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Clunk, ding, ding, bang...

Chronique

Mario Loubier Auteur et consultant 514 434-9423 info@marioloubier.com

Clunk, Ding, Ding, Bang et autres sons!

Si ces sons ne vous disent rien, on a définitivement un problème. Avant de les expliquer, laissez-moi vous raconter une courte anecdote.

On est en hiver à Ca rleton en Ga spésie un samedi matin de 1991 très froid et très gris. Ça fait quelques semaines que je vends des automobiles (enfin, j’essaie…) et j’arrive tout juste de deux semaines de formation. Je me sens prêt à faire face au défi de vendre enfin mon premier véhicule. Je connais mon processus de vente et j’ai même appris le DISC! Il est 9 h 15 très précisément et un couple arrive. Je me souviens encore de l’heure, car la dame du couple a pris la peine de me le répéter plusieurs fois pendant l’appel qui a précédé leur visite la journée d’avant. Elle voulait savoir si on avait en inventaire un Buick Regal, ce qui était le cas.

Afin d’offrir une belle expérience à mes clients, j’ai entré le véhicule dans le garage la veille avant de quitter pour m’assurer qu’il serait propre, exempt de neige et chaud. L’établissement pour lequel je travaillais n’avait pas de salle d’exposition. On devait donc tout faire à l’extérieur. Bien assis à mon bureau, je les vois arriver. Tous les deux sont sans sourire, l’air terne, ils marchent et bougent très lentement et parlent tout bas. Je constate bien dans leur regard qu’ils sont très suspicieux de voir arriver un jeune excité (moi) à leur devant. Je me présente et leur demande leur nom. Je les invite ensuite à s’asseoir à mon bureau en les avisant dès le départ que je suis nouveau dans la vente automobile. Leur attitude change comme si ça ne faisait pas leur affaire. D’éteints, ils passent en mode indifférence. Pour ceux et celles qui connaissent DISC, imaginez un « C » éteint en plus. Tu veux mourir! Cependant, comme je débute dans la vente automobile et que je suis donc naïf, je m’applique à faire ce que l’on m’a appris. L’évaluation des besoins avec ma feuille de travail. J’apprends qu’ils sont les propriétaires de l’entreprise de pompes funèbres de la ville voisine. Tu ne peux pas inventer cela! Ça explique sans doute l’air éteint. J’ai tiré le gros lot. Des analytiques éteints un samedi matin froid et gris, me dis-je à moi-même! Pour ceux qui me connaissent un peu, vous devez être surpris de lire ce gros jugement gratuit de ma part. J’ai heureusement compris aujourd’hui que coller une étiquette à des gens, c’est 80 % du succès ou de l’échec de la vente. Donc, assurez-vous de coller la bonne étiquette : ils sont acheteurs!

La rencontre se poursuit et je sens, à un moment donné, qu’ils sont pressés de voir l’automobile. Je les invite donc dans le garage pour leur montrer. Et là, le massacre commence. Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, ils me bombardent de questions dont je ne connais évidemment pas les réponses. Eux, contrairement à moi, avaient fait leur devoir. J’ai dû répéter au moins vingt fois la phrase que l’on se doit de connaitre lorsqu’on est nouveau dans un domaine : « Je ne connais pas la réponse, mais je sais où aller pour la trouver! » À la fin, ils ne m’entendaient plus. Ils ont tout bonnement quitté en ayant appris UNE seule chose de ma part. Ils ne feraient jamais affaire

avec moi. J’ai perdu la vente, mais j’ai retenu la leçon. Après avoir pansé mes plaies, j’ai réfléchi à la situation et je me suis fait deux promesses : 1. Je ferai tout en sorte pour que ça ne se reproduise plus jamais. 2. J’allais apprendre à démontrer la valeur de ce que je vends. J’ai compris, sans équivoque et sans exception, que la présentation d’un véhicule ou d’un produit est l’occasion unique de vous différencier des autres représentants aux yeux de votre client et surtout, de démontrer la valeur de ce que vous vendez. En cette ère où vous pouvez tout trouver sur Internet, c’est encore plus vrai que jamais. Que ce soit pour les véhicules neufs, d’occasion ou tout autre produit et service, avoir une séquence de présentation est capitale, point à la ligne. Qu’est-ce qu’il y a d’excitant pour le client de savoir que votre véhicule a douze coussins gonflables, dont un pour les genoux? Qu’est-ce que ça me donne de savoir que votre produit est fabriqué ici au lieu d’en Chine? En quoi ça ajoute de la valeur aux yeux du client? En quoi ça vous démarque de la compétition? Ah mais, Mario, la compétition a seulement dix coussins gonflables. WOW, vous avez tout compris! (Oui c’est ironique).

Dans les semaines qui ont suivi, les techniciens de l’établissement, les vidéos de formation et le guide de l’auto sont devenus mes meilleurs amis. J’ai bien écrit LE guide de l’auto, car en 1991, il n’y en avait qu’un seul et comme vous vous en doutez sûrement, pas d’Internet. Ayant grandi dans le monde de la construction, je n’avais aucune notion mécanique. J’ai déjà failli faire sauter le moteur du véhicule du paternel. J’ajoutais sans cesse de l’huile dans le moteur, car je vérifiais le niveau d’huile avec la baguette à huile de la transmission au lieu de celle du moteur!

Grâce à ces outils et mes collègues (merci encore Renaud B.), encore aujourd’hui, je peux vous expliquer ce qu’est l’alésage et la course du cylindre d’un moteur. Non, ça ne m’a jamais permis de vendre un véhicule de savoir à quoi servent l’alésage et la course, mais ça m’a permis de comprendre comment fonctionne un moteur. Ainsi, c’était plus facile d’expliquer la performance et l’économie au client et surtout, d’en démontrer la valeur lors de la présentation et de l’essai routier.

Lors de la formation que j’ai évoquée plus tôt dans cet article, on avait abordé le sujet de la présentation du véhicule. J’avais donc un canevas de travail, mais il était très peu documenté et vraiment pas à mon goût. J’ai donc décidé d’en faire un avec lequel je serais confortable de travailler. J’ai d’abord écrit dans un cahier toutes les caractéristiques qui pouvaient démontrer un avantage au client ou pour laquelle je pouvais raconter quelque chose d’intéressant, d’inusité ou que peu de gens connaissaient.

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Je l’ai fait pour chacun des véhicules que j’avais à vendre. Juste à côté, j’ai écrit une explication simple de cette caractéristique. À droite de cette explication, j’ai inscrit cinq autres colonnes avec les motifs d’achat dans chacune d’elle. Sécurité, Performance, Apparence, Confort/Commodité et Économie. J’ai ensuite documenté les motifs d’achat, lorsque possible, pour chacun des points. Ça ressemblait à ceci : Châssis monocoque

C’est un peu comme le squelette de votre automobile. Il s’agit d’une structure d’acier coulé en un seul morceau qui donne plus de rigidité et de solidité au véhicule. Sécurité : Cette structure d’acier permet de protéger les personnes dans l’habitacle en cas d’impact frontal et/ou par-derrière grâce à des zones de déformation qui se trouvent ici à l’avant et ici à l’arrière (pointez le bas du pare-brise à l’avant et le bas de la lunette à l’arrière). Imaginez une cannette de soda que je tiens par le milieu dans une main et dont les deux bouts sont écrasés. Vous, les occupants, êtes ainsi protégés. Performance : Cette structure d’acier réduit les torsions du châssis. De ce fait, le châssis est plus rigide et les éléments de suspension font leur travail, ce qui permet au véhicule de coller sur la route à plus haute vitesse et d’offrir une meilleure adhérence.

Apparence : ? Confort/Commodité : Par sa conception, il permet d’avoir plus d’espace dans l’habitacle. Économie : Étant donné qu’il n’y a pas de joints collés ou soudés de pièces (ouvrir les portières et montrer le cadre des

portes sur le châssis afin de constater qu’il n’y a pas de joints) de métal, on réduit les problèmes de rouille si vous désirez garder votre véhicule longtemps. Il va aussi contribuer à conserver la valeur de revente de votre véhicule.

C’est le modèle qui m’a servi au fil des années à documenter et utiliser environ une centaine de caractéristiques. En sachant quand et comment utiliser ces éléments lorsque je détectais un motif d’achat qui était plus important qu’un autre pour le client, j’avais déjà une réponse de prête. Je pouvais ainsi personnaliser la présentation de mon produit pour le client en face de moi. Ce qui, de fait, augmentait la valeur de mon produit à ses yeux et me rendait différent de mes compétiteurs.

Une fois cette première étape complétée, le soir après le travail et ce, pendant des semaines, j’entrais un véhicule dans le garage. J’écrivais une caractéristique sur un post-it et je le collais à l’endroit sur le véhicule où je voulais en parler. Je me rappelle l’expression d’étonnement d’un technicien venu chercher un outil le soir et voir le Pontiac Sunbird bleu éclatant en plein milieu du garage couvert de post it jaunes! Je faisais ensuite le tour du véhicule en répétant à voix haute chacun des points que j’ai cités plus haut. La caractéristique, son explication et les différents motifs d’achat que je pouvais utiliser. J’ai tranquillement intégré chacun des points dans mes présentations avec mes clients et au fil des années, j’ai ajouté des éléments de démonstration. Quand vous me verrez, demandez-moi de vous parler du verre d’eau, du 10 cents, du cône orange et de la pièce d’un dollar!

Vous n’imaginez pas la valeur de cet exercice! Oui, ça m’a pris des jours et des semaines de travail et de pratique. Une fois par trimestre, je mettais à jour mes données et je les pratiquais

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seul le soir dans le garage. Le résultat de ce travail, vous vous en doutez : plus de ventes et plus de profits. En faisant cet exercice, je sais qu’aujourd’hui encore, 85 % des composantes d’un véhicule automobile d’une marque versus une autre sont EXACTEMENT les mêmes. Imaginez la richesse de ces éléments, que vous vendiez des Ford, Kia, Lexus ou autre marque. Au fil des années, j’ai même eu la chance de me rendre dans différents pays pour faire de la formation sur les produits et devinez quoi? 85 % des composantes d’un véhicule automobile d’une marque versus une autre sont EXACTEMENT les mêmes.

Aujourd’hui, j’entends souvent les vendeurs parler du prix. Ils ne jurent que par le prix. Ils se plaisent à répéter à qui veut les entendre que les clients ne veulent qu’un prix. Dites-vous bien une chose, si c’est ce que vous croyez, changer de domaine, car vous n’avez rien compris à la vente. La vente, c’est l’art de transformer l’argument d’un client en un achat. Vous devez le faire en créant une relation et en démontrant la valeur de ce que vous vendez. Les clients apprécient une présentation de véhicules. Elle se doit d’être interactive, enthousiaste et intéressante. Vous saurez que vous aurez réussi quand vous entendrez des phrases du genre : « WOW! Je ne savais pas que ce véhicule avait tout cela. On ne m’a jamais présenté un véhicule comme vous venez de le faire ».

Et si j’avais à vendre des véhicules aujourd’hui, qu’est-ce que je ferais de différent, compte tenu du niveau de connaissance des clients qui se présentent? Et bien, je ferais exactement le même exercice car, au risque de me répéter, savoir présenter son produit permet d’en démontrer la valeur, d’augmenter l’intérêt du client et de vous différencier des compétiteurs. La chose que je ferais de différent serait d’identifier les caractéristiques qui ne

se trouvent nulle part sur les sites de produits. Par exemple : le pare-brise laminé, les pare-chocs 7 km/h ou le sac gonflable conducteur et son trou de beigne, etc. J’identifierais aussi les éléments qu’on voit souvent, mais qui ne veulent rien dire pour la plupart des gens qui magasinent un véhicule en moyenne aux 4 ans! Par exemple : les poutrelles d’acier dans les portes, les freins ABS ou les freins à disque ventilé, et je créerais une histoire pour en démontrer la valeur.

Tout cela n’est pas une histoire de connaissance de produits. C’est plutôt de savoir quoi faire avec ces connaissances. A. Vous pouvez attendre que le client vous pose des questions. B. Vous pouvez nommer les caractéristiques (12 sacs gonflables, direction assistée électrique à crémaillère, etc.) C. Vous pouvez présenter les caractéristiques et les personnaliser en fonction des motifs d’achat. D. Vous pouvez faire un ta… de bon show! Devinez lequel génère plus de ventes et de profits?

PS : Clunk, Ding, Ding, Bang sont les sons que fait un véhicule lorsque vous faites une présentation. Dommage que vous ne vous en rappeliez pas... Sans rancune j’espère!

PPSS : Non, je ne vous donnerai pas ma liste (eh oui, je l’ai toujours!), car la valeur de ce document est dans sa réalisation et dans son exécution.

PPPSSS : Aujourd’hui, les analytiques sont mes meilleurs amis. Ils me ralentissent et m’aident à prendre de meilleures décisions.

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