2 minute read

En écho les uns aux autres...

Next Article
RESUME

RESUME

Kidnapping

Avec « Kidnapping », c’est d’abord l’incroyable logique du totalitarisme, l’arbitraire d’une sécurité militaire enlevant et torturant sans avoir à le justifier, pour une photo prise par hasard, pour une rencontre involontaire : Adam a été montré à la une d’un journal riant de bon cœur avec ses voisins de café. Le propos qui l’a fait rire : une critique humoristique du président Boumediene. Il n’en faut pas plus pour démasquer un séditieux. Et emporté dans la spirale absurde de la répression, Adam en- tre les mains de ses tortionnaires en vient à regretter «d’avoir de la chair autour de son âme » .

Advertisement

L’écriture est sans exagération, sans pathos, c’est un scalpel qui détaille l’inacceptable et nous conduit, tranquillement, vers la révolte. Une révolte impossible. Insupportable.

Western ou la Balle

Et puis l’on revient aux chars, aux balles, dans un pays en guerre, le face à face entre deux camps opposés appartenant au même peuple. Ce récit est tragique et simple comme du Corneille. Cela s’appelle le fanatisme et cela s’appelle la mort. Abel, Caïn, deux frères depuis l’enfance, l’adolescence, ils ont tout fait ensemble… et puis la destinée…

Ils se trouvent face à face, prêt à se tirer dessus. Là, dans la terre qui les a vu grandir. Et soudain au moment où il tire, Caïn reconnaît -trop tard- l’ami qu’il vise. La balle est partie. Un sniper intégriste, non loin de là, appartenant au camp d’Abel venge celui-ci dans la minute : Caïn tombe. Dans ce raccourci, cette minute, Fellag glisse toutes leurs vies mêlées. Danse macabre d’une amitié fauchée en pleine jeunesse, pour le profit de manipulateurs, d’un côté des idéologues fanatiques… De l’autre des chefs-militaires pragmatiques et glacés, vaguement indifférents au coût humain de leurs tactiques…

Allô Adam !

Unefuiteimaginaire...

Le troisième récit, « Allô Adam ! », est à nouveau une fuite imaginaire. Un homme, réfugié politique à Bruxelles, dont on découvre peu à peu les qualités, les études, la formation, la personnalité, appelle toutes le nuits sa fiancée restée cloîtrée chez elle par des frères fanatiques et bornés. Injustice et absurdité du sort, elle qui aurait dû être leur guide devient leur prisonnière, recluse. Et elle s’enfuit, en pensée, vers un amant (notre réfugié de Bruxelles) dont seules les dernières lignes nous révèlent la véritable identité.

De ses monologues nocturnes adressée à sa fiancée qui se réfugie sur le balcon pour attendre ses appels, Fellag tire une peinture déchirante de la nuit qui tombe sur un pays imaginaire – mais Ô combien réel, aux prises avec les vautours noirs de la répression totalitaire.

Il n’y a pas de leçon, il n’y a pas de thèse. Fellag noue là dans un destin individuel l’absurdité de notre aventure collective. Sans pesanteur, sans afficher de thèse, simplement en racontant une histoire. Ce n’est pas vraiment drôle, mais c’est lu- cide, utile. A voir, évidemment, pour comprendre les temps que nous vivons.

Dès que la maisonnée est endormie, réfugiée sur le balcon de l’appartement, jusqu’au premier appel à la prière du lever du jour, une jeune femme, Êve, téléphone en cachette à Adam, l’homme qu’elle aime.

La chronique de sept monologues adressés à un correspondant compréhensif, patient et taciturne, révèle, au fil des nuits, la personnalité de Êve et la cause de ses appels clandestins. Malgré des études supérieures, une formation juridique et une expérience professionnelle, cette jeune femme cultivée est recluse par ses frères et beaux-frères acquis au fanatisme.

Faisant fi d’un couvre-feu, une nuit de terreur, des ombres discrètes glissent le long des murs, des familles terrorisées tentent d’échapper à la horde fasciste et l’écho de la chasse infernale parvient jusqu’au coin de balcon où se tapit Êve.

This article is from: