Un immeuble de détention à Villeurbanne

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Immeuble de détention à Villeurbanne I Auvergne Rhône-Alpes

livraison printemps 2023


20 min

fiche signalétique Acteurs

Les chiffres clés

Maîtrise d’ouvrage

Le projet

L’agence d’architecture ANFOS est en charge de ce premier projet d’immeuble de détention. Ces architectes ont été sélectionnés après une analyse des offres et des propositions d’esquisses. Ils se sont présentés avec un groupement de cinq entreprises locales (Rhône), en capacité de prendre en charge l’entièreté des lots du chantier. Un bureau d’étude structure et fuides fait également parti du groupement de conceptionréalisation. Le groupement de conception-réalisation a ensuite suivi un cycle de formation rémunéré de trois semaines englobant un certains nombres de modules nécessaires à la compréhension des enjeux qui soutendent aujourd’hui l’architecture carcérale et le domaine pénitentiaires : apports historiques, sociologiques, géographiques, sécuritaires, techniques, ... Pendant ce cycle de formation, architectes et entreprises ont été notamment amenés à rencontrer d’anciennes personnes détenues, des travailleurs sociaux et des membres du personnelles pénitentiaires. La future directrice de l’établissement, d’ores et déjà identifiée, était à l’origine du programme de ces trois semaines de formation.

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La parcelle urbaine choisie pour l’implantation du projet offre de nombreuses possibilités d’interactions entre l’immeuble de détention et la société extérieure. 1,5 km La programmation déployée à l’échelle de l’îlot, entre l’immeuble de détention et l’immeuble de logement, vient comme un prolongement des usages et programmes déjà présents à proximité, permettant un équilibre 1,3 entre km connexions avec l’extérieur, collectivité maîtrisée et intimité.

Une architecture au service de la (ré)insertion 31

Le calendrier

Janvier et février 2020 : appel d’offres Février à juillet 2020 : concours Septembre 2020 à décembre 2021 : études A partir de janvier 2022 : chantier

Les enjeux architecturaux de cet établissement pénitentiaire résident en partie dans la mise en dialogue d’espaces d’intimité, les cellules, et d’espaces de collectivité, permettant à la fois de travailler son rapport à soi et aux autres, base du processus de (ré) insertion. Par ailleurs, l’architecture développée témoigne d’un réel processus de réflexion sur la fenêtre, les vues et les rapports à l’extérieur.

Le chantier

Le chantier de l’immeuble de détention devrait débuter en janvier 2022, pour une livraison prévue au printemps 2023. Il permettra la création de 30 000 heures de travail d’intérêt général et de 5 contrats d’apprentissage. Le groupement de conception-réalisation travaille de concert avec Bobi Réemploi pour inscrire ce projet dans une dynamique éco-responsable.

Tranches de vie

1,40

En suivant Amad dans l’une de ses journées, découvrez sous un autre angle les espaces qui composent l’immeuble de détention. En complément des parcours présentés, ces tranches de vie permettent d’avoir un aperçu du quotidien dans cet immeuble de détention. 1,40

43

2,70 2,70

1,60

Groupement de conception-réalisation

Vue d’ensemble et programmation

1,60

L’AP - Administration pénitentiaires, département du Rhône.

Retenir l’essentiel

4,20

Maîtrise d’ouvrage déléguée

• 2 plots : un immeuble de détention et un immeuble de logement • une capacité d’accueil de 25 personnes détenues : 5 cellules individuelles et un espace collectif occupent le 2ème, 3ème, 4ème, 5ème, et 6ème de l’immeuble de détention • 4 studios, 7 appartements de trois pièces et 3 appartements de quatre pièces composent les étages de l’immeuble de logement • 3 services de proximité prennent place dans les rez-de-chaussée : une boulangerie, un atelier de réparation et une MAM. • 1 gardien, pour la bonne gestion de la vie quotidienne sur l’ensemble du projet • 1 cœur d’îlot partagé • 12 membres de l’administration pénitentiaire et 7 membres du personnel éducatif pour assurer le suivi, la surveillance et l’accompagnement des personnes détenues

sommaire

4,20

L’APIRIA - Agence publique pour l’immobilier de la (ré)insertion active.

CAF

1,6 km

Préfecture

2,8 km

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4

→ Vue depuis le trottoir faisant face à l’immeuble de détention. Au rez‑de-chaussée, les commerces d’application dynamise le quartier. 2m

4m

6m


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Retenir l’essentiel

→ Vue depuis le trottoir faisant face à l’immeuble de détention, en fin de journée, vers 17h.

Cet immeuble de détention ouvrira ses portes au printemps 2023 à Villeurbanne, dans le Rhône. Il propose une nouvelle réponse programmatique et spatiale de la peine de prison, une peine de privation de liberté. L’identité du projet est portée par une organisation spécifique des usages, au service de la privation de liberté et de la (ré)insertion. En effet l’immeuble de détention, pensé à échelle humaine et pouvant accueillir jusqu’à 25 personnes détenues, est conçu de manière à proposer une gradation de l’intimité, processus permettant de construire des bases solides pour une (ré)insertion future : le rez-de-chaussée de l’immeuble est ouvert sur le quartier et propose deux commerces de proximité (une boulangerie et un atelier de réparation), lieux d’apprentissage et de sociabilité pour les personnes détenues et espace de rencontre et d’ouverture pour les individus extérieurs. Aux 1er et dernier étages de l’immeuble, nous retrouvons l’ensemble des programmes nécessaire à la bonne exécution de la peine : bureau du personnel, espaces d’entretiens individuels, espaces de formation, espaces de rencontre avec les familles et les proches ... Enfin, chaque étage est composé de la même manière : un espace collectif partagé permettant la préparation des repas et l’échange à partir duquel chaque personne détenue peut accéder à sa cellule, comprenant un espace de jour avec un coin cuisine, et un espace de nuit avec une salle d’eau attenante (équipée d’un sanitaire). L’emploi du temps des personnes détenues est rythmé, et pensé au cas par cas. Il propose un équilibre entre temps imposé en cellule, et temps d’autonomie de mouvements dans un périmètre donné. Attention, ce projet ne doit pas être considéré comme un modèle à dupliquer partout et nul part. Il s’agit là d’une proposition architecturale située, répondant à certains des enjeux soulevés aujourd’hui par l’institution carcérale et ouvrant la voie.x vers une nouvelle spatialité de la peine.


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Vue d’ensemble et programmation

61 sur 187 c’est le nombre d’établissements pénitentiaires aujourd’hui situés en marge des villes en France.

↑ Première esquisse d’implantation du projet d’un immeuble de détention et d’un immeuble de logement sur la parcelle définie. → PLAN DE MASSES, situant le projet dans son environnement bâti. Le projet est composé de deux plots : un immeuble de détention et un immeuble de logement.

En 2018, plus de 100 000 peines d’emprisonnement ferme sont prononcées, pour une durée moyenne de 11 mois de détention. Onze mois passés dans l’un des 187 établissements pénitentiaires français, c’est assez de temps pour perdre travail et logement, se désocialiser et prendre le chemin de la récidive. Onze mois dans un immeuble de détention, c’est assez pour tenter de maintenir son travail, son logement, et les relations avec ses proches. C’est assez pour se former, apprendre, échanger, se retrouver avec soi‑même et se confronter à la collectivité dans un cadre donné, pour être prêt à se (ré)insérer dans la société à la fin de la peine de privation de liberté prononcée. Ce projet innovant, regroupant un immeuble de détention et un immeuble de logement autour d’un même cœur d’îlot, est situé en ville, à proximité de nombreux services essentiels pour penser la peine de privation de liberté comme un temps actif au service de la (ré)insertion de la personne condamnée dans la société. La programmation est développée dans ce sens-là, proposant tour à tour des usages en faveur du lien avec la société extérieur, des espaces collectifs réduits et des espaces permettant l’intimité.


CAF

1,6 km

Préfecture

2,8 km

10

20 min

1,5 km

→ Plan de situation permettant de mesurer les connexions entre le projet et les différents services situés à proximité.

1,3 km


UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE

— À l’échelle du quartier, de la ville

Le cahier des charges programmatique à l’origine de ce projet-test a fait l’objet de nombreux séminaires et discussions, avec des professionnels d’horizons différents pour garantir une multiplicité des regards (personnels pénitentiaires, avocats, assistants socials, psychologues, sociologues, représentants citoyens et politiques, architectes, urbanistes …). De ces échanges est ressortie la nécessité de concevoir un programme en dialogue avec les équipements et infrastructures déjà présents dans le quartier, et la ville d’attachement. Loin de recréer une micro-société autonome, ce cahier des charges propose une programmation complémentaire aux services déjà existants. Ainsi, pour certains besoins fondamentaux, garants de la sécurité physiques et affectives des personnes détenues, les membres du personnel pénitentiaires et socio‑éducatif seront amenés à les orienter, voir les accompagner dans certains cas, vers ces services extérieurs, proches. SANTÉ ET SOINS ◟Dans un rayon de 2km se trouve un nombre conséquent de personnels de santé, ainsi qu’un hôpital public. Des cabinets d’infirmiers libéraux sont implantés à proximité. Un pôle psychiatrique se situe également tout près de l’immeuble de détention. À 1,5km de l’établissement pénitentiaire, se trouve un centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie, en capacité d’accueillir, en suivi, des personnes incarcérées dans l’immeuble de détention, et de se déplacer pour des séances collectives de débats et de prévention. Des séances mixtes avec des citoyens extérieurs sont aussi prévues. BESOINS PRATIQUES ◟La préfecture du Rhône est accessible à pied ou en transports en commun pour toutes démarches administratives. Il est en de même pour la Caisse d’Allocations Familiales qui se trouve à vingt minutes à pied de l’établissement pénitentiaire. ◟Concernant les besoins en alimentation et produits de première nécessité, les personnes détenues ont la possibilité de se faire livrer leurs courses deux fois par mois, en commandant au près du Super U ou du Biocoop situés à proximité immédiate de l’établissement. Chacune de ces commandes est faite en présence d’un assistant familial accompagnant les personnes détenues dans leur gestion financière et matériel. En parallèle, une AMAP livre un panier de fruits et légumes, toute les semaine, à chaque personne détenue. Aucun repas n’est pris en charge par l’administration pénitentiaire ou un partenaire privé. Les personnes détenues ont la possibilité de commander, une fois par semaine, le samedi soir, un repas préparé par un restaurateur local.

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UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE Définir et organiser les usages : à l’échelle du quartier, de la ville

INSERTION PROFESSIONNELLE ET FORMATION ◟Les deux locaux d’activités créés et implantés au rezde-chaussée de l’immeuble de détention servent de lieux d’application professionnelle pour certaines des personnes détenues, faisant le choix de s’inscrire en apprentissage en boulangerie, pâtisserie, mécanique ou électronique. Si une personne détenue possède déjà un diplôme pour l’un de ces postes, elle peut prétendre à un emploi dans ces commerces d’application. ◟Lorsqu’une personne condamnée, incarcérée dans l’immeuble de détention, possède déjà un emploi, et si cet emploi n’entre pas en contradiction avec sa peine, elle le conserve à condition que ce dernier soit accessible en vélo, à pied ou en transports en commun. ◟Toute personne détenue dans l’immeuble de détention a une obligation d’emploi, à temps partiel, pour subvenir à ses propres besoins. Des conventions sont signées avec des entreprises situées à Villeurbanne ou sur le territoire du Grand Lyon. Lorsque la personne détenue ne possède aucune qualification professionnelle, elle est accompagné dans la mise en place d’un parcours professionnel en partenariat avec les Centres de Formation du territoire. RELATIONS SOCIALES ET LIENS AVEC L’EXTÉRIEUR ◟Les deux commerces d’application permettent aux personnes détenues d’entretenir des échanges sociaux avec des personnes de l’extérieur. La situation géographique de l’établissement pénitentiaire assure une connexion entre celui-ci et la ville par le biais d’une grande diversité de moyens de transport. Les proches des personnes détenues peuvent ainsi facilement leur rendre visite. Lors de ces visites, les personnes détenues sont autorisées à quitter, pendant 45min à 1h30 l’enceinte de la détention pour se rendre dans un rayon de 2km maximum. Cette dynamique est mise en place pour amoindrir l’impact de la détention sur les proches des personnes incarcérées et favoriser le lien avec l’extérieur. La situation géographique de l’établissement facilite également la venue d’intervenants extérieurs et donc l’enrichissement des relations sociales. ◟La présence d’intervenants extérieurs permet d’assurer la mise en place d’activités constructives parallèles à la formation et à l’emploi, éveillant la curiosité des personnes détenues, et travaillant leur confiance en eux. L’implantation géographique du bâtiment permet l’organisation de sorties culturelles et sportives à proximité, et induit l’absence de tels espaces dans le projet en lui-même.


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→ Coupe perspective sur les deux plots du projet. A gauche l’immeuble de logement, à droite l’immeuble de détention ; reliés par le cœur d’îlot partagé. 1m

2m

3m


UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE

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II Définir et organiser les usages Ces usages, définis par un cahier des charges programmatique, s’organisent selon deux échelles : une échelle restreinte, celle du projet et de l’îlot ; une échelle plus large, celle du quartier et de la ville.

— À l’échelle du projet

L’immeuble de détention prend place au cœur d’un projet global, comprenant également un immeuble de logement et un cœur d’îlot conçu de façon transversale. La programmation de ces deux bâtiments dialogue de manière à s’apporter mutuellement, et à créer des liens significatifs avec le reste du quartier. L’IMMEUBLE DE DÉTENTION. ◟Le rez-de-chaussée de l’immeuble de détention est conçu comme un pivot entre l’établissement pénitentiaire et l’extérieur, le quartier, la ville, et plus largement la société. Au niveau de ce rez-de-chaussée se trouve d’abord l’entrée sécurisée de l’immeuble de détention avec une zone d’accueil pour les personnes extérieures, une zone de contrôle pour les personnes détenues ainsi que les boîtes aux lettres des personnes détenues, domiciliées ici le temps de leur peine. Ce rez-dechaussée comprend également deux commerces d’application professionnelle pour les personnes détenues, de part et d’autre de l’entrée de l’immeuble, ouverts sur l’extérieur : une boulangerie et un atelier de réparation mécanique et électronique. ◟Le 1er étage comprend un espace d’échange collectif et de formation, trois espaces de rencontres dédiés aux visites extérieures des proches ainsi qu’un espace de repos réservé aux membres du personnel pénitentiaire et socio-éducatif. ◟Du 2ème au 6ème étage, on retrouve les étages courant de la détention, comprenant chacun : cinq cellules individuelles, un espace collectif de prise des repas, un espace collectif de partage, ainsi qu’un balcon partagé donnant sur la rue. La circulation verticale dessert, au niveau de chaque demi-palier, un petit balcon réservé uniquement au personnel pénitentiaire et socioéducatif. ◟Le dernier étage est quant à lui, composé d’une salle d’entretien individuel, d’un espace partagé entre l’ensemble des codétenus de l’immeuble et les membres du personnel et d’une salle neutre, appropriable selon les besoins.

→ Axonométrie programmatique - Immeuble de détention


UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE Définir et organiser les usages : à l’échelle du projet

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L’IMMEUBLE DE LOGEMENT. ◟Au rez-de-chaussée se trouvent l’entrée de l’immeuble de logement avec ses boîtes aux lettres, ainsi qu’une Maison d’assistants maternels aussi appelée MAM. Ce lieu peut accueillir jusqu’à seize jeunes enfants, dont douze en garde continue sur la journée. Deux places sont réservées à l’immeuble de détention, pour des proches de personnes détenues qui souhaiteraient déposer leurs enfants lors d’une visite. Les membres du personnel pénitentiaire peuvent également bénéficier de ce système de garde. Le rez-de-chaussée comprend également le bureau du gardien. ◟Le logement du gardien, quant à lui, est situé au 1er étage. Studio, T2, T3 et T4 se répartissent ensuite, en fonction des étages, jusqu’au 7ème et dernier. LE CŒUR D’ÎLOT. Initialement séparé en deux par un muret pour rassurer les futurs acquéreurs dans l’immeuble de logement, les différents temps de concertation avec les habitants du quartier, des psychologues, des éducateurs, des membres de l’administration pénitentiaires, les architectes et les pouvoirs publics, ont finalement abouti au dessin d’un cœur d’îlot conçu comme un tout, et dont une large partie est partagée entre l’immeuble de logement et l’immeuble de détention. Ce cœur d’îlot propose différents usages, complémentaires : chaque bâtiment dispose d’un espace privatif en stabilisé qui débouche sur une zone plantée, partagée et couverte au centre permettant différents usages individuels et collectifs : jardinage, repas, bricolages…

→ Axonométrie programmatique - Immeuble de logement


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→ Plan perspective sur le cœur d’îlot partagé entre l’immeuble de détention et l’immeuble de logement. Habitant.e.s et personnes détenues assistent actuellement à un cours de bricolage pour apprendre à fabriquer son propre mobilier en bois. Nord 1m

2m

3m


PERSONNES CONDAMNÉES POUR UN VOL OU AUTRE ATTEINTE AUX BIENS, OU POUR UNE ATTEINTE À LA LÉGISLATION SUR LES SUBSTANCES ILLICITES Homicide et atteinte volontaire ayant entraîné la mort

12%

Viol et agression

12%

22

18,4% 26,7%

Vol et autre atteinte aux biens Atteinte à la législation sur les substances illicites

19,1%

Atteinte à l’autorité de l’Etat

5,1%

Circulation, autre qu’homicide et blessure

5,3%

45,8%

96,7% hommes

%

% 30

%

%

%

25

20

15

10

5%

1,4%

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c’est le nombre maximum de personnes détenues que peut accueillir cet immeuble de détention.

PERSONNES CONDAMNÉES À UNE INCARCÉRATION, ÂGÉES DE 21 À 30 ANS 4,2% 8,4%

16%

29,5%

SITUATION FAMILIALE DES PERSONNES DÉTENUES

30 à 40 ans

30,4%

35,5%

19,5%

16% 6,1% 0,4%

25 à 30 ans

célibataire

51,9% ?

21 à 25 ans

18 à 21 ans 16 à 18 ans

II Planifier un établissement pénitentiaire à taille humaine

Graphique haut, gauche — Source : EX3/SDEX/SA/DAP/Ministère de la Justice - Statistiques trimestrielles des personnes écrouées en France II 1er janvier 2020

PROFILS ACCUEILLIS. ◟Les catégories de population pénale ont été identifiées et choisies en amont de la conception du projet afin que l’architecture conçue et réalisée soit adaptée à leurs besoins en termes d’incarcération et d’accompagnement. L’ensemble des personnes accueillies dans cet immeuble de détention, uniquement des hommes, sont condamnées pour vol(s) ou atteinte(s) aux biens, sans atteinte à la personne, ou pour atteinte à la législation sur les produits stupéfiants. Leur logement initiale doit se situer dans un rayon de 10 à 40 km. Leur situation personnelle varie.

Graphique bas, gauche — Source : Source : DAP II 1er juillet 2018

50 à 60 ans

40 à 50 ans

1. La sécurité dynamique est fondée sur l’humain, la connaissance de l’autre, le respect mutuel, la recherche de relations harmonieuses et la promotion du changement individuel. En conséquence, la sécurité dynamique se développe autour des relations positives entre les agents pénitentiaires et les personnes détenues. Ces relations favorisent la reconnaissance de la personne détenue par l’agent pénitentiaire qui adapte sa position professionnelle. Et cette adaptation contribue à prévenir les conflits. II Source : «La sécurité dynamique», ENAP, 2018

Graphique haut, droite — Source : AP II 1er mars 2021

60 ans et +

en couple

21 à 30 ans

UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE

23

3,3%

femmes

Violence et autre atteinte à la personne

Autre

INDIVIDUS DE SEXE MASCULIN

séparé, divorcé ou veuf

non renseigné

5,8%

11,9%

Graphique haut, droite — Source : EX3/SDEX/SA/DAP/Ministère de la Justice - Infocentre Pénitentiaire (posttraitement) II 1er janvier 2020

La taille de cet immeuble de détention test, a été pensée de manière à être un moyen favorisant la (ré)insertion et luttant contre la récidive. En effet, les recherches menées sur les prisons norvégiennes suggèrent que les établissements de petite taille ont de meilleurs taux de (ré)insertion et permettre une vraie qualité de vie au travail pour le personnel. Concevoir un établissement pénitentiaire à taille humaine, c’est permettre la mise en place et la réussite d’une sécurité dynamique1 et ainsi élaborer des trajectoires de (ré)insertion sur mesure pour les personnes détenues. CAPACITÉ DE L’ÉTABLISSEMENT. ◟25 personnes détenues

UN QUOTIDIEN FACILITÉ. ◟L’architecture et le système de gestion cherche à fluidifier au maximum les déplacements à l’intérieur du bâtiment. A chaque temps de la journée correspond un certains nombre de droits et devoir, notamment concernant les mouvements des personnes détenues. Lorsque les personnes détenues sont amenées à quitter l’établissement (emploi, rendez-vous socio-médicaux, formation ...), ils s’équipent d’un bracelet électronique afin qu’une surveillance distance puisse être assurée. DE LA SURVEILLANCE À L’ACCOMPAGNEMENT. ◟Le personnel pénitentiaire a un rôle éducatif et une bonne connaissance des personnes détenues , du fait de la gestion en petit groupe de 5 personnes détenues. Ce projet fait le choix de redonner une place centrale à la surveillance humaine, avec une place pour la sécurité électronique réduite au minimum (caméra, bracelet électronique, détecteur de métaux).


UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE

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II Trouver l’équilibre entre sécurité, confiance et responsabilisation UN CONTRAT DE CONFIANCE ENTRE PERSONNES DÉTENUES ET MEMBRES DU PERSONNEL. ◟Absence d’œilleton sur les portes des cellules. Le personnel pénitentiaire peut frapper au quotidien au porte, et la personne détenue est dans l’obligation d’ouvrir (en cas de douche / sanitaire, le personnel revient dix minutes après). LE BRACELET ÉLECTRONIQUE, GARANT D’UNE CERTAINE LIBERTÉ DE MOUVEMENTS. ◟ La journée, les personnes détenues « libres » de leur mouvement, à l’échelle de leur étage ou du bâtiment, selon les horaires, sont équipées d’un bracelet électronique, qu’elles peuvent retirer lors du retour en cellule à 20h. Ce système permet de garantir la sécurité de l’immeuble de détention, du personnel et du quartier tout en favorisant l’autonomie des personnes détenues. CADRE DE VIE ET RESPONSABILITÉS ◟Ici, il ne s’agit pas d’assister les personnes détenues dans leurs actions du quotidien, mais bien de les accompagner. Les personnes incarcérées ne reversent pas de loyer. Ce choix a été fait de manière à permettre à ces individus d’être en capacité de payer le loyer de leur logement personnel à l’extérieur de la détention, de manière à assurer un maintien de leur logement pendant l’exécution de leur peine et faciliter la sortie de détention. C’est aussi un engagement qui a été pris par l’Administration pénitentiaire vers les familles et proches de personnes détenues pour diminuer les effets collatéraux de l’incarcération d’un proche. Dans la même dynamique, une laverie est à disposition des personnes incarcérées, qui sont dans l’obligation de gérer leur linge. Parallèlement, chaque personne détenues versent à l’Administration pénitentiaire une contribution symbolique pour les charges collectives et a, à sa charge, l’achat de l’ensemble de ses denrées et produits nécessaires à son quotidien. Chaque personne détenue est suivie par un assistant familial pour l’accompagnée dans sa gestion financière et matériel. Il en va de même avec l’entretien des locaux : les personnes détenues sont individuellement responsable du bon entretien de leur cellule, et un planning collectif des tâches quotidiennes, en concertation, est mis en place à l’échelle de chaque étage de la détention, et à l’échelle de l’immeuble pour les espaces partagés.

Je travaille dans la MAM «A petits pas», au rezde-chaussée de l’immeuble de logement. Aujourd’hui je garde notamment la fille de Nour, formatrice en comptabilité, qui intervient deux jours par semaine dans l’immeuble de détention.

Amad est une personne détenue dans l’immeuble de détention depuis six mois, pour trafic de drogues. Sa cellule est actuellement au 2ème étage de l’immeuble. Il suit une formation en alternance en comptabilité.

→ Voici un exemple des parcours effectués par Amad, personne détenue de l’immeuble de détention, et Léa assistante maternelle de la MAM, un jeudi matin.


II Être au plus proche des codes spatiaux résidentiels

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N

UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE

côté cour

Les architectes de ce projet ont conçu les espaces de manière à réduire au minimum les différences qui peuvent exister entre la vie en prison et la vie en liberté, dans la mesure où ces différences tendent à atténuer le sens de la responsabilité du détenu ou le respect de la dignité de sa personne, le tout dans le respect de la privation de liberté, base de la sanction pénale prononcée.

R

GRADATION DE L’INTIMITÉ. ◟L’architecture propose une gradation de l’intimité depuis la rue jusqu’à la cellule de détention. Deux commerces d’application, dans lesquels les personnes détenues ont leurs habitudes donnent sur le trottoir de l’immeuble, permettant un premier degrés de familiarisation en revenant d’une formation, d’un rendez-vous ou d’une journée de travail. Ensuite, la personne détenue franchie une porte réservée aux habitants de cet immeuble et aux membres du personnel, derrière laquelle elle retrouve un surveillant pour toutes les formalités administratives, ainsi que sa boîte aux lettres nominatives. Puis la personne détenue accède à la circulation verticale avant d’arriver sur le palier de son étage de détention : ici elle se retrouve dans un espace partagé avec un nombre très réduit de personnes (cinq personnes détenues et quelques membres du personnel). Enfin, elle accède à sa cellule par une porte située en retrait par rapport à la vie de l’espace collectif. L’entrée de la cellule et dessinée de manière à attirer la vue sur l’extérieur par la fenêtre située dans l’axe, avant que le regard de ne pose sur l’espace de vie puis de nuit. L’espace intime n’est pas visible depuis l’entrée de la cellule. PERMETTRE L’APPROPRIATION ET L’ADAPTATION. ◟Le dessin de la cellule a été pensé de manière à laisser des espaces vides, pouvant être occupés de manières différentes selon les moments de la journée. ◟Toutes les cellules sont équipées de volets à projection, et de nombreuses sources de lumière avec plusieurs interrupteurs. UNE FAÇADE DE LOGEMENT, VALORISANTE. ◟Le dessin de la façade est celui d’une façade de logement, valorisante et évitant toute stigmatisation. Cela induit également la possibilité d’une réversibilité programmatique (de l’immeuble de détention à l’immeuble de logement).

côté rue → Plan d’un étage courant de l’immeuble de détention. En ocre, on retrouve les espaces collectifs partagés à l’échelle d’un étage (cuisine commune, balcon, salle multi-usages). En bleu, les cellules individuelles des personnes détenues, permettant l’intimité. Nord 1m

2m

3m


UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE Être au plus proche des codes spatiaux résidentiels

DES VOLUMES SIMILAIRES D’UN IMMEUBLE À L’AUTRE. ◟Les volumes sont identiques à ceux déployés dans l’immeuble de logement : même hauteur sous plafond, même rythme en façade, taille d’ouverture identique … DES VUES AU SERVICE DU MAINTIEN DES LIENS AVEC L’EXTÉRIEUR. ◟Le travail des vues depuis les cellules de l’immeuble de détention permet une connexion visuelle au quotidien de la société et favoriser ainsi la « normalité » : vivre en ville, c’est vivre avec le vis-à-vis, les bruit de la rue, etc ... UNE MATÉRIALITÉ AU SERVICE D’UN BIEN-ÊTRE. ◟Enfin, la pierre massive fut le matériau principal retenu pour les façades : il garantit un confort thermique, acoustique et d’usages. Parallèlement, un travail de briques ajourées permet de créer des rapports avec l’extérieur de différentes natures. Les matérialités des sols, parquet et carrelage, ont été choisies de manière à prolonger la continuité avec la vie dans un logement, hors détention.

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UN PROJET GLOBAL ET UNE NOUVELLE RÉPONSE SPATIALE ET PROGRAMMATIQUE

II Travailler et mettre en œuvre la privation de liberté La définition première de la sanction pénale réside dans la privation de liberté comme énoncé dans les Règles Nelson Mandela (2015) : «Les objectifs des peines d’emprisonnement et mesures similaires privant l’individu de sa liberté sont principalement de protéger la société contre le crime et d’éviter les récidives. Ces objectifs ne sauraient être atteints que si la période de privation de liberté est mise à profit pour obtenir, dans toute la mesure du possible, la réinsertion de ces individus dans la société après leur libération, afin qu’ils puissent vivre dans le respect de la loi et subvenir à leurs besoins ». Ici, le quotidien des personnes détenus, régit par le personnel pénitentiaires, propose une gradation des libertés selon les moments de la journée. UNE GESTION DU TEMPS ET DES ACCÈS PÉDAGOGIQUE DANS UNE LOGIQUE DE RESPONSABILISATION ET DE CONFIANCE. ◟Les personnes détenues sont libres de leurs mouvements de 7h à 20h, en moyenne, à l’échelle de leur étage et de certains espaces partagés, selon les moments. ◟Un accès à l’extérieur est permis librement, sur des temps donnés, contrôlés. ◟Les visites de la famille et des proches sont planifiées sur des plages horaires données. Les visites ont lieu au 1er étage, dans la cour ou dans un périmètre de 2km sur un temps donné (de 45min à 1h30). Les visiteurs ayant de jeunes enfants ont la possibilité de déposer leurs enfants à la MAM pour une durée déterminée, située au RDC de l’immeuble d’en face, partageant le même cœur d’îlot, afin de profiter d’une visite entre adultes, nécessaires à la vie du couple et à la prise de certaines décisions. ◟Les sorties extérieures à l’immeuble de détention (courses, soins, formations, emplois …) se font accompagnées d’un éducateur ou équipé d’un bracelet électronique.


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Une architecture au service de la (ré)insertion

Le choix de la terminologie «immeuble de détention» n’est pas arrivé par hasard. Il a été induit par les architectes du projet qui y voyez là une manière de faire référence à la notion d’habitat. Habiter un lieu, c’est exister et prendre place dans la société, c’est pratiquer les usages communs du quotidien qui sont directement liés à l’habitat : manger et se faire la cuisine, recevoir, se divertir et se détendre, travailler, dormir dignement en étant protégé, prendre soin de soi, avoir une intimité, etc. Redonner un lieu défini, personnel et appropriable aux personnes incarcérée, c’est leur donner une existence. Habiter un lieu, être résidant, avoir son « chez-soi » et voisiner sont autant d’éléments qui rendent possible la reconstruction du lien social et la reconstruction de soi : l’habitat participe ainsi à la réinsertion des personnes détenues. Gérer son intimité relève d’un enjeu à la fois social et psychologique puisqu’elle permet de préserver son intégrité. Les enjeux architecturaux de ce projet d’établissement pénitentiaire résident en partie dans la mise en dialogue d’espaces d’intimité, les cellules, et d’espaces de collectivité, permettant à la fois de travailler son rapport à soi et aux autres, base du processus de (ré)insertion dont la mise en œuvre se fait pendant le temps de la peine.


UNE ARCHITECTURE AU SERVICE DE LA (RÉ)INSERTION

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II Permettre l’intimité : le dessin de la cellule ou espace de vie privatif

[Aparté : emploi du temps type] EN SEMAINE

🕖 7h à 8h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage 🕗 8h à 13h30 — Emploi et/ou formation 🕐 13h00 à 14h — Repas seul ou partagé à l’échelle de l’étage 🕑 14h à 17h — Emploi et/ou formation et/ou interventions extérieures et/ou sortie 🕔 17h à 18h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage, accès libre à la cour extérieure, accès au dernier étage (espaces partagés et buanderie) 🕕 18h à 19h — Temps de discussion collectif à l’échelle de l’étage 🕖 19h à 20h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage 🕗 20h à 7h — Retour en cellule

Permettre l’intimité, c’est spatialiser un cadre garant de la sécurité psychique et affective des personnes détenues, une condition sine qua non à une (ré)insertion constructive. L’espace personnel constitue une référence, un outil de construction d’un monde à soi et, pour certains, un outil de construction personnelle. Cet espace vital doit notamment permettre d’être seul. DESCRIPTION. ◟Chacune des cellules est composée d’un espace jour avec un frigo, un évier et deux plaques de cuisson et d’un espace nuit avec un lit une place, un mur de rangements, et une salle de bain comprenant une douche, un sanitaire et un lavabo. Le sol de l’espace de jour jusqu’au mur de rangement, en passant par le lit, est en parquet. L’espace de cuisine, l’entrée et la salle de bain sont en carrelage. Ces espaces sont éclairés naturellement par deux ouvertures décrites ci-dessous. Chaque cellule est équipée de deux plafonniers et des spots LED supplémentaires sont disposées au dessus de l’espace dédié à la préparation du repas, au dessus du lavabo de la salle de bain, et dans le mur de rangement faisant office de tête de lit. Les personnes détenues ont la possibilité d’ajouter meubles, décorations ... sur validation de l’administration pénitentiaire. GRADATION ET RESPECT DE L’INTIMITÉ. ◟Les portes de cellules ne sont pas équipées d’œilleton, et un contrat de confiance est passé entre les personnes détenues et le personnel pénitentiaire pour assurer la sécurité de tous. ◟En entrant dans leur cellule, les personnes détenues ont une vue dégagée sur l’extérieur et un apport généreux de lumière naturelle. Un large muret d’1,20m de hauteur sépare visuellement l’entrée avec le reste de la cellule. Cette mi-hauteur laisse passer le regard et permet d’avoir une vue d’ensemble sur la cellule, seule la salle de bain n’est visuellement pas accessible. ◟Le dessin des ouvertures sur l’extérieur accompagne la gradation de l’intimité. L’entrée des cellules fait face à une fenêtre à deux ouvrants, située au niveau de l’espace de jour. Elle est équipée de volet extérieur manuel, à projection. La personne détenue est libre concernant l’ouverture et la fermeture des volets comme des ouvrants. Au niveau du coin nuit se trouve une seconde ouverture, de taille plus modeste, dont l’embrasure permet une assise sur le mur de pierre. En façade, cette ouverture est dissimulée par un système de briques ajourées, permettant l’apport de lumière et d’air naturel, tout en favorisant intimité et introspection.

UNE ARCHITECTURE AU SERVICE DE LA (RÉ)INSERTION

ROMPRE AVEC LE SCHÉMA CLASSIQUE DE LA PRISON Des cinq sens, la vue est un des plus sollicités dans un établissement pénitentiaire : le surveillant use de ce sens pour exercer une grande partie de la mission qui lui est confiée. En parallèle, la personne détenue use de nombreux stratagèmes pour s’en extraire, et espérer quelques moments d’intimité ou de lâcher-prise. Les rapports de force, qui s’exercent entre personnes détenues, ou entre personnes détenues et membres du personnel, utilisent en grande majorité ce sens. Une prison, c’est une sorte de scène de théâtre comme l’illustre si bien Laurent Solini dans l’ouvrage Faire sa peine. Faire sa peine, c’est savoir se mettre en scène, et jouer le bon rôle au bon moment. Nous savons que ces mécanismes sont néfastes au processus de (ré)insertion. Les architectes de ce projet ont conçu les cellules de manière à rompre avec ce phénomène, et permettre l’intimité dans le cadre d’un contrat de confiance.

L’IMPORTANCE DU COLLECTIF DANS LE PROCESSUS DE (RÉ)INSERTION Aménager des espaces restreints de convivialité et d’activité permettant aux personnes détenues de se retrouver en petit groupe, à l’échelle de leur étage, permet de créer un intermédiaire entre l’espace personnel de la cellule et le tout collectif de la société extérieure. Ces espaces permettent une banalisation de la vie relationnelle et sociale des personnes détenues, proche de ce que nous vivons dehors, dans la société. L’usage de ces espaces collectifs permet également de créer des repères spatio-temporels, appuis au processus de (ré)insertion. Ces espaces de vie collective induisent également la mise en place d’un quotidien dont chaque personne détenue est garante : ménage, repas, temps d’échange, respect... C’est en participant à cette vie quotidienne que chaque personne détenue trouve et consolide sa place au sein de la collectivité, et par extension de la société.

SAMEDI 🕖 7h à 11h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage 🕚 11h à 12h30 — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage & accès libre aux espaces partagés du 1er et dernier étage 🕧 12h30 à 14h — Repas collectif à chaque étage, préparé par l’une des personnes détenues selon un planning 🕑 14h à 16h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage 🕓 16h à 18h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage & accès libre à la cour extérieure 🕕 18h à 21h00 — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage & accès libre aux espaces partagés du 1er et dernier étage 🕘 21h à 7h — Retour en cellule DIMANCHE 🕖 7h à 11h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage 🕚 11h à 12h30 — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage, accès libre aux espaces partagés du 1er et dernier étage & accès libre à la cour extérieure 🕧 12h30 à 14h — Repas collectif à chaque étage, préparé par l’une des personnes détenues selon un planning 🕑 14h à 16h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage 🕓 16h à 18h — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage & accès libre à la cour extérieure 🕕 18h à 20h00 — Liberté de mouvement au niveau de chaque étage & accès libre aux espaces partagés du 1er et dernier étage 🕗 20h00 à 7h — Retour en cellule


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→ Coupe perspective sur l’espace collectif du 2ème étage de l’immeuble de détention. Il est 18h45, et les cinq co-détenus font le point avec leur référente sur les points positifs et négatifs de la journée, en transmettant les difficultés et les tranches de joie de la journée. Cela permet un retour au calme et à l’intimité dans des journées bien rythmées. 0,5m

1m

2m


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II Le travail de la fenêtre comme spatialisation de la (ré)insertion

La fenêtre est un élément fort, permettant le rapport à soi, aux autres, au temps qui passe, ou encore à l’extérieur. Selon le dessin de cette ouverture, ces différents rapports sont plus ou moins favorisés. Les ouvertures des étages de la détention, dans les cellules et les espaces collectifs, ont été pensées pour permettre de travailler ces différents rapport à des degrés divers. DES VUES AU SERVICE DU CONTACT AVEC LA SOCIÉTÉ EXTÉRIEURE À LA DÉTENTION. ◟ Le projet est intégrée au tissu urbain et les ouvertures, tant de l’immeuble de détention que de l’immeuble de logement, donnent sur la rue et le cœur d’îlot. De ce fait, depuis les cellules, les personnes détenues voient en arrière plan des immeubles de logement, et au premier plan des éléments et actions de vie quotidienne. Cela permet de nourrir un maintien visuel avec la société et ainsi favoriser le lien avec la «normalité». DES VUES AU SERVICE DU CONTACT AVEC LA SOCIÉTÉ EXTÉRIEURE À LA DÉTENTION. ◟Plusieurs typologie d’ouvertures sont développées pour permettre différents rapports à l’extérieur. Une large ouverture, située à l’axe de l’entrée de la cellule, permet un rapport direct avec l’extérieur, le temps qu’il fait et le moment de la journée. Possédant deux ouvrants, cette ouverture permet également l’aération de la cellule, et la connexion avec les bruits de la ville. A côté, se trouve une seconde ouverture, toujours dans la cellule, qui a été travaillé de manière à filtrer les vues et ainsi induire un rapport plus fort à l’intime. L’embrasure de cette fenêtre permet l’assise et l’introspection. LA FENÊTRE, MÉDIUM D’APPROPRIATION. ◟Il était primordiale que ces ouvertures soient équipées de système d’occultation de manière à permettre à la personne détenue d’être maître des apports de lumière et d’aire, selon ses besoins. Ainsi la grande fenêtre est par exemple équipée de volets pliants dans l’embrasure, à projection, permettant différents états lumineux.

→ Extrait de collages développés en phase de recherche pour questionner la question des vues depuis les cellules et leur(s) impact(s) sur le quotidien de la personne détenue.


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La vue sur autre bâtiment de l’établissement pénitentiaire favorise

La vue sur un champs, à la campagne, ou sur des montagnes favorise

La vue sur un paysage calme, dépaysant, favorise

La vue sur un immeuble ancien, en ville, favorise

La vue sur un immeuble récent, en ville, favorise

la sérénité et le calme

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la sérénité et le calme

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la sérénité et le calme

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la sérénité et le calme

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la sérénité et le calme

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l’introspection

l’introspection

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l’introspection

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l’introspection

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l’introspection

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le lien avec l’évolution de la société

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le lien avec l’évolution de la société

le lien avec l’évolution de la société

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le lien avec l’évolution de la société

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le lien avec l’évolution de la société

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la perception du rythme de la journée

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la perception du rythme de la journée

la perception du rythme de la journée

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la perception du rythme de la journée

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la perception du rythme de la journée

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→ Vue sur ... Travail sur les vues et leurs impacts potentiels sur la personne détenue à partir du tableau de Salvador Dalí, «Figura en una finestra»


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II Maintenir des liens avec l’extérieur

Le travail du maintien des liens avec l’extérieur est un axe majeur de réflexion pour l’administration pénitentiaire et l’Agence publique pour l’immobilier de la justice. De études menées en interne et en externe montrent que le maintien des liens avec l’extérieur est une condition nécessaires à la (ré)insertion des personnes détenues. Il leur permet de rester informés des événements et de la réalité de la vie hors détention, de conserver ou développer leurs compétences sociales et leurs relations avec des personnes extérieures, de continuer à assumer et favoriser la prise de responsabilités liées à ces relations (par exemple, en tant que parent). FACILITER L’ACCÈS DES PERSONNES EXTÉRIEURS, LEUR DONNER ENVIE DE VENIR. ◟L’immeuble de détention est implanté à Villeurbanne, avec un réseau de transports et d’accès diversifiés : transports en commun, accès et stationnement voitures, accès piétons, accès poussettes, accès pour les personnes à mobilité réduite… Le choix de cette parcelle a été fait dans le but de favoriser le maintien des liens familiaux et amicaux, de faciliter le quotidien du personnel pénitentiaire et socio-éducatif, l’intervention de personnes extérieures, les livraisons, l’accès aux services et infrastructures publics. Le projet inclut, au niveau de l’immeuble de logement, une maison d’assistants maternels dont deux places sont réservées pour les proches de personnes détenues qui souhaiteraient déposer leur(s) enfant(s) pendant leur visite. Il s’agit d’un dispositif favorisant le maintien des liens, et facilitant les visites des proches.

Je m’appelle Pauline et je suis comédienne de formation. J’ai monté mon collectif d’artistes il y a quelques années et en parallèle j’interviens régulièrement au près de public prioritaire, de vrais moments de plaisir !

Je suis incarcéré depuis quelques mois déjà et pour encore deux ans. Heureusement la peine est pensée de manière à me permettre de continuer à assumer mon rôle de conjoint et de père.

C’est notre petite routine du samedi depuis quelques mois avec Léo : rendre visite à son père ! Selon les semaines on se rend une petite heure au parc, ou on profite d’un atelier dans le cœur d’îlot. Les jours de pluie on se retrouve au 1er étage.

→ Le récit de ces trois parcours, un samedi matin, montre comment le quotidien de l’immeuble de détention s’enrichie des liens permis avec l’extérieur.

DES ESPACES, AU SEIN DE L’IMMEUBLE, VECTEURS DE LIENS AVEC L’EXTÉRIEUR. ◟La conception du projet propose des lieux susceptibles d’entraîner la création de nouveaux liens avec l’extérieur. Les deux commerces d’application professionnelle (boulangerie et atelier de réparation) entraînent de fait une relation artisan / client, bénéfique pour les personnes détenues qui sont ainsi amenées à dialoguer avec des personnes extérieures, et bénéfiques pour la société, qui met des visages et des histoires devant le mot «prisonnier», un manière de sensibiliser au rôle collectif que les citoyens ont à jouer dans la (ré)insertion des personnes condamnées. Le cœur d’îlot joue un rôle similaire, à l’échelle d’un groupe réduit d’individus : entre habitants de l’immeuble de logement, personnes détenues et membres du personnel pénitentiaire et socio-éducatif. Enfin, le 1er étage de l’immeuble de détention comprend trois espaces de rencontres dédiés aux visites extérieures des proches.


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Tranches de vie Un projet au service de l’amélioration des conditions de détention pour une (ré)insertion dans une dynamique constructive, responsabilisante pour les personnes détenues.

En suivant Amad dans l’une de ses journées, découvrez sous un autre angle les espaces qui composent l’immeuble de détention. En complément des parcours présentés, ces tranches de vie permettent d’avoir un aperçu du quotidien dans cet établissement pénitentiaire qui se pose aujourd’hui comme une alternative constructive, en faveur de la (ré)insertion des personnes condamnées.


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au chômage depuis 3 ans célibataire, sans enfant de nationalité française

5 ans

installé à Villeurbanne

Villefranche sur-Saône

21 ans

-

football

télévision

AMAD immeuble de détention

Portrait n°1 → Amad est une personne détenue dans l’immeuble de détention. Voici son profil

BEP

-

Vols ou atteinte aux biens ou atteinte à la législation sur les substances illicites Absence de consommation régulière

(père) (mère) • ouvrier • • au foyer •


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→ Amad se lève à 6h du matin et positionne ses volets en position projection.


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Après une douche rapide, il profite encore d’un petit moment de solitude en buvant son café avec les bruits de la ville qui s’éveille.


50

4,20

1,60

1,40

Après une matinée bien remplie à travailler sur la comptabilité de la boulangerie, Amad prépare le déjeuner pour lui et l’un de ses co-détenus dans sa cellule.

2,70


R

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Repas qu’ils partagent dans l’espace collectif. Le midi, à cet étage ils sont que tous les deux. Les trois autres co-détenus de l’étage suive un apprentissage en restauration et sont de service le midi.


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Il est 20h30, l’heure à laquelle en semaine chaque personne détenue doit rejoindre sa cellule. Amad profite des dernier rayons de soleil, assis sur le rebord de sa fenêtre, à l’abris des regards.


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Le mot de la fin !

Cet immeuble de détention est le premier à voir le jour en France. En réponse aux problématiques que connaît aujourd’hui le système pénitentiaire français, ce projet, livré en 2023, se présente comme une réponse adéquate. Il permet la privation de liberté tout en mettant réellement l’accent sur la (ré)insertion des personnes condamnées et incarcérées. Bien loin des petites avancées en matière de détention jusqu’alors mise en place par l’administration pénitentiaire et l’Agence publique pour l’immobilier de la justice, voici un projet qui illustre un véritable bond en avant dans les politiques publiques. Derrière ce projet, aujourd’hui expérimental, se cache une volonté de permettre la privation de liberté dans un cadre au plus près de nos normalités, avec comme ligne de mire, la (ré)insertion de la personne sanctionnée. Il ne s’agit en aucun cas de positionner cette réponse architecturale, parmi tant d’autres qui pourraient exister en réponse à ces mêmes critères, comme un modèle. En mettant en avant ce type de démarche, il est essentiel de se méfier de la simplification qui mènerait à cette notion de modèle, puis de duplication. Un processus à l’opposé de la démarche initiée ici : en réponse à chaque situation sociale, géographique, culturelle, selon les profils des personnes détenues, l’objet de leur peine, … la conception architecturale doit être adaptée, pour répondre à ces critères précis, et donner vie à une architecture responsable et utile.

Rendez-vous en 2023 pour l’ouverture de cette établissement pénitentiaire test, puis dans les mois et années à venir pour en suivre l’évolution. Et pour rester informé.e : https://www.instagram.com/et_alors_archifiction//


Ce projet d’immeuble de détention fait suite à un projet de recherche architecturale. Implanté à Villeurbanne, place Marengo, ce projet comprend la conception et la construction d’un immeuble de détention et d’un immeuble de logement, se faisant face et partageant un même cœur d’îlot. Le parti pris initial était de donner une place à la détention en ville, tout en requestionnant la taille des établissements pénitentiaires dans l’objectif de produire une architecture au service de la (ré)insertion des personnes condamnées. Ce projet pilote menée par l’Agence Publique pour l’Immobilier de la réinsertion active (APIRIA), très récemment nommée, a pour vocation d’inspirer les nouveaux programmes immobilier pénitentiaires pour tendre vers un arrêt des conception et construction de méga-établissements situés en marge des villes, et contreproductif en matière de (ré)insertion. A travers ce premier projet d’immeuble de détention il s’agit également de minimiser la surveillance électronique en redonnant une place particulière au personnel pénitentiaire, à la fois de surveillance et d’accompagnement, dans le travail d’une relation de confiance avec les personnes détenues, permis par la petite taille de l’établissement. Enfin, en s’insérant en pleine ville, ce projet ambitionne également de sensibiliser les citoyens, au nom desquels les peines de prison sont prononcées, à la privation de liberté de manière à ce que tout à chacun prenne sa part de responsabilité dans la bonne (ré)insertion des personnes condamnées.

A.P.I.R.I.A


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