I. INTRODUCTION Inspirés d’une forme traditionnelle rwandaise de résolution des conflits, les Gacaca sont un système de justice populaire qui a été modifié afin de poursuivre les crimes commis pendant le génocide. Quelques années après le génocide, les prisons étaient surpeuplées. En 1998, cette situation a atteint son apogée avec plus de 130 000 détenus, dont la majorité en détention préventive, suspectés de crimes liés au génocide1. C’est ainsi que les autorités rwandaises et une grande partie de la Communauté Internationale ont considéré que cette forme de résolution des conflits locale était l’option la plus adéquate afin de régler l’arriéré judiciaire lié au contentieux du génocide et des massacres de 1994. Le législateur a instauré par la loi organique n°40/2000 du 26/01/2001 les Juridictions Gacaca2. En son article premier, cette loi délimite son champ de compétences : elle « [...] porte sur l’organisation, la compétence et le fonctionnement des Juridictions Gacaca chargées des poursuites et du jugement des infractions constitutives du crime de génocide et d’autres crimes contre l’humanité commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 [...].»3. Le processus a débuté par l’organisation de l’élection des Inyangamugayo4 en octobre 2001. L’étape suivante fut celle de lancement de la phase pilote de collecte d’informations en juin 2002, qui s’est ensuite généralisée à toutes les Cellules5 du pays en janvier 2005. Les premiers jugements ont commencé en mars 2005 dans les Cellules et Secteurs pilotes. Cette phase s’est ensuite généralisée à tout le pays en juillet 20066. Jusqu’en juin 2009, les Juridictions Gacaca auraient jugé 1,5 million de personnes accusées de crimes de génocide7. A la date du 15 mars 2010, le SNJG (le Service National des Juridictions Gacaca)8 déclare qu’il reste 559 dossiers à juger devant les Juridictions Gacaca, toutes catégories confondues9. Depuis lors, plusieurs dates de fin du processus ont été officiellement annoncées et reportées. Le 31 juin 2010 fut pendant longtemps annoncé comme prochaine date de fermeture du processus Gacaca. Néanmoins, à l’heure de la rédaction du présent rapport, la date de clôture a été reportée ultérieurement sans qu’aucune date précise n’ait été fixée. La clôture officielle aura normalement lieu lorsque les Juridictions Gacaca n’auront plus à traiter d’aucun litige.
International Center of Prison Studies, «Prison Brief for Rwanda», accessible à http://www.kcl.ac.uk/depsta/law/research/icps/worldbrief/wpb_country.php?country=39 ; Penal Reform International, «Les juridictions Gacaca et leur préparation», 2001, p10 ; Carina Tertsakian, «Le Château, the lives of prisoners in Rwanda», Arves Books, 2008, p18. 2 Journal Officiel n°6 du 15 mars 2001. La Loi Organique Gacaca fut modifiée plusieurs fois depuis lors tel que nous l’énoncerons au cours du rappel chronologique. 3 Loi Organique n°16/2004 du 19/06/2004. 4 Les Inyangamugayo sont des personnes élues au sein de leur communauté en vertu de leur intégrité, et qui font office de juges au sein du processus Gacaca. 5 La Cellule est la plus petite entité administrative du Rwanda au niveau de laquelle la collecte d’informations et les jugements de la troisième catégorie ont eu lieu. Les Secteur, District, et Provinces constituent, dans l’ordre croissant, les autres entités administratives. 6 Service National des Juridictions Gacaca, « LES JURIDICTIONS GACACA : Réalisations, obstacles et perspectives d’avenir », accessible à http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/Fr/Introduction.htm, 2005. 7 Cf. «Rwanda: Des questions demeurent sur l’efficacité des tribunaux `Gacaca’ », accessible à http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?ReportId=84993, 24 juin 2009. 8 Le Service National des Juridictions Gacaca est l’institution publique rwandaise qui est chargée de suivre, superviser et coordonner les Juridictions Gacaca. 9 Service National des Juridictions Gacaca, « Dossiers à juger par les Juridictions Gacaca au 15/03/2010 », 2010. 1
7