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Laurence Dreyfus aime se définir comme un trait d’union entre les collectionneurs d’art, les artistes et les marchands. Cette conseillère en art est bien plus que cela, elle est une découvreuse de talents et œuvre aussi en tant que commissaire d’exposition pour des galeries.
L
aurence Dreyfus fait un métier difficile à cerner: elle facilite les décisions des uns, les transactions et les choix des autres. Elle a ce don de découvrir des artistes avant que leurs œuvres deviennent intouchables, du fait de la demande qui rend leurs prix hors d’atteinte. En quelques décennies, elle est devenue l’une des personnes les plus influentes du monde de l’art.
Laurence Dreyfus vit entre Paris, où elle a grandi, et Genève depuis huit ans. Elle est venue à l’art grâce à un pygmalion, ce genre de personnages que l’on rencontre dans les romans plus que dans la vraie vie. Elle a eu cette chance. Sa mère s’intéressait à la littérature, et son père avait une passion pour Juan Miro, mais dans les années 1990, quand la révélation a eu lieu, la jeune femme avait déjà le regard orienté sur certaines formes de beauté. L’homme qui l’a initiée aimait follement l’art et la peinture et l’emmenait au centre Pompidou pour lui faire découvrir Hartung, Tàpies et tant d’autres. Le goût lui est venu ainsi, au fil de rencontres avec des tableaux, des artistes, des œuvres. L’art lui a pris le cœur à Laurence Dreyfus et elle a décidé de faire des études à l’Ecole du Louvre, puis au sein de Sotheby's Institute of Art à Londres. Fraîchement diplômée, dans les années 90, elle a effectué des stages dans les meilleures galeries de Paris. « Ma métamorphose s’est effectuée grâce aux musées et aux galeries. J’ai eu la chance de connaître le galeriste Emmanuel Perrotin à ses débuts. Il connaissait bien Damien Hirst. Ce dernier allait faire sa première exposition. Dans la foulée, elle rencontre Jay Jopling qui n’avait pas encore créé la galerie White Cube à Londres: « Il me recevait dans des clubs anglais. » « C’est ainsi que j’ai plongé dans la hype anglaise. J’évoluais entre Paris, Londres et New York. L’Allemagne aussi, où j’ai rencontré Gerhard Richter dans son atelier. J’ai eu beaucoup de chance dans ma vie: je me suis retrouvée au bon endroit, au bon moment. J’ai pu faire acheter à mes clients des œuvres d’artistes comme Takashi Murakami ou Maurizio Cattelan, quand elles valaient seulement 30’000 dollars ! L’art contemporain, dans les années 90, ce n’était pas encore à la mode. »
Stéphane de Bourgies
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Laurence Dreyfus a le don de repérer les artistes et de ressentir l’importance que va prendre leur œuvre dans le temps. « Je fais confiance à mon regard. D’ailleurs, mon nom de jeune fille signifie: celui qui voit. » Organiser des expositions en tant que curatrice lui permet aussi d’apprendre à connaître en profondeur les artistes, de comprendre leur pensée, de pouvoir défendre leur travail auprès de ses clients. « Je ne conseille pas les collectionneurs uniquement en fonction des catalogues de vente