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VOYAGE D'UNE VIE Andrew Cassels, navigateur
Aller au bout de ses rêves, c'est ce qu'a brillamment fait Andrew Cassels en devenant le premier Genevois à traverser le Passage Nord Ouest à la voile

En Arctique, cette route maritime de l'extrême relie l'océan Atlantique à l'océan Pacifique, et se caractérise comme étant l'une des zones les plus techniques et périlleuses au monde. Un chef d'oeuvre de la navigation et une expérience de vie inédite que le jeune homme de 37 ans nous raconte, quelques mois après son retour.

5 MOIS, 3 CONTINENTS, 13 ÉTAPES, 19 MILLE KILOMÈTRES
"Après avoir découvert pour la première fois les joies de la navigation en mer à l'âge de 13 ans, j'ai su qu'elle ne me quitterait plus jamais. J'ai eu la chance il y a quelques années de naviguer en Patagonie et en Antarctique, deux lieux qui m'ont fait là aussi découvrir un monde à part, avec une nature sauvage et authentique. C'est ce que je suis allé chercher avec ce dernier voyage de l'autre côté du globe, en y ajoutant l'aspect technique qui nous a valu deux ans de préparation". Sur son Draco en aluminium de 45 pieds, Andrew et son équipage se lancent en avril dernier dans ce voyage de 19 mille kilomètres à travers 3 continents pour une durée de 5 mois. Au départ de l'Europe, cap sur le Groenland et le Canada pour atteindre le point fatidique du passage Nord-Ouest.

LA TRAVERSÉE DU PASSAGE NORD-OUEST

"Après des semaines de navigation au Groenland dans un infini zigzag de glaciers et plaques de glace, nous entamons le passage Nord-Ouest. Cette zone peu cartographiée et dépourvue de toute vie humaine est en constante évolution. Conditionné par la météo, ce passage est connu pour être quasi infranchissable et les chemins qui s'y dessinent se modifient d'un jour à l'autre. Pourtant en arrivant sur place, le passage fut moins périlleux que prévu, force est de constater le peu de glace à l'horizon...
Tenu informé avec des images satellites transmises depuis la terre ferme par Céline, compagne d'Andrew, l'équipage se lance dans la traversée pour une durée de 5 semaines. "Bien que nous n'ayons pas eu autant de glace que prévu, réchauffement climatique oblige, les premiers jours furent tout de même complexes. Les dernières semaines se sont déroulées sans encombre mais dans le brouillard. Au moment de sortir du passage, à l'issu de ce challenge que nous nous apprêtions à relever, les éléments ont joué en notre faveur. En plus de nous avoir laisser passer, ils nous ont permis d'en sortir sous un magnifique soleil, survolés par des dizaines d'oiseaux et entourés par des centaines de morses".
Avis de tempête
Soulagé, fier et empli d'une grande satisfaction, l'équipage fait halte quelques jours pour reprendre des forces. Sur le chemin du retour, en direction de l'Alaska, la mer de Bering s'agite puis se déchaîne. "Nous avons échappé de peu à la plus grosse tempête jamais connue depuis 20 ans ! Vagues de 9 mètres, température glaciale et vent à 120 km/h. Heureusement, nous avons tracé notre route le plus vite possible et sommes arrivés à temps, sains et saufs à bon port".
Il aura fallu 2 mois de récupération pour Andrew et son équipage, tant le voyage fut éprouvant physiquement et mentalement. Mais visiblement, rien ne pourra arrêter le Genevois originaire de Collonge-Bellerive qui reprend déjà la route en ce mois de février, avec sa compagne cette fois. "Nous repartons pour terminer le voyage en direction des Amériques puis nous ramènerons le bateau en Europe".
Ode à la nature

Au détour du voyage de sa vie, Andrew s'est passionné pour la technique et la navigation, mais il restera profondément marqué par la splendeur d'une nature sauvage, pure et sans artifice. "En plus de la liberté infinie que procure le fait d'être en mer, les éléments et les paysages tous plus merveilleux les uns que les autres nous submergent. 5 mois de voyage auront suffit à remplir toute ma vie de souvenirs, tant la nature fut généreuse. Nous avons été acclamé par des centaines de morses, nous avons vécu un tête-à-tête avec un grizzly, nous avons observé des aurores boréales dans le plus grand des silences, admiré des levers et des couchers de soleil d'une longueur extrême durant lesquels le temps semble s'arrêter. Et même lorsque la vie se fait plus rare, on se laisse séduire par le plancton et la mousse fluorescente qui s'emparent délicatement du bateau. Spectacle que jamais je n'oublierai".
