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On s'en va où avec ça? - Steeve De Marchi
Steeve De Marchi, MBA
Directeur général AMVOQ sdemarchi@amvoq.com
On s’en va où avec ça ?
La pandémie de Covid-19 et de ses variants « semble » vouloir s’estomper. Certains manufacturiers automobiles annoncent une reprise de la production, ce qui devrait permettre un flot plus soutenu de véhicules neufs dans les cours des concessionnaires. En conséquence, on devrait voir le niveau d’inventaire de véhicules d’occasion remonter doucement. Bon, ben, voilà !!! La crise est finie !!! … Juste de même ?
Malgré ces signes encourageants, l’heure est plus que jamais aux questionnements pour les marchands de véhicules d’occasion. Quels seront les effets à long terme de cette pandémie ? L’approvisionnement et l’inventaire vont probablement revenir à un niveau « normal » dans les prochains mois. Est-ce que ça prendra 8 mois ? 12 mois ? 18 mois ? Mais éventuellement… On y reviendra. Il est même possible que le niveau d’inventaire revienne temporairement à un niveau supérieur à ce qu’il était avant la crise avec l’effet du balancier. Alors, tout est pour le mieux ? Pas certain…
L’approvisionnement et l’inventaire, bien que préoccupants, pourraient en fait ne pas être les principaux défis de la vente de véhicules d’occasion. Des effets à plus long terme sont à prévoir. La pandémie aura été un catalyseur ayant pour effet d’accélérer la mise en place d’autres phénomènes déjà amorcés bien avant. Certains ont été surpris par le dépôt par un cabinet d’avocats de demandes d’autorisations d’exercer des actions collectives contre tout ce qui vend des véhicules. Ce qui est surprenant, c’est que cela ne soit pas arrivé avant. Les signaux étaient pourtant présents depuis plusieurs années.
L’Office de la protection du consommateur (OPC) mentionne que la vente au détail d’automobiles d’occasion avait généré plus de 3 166 plaintes en 2021. C’est 15 % de toutes les plaintes reçues concernant la vente au détail. Le deuxième secteur qui génère le plus de plaintes est celui des gros appareils ménagers avec 1 893 plaintes pour 9 %. Pas étonnant que l’OPC multiplie les démarches pour resserrer les règlements entourant la publicité et la conclusion de contrats de vente et de contrats de vente à tempérament.
De son côté, l’Autorité des marchés financiers (AMF) travaille depuis 2015 à une refonte des règles entourant la distribution sans représentant de produits et services financiers (DSR). Avec l’OPC, ce sont les deux volets d’une transaction automobile qui sont sous la loupe des autorités réglementaires. L’AMF menace de retirer aux commerçants automobile le privilège de faire de la DSR. Cela pourrait signifier la fin de la vente de produits d’assurances par les directeurs et directrices commerciaux. L’OPC prépare quant à elle une refonte de la loi pour encadrer davantage la conclusion de contrat de vente automobile, des garanties légales et des contrats de vente à tempérament.
Et qu’arriverait-il si le financement des véhicules automobiles retournait dans les banques ? Impossible direz-vous ? Il n’y a plus personne dans les banques ! OK… Mais le service en ligne continue de se développer. La pandémie l’a prouvé. Et qu’arriverait-il si les assurances crédit n’étaient offertes au commerce seulement par des agents « certifiés » ? Plus de DSR ? Impossible me direz-vous ? Avec la pandémie, les compagnies d’assurances sont de plus en plus à l’aise avec le transactionnel en ligne.
Mais pourquoi tant d’insatisfaction ? Pourquoi la vente de véhicules d’occasion prend-elle parfois des allures de combat ? Plus que jamais, les consommateurs et les commerçants semblent être à l’opposé les uns des autres. Le consommateur veut avoir la meilleure voiture, en parfaite condition et payer le moins cher possible. Il visite des dizaines de sites et contacte plusieurs commerçants. Il voit souvent le commerçant comme l’obstacle entre lui et la voiture de ses rêves. Le commerçant, quant à lui , veut dégager la meilleure marge bénéficiaire dans chaque transaction. Il en a besoin pour bien vivre, vivre ou parfois simplement survivre. Pour y arriver, il doit ABSOLUMENT attirer l’attention des consommateurs sur son inventaire. Il doit donc afficher le plus bas prix. Il doit être créatif et faire comme tout le monde sinon, le consommateur ira ailleurs. C’est le concept du « Tout le monde le fait… Alors je le fais aussi ». Et le service client ? Bah… Pas besoin, la voiture est livrée. Et tout ça, eh bien, ça donne parfois des demandes de recours collectifs…
Est-ce qu’on doit placer tous les commerçants de véhicules d’occasion dans le même panier ? Bien sûr que non. Une petite visite sur les pages Facebook de nos membres montre une image assez diversifiée. Voici deux commentaires récents de consommateurs qui ont acheté chez un membre de l’AMVOQ :
Élogieux !
Un peu moins élogieux…
C’est bien beau mais… On s’en va où avec ça ?
Avec la rareté de l’inventaire et la flambée des prix aux encans, il est tentant de délaisser la vente au détail. En effet, c’est la première fois que les prix à l’encan sont supérieurs aux prix de détail. Mais avant de devenir “Wholesaler” à temps plein, j’y penserais à deux fois. Le fait que les prix d’encan soient présentement plus élevés que les prix de détail est plus une anomalie de marché qu’une tendance à long terme. Cette folie ne peut simplement pas durer. Le marché se stabilise dans l’ouest du pays et ce n’est qu’une question de temps avant que les prix au Québec s’ajustent avec le reste du pays. Pour ceux qui désirent continuer dans l’industrie, il est prudent de conserver un volet de ventes au détail. Plusieurs de nos membres ont diversifié leurs sources d’approvisionnement et conservent une présence en ligne avantageuse, surtout au début de la campagne publicitaire du printemps. Les ventes au détail sont elles aussi très « intéressantes » même si elles sont moins nombreuses et elles assurent aussi une meilleure pérennité de l’entreprise.
Comme ma boule de cristal est encore très embuée, je vous laisse choisir où vous voulez aller avec ça…
Bon printemps et bonnes ventes, chers membres de l’AMVOQ.
