Les récits de Foresta // Restons branchés n°2

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LES RÉCITS DE FORESTA Restons Branchés !

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jeudi 29 NOVEMBRE 2018 Si j’étais un arbre... Avec le 1000 pattes


L’histoire du site de foresta Il était une fois au nord de Marseille un site exceptionnel, une colline argileuse au dessus de la mer. Longtemps, on y a cultivé la vigne et prélevé la matière première pour des ateliers de poterie. Au XIXe siècle, la colline a renoncé peu à peu à ses activités agricoles et artisanales pour alimenter les tuileries du bassin de Séon et accueillir des quartiers industrieux et populaires. Le château du Marquis de Foresta surplombait la colline jusqu’à ce que les batteries allemandes du Frioul le bombardent en 1944. L’exploitation de la carrière avait alors cessé et la pinède bastidaire où les familles du quartier venaient pique-niquer le dimanche est devenu un terrain d’aventures entre les ruines. Quelques décennies plus tard, le projet de centre commercial Grand Littoral redessine les pentes et le paysage. L’espace en contrebas devient “la coulée verte”, identifiée dans les plans d’urbanisme comme grand site à vocation sportive ou de loisirs. Mais le temps semble se suspendre pour ces terrains qui, en dépit de ces intentions, sont depuis des années à la limite de l’abandon. L’histoire se remet en marche en 2015 avec l’acquisition de ces terrains par la société Résiliance. Leur rencontre avec le collectif Yes we camp, puis avec la coopérative d’habitants Hôtel du Nord et l’équipe du Bureau des guides du GR2013 crée les conditions pour proposer une utilisation collective et expérimentale de ces 16 hectares à ciel ouvert.

De nombreuses balades et rendez-vous collectifs ont permis peu à peu d’imaginer et de tester l’idée d’un parc, espace de loisirs mais aussi outil pour produire, partager et apprendre à partir des ressources locales et avec ceux qui vivent là.


Cette fois รงa commence par un pique-nique sur la terrasse de Dominique...


Cette fois ça commence par un pique-nique sur la terrasse de Dominique. Chacun a amené une histoire à raconter, une production à goûter ou un bouquin à partager autour de sa relation à l’arbre. Après le pique quasi gastronomique, on revient dans l’enquête.

La mémoire des fractures D’abord l’histoire du Robinier Faux acacia. Dans la vieille ferme que Dominique et Jean viennent habiter il y a déjà un paquet d’années, ils devinent deux ronds entourant ce qui devait être deux arbres, abritant agréablement la terrasse et donnant des airs de bastide à l’endroit. Mais il faut bien vivre et l’activité de la ferme évolua, avec notamment du stockage de charbon. On coupa les arbres pour laisser la place au camion venant livrer le combustible. Des années après, Jean et Dominique partent donc en quête d’un nouvel arbre à planter là, pour donner un peu de fraicheur au lieu où nous pique-niquons. Alors qu’ils espéraient un micocoulier, c’est finalement un robinier qui emménagera avec eux. Ils apprendront avec lui à accompagner la « fracture » (c’est un arbre très cassant), ce qui va nous permettre d’arriver à notre premier adage/slogan inventé de la journée (il y en aura d’autres...) : « Ça casse mais ça pousse »...



Un instrument pour sonder les corbeaux en Ailante


Ça vaut des nèfles Pas très loin du robinier, on trouve un très vaillant néflier qui a tout particulièrement l’affection de Jean. Serait-ce par goût pour ce qui n’est pas très valorisé (comme un peu chacun de nous dans ces balades) ? Ou par intérêt pour l’activité permanente dont cet arbre fait preuve (Jean est aussi un grand travailleur) ? En tous cas il nous amène notre deuxième adage : « Super, ça vaut des nèfles »

Le Palmier du ghetto Josyane a bien préparé son résumé de ses recherches sur l’Ailante ! Outre ce qu’on savait déjà (que c’est une plante qui s’installe dans les terres remuées, qui résiste à des conditions très dégradées de sol et de pollution, qu’on peut au choix y voir une nuisible ou une championne de la survie), on apprend que cet arbre fut donc importé de Chine (on verra que la Chine est récurrente dans cette histoire) comme arbre d’ornement mais aussi, mais surtout, dans l’espoir d’une exploitation économique via son Bombyx, un papillon de nuit capable de produire de la soie. Quand cette production n’a plus trouvé d’intérêt économique, on l’a peu à peu trouvé moins sympathique... Pour continuer à lister ses qualités, et pas seulement ses défauts (notre goût pour les nèfles), on remarque sa capacité à pousser rapidement, les qualités musicales de son bois, ses capacités à inhiber la germination d’autres plantes (ce qui peut être un défaut comme une qualité). L’Ailante a aussi beaucoup de noms différents, qui expriment la difficulté de clairement le classer du côté des bons ou des mauvais... Outre le « Palmier du Ghetto », « Faux vernis du Japon », « Arbre du ciel » et « Arbre du paradis », il a aussi deux noms d’usage en Chine : Pour le chinois de la campagne il est l’« Arbre du printemps » (car sa période de « renaissance » annuelle est tardive et annonce avec certitude le printemps), quand il est pour le chinois des villes l’« Arbre puant » (parce qu’il dégage une odeur nauséabonde quand on froisse ses feuilles). Les chinois l’utilisent aussi comme métaphore à la fois du père de famille (par allusion à son côté imposant quand il est mature) et du fils dévergondé (en faisant allusion à la croissance un peu fofolle des rejets de souche). Alors l’adage qui nous vient pourrait être : « Oui mais non ».



Entre Terre et Ciel Et l’on finit notre petit tour de table de nouveau avec la Chine, mais aussi la langue arabe et le dessin, avec Stéphanie qui nous montre les idéogrammes qui correspondent à « arbre » mais aussi « racine », « cime », « forêt »... Elle nous fait également partager le beau livre Nous n’irons plus au bois dessiné par Zeynep Perinçek. Pour l’adage, les chinois nous invitent à réfléchir à Si j’étais un arbre... Et puis, on part en balade sur Foresta... C’est, pour commencer, le retour du robinier, dans une autre situation. Dalila nous raconte alors que cet arbre, grâce à la présence de nodosités et de bactéries symbiotiques sur ses racines, a la particularité comme toutes les Fabaceae (légumineuses), d’être capable de capter l’azote de l’air (ce que la plupart de végétaux ne peuvent pas faire, bien que l’atmosphère en contienne 78%). Une partie de cet azote sera utilisée pour fabriquer ses protéines, et l’autre restera dans le sol et deviendra assimilable par les autres plantes. Le Robinier, en agissant comme un engrais, en fait ainsi profiter les autres. Donc c’est super... Oui ! Mais il prend aussi possiblement la place d’autres plantes à cause de ses gousses pleines de graines... Non ! « Oui mais non » .


L’asie à l’honneur Bon, on apprend aussi qu’il peut remplacer le teck pour faire de chouettes terrasses, mais aussi des bâtons du jardinier, car son bois est imputrescible. Quelques mètres plus tard voici le peuplier. Potentiellement marqueur d’eau, mais « oui mais non » nous dit la compagnie, car c’est le peuplier blanc, pas le vert. Mais savez-vous que le peuplier blanc c’est le peuplier des peintres de la Renaissance italienne, l’arbre avec lequel ils fabriquaient leur retable pour peindre sur bois ? Ceux du nord, utilisaient le chêne. Clin d’œil aux nombreuses histoires italiennes de ces quartiers ? Et puis voilà le Frêne et ses histoires de frênette (idée pour l’Épicerie Foresta ?) mais aussi de fourmis qui nettoient l’arbre en buvant le liquide sucré contenu dans les pucerons à partir du suc de l’arbre... Euh... Vous m’avez compris ? Et toujours ces plantes qui indiqueraient l’eau, en dessous... Le mystère du Savonnier. Pourquoi ça s’appelle comme ça ? On ne sait pas mais on sait que, encore une fois, cet arbre vient de Chine... Troublante cette récurrence de la Chine, quand on sait que le projet MIF 68, qui indirectement a provoqué le projet Foresta, est largement lié aux investisseurs chinois et aux stratégies des nouvelles routes de la soie...

Tiens cette fois un Troène du Japon. Ils furent à la mode dans les bastides marseillaises, taillés en boule et recouverts de filets afin de permettre « Les chasses aux dames », les oiseaux étant ainsi plus faciles à chasser pour la gent féminine... Hum Hum...




Un drame et une chance Nous voilà à l’orée de l’incendie. Un drame et une chance... Nous échangeons sur les impacts de l’incendie, à la fois traumatiques pour les hommes dans la modification du paysage qu’il provoque, mais aussi accélérateur pour certaines plantes qui vont profiter de la lumière retrouvée. On se dit qu’il faudra approfondir cette question de l’incendie, de sa gestion aussi, notamment en invitant le chercheur Thierry Tatony à converser avec nous. Des Chênes blancs, Chênes Kermes, de la Filaire, du Neprun, Viorne tin, Salsepareille, c’est tout un milieu qui vit là, face aux Ailantes et aux buissons d’Atriplex.


L’un grignotera-t-il l’autre ? Nous y serons attentifs et pour prendre soin de cette incroyable relique, nous proposons également d’entamer une procédure de classement au titre de la protection du biotope, rien que ça ! À suivre...


LES RÉCITS DE FORESTA Les Récits du 1000 pattes

Les explorations botaniques

Animé par la coopérative d’habitants Hôtel du Nord, le 1000 pattes est un groupe ouvert de voisins (proches ou lointains) qui partent régulièrement en voyage tout à côté de chez eux… Nous explorons et enquêtons dans nos quartiers pour rencontrer, apprendre, agir. Nous créons ainsi des balades à partager au moment des Journées Européennes du Patrimoine puis toute l’année. On vient quand on veut, quand on peut, et même quand on ne vient jamais on peut suivre à distance nos aventures grâce à ces petits récits que l’on reçoit par mel, un peu à l’ancienne, entre correspondance et carnet de voyage.

Les explorations botaniques sont des balades qui invitent à faire ensemble l’inventaire de la flore de Foresta. Guidées par les artistes-cueilleurs du collectif SAFI et les botanistes de l’association Espigaou, par ailleurs habitants de cette partie du territoire, elles permettent d’observer pour se constituer peu à peu une connaissance commune et partager ce que nous raconte le monde végétal des lieux où nous vivons. Les explorations botaniques sont une proposition du collectif SAFI et d’Espigaou dans le cadre de Foresta, un projet porté par Yes We Camp en collaboration avec Hôtel du Nord.

Les conversations marchées

Les conversations marchées sont des invitations lancées par le collectif SAFI et le Bureau des guides du GR2013 à des scientifiques, écologues, botanistes, naturalistes… pour marcher ensemble et éclairer notre regard sur Foresta. Ils nous donnent à voir et à comprendre ce qui constitue nos paysages de proximité, les enjeux qui les traversent et en quoi ils participent d’un écosystème. Les conversations marchées font partie du programme européen Nature 4 Citylife.


LES RÉCITS DE FORESTA Par de multiples marches d’exploration, nous prenons le temps de collectivement observer Foresta. Au travers ses sols, ses arbres, ses paysages, ce site a beaucoup à nous apprendre sur la biodiversité en ville mais aussi sur l’histoire industrielle et sociale de Marseille. En collectant et racontant ses multiples histoires nous espérons contribuer à prendre soin de ces lieux et à les vivre en commun.

www.hoteldunord.coop www.gr2013.fr parcforesta.org


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