages

le printemps frémit et le jour se lève tôt — je bâille et m’étire

plus sombre que gris le jour usurpe son nom — la nuit se prolonge

le calendrier fait ce qu’il peut pour convaincre la vallée brumeuse

un gris uniforme — aucune ombre sur le mur n’égaie le béton

aube dans les yeux — d’un long soupir je balaie les miettes de nuit

plus que l’hirondelle les jeunes feuilles de chêne cèdent au printemps

ferveur du printemps — dans les branches effeuillées prient les tourterelles

dans un ciel nerveux les rayons de soleil sautent d’un nuage à l’autre

arbre de Judée — au bout des vieilles branches des gouttes de sang

des nuages jaunes s’affranchissent des collines — les ombres pâlissent

sur la branche nue un geai plastronne déjà dans un éclair bleu

même le loriot ne parvient pas de son chant à ranimer le soleil

fraicheur ce matin — le printemps fait une pause les oiseaux se taisent

fin des illusions — il faut tailler dans le vide s’en faire un costume

le regard mi-clos son poil brillant au soleil mon matou médite

l’ombre des barreaux esquisse sur la façade l’ombre d’un regard

sous le ciel d’étain toutes les teintes s’éteignent — l’âme grise aussi

quelques nues encore résistent sous mes paupières aux assauts du jour

il reprend sa place dans l’ordre des choses — le soleil est revenu

le ciel pleure encore — comme si les souvenirs ne suffisaient pas

rayant les nuages des corneilles malicieuses troublent le matin

entre les oliviers entre l’ombre et la lumière des oiseaux nerveux

il est tard déjà — les nuages tourmentés s’enfuient vers midi

un réveil tardif — l’aube n’a pas attendu pour fuir vers le soir 165


Paroles Suivantes

plus tardif encore le réveil ponctue ma nuit de profond sommeil

à peine éveillés il épouvante les chênes — le mistral colère

l’ombre dans ma tête a empoissé les pensées d’un Styx de mélasse

soleil en cadeau l’hiver s’en est retourné frapper à la porte

l’ombre sur le mur louvoie dangereusement entre les fissures

les oiseaux se taisent — ils ont laissé la parole aux bruits de la ville

sur le mur les ombres se confondent maintenant avec le béton 16 avrilmidi se présente au bout de la matinée — je bâille encore

la nuit silencieuse couvre le coassement même des crapauds

le soleil lui-même s’est réfugié sous la couette — matin indolent

printemps sans entrain — même les coquelicots perdent leur couleur

des oiseaux rieurs nouent les tresses du printemps dans le ciel limpide

le matin découvre sa lumière dans le froid — le soleil frissonne

quelques hirondelles bravent la fraicheur du vent — un don au printemps

matin sans lumière — la vallée sommeille encore sous son drap de brume

journée de mollesse — je promène entre les heures des pensées inertes

un mistral furieux déchiquète le ciel sombre — havre sous le drap

par moment le vent trébuche dans le rideau de perles de bois

poussant le volet un vent aigre me surprend — je frissonne en mai

dans le pot ouvert une mouche prise au piège de ses yeux trop grands

le printemps revient — le ronron d’une tondeuse pour le confirmer

à grands coups de vent l’hiver gifle le printemps — les oiseaux se taisent

le loriot raconte comment il est parvenu à bout de l’hiver

roulé sur lui-même il ouvre un œil le referme — tout va bien il dort

un profond silence enveloppe la vallée — les oiseaux se taisent

tremble sur le mur l’ombre des branches de chêne — le vent la torture

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Paroles Suivantes

c’est un vent amer qui secoue l’éclat des feuilles jusqu’à la nausée

entre les oreilles un bourdonnement de forge — le vent me secoue

les ombres fléchissent puis s’effacent tout à fait — les nuages guettent

dans l’ombre indistincte entre les feuilles de chêne un éclat de lierre

tant d’années soumises que le vent a effeuillées — encore une ride

d’un soupir je pose dans la paume de ma main un front lourd et las

entre le ciel gris et l’horizon sans couleur mes paupières lourdes

le temps change hélas — par delà l’horizon sombre complotent les nues

le nuage hésite entre le gris et le gris — il restera gris

encore une pause — le printemps n’en finit pas de singer l’hiver

les coquelicots sous la pluie longtemps promise redressent la tête

la tondeuse grogne débusquant dans les recoins le brin qui dépasse

les trois saints de glace — j’ai l’impression qu’ils sont mille tant j’ai froid aux pieds

d’un mouvement las le soleil chasse la brume comme on chasse un songe

une pie sans grâce dans la brume de mes yeux tristement s’envole

ombres effrangées sur le mur de la mémoire — les cendres d’un rêve

du bout de son aile un gabian cueille un nuage — délicatement

la lumière grise peine dans l’halètement d’un vent sans vigueur

une pie traverse le ciel d’une branche à l’autre — clin d’œil du soleil

passé la nuit grise le soleil montre un visage enfin plus amène

sur le mur le lierre brille comme de l’argent jeté par le ciel

il pleut grassement — j’entends les gouttes de nuit gifler la verrière

une feuille flotte et traverse la piscine — tout un pacifique

sous la nuit brumeuse le soleil s’est dérobé — matin pitoyable

un train lointain passe sur le bruit de l’autoroute — la vallée s’ébroue

dans le cerisier les frelons zélés surveillent leur garde-manger 167


Paroles Suivantes

ah les heures brèves — à grand pas la matinée se rue vers midi

coule des collines vers la vallée résignée la lumière grise

somnolent encore le ciel glisse un drap de brume au front du soleil

le silence monte l’échelle des chants d’oiseaux — clair matin de juin

d’un frisson je chasse la somnolence tenace qui me colle aux yeux

un vent violent fouette des cavales dans le ciel qui fuient effrayées

une fois par an de manière régulière je pisse du sang

grimé en crapaud un prince inconnu se vautre dans le bol du chat

j’ouvre enfin les yeux le sommeil se fait moins lourd — soleil revenu

la pluie terne et tiède qui tavèle la terrasse rebute le chat

le temps s’est trainé la matinée est passée comme une huile dense

après avoir fait une grasse matinée minet se repose

la lumière grise qui coule d’un soleil sombre peine sur les murs

j’entrouvre les yeux — la lumière lentement pare le matin

matin sans entrain — je traine las le boulet d’une nuit visqueuse

entre les nues sombres une seule étoile brille — un frisson frileux

silence de l’aube — une tourterelle passe sans l’ombre d’un cri

la lune impavide — les crapauds respirent bruyamment

le soleil traverse une atmosphère brouillée de rayons humides

un matin de juin à peine voilé de brume — encore un soupir

lever bien trop tard — férocement la chaleur me coupe le souffle

après la nuit tiède le jour dépose son bât de lumière ardente

les ramiers sans voix accablés par le soleil sont tentés par l’ombre

la matinée lente frôle des plages de sable sans un clapotis

grasse matinée — midi passé depuis peu mais les ombres rôdent

les rêves s’enfuient le matin s’ébroue à peine — un loriot s’éveille 168


Paroles Suivantes

la lune escalade le chêne au bout du jardin — luisante d’effort

soudain me revient une odeur d’iode et de sel le bruit du ressac

la lune s’estompe — il ne reste dans le ciel pas même une trace

reflet de la nuit — sur le bassin les étoiles brillent en silence

une goutte coule depuis le front sur mon nez — il n’est que huit heures

je recherche en moi une raison de bouger — matin sans entrain

quel drôle d’oiseau — il se cache mais son bec parle l’étranger

une ombre est passée lentement sur mes paupières — ce n’est qu’un nuage

seul sur la terrasse — le silence de la nuit me serre la gorge

désespérément le ciel brille sans nuage — un rêve de pluie

un ciel dépoli maculé de cotons moites feutre le silence

sortir de l’ornière au milieu de la fournaise d’une nuit d’errance

la chaleur s’abat brutalement sur les dalles pourpres des terrasses

belle matinée d’été les dards du soleil plantés dans la gorge

le temps a passé émietté entre mes doigts — cendres de l’espoir

sur le pré brulant d’un soleil impitoyable les ombres frémissent

fraicheur ce matin l’été s’accorde une pause — enfin je respire

le ciel dodeline entre l’ombre et la lumière — j’hésite et je bâille

je ferme les yeux pour tenter de retenir l’eau de la nuit fraîche

je somnole encore — le bruit du ventilateur comme une berceuse

le soleil pensif interroge les collines — sueur sur mon front

l’air est si brulant que les ombres s’évaporent en touchant le sol

une goutte brille et lentement s’évapore au bout du feuillage

je rêve parfois de soleil sur la banquise — j’éponge mon front

retour du jardin une poignée d’herbes sèches crisse dans ses poils

sur les carreaux pourpres il ne reste aucune flaque d’une brève averse 169


Paroles Suivantes

les cris du mistral attise même le feu crissant des cigales

avide le pré sourit aux premières gouttes — orage d’été

j’ai mis des chaussettes pour le vent et le ciel gris — pause de l’été

les feuilles lavées par les averses d’hier brillent maintenant

l’horreur à la porte aveugle et sans compassion frappe et frappe encore

réveil empâté d’un sommeil épais encore — odeur du café !

un soleil sans tache indifférent aux secousses d’une terre folle

loin une tondeuse se dépêche d’en finir — déjà midi grogne

la matinée passe petits riens dans le néant — odeur de café

la peau s’est couverte d’une sueur corrodée par un vent acide

une nuit craintive un train contourne la ville un bruit de fers crus

le soleil pourtant domine un ciel sans nuage — je somnole encore

de pâles étoiles vacillent sur la piscine — respiration lente

rien dans le ciel ne présage que l’été finira bientôt

matinée brûlante — le grincement des cigales me serre la gorge

le cri d’un oiseau — mon chat rentre l’air penaud le poil emplumé

au bout du matin midi me prend à la gorge — je reprends mon souffle

sur le ciel voilé (tendu) (gauchi) quelques gouttes tambourinent paresseusement

après la nuit fraîche soudain le matin s’embrase — en quête de l’ombre

l’odeur du café madeleine improvisée revient sur mes grèves

rives outragées des nappes de fiel flottent (dérivent) les criques se crottent

la nuit vagabonde émerveille le gros chat aux yeux qui scintillent

les ombres s’affutent tranchées net par les rayons — mon ardeur s’émousse

les ombres se floutent — je traverse le matin dans un bâillement

les ombres s’estompent dans la moiteur du matin — je reste sans force

sa lèvre frémit — un moineau vient de tomber tout droit dans son rêve 170


Paroles Suivantes

le ciel gris déteint lentement sur mes paupières — je marche sans ombre

le soleil se voile — je me perds dans la stupeur d’un réveil revêche

le vent insolent m’a claqué la porte au nez — je ne peux sortir

le poids de mon front la lourdeur de mes paupières m’ont coupé les jambes

un pilleur d’assiettes lui a nettoyé la sienne — mon chat en colère

de grosses abeilles ronflent dans le ciel en quête de brume suspecte

nuit effervescente d’une musique trop proche — matinée brumeuse

l’épaisseur du jour farde mes paupières moites de sanie salée lente matinée qui s’attarde avant midi glisse sur les heures

soleil déjà haut je me lève en suffocant secouant la nuit

lever difficile — vieux cordages inutiles mes muscles se nouent

un coup de tonnerre me réveille brusquement — une assiette a chu

le mistral se lève — une fraicheur indocile un ciel sans nuance

un vent bienvenu a chassé les cauchemars de mon front recru

la lune mangée par les étoiles voraces s’enfuit vers demain

le ciel s’est voilé d’une brume parfumée de fumée de pin

tache de lumière au milieu d’une ombre dense — le chat à l’affut

un couteau de lune tranche des copeaux de vent — la nuit se rétracte

la lune s’arrache des collines qui retiennent des lambeaux d’argent

été intangible — mais ce matin on ressent les premiers frissons

sous un soleil fauve l’herbe du jardin crépite prête à s’enflammer

sur le mur chauffé à blanc de rayons brûlants les ombres s’inclinent

la lune s’élève ensemençant la piscine de graines d’étoiles

la matinée passe une langue doucereuse sur les heures lisses

le jour s’est levé depuis si longtemps déjà — il paresse encore

fin de matinée — un midi brûlant et lourd pèse sur les ombres 171


Paroles Suivantes

sur les paupières nerveuses mes cils emmêlés

les arbres fléchissent sous le fardeau de midi — les ombres sont lourdes

un vent sans couleur balaie les dernières cendres du dernier été

je sors du sommeil avec un bout de la nuit — un rêve déborde

la chaleur résiste elle s’accroche à septembre — moule à son rocher

aucun bruit à l’aube la vallée retient son souffle — la nuit se prolonge

l’été se complait dans un septembre torride — été indigeste

dehors midi crisse entre les rides des pins aux odeurs d’essence — dans la pièce aux ombres lourdes le silence d’une mouche

premières fraicheurs — le matin laisse espérer un petit répit

première rosée ce matin sur les voitures — la fin des vacances

rien n’a changé — une goutte se faufile le long de mon front

les journées plus courtes le cartable déjà prêt — un soupir encore

un sommeil profond m’a conduit jusqu’à midi sans faire un faux pas

sur les carreaux ternes pas une goutte ne reste des tonnerres d’hier

la matinée flâne entre les livres qu’on range et la somnolence

un ciel incertain entre excitation et crainte grime la rentrée

les ombres sont raides j’essaie de rester debout — midi m’a sonné

fin de matinée — sur les ombres restées raides l’enfer de midi

un ciel sans présage — entre les nuages rouges un corbeau s’attarde

les rêves s’emmêlent s’entachent de souvenirs largués comme une ancre

à travers la vitre sèche je plains l’herbe sale qui supplie le ciel

les heures s’enroulent dans la vapeur du café — samedi matin

un soleil timide attire vers lui l’odeur de l’herbe mouillée

j’aimais en silence ses cheveux noirs son teint pâle — sur la photo jaune cinquante années consumées n’ont pas flétri son sourire

l’averse promet au jardin reconnaissant un flot d’arcs-en-ciel

matin lancinant —

les ombres confuses 172


Paroles Suivantes

frissonnent sur les murs froids — septembre profond

ce matin l’automne est venu gratter la porte et s’asseoir à table

dans le ciel traverse le cri rompu des corneilles par d’épais nuages

premier jour d’octobre — une pluie fine s’invite pour le célébrer

l’été se termine doucement dans la clarté d’un matin paisible

joli temps d’automne — le ciel répand du pastel sur l’ombre des arbres

quelques hirondelles dans le ciel encor clair gravent un signe d’adieu

un mistral moqueur a repeint couleur lavande le ciel gris hier

une rosée fine sur le pré et sous mon crâne un brume épaisse

brume sur mes yeux — je me souviens d’une nuit de chants de sirène

voilant la lumière la mélancolie s’installe après l’équinoxe

je n’ai pas rêvé — le matin atteint midi et je bâille encore

une nuit passée à l’ombre des cauchemars — réveil hésitant

l’automne se traine entre le ciel sans couleur et mon humeur terne

midi est passé — le réveil délie à peine la nuit ténébreuse

automne brillant ce matin d’un soleil tiède — un vague sourire

quelques hirondelles encor narguent les nuages qui mangent le ciel

la rosée dans l’herbe glisse et crisse sur l’émail de mes dents crispées

une lente flemme s’est emparée de mon corps — pourquoi résister

le matin s’effrite sec comme une cacahouète guettant l’apéro

petit à petit dans le jardin dans ma tête l’automne s’installe

le soleil s’essouffle — des nuages filandreux peu à peu l’étouffent

clin d’œil de l’été — ce matin l’automne brille de toutes ses gouttes

le soleil patine dans la mélasse du ciel — l’automne s’embourbe

par la porte ouverte le chat filou a pillé l’assiette à minou

sous un ciel sans faille dur effet du temps qui pèse l’eau devient poussière 173


Paroles Suivantes

matin silencieux — la vallée geint doucement en pansant ses cris les corneilles sur le ciel gravent leurs runes obscures

le bruit étouffé grimpe avec peine des routes jusqu’à mes yeux clos plic ploc dans la flaque les notes gouttes écoutent la pluie musicienne

vallée à l’envers — la pluie chassée par le vent remonte la pente

parfois on trébuche l’ornière était peu profonde mais infranchissable

réveil en sursaut — l’orage sur la verrière inonde mon rêve

les ombres s’effacent la lueur sans couleur vient prendre leur place

je laisse mes yeux fermés s’offrir au soleil — clair matin d’octobre les gouttes de pluie scintillent dans les gouttes de rosée

journée sans frisson — l’automne fait une pause au seuil de novembre

sous mes pas frileux hésitant entre les dalles la terre soupire

midi est passé sans que j’y prête attention — nul désir d’horloge

le ciel s’est couvert d’un épais tissus de laine — j’en fait tout autant

l’air parait visqueux — une ablution d’huile tiède alentit mes membres

sur l’herbe brillante un petit gland est tombé — complainte d’octobre

un petit oiseau raye l’air entre les feuilles — sourire ou frisson

couché au soleil mon chat les yeux fermés compte les rais de lumière

midi me piétine comme une armée de fourmis — le temps me consume

rousseurs dans les chênes — à regret les feuilles quittent leur robe d’été

un jour de novembre humide sans être froid — je serre mon col

sous les dents aigües pauvre petite souris — minou pas si doux

réveil dans la nuit on croit avoir atteint l’aube — ce n’est qu’un mirage

ambiance polaire — on surveille le soleil pour briser la glace

novembre incongru — un soleil épanoui agite la brume

octobre anticipe nuages lourds et pluies froides un air de novembre

je traîne paresse tout au long de la journée — mon ombre est pesante 174


Paroles Suivantes

matin de grisaille — je paye d’un temps maussade une courte nuit

sur les dalles sombres des taches de soleil rare — ciel de neige sale

à peine éveillé je navigue entre deux sauts l’un clair l’autre obscur

le ciel se découvre — les nuages dans ma tête ont repris leur place

un léger frisson malgré le soleil serein — novembre déjà

un train de nuages dans le silence du ciel vrombit sourdement

un mistral malin prend les arbres par surprise — le froid me traverse

la pluie sans relâche fouette les branches sans feuille — grincements d’automne

automne en colère — la pluie d’hiver en novembre trempe mes chaussettes

vitres lacérées des traits violents de l’averse — mon regard se brouille

une pensée vive un oiseau perce le ciel j’ai perdu sa trace

dernières visites dans le couloir le silence a rejoint la nuit

le temps me dépasse — l’aiguille frôle midi et ne m’attend pas

à travers la vitre le ciel couvert d’ouate sale est inaccessible

entre ses mâchoires le rouge-gorge saigné semble encor sourire

ombre sur la vitre — le soir frôle le silence d’une autre souffrance

dans le laurier-tin qui frissonne de leur jeu un beau tintamarre

pastel sans chaleur — le ciel de décembre couvre les toits désolés

un crachin souillé glisse sur les dalles ternes — soupir fatigué

un cri inaudible raye la fenêtre sale d’un vol sombre et las

un peu frissonnant paré de nuages clairs le soleil sourit

le soir s’est posé — une respiration douce vibre dans le noir

soleil de novembre lumineux mais sans chaleur — fausse pièce usée

absence si courte — chaque objet me la reproche d’un silence hautain

la matinée court le long des heures trop brèves — la rattraper — vite

j’ouvre le volet sur décembre lumineux — soupirs et sourires 175


Paroles Suivantes

midi est passé sans que je m’en rendre compte — journée sans couleur

le ciel de décembre lourd de nues mélancoliques rayées de corneilles

une feuille brille sur sa branche encore humide et puis lâche prise

museau dans les pattes qui lui cachent le regard de quoi rêve-t-il

froid matin d’hiver — je laisse une trace mate dans l’herbe brillante

celles-là par contre je ne les supporte pas — piqûres de froid

des lambeaux de gaze éparpillés dans le ciel — décembre en désordre

humide le froid se traine entre les nues grises — vieux serpent malade

sur la couverture une peluche endormie ronronne en confiance

par crainte du vent il soupire à mes côtés — de dépit il dort

le ciel s’est couvert l’hiver tisse son manteau de nuages sombres

le jour s’est levé — il portait une aube rouge au dessous des nues

un soleil taquin jouant avec le rideau me fait un clin d’œil

un soleil serein au-dessus des pins paisibles — solstice d’hiver

malgré le soleil il fait froid je frissonne dans mon pull de laine

matinée polaire — les rayons du soleil même sont des dards de glace

grasse matinée — il est midi et à peine mes yeux se dessillent

matinée glaciale — même le vol des corneilles devient hiératique

les années s’écoulent sur le limon de l’oubli — fleuve sans reflets

des braises dans l’âtre se souviennent de leur cœur de flammes ardentes

plus dur que l’oubli le souvenir cependant se voile et s’embrume

aube de noël un profond silence enrobe les paquets encore

le ciel a pali après une aube écarlate — mes rêves s’estompent

l’hiver pèse encore de tout son ennui — et dire qu’il commence à peine

le ciel s’est couvert d’un manteau de laine épaisse — le col me démange

il attend serein et somnole sous la lampe en clignant des yeux 176


Paroles Suivantes

un pied sur le sol j’hésite encore à sortir de mon long sommeil

une aube ternie par des lambeaux de nuages floute la vallée

des flèches de glace m’ont assailli au moment d’ouvrir les volets

les tessons épars d’une mémoire infidèle crissent sous mes pas

le ciel s’est figé dans sa couverture obscure — midi je somnole

il fait si froid là — j’ai envie de me cloîtrer dans des murs de laine

malgré le soleil une larme sur ma joue — le froid est partout

de me réfugier sous un édredon épais j’en ai le désir

le soleil falot illumine quelques miettes sur la nappe sale

le soir est tombé brutalement— je trébuche sur la route obscure

premier jour de l’an — on repousse les bilans à l’année prochaine

un crissement tente de réveiller le soleil — un trait de corneille

une pluie sans joie couvre les dalles noircies — lendemain de fête

le vent et les feuilles jouent sur les terrasses une musique grinçante

les ombres sont lâches sur les murs décolorés — un jour déjà flou.

le vent en colère pratique la fouille au corps de tous les passants

la lumière vive d’un jour déjà avancé me réveille à peine

le vent fatigué délaisse les feuilles mortes qui grincent encore

le mistral secoue le vieux tas de feuilles mortes — ma vieille carcasse

animal rusé l’hiver passe sous la porte et me mord les pieds

mon chat guette inquiet l’ombre douteuse d’un chien qui force la vitre

les rayons aigus tintent comme des glaçons lâchés dans un verre

les arbres grelottent sous les nuages figés— jardin en hiver

midi dépassé depuis un moment déjà — je me lève à peine

mes vieux doigts noués le soleil ne parvient pas à les réchauffer

sur le mur les ombres tremblent de la nuit encore froide qui résiste 177


Paroles Suivantes

changement de rythme — le sommeil s’est prolongé jusqu’avant la sieste

au-dessus des toits les nuages s’amoncellent — j’attends que ça passe

une odeur subtile court entre les branches nues — une odeur sucrée

et quand on revient on s’aperçoit sans surprise d’un oubli encore

l’hiver se repose sous un ciel de laine grise — midi je m’étire

sur les carreaux sales même les flaques sont grises — le ciel se dérobe

coup d’œil vers le ciel : il fait un temps d’édredon — odeur du café

le mistral hulule en forçant sur les fenêtres — une porte claque

les ombres se brouillent — le soleil ne parvient pas à rester bien droit

le soleil voilé a tendu comme une gaze sur mes cils collés

une pluie glaciale crible la vallée brumeuse — hiver opiniâtre

j’ouvre le volet sur un lever de soleil incertain et flou

dans la nuit frileuse des éboulis de tonnerres déchirent mes rêves

un matin humide la pluie glisse sur les tuiles — mes pensées s’embourbent

dans les foules denses dansent et battent des cœurs sans pitié aucune

matin de grisaille — ma maison dans le nuage et l’esprit brumeux

le matin paresse entre souffle et bâillement — besoin de café

Sans énergie je traine une ombre sans contour ; une brume spectrale a obscurci le jour, a envahi mon crâne et embue ma cervelle. Je reste sans un geste, un plomb dans mes semelles.

la couleur du ciel a coulé sous mes paupières — couleur des soupirs

un ciel triste et froid pleure sur les branches nues — mon regard s’embrume

hiver sans violence — le vent a chassé la rosée du banc de jardin

milieu de l’hiver et des millions de secondes à subir le froid

caché sous sa couette le soleil a grise mine — michel fait la gueule

quelques feuilles lasses choient dans le vent essoufflé — matinée d’hiver

on ne sait jamais ce qu’on oublie de ranger avant de partir

à travers la vitre je regarde succomber les dernières feuilles 178


Paroles Suivantes

midi est passé

le vent les secoue les essore puis les jette d’un geste arrogant

frisson ce matin malgré l’éclat du soleil — l’hiver se reprend

le matin empiète sur la marge de midi — paresse insolente

un éternuement en repoussant le volet — hiver ou pollen

je somnole encore quand midi sonne à la porte — pas envie d’ouvrir

matinée pluvieuse — la grisaille est remontée jusque dans ma tête

le soleil s’invite arborant un grand sourire au fort de l’hiver

sur la corde à linge deux tourterelles profitent d’un bain de soleil

amandiers en fleurs — le printemps trouble déjà le calendrier

malgré la douceur aucune senteur encore — un rhume entêtant

tache de soleil — le doux minou en profite pour rouler dedans

clair soleil de mars — le printemps nonchalamment taquine l’hiver

malgré le soleil il préfère son coussin pour dormir au chaud

un trait dans le ciel — une corneille attardée rejoint son clocher

midi déjà là alors que j’ai l’impression de dormir encore

cognent dans ma tête l’écho épais et profond de graves bourdons.

le soleil s’efforce de mes yeux ensommeillés d’effacer les ombres

un ciel sans couleur se reflète dans les flaques et frôle mon crâne

quelques nues encore — le soleil se noie la face d’un léger dépit

encore un matin où la grisaille l’emporte sans contestation

rires du soleil — il étire les nuages il lave son linge

mon chat en profite — le soleil sur ses moustaches qui brillent au vent

Garlaban en gris — même les ombres se cachent au fond du vallon

couché sur le sol la sagesse du soleil frémit dans ses poils

un bol ébréché — ma paresse reste intacte 179


Paroles Suivantes

une nuit houleuse où les démons m’asticotent — il pleut ce matin

clair matin à l’ombre le bol de café fumant embaume l’auvent

un soleil sans force enveloppé de grisaille frise l’eau des flaques

au sommet du cèdre la tourterelle trépigne — quand va-t-il oser

les nues fuient nerveuses au-delà de l’horizon — le journal m’échappe

vapeurs de café — je me remets doucement d’une nuit sauvage

même entre les lignes le monde va sur la tête — de rage on le ferme

le chien du voisin m’a donné un coup de patte pour creuser les raies

un signe ce soir est venu plisser l’eau lisse de mon lac placide

ciel plein de soleil — la lanterne sur le mur cisèle son ombre

j'ai un brin de chance la salle d'attente est vide je passe en premier

je bâille et m’étire une journée sans surprise franchit la fenêtre

frisson ce matin — à travers les branches nues le ciel est limpide

on n'oubliera pas Fukushima mon amour — un grand éclair blanc

une brise lente (un dernier frisson) secoue les dernières feuilles mortes dans les chênes

l’ouate dans le ciel maintenant fait grise mine — le temps tergiverse

le soir me présente le bagage à peine ouvert d’une nuit pesante

le ciel prend parti — aujourd’hui il est chagrin et déjà il pleure

— et je me réveille de son souffle chatouillant son nez sur mon front

le rideau frissonne — au crépuscule les ombres ont l’air de fantômes

j’ai repris la plume qui me paraissait si lourde — mais l’encre est épaisse

la pluie d’aujourd’hui n’a laissé sur la terrasse pas la moindre trace

incompris vos signes sont le fanal cependant d’un chemin étrange

sans la moindre honte les petits pêchers fleurissent sous les chênes nus

cafard sur la neige — vous décrivez noir sur blanc l’ombre sans lumière

jardin indécent — des corsages de pétales frémissent dans l’herbe 180


Paroles Suivantes

matin de papier froissé l’encre à peine sèche — la corbeille est pleine

fleurs de grenadier votre couleur seule explose rouge cependant

le soleil se lève dans les replis froids de mars — partout de la brume

la nuit est tombée d’un soupir j’ouvre la boite et prends le cachet l’eau tremble un peu dans le verre quand je le porte à ma bouche

puis l’ombre s’échauffe la buée sur le banc fume et je peux m’asseoir

filaments de brume — dans la fraicheur du matin le soleil respire

aussi embrumé par le parfum du café sur mes verres sales

j’ouvre le volet et le jardin m’honore d’un vol de ramiers

je viens de finir un plat qui me mange froid — un second cancer

un bruissement d’ailes — un ramier secoue les chênes c’est de bon augure

grâce des nuages qui traversent l’océan — merci de me suivre

mauvaises nouvelles — le Levant en est chargées le Mistral les chasse

le jour s’est levé la rumeur de la vallée traverse mes tempes

le chien du voisin qui courait après mon chat s’est cassé la patte

accrochée au cèdre la lune blafarde mime une perfusion

de mes vieilles mains j’ai soigné de jeunes pousses aux fruits si lointains

la salle d’attente — quelques fantômes patients redoutent leur tour

vague à l’âme — mon esprit vide glisse dans la glu des pensées

une tourterelle pleine d’enthousiasme enseigne le plain-chant aux pies

brillant au soleil les fleurs du petit pêcher prennent de la graine

le sommeil me pègue — hier soir je me suis couché à l’heure des brousses

passé sous le lit mon chat garde les moutons — ah reconversion

il lustre son poil — la terrasse en plein soleil est son territoire

des lambeaux de brume déguisent le Garlaban en zombie de pierre

quand il ronge un os même le chien du voisin ne connaît personne 181


Paroles Suivantes

étouffée par l’ouate de la brume la vallée ne geint même plus

une tronçonneuse pour honorer le printemps pétarade au loin

la vallée se tait étouffée par un bâillon de brouillard épais

près de son coussin il surveille la fenêtre — un chien peut surgir

sur l’autre versant la Sainte-Baume s’estompe d’un pinceau humide

il est rassuré il n’y a pas de danger mon ventre est douillet

mon chat qui ronronne adore que je lui parle comme à un enfant

voilà la nuit tombe goutte de soir après l’autre sur de lents soupirs

comme un mot secret le soir glisse sous la porte — le cœur bat plus vite

pur arabica — un cri de sable précède l’odeur du café

le chien du voisin a couru dans son jardin — mon chat fait la gueule

sur le lit défait le chat d’un profond sommeil prend toute la place

soleil facétieux — il est entré dans la chambre par la fente étroite

c’est un printemps terne — je me retourne souvent pour chercher mon ombre

mon chat se réveille devant son bol de croquettes — je bâille et m’étire

une voile grise conduit le soir jusqu’au bord du céladon vide

le soleil dans l’œil il le cache sous sa patte — grasse matinée

une tourterelle sur la route de mon chat y laissa ses plumes

le papier résiste sous la plume qui s’accroche à la moindre fibre

les plumes éparses sous les chênes délimitent la scène de crime

fatigué je rentre du jardin sans compassion — je range mon ombre

dans le hall d’attente je suis le premier fantôme — pas de quoi crâner

yeux clos esprit vide je viens de pendre mon ombre au croc de l’oubli

assis je patiente tandis que dehors le ciel rit sur les collines

soleil déjà haut — encor plus haut sur le cèdre une tourterelle

le soleil serein me tape entre les épaules quand je sors de l’ombre 182


Paroles Suivantes

sur touiteur si tu postes une photo de chat t’as cent followeurs

un spectre marmonne — on ne sait ce qu’il se trame sous l’ombre linceul

le printemps est revenu il va peut-être forcer les cerisiers à fleurir dans ton cœur de pierre

j’ai su une langue que comprenaient les collines — j’étais un enfant

l’averse est finie — une lumière d’or pâle brise les nuages

poussière futile noyée dans le sablier le temps me dévore

le matin prend force — sur les pierres des restanques les ombres s’aiguisent

sur le quadrillage un cercle dit au triangle : ”on prend la tangente ?“

ne vous fiez pas à ma gueule de métèque — je suis une pâte

le bruit de la pluie a chassé mon dernier rêve — palmiers dans la boue

fleurs de cerisiers blanches si tristement blanches sous le ciel d’orage

forcé de rentrer l’auvent sert d’abri aux flaques — la pluie s’embourrasque

surpris par l’averse mon chat est rentré trempé comme un chien mouillé

cette nuit mon chat s’est réfugié sur le lit recouvert d’orage

matin de paresse — le front sur la vitre sale je compte les gouttes

pour un shamisen peau de chat ne suffit pas — il lui faut son âme

le chat est sorti malgré les flaques douteuses sermonner le ciel

la nuit est tombée — c’est à peine si l’on sent qu’a cessé la pluie

les tuiles qui glissent mon acrobate de chat sait bien les dompter il préfère cependant rester maitre de sa couette

ce n’est pas du luxe dormir une heure de plus sans s’en rendre compte une heure volée dans les limbes envolée — je bâille et m’endors

j’aime quand le réveil affiche 11:11 la journée est presque à son acmé pas le trouble 00:00 ou 22:22 Et surtout il n’affichera jamais 66:66

choisir bleu ou gris le ciel ne sait pas encore — moi aussi j’hésite

films scandinaves — de leur torpeur mon chat lent ne peut se passer

l’herbe encore humide s’endimanche de couleurs et de chants d’oiseaux 183


Paroles Suivantes

fleur de caniveau le don d’un printemps prodigue reine te couronne

avec indulgence je souris aux craquements d’une pie revêche

vous vous rendez compte — soixante-huit ans bientôt que je me crois jeune

assis sous l’auvent on échange des nouvelles le printemps et moi

le soir me démange — vêtement trop ajusté de mauvaise laine

après un hiver à invoquer le soleil mon chat dort à l’ombre

ces marches trop hautes la journée n’en manque pas — je suis essoufflé

les branches de chêne qui enfilent leur jupon défroissent leur robe

dans la nuit patiente de pédants crapauds échangent leurs vains points de vue

papillon citron ce soir comme une rondelle au bord de mon verre

soleil ce matin — pour faire bonne figure j’ouvre les volets

la soirée fraichit je traverse le jardin en sifflant mon chat

soleil insolent — je rabats les jalousies sur mon humeur sombre

sa patte remise le chien du voisin s’en prend encore à mon chat

des ombres tranchantes soleil d’automne à Pékin fendent les carreaux

in the green garden cherry blossoms bless blue sky over growing grass

assis sur le banc j’attends que passe le soir — il est en retard

je suis en retard — devant moi plusieurs fantômes attendent leur tour

je lève la tête le ciel pâlit peu à peu — je baisse la tête

dehors le soleil inonde la rue de joie — un néon clignote

dans ma main je garde encore un peu de chaleur — je serre le poing

il fait doux et clair le printemps me fait risette quand je sors du trou

à l’ombre des chênes deux papillons palpitants dessinent des cœurs

je me pose enfin mais sur un fil chancelant ma chaise vacille

j’ouvre la fenêtre — les fleurs de jasmin parfument le soleil du mur

puis j’ouvre les yeux — le ciel encore à sa place le chat sur le lit 184


Paroles Suivantes

single malt sans glace — dans les branches d’olivier un petit nuage

lumière embrumée par la chute du pollen — mes yeux enrhumés

mes tympans débordent — un colloque de crapauds a loué la nuit

le chien libéré mon chat a trouvé refuge sous les couvertures

la soirée me pèse — des cernes noirs sous les yeux tombent sur mes joues

un théâtre d’ombre — les collines se diluent dans la nuit sans lune

soleil dans la brume — j’ouvre les yeux ce matin sur un nouveau monde

au fond du jardin j’ai échangé ma sueur contre une odeur d’herbe

soleil dans les yeux — à la vapeur du café se mêle mon souffle

un brouillard léger étire ses filaments entre les pins sombres

un escargot laisse un message sur la table — laissez-moi le temps

grasse matinée — les collines embrumées émergent à peine

sur touiteur si tu fais un méchant jeu de mots t’as cent followeurs

la pluie cette nuit n’a laissé sur la terrasse aucun témoignage

d’une main nerveuse pendant que mon chat musarde j’écris des haïkus

quelquefois les rêves tangentent les cauchemars — et en plus il pleut

mon voisin végan n'aime pas les chiens moi je n'aime pas les courges

au fond il ne reste de cette journée de pluie que mes pieds mouillés

je rentre fourbu — une odeur d’herbe coupée m’annonce et me suit

le rideau de pluie est le seul rideau qui tombe — demain rien ne change

spectacle de guerre — la tondeuse impitoyable rase la luzerne

crachin matinal — ma tête embrumée réclame un café d’urgence

le chien du voisin enfermé dans le chenil — mon chat se désole

le soleil s’épuise à percer le ciel plombé — copeaux de lumière

levé bien trop tard pour que je puisse surprendre l’aube à sa toilette

ombres sans contours sur la terre sans ardeur — flou de mes pensées 185


Paroles Suivantes

sur la vitre froide dans la buée de mon souffle j’évite les flaques

dans la nuit bavarde les crapauds me recommandent de bien rester coi

captif de la pluie j’ai parlé avec moi-même du beau temps et d’elle

fauchant la luzerne le chien du voisin s’en vient troubler mes andains

de longs doigts glacés surprennent mon front brûlant et ce sont les miens

de l’herbe coupée une fragrance envoutante farde ma sueur

sur les fleurs pliées le crépuscule déploie une aile de pluie

le miroir me ment — c’est à peine si je fais l’âge de mon ombre

dans la nuit un duc de je ne sais quelle taille questionne un crapaud

le verger prend forme les fleurs ont cédé la place à des billes vertes

un si petit corps pour sa petite personne — mon chat me sourit

un voile de soie sur mes yeux au crépuscule ondoie lentement

ce matin je bâille d’avoir manqué les couleurs d’une aube invaincue

rassasié d’odeurs j’ai posé mes os rompus sur la balancelle

il est tard pourtant — je me rends à la lumière les yeux pleins de nuit

le soleil fourbu a glissé sous les collines — j’ai perdu mon ombre

pendues aux feuilles présents de la pluie d’hier quelques perles brillent

j’enfile mon aube pour rejoindre les fantômes — le soleil se lève

le soir se prépare à recouvrir de velours mon cœur fatigué

les mêmes visages toujours la même pâleur le même silence

la brouette est lourde dans la côte — en plus il faut trainer ses années

un son d’air pulsé m’engourdit de somnolence — une longue attente

je rentre à présent — mes mains sentent l’ail sauvage du vieux mur de pierres

des bruits de labeurs parviennent de la vallée — ah saine paresse

pas le moindre bruit les feuilles ne tremblent plus — la vallée respire

en face de moi la Sainte-Baume s’embrume — prémices d’orage 186


Paroles Suivantes

Garlaban derrière complote avec le vent d’est — sûr il va pleuvoir

consciencieusement mon chat depuis la terrasse compte les brins d’herbe

sur l’auvent la pluie claque des dents et des tuiles — dessous je frissonne

les cheveux hirsutes des pissenlits sans pétales attendent le vent

la pluie a cessé — l’herbe hachée a une odeur de foin pourrissant

luisant de rosée le chat a conduit la nuit jusqu’à son panier

le soleil n’a pas la bonne température — retour au panier

pendu desséché l’ombre du fanal rouillé grince sur le mur

il faut bien le faire — lentement je me prépare à céder mes jours

je bâille et m’ébroue renvoyant sur les murs sombres des éclats de nuit

soleil sur mes mains — un paysage pétri d’ombre et de lumière

le soleil se lève — je suis fardé du visage d’un être vivant

les lilas en fleurs lilas blancs et lilas mauves troquent leur parfum

le goût du café plutôt amer ce matin me racle les rêves

d’un long bâillement je me glisse hors du sommeil qu’exigent mes ans

faudrait que j’arrête de retouitter tous les chats sautant sur ma ligne

les chatons de chênes entre les pages du livre ont trouvé refuge

du mur mitoyen il surveille la frontière avec indulgence

la vieille tondeuse malodorante et vibrante me ressemble un peu

nous sommes rentrés de la promenade avec des odeurs de ciel

le trèfle scintille sur son étendue mouvante mon esprit patine

un loriot peut-être rompt le calme monotone du doux crépuscule

la porte qui bâille laisse le soleil lustrer le museau du chat

soleil dans les yeux c’est bon de se répéter vapeur de café

les ombres du mur d’un contraste acéré m’ont coupé la parole

le printemps parait de plus en plus téméraire mais l’été vaincra 187


Paroles Suivantes

un loriot s’entraine — la tourterelle s’obstine et lui cloue le bec

des jours qu’on se croise on se tourne on se détourne sans se reconnaître

soudain le silence fige branches et oiseaux — mon chat fait ses griffes

suivre ses suiveurs serait la moindre des choses mais pas de trop près

pause de midi — au fond du verre un glaçon attend qu’on l’abreuve

se dissimuler sans pourtant se travestir d’un masque grotesque

les langueurs du soir s’étirent d’un chêne à l’autre — moite est le silence

dans les bras du soir je regarde la journée — je soupire un peu

nous sommes restés sur la terrasse ombragée promener nos songes

d’un claquement brusque je referme ce vieux livre oubliant le signet

il est loin encore le crépuscule espéré des crapauds loquaces

contesté violemment un crapaud prend la parole — le soir tombe à peine

au bout du tuyau d’une œillade le soleil m’offre un arc-en-ciel

un pied dans la barque avant de franchir le Styx je teste la nuit

ferme la fenêtre il ne faut pas que tarisse mon désir de fuite

sauter à pieds joints sur le jour qui me devance avec le sourire

la lune se dresse luit et impassible inonde la nuit nostalgique

contre le fil d’eau des filaments de pollen tentent de survivre

des rêves rugueux ont laissé des ecchymoses sous l’arc de mes yeux

un chien qui aboie des bruits de chêne froissé — la vallée s’éveille

craintes du matin un café et son parfum seront mon armure

le soufflet s’embrase un marteau trouve son maître un cri de fer chaud

animal inquiet la caresse du soleil pour me rassurer

comme un café tiède le temps passé n’a qu’un goût d’amère potion

le chant d’un oiseau a libéré ma poitrine je respire enfin

offert au sommeil sur ma table de chevet il rêve et sourit 188


Paroles Suivantes

plonger dans le Styx pour ne pas payer Charon — Harpagon s’en tire

pour que le soleil ne me reconnaisse pas je mets des lunettes

sur un coup de vent plusieurs milliers de chatons couvrent la piscine

du jardin que je frôle une abeille me tend un parfum de lilas

fin d’après-midi — des rubans de soie dorés floutent les collines

midi sous l’auvent le soleil chauffe mes pieds fondent les glaçons

fin de la journée — entre les branches passives les chants se sont tus

il est temps je crois d’adresser un grand merci aux cueilleurs de lune

fin de la journée — la tourterelle esseulée cherche compagnie

ni droite ni gauche deux ramiers volent vers moi — fluctuants augures

fin de la journée — les longues heures s’étirent loin vers l’horizon

fin d’après-midi d’une indicible langueur — mon chat bâille encore

fin de la journée — je respire lentement en fait je soupire

ni thé ni café un grand verre d’eau gazeuse peut mettre ma tête en effervescence

début de soirée — j’enfile un manteau de nuit boutonné d’étoiles

tout bien réfléchi ma pensée est aussi fade qu’un verre d’eau plate

photo barbouillée — dans mon vieil OM10 le film est périmé

une guêpe hagarde cherche une tuile où mâcher son origami

pas de spectre en vue la salle d’attente est vide — je hante en premier

vient le crépuscule dans un silence sans ombre couvrir ma grisaille

que l’attente est longue — la salle est pleine soudain de linceuls troublants

dans ma tête grince encore un vieux cafard qui radote

dernière séance mais la comédie n’a pas dit son dernier mot

le café tiédit — une guêpe téméraire au bord de la tasse

quand je sors de là le soleil surprend les rides de mon regard morne

les sons du matin enrobés de la lumière du soleil d’avril 189


Paroles Suivantes

l’ombre délicate sous l’arbre de Judée un peu rosée encore

j’ai rêvé de sentes que je grimpais en souffrant — j’ai mal aux molaires

contre l’arrogance et les fausses certitudes sourire en silence

je ne sens plus l’ombre du lumignon corrodé qui ronchonne en moi

sous le haut plafond une abeille prisonnière — ouvrir le velux

cette lanterne rouillée qui grince encore et encore comme tu y vas — je fléchis sous le fardeau de vos compliments

le long du chemin une chatte énamourée nous geint sa détresse allons mon gros chat soyeux qu’est-ce que ça peut nous faire

te voilà entré dans le siècle de l’obscur caché athée souhait

la clameur du vent tambourine dans les chênes — la sieste en fanfare

la nuit je croisait des barges chargées d’étoiles qui fendaient le ciel le ciel sans soleil couleurs vertes sans contour un tableau sans ombre

mon esprit s’égare je ne peux le rattraper qu’en fermant les yeux

le vent essoufflé dessus le bain de soleil secoue sa serviette

la ligne de crête bleuit avant de noircir — la journée m’achève

ce joli poil terne ombre et gris mon chat le doit au pollen de pin

juché sur les tuiles d’une patience de chat il guette la lune

les rayons plus frais font bonne figure encore — ah le fil d’avril

entre les collines un luisant ballon d’enfant indolent et libre

une tourterelle inébranlable plastronne dans le vent frisquet

ne tardons plus trop dans la chambre ensommeillée un rêve m’attend

en ouvrant la porte les poils s’en sont hérissés — j’ai remis ma laine

la colline en face est barbouillée de trainées de sillons humides

les ombres moins nettes des pensées qui vont et viennent — un second café

sur le jour qui vient je dessille mon regard sur le jour passé 190


Paroles Suivantes

voilà une histoire anecdotique et ancienne — je l’ai oubliée

la fenêtre ouverte je laisse entrer le soleil jusque sur mes os

par-dessus la rampe un coup d’œil dans l’escalier — la pénombre suit

papillon de nuit — il se blottit sous ses ailes pour passer le jour

j’ai rangé la bêche — pour mes souvenirs futile de creuser profond

rêvant sur le mur le lierre et le jasmin mêlent leur soif de soleil

boulanger sommaire le vent roule les nuages par dessus les pins

dormir dans l’armoire pour profiter du parfum de l’assouplissant

quand le vent s’essouffle le silence circonspect et bruissant des feuilles

vous remercier tous je ne le fais pas assez et je le regrette

couché sous la lampe il rêve à tous les haïkus qu’il pourrait écrire

la surface du matin tangente la profondeur de mes rides

grasse matinée — pour lui un bol de croquettes un café pour moi

le soleil se glisse doucement par effraction comme un rat d’hôtel

d’une nuit à l’autre les rêves changent de langue — parfois ils bégaient

je fais trop de bruit il est sorti sur le seuil pour s’en prendre au vent

au fond de l’assiette mon chat a trouvé un œuf — on en glousse encore

j’ai versé ma tasse — ça ne va pas réveiller mon vieux téléphone

le soleil s’accroche à la cime du grand cèdre et chasse la pie

matin maladroit — je trébuche à chaque pas pour quitter mes rêves

la couleur de mon ciel (sur la vermine des toits) frise l’insolence

à vous tous et toutes merci de votre indulgence envers mes mots niais

parler sans emphase d’une langue simple et droite qui sourit au cœur

fief de tous les vents la terrasse est en bataille — il rentre la tête

de fils invisibles maniés dans l'ombre il dit qu'il nous a compris

soudain il se tourne — un brutal coup de vent l’a pris par surprise 191


Paroles Suivantes

nous nous promenons mais je vois bien que mon chat est dans son assiette

des nuages roses chargés du vent de demain flirtent dans le ciel

recru je m’assois — ma molaire me rappelle qu’elle est bien présente

repos bien gagné — sur mes genoux il ronronne ses exploits du jour

je me sens plus pâle en tout cas je l’imagine — j’ai fermé les yeux

une nuit d’épines jusqu’au matin égratigne mes yeux écorcés

mon cœur se repose et moi sous la lampe lasse je bats la mesure

réveil trop tardif — une gorgée de café remonte le temps

en réalité je suis plus vieux que mon âge je dupe mon monde

la nuit fut bien longue — je ne sais combien de gouffres sans pont j’ai franchis

un second café j’aurais l’impression ainsi d’être en équilibre

des rêves sans lisse — j’ai glissé sur je ne sais combien de devers

fraicheur ce matin — le bol de café frissonne sur la table instable

midi se rapproche et le soleil me rassure — la nuit est passée

un loriot timide s’essaie au chant tyrolien — je crois qu’il grelotte

bruissant doucement à l’abri des pins les ombres ne me font plus peur

l’une contre l’autre deux tourterelles sans zèle feignent la tendresse

…et la tourterelle jamais lasse de chanter fait du racolage

dans les herbes folles les premiers coquelicots se sont refermés

enfer métallique — dressé sur ses rails un train encercle la ville

soudain le silence — les maux effacent les mots et inversement

hautain et distant un avion raille le ciel — fiente sur l’épaule

homme sans mystère — un plat de nouilles trop cuites sans sauce et sans sel

soleil toujours haut pourtant le vent est chargé d’une odeur de neige

je marche sans ombre sans passé sans devenir présence éphémère

à l’orée du matin comme à l’orée d’un bois je reste attentif 192


Paroles Suivantes

j’écoute ma peau caressée par un soleil gorgé de silence

la tenue de schtroumpf pour humer les pâquerettes est indispensable

le loriot aphone a retrouvé un ramage caché sous les feuilles

mon chat a une vie intérieure très riche — surtout intérieure

une sauterelle intrépide et désinvolte goûte à mon café

une clarté sale sorte d’égout de lumière suinte de la lampe

l’arrosoir percé abreuve de tout son cœur les pots ébréchés

jour faste aujourd’hui j’ai nettoyé le clavier — de ses mots grossiers

être sans passion je voudrais me dépeaucer de ce monde en flamme

je laisse après moi les illusions innomées ma mémoire est vide

le banc sous le chêne je m’assoie et j’ouvre un livre ”jardins de curés“

dans le laurier-rose un papillon téméraire part en éclaireur

le soleil s’éloigne seule la cime du cèdre étincèle encore

mon chat bosse encore — comprendre il fait un bosse sur la chaise-longue

l’appareil photo sur les genoux je m’arrime à mes souvenirs

soufflant sur ma tasse je me balance en suivant le rythme des branches

ici l’heure est grise — les regards se désagrègent entre chien et loup

indécis le vent souffle à droite glisse à gauche la feuille docile

le vent se recueille dans le silence des arbres — encensoir de feuilles

vivement je me retourne j’ai cru reconnaître le pas de mon ombre

un soleil sans joie s’éreinte entre les nuages à pétrir des ombres

la vallée se fige comme si elle espérait la fin du suspense

je tente une approche en grinçant de tous mes os vers la cafetière

la fleur d’hibiscus que le vent a arrachée flétrit sur le sol

je frisonne un peu quand j’approche de mes lèvres la tasse fumante

un inconnu semble s’être glissé à ma place — ce miroir me glace 193


Paroles Suivantes

j’oscille sur mon perchoir en lissant mes plumes

devoir conjugal rendu envers la nation qui c’est le baisé ?

l’estomac en vrac je balance sur le banc les yeux dans la vague

j’ai bien mérité de ma carte d’électeur — un premier tampon

j’ai ouvert un livre hélas je l’ai déjà lu ”la nausée“ de Sartre

me voilà rentré — curieux mon chat me demande où j’étais passé

je reprends conscience secoué par l’amertume d’un café brûlant

dernières nouvelles le ciel toujours à sa place — je suis rassuré

soleil sans lumière — un vieux ballon sans couleur fuit sur l’herbe lasse

fin gourmet mon chat s’est voté une seconde sardine

un marteau-piqueur insolent couvre le son du pic dans le bois

le premier café n’est pas plus amer pourtant — oui mais jusqu’à quand

les ombres s’inclinent devant la nue qui traverse mon regard perdu

malgré la lumière le ciel me parait plus pâle — pensées anémiques

la vallée nerveuse n’en finit pas de trembler — le monde est trop vieux

restrictions déjà — je me refuse le droit au moindre sourire

au prochain éon la terre aura effacé l’arrogance humaine

puis je me raisonne — le cœur enfin plus léger d’un second café

boule de roulette tournant autour du néant — noir je perd et passe

narquois le miroir me renvoie un teint de vieille carcasse graisseuse

un œil dans le ciel — les nuages distendus pour jauger la terre

cette nuit j’ai couru l’Érèbe j’en garde le souffle court

de lourdes nuées grondent pour qu’avance l’heure du crépuscule

fin d’après-midi je me repais du silence somptueux des arbres

je cale la joue dans la paume de ma main — le soir goutte à goutte

pigeon bec cloué 194


Paroles Suivantes

elle porte un masque je ne me reconnais pas dans l’eau de ses yeux

serrés sur la tasse je revigore mes doigts d’un souffle engourdi

un rideau de pluie a englouti la lumière — le matin abdique

le matin effraie — les pissenlits décoiffés froncent tête basse

brume du café qui embue la vitre froide — l’attrait de la pluie

l’esprit dans le vague j’ai traversé l’eau boueuse d’un jour sans escale

le jardin sourit d’une odeur de foin mouillé — frisson dans la tasse

les souvenirs las de remonter le courant glissent dans la vase

la lumière mate qui sourd épaisse des nues — lumière pourtant

mon ombre avait froid — elle craignait d’affronter une journée grise

jusqu’au bout du jour sur les murs ont ruisselé des plaques de nuit

cailloux dispersés dans le lit de ma mémoire — stèles sans repère

la lumière grise ourle l’ombre des collines — morne crépuscule

les ombres précèdent un crépuscule frileux — sourires livides

entre mes oreilles le frottement infatigable d’un tamis de sable

le mistral en colère m’a claqué la porte au nez — colère rentrée

assis sous la lampe un reflux de la mémoire me fait frissonner

battue par le vent même l’ombre des collines a courbé l’échine

je quitte twitter je prends le temps de rêver j’entrouvre à twitter

derrière la vitre j’entends la plainte assourdie des branches forcées

grisaille de l’aube — je me suis levé si tôt la nuit colle encore

harangue du vent plaintes du chêne étrillé silence des oiseaux

mon esprit cahote dans l’ornière du réveil — les ombres trébuchent

le vent s’est calmé — soupir d’une feuille à l’autre le message passe

dans le matin gris les tourterelles se taisent — un vibrant silence

le fauteuil boiteux aux bras lustrés par les ans m’accueille en grinçant 195


Paroles Suivantes

l’âme bosselée je bascule mon humeur sur le siège informe

lové sur mes cuisses mon chat me tient chaud au cœur avec ses ronrons

crise identitaire — je ne sais pas qui me fixe là dans le miroir

toute au long du jour il m’a aidé à chercher un soupçon de flamme

mon stylo usé à la plume obéissante n’a bientôt plus d’encre

les coquelicots dans la lumière assombrie saignent sur le pré

soleil dans les yeux je m’enivre d’un parfum de café fumant

la lumière grise qui sourd dessous les nuages oppresse mon cœur

la tasse de café me convie au voyage — arabica du Brésil

les ombres s’effacent et le soir qui se précise ment au crépuscule

les vieux pissenlits et les luzernes en fleur flirtent dans le pré

au fond du verger la nuit glisse entre les troncs — un frémissement

courtoisie du vent — poliment il tient la porte aux rayons prudents

soleil et averses tendent des diamants aux feuilles que le vent détrousse

derrière la vitre une compagnie de nues piaffe d’impatience

une nuit d’averses a abreuvé le verger — le soleil l’embaume

les ombres vaincues sur le mur de béton cru font pâle figure

soleil pour arbitre le vent joue avec les nues — spectateur comblé

un bruit de moteur interroge la vallée — le silence hésite

les ombres sont vives dans le vent qui les taquine — j’en vois qui sourient

j’ai rêvé si fort de remonter le courant — je m’éveille en nage

merci mes pisteurs vous que la trace des mots ne rebute pas

ce matin même le café a le goût d’une défaite

jardin sans muguet — il m’offre pourtant la joie des coquelicots

dans ce corps sans force je me sens comme en prison — la journée commence

la journée a fui comme coule un sablier — jusqu’au dernier grain 196


Paroles Suivantes

loin dans un méandre de mon cerveau limoneux la plage de sable

je marche et je croise sur des corps sans consistance des masques livides

l’herbe encore humide d’une averse bienvenue émousse sa faux

soir mélancolique — des boules de coton sales maculent le ciel

la nuit vient quêter quelques miettes de lumière — j’entrouvre la porte

comme un sable aride qui s’écoule entre mes paumes le verbe s’épuise

sur la route lente le silence ponctué de fétus d’étoiles

plus de souvenirs — la mémoire a trébuché sur l’âpre aujourd’hui

des fils de brouillard s’étirant sous les nuages suturent mes yeux

dans un ciel malade le soleil revient sans force en convalescence

la nuit traine encore entre les branches des pins — matin de grisaille

mes poumons grinçants s’étourdissent d’un parfum de printemps chétif

poussant le volet qui grince sous le ciel noir un frisson me prend

sous la molle brise les coquelicots froissés redressent la tête

le printemps abdique et va pleurer sa défaite sous le radiateur

petit à petit en escaladant le ciel le soleil s’avive

je sens une main se poser sur mon épaule — ce n’est que mon ombre

le goût du café redevient ce qu’il était — le premier plaisir

je ris de mon ombre qui se dérobe la nuit et les jours d’orage

de nouveau les ombres vives et acérées tranchent le mur de béton

je fâche le calendrier j’ai toujours des objections je suis un vrai moi de mais

pour les déciller je râpe mes yeux pâteux jusqu’à la douleur

ce soir l’esprit vide j’erre hagard sur des sentiers rongés de silence

c’est l’heure essentielle celle où le fauteuil soupire cette heure où j’oublie

par moment le ciel se déleste d’un clin d’œil qui ne m’atteint pas

à l’ombre du mur une ombre plus floue encore chuchote à l’oreille 197


Paroles Suivantes

sans se faire voir le soir glisse sous la porte — un peu froid aux pieds

les arbres complices se murmurent des secrets — frôlement des feuilles

ah le mois de mai le mois de ce qui leur plaît — les mains dans nos poches

encore un peu gris — les couleurs en embuscade affutent leurs charmes

je me suis levé avec des lambeaux de nuit plantés dans les yeux

sans ambiguïté le printemps et le soleil se tirent la gueule

pourtant cette nuit j’avais la joie d’un enfant mais c’était un rêve

je pose ma tasse sur la table de l’auvent — j’attends un miracle

bonjour à tous ceux que n’ennuient pas les sursauts de mon épiderme

les nuages se lassent — ils entrouvrent la porte au soleil atone

ciel sans compassion — les nues grises qui me narguent jouent de mon humeur

des ombres sans forme crépitent sur le béton — étincelles noires

des couleurs flétries dégoulinent du jardin — le soleil renonce

depuis qu’un chat rode la mésange a déserté son creux d’olivier

j’ai trouvé refuge et un peu de réconfort au fond de ma tasse

le soleil franchit le péage des nuages — mission cap au sud

en se faufilant sous les nues la lumière y laisse des plumes

un après-midi à remonter un courant gonflé d’arrogance

sur les vitres sales elle brille sans vigueur — lumière du soir

du coup mon fauteuil complice semble un peu raide à mon dos fourbu

j’ai refait les comptes — je n’arriverai jamais au siècle prochain

j’ai pagayé si longtemps — hélas le soleil ne m’a pas suivi

j’envie les rochers campés que les vagues seules érodent de sel

on distingue à peine sur le chemin sans lumière l’ombre de la haie

j’envie les rochers détachés de leur mémoire — vieux témoins mutiques

les petites fleurs des viornes-tins — un dessert servi aux abeilles 198


Paroles Suivantes

je rentre en boitant mes os crient miséricorde — torpeur languissante

la colline au loin se dilue dans le mystère — légère aquarelle

ascenseur en panne il faudra monter à pieds au septième ciel

assis sous l’auvent je laisse mon esprit vide se remplir de nuit

ce matin mon chat m’a offert une mésange palpitant encore

douceur du soleil le vent dans les herbes hautes — flux de souvenirs

un chat reste un chat malgré le prix des croquettes qu’on peut lui servir

réveil matinal — le soleil m’a devancé sur le quai du jour

mon café avait une odeur de cendre froide dans le bol fumant

le premier café — il mêle sa vapeur à mon front embrumé

une brusque averse ruisselant sur les carreaux disperse les plumes

les coquelicots à l’insistance du vent retroussent leur jupe

si l’herbe est ravie de la pluie prodigue la tondeuse fait la tête

le roucoulement des tourterelles amoureuses prend toute la place

la pluie tambourine en colère sur le toit — tenez bon les tuiles

même sur les doigts je compte comme mes pieds parfois j’en rajoute

un sorcier espiègle a transformé les averses en mistral solaire

vagues de verdure pré couvert d’herbe trop haute — mes pensées embarquent

d’un coup de baguette les nuages ont glissé en vapeur étrange

dans la rue déserte le mistral fait le ménage — mon bulletin m’échappe

oubliant la pluie ils déploient enfin leurs branches — les arbres respirent

j’ouvre la fenêtre — le ciel sans tache répand la joie du loriot

les peuples des arbres à présent louent le beau temps et leurs abreuvoirs

bercées de musique par le vent subtil les branches battent la mesure

la nuit va venir bientôt et aucun oiseau n’a besoin d’abri

le café est tiède à force de somnoler — je m’en sers un autre 199


Paroles Suivantes

les ombres du mur que le vent lisse et enlace deviennent chinoises

pas un seul nuage dans la tête n’est venu ternir mon périple

malgré mes yeux rouges du fond de la vallée bruisse un état d’espoir

pas de vent seulement l’odeur âpre de l’herbe coupée

un ciel de velours ondule sur les collines — le soir s’épaissit

les abeilles jouent au chat et à la souris dans les pyracanthes

la lueur sans force qui s’échappe de mes mots bute sur les touches

sur le banc je pose un fardeau de souvenir — vol lourd d’un bourdon

je rentre essoufflé — des parcelles du verger collées aux souliers

essoufflé d’avoir dompté les fruits du verger j’en garde l’odeur

bourdonnant sans cesse une abeille s’étourdit autour de ma tasse

s’extirper de sa couette — j’en mets plus encore une fois tirées sur l’horizon les nues semblent un tas de draps sales

un sommeil sans rêve — une escale languissante au bord du néant

un rayon enfin dans la vapeur du café gagne en importance

la fenêtre ouverte l’ombre du rideau de perles bruit sur les carreaux

douceur du matin — même ma dent douloureuse calme son ardeur

le soleil frémit dans les rides de mon front — je ferme les yeux

du haut de leurs cimes à l’abri des convoitises les loriots conversent

l’odeur du café ondule sur la terrasse — la journée commence

mon chat sur sa couette — enfin les mésanges peuvent déplisser leurs plumes

bourdonnant sans cesse une abeille s’étourdit autour de ma tasse

quelques gouttes chaudes ont maculé la terrasse — mes yeux chiffonnés

une tourterelle haranguée par une pie — mégères sauvages

la faux a glissé sur les tiges trop humides — le jardin ronchonne

la mésange bleue s’en retourne vers le ciel — on ne la voit plus 200


Paroles Suivantes

une averse molle et chaude englue le verger — les arbres transpirent

tout l’après-midi sur l’échine du jardin — j’en transpire encore

je me suis assis sur le banc au bord du soir — pantalon trempé

j’aime bien les rousses — la lune pourtant ne montre qu’un profil livide

j’ai pendu au crochet l’odeur du jardin humide et mon humeur terne

le vent pantelant se repose sur les feuilles avant de tomber

un lueur lasse burine le ciel froissé — suivre le chemin

au gré des méandres d’un vieux rêve inachevé mon ombre s’égare

à rebrousse poil le vent étrille les arbres — mon front me démange

second saint de glace — le soleil s’invite à table où elle a fondu

sous l’auvent ouvert aux quatre vents — trop de bruit café sans arôme

le matin déchire le dernier voile de brume — les ombres s’affutent

je me réfugie auprès de la cafetière — elle me comprend

parfum bienveillant — dans la vapeur du café je ferme les yeux

à travers la vitre les nuages malmenés me tirent des larmes

sur ma peau encore et dans les sillons du drap l’empreinte d’un rêve

je laisse à la porte le tumulte des rafales et ma dent dolente

mes mains impuissantes n’ont pas pu la retenir — moire du miroir

comme fond sonore il y a plus relaxant que les cris du vent

parfois je me dis que je ne fais pas du tout mon âge mental

les arrêts de jeu avant que vienne le soir — un grand verre d’eau

au fond du jardin j’oublie très facilement que j’ai mal aux dents

douceur des senteurs — ce n’était pas le printemps attendu pourtant

qu’ai-je pu leur faire — ils sont là qui me surveillent les pesants ramiers

premier saint de glace — il a semblé très sensible au réchauffement

un nuage en feu — il a frôlé de trop près l’ardent crépuscule 201


Paroles Suivantes

je ne la sens plus — mille fois j’ai soulevé ma vieille carcasse

contre ma sueur des senteurs ensoleillées — commerce équitable

là un chien aboie ici un cheval hennit ailleurs je me tais

les ombres s’émoussent contre le mur encor chaud — le soir goutte à goutte

malgré l'apparence mon chat me prend pour un chat — parfois je ronronne

vallée silencieuse — la tourterelle amoureuse en couvre les bruits

une tourterelle sur les bienfaits du sommeil préside un colloque

réveil laborieux — le soleil a tiré la couverture à lui

je compte mes membres — je n’en ai pas égarés en passant la nuit

des ombres fanées glissent sur le mur sans grâce jusqu’à l’herbe courbe

le soleil aussi dans le ciel indifférent est bien à sa place

le loriot fredonne se satisfaisant de peu — lumière indolente

contre toute attente je n’ai perdu qu’un cheveu dans ce mauvais rêve

le printemps et moi sur la terrasse odorante assis face à face

dans l’azur sans ride un petit nuage flotte et soutient mes yeux

savourant l’instant un café pour compagnon de bonne fortune

après un café et un loriot pour témoin je peux respirer

parfois je m’étonne que l’on m’imagine en vie — remous sous la peau

dernier saint de glace — j'en glisse un dans le pastis et j'attends qu'il fonde

d’un pas incertain je foule l’herbe charnue — vivante elle aussi

mon accent s’en mêle — diérèse et synérèse s’emmêlent les pieds

en trainant la jambe j’ai traversé le verger — l’air était léger

je rentre harassé des ruades du jardin — odeur crue de l’herbe

boite à souvenance — l’appareil en bandoulière ne m’a pas servi

collée sur mon front une feuille de laurier — rien qu’une seule

ivres les abeilles glissent d’un pistil à l’autre — parfum de jasmin 202


Paroles Suivantes

un chant d’oiseau couvre la clameur des tourterelles — fin de journée tiède

les bruits du silence qui arpente la colline apaisent mes nerfs

je me suis assis — le banc était occupé par un souvenir

dessus mon épaule le soleil dit au-revoir à la Sainte-Baume

au dessus de moi les feuilles du chêne aussi ont de la mémoire

les ombres farouches ont regagné leur tanière pour passer la nuit

premières chaleurs émoustillées les cerises prennent des couleurs

un maître crapaud à présent donne le la au chahut nocturne

merci à vous toutes et tous que rien ne rebute pas même mes mots

bonjour le matin un moment nous irons ensemble tu t’effaceras sous le poids des heures chaudes qui pèseront leurs midis

un chœur de loriots dans la robe du verger — offrande au soleil

quelques gouttelettes ont embué mon visage — une ombre espérée parfum du café — le loriot qui m’accompagne semble le goûter

symphonie des ombres sur la luzerne fleurie — parfum de rosée soleil dans les yeux mon chat caresse la brosse — le café tiédit

je ferme les yeux — curieux je suis les potins du loriot loquace

à l’abri du chêne un couple de tourterelles bât les draps du nid

j’ai posé mon livre pour mieux lire dans le marc du second café

une plume flotte dans la vapeur du café — parfum si léger

visite au jardin — vite je me travestis en schtroumpf à lunettes

cheveux ou jardin par quoi vais-je commencer — il faut que je tonde

le chat s’interroge — des arcs-en-ciel improbables fusent du jet d’eau

journée envoutante — les odeurs du jardin collent encore à la peau

j’arrose les roses et glisse mille couleurs dans les yeux du chat

douceur duveteuse — insensiblement le soir me prend par la main

transpirant mon ombre 203


Paroles Suivantes

rentre plus vite que moi se mettre à l’abri

tout au début du chemin avant de me perdre

seules quelques feuilles frissonnent dans l’air brûlant soupirs incandescents

le ciel clair encore — un voile de soie flottant sur mes joues brûlantes

avec lassitude et regret le soir libère un peu de fraicheur

bruit de fer battu — un train contourne la ville d’un rail impatient

par endroit l’herbe déjà sèche crépite comme mon cœur

levé tôt pourtant mais la journée qui trébuche prend le mors aux dents

sirène sans charme le réveil secoue mes cils rêve au teint café

un marteau piqueur vibrant de rage exaltée mord dans le béton

mon voisin loriot a mis la radio à fond — j’ouvre la fenêtre

mains sur les oreilles il faut que je pousse un cri pour me libérer

narguant le loriot deux tourterelles massacrent des chansons d’amour

soleil paresseux — escamotées par les nues les ombres se fâchent

les sons du printemps — je laisse la vitre ouverte pour les savourer

un café enfin — celui-là je le savoure d’un profond soupir

le soleil déjà ondule sur les façades — les poumons s’échauffent

tasse vaporeuse — l’arabica du Brésil sent bon la samba

à l’ombre des chênes le café prend tout son sens et flatte les miens

les mains dans les poches le soleil vient nonchalant prendre l’apéro

mon ombre partage le fardeau de la journée puis elle s’esquive

une brève averse la nuit a brisé mon rêve de grève et de sable

sur mon front la sueur et la mémoire ont laissé de profonds sillons

le soleil se cache derrière un loup de nuages — soudain il sourit

la terre s’effrite entre mes mains fatiguées — trop longtemps pétrie

les ombres aussi jouent à chat contre le mur — matin incertain

je me suis revu

puis mistral régnant 204


Paroles Suivantes

les nuages s’escamotent vers la mer promise

je retarde le plaisir du premier café

satisfait je hume dans la vapeur du café un air d’outremer

enfin je me lance et saisis la cafetière pour un corps à corps

pourtant je déteste l’idée même du voyage — mais parfois j’y songe

mistral devenue la petite brise aboie et montre les dents

un peu ébréché éméché par trop de vent je rentre en boitant

le soleil s’en moque il tient tête au mistral d’un haussement d’épaule

j’ai trop attendu — dans le pré l’herbe trop haute noie les pâquerettes

éperdues de vent et de soleil les avoines sont devenues folles

sur le cerisier une poignée de cerises — mauvaise saison

la faux rebutée par le rempart d’herbes hautes s’est donné raison

je retiens à peine les pensées qui vagabondent sur mes souvenirs

le linge étendu geint et claque sur le fil — fourbu il se rend

le silence glisse d’une ombre indécise à l’autre au gré de la brise

fin d’après-midi — à bout d’argument le vent déclare forfait

poussière d’un souffle qui prend vie dans la lumière lente et fatiguée

mon voisin loriot invisible mais présent m’attend sous l’auvent

une odeur de nuit où le soleil n’ose aller harcèle la chambre

le chant du loriot aussi pointu que soyeux — matin de printemps

sur la cheminée une tourterelle éprise déclare sa flamme

mon regard s’embue envouté par le parfum du café fumant

candeur des collines sous la caresse de l’aube — un voile de gaze

le vent a cessé — il ne reste qu’un frisson dans le cœur des arbres

des flèches dorées ricochent sur la façade — le soleil s’éveille

la vallée s’ébroue — le son étouffé d’un train agite la brume

un peu masochiste

bientôt six saisons 205


Paroles Suivantes

auront jalonné mes ans — triste certitude

palpitent dans la colline — le loriot s’est tu

dodelinant vers les croquettes du chat un hérisson pansu

il est tard j’ouvre enfin mon cœur le café a fait son œuvre

j’inspire le soir je respire sa douceur j’inspire et je vis

le parking bondé la salle d’attente aussi — je me sens vidé

sur les hautes tiges de petites sauterelles font du trampoline

prendre un ticket attendre qu’on vous appelle comme au rayon fromages

le chat des voisins à cinq heures tous les jours vient prendre le thé

salle surchauffée — par chance je vois le ciel à travers la vitre

dans la haie d’épines les minuscules oiseaux restent sur leur garde

au fond du jardin un écureuil facétieux jouait à m’attendre

odeur de fumée — les pins ont envie de prendre leur souche à leur cime

le soir est entré il a jeté sur le sol une brassée d’ombres

silence du soir — en face un bout de colline encore grésille

un ciel d’étain mat plombe les crêtes cuivrées — soirée métallique

la mine boudeuse d’un mois de mai versatile — ma mauvaise humeur

en fin géomètre mon chat sait très bien marquer le milieu du lit

entre ombre et lumière entre contrainte et sourire — le matin oscille

fragrances légères dans la fraicheur du matin — symphonie de mai

butant sur mes rêves je n’ai pas le cœur à rire — les couleurs sont grises

la nuit traversée sans le moindre clapotis — une nuit de rêve

peu à peu le trille épanoui du loriot dessillent mes yeux

à celui du loriot un chant non identifié reprend l’harmonie

le soleil repousse tout doucement les nuages — les ombres s’affirment

la brume s’étiole et les ombres peu à peu tendent leur contour

des cris de marteau

le premier café 206


Paroles Suivantes

premier violon de l’orchestre dans la vapeur grave

le soleil est déjà haut et le café tiède

autre spécialiste salle d'attente identique le même fantôme

je retourne alors embrasser la cafetière qui me le rend bien

ancienne musique — les nerfs vibrent sous le plectre de mes errements

matin lumineux — mon ombre animal docile se frotte à mes jambes

ardente moiteur— j’ai promené ma carcasse dans un four solaire

l’ombre qui me suis a une odeur de cerise — verger sur la peau

même les odeurs des fleurs et l’herbe jaunissent broyées de chaleur

sous mon bonnet rouge les coquelicots me prennent pour une cerise

j’ai laissé mon ombre finir seule la besogne — respirer fatigue

les tracas les peines je les ai abandonnés dans les herbes hautes

à l’ombre des chênes les pensées peuvent souffler — j’ai la tête vide

j’ai fait provision de fragrances printanières pour l’hiver prochain

pesanteur du front dans la touffeur de la paume — la journée chancelle

je claudique encore mais mon panier est rempli de cerises rondes

la vie continue — sur le fil deux tourterelles parlent d’avenir

c’est un soir de soie qui glisse sur mes épaules léger et grisant

bilan d’une nuit passée à fuir l’insomnie — je compte les rêves

ce matin le chat m’a entrainé hors du lit — il avait très faim

bercées de soleil les feuilles de viornes-tins sourient veloutées

debout dans l’alcôve je goûte au premier café tandis qu’il grignote

quand j’ouvre au jardin je fait l’appel des oiseaux — tout le monde est là

le soleil s’étire sur la terrasse odorante — un second café

cadeau de mon chat — deux souris décapitées près de ses croquettes

d’un humble silence je salue tous les oiseaux qui m’offrent leur chant

je m’assieds enfin —

il fait déjà chaud 207


Paroles Suivantes

si j’en crois le thermomètre — gouttes sur le front

soupirs — le loriot et moi nous nous comprenons

émerveillé par l’harmonie du printemps je repends des forces

la chaleur déjà pesante — on a beau brasser la surface oblique

ma peau tourmentée vibre de toutes ses cordes — je respire à peine

sur ma peau ricochent les dards d’un soleil rageur — cuirasse fragile

des avoines folles brulantes et frénétiques crissent sur mes joues

je vais aller tondre les dernier coquelicots — et las mon cœur saigne

la faux affutée couche le chaume docile — fière des andains

odeur de figuier — quand on chiffonne ses feuilles on dirait le sud

un haïku ce n’est pas seulement dix-sept mores ni même un tercet c’est un instant, la surprise fixée dans l’exclamation

entre les avoines deux papillons font la cour aux fleurs ombrageuses dans les cerisiers guêpes et frelons choisissent les fruit les plus surs

dans l’arbre je croque une poignée de cerises — sucrée madeleine

en toute confiance mon ombre aveugle me suit sûre de mes pas

derrière la vitre mon chat attend patiemment — quand j’ouvre il m’engueule

assis sur le banc j’y dépose les sanglots de mes os rompus

les ombres s’estompent — bientôt il n’y aura plus que l’ombre du soir

menthe et marjolaine dans l’or du soleil couchant mêlent leur sueur

le café attend que soit passée l’infirmière — ça le laisse froid

éclats du soleil par les fentes du volet — mille éclats de rire

enfin sous l’auvent dans les parfums du café — le son du silence

mon chat aux aguets — la mélodie des oiseaux aiguise ses griffes

brutale version d’un poème silencieux — un jour de colère

café de Colombie — je me laisse dériver sur l’Orénoque

cris des tourterelles — 208


Paroles Suivantes

au bord de la piscine j’imagine les mystères du fond d’un lac

tandis que s’enroule le rideau de la piscine les degrés s’envolent

les yeux qui se ferment seuls dans la vapeur troublante du dernier café

des gerbes ardentes brutalisent les collines — mon regard s’enflamme

aller tondre les dernier coquelicots — mon cœur saigne

à l’ombre des arbres le retour du geai des chênes — un éclair bleuté

les coquelicots ont échappé à leur sort — la tondeuse en panne

dans la chaise-longue entre veille et somnolence — planning de l’été

dans le ciel cobalt aucun oiseau ne se risque peur d’y laisser des plumes

chapeau sur les yeux je me détends et je sonne la fin de la sieste

les feuilles transpirent sous l’épreuve méridienne une ombre sans force

sous l’œil des ramiers j’émiette du pain rassis pour leur collation

la journée se traîne sur le chemin poussiéreux — le soir m’impatiente

dans le cerisier il reste assez de cerises pour la guêpe et moi

odeur d’herbe sèche de transpiration collée — mon chat se détourne

lumière sans ombre le soleil passe au dessous des collines noires

je ferme mon livre et tout doucement je rentre d’un claquement sec

la brise candide qui maraude dans la nuit délaisse mon front

le soleil disperse les derniers haillons de brume — la vallée s’étire

la lune s’attarde morose sous l'horizon — j'ai des idées grises

de profil mon chat tient de la panthère rose la couleur en moins

le chant du loriot sur un rayon de soleil — réveil illuminé

il dort insensible à l’aubade du loriot — la panse remplie

je regarde faire le soleil — il est à l’œuvre — ombres affutées

le soleil câline doucement mes joues l’arabica mes narines

l’esprit plein de nuit je me dirige au radar vers la cafetière 209


Paroles Suivantes

le chat m’accompagne sous l’auvent de la terrasse — envie de caresses

une pie criarde au milieu des tourterelles — oreilles en feu

les yeux qui se ferment — nous faisons le plein d’odeurs et de chants d’oiseaux

voyagé si loin par le parfum du café — j’oublie de penser

le geai qui sautille allègrement sous les chênes fait son numéro

une guêpe harassée tournaille autour de la tasse — la vallée bourdonne

ma misanthropie grandit — aujourd’hui j’ai fait la gueule au jardin

jusqu’au bout des cils la lassitude me suit — je rentre en rampant

ma misanthropie grandit — aujourd’hui j’ai fait la gueule au jardin

très bien repassée la lame de la faux serre la menthe de près

la tondeuse en panne j’ai voulu tondre à la faux — ce fut une erreur

un verre à la main je regarde le voisin qui sue sur sa faux

l’herbe haute se moque de moi je n’ai pas le geste auguste

pas fait grand-chose mais demain est un autre jour — je m’en veux à peine

allongé dans l’herbe j’ai renoncé à la faux — les andains troublés

sous la lampe basse l’ombre lasse de ma main cherche un point d’appui

le geai fait le guet depuis les branches du chêne — inquiet ou moqueur ?

mon stylo hésite — serait-ce donc le stylo ou bien la cervelle

bien avant le soir je revois mes ambitions — un verre d’eau fraiche

quelques gouttes lourdes s’écrasent sur les carreaux — pluie désenchantée

fraicheur matinale — un pépiement anonyme répond au loriot

le volet découvre un ciel de zinc pommelé — retour sous la couette

le soleil s’étire dans un ciel sans enthousiasme — réveil nébuleux

le ciel a raison des nuages qui s’éloignent — sourire timide

derrière les troncs la chaleur en embuscade complote déjà

la pluie a cessé mais reste la pesanteur moite de mon front 210


Paroles Suivantes

j’ai le cœur qui bat

soleil d’opérette qui ne parvient même pas à faire danser les ombres

faut me dépêcher — l’anesthésiste s’endort derrière son masque

devant un café sur la terrasse j’attends l’éveil du loriot

salle immaculée le soleil joue l'artifice — réveil évasé

fin d’après-midi — le son du ventilateur berce son sommeil

la cervelle en vrac mes tempes d'airain résonnent de couleurs stridentes

chassés les nuages — finalement le soleil retrouve sa place

il est toujours là le jardin n’a pas bougé — l’herbe s’est tendue

sur le mur en face l’ombre du toit se fait pagode — saveur d’orient

peu à peu je rentre dans ma peau de revenant — malgré tout j’hésite

j’ai fui le verger je n’avais pas de panier — la pêche encor moins

j’escorte le soir jusqu’au bord du crépuscule — peur de m’y noyer

lumière du soir — un tintement de cascade abreuve les yeux

je ne parle plus — sur ma langue un goût de cendre buvarde les mots

les ombres se touchent se superposent se fondent — amours cannibales

momifié dans mon inconscient j’ai trouvé un mot d’amour

la couleur du ciel quand je pousse le volet ne m’importe guère

tenon bien scié attend mortaise au bédane pour le rendre raide

matin un peu frais — voilà le temps idéal pour la marche à pieds

je digère mal les anesthésies fréquentes — je n’ai pas sommeil et je dis n’importe quoi pour colorer les nuits blanches

le soleil sourit timidement malgré tout — je souris aussi

la nuit ment le plus petit rêve jamais ne se réalise

je savoure le seul café auquel j’ai droit — brûlant et sans sucre

soirée de délires une nuit cent cauchemars la coupe déborde

rendez-vous pour une opération de routine — 211


Paroles Suivantes

le soleil s’impose — je me lève émerveillé il m’aurait manqué

pendant que je souffle quelques gouttes sur mon front — vapeur du café

en trainant la patte j’arrive sur la terrasse — café plein d’entrain

clapotis dans l’eau — le silence des oiseaux berce mon regard

insoucieux je goûte les boniments du loriot — ils me font sourire

les petits plaisirs d’une vie loin du chaos — les pieds sur la table

fin de matinée — sur la vitre l’araignée attend une mouche

cadeau de mon chat qui s’enfuit dans le salon — un vase brisé

aveu dérisoire : la femme qui est en moi est homosexuelle !

une clarté fraîche court entre les pins prudents — midi se rapproche

son du shamisen — sous les fleurs de sakura les plaintes du chat

comme on manque un bus j’ai raté ma vie — tant pis je prends la suivante

le jardin sourit — il se met à ronronner après deux caresses

dans un air visqueux péniblement je m’éveille d’une sieste moite

toute la journée même sur la chaise longue j’ai trainé mes os

mes mains harassées chassent de devant mes cils un rêve adhérant

j’offre à mon chat un arc-en-ciel éphémère en arrosant les pots

spectre sans substance le fauteuil ne grince pas quand je m’y enfonce

la journée s’achève et la colline s’embrume — elle aussi transpire

je vois tout en sombre — pourtant le ciel est limpide le soleil solide

entre chien et loup — le soir par petites touches glisse de mes yeux

fin d’après-midi pourtant déjà je redoute la nuit et ses ombres

les parfums du soir ricochent sur la piscine — cœur éclaboussé

comme dans du sable je me terre dans les mots que mon front émiette

comme un cri de joie pour accueillir le soleil — clameurs matinales

un train passe au loin — j’entends qu’il geint sur ses rails : ”je reviens-reviens“ 212


Paroles Suivantes

un réveil sans zèle après une nuit rugueuse — mais le soleil luit

assis sous l’auvent un sanglot plie le gosier — pourtant je vais bien

un animal sombre me suit et plante ses crocs dans ma nuque à nue

malgré la pluie d’hier l’herbe a une odeur de foin — j’ai la gorge sèche

enfin je parviens au bord de la cafetière — contrée bienaimée

attentif j’écoute le message de mon corps — acouphène en morse

je reprends vigueur dans les vapeurs veloutées d’un café complice

volet repoussé — la lueur d’un autre monde fige le matin

le vent sous l’auvent évacue les derniers miasmes — gorgées de plaisir

museau dans les pattes mon chat prolonge sa nuit — sommeil équivoque

maintenant je peux regarder le jour en face — eh bonjour, le jour !

ciel ni gris ni bleu — il ne dévoue sa lumière qu’aux rêves perdus

pour vous je dessine d’une pointe malhabile le chant du loriot

ce juin ambigu — il roule sur le matin des flocons de nuit

le mistral balaie les poussières du chemin — un grain dans l’œil

sur le mur les ombres qui désignent l’horizon sont vides de sens

poser ses pensées et un instant son bagage -reprendre son souffle

le loriot et moi on se passe de lumière — on ferme les yeux

j’avais dessiné sur les plumes du loriot l’ombre d’un sourire

dans mes mains la tasse aux odeurs pensives ranime mon cœur

un pas encore un et je la vois qui approche — la dernière borne

le ciel s’est fendu d’un sourire versatile — mes yeux le lui rendent

une douceur moite s’écoule sur les collines figées dans le soir

dans l’ombre du buis deux papillons se racontent des rêves tremblants

la frange des heures ondule au bord de mes cils — ce n’est qu’une larme

tout au fond je garde l’âme de mes dix-sept ans — hélas mes os grognent 213


Paroles Suivantes

une ombre de soie auréole le jardin — le soir se maquille

mon chat est tout smouale — il a fait un mauvais rêve qu’il ne sait narrer

depuis l’herbe sèche mon chat en est revenu couvert de jardin

derrière les nues le soleil est renfrogné — il cache sa joie

le ventilateur s’époumone à brasser l’air sans le rafraichir

nouvelle tondeuse — dès à présent le jardin va bien se tenir

sous la peau je garde de mes frissons juvéniles une ancienne trace

d’un grain minuscule je fais tout un monument — j’en fais souvent trop

silence du soir déchiré par les hoquets d’un chien mécontent

je rentre rompu — j’ai taillé une bavette avec le verger

je ferme un volet sur la journée claire encore — la nuit prend patience

les perles de bois s’entrechoquent dans le vent — son mat et sinistre

un crapaud enroué tousse sous la pluie d’étoiles les pattes dans l’eau mon chat dort encore — je me lève doucement mais je le réveille

des fleurs d’olivier sont tombées sur mes épaules — le vent les disperse il s’accroche au vent de ses ailes tremblotantes le vieux papillon

vers nos appétits nous tendons — lui ses croquettes moi la cafetière

le mistral trop froid me force à raccompagner mon café à table

avec le temps et quelques cafés on frôle la sérénité

soleil violent — ce matin je ne le vois qu’à travers les vitres

soleil vif et frais premier sourire du jour — le café pétille

le ciel dégagé des cauchemars de la nuit — il semble infini

pas un froissement — même le loriot l’écoute l’éclatant silence

duel au soleil — les pins affrontent leurs ombres dans le vent limpide

parfois un nuage aiguillonne le soleil et ils jouent à chat

des bruits de moteurs tournent autour des collines — la moindre étincelle… 214


Paroles Suivantes

craquements de branche claquements froissés des feuilles — la plainte des arbres

le voilà il chante — enfin nous pouvons sourire le loriot et moi

midi sous l’auvent le vent en face de moi — on prend l’apéro

carreau de soleil sur le parasol qui s’ouvre — il devient losange

sur la méridienne le vent entre les orteils me lave la tête

il monte au grenier pour donner à réfléchir aux souris — le chat

les pierres des murs geignent insensiblement — le vent se renforce

des marteaux résonnent sur l’écorce des collines — soleil de midi

oint de citronnelle les moustiques n’en ont cure — assaisonnement ?

entre argent et vert les oliviers font de l’ombre aux dieux des dollars

sur ma peau aride le temps a laissé des dunes que le vent modèle

brin de basilic froissé — sur mes doigts l’odeur de soupe au pistou

sur le sol je glane les abricots que le vent a giflé — trop verts

le soleil sourit entre les branches de chêne — je souris aussi

colère du vent — toute la journée passée sans un chant d’oiseau

la paresse gagne l’épaisseur de mes paupières — elles sont si lourdes

soir et lassitude — peu à peu je prends la forme d’un tronc vermoulu

quand je souffle pour sécher ses ailes l’abeille cligne des yeux

la lampe s’essouffle et sous le vent la nuit rampe — les étoiles fuient

par la porte ouverte se glissent le cris des pies et un vent coulis

le vent laisse enfin les pins méditer en paix — bruissement d’aiguilles

sur le thym en fleur une abeille s’est posée — un subtil mélange

fraicheur et soleil tendent ma peau chiffonnée — le jour devient lisse

parmi les ramiers une pie chicane et glane — soirée besogneuse

elle monte droite dans l’évidence du ciel — vapeur du café

je m’assoie je souffle et j’attends que se dilue le poids du soleil 215


Paroles Suivantes

le tas minuscule tout au fond du sablier est infranchissable

papillon sur l’herbe — à chaque battement d’aile le monde se cabre

j’enfourche le soir je lui retrousse les ailes j’attends du néant qui palpite dans ma nuit un signe une incantation

dans la vieille armoire poussiéreux j’ai trouvé un battement de cœur je cède à l’envie et je me verse un grand verre de rêves sans nuit

dans un ciel maussade une corneille muette me fait un clin d’œil

au loriot se mêle le parfum du chèvrefeuille — fraicheur matinale

quelques rayons pâles rebondissent mollement sur les tuiles sales

quand je me rapproche c'est à peine s'il frémit — confiance émouvante

commence un colloque avec le premier café — chaos des corps fluides

dans le ciel nouveau le soleil retient son souffle — vestiges de brume

des étirements — mon chat qui n’en perd pas une dort sur son coussin

ceux qui me subissent — du fond de mon encrier je vous remercie

j’oublie quelquefois combien de calendriers m’ont couvert feuilles

oiseau dans vos yeux — le sourire qui s’y pose nargue le soleil

un autre café me fourni des arguments — soleil dans ma tasse

seul il se prolonge dans le frôlement des feuilles — silence de soie

même sans sucre j’éprouve le besoin de le tourner

je pose ma tasse — je regarde le parfum flottant du café

mollets douloureux — j’ai marché tellement loin dans ce rêve inouï

l’ombre de la lampe — une potence où la nuit se pend chaque soir

je guette mon chat qui lui épie une pie qui elle essuie ses ailes

une tourterelle sur le fil téléphonique se tient au courant

la tête en bataille je ne sais où j’ai rangé mon indifférence

on ne gagne rien à mieux me connaître — je ne suis qu’une défaite 216


Paroles Suivantes

doucement je sors la tête du thermomètre — chaleur par surprise

une épaisse couche de vieille mélancolie sous mes yeux de clown

j’offre ma peau nue en sacrifice aux moustiques — tant pis j’ai trop chaud

encore un soir où je rentre avec le jardin rivé sur les os

transpirant je rentre des miettes de canicule collées sur les os

des larmes dorées pendues aux abricotiers — on en mangerait

le chat et moi nous rentrons de promenade — suer et sourire ensemble

soyeuse la brise chargées d’incertains parfums caresse le soir

les parfums du soir frôlent mes paupières — odeur de l’heure sans ombre

des graviers qui crissent — violemment la nuit ratisse le cri des crapauds

miasmes de la nuit vite chassés de la chambre — brassée de soleil

dans la haie profonde le ciel sème ses étoiles — écho des lucioles

j’ouvre les volets pendant que le café passe — la maison sourit

une vie d’homme — la Sainte-Baume en face au soleil levant

ombre sous l’auvent — j’en profite avant l’assaut des hordes brûlantes

sans bruit je regarde sur le lit dormir mon chat — sommeil rassurant

d’un coup d’aille alerte il saute d’un arbre à l’autre — le loriot aigu

le sourire au lèvres je prépare mon café — je mouds de plaisir

le débat s’engage entre un loriot volubile et l’inconnu bavard

je sais me défendre du soleil qui mord déjà — café sous l’auvent

le front sur la tasse je me noie de chants d’oiseaux parfum de café

le loriot s’éloigne — il est vrai que ce matin je n’ai rien à dire

à l’ombre des chênes je brosse les poils du chat — il ronronne d’aise

l’abeille perdue essaie d’atteindre la feuille — vite l’épuisette

c’est l’heure où l’on croise les volets et où l’on rentre pour jouir de l’ombre

le ventilateur disperse au loin mes pensées — il en fait des songes 217


Paroles Suivantes

le soleil s’embroche sur la pointe de midi — un four de lumière

quelques gouttes d’eau pour l’odeur du chèvrefeuille — j’y gagne un sourire

crevant l’interface réveil en pleine chaleur — le rêve en fusion

pas de bruit — le jardin retient son souffle avant l’assaut de l’été

le soleil traverse la chair même du feuillage — ombre incandescente

esprit attentif — le vent du nord-ouest remue le cœur des vieux chênes

le chemin hésite — entre mes bras il n’y a rien qu’un peu d’amertume

premières cigales — inlassablement elles strient l’écorce des pins

le chant des oiseaux bâillonné par la chaleur — craquements de l’herbe

malgré la chaleur j’ai laissé tiédir ma tasse — le vol des mésanges

sur les murs fiévreux les ombres nues s’évaporent — spectres ondulants

larsen dans les pins acouphènes du jardin — je rentre à l’abri

entre mes mains je pétris le vide et l’absence — golem sans parole

olivier d’argent — tes fleurs d’un blanc si peu blanc coulent sans un bruit

assis sans un geste j’accompagne sans substance la fuite des jours

retrouver ses marques après une longue sieste — mission difficile

photo surannée — même l’ombre des sourires lentement s’efface

tête incandescente — je brule par tous les pores de mots calcinés

deux perruches vertes évadées de leur volière chantent sur la grille

le regard se brouille et les ombres s’effilochent — silence accablé

la gorge nouée et les doigts tremblants je cherche le sens de ma nuit

le nez dans le verre je respire les glaçons — respiration lente

au bord de la nuit entre le bleu et le noir une étoile brille

des pensées flottantes des rêves mal assouvis mais des couleurs vives

de longs fils d’argent cousent le ciel à la terre — mille trous d’aiguille

un frémissement d’impatience entre les branches — fraicheur espérée 218


Paroles Suivantes

moments merveilleux traversés si près de vous et si loin de vous

le soir se prolonge d’un souffle d’air sur la joue — ancienne caresse

le ventilateur me prend à retrousse-poils — je lui en veux pas

ruminer ma vie — je suis de ces bœufs qu’on mène calmer les taureaux

vous êtes si loin que je ne peux vous toucher que du bout des yeux

dans la soirée grise un vieux souvenir me roule dans les illusions

le ciel s’empoussière — le soleil fouette les corps de lanières sales

d’un sommeil d’argent il dort encore au milieu du chant des oiseaux

sur la vitre sale une mouche trace un cœur tout égratigné

le loriot de l'est dit merde au loriot du nord — concours d'insolence

la drôle d’idée — tout à coup mon chat devient un olivier nain

avant le café pour les fleurs de grenadiers deux arrosoirs d’eau

fin de la journée — tristement dort l’étendue de tiges brûlées

sous le parasol je médite mon café — songes vaporeux

c'est un soir d'étain un soir de lumière grise — les ombres ricochent

qui peut affirmer avoir vu pleurer un homme — lui seul peut le dire

peau de shamisen mon cœur ne bat plus il vibre sous ses mots d'écailles

regard vers l’arrière il n’y a rien de magique plongée dans le ciel — dans la mélasse et le miel je laisse un doigt nostalgique

fraîcheur sous l'auvent — je fixe droit dans les yeux ma nuit intérieure

dans l’air frais encore sur la fleur à peine ouverte un papillon rêve

mois de juin féroce -ses crocs déchirent ma peau même quand il dort

signal des cigales — il est grand temps de rabattre les volets sur l’ombre

réveil en sursaut — c'est une douleur ancienne comme une molaire

un après-midi dans un courant de sourires — clapotis de l’eau

avec l'âge les sentiments évoluent si vite -ils n'ont plus le temps 219


Paroles Suivantes

quand les lunes bienveillantes dansent dans ses yeux

les heures ont passé dans des vapeurs de café parfumées et douces

une couverture de laine sur la torpeur — le ciel se voile

mon cœur garde encore la fraîcheur de cette nuit au fond de ses rides

mon chat mélomane — sous les chênes il se délecte du chant des loriots

sur le guéridon j’ai laissé la tasse vide se remplir d’été

petite rainette sur la margelle du soir — bruissement de feuilles

le sable s’écoule entre mes doigts sans vigueur — sablier figé

sur la terrasse la fraîcheur se fait attendre -je vous sais rêveuse

rêver oui rêver dans le va-et-vient des feuilles les yeux grand ouverts

nuit de bure rêche — pas un souffle ne viendra soulager mes pores

imaginez un esquif si petit que vous rêveriez lune contre lui

échos des souvenirs — ils martèlent sans répit les murs de mon crâne

du bout de mes doigts étincelles de soleil j’allume ta joie

la lune souligne les contours fantomatiques d'une plume d'ombre

déjà — sur l’écorce rainurée une cigale a laissé sa peau

plus fort que l'appel de la vallée qui s'éveille le chant du coq

Sur le chemin du nord sur le Hokkaido dans le port d'Otaru il débarque

le premier café tôt sur la terrasse — dans le pins les pies m'espionnent

Il vient pour retrouver une fille une fille aux seins blancs comme la neige à Sapporo une fille au cœur dur comme un vase Jomon

j’ai plongé mes songes dans la nuit profonde et noire — j’ai touché le fond vapeur de café — je repose la sous-tasse pour la voir sourire

ne plus respirer ne plus pleurer ne plus rire — pierre en plein soleil

sept heur’ au soleil — et les cigales déjà lustrent leurs archers

belles nuits de juin 220


Paroles Suivantes

je marche au soleil — des rouleaux de barbelés me frottent le dos

matin de cristal — les mauvais rêves chassés d’un battement d’elle

il lui décrivait pléthore de métaphores — elle prit le large

nous rêvions ensemble dans le satin d’un drap d’été — mon chat et moi

j’en tombe mon verre — heureusement les glaçons vite disparaissent

le soleil souligne l’ombre posée de la tasse que mes lèvres frôlent

il attend sa muse à l’abri des balles perdues qui l’auront par ruse

j’écoute le murmure de son cœur électrique — la piscine

il ne rit jamais — en fidèle samouraï il trahit son maitre

rêver de lumière ou de la fin des ténèbres c’est très différent

triste sire attend à la porte de Rashô l’emprise des sens

la belle violette à son cou une améthyste fuit une âme triste

le soir calciné promène sur la terrasse un regard brûlant

le détroit passé il peut enfin souffler et sourire à sa plus jeune épouse

trainées dans le ciel les cigales se sont tues — odeurs de fumée

Vasco le portugais sage tire à boulets rouges sur ses souvenirs

voici l'heure d'ambre où nos cœurs battent ensemble la même mesure

Vasco le portugais sage tire à boulets rouges sur ses souvenirs

sur la table mise il rêve de tout son long à des souris grises

je suis un homme enfin ce qu'il en reste -la soif de caresses

et puis l'heure grise où ton pas trébuche et glisse s'éloigne du mien

l'avocat en pot se flétrit de canicule -qu'il ôte sa robe

enfin l'heure noire où les yeux ne peuvent plus nos mains se séparent

mais comment mon chat supporte-t-il la chaleur coincé sous la clim

mais l'heure profonde l'heure sans nom ni couleur vainc le sortilège

mille kilomètres elle a mille fois le temps de changer d'avis 221


Paroles Suivantes

un sourire qui passe — on se remet à écrire des niaiseries

à travers la vitre je vois frissonner les feuilles dans la chaleur moite

le soleil s'élève dessus les noires collines odeurs du matin

il faut que j'arrose les plantes en pots -- amour d'été...

ensemble à ma table une odeur de chèvrefeuille le chant du loriot

six heures du soir trente quatre degrés à l'ombre ”je suis en nage je vais rouiller“

somnolent encore j’enlace ma cafetière — valse vaporeuse

seulement attendre que la chaleur passe attendre que le rêve cesse

le banc sous les chênes attend patiemment un rêve pour entrer dans l’ombre

épaisse chaleur recrus les crapauds y coupent des copeaux de nuit

malgré la chaleur vaguement mélancolique je reprends un café

silence du soir les cigales ont annulé le concert nocturne

la lave en fusion que le ciel verse sans trêve coule dans mes veines

ivres de lumière les papillons de nuit roulent sur le papier

la force de rire je la puise dans des tripes déchirées et mortes

j'ai voulu garder sur mes lèvres son parfum son sourire aussi j'ai voulu apprivoiser son cœur de granit sauvage

repas dominical -penser un kôan zen face à sa belle-mère

lâcher lâcher prise lâcher sa main qui palpite prendre son envol

vous les innombrables amusés de mes paroles merci je vous aime

frissons sur la peau — la lune tient la chandelle quand la nuit m'embrasse

ronron de la clim l'occident baisse la tête -dehors grognent les hordes

tintement d'étoiles contre le mur de la nuit — cristal qui se brise

feuille de figuier déchirée en plein soleil -mordre dans le fruit

mon plus bel haïku — il est entré dans mon cœur sans effraction

un creux dans le cœur encore plus grand que l'absence là dans les entrailles 222


Paroles Suivantes

n'avoir que dix doigts pour compter tes paysages raconter tes pores

le chant du loriot ce matin plus que jamais un chant dans le cœur

je lève mon verre à la santé — à la santé c’est tout

nuit brève et hachée une nuit propice aux rêves — j’en ai choisi un

dompteur de mots comme je voudrais l’être ils m’obéiraient au pied de la lettre

viens ma dame viens les cordes du shamisen tremblent sur ton cou sa peau de chat se hérisse déjà le matin pâlit

le clavier se tord l’écran me saute au visage — je ferme les yeux

dans les herbes sèches la mante tricote un tour pas piqué des vers

jonque de papier contre vaisseaux d'acier il s'en remet aux vents divins

mâcher des amandes un casque sur les oreilles — broyer du gravier

seppuku ! seppuku ! hurle l’équipage — décidemment on n’a rien sans rien geint le capitaine

le soleil enfin s’ébroue et chasse la brume autour de son cœur

soirée veloutée qu'un léger vent tempère -une feuille tombe

il se replie sous la voile espérant échapper aux dards des rônins

poussière dans l'œil ou le cœur qui se reverse -larme sur ma joue

geiko est bien jeune le souvenir du vieux samouraï brûlera avec l’encens

le ciel s'engrisaille pas de promesse de pluie c'est la nuit qui vient

dans la chambre torride les shoji crépitent des baisers de feu

bruits dans la vallée la ville rentre chez elle -je n'ai pas bougé

un peu de fraîcheur un courant d'air sur la peau baiser dans le cou

à quoi les chats rêvent-ils le mien en tout cas garde son secret

il rêve d'une jonque aux seins accueillants et doux qui les conduirait tous les deux vers la caverne d'Amaterasu la divine

même sans torture l'aveu lui brûlait la gorge -il aurait parlé un ciel de coton est en train de grimer l'aube -soleil sous la couette

ils tairaient aux hommes l'existence du soleil -223


Paroles Suivantes

ils feraient l'amour

au fronton des temples de cette contrée sans prince "tu n'existes pas"

l'amour d'une mouche est un amour qui perdure bien après la mort

la lune attend l'heure complice où les amants s'enlacent pour en témoigner

trente-et-un à l'ombre -le bon vieux temps qui revient et j'ai presque froid

le dernier amour celui dont on se souvient le moins longtemps

mon torrent tardif -assis au bord de ses rives et boire son eau

au creux des collines la nuit lentement dénude l'épaule de l'aube

je l'avais si bien enrobée de paroles que j'ai cru pouvoir la caresser Elle sourit et puis s'envole la mésange apprivoisée

tendresse infinie -il dépose sur ses yeux l'idée de ses lèvres

les vieux pins se courbent — quelquefois ils espèrent le feu rédempteur

fraicheur du matin -l'odeur des fleurs de troène force la fenêtre

la cendre des pins dévalera la colline dans l’eau du torrent

la nuit je respire un parfum de mille kilomètres d’envergure

dans la nuit craintive une chouette peu farouche en quête d'amour

assis le soleil me pince pendant que je twitte — je baisse les yeux

un courant d'air frais frôle ma peau dénudée -une nuit de soie

pour rester à l’ombre je repousse un peu la table — taches de café

au temple d'Isé dans un bras de la rivière les nonnes se baignent souvent elles vont par deux les doigts anxieux de caresses

je n’ai plus de doigts usés de compter les ans — compter sur mes larmes je ne me vois plus — le miroir m’a traversé sans laisser de traces

il fut un temps où l'impératrice vêtait ses dames d'argent gardant l'or pour elle seule l'empereur aimait l'argent

ciel couleur lavande -les dents de scie des cigales mordent dans l'été fuyant la tempête solaire la jonque geint de tous ses bambous tout amour dispersé -entre les anneaux de jade

petit baiser vole apaise le front soucieux de la bien-aimée 224


Paroles Suivantes

sa coque tente le sort

des larmes figées

la pêcheuse de perle rêve des bras de la grande pieuvre le kraken aux ventouses brûlantes

hors du nuage de Magellan point de salut se dit la jonque perspicace --

au fond de l'auberge près de l'âtre sans chaleur pour un bol de riz elle monte réchauffer des couches de paille froides

d'un coup de rein habille elle libère son capitaine des anneaux de jade et tranche dans la brume un denier pour la route mais déjà la route avait disparu

les yeux vides et patients elle attend le marchand riche et son aumône de sel

la fenêtre ouverte sur le frisson des étoiles -la nuit d'été nue

je n’ai pas grand-chose à dire alors j’écris des haïkus

à vous qui avez posé un pas sur ma piste j'offre ce matin

sa main dans la mienne je peux franchir l’horizon d’un coup d’elle

six heures j'hésite -je me retourne et savoure l'éveil des oiseaux

pour sa jonque encalminée à présent il acheta mille roses d’un bleu vif à une femme trop fière pour son kimono ouvert

mon chat noctambule -il rentre potron-minet la queue éméchée

entre les étoiles qui lui montrent son destin il navigue à vue

les poètes ne devraient pas vieillir le ventre sans forme les os grinçants d’un fantôme l’âme incandescente ?

fier de sa jonque il entreprend un périple aux sources du feu

l’âme se dilue dans le gouffre des années le désir s’érode

le jour finissant apporte avec lui son lot d’émotions sincères

un brin téméraire j’ouvre la porte et je sors face aux dards solaires

la lampe sous l'auvent libère des bouts de nuit à chaque remous

je l’ai sur la langue ce goût d’un baiser rêvé — bruissement des vagues

la nuit dans mon cœur ne connaît pas les étoiles je m'y perds souvent

les ombres titubent bouillonnantes du désir de quitter les murs

je regarde les minutes des gouttes de temps salées 225


Paroles Suivantes

pour éviter que les rêves ne m'envoient en l'air

les oiseaux se taisent — midi l’heure où les cigales écorcent les pins

sous le ciel sans borne la nuit sème sur ma peau une pluie d'étoiles

tout en haut du col il la rencontra enfin il leva son sabre mais pour Chiyo-shikibu le ronin rendit les armes

il voudrait avoir chaud vous respirer par les pores se blottir de vous

d’une plume fluide il ourle les douces courbes de son chant grisant d’un regard sans équivoque elle l’invite à la suivre

le chant du loriot dans un monde rédimé -prémices de l'aube ô ma petite sœur pour revoir tes sourires pour frôler à nouveau ta couronne de fleurs pour apaiser ton cœur et calmer tes délires je t’offre les joyaux d’une triste âme en pleurs

les oiseaux fébriles s’agitent dans le branchage — silence de buse

sentir sa présence flottant dans l'air frais encore d'un matin d'été

trouvé le lézard que chassait mon chat noyé dans la piscine

avant les cigales les moineaux et les mésanges partagent le pin matinée fragile où les papillons volettent dans les lauriers-roses

petit à petit le ciel se couvre de laine — ce ciel me démange à l’ombre des chênes sur le vieux banc sans peinture un vieillard sans teint

ma raison fragile lâche la bride au désir — je m’essouffle au cœur

solstice d’été — un saxo mélancolique geint sur summertime

l’accordéoniste aveuglé par son parfum la prend dans ses bras dépose un sol sur ses lèvres dont seul il détient la clé

dans le ciel d’été la jeune étoile filante s’est trompée de route silence profond -pas même un crapaud pour fêter la musique

le désir m’envole m’écorche et m’époumone — j’ai le cœur salé une mer grise et creusée bat la rage dans mes tripes

loin un âne brait -le saxo mélancolique est resté sans voix La nuit je porte un gyrophare un gilet fluo

le soir se dépose sur les derniers chants d’oiseaux — 226


Paroles Suivantes

gaze tiède et lente

les dents des cigales

ma nuit infidèle traine en bas dans les impasses aux odeurs d’ennui

usées par les mots j’ai fini par devenir cet homme sans lèvres

ma nuit est rentrée sans faire un bruit un peu grise — la porte a grincé

contraction des feuilles agitées par la fournaise — mon cerveau vacille

silence pesant -même le chœur des étoiles en est bâillonnée

toute la journée dans l’œil du ventilateur — je me suis enrhumé

je lève ma coupe à demain s'il parvient à franchir le Rubicon de lave

la nuit se faufile profondément dans mon ventre — il fait noir dedans

mon chat me surveille -la nuit pour lui est un jeu réservé aux rêve

j'ai posé ma nuit douce et ronronnant encore au bord de mes lèvres

il vous veut madame il vous veut libre de rire de sa maladresse

votre visage madame se disperse si souvent de vos yeux à votre bouche que mes mains vacillent

je vous écoute et vous luis vous qui zébrez mes nuits de parfums d'oriflamme

j'écoute ma nuit me balbutier ses charades -je crois qu'elle est ivre

nuit incorrigible qui lâche ses chiens d’airain laper mon sommeil

bagage égaré le vieil homme terne attend dans le hall de gare désert un train vers les autres un illusoire convoi

une pie grivoise s'en prend à deux tourterelles et leur cloue le bec

je ne sais pas vous mais j'ai un petit problème de regrets

d'un vol lent il raye le ciel de ses idées noires -corbeau cafardeux

pèse oh oui mon cœur sur les fléaux sans souplesse d'un passé renié

un filet perdu la transforma en sirène aux cuisses sans voix depuis toutes les perles pleurent sur ses os dissous

ma nuit ma rebelle vos yeux dans mon encrier rires de diamant

seul un chien lointain se risque à les affronter —

une aube violette étire sa chevelure 227


Paroles Suivantes

sur ma nuit rêveuse

la nuit ton domaine

je ferme les yeux une association d'idées me frôle les lèvres

folle ambiguïté -dans la distance des vous leurs peaux se tutoient

première gorgée — le soleil qui entre en moi passe sur ma langue

un feu d'artifice soudain déchire la nuit -mon chat sous le lit

le loriot du chêne entame un chant d’espérance — il prend soin de moi

il a lâché prise -il est trop tard il le sait mais le nie d'un sourire

les muscles sans force je ne peux pas résister — tropisme du café

ma nuit vient de rentrer elle se colle à mon cuir et vide mes yeux

elle s’écartait de la balise des hommes — la route dans le crâne

ô ma nuit la belle les étoiles de tes yeux donnent le frisson

quelques gouttelettes salées brillent sur mon front — bien assaisonné

sur le bord de l'aube nostalgique ma nuit m'offre sa dernière étreinte

rayé de cigales un silence opaque fige les heures torrides

au signal du coq un vol de corneille regagne l'abri de leurs ruines

fin d’après-midi — sur ma vieille peau je rêve d’un froid de banquise

le soleil hésite à quitter ses draps froissés — le loriot insiste

une odeur de sel flotte dans mes souvenirs — que la mer est loin

dans le ciel sans force de vieux rêves rayés suivent les nuages

sur ma langue inerte le goût âcre de la cendre dans un âtre éteint

lumière perlée — les ombres bâillent encore sur le mur gercé

mon vieux cœur s’échappe — je n’ai que deux vieilles mains pour le retenir

des clochettes tintent dans ses yeux et sur ses lèvres scintille un serment

mon ventre écorché de pensées trop vagabondes me rappelle à l'ordre

regard dans les nues sans âge ses larmes coulent vers le ciel nuages

étoile filante le ciel noir est ton tremplin

chaque battement me vide d'un poing de sang -228


Paroles Suivantes

siphon sans espoir

hallucination non ce sombre champignon ravage le ciel

Vous qui me portez sur ce fleuve dérisoire je vous remercie

dans la nuit lasse erre un parfum de chèvrefeuille -haleine de l'aube

il parlait sans cesse elle l’ignorait de toute incompréhension

le matin approche -mélancolie d'un frisson quand ma nuit me quitte

d’un vol souple et ample son esprit rejoint la mer — il compte son sel

que jamais ne cessent les miettes d'éternité du dernier amour

entre les lauriers les oreilles de mon chat — le soir délibère

l'oiseau dans la viorne une mésange je crois pépie de bonheur

regard dans les nues sans âge ses larmes coulent vers le ciel nuages

la femme infidèle le regard hautain traverse la porte de Rashō

chaque battement me vide d'un poing de sang -siphon sans espoir

dix-mille étincelles brillent dans ses yeux — je sais je les ai comptées

Vous qui me portez sur ce fleuve dérisoire je vous remercie

fin de matinée le soleil c’est assoupi — levé bien trop tôt

sur le quai j'attends un minuscule bonhomme aux yeux d'espérance

quand elle sourit ses yeux délient des mésanges — je ferme les miens

l'ironie se cache dans ses yeux de diamant bleu -profonde détresse

je m’entrainais enfant à sauter dans les flaques — je riais alors

son rire m'a ému quand j'ai serré son corsage et ne l'ai plus revue

les ombres se lassent de couler sur les façades — le soleil se cache

le rire s'est brisé quand il serra le corsage et le corps trop prude de celle qui maintenant git pudiquement inerte

triangle amoureux — Jules et Jim à ses pieds Catherine tombe

ma nuit enveloppe ses frôlements impudiques d'un manteau d'étoiles

il a changé l’eau a remis des graines mais l’oiseau s’est envolé 229


Paroles Suivantes

dark sky of the night no more stars for leading me my dried tears refluing

prendre le train en marche chapeau quelle acrobatie — on n’a plus qu’à s’taire

un bon vieux silence -seul un bon vieil acouphène me tient compagnie

bruits de la vallée incommodants aujourd’hui — le temps change il pèse

Il la laisse entrer titubant riant sans joie sa nuit déjà grise

sous le tas de cendre les papillons de nuit gardent l’âme des feuilles mortes

il ferme le livre et lui raconte une vie de mémoire

un soir de limace de glu ou de beurre rance qui colle à la peau

musique torture peau de chat de shamisen plectre entre les yeux

un courant d’air le rideau de perles tremble — mes pensées tressautent

j'ai traversé la rue comme on traverse la vie -sans regarder

la confiance ne dissipe pas le manque elle le potentialise

ma nuit sur la peau je recueille de ses yeux un bouquet d'étoiles

assis somnolent sur la terrasse encor tiède c'est déjà demain

ivre d'insomnie las je voudrais de ma nuit qu'elle m'abandonne

je n'ai pas sommeil -ma nuit me prend par l'épaule -elle a pris les clés

premières lueurs déjà un loriot s'ébroue -je n'ai pas sommeil

ma nuit le tracasse et l'intrigue elle n'a pas l'odeur de sa nuit

au bord de l'éveil une foule le renverse sous les roues du train qui n'arrivera jamais -son cœur bout de détresse

encore un bourbon -mare de la vieille Europe la mer me traverse l'épaisse fatigue qui englue pensées et gestes me noie sans sommeil

ah ma cafetière mon étoile matutine cœur qui bout d'amour

mon corps me fait chier je ne sais pas quoi en faire -il ne sert à rien

les ombres enfin se pavanent sur le mur — travaux de peinture

ma nuit s'impatiente je lui ai fermé la porte -chacun son tour 230


Paroles Suivantes

plonger sans scaphandre dans l’immensité d’un rêve — havre du sommeil

averse attendue dans ses yeux l'orage éclate -il est fou de vous

la lampe allumée — mes yeux de vieille bourrique chutent sur les mots

il fait nuit ici un orage d'été gronde -clair à Montréal

encore un regard perdu au loin vers le ciel — le même rêveur

l'orage me parle il me conte sa détresse -nous pleurons ensemble

son cœur ne bat plus — un vieil appareil photo sans sa pellicule

ma nuit m'échappe son désir de jour me fouette-je ne vois plus clair

sur le seuil j’attends que vienne dans ma maison un oiseau magique

Spectre et mari jouent au foot avec la lune -Rashomon prends un but mon chat et ma nuit sont de connivence -je ne dois pas voir le jour

les fenêtres volent en éclats de rire — maintenant on peut voir le ciel profond

aussi gris que moi le soleil se frotte aux nues — mes yeux se décillent

jambes en coton j’ai trop marché dans ma tête — je suis si lourdaud

un loriot encore m’a conté par le menu ses prises de bec

je viens de croiser un cortège d’idées noires avec un nez rouge

boire un café tiède c’est pas ma tasse de thé — n’es’pas micro-onde ?

rage de l’orage qui fouette l’herbe séchée — une odeur de foin

il a pris la route celle qui fuit les impasses le Tōkaidō route de la mer de l’Est les bras chargés de baisers

ma nuit silencieuse je n'ouvrirai pas la trappe à tes bouderies fraicheur du sous-bois après l'averse d'été -parfum de sourires

rue de Rome une Geisha déambule au milieu des patineurs

seul je m'endormais dans la fraicheur de la nuit sur la nappe sale

tremblements de l’aube — la fièvre méthémérine du manque de toi

réveil dans le noir je cherche l'interrupteur -ouf je l'ai trouvé 231


Paroles Suivantes

un oiseau me pique et lentement je m'éveille pour mieux lui sourire

la nuit est profonde -c'est à peine si l'on sent la lune vibrer

au rythme des mots le matin lentement brûle sans laisser de cendre

j'étais endormi sous l'œil indifférent de vieilles étoiles

plus de points d’étoiles — le vieux chien mélancolique se gratte les puces

sur l'oreiller tiède une pensée le réchauffe demain n'est pas froid

clavier sous la lampe — une jeune coccinelle se pose sur « X »

nuit deuxième arrêt dans ce train où ne médite qu'un seul passager

amis sans visage mon cœur de papier froissé vous dit grand merci

où ont donc glissé les yeux d'Amélie la sage -la nuit m'ennéonne

retour du marché — dans le panier les melons s'époumonent

un bouquet de mots attend que l’arrêt de bus enlève son masque

journée d’été fraiche je délaisse le Ricard pour un Caol Ila

mur de béton gris que le soleil vient frôler — vague sur le sable

neiges du Fuji ce miroir des âmes tristes glissez vers le ciel

avec nonchalance j’interpelle le matin — je hèle les heures

le charpentier sombre sait accueillir la lumière que vos yeux lui tende

la fleur de patience a hérité les épines de l’impatience

malgré sa fatigue le chapelier réussit à rater son train

leurs deux mains liées par l’impossible lumière d’un baiser offert

mâchant sa laitue fade un escargot espère la peau d’une épaule

la tigresse feule son amour intransigeant sauvage et féline

vol plané du soir dans le vent et les claquettes des huis mal fermés

exit le lexique — la houle foule déboule le gosier gazé

regard au plafond -une araignée entre les poutres se froisse une mouche

attraction lunaire — une âcre marée submerge mon gosier noué 232


Paroles Suivantes

au milieu de gué — pourtant la berge était proche

les mots me submergent ils sont le souffle et la perche — vol des papillons

rebrousser chemin c’est sans doute nécessaire si c’est une impasse

des mots sans tabou libérés des mots sans masque — une love story

l’océan d’alcool remonte jusqu’au gosier malaxe ses yeux

elle était je ne sait ce qu’elle était mais je ne suis plus

recru je m’assois sur l’avant-dernière borne — sourire ironique

la nuit se referme sur leurs bouches entrouvertes — les serments scellés

la valise est lourde tous les coins sont abîmés — il faut la poser

la douleur s’estompe l’épaisseur de l’océan défie le regard

le cœur apaisé l’âme et l’esprit silencieux — que ma joie revienne

les loriots se moquent de mon teint de vase terne — ils y mettent des fleurs

la langue brûlée de mots rugueux et d’alcool — devenir aphone

un peu de nuit brouille mon visage encore — j’essuie le miroir

le soir épuisé glu d'un fleuve incandescent ronge ma cervelle

dans le vent plus frais les cigales persévèrent — suivre l’agenda

la soirée s'achève dans le vacarme crissant de mes acouphènes

cœur de papillon virevoltant sur la vitre — éclair dans mes yeux

freinée par le vent la nuit me parait plus lente -les heures me broient

les nuages courent -le ciel ivre de lavande glisse sur leurs joues

une lame noire surgie de l'enfer que j'abrite m'a coupé la langue

le vent s'encolère -des brassées de feuilles mortes jouent dans la piscine

la nuit me submerge d'une vague d'horizons aux aubes violettes . le vent a cessé dans ma tête maintenant l'espoir d'un ruisseau

elle avait pour lui des attentions d'odalisque -elle était son cristal elle était son katana tranchant la mélancolie rebrousser chemin 233


Paroles Suivantes

parfum de café dans l’euphorie des oiseaux — mon corps se déplie

Ah que n'ai-je de bons yeux pour bien écouter le chant de la lune

journal déplié — d’une main gauchie je lisse mon cœur chiffonné

de la vallée monte la rumeur des gens qui vivent -ici c'est silence

se laisser bercer d’une vague somnolence après la nuit brève

ma nuit j'abandonne conduisez-moi sur la rive des rêves secrets

le jeune soleil me regarde dans les yeux clair et charitable

pensée agaçante entre le sommeil et moi -le vol d'un moustique

tinte sur le ciel bondit rebondit mon cœur luit dans ses étoiles

papillon de nuit vrombissant dans mon oreille -la joie d'un poème

les ombres s’affirment — elles entament un dialogue avec le béton

le rêve s'échappe -les ailes d'un papillon glissées sous la porte

dans ses mains l’immensité de sa peau devient minuscule

quel étrange chat il m'éveille pour que je le pose sur le lavabo

mon cœur glisse et tombe dans la débâcle du sang — de glace il se fige

le gouffre des nuits s’entrouvre un instant et prend sa part de lumière

les chênes le bercent leur respiration le pose sur un chant d’oiseau

la colline gronde — des chenilles métalliques écorcent son cuir

fin de journée lente même l’ardeur des moustiques semble s’assoupir

l’heure est dépassée mais je remonte le temps d’un café-loriot

les vieilles cigales ont commencé à mourir — leur été fut bien court

soleil et cigales se brouillent dans mon cerveau — l’ombre et le silence

soleil indolent je marche sur le chemin cris des feuilles sèches

atteindre la cible émouvante dans la nuit j’y arriverai

histoire d’amour — dans le ciel les hirondelles posent les virgules

elle aimait ma voix moi je n’aimais que sa voix — 234


Paroles Suivantes

un malentendu

fraicheur du matin -l'été dans le cœur des pierres trépigne impatient

tant triste Tristan nautonier désespéré sur la mer brumeuse

un premier baiser posé au bord de mes lèvres -le premier café

partir revenir le pendule raie le sable jusqu'au verre froid

le parfum des fleurs du vieux troène ridé grise les oiseaux

amis sans visage amis au cœur mélodieux amis que le vent a rassemblés à ma porte j’ose dire je vous aime

lentement je lisse mes ailes — cigale je vais chanter mon été

il cherche fiévreux dans les épaisses fougères un indice infime qui lui donnerait la clé de son cœur de dur ébène le néant traverse le torii dressé du vide — une mer sans dieux

une marée coule depuis mes viandes liquides vers ma bouche d’algue

ma nuit me surprend à dérober à mes rêves leurs chandeliers d'or

fraicheur du matin -l'été dans le cœur des pierres trépigne impatient

la nuit m'emporte entre des sommeils sans force -un souffle les tue

un premier baiser posé au bord de mes lèvres -le premier café

couvert de nuit lourde du bout des yeux je m'endors sans faire le point

le parfum des fleurs du vieux troène ridé grise les oiseaux

emportez-moi dans vos bras de lave tendre je baisse les armes

lentement je lisse mes ailes — cigale je vais chanter mon été

sur le lac épais ricochent de lourds galets -des mots sans leur peau

une marée coule depuis mes viandes liquides vers ma bouche d’algue

une seule fleur dans ce jardin d'herbes sèches garde sa fraîcheur

tombent sur mon dos les hallebardes du ciel — aiguës et ardentes

tombent sur mon dos les hallebardes du ciel — aiguës et ardentes

les chaines brisées 235


Paroles Suivantes

mais le cœur pulvérisé — les ombres s’enchainent

seul importe le café sur lequel je souffle

dessus le jasmin un songe épand son parfum — ce n’est qu’une abeille

c’était le temps où on fumait des gaulois’ bleues — un temps de partage —— maintenant on reste assis sur des souvenirs jaunis

le mai est passé la pierre inerte est restée sur le cœur glacé mois de doute mois des mais est passé le temps d’aimer

pour ne plus l’entendre je suis entré avec lui dans l’arbre effeuillé

la lune impassible ne bouge pas même un cil quand un avion passe

les ombres répondent de signes imperceptibles au marc de café

collines de l'est éclaboussées d'un soleil crépusculaire

le léger rayon d’un soleil en pleine forme me la communique

sur le couvre-lit raide de trop de lavages j'attends le sommeil

midi sur la peau — mais une étrange chaleur vient me rafraichir

la nuit me secoue de son rire d'euménide -moi l'arbre sans feuilles

pas un autre son que la scie des cigales — c’est vraiment sciant

j'aurais tant donné pour effacer les années qui rayent ma peau

au bout de la langue un mot leste prend le large — ce mot me moleste

la nuit s'accommode ne pouvant les effacer -taches de sommeil

la peau en fusion — une façon comme une autre de briser la glace

la fenêtre ouverte sur d'implacables rumeurs -la fin de la nuit

rêve de pénombre — l’intransigeance du soir bannit la lumière

dans la chambre sombre l'illumination d'un sourire rêvé

plaisir émérite — faire comme si jeudi tombait un dimanche

mon téléphone vibre de joie…

parfum du silence la soir — seules des cigales font des heures sup’

je ne pense à rien —

lune confidente garde toi mes secrets 236


Paroles Suivantes

pas même à la nuit

le mur rajeunit — le lierre a tout envahi, même les fenêtres

un léger halo de lumière grise et perle masque mes pensées

mon vieux banc fidèle — il connaît tous mes secrets et surtout mon cul

ma nuit viens à moi dévoile-moi les mystères des lieux intérieurs

le soleil dans l’œil — il me montre les glaçons l’eau et le pastis

entier il s'exhibe mais qui s'en soucie vraiment -la clé s'est rouillée

son vol ample et lent vigoureux parfois m’emporte au-dessus des houles

sur le quai désert un falot oscille et grince -odeur de pourri

mille kilomètres — dans l’étendue la durée soyons face à face

entrailles meurtries par un crabe incandescent mort l'envie du large ———— c'est tout juste si sa nuit lui permet de ricaner

ô ma fleur de sang je te sais et je te sens salissant mon sel

la nuit s'est glissée au fond des vieilles armoires -vieux parfum lavande

ma peau se résigne à n’être plus que ma peau — pur déchirement

lire quelques mots sourire parfois aimer -twitter au café

la lune sauvage cachée dans l'ombre des pins -la lune complice

jouir de cet air avant l’érosion sableuse des cigales

sous les dalles de la plage du sable de chantier de la ferraille et un rêve

écorce des pins les cigales y engravent leurs cris d’agonie

contre le sommeil résister -- les affronter les yeux grand ouverts

dernière gorgée — le café soudain pétille de lèvres rêvées

elle a transformé mes rêves en cauchemars -ou bien est-ce moi qui rêvait trop haut trop grand avec des bouchons de cire

l’ombre me suivait — j’ai pris le soleil marche j’en n’ai plus besoin

rêver de passer les déserts dans les bagages d'une femme-fontaine

alcôve de branches — rêver blotti sous les chênes que la vie bégaie 237


Paroles Suivantes

le sommeil décroche perte de vitesse il plonge -un sommeil sans elle

un crapaud sans force meugle dans la nuit lointaine -l'amour rend aveugle

soleil déjà haut -il y a longtemps que l'aube a perdu la sienne

un souffle léger un souvenir égaré traverse ma peau

de tous ses parfums le vieux troène me parle de l'amour des fleurs

sous l'auvent la nuit je vous ai rejointe d'un sommeil sauvage

fleurs des lauriers-roses impassibles dans la haie -couleur du poison

escale de nuit -le fuyard s'étire et bâille et reprend son train

rempli de doute le café devient amer et la tasse tremble

escale de nuit -le dormeur bâille et s'étire puis reprend son rêve

deux loriot traversent prestement d’un arbre à l’autre — éclats d’éclairs verts pas de vent un pas le chemin et la poussière retombe

un nouvel arrêt -cette traversée est pleine de doux imprévus un soleil peu amène traîne une lumière grise -laisse de nuages

la journée se passe encombrée de somnolences — des hauts et des bas

pot de basilic arrosé près du vieux buis -odeurs doigts mêlés

la chaleur intense fait vibrer les oliviers — mon cerveau grésille

vapeur de café -un parfum qu'on imagine effacer la nuit

le sommeil me fuit je lui cours après parfois — il m’attend et rit

je claque un moustique -subtile trainée de sang tout près de mon cœur

me vient sur les lèvres un étrange goût de sel — je ne pleure pas

entre les sourires mon cœur s’en va bondissant d’un café à l’autre

le soir un alcool qui grise les murs déjà sombres qui me grise

tu aimais l’un et les autres t’ont meurtries mêle un goût de miel

chaude nuit d'été -elle aiguise sur ma peau ses ongles de fée

refaire surface après la plongée démon cerveau en surchauffe 238


Paroles Suivantes

le ciel s’ennuage — l’épaisseur du soir promet l’orage d’été

je crispe les doigts mais je sais elle s’échappe la fontaine vive

la nuit enveloppe le silence des cigales brusque et inquiétant

ne plus m’endormir pour ne plus rêver de vous — enfin lâchez prise

entre mes bras - rien dans mes mains dans mes yeux – rien cachée sur la page

ta main dans la mienne chaque doigt une couleur au revers du monde

la nuit est fébrile -la pluie a pris du retard pour l'herbe trop sèche

pudique il cache un sourire émerveillé de sa main tremblante

sous l'auvent -- les rides creusées dans mon corps pesant espèrent l'orage

par dessus l’orage tire d’aile et fendant l’air mon oiseau nuage

le cri des cigales pèse sur l'aube brûlante -copeaux de mon cœur

sur sa peau elle a l’odeur de mes paysages — du sel et des rêves

promesse de pluie foulée aux pieds déchirée dans la nuit torride

dans le ciel ce soir les nues glissent deux par deux dans le même rêve

vous êtes si loin -mon rêve immense pourtant ne peut vous rejoindre

c’est un ciel satin un ciel qui au bout des doigts craque une étincelle

un goût de goudron froid en travers de la gorge -haleine de souffre

dans leur nuit tangible ils avancent côte à côte les doigts emmêlés

quelques gouttes se diluent dans le café — la pluie lente et sale

la lune a roulé entre les branches du pin sans toucher les quilles

soudain le soleil transperce le coton sale — un éclat de rire

notre amour est plus grand que tous les grands domaines où l'amour est roi oú tu seras reine

maître loriot sur le fil se balance et compte les gouttes de pluie

merci mes amis que la nuit tisse vos rêves dans du fil d'Ariane

entre les collines ours entravé il grommelle — l’orage espéré

halte sur une île au milieu de la nuit -une île habitée 239


Paroles Suivantes

peine à trancher l'épaisseur de la nuit aveugle

le fauteuil humide — mais le café me console de mon cul mouillé

enfin le silence que narguent insolemment plusieurs acouphènes

rosée sublimée dans la colère solaire — les murs s’embrasent

souvent je rêvasse sous les étoiles en guise d'attrape sommeil

un éclair ardent — dans ma tête les cigales se sont affolées

- "peux pas dormir - "compte les boutons dit cal'çon à la chemise

boule de bowling mon cœur roule l’escalier meurtrissant les marches

-"terre capitaine -"non petit mousse pas elle "continue ton rêve

petit’ fille en pleurs je n’ai que des mains ridées pour te faire rire

de la nuit je garde les étoiles sur la peau -le jour se lève

lueurs dans les yeux — un cri retenu au bord des lèvres mordues

la nuit arc-en-ciel éclipsée par le matin -insomnie fébrile

sur ma peau humide le soir ose une caresse — les yeux dans le vague

le café m’aime bien — il m’a fait la courte échelle pour sortir du lit

les yeux ensablés il tète une bière tiède mâche un hot-dog rance chaque jour il rembobine longue route soixant’ six

j’aime bien le café — le bout de ma langue avide fait rire sa mousse

frapper à la porte les yeux remplis d’espérance le cœur palpitant

oxyde de plomb — gouache étalée trop épaisse le ciel est trop blanc

un instant mon cœur pendu au bout de son fil a cessé de battre

la cervelle en vrac je l’étale sur la table et pioche dedans

sur la dune danse danse les elfes de sel aux yeux de lunaires

géant vert les marches de ton palais d’émeraude grouillent de fourmis

son jupon de gaze ourlé sous ses seins la lune coquette

la lune interroge les augures de la nuit -un hibou hésite

un bruit de moteur 240


Paroles Suivantes

balaie la poussière

elle aurait bien voulu te griffer la joue d’un trait-étoile filante

lenteur de la nuit -vent venu du fond des ères chaud des vieilles laves

de l'autre côté loin du calme des jours fades le ciel est tempête

gonflé de tropique un vieux vent chargé de sable raye ma mémoire

où êtes vous vous dont le cœur me ressemble où bruissez vous

les yeux refermés sur un monde de contraintes je paie de mots lents

voici l'heure éteinte l'heure où des cendres inertes reviennent les ombres

de mes doigts rongés sur ton mur j'écris je t'aime en lettres de sang

les premiers oiseaux -leurs chants tendus sur l'aurore soulèvent le monde

de la vallée grise montent le bruit de chenilles rongeant le bitume

troisième café toujours aussi somnolent — mon cœur bringuebale

le premier café goûté au chant des cigales -Qui se lève tôt ?

contre ce malaise j’essaierais bien la tisane mais les tilleuls mentent

soleil sur ma peau — cette peau vieille et ridée mais qui rêve encore

lourde somnolence — ma tête une fleur fanée ployant sur sa tige

sur le ciel limpide une démangeaison l'ombre de mon attente

journée sans ombre et la chaleur ne sais plus où donner de la tête

aux feuilles conquises le vent décrit le désert — brûlure et nuit froide

mes épaules nues — les moustiq’ ont décidé d’y pique-niquer

écrasée sans force la terre n’a plus de cri — langue calcinée

du vécu qui gratte qui démange qui déborde — un vécu pur soi

une nuit cuisante chevauche un vent sans merci -Insomnie de sable

une soirée lisse — déjà glisse sous la porte de la nuit pilée

le ventilateur halète dans la mélasse collée sur les murs

par la vitre ouverte un grand courant d’amitié

j'allume une lampe 241


Paroles Suivantes

fanal sous l'auvent -la lune boude ce soir.

sur les collines recrues — pénombres sournoises

palpitants encore mon doux minou fait offrande de deux oisillons

soixant'sept hivers rien n'a changé dans ma poche -toujours poing serré

ma nuit qui s'enroule dans les effluves du vent me claque la porte

l'encre de la nuit se craquelle dans mon cœur -trop sèche trop sec

ma nuit et le vent jouent tant et si bien ensemble que je laisse faire-part

votre peau madame pouvez-vous me la prêter -je me sens si nu.

le café et moi -le mistral n'arrête pas de nous interrompre

je voudrais courir vers vous délesté surtout du regard des autres

silence la page désespérément futile — et mon cœur se gerce

vos mains sur mes seins -oh ressentez-vous ma Dame ce frémissement

midi se faufile — il franchit les heures fraiches en jouant des coudes

le cours de mes rêves Interrompu par mon chat -manque de croquettes

l’oisillon est mort bercé dans son pot de fleurs sur les crocs du chat

le vent est tombé –– une seule mouche nage au fond de la tasse

Un jour le néant fit la rencontre du vide. Et alors quoi ? Rien !

pas de chant d’oiseau ce matin – veillée funèbre pour l’oisillon mort

au bout du sourire un rien seulement le zeste du signe infini

encor les cigales pour un oui ou pour un mort qui jouent de la scie

je voudrais passer mon cœur au mixer et puis en filtrer la haine

Sentez vous ma Dame le rêve de vos parfums perler de mes pores ?

bande de Moebius — l’infini a trop fumé et se tord de rire

à l’aune des amies vous pesez bien plus encore qu’un clair papillon

bulle de désir — affolées les mains troublées ont perdu la tête

odeur de fumée de pins calcinés le ciel embrasé s'essouffle

un drap noir se glisse

je baisse les yeux 242


Paroles Suivantes

votre regard me subjugue je lève les yeux la nuit abyssale m'ouvre grandes ses ténèbres sans poisson pilote

j’ai volé une âme pure pour mon âme noire puzzle en désordre — je tente d’un cerveau lent de soigner ma tête

il monte l'érèbe croyant chevaucher la nuit -désordre et chaos

j'ai mis cinquante ans à grandir -- j'ai dix-sept ans et mon corps se meurt

savez-vous ma Dame mes grains de sable s'affolent de vous voir marcher

écrire des haïkus je n'ai pas besoin de ça pour vivre mais j'ai besoin de ça pour vivre

je suis une plage que la mer lisse et soumet Indéfiniment

je n'ai pas besoin de spectateur à ma mort -je me suffirai

je rêve ma Dame de rivières de sourires pendues à mon cou

une nuit sauvage s'est emparé de mes tempes -un feu d'artifice

horizon en feu -toutes les îles du monde brûlent dans la nuit le matin soupire au-dessus de l'horizon -aube frémissante

ô ma Dame mon âme de vos dagues de vos lames coupez tous les ponts chos dans la nuit mon cœur se prolonge et frappe les cordes du vide

la nuit granuleuse ouverte et close à la fois crisse sur mes dents

rumeurs indistinctes des routes et de l'asphalte -la vallée bougonne

têtue une abeille vole au-dessus de ma tasse -un café pour deux

parfois par surprise la nuit me prend à la gorge et veut m'embrasser

un éclair de jade -un loriot change d'abri à toute vitesse

contournant les ombres le rêve de vous s'installe en pleine lumière

déboire un matin ce n’est pas l’amer à boire — une absence noire

la vallée rugit de mille fauves lâchés -lundi matin

l’une contre l’autre je frotte mes mains rugueuses — seulement le vide

souvent je reste l’esprit vacant de besoin — ma plume est épaisse

bandit malandrin

glisse sur mon cœur 243


Paroles Suivantes

un copeau du vieil hiver vite évaporé

vos yeux madame ils me clouent ils me dépècent rangez vos couteaux

ô ma Dame, ma lame, tranchons d’un éclat de rire l’écume des jours

levé tard malade le café a mauvais goût — un autre pour comparer

j'étais prof hélas -mais de travail manuel ! ce qui change tout

mon chat me comprend — il me regarde, il s’étire bâille et se rendort

hagard égaré il te regarde oublier que tu fus ses yeux

vos yeux dans mes yeux ma Dame et enfin je peux voir le bout du monde

il ne dira pas que l'émotion le perfore de son regard bleu que déjà enseveli son cœur tendu tambourine

après les collines le ciel ondule et se fend — j’essuie mes lunettes je comprends mon chat — je le regarde je bâille et il se rendort

sur la page vide il essaie un regard morne – eh non, les mots filent

papillon citron au bord blanc d’une tulipe — Perrier rondelle

un chaton peureux — la nuit m’a pris dans sa gueule de bave gluante

journée somnolente trainer l’ombre de son ombre — infinie lenteur

ma Dame ma lame tranchez ces liens d’un coup bref sauvez moi les mains

une nuit épaisse a plaqué sur mon visage un masque de cire

je sens votre souffle qui lancine sur mon cou — que le temps s’arrête !

secouer la nuit pour qu’enfin soient réunis la glace et le feu

contre le cynisme le vieil âge ne peut rien si ce n’est sourire

bientôt réunis soleil neuf et lune éteinte témoins de Vénus

des pas dans la nuit le gravier crisse complice — je vous attendais

breuvage sournois — le premier café appelle un second café

le silence éphémère du cri votre main la mienne votre rêve dans mon rêve — chasse l’amertume

ciel de peine ce matin les nuages 244


Paroles Suivantes

transpirent

la nuit jalouse conserve les rumeurs pour elle

l’été se fatigue il lance ses javelots avec négligence

viens plus près approche sur mon front ose ton front mêlons nos humeurs

ma Dame venez accourez de votre dague trancher dans les doutes

aube martelée de nuages sans promesse -le jour prend conscience

sa peau a le goût du sel et d’iode du large la tiédeur d’un nid

trois gouttes d’eau sale sur la poussière des toits — tout espoir tari

elle a les saveurs aigres-douces de son fruit que mes doigt patinent

sa peau te crie viens coule-toi fonds-toi en moi explore mes pores

soir sans habit noir — la paresse cette ogresse me lèche la joue

dans ses yeux tu pêches des huîtres de perles brunes aux filins d’argent

l’air devient épais — la colline au loin ressemble à du pain grillé

entre ses doigts coule une eau de baptême impie qu’avide tu gouttes

tu voudrais lui dire la couleur de ta tendresse de tes yeux limpides

vos lèvres s’accouplent vous parlez la même langue de cristal brillant

elle aura pour toi du tangage et des tempêtes — tu crieras de vertige

au creux de ton ventre de lourds papillons s’affolent et te plient le cœur

elle aura pour toi des mouvements de maitresse un nid de ses bras

le ciel vous protège du regard jaloux des foules — vous vous en moquez

des chemins de sel s’échapperont de vos pores la nuit sera mauve

dans le flux des mots tu t’abreuves des paroles qu’elle te chuchote

assis sur son lit très lentement il referme le livre sans page

il ne devrait pas faire saigner la blessure en rouvrant le livre où chaque page souligne au fer vos éloignements

une nuit sans heurt une nuit lisse et polie une nuit de rêves

ton cœur est une étoile qui vient de naître

silence bruissant 245


Paroles Suivantes

dans le ciel l’étoile filante revient et revient sans cesse

le sommeil m’agrippe broie mes yeux me met à terre ! et fond dans mon crâne

une brusque averse — le jardin s’est défendu avec ses odeurs

rêvant de moisson j’avais le cœur en jachère — j’ai piqué sa faux

parfois ça fait mal — j’ai des cailloux dans le cœur pour ne pas me perdre

devant son amant Briséis tombe à genoux et brise un talon

une chaleur moite gluante chaude étouffante se colle à ma peau

le soir est venu nonchalamment et sans bruit — un chat dans la nuit

auréole sale déjà sèche et poussiéreuse — pluie parcimonieuse

Silence ! La nuit poursuit un rêve de braises jusqu’au point du jour

la nuit est muette — même le vent qui l’agite n’entends pas un bruit

elle ouvre son sac — sur le sol elle piétine de vieux souvenirs pendant ce temps-là il entend le vent qui hurle — vieux buvard froissé

la nuit s'enveloppe dans son parfum d'eau limpide-tintent les étoiles

sur un banc ils serrent leurs mains et un pont surgit vers l’imaginable

sous l'auvent la lampe dresse l'ombre à se défendre contre le béton

le premier café est loin maintenant — son goût cependant perdure

à bout de souffle sublime et pathétique Jean Seeberg trébuche et mange du sable

au bord des nuages un vieux rêve illuminé un chant de silence

où êtes vous donc ma Dame au regard de fée -vos lames me fendent

sur la table humide la tasse fumante glisse — café en danger

la vieille cigale qui se tourne vers la mer n'attend que la mort

sur le banc de bois je pose un livre fermé et ma lassitude

une pluie d’été pleine d’odeurs à la fois fortes et subtiles

sur le banc sans forme il panse son coeur meurtri et à ses beaux yeux 246


Paroles Suivantes

jusqu’à son absence

chaussée je serai pour la sortir de l'ornière -route sans virage

soleil dans les yeux les directions s’abolissent — seul le pont demeure

un pont arc-en-ciel bien au delà des nausées et des meurtrissures

au-dessus du vide seul un rêve te soutient — jouir du vertige

funambules nous traverserons ce pont de nos bras emmêlés sans la crainte des distractions es opprobres et des huées

son rêve a des ailes cousues de fils solides et de peau vibrantes car le temps figé sur un éternel été se rit des saisons

plantée dans le sable du bois flotté une épave rongée par le sel elle dresse à marée basse l’énigme des souvenirs

au bord de la sente un rêve sans bras ni jambes — seulement deux larmes

le joug et les clous, la colline et la croix lourde — il n’oubliera pas

à la nuit tombante les cigales fatiguées déposent les armes

la nuit colle aux yeux de ce corps que je supporte et qui me débecte

et la nuit tombée l’angoisse et son souffle rauque prennent position

un moment je lâche prise d’avec le réel — le rêve me noie

ils serrent ma gorge les imbéciles béats aux piètres soucis

le front appuyé sur le frigidaire j’inhale le café qui passe

dans la nuit silence loin très loin un chien aboie — j'entends mon cœur battre

déjà le soleil grésille sur les carreaux — mes pensées en feu

la nuit m'enveloppe elle me prend dans ses orbes excite mes rêves

sur mon front des gouttes de sueurs salées subtiles effacent mes ans

donner un baiser à la tasse encor brûlante — journée qui commence

parfum de lavande une mèche de cheveux — tiroir qu’on referme

la vapeur serpente dans l’air léger jusqu’à mes narines conquises

des gouttes de nuit se glissent le long des plaintes

plus fine que claire 247


Paroles Suivantes

ma reine ne laisserai mordre un crabe hideux

les mains dans les braises elle prend ton cœur les cicatrices l’effraient le prend tout de même

mistral en colère vent à décoiffer un chauve les arbres gémissent

la pierre de lune qui palpite dans mon cœur brille de vos yeux

J’aime fort Alisse plus qu’Alice ou A d’ailles. Dans ses bras je glisse

aiguilles de pin — l’ombre que je traine au sol peut se recoiffer

le mistral renverse les pots de fleurs et me met la tête à l’envers

à chaque seconde le peu d’avenir qui reste remis en question

mon chat est rentré ébouriffé en tonnant fort contre le vent

sur le vieux banc de bois j’écoute la lumière qui traverse les chênes

sous leurs oripeaux malmenés et déchirés les vieux chênes geignent

bouquet de secondes enveloppé d’espérance abreuvé de larmes

elle ne sais pas qu’elle vient de s’essuyer les pieds sur mon cœur tu ne diras rien tu resteras immobile et elle rira

une nuit opaque malmenée par un mistral hurlant de fureur

mistral en colère il hurle et geint dans ma tête — il me glace l’âme

soufflant la lanterne le mistral éteint même une étoile filante

un tambour tendu se déchaîne dans mon crâne — le soleil m’effraie

la jeune nuit geint sous les caresses d'un vent aux ronrons de chat

je poursuis les ombres pour acquérir leur sagesse — rester transparent

amie à ma table le soleil ne survient pas forcément du Sud

manque de sommeil — ce n’est pas la mer à boire l’air à respirer

un haïku c'est dire je t'aime à un courant d'air le dernier café pris sous la jupe des pins -saveur des cigales

troisième café les deux premiers sans effet envie de vomir

sous l'auvent de tuiles des myriades de lucioles dans les yeux amis

tu lui tends ton cœur brûlant d’angoisse et de fièvre — 248


Paroles Suivantes

brûler les étapes s'élancer à perdre haleine tout perdre à l'instant les rêves et l'infini ne font guère bon ménage

à nouveau cette heure aux couleurs sans espérance qui me mord le cœur une nuit sans fin revient vague de sel noir glacer tous les soirs

l'orage est passé -au soleil les tuiles tintent de mille couleurs

un regard de fauve -la nuit me frappe en plein cœur d'une dague sombre

le vent dans la sauge -son parfum virevoltant entre mes lavandes

perdue un étoile attend de la nuit un signe qui ne viendra pas

le soleil joue du xylophone à la cime des pins

mille fleurs rubis tissés dans l'ourlet secret du vent de l'espoir

les aigreurs d'égout font d'haineuses flatulences -salir pour salir

nuit intemporelle -la lumière des villes s'y casse les dents

le chant des cigales -des hachures de crayons sur le front des arbres

quand l'enfant se rend compte qu'il a déjà mille ans

dans le vent léger les branches de pins soudoient l'ombre et la lumière

la nuit s'achève les routes reprennent leur souffle

Café crêm' café lame café sang noie les larmes un café slam

on replie les rêves dans le grand livre des songes -la nuit s'évapore

le chant des cigales -des hachures de crayons sur le tronc des arbres

derrière les toits le ciel pâlit sans angoisse -l'aube en papillote

"mon alouette "j'ai brisé tous les miroirs "contemple-toi

mourir un peu plus chaque matin un peu plus et croire en demain

fleurs rouges fleurs blanches tout au bout de leurs élans les œillets hésitent

j'ai vu se rosir l'aube d'été frémissante -le vent à mes pieds

langoureux le soir sous son masque bienveillant tremble de terreur

loin la vieille route soigne son bitume gras d'un long chuintement 249


Paroles Suivantes

dans mon ventre cave les papillons s'interrogent du sens de la vie

les jours de lumière remémorés et le rêve te suis en plein jour

j'ai fermé la porte -dans la nuit les ombres glissent sur un Styx sans fin

le ciel s’est voilé dans l’hésitation du vent — odeur de fumée

a moving star flies from the beginning of words to the end of love

le rideau de perles a giflé si fort la vitre — vent incandescent

ses feuilles d'argent vibrent au soleil on n'a jamais fait d'armes en bois d'olivier

les ombres fuient jaunes sur le grain du béton mauve — un regard perplexe

un peu de tu beaucoup de vous nos peaux polyglottent

d’une rive à l’autre enjambant le clair ruisseau pont pour les oiseaux

le ciel devient noir -les étoiles rient pourtant des mauvais présages

foutu sirocco — la peau râpée par un sable qui n’existe pas

sur le quai leurs mains qui se tendent esquissent un blanc sourire

j'ai fermé la porte elles ne peuvent entrer les goules hurlantes

dans le ciel éteint des routes qui se séparent déroutes croisées

la nuit est jalouse de notre folle lumière -la nuit je l'emmerde

mille tours de roues mille blessures

comprenne qui voudra comprenne qui pourra le rite est sans faille

d’une langue avide je découvre un grain de riz aux saveurs magiques

hors du virtuel l'actuel s'est délecté d'un présent qui chante

entendu sur le Vieux-Port : Peuchère, à Marseille même les eunuques baisent comme des dieux ! Constat à l'huile d'olive et à l'ail

chaude est la nuit -avant que je ne m'envole le vent me pourlèche

triste incertitude que le vent du nord rassure d’une haleine fraîche

foutu sirocco — la peau râpée par un sable qui n’existe pas

terrasse en colère — l’air plus chaud que le café me brûle la gorge

ils n'ont pas osé passer la porte béante de mes souvenirs 250


Paroles Suivantes

spectres de mes nuits restez à la porte inertes -ne me rêvez pas

croire au jours heureux — laisser le ciment du rêve prendre consistance

j'ai claqué la porte et mon ventre vide seul souffre leurs morsures

un soleil son rire illumine mon visage — heureux je la suis

elle était si belle -elle seule était capable d'un vol plein d'élan

les yeux pleins de fête elle danse sur les tables sans briser un verre

au fond de ses yeux j'ai égaré mon regard -je m'y perd encore

dans la nuit de l'août une dernière cigale un dernier concert

de ses cris de louve elle arrachait de ma peau des désirs d'envol

de la terre aride monte en volutes nerveuses le chant du soleil

la case départ devenue case prison -j'en mords les barreaux.

flottant sur le ciel comme un ange évaporé trainée du retour

je me sens si vieux alors que mon cœur plissé n'a jamais vieilli

elle avait les yeux les plus liquides du monde -leurs mains orphelines

elle est mon amie cette amie et cette peau qui ressent le monde

le vent m’a promis demain j’aurai dix sept ans — le vent fanfaronne

ne déborde pas haïku reste dans tes rails retiens bien tes larmes

un ciel toujours jaune — toutes les ombres diluées dans l’enfer solaire

la nuit sans étoiles comme la vie sans repère -aveugle souffrance

le sommeil me gagne ô ma nuit incandescente ouvre moi la porte

fraicheur du matin -elle m'a lavé des sueurs de la nuit rugueuse

j'arpente ses creux de mes doigts reconnaissants je ressens ses courbes

pause de la nuit enjambe la méridienne broyée de chaleur

sans tabou ni gêne je parcours ses paysages curieux de sa peau

deviner l'enfoui éclipsé par la surface -geyser de lumière

venez revenez 251


Paroles Suivantes

vers la source de nos langues partageons nos sels

l'herbe a besoin d'eau le ciel a besoin d'étoiles j'ai besoin de vous

délier délire le grand livre où se chuchotent de moites secrets

la nuit chaude encore joue sur ma peau résignée un air incolore

la nuit me secoue elle chasse mon sommeil vous fait de la place

où vous cachez vous orbe incandescente et fière ma blanche hyperbole

ah vos yeux ma Dame plonger dans leur océan est le vrai baptême

j'ai tendu les doigts la peau la langue et l'espoir sur l'arc de vos rêves

les cerveaux brûlés de vagues ultra violettes — violence solaire

oh tant que ma bouche s'épuise à mordre vos mots vous manquez ma Dame

la larme a séché à peine sortie de l’œil — du sel sur les cils

le premier café dans la confusion des sens — amère douceur

la chaleur me gifle pénètre dans mes poumons et blanchit mon sang

un parfum s’y mêle un parfum de souvenirs et de fleurs d’iris

elle joue à chat et sourit des battements dans mon cœur soumis

un matin torride arrache la peau des arbres — j’ai les os à nu

la tendresse allège le poids lugubre des ans par tant de sourires

brûlées de lumière les ombres crient de douleur la gorge tranchée

ô ma dague ma Dame libérez vous de vos liens les miens qu'importe

mes yeux vous décrivent et dans l’air brûlant mes mains soulignent vos traits

elle danse seule sur la musique lugubre de l'ennui sans fond

souffle de dragon — du ciel tombent des boulets d’uranium liquide

elle sait pourtant que de mes doigts sans violence je récrit l'histoire

ciel de feu liquide — l’oiseau tombe entre les arbres les ailes brûlées

ma belle féline ma chair pour vos crocs sera votre quotidien

le ciel brûle encore ici même les sourires sont carbonisés 252


Paroles Suivantes

rêver d’un soleil patinant sur la banquise — tongs et bermuda

deux heures du mat' -avec ses trente degrés rit le thermomètre

pattes de velours — sa main était dans la mienne et nous ronronnions

elle part bientôt et toi tu vas rester là le cœur en écharde

ma main sur sa joue du bout des doigts un désir à peine effleuré

il viendra tigresse plonger dans votre calice sa langue assoiffée

un bal dans la nuit -l'orchestre très inspiré massacre sweet dreams

éveillé il rêve de vos ravins des collines aux senteurs de lys

une nuit torride -l'air à couper au couteau s'alourdit de larmes

j'ai ouvert la porte -le peuple des papillons vrombit de chaleur

ma Dame féline je prendrai soin de ton coeur comme un grain de rire

une aube sans joie a déchiré les nuages -mon cœur en dé route

toute lame tue-la votre dague insoumise caresse mes soifs

matin sans entrain je tourne, tourne sans cesse un café sans sucre

j'irai jusqu'au bout des mondes infranchissables pour lécher vos larmes

l’air s’est rafraichit aussi vite que mon cœur palpite d’absence

l'orchestre s'est tu -un saxo mélancolique pleure summertime

il fait gris et lourd — dans ma tête les bagages pèsent de tristesse

petit grain de riz qui se love entre mes doigts ma langue est habile

le soleil timide jette des regards troublés dans les flaques d’eau

quelques gouttes tapent sur les tuiles surchauffées -avant-goût sans goût

trois gouttes à peine — le verger bénit la pluie de senteurs sauvages

tonnerres lointains ils contournent la vallée sans blesser personne

prends ma main ma Dame laisse-moi t’accompagner dans ton fier jardin

la valise est prête -serrés dedans s'entrechoquent des envols sublimes

du bout de mes doigts je préserverai pour vous vos saveurs de mures 253


Paroles Suivantes

de ma vieille peau de clown la nuit nostalgique

Dame aux yeux d’étoiles ton regard m’a adopté — je baise tes cils

ma douleur s'apaise quand je sens frôler vos lèvres au sourire humide

le prix de l’espoir en parler devient souffrance — oublier le prix mais ne pas y renoncer quitte à le voler alors

prisonniers des heures nous manquons ma douce Dame à nos doigts qui tremblent

de ses yeux point une cascade d’eau pâle jusque dans mes yeux

je souris ma Dame et survis aussi à l'ombre de nos souvenances

toujours pas de signe l’impatience me consume — mon ciel s’est couvert

la nuit s'effiloche les rêves mentent encore nous sommes trop loin

le vent m’a porté des nouvelles rassurantes — presque rassurantes

café sous l’attente — la vapeur brûle mes yeux coin de l’œil humide

je suis un brigand un vieux voleur de chevaux qui nie les clôtures

matinée frisson — d’agréables souvenirs bloqués dans ma gorge

la jeune tigresse qui court la plaine avec moi se rit de mes rides

le soleil profite d’un thermomètre clément — ne provoquons pas

elle se sens libre — pourtant elle porte au cou la marque d’un maitre

l’été redevient ce qu’il devrait toujours être l’ombre du printemps

par des mots sorciers elle a cousu nos deux cœurs et tranché sa laisse

mon cœur s’est vrillé une vieille serpillière transpirant des larmes

je suis un brigand un vieux voleur de tigresse je ris dans ma tête

une robe bleue couleur de mon cœur blessé couleur de vos larmes

ma Dame soucieuse là votre joue sur mon cœur entendez l’écho

serre moi ma Dame contre ton cœur apeuré que je le rassure

je rejoins la nuit pour tournoyer avec elle d’improbables danses

pour vos yeux ma Dame j’aurais les égards graciles du sel pour le sable

elle tourne autour

mon pas devient lourd 254


Paroles Suivantes

je perds ma légèreté sans votre regard

plein de cris et de murmures crève mes tympans

ô ma douce dague restez plantée dans mon cœur restez-y paisible

ma Dame vous êtes si profondément ancrée ma chair vous surligne

voleur de chevaux il ne résistera pas au vol des baisers

il garde de vous parfum au bout de ses doigts désir sur sa peau

au premier regard la tigresse lui arrache un cœur enflammé

la lune s'apprête au bord du ciel pommelé-elle me fait signe

et d’un coup de langue le laissant fumant encore elle l’éteignit

lenteur d'escargot de mes doigts sans impatience ma langue docile

elle le calma et le caressa si bien qu’il se mit à battre

la nuit me dévore un ogre cruel et sombre lamelle mon cœur

lune confidente écoute mes os grincer d’un rictus de spectre

vos parfums le hantent ils labourent dans ses nuits d'un soc de désir

j’ai eu beau chercher je suis le seul mort vivant que j’ai rencontré

mais la nuit m'apaise et je trouve sur ses grèves le désir de durer

ma Dame ma lame vos yeux sont des armes pour plier le monde

sable au sel tentant mes mains pétrissent ta chair heureuse du geste

ma dague ma Dame ne me laissez pas trembler face à mes démons

café arrosé d’une pluie soudaine et brève — café allongé

je fermerai la porte aucun ne pourra entrer — nous ferons l’amour

le soleil parfois s’amuse aux ombres chinoises avec les nuages

le monde a pris vie quand le rêve s’est blotti serré dans mes bras

l’ombre sur le mur soudain prend toute la place — le soleil se cache

un train dans la nuit chancelle entre les traverses les rails des ornières

une nuit prodigue d’un rêve sans épaisseur — mais quelle musique !

un profond silence

une averse encore — 255


Paroles Suivantes

la terrasse surchauffée n’en garde pas trace

au cœur de mes rêves un vent s'est levé -il a parcouru la lune et sa chevelure

un navire errant crachant ses rivets malades comme des carries

je me souviens bien d'un tout petit grain de riz au goût de noisette

un très vieux navire le bastingage et les ponts rongés par la rouille

un téton meurtri d'une colère jalouse -enfance boiteuse

contre toute attente il flotte encore bien droit même par gros temps

les cheveux des arbres décoiffés par un vent leste -la nuit qui respire

d’un instinct féroce entre Charybde et Scylla il n’hésite pas

au fond la vallée a calmé ses autoroutes-minuit de silence je ferme le livre la journée s'achève encore par un vide immense

il est de son corps mon navire ma mémoire il est mon squelette de la quille au mat ensemble nous pourrissons d’un ardent naufrage

j'ouvre grand mes bras pour vous accueillir amis que n'effraie ma porte

ma Dame ô ma Dame rapprochez vous de vous-même tranchez dans le temps

un café tardif — le soleil déjà haut mais la magie demeure

un air me revient un air qu’elle nous chantait quand nous nous aimions

douces caresses vos caresses souvenues — papillons complotent

c’était un fado extrait des pores de l’âme par un cœur en miette

toujours la même ombre qui s’accroche à la même heure au fanal rouillé

elle chantait j’écoutais tandis que mes mains suivaient sa mesure

l’été est en ordre aube fraîche et journée chaude — mon cœur apaisé

je laissais sa peau vibrante et sa gorge rauque défier la nuit

lumière changeante — vieilles collines brûlées prenant des tons fauves

or je l’ai quittée— mais toujours quelques iris restent sur ma tombe

je laisse glisser le soleil sur mon visage — caresse et ivresse

je ne devrais pas laisser la nuit pénétrer 256


Paroles Suivantes

la journée patine négocie mal la soirée et enfin s’ensable

frissons ce matin temps d’automne en plein été — un café m’apaise

les mains dans les poches je suis le maître des heures quand je pense à toi

le ciel devient blanc — une feuille de zinc couvre les tuiles noircies

voila les mésanges les deux coches qui pépient défroissent mon cœur

des ombres sans corps parues même sans lumière glissent sur les murs

l’envol des mésanges un cri dans le ciel relie les amants lointains

sous un ciel d’automne deux mésanges sont venues offrir un sourire

mésanges – mésanges par quatre mains et quatre ailes le monde s’allège

jour mélancolique même la vallée s’enclot d’un profond silence

une soirée calme seule la brise murmure son amour des chênes

j’ai laissé tiédir sans même y poser les lèvres la dernière tasse

la nuit d’août m’appelle de son silence apaisant — je me laisse faire

une pie hésite et finalement se pose sans plus s’inquiéter

à travers les branches la lune illumine et rit aux mésanges bleues

je garde de vous les souvenirs les plus clairs les plus lumineux

pas d'étoile encore pour adoucir le regard triste de la lune

souvenirs de soie dans des draps de coton fluide nos peau de velours

dans la nuit profonde ton sur ton l'ombre des arbres effraie le ciel noir

de vos lèvres libres sur ma vieille peau ridée mes doigts se souviennent

papillon de nuit de tes ailes si fragiles tu nargues le jour

souviens-toi dit-il alors elle se souvient qu’ils ne sont plus qu’un

les mésanges dorment douillettes et protégées par les papillons

le geai s’est posé en face sur l’olivier — nous parlons mésanges

le vent dans la nuit me murmure des chansons de souvenirs bleus

ta mésange amour se hâte de taquiner ma mésange aimée 257


Paroles Suivantes

j’arrose la haie pendant que mon chat regarde l’or des arcs-en-ciel

et je m'abandonne du fond de mon âme seule à penser à elle

trébuchant j’effraie un volée de moineaux — mon chat ébahi

mille étoiles dans ses yeux scintillent tous mes sens sont en éveil

pour la rencontrer il ira au bout du monde et même au-delà

l’odeur du café arrachée comme une peau — tellement de vent

elle l’attendra au pays du bout du monde sûre qu’il viendra

le ciel est si bleu qu’on semble entendre les vagues caresser le sable

mésanges perchées sur le fil du téléphone appeler son cœur

des ombres se battent pour une place au soleil — le vent pour témoin

le soir me surprend il me prend par l’épaule et me dit ”il est l’heure“

il mugit il siffle ce vieux mistral ancestral entre mes oreilles

temps de replier les ailes de mon cœur — et d’un dernier verre

le long de ses rives poussent des brassées d’iris — je rêve son fleuve

lune au rendez-vous elle roule entre les branches elle me sourit

ils ne sont plus seuls — leurs empreintes sur le sable ne s’effacent pas

loin sur les collines le ciel un terrain de jeu pour jeunes étoiles

heure méridienne midi heure médiatrice heure où tout se lie

l'arbre frappe dans la lune il la prend pour un ballon un petit vent aigre entraine des feuilles sèches crissant de douleur

air de paradis — elle est coiffé d’un chapeau au goût de sourire courent les nuages pourchassés par le mistral vers un ciel plus sage

la lune a pâli quand elle a vu son sourire refléter le mien

la mort l’insidieuse ne laisse que peu de temps pour choisir sa vie

un train en partance vers un incertain rivage -au loin les rails geignent

ce désir de sel 258


Paroles Suivantes

qui s’enroule sur la langue — mon gosier trébuche

le ciel s'ennuage -la lune s'est diluée le long de vos rives

nous sommes si loin — mains en manque de peau et peau de demain

elle me regarde je la regarde elle rit nous ce n'est que nous

un profil de pierre ses diamants sont si tranchants -mon âme s'apeure

un café tardif — parfum plus fort que le vent vapeur lumineuse

j’avais l’âme en peine et le cœur meurtri d’attente longue et incertaine sont venues les tourterelles deux oiseaux du paradis

au fond de la tasse le visage de l’absente — un parfum d’iris

la journée s’achève il me semble que je porte tout le poids du monde

les ombres se calment et sur le béton rugueux elles se caressent plus jamais personne ne s’assiéra sur mon banc — place réservée

le vent sans faiblir gifle griffe les collines et ride mon cœur

un air de fado mélancolie et espoir trotte dans ma tête

à travers la vitre j’ai vu la nuit s’approcher toutes dents dehors

un éclair bleuté — une mésange traverse d’un arbre à l’autre

sombre et si brillant un éclat de nuit sauvage nargue la lumière

des éclairs bleutés mille pensées pulvérisent distance et frontières

la lune se cabre monte sur ses grands chevaux et me désarçonne

comme des nuages ils sont deux en plein soleil à rêver de ciel

le vent me secoue -je me souviens d'un patio d’aromes charnus

soleil au plus haut mon cœur bat entre vos seins — le ciel est lavande

mon âme ma dague mon rêve devenu chair mon espoir tangible

profondeur du ciel aux senteurs ultramarines — je vole vers vous

je suis sans défense -votre peau nue me menace des pires caresses

j’ai compté les heures — hélas combien de cailloux restent dans ma poche

rabbit on the moon jump and run around the sky black clouds are your weed 259


Paroles Suivantes

un seul verre mes fantômes et ils sont partis

plus de vent les feuilles ont cessé de frissonner — la paix revenue

ranger la vaisselle une recherche inutile café refroidi

le soir s’est posé à la lisère des sons tout près du silence

mais la cafetière est bonne et compatissante mon cœur réchauffé

par l’imposte ouverte l’avant-garde de la nuit roule sur mon cœur

les mésanges passent au dessus des pages vides — désert refleuri

glissant sous la porte comme une lettre anonyme mes souvenirs froids

dimanche tranquille — les tondeuses sont muettes chez tous mes voisins

dans la nuit des chants se glissent entre les troncs — curieux fantômes

dans leur nid douillet les mésanges endormies près de votre cœur

la nuit pour complice tous deux nous tirons les cartes aux étoiles naïves

dans le ciel flottant à tire d’ailes deux coches — le gris passe au bleu

vivons cette vie d'un amour intarissable source de nos joies

le ciel s’enhardit plus fort plus bleu plus profond que la mer prédite

le train couvre un temps les chants lointains de la fête -pour qui part ce train

le ciel s’enhardit plus fort plus bleu plus profond que la mer prédite

la lune s'attarde sous la colline elle rêve d'un passé de cendre

soleil caressant il scintille dans les plumes azur des mésanges

quand elle saura la profondeur de l'abîme je ne crierai pas

un simple frisson quand votre pensée capture mon âme soumise

j'ai pour vous ma Dame des égards de femme aimante -je lisse vos grains

tu es arrimé -le courant vous emporte et rien ne vous sépare

mes mains de vieil homme sur votre peau de gazelle -Est-ce un sacrilège

les branches balancent doucement au vent d'été -je rêve vos mains

ils ont pris un verre

je sens sous mes doigts 260


Paroles Suivantes

les grains de vos tremblements l'élan de vos cris

jusqu’à la lie, boire ! dans la nuit épaisse la vallée monte au gosier comme une nausée

le jardin m’a suivi je rentre avec un odeur de foin transpirant

musique trop forte -le vent léger la transporte jusqu'à ma fatigue

douceur du silence surtout ne vous taisez pas deux doigts sur vos lèvres

il vous aime dague comme l'amour peut creuser des rivières d'or

Babel on s’en fiche — nous avons découvert seuls la langue commune

la musique va vient et s'estompe au loin -le vent a tourné

le soir vient plus vite — on dirait qu’il apprécie l’odeur de ma cave

l'horizon rougit la lune se lève et bâille dans le ciel sans fin

masqués ils avancent les fantômes vers mon cœur qu’ils vont piétiner

cette nuit m'échappe la vallée s'est révoltée -le sommeil s'évade

j’ai fermé la porte que le diable les balaie mes spectres fanés

vapeur dans les cils parfum amer sur mes lèvres— café de survie

un soir de velours s’est accoudé au comptoir — un Nikka sans glace !

les pies se disputent un vieux bout de pain moisi — engueulade aux caisses

puis le soir s’assoie en face de moi et entre deux nuages sombres

soleil sur la peau — je rêve d’autres caresses dans un autre lieu

d’une poche il sort un vieux jeu de cartes grasses et il distribue il ne me tend qu’une carte et c’est la dame de pique

des bruits de journées courent entre les collines — ronde quotidienne

je sors je trébuche l’air frais me saute au visage mais je me rattrape

les arbres se frôlent ils se caressent l’un l’autre — le vent est complice

un feu d’artifice camouflé dans les collines déchire la nuit

une feuille tombe — deux arbres écartelés échangent un mot

un bal populaire dans un village alentour —

on ne pourra pas 261


Paroles Suivantes

changer la face du monde alors aimons-nous

les mésanges restent grises et mon âme aussi

bien avant les vôtres les miennes seront closes -vos doigts sur mes yeux

un train mord ses rails au loin ils crient la douleur de l'acier froissé

mésanges gardiennes de mes plus beaux souvenirs raturez le ciel

attablés ensemble nous nous enivrons de nuit nous brisons nos verres

présence éphémère -quelques instants dérobés à l'éternité

voilà ils s'en vont pleins de nuit dans leur repaire je vide mon verre sur l'autre versant la nuit est d'une douceur de chat qu'on caresse

pensée fugitive qui met mon cœur à l’envers — buée dans les yeux

tout autour de moi j'imagine la présence d'amis bienveillants

il était un temps de ciel bleu et de rivières — reviendra ce temps

sur la plage leurs doigts se sont emmêlés de caresses souvenues

du bout de ses doigts il allume tes étoiles votre ciel s’embrase

café sauvetage — enfin je peux me remettre de la nuit sauvage

un petit enfant d’un coup de crayon magique dessine l’amour

devant moi la tasse fumante qui m’ensorcelle — mes lèvres soumises

moment du départ ils se sont tenus la main entre deux sanglots

je vous vois sourire vous tournez dans mes pensées — l’abeille et la fleur

je ne sais pas où déposer mon désarroi non, je le garde !

silence profond seul le murmure de l’air — routes suspendues

surtout ne rien dire remettre le cœur en route et fermer les yeux

le soleil caresse ma peau de vieillard ridé — la cime des arbres…

le cœur en déroute je fuis devant la nuit sombre elle me rattrape

aucun vent ne souffle — la poussière effacera la trace des heures

bruits de la vallée ivre de routes amères -cœur au bord des lèvres

au-dessus de l’eau

le ciel est trop noir 262


Paroles Suivantes

deux libellules s’embrassent en vol stationnaire

devenez mon avenir ma route éternelle

un chien qui aboie au loin dans la somnolence de l’après-midi

le frelon mangé les deux tarentes repues boudent les lucioles

depuis l'ombre douce il pose un regard ému dans tes yeux aimants

le train est passé un voyage halluciné dans la nuit aride

journée sans secousse c’est à peine si la tasse en a frissonné

je vois vos sourires d'enfance fracassée votre âme limpide

déchiffrer les signes à cela je suis expert — toujours vers la gauche

au loin les étoiles refusent toute lumière -la ville est féroce

mésanges figées dans l’absence de couleur pas un seul coup d’aile

j'ai aimé ces instants où ensemble nous étions si près des étoiles

parfois je me moque des alarmes dont moi-même attise les braises

tant que je pourrai encore ramper sans geindre je vous aimerai

le soir s’est assis près de la fenêtre ouverte — on attend la nuit

un café zélé apaise ma gorge sèche et ma tête en vrac

je vois les mésanges vite elles volent vers moi — mon cœur les accueille

patient je patiente parmi les mêmes fantômes aux mines figées

ma Dame ô ma Dame dans un ciel d’éternité lancez vos oiseaux

toujours immobile planté comme un bananier sous sa serre tiède

un frelon hagard brûle autour du lampadaire -une âme égarée

de vos yeux profonds je vous vois me regarder dans le fond des yeux

la tarente avide le guette avec convoitise -frelon pour dessert

fraicheur du matin — elle a vite laissé place aux claques solaires

m'inondant de nuit je médite sous l'auvent -racines amères

café du Brésil — je ne peux pas résister au chant des sirènes

ô ma si belle âme

mon ventre s’éveille 263


Paroles Suivantes

de mille fourmillements — pensées papillons

dans la lueur de la lampe l'olivier s'embrase

ma Dame ma dague je voudrais vous retrouver sur un pont de liane

debout sur ses rails le train sans destination fouette ses wagons

au bord du vertige jusqu’à ce que nos cœurs volent nous balancerions

dans la glaise épaisse il ira chercher pour vous des cristaux d'amour

sous un ciel de gaze les minutes de coton effrangent le jour

fontaine des vents y nait un souffle si clair qu'on sait de cristal

désir nostalgique de retrouver ses racines — désir de retour

vous vous ressemblez de nuances si subtiles qui est il où est elle

vide et vague à l’âme — les larmes posent leur sel sur la peau du temps

ma dame ô mon âme servez-vous de votre dague ne vous trompez pas

jeu de dupes peu à peu le soir grignote les pieds du jour

l'ordre surviendra -avant d'y laisser le souffle ne regrettez rien

dans la douceur moite d’un ciel tendu de nuages la journée s’essouffle

souffler sur la tasse s’imprégner de son arôme louange au café

dans un grand silence mon esprit s’est séparé de toute pensée

de menus travaux m’éloignent de l’essentiel le second café

mes mains tremblent elles ne savent où trouver le Graal de sa peau

douceur matinale — les crissements de la nuit deviennent murmures

vous montez ensemble des papillons pleins les yeux la même licorne

lumière timide — le soleil pourtant ardent se tient sur ses gardes

il ne pleuvra pas trop loin gronde le tonnerre dans le cœur du ciel

des coups de marteau au loin suis-je donc le seul à chérir silence

la nuit fait silence je peux donc me consacrer à mes acouphènes

que faire de mes mains tous les livres que j’ouvre me parlent de vous

un fanal d'argent

assis sur la rive 264


Paroles Suivantes

à la surface du temps quelques feuilles mortes

vous fendez mon vague à l’âme ma Dame ma dague

vous êtes venue de loin boire à la fontaine ma maison la vôtre

le soir s’est assis à ma table après manger — nous faisons silence

dans mes mains offertes il n’y a rien que le désir de milles caresses

autour de la lampe ailes éblouies broyées papillon de nuit

le col est passé je descends vers la vallée enivré de ciel

le liquide ambré tourne encore dans mon verre — ivresse illusoire

le jardin prostré dans la chaleur implacable rêve d’eau féconde

buée sur l’écran les mots que j’écris adore le café brûlant

leurs feuilles penaudes à bout de sève les arbres ont baissé les bras

le soleil se lève — aujourd’hui il a fait la grasse matinée

la nuit sans étoile -et toi le doux dingue amant d'un astre invisible

quel soulagement j’avais cru l’avoir perdue ma dague d’argent

elle me murmure l'histoire de nos caresses -la vallée s'enflamme

tremblements sonores — mon cœur retrouve son calme le torrent son lit

il est loin de tout son plein carquois l'indiffère seul' compte une flèche

galaxies noyées dans l’écume des marées — mon étoile en larmes

où va-t-il ce train exigeant envers ses rails où me conduit-t-il

où vont les étoiles après avoir disparues au fond des ténèbres

il vous sent si proche et cependant si lointaine -il en perd ses nords

un an qu’est-ce un an trois-cent-soixante-cinq nuits au fond de l’abyme

êtes-vous paisible dans votre vie de coton-sa laine l'irrite

le soir se rapproche il me prend par les épaules et je le console

mon âme éloignée je voudrais qu’un lien d’or vif nous couse çà jamais

mon cœur est tombé dans les escaliers — il est tout contusionné

recrue de fatigue

nuit aveugle 265


Paroles Suivantes

commence son long périple d'un pas assuré

le vent se déchaîne sur les portes de la nuit -il vomit son fiel

la vallée enrouée tousse de vapeurs funestes retours de vacances

le ciel effrayé d'un coup de vent a éteint toutes les étoiles

une seule étoile dans le linceul noir du ciel elle l'illumine

entre deux rafales un calme inquiétant se pose -la gifle promise

aucune lumière que la lampe dans mon dos -je suis contre-jour

un coup de rasoir a coupé toutes les phrases au milieu du mot

elle a pris tous mes pores je respire sa peau son haleine

je suis seul la nuit me tient compagnie mais reste muette

rêver d'un bateau où nous serions tous deux le mat et la voile

rire il faut sourire et le sable qui s'écoule rit du sablier

vous les conduiriez aux confins des galaxies -larmes d'une étoile

un frelon fourbu s'obstine contre la lampe-Sisyphe jubile

la cuisine embaume de l’odeur de chaude ivresse — un café qui passe

la nuit me pardonne la lumière qui en moi chasse les ténèbres

soleil capricieux dans un ciel qui fait la moue — un été boudeur

fuient les feuilles mortes sur la terrasse grinçante -le vent lui ricane

matinée languide tous les sons sont assourdis dans l’ouate du temps

la tarente dort -obstinément le frelon heurte la lumière

le bal des tondeuses vient enfin de prendre fin — midi apéro

nuit ma douce nuit allons tous les deux ensemble au bord de l'oubli

à rebrousse poil le vent surprend mon chapeau — air de liberté

odeur de fumée — inquiet le premier café retient son arôme les feuilles frémissent — le vent semble si léger pourquoi s’inquiéter

bien seul sur le banc pas même une feuille morte pour causer du temps

pendue au gibet 266


Paroles Suivantes

l’ombre crue de la lanterne sur le mur de pierre

tout l’été l’ami loriot pendant le café

le soleil s’étire en longs filaments brunâtres — le ciel tousse encore

mémoire infidèle des délires du passé il ne reste rien

le vent s’est calmé mais ils bourdonnent toujours les gros frelons jaunes

je quitte la table les poches vidées des mises économisées

tête pleine encore des soubresauts de la nuit j’huile mes paupières

volutes suaves qu’un parfum incomparable arrime à mon âme

le monde est en ordre il n’y a guère que moi qui perds ma substance

fleur de laurier-rose virginale ou empourprée — un poison mortel

un baptême tardif une oblation au verger — corvée d’arrosage

une branche craque sous mon pas mal assuré de vieux promeneur je surprends le cœur meurtri d’un couple de tourterelles

Il la faut bénite cette eau que le ciel refuse les racines seules pourront savourer l’essence et le goût suave

j’ai rangé mon sabre au râtelier où l’on pend les vieux souvenirs je n’ai pas pu me défendre de votre regard ardent

la vallée fulmine -la chenille gigantesque d'asphalte brûlant

au soleil je sens sur le mur une ombre froide qui surprend la mienne

j'ai posé mon âme au beau milieu du chemin sur lequel tu marches

au bord de midi dans la torpeur de l’été mes yeux s’ensommeillent

papillon de nuit pour sauver tes obsessions j'éteins la lumière

les sons écrasés par les ombres de midi — pesanteur du temps

échange en six lettres l’amitié s’invite à table — café mots croisés

au bord du ruisseau son cœur bat si fort pour lui que tremblent ses mains le plectre du shamisen garde une goutte de sang

au bord de la crique nu dans le miroir de l’eau il se fond au sable

je fais des progrès — je n’ai plus pensé à vous pendant cinq secondes

après s’être tu 267


Paroles Suivantes

j'ai pour vous ma Dame une tendresse infinie une vraie lumière

soirée d'arrosage corvée qui fait convoiter des années de pluie

la nuit porte encore les stigmates du soleil -des millions d'étoiles

elle reste assise elle l’attend immobile sur l’ultime borne — prête à lever son visage elle a affûté sa faux

il manque des mots pour décrire le désir dans les dictionnaires

pour votre coiffure j’ai cueilli cent fleurs des champs je vous les ai tendues vous avez chéri la rose qui m’a déchiré le cœur

midi est passé je bois un dernier café avant le pastis des coups de marteaux mon cher voisin pourrait bien taper sur sa tête

là sans équilibre sur le bord de la fenêtre le soir tergiverse

le soleil voilé compatit à la lourdeur de mon front dolent

le désert sans limite filtre du soleil l’ardeur fiévreuse qui consume mes pensées — étendus sur le sable mes os en comptent les grains

dans le ciel les nues ont entrepris un concours de déguisement la réalité — l’autre versant de l’espoir c’est le désespoir

la hauteur infinie des monts sous la coupe du soleil tranche dans mes pensées enchainé au rocher mes bras usent la pierre

je l’ai prise la main dans le sang mon cœur au bout du couteau

une soirée d'encre en aurais-je jamais assez de rayer mes nuits

Elle disait Je ne sais plus si je t’aime Je reste pour nous désunis Pour le temps qui reste à souffrir Je reste pour celui qui s'éteint

dans la nuit profonde je cherche un chemin aveugle aux bruissements d'ailes un frisson ce soir -les nuits d'été s'effilochent septembre aux aguets

tout autour de vous des hippocampes aux ailes bleues de transparence pareraient vos chevelures d’algues diaphanes et brunes

moi qui n'ai connu que la peur de l'inconnu je connais la joie

la lampe s’endort 268


Paroles Suivantes

dans le silence du soir — écho d’un soupir

tout doux autour de la tasse le premier café

plume silencieuse le soir s’est posé sans heurt entre mes épaules

un soleil falot paresse sur les murs sales — le café est tiède

la nuit me précède elle m’attend sous l’auvent pour battre les cartes

assis à la table j’ai repoussé les crayons pour bercer mon âme

j'ai des idées grises grises pas vraiment foncées comme un éléphant

quand les yeux s’embuent que le cœur bat la chamade — heure du Xanax

la nuit distribue -la chance vient de sourire j'ai quatre as de pique

après-midi lente — compter les gouttes de sueurs et les essuyer

la tête hors de l'eau mes pieds battent follement -je respire encore

j’ai cassé un pot — la plante qui y vivait exige plus grand

amis qui savez que twitter est un remède signez l'ordonnance

je ferme mes yeux et tout doucement le livre se referme aussi

là ça bringuebale j'ai des boulons plein la tête mon corps se déglingue

le soir a cédé la nuit a forcé la porte — je ressors les verres

je me rattrape je m'enchaine à la montagne j'attends les vautours puis la nuit s'approche pose une main sur mon front et dit "t'es vivant"

Elle disait Tu m'as tout donné le calme la richesse de ta force contre mes errements Ce n'est rien contre le regard de celui qui s'éteint

et puisque je vis je sépare de la cendre des éclats de rire

sur la table il pose une bouteille de scotch dont la nuit s’empare

promeneur qui cueille dans les prés en fin d'été bouquet pour l'aimée n'arrache pas la colchique une fleur empoisonnée

elle boit un verre sur sa langue le scotch a des sueurs froides la nuit fait silence pour que prenne conscience des cris intérieurs

je l’ai fait tourné 269


Paroles Suivantes

Notre amour a le goût du potage que je ne goûterai jamais avec celui qui s'éteint

la nuit me contourne elle veut prendre à revers toutes mes impasses tous deux nous souffrons d'une route dont l'asphalte nous coupe la gorge

le soir vide un verre la nuit l’imite et sourit jusqu’au dernier verre — à la fin désespéré le soir roule sous la table

un fantôme approche -je lui arrache les dents d'un coup de ma Dague

nuit ! à ta santé ! berce-moi de cauchemars dont je sors vainqueur

seuls quelques éclats sont tombés dans la piscine un ciel d'obsidienne

mille nuits sans rêve -je déroule ma cervelle le cœur s'en repaît

vapeur de lumière l’arôme autour du soleil café ambitieux

vous ne l'aimez plus madame et votre ironie sent déjà l'oubli

vieil homme prodigue j’ai laissé passer les heures sans en garder une

un parfum d'iris a embrasé ma mémoire mauve un iris mauve — la source du souvenir a disparu dans le sable

le ciel se défend comme il peut contre les nues — sol d’ombre et lumière septembre bientôt et toujours pas une goutte sur le sol aride

la nuit silencieuse revient sur ces pas la nuit d'esprits égarés

sur mon cuir brûlé le soleil a buriné des ravins de sel

cent nuits mille bruits de pas dans cette prison où le rêve meurt

l’été dans ma tête grésille comme des braises saturées de graisse

il n'aura été qu'une petite virgule dans votre poème

les ombres ont fui le soleil était trop âpre et les murs rugueux

je voudrais plonger dans une mer de café et la boire entière

assis à la table le soir et la nuit attendent pour prendre verre

la tasse a tinté pendant que je tournais un café déjà tiède

Elle disait Je reste car tu me veux belle pour tes amis

la tondeuse au loin 270


Paroles Suivantes

poursuit son labeur stérile dans l’herbe brulée

il lance son âme à l'assaut des galaxies dévorant leurs flammes

”de plus en plus haute la montagne“ dit l’insecte à ses vieilles pattes je prends ma besace en retire quelques mots — j’écris un haïku

son corps se consume dans un tourbillon d'étoiles -reste un cœur de braise il retombe enfin en plein cœur de la nuit noire -suffocant encore

mon front embrasé sous un ciel âprement pâle — été ruisselant

elle est bien paisible et elle le réconforte dans le vrai silence

je sens ton regard briser mon âme étoilée me crever les yeux

la nuit me rassure elle me caresse et panse mon cœur fissuré il s'en est fallu de peu pour que je ne rate le désir de vivre

Elle disait Nous resterons ensemble dans nos solitudes Nous ne regarderons plus la même direction J'ai choisi celle de celui qui s'éteint

Je suis un fleuve lent Qu'aucun galet ne ride Un lit doux et aimant Pour ma Dame intrépide Même les jours je mens De mes mots insipides Sans la perdre vraiment D'amour son cœur se vide

le soir nonchalant se penche sur mon oreille il me dit bonsoir

vallée silencieuse -de ses méandres remontent l'envie de sourire

la nuit vient enfin— d’un repli dissimulé elle sort trois dés

remontant le cours j'atteins la source première de la souvenance

je ressors la piste elle projette les dés et tombent trois six

ciel de lait bouillant— des nuages bruns collés sur la casserole

je les prends je souffle et quatre-cent-vingt et un roulent sur les dés

du nez au menton une goutte de sueur frôle le vertige

nous nous regardons — hélas nous ne jouons pas la même partie

il fait lourd — c’est à peine si le vent soulève une feuille morte 271


Paroles Suivantes

l’été à rebrousse temps retour des cigales

à l’ombre des chênes sur le banc je me balance — je n’ai pas moins chaud

une feuille morte c’est l’âme d’un papillon que le vent console

chaude nuit d’été — sous l’auvent elle me prend sous son aille noire

le soir parfois amertume et vague à l’âme tournent dans mon verre

un hennissement -dans la nuit sombre un cheval fait des cauchemars

un trait a rayé la surface de la lune — mouche sur la lampe

l'olivier a soif -feuilles recroquevillées il ne brille plus

sur la vitre sale le vieux papillon de nuit s’inquiète de l’aube

souffrir à quoi bon vos émois seront ma Dame toujours des sourires — ils viendront toutes les nuits bercer mon cœur affligé

Elle disait Vois-tu le corps a des exigences l'âme les siennes si divergentes des tiennes Lui comblent les miennes lui celui qui s'éteint

nuit de goudron chaud -elle court dans la vallée comme du sang lourd

ce sont des insectes de monstrueuses cigales mes cris intérieurs

la vallée s’agite elle s’ébroue et vrombit l’un lundi matin

pas de vent de bruit ce son ce sont seulement les feuilles craintives

par le sang donné que vienne vite un café après l’infirmière !

mon miroir renvoie le visage énigmatique d'un agonisant

le sommeil me manque — j’aimerai qu’il me rattrape même en plein jour

mon jardin secret n'est un secret pour personne — pour moi il le reste

ouvrant ses volets elle laisse deviner la douceur d’un sein — le mien serait aussi doux si vous y posiez vos lèvres

une nuit fébrile enserre les haies dans ses poings — tous les nids frissonnent

le ventilateur est soudain pris de vertige — il vomit ses pâles

je frotte ma joue la barbe naissante crisse — demain n'est pas loin

septembre bientôt

patiente elle attend 272


Paroles Suivantes

que je lui donne un baiser — tasse de café

quand on écrit un poème on ne simule jamais vraiment on brode les fils de l'aube sur la trame du crépuscule

vacarme brûlant — tout près une tronçonneuse creuse mon écorce

du vent dans les drisses j’ai traversé l’océan — café sur le port

le silence enfin et le soleil moins cruel — je rejoins mon banc

du cœur du poème j’irai où le vent le porte — vers ton cœur peut-être

je rince ma tasse — ah si je pouvais de même là rincer mon cœur — que d’une eau claire et riante il en renaisse écarlate

brusque somnolence — sur la table un crayon roule au bord de l’abîme je vous regardais vous dénouiez vos cheveux au parfum grisant — la cascade au bout du fleuve n’a qu’une odeur d’algue humide

tremblant je relis les quelques mots du message — toujours pas de pluie sur la nappe sale avec la main je rassemble des miettes de pain — au rebord de la fenêtre je les pose avec mon cœur

un nid sur le sol — hélas il ne contient plus qu’un bec desséché sur votre chemin j'ai ramassé un mouchoir à vos initiales — hélas y était aussi roulé le parfum d'une autre

ma nuit consolante sers moi ton nectar subtil au goût de ténèbres des sons étouffés parviennent de la vallée -les cris de la terre

des papillons roux — nuage de feuilles sèches fuyant le souffleur

un train sans dessein claque sur ses rails mal joints -la nuit le dévore

autour de la lampe rode un papillon de nuit — voler de lumière

la lune est passée sur des rives insouciantes -âme illuminée

la nuit s’est assise près de moi sur la margelle me cachant mon ombre

une pluie d'étoiles a labouré mes paupières -tu vois je t'espère

une nuit torride -au ciel même les étoiles rêvent de banquise

Il disait

silence obsédant -273


Paroles Suivantes

les feuilles ne bruissent plus seul mon cœur tressaille

le verger défait mon verre déborde — comme le temps il ne fait que troubler l’espace

tombé quelques gouttes -le temps se moque de nous d'une ironie sèche

l’air semble figé — je creuse dans mon sommeil comme on broie la gangue

on accepte tout de celle ou celui qu'on aime surtout ses erreurs

parfois une averse pas de quoi mouiller un chat — herbe à l’agonie

quand vous reviendrez la table sera dressée -tinteront nos rires

coudes sur la table il ne fait ni frais ni tiède — soirée en coton

Il disait laisse brûler ton âme laisse ton cœur saigner sur la feuille encore blanche le poème est déjà écrit

mon esprit opaque repousse la lourde porte tu es en avance croasse le vautour chauve mais bienvenue en enfer

il voudrait garder de vous cette image claire rire dans vos yeux toujours espéré quand le matin nous englue le premier café

il disait d’un claquement de langue il faut allumer les étoiles elle plongeront alors dans le poème et l’embraseront

tuiles maculées souillures sur les voitures ah oui ! il a plu !

sur la route abrupte et comme tout un chacun je roule un rocher

ah votre visage éclipsé par l’éventail pâle et insondable — que diriez-vous si soudain la lune se dérobait

nuit privée de sens elle résonne et soumet mes frémissements

au fond de ma tasse la carte d’un continent aux rives certaines

silence profond -la nuit attentive accueille l'écho de mon cœur

le dernier café c’est le dernier argument pour ne rien faire

des ombres chinoises -la lune à travers les branches joue avec mes joues

elle s’en retourne piètre aumône de la pluie —

pour un court sommeil je vais te quitter ma nuit reste-moi fidèle

l'ombre de notre amour traverse le miroir

274


Paroles Suivantes

des gifles du vent qui frappe de mauvais élèves

mes yeux s’embuent de l’émotion primitive du premier café

tristesse des mots qui ne savent obéir qu'aux doigts de leur mètre

vous les oubliez mais maintes fois dans nos draps ces mots vous les dîtes — ce mouchoir que je chiffonne a les parfums d’un été

brusquement me prend un désir d'ardeur intense -je ne l'écris pas Il disait La nuit brasse les mots soucie-toi de la nuit qui mêle mots et poème Le poème même dans les ténèbres le poème est solaire

Il disait frappe le tambour du ciel une nuit d’orage alors des ténèbres l’éclair jaillira et sous l’arbre foudroyé déjà un poème brille

de ma tasse à l’âme une fine vapeur guide l’esprit du café

il a fait semblant de pleuvoir — maintenant le mistral se lève

partant de ma tête le mistral prend possession de mon corps entier

du jardin je rentre la tête remplie de vent — l’âme empoussiérée

dans ma tête creuse les pensées jouent au flipper — le tilt n’est pas loin

je range ma veste — au clou j’accroche mon cœur pour le défroisser

trois mots seulement illuminent ma journée plus que le soleil

sous la porte passe un vent coulis insidieux mais j’ai des chaussettes

l’écorce du pin retient encore la mue d’une cigale morte

le vent s’est calmé — il laisse place à la nuit pour limer ma peau

ce mistral de fou faudrait qu’il se calme un peu — j’ai un pastis à prendre

Il disait un tourbillon de mots ne fait pas un poème Il faut les pulvériser avant de les lancer comme des couteaux volants percer les cœurs

virgule de vapeur — un nuage éphémère surligne le ciel surface du vent — la nue tente de survivre à l'oubli du rêve

le vent tord la nuit -une serpillière sèche claque sur ma peau

d’une marche lente

les arbres se plaignent 275


Paroles Suivantes

je vais au bout jardin je m’assoie je pense

jouir de la nuit voila tout ce qu'il me reste et c'est déjà bien

surtout ne rien faire laisser le vent se charger d'assembler les feuilles

la vapeur se vrille elle caresse mes joues — baiser du café

je laisse venir le soir sans lui résister — même le vent cède

je pose ma tasse — sur la table une série d’anneaux olympiques

dans la main je compte les brins que j’ai à semer — il m’en reste peu

ombres immobiles — battues par le vent d’hier enfin elles soufflent

la nuit est venue pour mettre le vent au pas — ah la bienveillante !

sur la table au soleil les verres s’impatientent — on attend les glaçons

la main de la nuit à mis les pieds dans le plat pour que je trébuche

encore un nid vide — assis là sous le lilas mon chat se recueille

dernières cartouches ce soir le vent furieux a capitulé

le temps s’est couvert — rien que de l’eau du tuyau et pas d’arc-en ciel

au loin cependant les feuilles tremblent encore -le vent n'est pas mort qu'ils sont loin ces mois de connivence enchantée -un mois seulement

le jour se termine dans le silence des feuilles — soirée de satin presque transparent un tout petit papillon mange la lumière

le vase ébréché que tu as lâché des mains sa fleur s'est fanée

des grésillements dans mon oreille en colère — moustique hors saison

je ne veux rien pas même le moindre geste -mais l'oubli ! l'oubli !

à ce rendez-vous la nuit s'est déshabillée -pas même un frisson

c'est un vent de nuit un tout petit vent sournois qui secoue mes branches

une clope un verre alors j'écris un haïku et je recommence

le train est passé -il n'a laissé sur ses rails que cendre d'acier

de ce train absurde 276


Paroles Suivantes

je voudrais en sauter vite -et pourtant je marche

sous l'auvent la lune en tant que mère attentive surveille mon verre

mille bruissements chuchotent dans les ténèbres -des elfes peut-être

pie chie sur le chat chat se lâche sur la pie et tout lâche et chie

dans les oliviers les fruits sont déjà formés -quand les cueillerai-je ?

un ballon d'enfant qu'aucun fil ne retient plus embrasse la lune

de l'ombre des arbres la lune émerge insolente -des nuits à attendre

vous dire je t'aime la plus douce des caresses que vos yeux entendent

d'un pas de vieillard je promène lourdement mon désir d'enfance

la vallée s'embruisse de lointains moteurs grognons -retours de vacances

lenteur et douceur des volutes langoureuses — bienveillant café

la lune au zénith -la marée dans ma cervelle au point culminant

la journée commence dans les bruits et le désordre — rentrée de septembre

les arbres ombreux redessinent leurs contours -pensées vagabondes

la mélancolie déjà sème le désordre aux cœurs de septembre

brûlant il m'attend dans sa peau de porcelaine -arôme et vigueur

un rêve revient — d’un sourire il me propose d’attiser mon cœur

d’un regard brumeux j’accompagne ses volutes — un goût de matin

d’un soupir je range mes vêtements de coton— un an à attendre

entre ombre et soleil dans ce matin de septembre mon fauteuil hésite

fin de matinée — sur le pin au bout du ciel le même nuage

ma tête est à l’ombre et tout mon corps au soleil — sous mon vieux chapeau

l’odeur d’herbe sèche me précède quand je rentre — mon chat se détourne

vous souvenez-vous de celle qui m’approcha de mots tentateurs ——— votre visage était blême comme le mien maintenant

tout en haut du cèdre remplie d’orgueil une pie fiente sur le monde

mon esprit s’apaise 277


Paroles Suivantes

et mon cœur reprend sa place — le film est fini

comme un arc tendu vers les étoiles mes yeux dévorés de nuit

sur la gouttière un papillon multicolore rêve de la pluie

le premier café un envoutement que le quotidien jamais ne corrompt

sortie de la sieste — il connait vraiment son texte souffleur du voisin

le volet fendu — les rayons d’un soleil bleu jouent avec mes cils une fente étroite dans la porte du grenier — secrets oubliés

c'était bien la peine la salle d'attente est pleine — prendre un rendez-vous... ! ce bruit dans ma tête c’est le bruit rouge des vagues qui saignent le sable

en haut du jardin je m’assoie sous un vieux chêne— le regard baissé

décence du vent qui sait s’incliner devant une feuille morte

après les collines je sais que la mer respire — je bois son haleine

le silence du soir posé sur la solitude du vieux mur de pierre

à travers la haie les jardins du voisinage — toujours pas de pluie

sur la sol aride des effluves de lavande consolent la terre

au creux de mes tripes je porte une pierre polie par l’angoisse

au-dessus des arbres majestueusement nue la lune s’élève

feuilles de la haie tombées sur la terre aride — mon cœur aussi craque

parée de nuages la lune s'empare du ciel -nuit magique

la soirée avance d’une démarche feutrée adoucir mon cœur

vallée insoumise-dans des crissements d'asphalte tu secoues tes reins

la nuit se répand sur les sentiers sinueux — âmes torturées

d'un vieux vent passé chaque feuille en est l'écho -fredons de la nuit

assis sur le banc une feuille morte et moi attendons la lune

joli clair de lune -de mon seul prénom ce soir je fais un haïku

la nuit douce encore 278


Paroles Suivantes

caresse mon cuir usé -le vent vire au bleu

sous la lampe pâle

lumière dans l'œil -je cherche l'interrupteur qui éteint la lune

lune couronnée de ses pages de nuages -reine de ma nuit pensées égarées au milieu des oripeaux des anciennes fêtes traverser le Styx et payer le fils d'Érèbe en monnaie de singe

la nuit s'appartient -elle roule sous les vagues de mes pensées brunes pensées enkystées chevillées dans nos corps et âmes trop fluides

mémoire bénie -change le limon crasseux en poussière d'or

ma pensée dialogue avec l’âme du café — l’esprit et l’arome

puis la mort viendra bien en face et sans surprise me parler d'amour

vêtements de clown dans la lumière fragile d’un box d’hôpital

mais tu ne peux dire les mots que tu voudrais dire -ta gorge étranglée

un peu décalé — je reste à côté de moi à deux centimètres

dans quel dictionnaire trouver des mots de diamant pour parer vos rires

rousse la rentrée comme l'écureuil surpris de ne plus me voir

un café méandre — il dépose sur mes rives sa mousse odorante

derrière la porte c'est la rentrée et les flaques dans lesquelles je saute

fraicheur matinale — septembre apprend de l’automne le goût du frisson

la mousse des pierres sèche s’est parée de brun — un cœur en automne

la vie intérieure de mon chat est très intense — il dort tout le temps

désespérément la terre implore le ciel — secs, les yeux sans larmes

une ombre tremblante sur le mur de béton froid — la flamme vacille

la gorge écrasée — l’estomac empoisonné par des fruits amers

chambre silencieuse — le grognement des pensées comme un acouphène

à quoi rêve-t-il seul le papillon de nuit

pas de vent sur la route — la poussière retombe et couvre 279


Paroles Suivantes

la trace de mes pas

les arbres frémissent

les fruits de l'automne cette année ont des noyaux qu’on jette aux orties

les chenaux débordent obstrués de feuilles mortes — paresse d’été

les aigreurs du jours se referment pour la nuit — silence du soir

je les imagine vos yeux baissés sur les mots qu’il vous a écrits —— les couverts sont inutiles et un verre vous échappe

la nuit est tombée sac de suie dans une cave — le noir se répand au bout de la rue la lueur du réverbère constellée d’étoiles

sur la table un bol de thé que sans cesse une main tourne s’éclaircit d’une larme

un joueur de flûte égare des mots dérobés non loin d'Hamelin

les jours ont passé et j’ai perdu mes jouets au fond de mes rides

clin d'œil sans rancune -on n'apprend pas au vieux singe le prix des grimaces

à l’arrêt de bus il n’y a pas de bus, rien, pas même un arrêt

première nuit fraîche -même la lune paraît un peu tremblotante

c’est tellement petit un haïku qu’il peut se perdre au fond de lui-même

les mêmes cris encore d'une vallée malmenée au cœur de l'asphalte

les bruits de la nuits aussi présents qu'en plein jour -mais ils n'ont pas d'ombre

la lune souligne les arbres en contre ciel -un trait de génie

il a plu aujourd'hui les parfums de la nuit me chavirent

dans la tasse chaude je dessine des mes sens une raison d'être

entre deux nuages la lune a joué des coudes ! première à la caisse

votre épaule nue hardis mes doigts ont frôlé la source du cri

ma nuit suit le vent il la conduit d'un sourire vers l'aube intrépide

promesse de pluie — de gros nuages résonnent déjà dans la tête

je traverse l'océan à bord de l'arome du premier café

la pluie frappe enfin sur les toits fiévreux encore —

une Île après la nuit — 280


Paroles Suivantes

la mousse du premier café un refuge charnel

nuit calme et sereine un vent doux bruit dans les feuilles un gong dans mon cœur

fructidor s’endort et brutalement le vent ouvre à vendémiaire

le vent a forci tout bruisse et tremble alentour mon âme bouillonne

sont perdus ces ans où j’avais l’esprit agile — las tout mon corps grince

ombre du profil entre vapeur et arôme -enfin je prends forme

à côté du chat mes pensées se réfugient sous la couette épaisse

la nuit sans parfum autre que celui infirme de la souvenance

le vent et la nuit qui s’enlacent follement dansent dans ma tête

pas de bruit au loin seul celui de la vallée qui vrille mon cœur

les fleurs n’oublient pas mais le vent le leur parelle — rien jamais ne dure

dans ma nuit sauvage j'affronte seul les marées d'un gosier noué

la nuit sans étoiles ivre d’un vent sans merci hurle son silence vos mots sont des perles dont on peux être jaloux nacrées et baroques quelquefois vous les mêler dans un vinaigre inutile

de mes nuits rêvées je n'ai d'autres souvenirs que leur confusion la tasse fumante des effluves de sourires — la journée commence

la cuillère écrit votre absence sur la mousse du premier café

hurlant de colère le vent se lève soudain — les portes se claquent

devenues inutiles je vais où le vent me porte je rabats mes ailes

le vent dans la tête qui fouille dans tous les coins traque ma mémoire

le vent a faibli les branches ne geignent plus seul mon cœur se tord

sur le tableau noir avec des craie de couleurs j’énonce ”bonheur“

dans le soir avancent des ombres mal définies — l’ombre des pensées

retour sur mes pas certain d’avoir oublier de ranger ma vie

dans la vieille office pour le parfum du café même les poutres craquent

il se noue dans l’air 281


Paroles Suivantes

un pesant parfum d’automne — mon cœur dégouline

sur la mousse du café — je crée des montagnes

sur l’herbe qui craque quelques gouttes sont tombées — un brin a ployé

maintenant le soir s’éternise peu — un verre et c’est tout

tous ces mois sans pluie mon chat n’a plus l’habitude — il rentre en râlant

nuit cousue de silence les battements de mon cœur crépitent un peu

la lampe tressaille — au loin un éclair absorbe toute la lumière

papillon de nuit amoureux de la lumière se brûle le cœur

odeur de la pluie — de sous l’auvent me parvient la joie du feuillage

night butterfly lovers of light burns heart

ma nuit équivoque ni sereine ni colère — spectres entravés

une pluie d’automne une pluie sans concession apaise mes doutes

crème du café — sans bouger je suis resté pour humer l’arôme

au bout de la branche une goutte s’impatiente — saut dans l’inconnu

le bruit de la nuit — une pierre dans mon cœur le fait trébucher

at the end of the branch an impatient drop — jump into the unknown

qui pouvait savoir où je pouvais m’assombrir — là, la nuit le sait

parti sous la pluie le vieux promeneur ramène des brins de soleil

la nuit paraît douce à qui a le cœur serein — le mien me chiffonne

gone with the rain the old walker brings back blades of sun

la vallée vrombit de bitume maltraité — le vent vient de l’est

mauvais vent du nord qui vient de chasser la pluie d’une gifle leste

par courtes lampées la nuit humecte ma langue d’un breuvage amer

bad North wind which has just taken away the rain of an agile slap

dans ma poitrine des frissons et tremblements font la fête

il est temps que vienne la nuit et ses douceurs de mère — je suis las des griffes du jour

doucement je souffle

le vent se hérisse 282


Paroles Suivantes

il gifle de ses rictus les feuilles soumises

le passé m’a rattrapé d’un espoir fourbu

the wind bristles it slap of its grin the subdued leaves

le dernier café après la journée commence — un goût plus amer

fissures dans les canaux la barge racle le fond le Styx s’englue

la fraîcheur du soir sans heurt insensiblement glisse sous la porte

J’ai dit ton nom au ciel et aux rochers aux yeux et aux rivières

je reviens chez nous doucement sans bruit je pousse la petite porte

J’ai gravé ton nom de sombres tremblements et de désespérance aveugle

cette nuit blafarde qui se plaque sur le sol déterre les ombres

Je donnerai ton nom à toutes les impasses Voilà la fin des temps où nos verbes étaient communs J'oublierai ton nom

passer de l’amour fou à plus d’amour du tout — que d’amour foutu nuit noire sur les docks les spectres s’y insultent — odeur de goudron et de sel septembre en chiffon dans le ciel de l’ouate sale mon cœur bat si mal

élixir du jour qui commence dans l’odeur blonde du café day elixir which begins in the fair smell of the coffee

le soleil s’efface et les ombres se referment sur leur propre cœur

que comprendre au vent il va il vient il s’essouffle brouille mes pensées

bientôt la nuit d’ombres battra dans mon propre cœur — papillons en fuite

le vent geint aux volets — à toute force il pénètre entre mes tempes

d’une poignée de sable jetée aux yeux de la nuit clignent les étoiles

une nuit rebelle elle ne laisse filtrer aucun battement

je pousse la porte ouvre le pot de café déjà je voyage

la nuit s’épaissit et mon vieux cœur balbutie d’une glu revêche

l’ombre de midi il n’en reste que des miettes jetées aux oiseaux

vent sur le retour —

le soir se glisse entre les rides de mon cœur 283


Paroles Suivantes

il y fait moins froid

belle nuit sauvage — les souris restent tapies dans les herbes hautes

me reste de vous votre sensibilité et vos yeux d’artiste

cette année les glands tombent plus tôt des vieux chênes sons feutrés d’automne

dès ce soir mon cœur bat comme une vieille cloche de bronze fêlée

ma nuit est la vôtre vous qui avez su de mots raviver les miens

aux vêpres mon cœur bat comme une vieille cloche de bronze fêlée

ombres familières sur les pierres du vieux mur et leur mousse brun

la nuit outrancière ricane et se fout de moi dans mes tripes-mêmes

il vient de frapper à la porte de midi mon chat affamé

une douce nuit conduit d'une poigne sûre son troupeau de rêves

le jour s’alanguit il traine dans le jardin sur les mottes sèches

nous parlions de choses sans importance réelle d'amour sûrement

à l’encre de Chine les contours de mes pensées toujours indistincts

elle fut un miroir dans lequel je me voyais tel qu'elle me jaugeait

l’ombre sur les tuiles elle ressemble à un pin découpé en tranches

j'ai tant cru en vous comme on peut croire en un dieu sans miséricorde

j’ai l’esprit ailleurs — mon vieux cuir dans les étoiles je l’ai égaré

le dernier café un parfum d’inachevé reste dans la tasse

me reste de vous votre sensibilité et vos yeux d’artiste

par la lucarne l’automne joue la couleur hésitante des feuilles

une nuit sur les barricades j’ai vu une mésange

au loin un chien pleure et la nuit qui me rassure le rend malheureux

au bord de l’horizon une rivière sans galet seulement une étoile

pas le moindre souffle mais le feuillage inquiet en frisonne encore

au bout du champs une fleur se laisse séduire par les lèvres d’un âne 284


Paroles Suivantes

celle qu'on n'abat sans doute que par désespoir

en fermant les yeux de leurs baisers s’élançaient le bleu des mésanges

des bruits de pas dans les ténèbres demain trace sa route

dans mon cœur ce soir ombre et lumière se mêlent amoureusement

horizon brumeux les collines ont du mal à quitter les draps

train de nuit -sous ses roues les rails claquent d'espérance inassouvie

en suivant les routes que mon sang emprunte j’ai cru reconnaître un cœur

je cherche un chemin -ô voie lactée silencieuse parle moi d'étoiles

mes doigts ont cherché ils ont fini par trouver la porte du cri

le temps sent l'espace comme un chien sent le cul d'une chienne

hurlements des routes le soir où vont-ils donc les espoirs qu'on noie dans le bitume ou le whisky

la plaie saigne encore -quand donc se remettra-t-elle du sang répandu

je me rature à petit feu

certains jouent aux dames je ne joue qu'avec des mots les pions de mon âme

élans d'évasion mon vieux cœur veux me quitter pour vivre sa vie

belle nuit à tous à vous que je sens si proches malgré les distances

rêves dilués mélancolie d'automne la saison s'y prête

sur l’or de l’automne je marche et je me sens riche de bruits et d’odeurs

passé l’équinoxe les ombres qui s’ébattaient ont quitté la cour

Ce n’est pas Alzheimer un peu d’Asperger sans doute une vieille maladie que personne ne voit mais que tout le monde raille

même la nuit illumine mon cœur

tout au bout du quai un regard dilue la brume — le pinceau du phare

la pluie fut bien courte mais lui le silence reste ivre de chagrin

au bout de la route où les pas cèdent au vide la mer m'illumine

vous avez dit des mots que je n'aurais acceptés de personne mais dans votre voix c'était de l'amour

l'herbe se dépêche de se parfumer de pluie -une odeur de foin

la dernière carte 285


Paroles Suivantes

je l’ai regardée la tasse était bien d’accord — sa lèvre et mes lèvres

une seule fois dans ta vie tu croises l'amour le vrai le pur le dur mais s'il glisse entre tes doigts tu ne vaux rien pour les anguilles

ombres sans visage vous qui traversez l’amer laissez moi en paix

vous êtes mon secret que je distribue à qui veut l'entendre

les ombres se glissent sous les angoisses du soir — les volets se ferment

silence matois -j'aime la nuit qui prend feu de ses confidences

le lent crépuscule inonde les crêtes sombres d’une odeur de sang

journée indolente pour tomber les feuilles mortes ne se pressent pas

la nuit sans étoile rayée de filaments blêmes hurle son silence

je vous ai aimée madame comme aime suit aile et comme jamais haine ne pourra suivre aime

je rêve d’une île qui ne perdrait pas son temps à compter les heures

j'ai fermé les yeux — vos ailes dans ce dimanche s'ébattaient d'espoir

les feuilles des chênes ont déjà perdu espoir -pourtant elles tiennent

le soir vient plus vite — affamé il sort des arbres et mange le jour

hallucinogènes des champignons arc-en-ciel maquillent ma nuit

du bout de ses doigts l’araignée obstinément reconstruit sa toile

souvenir d'un lit où le matelas jaloux nous a séparé

des éclats de rire au fin fond de la nuit comme des éclats de verre

en contre ciel l'ombre des arbres pleure l'encre de mes yeux

la bouteille plaint le verre vide

un petit auvent ouvert sur un jardin d'arômes l'été fut bien court

il y a des anges que n'inquiète pas le ciel de la nuit d'octobre

Si j'étais poète, j'inventerai le mot "namour". Ce ne serait plus de l'amour, mais ce serait de l'amour, non ?

deux petits fauteuils où la poésie glissait de nos mains tremblantes 286


Paroles Suivantes

aube blanche de la lune le ciel n'en fait qu'à sa tête

par dessus l'auvent clair de lune énigmatique -je garde un secret

dans ciel obscur une étoile se dévoile mon cœur s'en empare

j'ai rêvé de nous tant que mon cœur ne sait plus s'il est vôtre ou mien

goutte de café — d’un coup de langue je mets fin à sa solitude

la nuit équivoque a déposé sur ma peau un désir de peau

le second café un rayon de soleil pâle fait rire sa mousse

I don't know where I am am I in your heart in my heart I'm not in my mind

quelques ombres blêmes oscillent sur le béton — les ailes d’octobre

train vers nulle part il freine sur le ballast les portes se ferment

mes tempes bourdonnent — le sommeil bien capricieux a traîné la patte

j'aurais aimé que les mots viennent à mon aide pour sauver du naufrage mes désirs avoués

être au bord du gouffre — ne pas avoir le vertige devient dangereux sur l’écran de verre quelques signes déchiffrables la clé d’une énigme…

il se noie il coule même la mer dans les poumons il respire encore

grisaille du soir — éclaireur du crépuscule il étreint mon cœur

dites lui qu'il va bien qu'il a retrouvé un navire un jour une nuit il embarquera sur le Styx

octobre hésitant entre l’été vieillissant et l’éphèbe automne le jour effacé par l’acidité du soir — le sel de la nuit

lentement je rampe vers la porte savourer l’odeur du café narine gourmande je recueille de la tasse la moindre vapeur

même la nuit mon ombre m’accompagne

poussant le volet une feuille rousse vient mourir sur mon lit

je passe du temps dans les bras de mon fauteuil — je pense à vos bras

l’écureuil s’inquiète d’une troupe de ramiers glanant sous les chênes 287


Paroles Suivantes

que le Styx est d'un cours calme Charon est avide

le soleil voilé maculé de brume sale prend un air penaud

maladroit des mots je souhaite à ceux qui m'ont lu une nuit fertile

du soleil d’octobre il ne reste que des flaques sous les pins frileux

riant dans sa tasse sa mousse crémeuse et chaude déride mon cœur

le soleil laisse à la lumière dorée le soin du crépuscule

frisson sur la peau mon cœur aussi tremble un peu fraicheur du matin

une lueur grise recouvre alors les collines — la couleur du soir

rayon de soleil — la tasse devenue tiède reprend des couleurs

la nuit devient lisse elle glisse lentement sur l’ombre des ombres

sans savoir pourquoi soudain un sourire éclaire le miroir terni

la nuit installée sur le banc dessous les chênes marmonne déjà

j’ai fini ma tasse retour vers la cafetière prodigue en bien-être

les dalles de l’allée n’en peuvent plus de compter les glands qui tombent

midi se promène aux alentours du jardin — automne sublime

triangle de feu que deux cuisses révèlent — papillons embrasés

assis sur le banc par bonheur j’ai un chapeau — une pluie de glands

mots qu'on ne dit plus feuilles mortes chiffonnées que les pas déchirent

soir mélancolique — octobre est sans compassion pour les cœurs fripés

j'ai suivi la route qui chemine de l'amour à la déraison — revenir sur mes pas

des ombres encore trainent au bord des chemins le soir les rassemble

une nuit d'octobre sans vent sans bruit en silence j'ai aimé l'automne

un ange étranger un oiseau aux ailes blanches traverse la lune

c'est une nuit bleue les battements de mon cœur prennent des couleurs

l'auvent me protège malgré moi des dards de la lune

ne surtout pas croire

au bout du monde 288


Paroles Suivantes

j'ai vu des douaniers qui fouillaient les rêves

un livre sur la poitrine « l’univers chiffonné »

j'ai trop d'ans sur moi jamais je ne passerai l'ultime frontière

je ne saurais plus aimer comme j’ai aimé la fille de vent

d'un rire insouciant elle a dérobé mon cœur pour le perdre en mer

affolé de vent le soir ne sais plus du tout où poser ses ombres

dans une autre vie peut-être m'aimera-t-elle alors je l'attends assis au bout du chemin dans les senteurs de l'automne

le vent s’est calmé mais il laisse le jardin tremblotant encore face à la lune un nuage raide et droit comme une potence

le vent geint aux volets — à toute force il pénètre entre mes tempes

pleine lune embrumée mon cœur transparent et clair est rongé de doutes

d'une nuit sereine je couve votre amitié comme un œuf fragile

les feuilles mortes fuient la rage du vent pour se noyer dans la piscine

l’anse bien serrée je l’approche de mes lèvres — tango matinal

j'étais inconstant et me voilà pris au piège de mes sentiments où vas-tu gamin avec ton air insouciant et ce grand sourire ne vois-tu pas la faucheuse j'y vais et je suis heureux

parfum sublimé par les mémoires anciennes des cafés heureux temps et espace au bout de la lumière unis à jamais

la nuit est silence et le silence de ma nuit est un clair repaire

je ferme la porte je laisse le vent colère s’en prendre à lui-même

ma longue mémoire comme le fil d'or d'Ariane ne vous oublie pas

symphonie du vent aux rires des pins répondent les oliviers sagaces

sans sucre sans lait encore endormi je tourne le premier café

rongée de morsures la branche morte a cédé — vent impitoyable

d’un regard amoureux je caresse la cafetière qui s’échauffe

je m’éveille 289


Paroles Suivantes

les grains coulent lentement -noyé sous les heures

vivre aimer penser fermer les yeux les ouvrir et rien n’a changé

la nuit me console de ces battements d'un cœur de vieux gong fêlé

j’ai rejoint les ombres qui courent dans le bois et les flaques de soleil

la lune s'épuise ses rayons flottent à peine au bord des collines

quand le vent se calme le mois d’octobre m’enrobe je deviens automne

la solitude d'un chien la pire des solitudes

ouvrir la fenêtre et respirer les parfums d’un octobre aride

des bruits sur les feuilles mon cœur s'emballe et gémit des pas de la nuit

les nuits je me mens je me racontes des rêves sans réalité

je suis un moineau qui sautille sur son cœur sans laisser de trace

je compte les soirs — loin là-bas inaccessible j’étais un enfant

avec huit-cents mots je peux décrire ma vie -"rose" huit-cent-un

velours sur la peau — le soir d’octobre m’envoute tout juste un frisson

je vous souhaite amies amis présents et lointains une nuit vermeille

sur les vieilles pierres glisse une mue de couleuvre — ah ! changer de peau

plongé dans la brume il va redresser la barre ce premier café

des nuages roses se trainent dans le ciel sombre — promesse de vent

drainant le désir de son écume de soie — sensuel arôme

et puis vient la noire la sombre nuit maladive qui trouble mes yeux

une feuille morte se souvient de son amour brisé par l’automne

vieilles cartes grasses devant moi posées les heures passées à sourire

matin d’ombres franches — la brume vite écartée d’un léger frisson

un halo de brume incandescence livide bâillonne la lune

avec un crayon couleur de soleil j’efface le gris de mon cœur

dans le sablier

midi va sonner 290


Paroles Suivantes

le ciel est à sa place suis-je vraiment à la mienne

qu’un sommeil sans faille peuplé de vos rêveries traverse la nuit

il préserve d’elle le souvenir lumineux d’un béant mensonge

un café refuge — un feu de camp dans la nuit pour bannir les loups

le vent revanchard disperse sur les terrasses les tas de feuilles mortes

somptueux arôme de ce pur arabica caressant mes lèvres

sur les murs sans ombre les grêles de vent arrachent des plaintes aiguës

les heures s’étirent et je les laissent filer sans trame ni chaine

le vent et le soir à l’abri des pins conspirent — la nuit sera blanche

au bord de midi je tutoie la cafetière une fois encore

la nuit improbable illuminée par la lune — l’ombre de la nuit

octobre, le mois du gland !

je me souviens mal mais je sais bien une chose je ne peux l’oublier

d'un regard d'un geste elle a mis le feu en lui dont cendre il ne reste

mes mains de vieil homme se souviennent du chemin jusqu’à son sourire

je les vois qui passent les impassibles nuages loin de tout espoir

timide et tremblante la lune se dissimule dans les hautes branches

fin d’après-midi tu sens le soir qui approche un chat vers l’oiseau

autour de la lune gouffre insondé sans étoiles la nuit abyssale

les ombres dominent il est temps de rentrer la mienne suit encore

de ces mots si doux se souvenir est facile l'oubli impossible

moustique sur la joue je le claque rudement — me voilà puni

la lune coquette s'admire dans le nuage qu'elle a pour coiffure

rêver d’un sourire est-ce que tu dois en rêver ou bien en sourire

nuances de noir inconsistance des sons que la nuit fredonne

une lune fourbe refuse de se montrer -je l'attends quand même 291


Paroles Suivantes

pour revoir tes yeux j'irai où tes pas me mènent je suivrai ton ombre

sont tombées dans la piscine — reflets d’un ciel chiche où vont les mots qu’on ne prononce pas parfois ils s’emmêlent dans l’enclos d’une page pour sortir le full aux as d’un poème

d'un index tremblant j'efface le grain salé -c'était une larme écrire ne sert à rien sinon à rapprocher l'encre et le feuillet -ils ne le savent pas encore mais ils s'aiment d'un amour indélébile

je rejoins la nuit sous l'auvent elle m'attend pour parler silence le cœur desséché un jeune olivier est mort d'amour pour la pluie

la lune se lève et à présent elle veille vos rêves de soie

cette nuit j'ai compté les étoiles me suis arrêté à cent-deux demain sera sans toi

ce premier café illumine la cuisine d’un parfum lustré circonspect je tourne autour de la tasse pour refroidir le café

je ne sais qui je suis je ne sais où je suis comme l'eau je suis la pente

sur quelle planète il faudra que je les trouve les mots pour lui dire

tu me regardais et tu ne voyais que l'ombre d'une ombre sans étoiles

je te reverrai un jour — je resterai là à te regarder

je pense à la nuit comme un océan sans vague seulement le sel

fraicheur du matin — il ne reste de l’été qu’un souvenir tendre

assis je regarde la vapeur qui s’en échappe je m’enivre d’arôme

sur ton souvenir tous les matins je dépose une fleur furtive

puis je saisi l’anse de la tasse qui me rend un baisser torride

je ressens ce soir comme une ancre dans le cœur mon âme dérive

soleil dans les yeux frissons sur la peau les paradoxes d’octobre

c’est de là qu’il vient des profondeurs de l’Érèbe — ciel noir sans nuance

lentement les heures terminent leur course lente je n’irai pas plus vite

quelques étoiles 292


Paroles Suivantes

les cœurs effleurés battent de bonheur

les roses trémières ne craignent pas de fleurir sur le bord des routes

voilà l’heure grise l’heure où les ombres ignorent qu’elles sont des ombres

quelques pâquerettes comme mon cœur hésitant se ferment le soir

les ombres aussi rêvent de reprendre forme — un rêve de pierre

elle était un phare la lueur qui éloignait la dernière borne

il garde de vous le souvenir d’un volcan souriant et calme

chacun condamne les fautes des autres absout les siennes avec un rire

la nuit se répand comme les pas du fantôme qu’elle rêve d’être

les prétextes sont des boucs émissaires garder sur son cœur le parfum de vos seins que peut-il vouloir d'autre

la nuit si profonde que même mon cœur fendu ne reviendra plus

de la condensation de l'aube un poème naquit

j'ai dans le cœur un petit caillou qui grince un caillou pas bien rond

le crissement de la plume embrase l'encre le feuillet résiste sous les étoiles absentes les mots ancrés du poème brillent sans soupirs

enfin le train s'arrête les rails fourbus peuvent souffler le train s'impatiente je suis un brin d'herbe que mille pas ont foulé -je rentre sous terre

l'encre sait que le feuillet est la lumière de son ombre

une brume grasse se colle sur les feuillages -arbres sans repaire

lever le voile d'un visage que les mots maquillent

oiseau sans présage vous avez un autre lit pour lisser vos plumes

quelques mots lus ou dits un échange de battements de cœur

qu'une nuit sans houle berce vos rêves d'enfant comme un lac à l'aube

rien ne dit plus rien le silence qui sait tout impose le silence

ma main tremble un peu — le saisir plonger dedans effacer la nuit

moment partagé

parfum doux-amer 293


Paroles Suivantes

de sa mousse qui ondule sur ma lèvre avide

je suis un vieux fou qui n'a pas oublier d'aimer -je suis un vieux fou

odeurs de l’automne — ce matin les feuilles mortes sentaient la rosée

sur une galère on ne rame jamais seul pour franchir l'amer

mes mains se souviennent comme son cœur battait fort au creux de ses reins

quand vous reviendrez déçue par le chemin emprunté alors retournerez-vous vers le bleu lavande

le ciel un peu plus pâle plus le crin-crin des cigales toujours pas de pluie

belle nuit mes amies mes amis qui me savez tellement bavard

un ailleurs est toujours trop loin fin d’après-midi sur le pré jauni les ombres somnolent encore

coudes sur la nappe je me prédis l’avenir dans le café même

bientôt vient le soir avec son parfum étrange de mélancolie

je la fais rouler entre mes mains languissant d’y poser les lèvres

nous ne comptions plus nos lianes tentaculaires nos langues multiples un seul regard nous unit et l’univers se renverse

quand le jour se lève il ne se lève jamais sans sourire un peu

traverser la nuit — la voile noire est hissée la falaise abrupte

soleil de saison il s’est levé en bâillant pour chasser la brume

il fait nuit déjà sur le chemin je piétine et n’avance pas

soleil sur la peau — s’il pouvait sourire aussi dans mon cœur trop pâle

la nuit insondable dépouille le ciel sans borne de sa pluie d'étoiles

les rayons sans force somnolent sur les façades — ombres émoussées

bruissement des feuilles dans la nuit les arbres filtrent le regard des hommes

ah, que je voudrais que le soleil la ranime l’étincelle d’or

au fond du sablier les jours noient les heures quelques secondes surnagent encore

elle se balance la potence sans pendu la vieille lanterne elle rit la lavandière 294


Paroles Suivantes

celle qui a lessivé mon vieux cœur de drap froissé et bat, bat mon cœur

d’un regard aigu elle a tranché mon cœur une part pour elle et l’autre en enfer

je la sens venir avec son grand manteau d’ombre l’oppression du soir

j’erre sur la plaine le vent me prenant pour cendre disperse mon corps

un ciel mat et blême couvre peu à peu les pins terne crépuscule

elle l’attend tout le jour elle l’espère la nuit le voleur qui lui rendra la peau de son cœur

au creux du méandre là où le sable s’envase mon cœur bat encore

du plus haut des monts je surveille nuit et jour un horizon vide

je ne sais que faire de mon corps de vieux guignol sans marionnettiste

la nuit dans le cœur elle grave sur ses veines d’un burin aigu

dans l’ombre grisâtre le soir enrobe la lampe d’un trait de ténèbres

une fête au loin des bruits des chants et des rires — je remonte mon col

en lentes spirales l’arôme s’est répandu jusque sous mon crâne

sur la terrasse sale feuilles mortes entassées espoirs balayés

encore embrumé mon corps entier n’aspire qu’au premier café sa grisaille épaisse ne nous laisse aucun espoir — cruauté du ciel

battements de cœur la nuit ne se calme pas ce froid dans le ventre

avant de partir il a posé sur la table sa soif de poèmes

je suis un fantôme qui habite encore un corps le temps est compté

quand il est revenu les fourmis avaient bu tous les mots — silence

rêve de lumière dans cette nuit sans étoiles les nefs vermoulues restent toujours ténébreuses en franchissant l'horizon

j’ai longtemps marché avant de l’apercevoir au bout de la route

elle l'aimait d'amour fou d'amour dément il l'aimait jamais ils ne se croisèrent dans ce monde-là

elle était si belle vêtue d’un manteau de nuit qu’elle m’a fait peur

d'un sommeil douteux 295


Paroles Suivantes

je vais où la nuit me pousse pas trop loin j'espère

la nuit installée sur le banc à mes côtés nous comptons les glands

embué de nuit je m’enrobe dans l’arôme royal du café

en battant des mains en silence sous l’auvent il sculpte la nuit

le nez dans la tasse je m’imagine embarquer vers le bout du monde

de ces glands qui frappent sur l'auvent les tuiles tintent -soirée musicale

un voile de brume brosse un soleil matinal à l’aquarelle

main dans la main ils partirent pataugeant dans les rizières sûrs de leur destination l'autre bout du monde

à la proue du vieux navire le capitaine ombrageux interroge chaque vague — laquelle est son âme

j'ai traversé la mer en cessant de respirer pour te retrouver

toujours ce parfum le matin quand je m’éveille fragrance d’été une odeur sans consistance le parfum de ton absence

il rêve d'un pays où les figues violettes dessinent sur sa bouche le contour de ses yeux améthyste et grenat

puis je me souviens des sourires qu’un été recommencera

ne plus respirer ne plus trembler ni sourire la regarder vivre

nous mangeons tard les glaçons résistent

une étoile à peine attend la lune équivoque -éteint je patiente

cris d’oisillon ouverture de la chasse cris d’un oisillon

nuit mon insondable nuit tu m'appartiens et je te respire comme une fleur de pavot qui épuise sa résine

sieste difficile mon voisin n’a pas compris un mot de la bible

rêver une fête autour de la même table nous levons nos verres

le soir est tombé en plein milieu du jardin comme un sac de sable

laisse-toi porter par le vent par n'importe quel vent comme une feuille morte sans faillir il te conduira vers ceux qui te ressemblent

ombre carnivores elles se mangent entre elles sans laisser de miettes 296


Paroles Suivantes

je connais un poète qui ne sait pas écrire mais quand il regarde une fleur celle-ci se prend à chanter

au bord du verger j’ai creusé un trou profond pour planter un arbre mais cet arbre c’est l’amour et ses fruits toujours amers

j’approche les lèvres — trop chaud pour l’étreinte encore j’en respire l’odeur

la brume descend d’un ciel sans concession noir sans la moindre chandelle pour éclairer mes doutes

je la pose trop fort tintement de porcelaine et rond sur la table

le vieux portail grince pas très loin un chien aboie — une nuit de brume

le vieux cerisier a perdu toutes ses feuilles — octobre dénude

fauteuil de jardin dans l'épaisseur des ténèbres -mon poste de guet

se frôlant à peine lucanes et papillons dansent dans mon ventre l’incandescente asymptote d’une hyperbole éphémère

la nuit m'a rejoint salutations d'usage nous ne pensons à rien

au milieu des tempêtes auxquelles il imposait silence le vieil homme édenté se revoit jeune et mordre

il cueille des fleurs des champs des fleurs sauvages qu'il lie avec un bout de son cœur pour elle farouche

au fond du jardin sous le tas de feuilles mortes pourrissent des pleurs ombre des barreaux de l’imposte sur le lit -rêves en prison

sur le bord de la rivière elle regarde couler le flot de ses larmes pour celui qui a tant promis je vous aime disait-il à en perdre la raison elle n'aime toujours pas l'oiseau dans sa cage

fleur du souvenir et crème de la mémoire je vous sens frémir

le sommeil m'emporte je ne sais où il m'entraine vers demain sans doute

c’est l’heure où le soir tutoie le jour le moment où l’âme s’alarme je vais sur ma route des rêves plein ma besace mais qui les entend

parfois je voudrais ne plus être ce caillou dans sa chaussure cet ennui dans sa tête cette tasse qui déborde parfois je voudrais ne plus

j’ai le cœur brûlé il s’est approché trop près de ma seule étoile

sur la mer amère du premier café la mousse traverse l’arôme 297


Paroles Suivantes

chaude dans mes mains tremblant de sommeil encore la tasse m’apaise

embué englué d’une pâte chimique je m’éveille enfin mais non, ni le monde ni rien ne change jamais

sur le pré brûlé des fleurs toujours insoumises boivent la rosée

tout au bord du monde doucement je me balance pieds dans le néant

les herbes hautes se sont couchées maintenant sans jamais reverdir

trainant dans le soir sur le chemin la nausée griffe mon gosier

le sable qui coule entre mes doigts de vieillard retourne à l’oubli

la nuit dans le cœur tente désespérément d’en éteindre le feu

il va lentement le long de la ligne d’ombre mon cœur fatigué

ma main tremble un peu je renverse quelques gouttes et je déglutis

l’automne me suit comme l’ombre d’un soleil rongé par le doute

vapeur dans les yeux — je ne peux les retenir un café aux larmes

oliviers mal taillés tels que vous devriez être je vous vois enfin

vraiment maladroit encore un rond sur la nappe pertes et profits

litière de pin le soleil sur les paupières l’été en partage — où suis-je ? dit-elle. — mais dans mes bras mon amour ! — oh ! les bras de qui ?

illusions bercées rêves couvés comme un œuf briser la coquille

je me moque de tout la couleur de ta peau les joyaux dans tes yeux l’odeur de ton sexe je me moque de tout sauf de toi peut-être

malgré le soleil qui incendie les fenêtres j’allume la lampe sur les carreaux rouges tavelure blanche et noire du chat endormi

une nuit j’irai par misère dans un bar je demanderai après la loutre bleue qui n’existe pas elle me dirait casse-toi vieux débris

au bord de midi le ciel s’est couvert d’ennui sans promesse de pluie on s’est regardé 298


Paroles Suivantes

et le temps s’est arrêté pour l’éternité

je lui prédis un avenir sans chaîne !

regardez le ciel il est rempli de nos insomnies elles le griffent de cris transparents vous qui croyez bien dormir regardez le ciel

assis sous l'auvent la nuit me prend par la main nous rêvons ensemble

- je ne veux pas mourir mon amour - tu es déjà mort gros ballot mais tu rêves encore

le navire dérive dans le ciel enténébré chaque étoile qu'il frôle il ne restera de lui que la constellation de l'ange aux ailes déplumées

fleur de laurier-rose couleur des plus belles roses odeur de cadavre

je suis ce vieux fou amoureux d'une étoile indifférente

au magasin de farces et attrapes j’ai acheté le masque du sourire à présent on me dit bonjour quand on me croise

j'ai la nuit pour amie la nuit pour ennemie souvent elle se bat contre mes rêves à mains nues

j’ai posé un ex-voto sur la tombe de mon père ma mère me demande combien ça m’a coûté

nuit le cri silencieux de mon âme déchiquetée

le soleil en pause la pluie même se refuse au moindre présent

je ne sers à rien dit-il pas même tu me regardes quand je sors les poubelles d'un sommeil rieur la nuit bleue vous accompagne vers demain insoumis

la journée s’achève un parfum de néant reste collé à mon âme

ma vie fut bien longue j'ai aimé on m'a aimé l'amitié demeure

un soir scélérat troque la douceur du jour contre un banc de brume

arôme envoutant même mon chat indolent semble apprécier

et la nuit venu le linge sur l’étendoir prend des airs de spectre

dessin d’un sourire sur la mousse du café — un joli présage

la nuit devient fraiche octobre montre les dents et les jours reculent

de la chantilly mousseuse blanche et sucrée dans le ciel d’octobre

sur le banc je rêve un gland me surprend 299


Paroles Suivantes

la pensée que j'ai de vous fanal dans ma nuit

le rideau de perles musique d’un vent léger frémit dans la chambre

elle tricotait une chaîne pour mon cœur de ses mains expertes

ombre de demain aujourd’hui veut oublier l’ornière d’hier

je me sens léger comme sa respiration quand elle dormait

c’est un jour d’automne les corneilles vont glaner de leurs cris de craie

seul un vent léger s'agite dans le feuillage -les feuilles résistent

soleil sous la couette cette nuit j’en suis certain j’ai rêvé de vous

qu'elles soient lumières les étoiles sur la mer de votre sommeil

comme des moutons confiants dans le pâtre du vent les nuages passent

d'une rive à l'autre il nageait il y mettait force et volonté il n'a jamais su où aborder il s'est noyé en faisant la planche

ne fais pas confiance à un dépressif tu lui poses la main sur l’épaule il te prend pour dieu

c'était un coureur d'étoiles de l'une à l'autre il brûlait sa peau et son cœur sans voile et chaque fois il hurlait

le bruit de la ville traverse la vallée aux relents de bitume qu’importe le ressac tu reviens vers moi

mes lèvres frémissent puis tout doucement j’aspire l’odeur primitive le parfum de braises chaudes du premier matin du monde

le temps s’engrisaille c’est l’heure où les ombres pointent vers le soir sous les pins ensuite elles se boivent entre elles les ombres liquides

la cuillère tinte en tombant sur les carreaux pas bien réveillé

les mains caressées par la lueur de la lampe j’écris des mots sombres

au-dessus de l’horizon le soleil danse avec la brume au son de la lumière

ils ont fui par la rivière pour ne pas laisser de traces et dans un baiser farouche se sont envolés

cœur emmitouflé d’un cocon d’ouate indécise je ne l’entends plus

elle est lumineuse

quelques jours encore octobre le mois sans dieu 300


Paroles Suivantes

et sans pluie non plus

le premier amour est inoubliable le dernier amour lui est meurtrier

sur le sentier sans fin aux ornières profondes sur le sentier sans fin bordé de ronces épaisses sur le sentier sans fin

dans le petit bois de mon jardin je promène ma vieille ombre lasse

il sait qu’un jour il en prendra un de trop un verre de trop un comprimé de trop mais un bain chaud un cutter pour couper court

les ans me pèsent respirer me pèse mon corps meurtri me pèse et je ne pèse presque rien même mon cœur s'allège

dans le ciel les nues détourent sa silhouette le cœur est absent

je sens l'eau sur mon corps et le sang qui coule encore je sens mon corps liquide mon esprit qui se vide

plus que septembre octobre pue la mélancolie une vieille charogne le cœur un peu lourd je retourne du jardin toujours aussi sec

il vous a sans doute effrayée mais bien avant cela vous étiez captive d'un autre cœur tout va si vite l'amour a le vertige

le soir je ne sais d’où me vient cette amertume du jour qui s’achève

l'oubli ce n'est pas une perte de mémoire l'oubli c'est l'indifférence

assis sans équilibre sur la margelle du puits il regarde le ciel des antipodes

naviguer sur la nuit sans timon ni rames tutoyer les étoiles et garder leur lumière je ne sais pas le faire

ce soir il fait triste la nuit suinte d’ennui tout mon corps bâille

d'un sommeil sans faille que votre nuit se remplisse et de rêves bleus

enfin ils arrivent dans un ciel qui accueille les yeux étoilés

gorgé de sommeil j’ouvre la porte et déjà … caresse d’arôme

des millions de pas -faire le tour d'une vie c'est exténuant

premier espresso ce n’est pas le plus rapide mais c’est du velours

rêver sous l'auvent avec la nuit pour compagne rêve familier

toujours ce même soleil qui d’un coup de lange sèche 301


Paroles Suivantes

s’abreuve de la rosée cédée par la nuit ne penser à rien demeurer devant l’oubli attendre d’entrer en train de bronzer à l’ombre de mes pensées qui n’ont plus de feuilles on ne sais jamais quand la porte s’ouvrira parfois elle l’est déjà nuages avares il faut trouver la cassette qui garde leur or il pense au printemps l’oiseau caché dans les chênes et qui chante encore je penche plutôt pour un dimanche d’avril samedi d’octobre Je ne le dirai plus que je rejoins la faux je dirai que je vais chercher des allumettes

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