Recherche Agronomique Suisse, numéro 9, septembre 2014

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RECHERCHE AGRONOMIQUE SUISSE 2 0 1 4

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N u m é r o

9

Agroscope | OFAG | HAFL | AGRIDEA | ETH Zürich | FiBL

S e p t e m b r e

Production animale Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés Page 324 Société Qui achète des aliments bio en Suisse? Page 338 Production végétale Essais de variétés de luzerne (2011–2013) Page 358


Sommaire Septembre 2014 | Numéro 9 Pour des raisons économique, les porcelets sont rapidement séparés de leur mère, avant que celle-ci ait pu leur enseigner à manger des aliments solides. Lors d’un essai alimentaire, des chercheurs d’Agroscope et de l’EPFZ ont cherché à savoir si les porcelets fraîchement sevrés pouvaient profiter de l’exemple et de l’expérience d’autres porcelets déjà habitués à consommer des aliments solides. (Photo: G ­ abriela Brändle, Agroscope). Impressum Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz est une publication des stations de recherche agronomique Agroscope et de leurs partenaires. Cette publication paraît en allemand et en français. Elle s’adresse aux scientifiques, spécialistes de la recherche et de l’industrie, enseignants, organisations de conseil et de vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux, praticiens, politiciens et autres personnes intéressées.

323 Editorial 324

pas la croissance de porcelets à peine sevrés Andreas Gutzwiller, Marion Reichenbach et Edna Hillmann Production animale Composition des acides gras dans 330

l’alimentation animale – méthodes d’analyse Silvia Ampuero Kragten, Marius Collomb, Sébastien Dubois et Peter Stoll

Editeur Agroscope Partenaires bA groscope (Institut des sciences en production végétale IPV; Institut des sciences en p­ roduction animale IPA; Institut des sciences en denrées alimentaires IDA; Institut des ­s ciences en durabilité agronomique IDU), www.agroscope.ch b Office fédéral de l’agriculture OFAG, Berne, www.ofag.ch b Haute école des sciences agronomiques forestières et alimentaires HAFL, Zollikofen, www.hafl.ch b Centrale de vulgarisation AGRIDEA, Lausanne et Lindau, www.agridea.ch b E cole polytechnique fédérale de Zurich ETH Zürich, Département des Sciences des Systèmes de l'Environnement, www.usys.ethz.ch b Institut de recherche de l'agriculture biologique FiBL, www.fibl.org Rédaction Direction et rédaction germanophone Andrea Leuenberger-Minger, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Agroscope, Case postale 64, 1725 Posieux, Tél. +41 58 466 72 21, Fax +41 58 466 73 00 Rédaction francophone Sibylle Willi Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Agroscope, Case postale 1012, 1260 Nyon 1, Tél. +41 58 460 41 57 Suppléance Judith Auer, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Agroscope, Case postale 1012, 1260 Nyon 1, Tél. +41 58 460 41 82 e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Team de rédaction Président: Jean-Philippe Mayor (Responsable Corporate Communication Agroscope), Evelyne Fasnacht, Erika Meili et Sibylle Willi (Agroscope), Karin Bovigny-Ackermann (OFAG), Beat Huber-Eicher (HAFL), Esther Weiss (AGRIDEA), Brigitte Dorn (ETH Zürich), Thomas Alföldi (FiBL). Abonnements Tarifs Revue: CHF 61.–*, TVA et frais de port compris (étranger + CHF 20.– frais de port), en ligne: CHF 61.–* * Tarifs réduits voir: www.rechercheagronomiquesuisse.ch Adresse Nicole Boschung, Recherche Agronomique Suisse/Agrarforschung Schweiz, Agroscope, Case postale 64, 1725 Posieux e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch, Fax +41 26 407 73 00 Changement d'adresse e-mail: verkauf.zivil@bbl.admin.ch, Fax +41 31 325 50 58 Internet www.rechercheagronomiquesuisse.ch www.agrarforschungschweiz.ch ISSN infos ISSN 1663 – 7917 (imprimé) ISSN 1663 – 7925 (en ligne) Titre: Recherche Agronomique Suisse Titre abrégé: Rech. Agron. Suisse © Copyright Agroscope. Tous droits de reproduction et de traduction réservés. Toute reproduction ou traduction, partielle ou intégrale, doit faire l’objet d’un accord avec la rédaction.

Indexé: Web of Science, CAB Abstracts, AGRIS

Production animale es porcelets expérimentés ne favorisent D

Société Qui achète des aliments bio en Suisse? 338 Franziska Götze et Ali Ferjani Economie agricole Potentiel de l’agriculture dans la région 344

du Gothard Andreas Hochuli, Esther Hidber et Mario Huber 352

Economie agricole alculs des coûts complets des travaux C

en régie Daniel Hoop, Anja Schwarz et Markus Lips 358

Production végétale ssais de variétés de luzerne (2011–2013) E Rainer Frick, Eric Mosimann, Philippe Aebi, ­Daniel Suter et Hans-Ueli Hirschi

366

Production végétale S élection végétale suisse –analyse spatiale,

temporelle et thématique de la situation Achim Walter, Christoph Grieder, Luisa Last, Beat Keller, Andreas Hund et Bruno Studer Eclairage Charbon de l’orge: sensibilité variétale et 374

­alternatives de lutte Heinz Krebs et al. Eclairage World Café «Croissance dans l’agriculture» 378 Linda Reissig 382 Portrait 383 Actualités 387 Manifestations


Editorial

La grande chance de la recherche agronomique suisse Chère lectrice, cher lecteur,

Urs Niggli, directeur du FiBL

La recherche agronomique a de nouveau regagné du poids dans la société. Les gens aiment manger, et cuisiner est apprécié. Ils ne sont pas rares ceux qui se définissent même par leur manière de manger et d’acheter: «Je suis végane», «J’achète régulièrement des produits bio», «J’achète seulement chez la paysanne au marché», «Je suis contre les manipulations génétiques» ou «Chez moi, pas d’autres steaks que ceux d’élevages de plein air». Ce que contredisent par ailleurs les deux milliards de francs que les Suisses dépensent de l’autre côté de la frontière avant tout dans les magasins hard-discount bon marché. Que nous le voulions ou non, les consommatrices et les consommateurs participent à la discussion quand il s’agit de définir des priorités de recherche. La société attend de la recherche des recettes pour pouvoir nourrir une population mondiale en continuelle augmentation. Cela ne simplifie malheureusement pas la chose. Car l’augmentation de la production n’est en fait pas une solution, puisqu’elle menace la stabilité de la planète. Cette situation présente cependant des opportunités pour la recherche agronomique suisse. Elle est en bonne place internationale dans différentes disciplines de la durabilité - par exemple l’écologie du sol, les systèmes herbagers durables, l’agriculture biologique, l’alimentation bovine et les conditions d’élevage conformes aux besoins des espèces, mais aussi la protection phytosanitaire biologique, la technologie laitière ou la modélisation des systèmes économico-écologiques. La compétence dans la collaboration scientifique avec les pays en développement est encore en phase de construction. Dans la recherche, la discussion est imprégnée des notions d’efficience et de suffisance. L’efficience permet bien sûr de faire plus avec moins; mais sans renoncements fondamentaux, les gains de productivité entraînent davantage de gaspillage de denrées alimentaires. La consommation des ressources finies (par exemple le phosphore ou le pétrole) et la pollution des écosystèmes continueront d’augmenter. La suffisance signifie par contre tenir compte, aujourd’hui déjà, de la pénurie future. C’est ce que fait par exemple l’agriculture biologique avec ses directives pour la fumure. La production de déchets de toute sorte doit diminuer drastiquement, du champ à la consommation. Et de nouveaux procédés de transformation doivent permettre aux déchets inévitables de revenir dans l’agriculture sous forme de matières premières de haute valeur. La plupart des paramètres de la durabilité qui sont influencés par l’agriculture - comme la biodiversité, la qualité du sol, la diversité agro-génétique, la qualité des paysages, de l’eau et de l’air, sans oublier le revenu agricole - ont continué de se dégrader inexorablement, malgré les objectifs de l’ONU et les augmentations d’efficience. L’agriculture pratiquée en Suisse sur un million d’hectares a davantage de degrés de liberté, et les politiciens de l’UE la considèrent souvent comme une sorte de cuisine d’expérimentation pour les nouvelles idées. Sachons donc saisir la chance de nous attaquer au changement de paradigme réclamé par de nombreuses institutions internationales, de l’expérimenter progressivement avec les agriculteurs et d’analyser plus précisément ses répercussion sur la durabilité globale. La recherche agronomique doit réfléchir de manière beaucoup plus radicale!

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P r o d u c t i o n

a n i m a l e

Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés Andreas Gutzwiller1, Marion Reichenbach2 et Edna Hillmann2 Agroscope, Institut des sciences en production animale IPA, 1725 Posieux, Suisse 2 ETHZ, Institut des sciences agronomiques, 8092 Zurich, Suisse Renseignements: Andreas Gutzwiller, e-mail: andreas.gutzwiller@agroscope.admin.ch

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Jusqu’à l’âge de quatre semaines, les porcelets sous la mère couvrent plus de 80 % de leurs besoins en énergie et en nutriment par l’ingestion de lait maternel. Le sevrage à l’âge de quatre semaines représente donc un changement brusque du régime alimentaire.

Introduction Pour des raisons économiques, les truies doivent élever le plus grand nombre possible de porcelets par année. Aussi longtemps que les truies allaitent régulièrement leurs porcelets, elles ne peuvent pas être en chaleur. Pour que les truies soient à nouveau portantes rapidement après la mise-bas, elles sont séparées de leurs porcelets quelques semaines après leur naissance, avant que ceuxci ne soient habitués à manger de l’aliment solide. Les porcelets sevrés doivent donc apprendre à satisfaire leur faim et leur soif en consommant de l’aliment solide et de

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Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 324–329, 2014

l’eau sans pour autant profiter de l’exemple du comportement alimentaire de leur mère ou d’autres individus expérimentés. Pendant cette phase d’apprentissage de plusieurs jours, les porcelets ne mangent pas suffisamment pour couvrir complètement leurs besoins nutritionnels et doivent mobiliser leurs réserves corporelles, ce qui influence de façon négative leur résistance aux maladies et leur croissance (William 2003). Lors d’un essai alimentaire, il a été examiné si la présence de porcelets sevrés plus rapidement et habitués à la consommation d’aliment solide pouvait stimuler la prise de nourriture de porcelets fraîchement sevrés.


Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés | Production animale

L’essai a été conduit sur le site d’Agroscope à Posieux avec 144 porcelets de la race Grand Porc Blanc. À partir de l’âge de deux semaines, les porcelets, toujours sous leur mère, ont reçu de l’aliment complémentaire et de la terre à fouiller afin qu’ils puissent s’habituer à la consommation d’aliment solide. Après le sevrage, les porcelets ont été placés dans des boxes d’une surface au sol de 9,2 m² (dont 3,1 m² de caillebotis métalliques), qui comprenaient une mangeoire large de 90 cm, deux abreuvoirs (coupe et pipette), deux logettes chauffées et un râtelier pour la paille. L’aliment granulé, l’eau et la paille étaient à libre disposition. Pendant les deux premières semaines après le sevrage, un starter pour porcelets contenant 175 g de matière azotée et 14,6 MJ d’énergie digestible par kg, puis un aliment pour porcelets contenant 170 g de matière azotée et 13,9 MJ d’énergie digestible ont été distribués. La structure de l’essai est présentée schématiquement dans le tableau 1. Les 144 porcelets de l’essai, sevrés à l’âge de quatre semaines, ont été répartis en 72 paires de frères et sœurs du même sexe avec un poids semblable. Un animal de chaque paire a été assigné à la variante I (inexpérimenté) et le second à la variante IE (inexpérimenté et expérimenté). Alors que les groupes de porcelets I étaient composés uniquement de porcelets fraîchement sevrés, deux porcelets «expérimentés» (E), sevrés une semaine avant les autres et ainsi habitués à la consommation d’aliment solide, ont été introduits en plus dans chaque box de la variante IE, soit douze porcelets au total. Les porcelets expérimentés étaient les porcelets les plus gros dans les différentes portées de l’essai. Ils ont été sevrés à l’âge de trois semaines et nourris avec de l’aliment solide tandis que les autres porcelets sont restés sous leur mère quatre semaines (sevrage en deux phases, en anglais «split weaning»). La croissance a servi de critère décisif pour mesurer l’influence des porcelets expérimentés sur la prise de nourriture des porcelets fraîchement sevrés, influence 

Résumé

Animaux, matériel et méthodes

Lors d’un essai alimentaire, il a été examiné si des porcelets ayant déjà appris à manger de l’aliment solide pouvaient montrer l’exemple à des porcelets fraîchement sevrés et les stimuler à en consommer. Les 72 porcelets de la variante expérimentale, âgés de quatre semaines, ont été mélangés le jour de leur sevrage avec douze porcelets du même âge sevrés une semaine plus tôt, tandis que leurs 72 frères et sœurs de la variante témoin ne l’ont pas été. Les observations effectuées du deuxième au quatrième jour de l’essai ont montré que les porcelets des groupes expérimentaux mangeaient plus fréquemment. Durant la première semaine de l’essai, les porcelets de la variante expérimentale ont plus souvent souffert de diarrhée (35 contre 25 individus; P = 0,09) et ont grandi plus lentement (croissance journalière de 11 g contre 29 g; P = 0,10) que ceux de la variante témoin. La croissance pendant les cinq semaines de la phase d’élevage complète était pratiquement identique dans les deux variantes (P = 0,90). L’incidence plus élevée de diarrhée dans la variante expérimentale pourrait aussi bien être imputée à une exposition plus importante à des entéropathogènes excrétés par les porcelets sevrés plus rapidement qu’à une consommation d’aliments élevée sans adaptation suffisante du système digestif.

Tableau 1 | Structure de l’essai 144 porcelets sevrés à l’âge de quatre semaines, en trois séries Répartition des porcelets appariés dans les variantes I (porcelets inexpérimentés uniquement) et IE (porcelets inexpérimentés mélangés avec des porcelets expérimentés) I (72 animaux)

IE (72 animaux)

8–14 animaux inexpérimentés (I) par box

8–14 animaux inexpérimentés (I) par box plus 2 porcelets expérimentés (E), qui ont été sevrés une semaine plus tôt

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Production animale | Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés

Figure 1 | Dans la deuxième série expérimentale, le comportement des porcelets, identifiés par des numéros écrits sur le dos, a été observé pendant les premiers jours après le sevrage. Les porcelets fraîchement sevrés mélangés à des porcelets expérimentés étaient plus souvent devant la mangeoire que les porcelets de la variante «sans porcelets expérimentés».

supposée positive. Puisque la consommation d’aliments par groupe a été influencée par les deux porcelets expérimentés dans chaque box de la variante IE, cette valeur ne pouvait pas être utilisée comme indicateur. Pour les 74 porcelets fraîchement sevrés de la deuxième série de l’essai, le comportement aux environs de la mangeoire a été observé (fig. 1). Les porcelets, qui étaient identifiés à distance grâce à un chiffre écrit sur leur dos, ont été observés depuis le matin du deuxième jour jusqu’au quatrième jour ainsi que l’après-midi du deuxième et du troisième jour. Le temps d’observation par box était de 40 minutes pour chaque période d’observation. Trois catégories d’observation ont été relevées: ••Consommation = tête dans la mangeoire pendant > 10 secondes. ••Contact avec la nourriture = tête dans la mangeoire pendant < 10 secondes.

••A proximité de la mangeoire = mangeoire touchée avec le nez ou la gueule, exploration dans les environs immédiats de la mangeoire, recherche d’un accès à la mangeoire à côté des autres porcelets.

Résultats et discussion Le poids des porcelets figure dans le tableau 2. Bien que les 72 porcelets de la variante IE aient été plus lourds de 40 g au sevrage que leurs 72 frères et sœurs de la variante I, ils se sont moins développés durant la première semaine après le sevrage (IE: 11 g par jour contre I: 29 g par jour; P = 0,10). Sur les cinq semaines de la période d’élevage complète, les porcelets des deux variantes ont grandi pratiquement à la même vitesse (P = 0,90). L’accroissement pendant la première semaine, qui était le critère le plus important, montre que la présence de porcelets expérimentés agissait de façon non

Tableau 2 | Poids vif (PV) et accroissement journalier (AJ) des porcelets I (72 animaux)

P

PV début, kg

6,58 ± 1,16

6,62 ± 1,15

0,3

PV fin de la 1re semaine, kg

6,78 ± 1,28

6,70 ± 1,40

0,29

PV fin de la 5e semaine, kg

0,98

14,28 ± 3,94

14,27 ± 4,47

AJ, 1re semaine, g

29 ± 71

11 ± 72

0,10

AJ sevrage - fin de la 5e semaine, g

220 ± 95

219 ± 104

0,90

Valeurs moyennes ± écart-type, P = probabilité d'erreur

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IE (72 animaux)

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Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés | Production animale

1,4

activités par période de 40 minutes

1,2 1 0,8 0,6 0,4 consommation

0,2

contact avec la nourriture proximité de la mangeoire

0 IE jour 2

IE jour 3

IE jour 4

I jour 2

I jour 3

I jour 4

Figure 2 | Comportement des 74 porcelets de la deuxième série de l’essai à proximité de la mangeoire. Activités comptabilisées par porcelet inexpérimenté et par période d’observation de 40 minutes.

pas positive, mais négative sur le développement du poids des porcelets fraîchement sevrés. Les observations conduites durant la deuxième série (fig. 2) indiquent que la présence de porcelets expérimentés dans la variante IE augmente la fréquence d’ingestion de nourriture des porcelets fraîchement sevrés: au deuxième et troisième jour, 1,2 observations «consommation» par porcelet IE contre 0,8 par porcelet I ont été faites pour chaque période d’observation de 40 minutes. Le quatrième jour, la fréquence d’ingestion de nourriture observée a diminué contrairement à ce qui était escompté. Un essai sur la prise de nourriture journalière durant la première semaine après le sevrage a en effet montré qu’elle augmentait continuellement aux cours des premiers jours après le sevrage (Gutzwiller 2000). Puisque ni la durée de la prise de nourriture, ni la quantité d’aliments effectivement consommée n’ont été relevées dans les observations du présent essai, il est possible qu’au quatrième jour les porcelets aient consommé plus d’aliments par visite à la mangeoire et aient ainsi davantage mangé que durant les jours précédents, malgré une plus faible fréquence de visites. Le fait que les porcelets de la variante IE ont moins pris de poids pendant la première semaine – bien qu’ils aient été plus souvent observés en train de manger

après le sevrage selon les observations de la deuxième série – peut être attribué à la plus grande incidence de diarrhée dans la variante IE durant la première semaine. Comme la figure 3 le montre, les cas de diarrhée ont commencé un jour plus tôt dans la variante IE que dans la variante I et, au total, davantage de porcelets IE ont souffert de diarrhée durant la première semaine (35 contre 25 porcelets; P = 0,09). La prise de poids tendanciellement moindre des porcelets de la variante IE durant la première semaine peut être attribuée à une consommation d’aliments moins importante et à un tractus gastro-intestinal moins rempli à cause des diarrhées. Deux raisons peuvent expliquer les cas de diarrhées plus fréquents des porcelets IE durant la première semaine après le sevrage: premièrement, une prise de nourriture stimulée par la présence des porcelets expérimentés pourrait conduire à une surcharge du tractus gastro-intestinal des porcelets qui ne sont pas encore habitués à la digestion de l’aliment solide, ce qui augmente la sensibilité aux diarrhées. Pour cette raison, Rantzer et al. (1996) et Dirkzwager et al. (2005) conseillent de stimuler la prise de nourriture des porcelets pendant 2 à 4 jours après le sevrage et de limiter ensuite l’apport nutritionnel pour diminuer les cas de 

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Production animale | Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés

16 14

nouveaux cas de diarrhée

12 10 8 6 4 2

I IE

0 1

2

3

4

5

6

7

jours après le sevrage

Figure 3 | Incidence des diarrhées pendant la première semaine après le sevrage.

diarrhée. Deuxièmement, puisque la plupart des diarrhées, qui sont accompagnées par des excrétions massives d’entéropathogènes, surviennent généralement vers la fin de la première et durant la deuxième semaine après le sevrage, il est fort probable que les porcelets expérimentés ont contaminé les boxes de la variante IE au début de l’essai avec des entéropathogènes et ont ainsi augmenté le risque de diarrhée pour les porcelets fraîchement sevrés de la variante IE. Une consommation alimentaire plus importante de jeunes animaux inexpérimentés induite par la présence de congénères expérimentés, comme observé dans le présent essai, a été décrite aussi bien chez des porcelets que chez des veaux (Morgan et al. 2001; De Paula Vieira et al. 2012). Au contraire de ces essais, dans lesquels ce procédé a eu des conséquences positives sur les jeunes animaux inexpérimentés, les effets négatifs prévalent durant la première semaine de l’essai sans influence sur la croissance durant la période d’élevage complète.

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Conclusions L’essai mené chez Agroscope montre que le mélange d’animaux expérimentés et inexpérimentés peut entraîner tant des effets négatifs, comme une incidence plus importante de maladies, que de potentiels effets positifs d’apprentissage. Afin d’éviter une augmentation de cas de maladies, il est déconseillé de mélanger des porcelets fraîchement sevrés avec des porcelets sevrés depuis plus n longtemps.


I suinetti già svezzati non stimolano la crescita dei suinetti appena svezzati È stato condotto un esperimento di nutrizione allo scopo di stabilire se suinetti appena svezzati potevano essere stimolati a ingerire cibo solido, seguendo l’esempio di suinetti che avevano già imparato ad alimentarsi con foraggio secco. Nel test con il gruppo sperimentale 72 suinetti di 4 settimane sono stati collocati, dal primo giorno di svezzamento, con 12 che erano stati svezzati una settimana prima. Il gruppo di controllo era costituito da altri 72 suinetti della stessa figliata che non sono invece stati uniti a suinetti già svezzati. Dopo 2-4 giorni di osservazione, risultava che i suinetti del gruppo sperimentale si alimentavano più frequentemente. Nella prima settimana essi hanno sofferto più spesso di dissenteria (35 contro 25; P = 0.09) e sono cresciuti meno (crescita giornaliera 11 g contro 29 g; P = 0.10) rispetto agli animali del gruppo di controllo. La crescita durante l’intero periodo di allevamento di cinque settimane è però risultata praticamente identica (P = 0.90). Gli episodi più frequenti di dissenteria nei suinetti del gruppo sperimentale potrebbero essere riconducibili a una loro maggiore esposizione ad agenti patogeni di tale disturbo, causati dalla presenza dei suinetti svezzati prima, o a un’eccessiva assunzione di cibo, mentre il loro sistema digestivo non era ancora sufficientemente adattato.

Bibliographie ▪▪ De Paula Vieira A., von Keyserlingk M. A. G. & Weary D. M., 2012. Presence of older weaned companion influences feeding behavior and improves performance of dairy calves before and after weaning from milk. J. Dairy Sci. 95, 3218–3224. ▪▪ Dirkzwager A., Veldman B. & Bikker P., 2005. A nutritional approach for the prevention of Post Weaning Syndrome in piglets. Anim. Res. 54, 231–236. ▪▪ Gutzwiller A., 2000. Lait, petit-lait et aliment diététique dans l’élevage des porcelets. Revue suisse Agric. 32 (6), 253–257.

Summary

Riassunto

Des porcelets expérimentés ne favorisent pas la croissance de porcelets à peine sevrés | Production animale

The presence of experienced piglets does not promote the growth of newly weaned piglets In a feeding trial the hypothesis was tested that the presence of experienced piglets facilitates the adaptation of newly weaned piglets to solid food. The 72 four-week-old piglets in the experimental group were mixed at weaning with 12 piglets which had been weaned one week earlier, whereas their 72 siblings in the control group were reared in the absence of experienced piglets. Observations between the second and fourth day showed that the experimental piglets displayed eating behaviour more frequently than the control piglets. During the first week, diarrhea prevalence was higher (35 vs. 25 animals; P = 0.09) and daily weight gain was lower (11 g vs. 29 g; P = 0.10) in the experimental group than in the control group. Weight gain during the whole five-week experimental period was practically identical (P = 0.90). The negative effect of the experienced piglets can possibly be attributed to their shedding of entero-pathogens and the increased food intake of the newly weaned piglets before their gastrointestinal tract was adapted to solid feed, thus increasing the diarrhea risk in the experimental group. Key words: weaning, pig, learning, food intake, diarrhea.

▪▪ Morgan C.A., Lawrence A.B., Chirnside J. & Deans L.A., 2001. Can information about solid food be transmitted from one piglet to another? ­A nimal Science 73, 471–478. ▪▪ Rantzer D., Svendsen J. & Weström B., 1996. Effects of a strategic feed restriction on pig performance and health during the post-weaning period. Acta Agric. Scand. Sect. A Animal Sci. 46, 219–226. ▪▪ William I. H., 2003. Growth of the weaned pig. In: Weaning the pig (Ed. J. R. Pluske, J. Le Dividich, M. W. A. Verstegen). Wageningen Academic ­P ublishers, Wageningen, NL, 17-35.

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P r o d u c t i o n

a n i m a l e

Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse Silvia Ampuero Kragten1, Marius Collomb2, Sébastien Dubois1 et Peter Stoll1 Agroscope, Institut des sciences en production animale IPA, 1725 Posieux, Suisse 2 Ancien collaborateur scientifique d'Agroscope, 1723 Marly, Suisse Renseignements: Silvia Ampuero Kragten, e-mail: silvia.ampuero@agroscope.admin.ch

1

correspondre aux recommandations quant aux teneurs en PUFA, MUFA et SFA. D’où la nécessité d’une méthode analytique précise.

Les porcs aiment les aliments riches en graisse.

Introduction Historiquement, l’intérêt premier des corps gras dans l’alimentation animale réside dans l’apport énergétique qu’ils constituent dans la ration. L’intérêt pour la composition des corps gras est plus récent, notamment lié aux potentiels bénéfices pour la santé humaine. Par ailleurs, en Suisse, la qualité technologique de la graisse de la carcasse de porc subit une classification ad hoc, qui d’une manière générale tient compte de la présence de liaisons insaturées dans les acides gras (Christen 2014); cette classification, effectuée au niveau des abattoirs, influence le prix de la carcasse. De sorte que les aliments pour porc en Suisse doivent être formulés non seulement en fonction de la teneur en corps gras (MG) de matières premières comme source d’énergie, mais doivent en plus

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Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

Structure moléculaire des lipides Du point de vue chimique, les lipides (corps gras) sont constitués d’une riche variété de composés. Du point de vue de la solubilité, les lipides peuvent être classés selon leur structure moléculaire en lipides neutres ou polaires. A) Les lipides neutres (ou simples) sont les acides gras libres ainsi que les acides gras liés à une molécule de glycérol pour former des mono, di ou triglycérides. Ce type de lipides est soluble dans des solvants non polaires, par contre les lipides polaires (ou complexes) sont solubles dans des solvants plus ou moins polaires. B) Les lipides polaires peuvent être de deux types (fig. 1): Les phosphoglycérides, lipides où un des acides gras du triglycéride est remplacé par un ester de phosphate (liaison O-acyl). Ces composés peuvent avoir divers degrés de complexité en fonction de l’ester de phosphate (y compris la présence de composés azotés). Les sphingolipides, lipides où l’acide gras est lié à l’azote d’une molécule de sphingosine (liaison N-acyl). La sphingosine peut être liée à des sucres (cérébrosides, gangliosides, etc.), des phosphates, etc. Ces lipides polaires peuvent aussi être classés, selon qu’ils comportent une molécule de phosphate ou de sucre, en phospholipides ou glycolipides, indépendamment de la présence de liaisons O-acyl ou N-acyl avec l’acide gras. Les lipides comprennent encore les détergents ou sels d’acides gras, les isoprenoïdes (cholestérol, stéroïdes, etc.), les terpènes ainsi que les cires et autres lipides avec des acides gras cycliques. A l’exception des sels d’acides gras, ces dernières molécules peuvent être considérées comme source d’énergie négligeable dans l’alimentation animale, une partie sera toutefois extraite dans la MG (partiellement les cires et autres). La détermination des acides gras par GC-FID (chromatographie en phase gazeuse avec détecteur à ionisation de flamme) passe par leur estérification (généralement méthylation). Ce type de réaction de dérivatisation a lieu


Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse | Production animale

Acide gras libre: H+

R’-CO-OCH3 + H-OH

Lipide où l’acide gras est lié par une liaison O-acyl (p. ex.: triglycérides, phospholipides): R’-CO-OR’’ + CH3-OH

H+ ou OCH3

R’-CO-OCH3 + R’’-OH

Lipide où l’acide gras est lié par une liaison N-acyl (p. ex. : sphingolipides, céramides, etc.) R’-CO-NHR’’ + CH3-OH

H+

R’-CO-OCH3 + R’’-NH2

Méthodes analytiques La MG est encore couramment déterminée par des méthodes gravimétriques empiriques, telles que Soxhlet (AOAC 1980) et Weibull-Berntrop, basées sur des principes développés au 19e siècle (Hammond 2001). Le principe de ces méthodes est la dissolution des corps gras dans un solvant non polaire, souvent de l’éther pétrole ou de l’hexane, etc. Il est aisé de comprendre qu’un seul solvant à polarité donnée ne parviendra pas à dissoudre les différents lipides à polarité diverse. Ainsi, en général, les lipides membranaires (phospholipides, glycolipides, sphingolipides, etc.) seront moins bien dissous dans des 

PUFA acides polyéniques (acides gras ­polyinsaturés) MUFA Acides gras monoinsaturés SFA Acides gras saturés GT Teneur en graisse totale MG Matière grasse

Lipides membranaires (polaires)

Lipides, stockage d’énergie

Glycolipides

Phospholipides

Ac. gras

Sphingosine

Ac. gras Glycérol

Glycérol

Ac. gras

Ac. gras

Sphingolipides

Phosphoglycérides

Triglycérides

Ac. gras

PO4

ROH

Sphingosine

R’-CO-OH + CH3-OH

Cet article illustre l’importance de la méthode analytique pour la détermination de la composition d’acides gras dans les aliments pour animaux. Notamment dans l’alimentation pour porcs où, en Suisse, non seulement la teneur en lipides mais aussi le profil d’acides gras sont nécessaires pour formuler une ration apte à fournir une qualité optimale de graisse dans la carcasse de porc. L’étude montre que la méthode GC (chromatographie en phase gazeuse) par transestérification in situ est plus précise et complète que, d’une part, la méthode GC en deux étapes (par extraction des corps gras puis estérification) et, d’autre part, la méthode empirique, par gravimétrie, qui consiste en l’extraction des composés solubles dans un solvant donné.

Résumé

en présence d’un catalyseur: soit acide, soit basique, en fonction du type de lipide (Christie 1993, Carrapiso et al. 2000):

Ac. gras

PO4

Sucre

Ac. gras

Sucre

Figure 1 | Schéma de classification des lipides fréquents.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

331


Production animale | Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse

A

B

C

D

E

F

Figure 2 | Echantillons analysés. A = avoine, B = Alikon, C = orge, D = maïs, E = tourteau de pression de colza, F = graines de soja

solvants non polaires comme l’hexane ou l’éther pétrole et, en même temps, une diversité de composés non lipidiques sera extraite (pigments, vitamines, chlorophylle, etc.) ainsi que des cires. De plus, certains composés hydrophiles (urée, hexoses) seront aussi extraits lorsque le solvant utilisé est un peu plus polaire comme l’éther diéthylique (Palmquist et al. 2003). Malgré leur caractère approximatif, ces méthodes empiriques sont toujours d’actualité en raison de leur simplicité d’utilisation, mais aussi parce que les outils d’optimisation des rations alimentaires sont basés sur la MG. La voie qui passe par l’identification/quantification des différents acides gras, par exemple par GC-FID, permet une analyse plus rationnelle et descriptive de la teneur en lipides. Cependant, l’extraction préalable, exhaustive, des lipides polaires et non polaires, n’est pas aisée. Ainsi, des méthodes de transestérification in situ gagnent en intérêt, car elles procèdent à l’hydrolyse de lipides y compris les molécules très complexes, et estérifient par méthylation les acides gras ainsi libérés, le tout en une seule étape (Jenkins 2010). Ceci implique des conditions de réaction moins sévères que dans les méthodes à deux étapes qui se traduit par un gain dans la préservation des lipides et par une réduction considérable de la quantité des solvants, des réactifs et du

332

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

temps de manipulation (Carrapiso et al. 2000). La méthode GC in situ (GC-IS) présentée ici a été adaptée d’Alves et al. (2008, 2009) et de Palmquist et al. (2003). Cet article illustre les résultats de l’analyse de lipides dans des matières premières et aliments pour animaux en comparant trois méthodes différentes: une méthode gravimétrique (Weibull-Berntrop), une méthode GC-FID en deux étapes (extraction puis estérification) et une méthode GC-FID par transestérification in situ. Ces deux dernières permettent la détermination de la composition de lipides en plus de la teneur en graisse totale (GT), tandis que la première ne détermine que la MG. Selon la FDA (U.S. Food and Drug Administration), dans le cas des denrées alimentaires, la graisse totale est déterminée par la somme de tous les acides gras extraits exprimée sous forme de triglycérides (Eller 1999); la GT est ainsi assimilable à la MG. De plus, la validation de la méthode GC in situ est présentée ici.

Matériel et méthode Les échantillons La comparaison des méthodes analytiques a été réalisée avec une série de 29 échantillons, parmi lesquels des matières premières: du blé, de l’orge, de l’avoine, du


Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse | Production animale

maïs, des germes de blé, des drêches de brasserie, du tourteau de pression de colza, des graines de soja, des graines de tournesol; des aliments complets: aliment pour porc à l’engrais, pour porcelet, pour truie; ainsi que: de la bouillie, des déchets de pâtes et de l’Alikon (graisse végétale cristalisée). L’exactitude de la méthode GC-IS a été déterminée avec un échantillon de référence certifié: BCR® – 163: Beef-Pork Fat Blend (IRMM), et l’incertitude avec quatre échantillons, dont de l’orge, deux aliments pour porc et un échantillon de tissu adipeux porcin. A l’exception du tissu adipeux, tous les échantillons ont été moulus avec un moulin à couteaux Brabender (1 mm). Les échantillons avec GT > 15 % ont été moulus avec de l’N2 liquide. Les échantillons de tissus adipeux et de bouillie ont été lyophilisés puis moulus. La teneur en matière sèche (MS) a été déterminée dans tous les échantillons par séchage au four à 105 °C pendant 2 h 40 (basée sur ISO 6496:1999). Les trois méthodes utilisées La méthode gravimétrique Selon la méthode Weibull-Berntrop, l’échantillon est hydrolysé avec du HCl 10 % bouillant pendant 1h. Après rinçage à l’eau jusqu’à pH neutre, l’échantillon est séché dans un four à micro-ondes (30 min, 300 W). Puis l’échantillon est placé dans un système du type Soxtec et extrait avec de l’éther pétrole à 135 °C pendant 85 min. Le résidu (MG) après évaporation du solvant est pesé et exprimé en g/kg MS. La méthode GC en 2 étapes (GC-2E) Etape d’extraction: 0,5 à 50 g d’échantillon sont placés dans un bécher, 1 ml de standard interne (C13 FAME (ester méthylique de l’acide gras)) est additionné ainsi que 60 ml de dichlorométhane:méthanol 2:1 (v:v). Le tout est mixé puis laissé reposer pendant 15 min. Les composés non lipidiques sont séparés par l’addition de 1 ml de MgCl2 (2 % dans de l’eau) et de 20 ml H2O ; ils se concentrent dans la phase aqueuse formée après filtration et 1h de repos. La phase organique contenant les lipides (couche inférieure) est récupérée, puis évaporée à 40 °C et 600 – 550 mbar. Le résidu solide est quantitativement récupéré dans de l’hexane et le solvant à nouveau évaporé. Etape d’estérification: pour cela, 2 ml de NaOH (0,5 M dans méthanol) sont additionnés au résidu solide et le tout est laissé reposer pendant 30 min, puis bouilli pendant 2 min (pour une saponification complète). Ensuite, 3 ml de BF3 (10 % dans méthanol) sont additionnés et le tout bouilli encore 4 min. Après retour à température ambiante, 7 ml de NaCl (1,5 % dans H2O) et 3 ml d’heptane sont additionnés. Après mélange et centrifugation (5 min à 3000 rpm), 1 μl (aliquote filtré) de la couche supérieure contenant de l’ester

méthylique des acides gras (FAME) est directement injecté dans le GC. Le système GC (HP 5890) est équipé d’une colonne SupelcowaxTM 10 (30m × 0,32mm, 0.25 μm). L’échantillon est injecté avec une partition 100:1, dans un flux d’N2 (1,15 ml/min). La température du détecteur FID est de 250 °C. Le programme thermique du four est le suivant: 1 min à 170 °C, monté à 210 °C à 2,5 °C/min, puis à 220 °C à 0,5 °C/min, suivis de 5 min à 220 °C, monté à 250 °C à 15°C/min, et finalement 6 min à 250 °C. La méthode par transestérification in situ (GC-IS) Transestérification: 250 mg d’échantillon sont placés dans un tube hermétique en téflon avec 0,25 à 2 ml de standard interne (C19 FAME), 3 à 6 ml HCl (5 % dans du méthanol) et entre 0 et 1,75 ml de toluène (ces proportions ont été adaptées et peuvent varier selon le type d’échantillon). Le tube fermé est placé à 70 °C pendant 3h. Après retour à température ambiante, le mélange est neutralisé avec 5 à 8 ml de K2CO3 (6 % dans H2O). Après addition de 2 ml de pentane, le mélange est centrifugé (5 min à 2500 rpm), puis la phase organique (couche supérieure) est transvasée dans un tube contenant 1 g de Na2SO4 anhydre et 0,2 g de charbon actif. Après 1h de repos puis centrifugation (5 min à 2500 rpm), la phase organique est récupérée et évaporée à 40 °C. Purification au SPE: 1 ml de dichlorométhane est additionné au résidu solide, 250 à 500 μl de cette solution sont évaporés à 40 °C. Le résidu est dissous dans 100 μl de dichlorométhane puis placé dans une cartouche SPE pré-conditionnée (LiChrolut Si (40 – 63 μm), Merck 1.02024.0001). Le mélange de FAME est élué avec 2,5 ml de dichlorométhane, desquels les premiers 0,5 ml sont rejetés car ils pourraient contenir des impuretés telles que des phytadiènes (Alves et al. 2009). Les 2 ml suivants sont récupérés et évaporés à sec à 40 °C. Le résidu solide est dissous dans 1 ml de pentane, 1 μl de cette solution est injecté dans le GC. Le système GC (Agilent 6810) est équipé d'une colonne polaire SupelcowaxTM 10 (15 m × 0,1 mm, 0,1 μm). L’échantillon est injecté avec une partition de 150 : 1 et un flux d’H2 (1 ml/min). La température du détecteur FID est de 250 °C. Le programme thermique du four est le suivant: 0,2 min à 170 °C, puis monté à 210 °C à 11 °C/min, puis à 220 °C à 2 °C/min, 2 min à 220 °C, puis monté à 230 °C à 50 °C/min et maintenu à 230 °C pendant 5 min. Pour les deux méthodes GC, la quantification de chaque FAME se fait à l’aide du standard interne (voir chromatogramme type dans la figure 2). La somme de tous les FAME identifiés, comptabilisés en tant que triglycérides (par division par le facteur 0,956), constitue la teneur en graisse totale (GT),  exprimée en g/kg MS.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

333


Production animale | Composition des acides gras dans l’alimentation animale – mÊthodes d’analyse

Tableau 1 | Teneurs (moyenne de deux rĂŠplicas Âą sd) en GT (graisse totale), SFA (ac. gras saturĂŠs), MUFA (ac. gras mono-insaturĂŠs) et PUFA (ac. gras poly-insaturĂŠs), selon 3 mĂŠthodes: GC-IS (GC-FID in-situ), GC-2E (GC-FID 2 ĂŠtapes) et extraction Echantillon

GT [g/kg MS]

SFA [g/kg MS]

*

GC-IS

GC-2E

Extraction

MUFA [g/kg MS]

PUFA [g/kg MS]

GC-IS

GC-2E

GC-IS

GC-2E

GC-IS

GC-2E 10,2 Âą 0,6

BlĂŠ a

24,0 Âą 0,0

15,9 Âą 1,1

15,9 Âą 1,9

5,9 Âą 0,0

3,2 Âą 0,2

2,9, Âą 0,1

1,8 Âą 0,1

14,1 Âą 0,0

BlĂŠ b

26,1 Âą 0,2

14,2 Âą 0,7

21,9 Âą 1,7

5,6 Âą 0,0

2,6 Âą 0,1

3,4 Âą 0,1

1,8 Âą 0,1

15,9 Âą 0,1

9,2 Âą 0,4

Orge a

30,9 Âą 1,2

21,4 Âą 0,5

24,5 Âą 0,7

8,3 Âą 0,3

4,6 Âą 0,1

4,7 Âą 0,1

3,2 Âą 0,1

15,2 Âą 0,7

12,6 Âą 0,3

Orge b

37,5 Âą 1,2

18,4 Âą 0,5

23,6 Âą 2,0

8,7 Âą 0,1

4,0 Âą 0,1

6,0 Âą 0,2

2,9 Âą 0,1

21,2 Âą 0,9

10,8 Âą 0,3

Avoine a

43,1 Âą 1,1

35,6 Âą 0,4

43,1 Âą 0,2

11,3 Âą 0,1

7,1 Âą 0,0

15,4 Âą 0,5

12,4 Âą 0,2

14,3 Âą 0,5

14,6 Âą 0,2

Avoine b

47,3 Âą 2,1

42,0 Âą 0,5

45,5 Âą 2,5

11,8 Âą 0,4

8,2 Âą 0,1

17,9 Âą 0,7

15,7 Âą 0,2

15,1 Âą 0,9

16,2 Âą 0,3

MaĂŻs a

59,4 Âą 2,2

43,8 Âą 0,3

50,1 Âą 1,9

8,6 Âą 0,2

5,8 Âą 0,0

14,0 Âą 0,5

10,6 Âą 0,1

34,1 Âą 1,3

25,5 Âą 0,2

MaĂŻs b

70,1 Âą 3,0

55,2 Âą 0,1

51,0 Âą 0,9

9,5 Âą 0,2

6,9 Âą 0,0

19,8 Âą 0,9

16,0 Âą 0,0

37,7 Âą 1,8

29,9 Âą 0,1

Pâtes a

36,0 Âą 1,5

17,2 Âą 1,0

29,6 Âą 0,0

9,7 Âą 0,3

4,6 Âą 0,3

9,6 Âą 0,4

5,2 Âą 0,3

15,0 Âą 0,7

6,6 Âą 0,4

Pâtes b

38,3 Âą 0,4

16,5 Âą 0,6

30,8 Âą 0,4

10,0 Âą 0,1

4,2 Âą 0,2

9,8 Âą 0,1

4,9 Âą 0,2

16,0 Âą 0,2

6,6 Âą 0,2

Bouillie a

42,2 Âą 0,3

26,8 Âą 0,2

34,4 Âą 0,6

16,2 Âą 0,1

10,9 Âą 0,2

12,8 Âą 0,2

8,2 Âą 0,1

10,8 Âą 0,1

6,6 Âą 0,0

Bouillie b

268,0 Âą 4,1

172,8 Âą 0,0

273,0 Âą 13,3

110,7 Âą 1,7

74,2 Âą 0,1

89,3 Âą 1,2

57,3 Âą 0,0

51,1 Âą 0,7

33,6 Âą 0,1 13,8 Âą 0,3

Aliment porc d'engr.

24,6 Âą 1,1

24,9 Âą 0,1

29,0 Âą 0,1

6,3 Âą 0,2

5,3 Âą 0,1

4,4 Âą 0,2

4,7 Âą 0,1

12,8 Âą 0,7

Aliment porcelet a

62,6 Âą 2,5

46,4 Âą 0,5

57,9 Âą 0,2

18,1 Âą 0,7

12,5 Âą 0,1

19,4 Âą 0,9

14,5 Âą 0,2

21,7 Âą 0,8

17,3 Âą 0,2

Aliment porcelet b

65,5 Âą 0,4

46,5 Âą 0,3

59,1 Âą 2,9

23,9 Âą 0,5

17,3 Âą 0,1

20,6 Âą 0,1

15,2 Âą 0,1

17,1 Âą 0,1

12,0 Âą 0,0

Aliment truie a

75,9 Âą 1,1

55,5 Âą 0,9

61,2 Âą 2,2

23,3 Âą 0,5

17,8 Âą 0,3

26,0 Âą 0,4

19,1 Âą 0,3

22,2 Âą 0,3

16,1 Âą 0,2

Aliment truie b

77,5 Âą 0,8

64,8 Âą 0,4

66,1 Âą 2,2

24,6 Âą 0,1

21,2 Âą 0,2

23,2 Âą 0,2

19,6 Âą 0,1

25,2 Âą 0,3

21,2 Âą 0,1

Germe de blĂŠ a

76,0 Âą 4,6

64,0 Âą 0,0

67,4 Âą 4,2

15,4 Âą 0,7

13,3 Âą 0,0

11,4 Âą 0,8

9,8 Âą 0,0

44,9 Âą 3,3

38,1 Âą 0,0

Germe de blĂŠ b

78,6 Âą 0,7

64,6 Âą 0,0

n.d.

15,8 Âą 0,1

13,2 Âą 0,0

12,4 Âą 0,1

10,4 Âą 0,0

46,6 Âą 0,5,

38,1 Âą 0,0

DrĂŞches a

108,9 Âą 0,7

86,1 Âą 0,3

101,6 Âą 0,7

31,3 Âą 0,1

23,1 Âą 0,1

14,4 Âą 0,1

9,8 Âą 0,2

57,9 Âą 0,5

49,3 Âą 0,3

DrĂŞches b

109,1 Âą 0,1

86,5 Âą 1,3

90,7 Âą 2,2

30,1 Âą 0,1

23,1 Âą 0,3

14,0 Âą 0,0

10,1 Âą 0,3

58,8 Âą 0,2

49,5 Âą 0,7

Tourteau de colza a

112,6 Âą 3,5

109,0 Âą 0,1

105,9 Âą 1,8

15,7 Âą 0,7

15,8 Âą 0,1

61,2 Âą 1,7

58,5 Âą 0,1

30,2 Âą 1,0

29,8 Âą 0,0

Tourteau de colza b

106,8 Âą 3,5

102,0 Âą 0,5

92,9 Âą 1,5

10,8 Âą 0,7

9,9 Âą 0,0

59,7 Âą 1,7

57,3 Âą 0,3

30,9 Âą 1,0

30,3 Âą 0,1

Graines de soja a

248,7 Âą 5,4

250,8 Âą 2,0

216,4 Âą 1,6

38,1 Âą 0,4

39,4 Âą 0,0

56,1 Âą 1,2

56,3 Âą 0,0

142,9 Âą 3,7

144,0 Âą 1,9

Graines de soja b

272,9 Âą 0,4

258,7 Âą 1,2

213,8 Âą 1,6

43,0 Âą 0,0

41,2 Âą 0,3

63,2 Âą 0,6

59,0 Âą 0,2

154,4 Âą 0,3

147,0 Âą 0,7

Tournesol a

374,8 Âą 10,0

357,5 Âą 4,7

351,7 Âą 24,1

40,2 Âą 1,2

38,0 Âą 0,5

90,6 Âą 1,8

84,5 Âą 0,8

225,7 Âą 6,2

219,1 Âą 3,1

Tournesol b

517,7 Âą 0,1

511,3 Âą 1,1

486,3 Âą 27,0

55,6 Âą 0,4

54,1 Âą 0,2

103,7 Âą 0,2

103,3 Âą 0,5

333,5 Âą 0,3

331,2 Âą 0,8

Alikon a

998,1 Âą 1,5

1031 Âą 4,6

935,9 Âą 7,4

947,7 Âą 1,1

979,7 Âą 4,0

4,7 Âą 0,2

4,4 Âą 0,3

1,1 Âą 0,0

1,4 Âą 0,1

Alilkon b

1010,1 Âą 10,9

1011,6 Âą 3,7

n.d.

959,5 Âą 10,1

961,0 Âą 3,2

4,5 Âą 0,3

4,0 Âą 0,1

1,1 Âą 0,1

1,6 Âą 0,2

*GT: correspond Ă MG par la mĂŠthode d'extraction. n.d.: non dĂŠtectĂŠ.

La caractÊrisation analytique de la mÊthode GC-IS L’exactitude de cette mÊthode a ÊtÊ dÊterminÊe par comparaison avec un Êchantillon certifiÊ, en utilisant l’incertitude combinÊe de la valeur certifiÊe et de la valeur mesurÊe (à 95 % intervalle de confiance du t test bilatÊral de Student).

oĂš uđ??şđ??śâˆ’đ??źđ?‘† est l’incertitude de GC-IS, đ?‘˘đ??ľđ??śđ?‘…1632 celle de l’Êchantillon certifiĂŠ et đ?‘˘âˆ† l’incertitude combinĂŠe oĂš sd est l’Êcart-type et n le nombre de mesures).

334

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

U∆ = k u∆ oĂš k est le facteur d’Êlargissement (facteur t du test bilatĂŠral de Student Ă 95 % d’intervalle de confiance) et U∆ l’incertitude combinĂŠe ĂŠlargie. Pour la dĂŠtermination de l’incertitude, dix rĂŠplicas de quatre ĂŠchantillons diffĂŠrents ont ĂŠtĂŠ analysĂŠs sur une pĂŠriode de deux mois par diffĂŠrents opĂŠrateurs mais dans le mĂŞme laboratoire. L’incertitude ĂŠlargie, U, a ÊtĂŠ calculĂŠe en % de la valeur moyenne, Ă 95 % d’intervalle de confiance du t test bilatĂŠral de Student, avec car l’analyse en routine comprend uniquement đ?‘˘= deux rĂŠplicas.


Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse | Production animale

10%

20%

0% SFA (GC-2E - GC-IS)

Différence en GT

10% 0% -10% -20% -30% -40%

-20% -30% -40% -50%

-50% -60%

-10%

0

50

100

150 GT [g/kg MS]

200

250

-60%

300

-10% -20% -30% -40% -50% -60%

50

100

150 GT [g/kg MS]

200

250

300

0

50

100

150

200

250

300

10%

0% PUFA (GC-2 E - GC-IS)

MUFA (GC-2E - GC-IS)

10%

0

0

50

100

150

200

GT [g/kg MS]

-20% -30% -40% -50% -60%

300

250

0% -10%

GC-2E - GC-IS

Ext. - GC-IS

GT [g/kg MS]

Figure 3 | Différences des GT entre GC-2E et GC-IS ainsi qu’entre Extraction et CG-IS (en % par rapport à GT selon GC-IS), versus GT selon GC-IS.

Résultats et discussion

dans l’avoine ont été correctement déterminées par les deux méthodes (tabl. 2). La fraction de lipides neutres/ polaires dans l’avoine est de l’ordre de 80 à 90 %, avec > 94 % sous forme de triglycérides (Banaś et al. 2007), tandis que dans les autres céréales cette fraction est plus faible (75 % dans l’orge selon Newman et al. 2008). Ces particularités s’observent aussi avec la méthode d’extraction. Dans le cas des aliments, cette différence peut être négligeable (1,2 %) ou de l’ordre de 16 à 29 %. Le cas des aliments composés dépend de leur composition, ainsi la présence de lipides neutres facilitera leur extraction. Finalement, les échantillons testés avec des teneurs en graisse totale > 110 g/kg MS, tels que: tourteaux de colza, graines de soja, graines de tournesol et Alikon ne présentent que de très faibles différences, de 0 à 5 %. En effet, l'Alikon de même que les tissus adipeux sont majoritairement composés des triglycérides (Doreau et al.  1991, Murphy et al. 1998).

Teneurs en lipides selon trois méthodes analytiques Le tableau 1 présente les teneurs en lipides dans 29 échantillons différents, déterminées selon trois méthodes analytiques. Chaque résultat est la moyenne des deux déterminations indépendantes. Dans le cas des échantillons utilisés dans cette étude, d’une façon générale, la méthode GC-IS donne des teneurs en graisse totale plus élevées que les deux autres, tandis que la méthode GC-2E présente le plus souvent les valeurs les plus faibles. Les différences les plus marquées entre GC-2E et GC-IS (exprimées par rapport à GT selon GC-IS) s’observent dans le cas des céréales analysées (GT de 24 à 47 g/kg MS) (fig. 3) et produits céréaliers, avec des différences de l’ordre de 30 à 50 % pour le blé et l’orge, de 10 à 26 % pour l’avoine, le maïs, les germes de blé et les drêches de brasserie. Contrairement aux autres céréales, les teneurs en PUFA

Tableau 2 | Certains acides gras déterminés dans des céréales par les méthodes GC-IS et GC-2E Blé a

Blé b

Orge a

Orge b

Avoine a

Avoine b

[g/kg MS]

GC-SI

GC-2E

GC-SI

GC-2E

GC-SI

GC-2E

GC-SI

GC-2E

GC-SI

GC-2E

GC-SI

GC-2E

C16 : 1 t3

5,3

2,4

5,6

2,9

7,6

4,1

8,1

3,6

10,2

6,2

10,7

7,2

C18 : 1 c9

2,9

1,7

2,5

1,7

4,1

3,0

5,4

2,7

14,2

11,4

16,7

14,8

C18 : 2 c9c12

14,8

8,5

13,2

9,4

15,2

11,4

19,8

9,9

13,9

13,9

14,6

15,5

C18 : 3 c9c12c15

1,0

0,7

0,9

0,7

1,2

1,1

1,4

0,8

0,4

0,6

0,4

0,6

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

335


Production animale | Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse

Tableau 3 | Détermination de l’exactitude de la méthode GC-SI par comparaison entre les différences de valeurs moyennes, Δ m , et de l’incertitude combinée élargie, UΔ (en valeurs absolues) BCR® – 163: Beef – Pork Fat Blend

BCR163

GC-IS

%

C14

C16

C16 : 1

C18

C18 : 1

C18 : 2

C18 : 3

MRC

2,29

25,96

2,58

18,29

38,3

7,05

0,86

U

0,04

0,3

0,16

0,17

0,4

0,17

0,14

n

11

11

11

11

12

11

10

moyenne

2,22

26,23

2,55

18,18

39,51

8

0,76

U

0,08

0,54

0,06

0,16

0,48

0,11

0,02

n

28

28

28

28

28

28

28

∆m

0,07

0,27

0,03

0,11

1,21

0,95

0,1

0,08

0,59

0,16

0,22

0,59

0,19

0,12

U∆

BCR163: Echantillon de référence certifié: BCR® – 163 : Beef-Pork Fat Blend (IRMM). MRC : Valeur certifiée. U : Incertitude élargie, à 95 % intervalle de confiance du t test bilatéral de Student. n: nombre de réplicas.

Tableau 4 | Incertitude (exprimée en % de la moyenne) de la méthode GC-SI, calculée à 95 % d’intervalle de confiance du t test bilatéral de Student.

Orge Aliment a Aliment b Tissu adip.

[g/kg MS]

n

SFA

MUFA

PUFA

GT

moyenne

20

6,9

4,5

18,9

31,7

7,30 %

11,70 %

11,20 %

10,10 %

10,3

6,6

16

34,5

6,30 %

8,50 %

9,40 %

7,70 %

U moyenne

20

U moyenne

20

U moyenne

16

U

12,4

26,3

31,9

74,3

3,50 %

6,90 %

7,70 %

6,40 %

348,5

440,8

139,5

973,1

1,70 %

3,80 %

3,80 %

2,70 %

La teneur en graisse totale déterminée par la méthode d’extraction est en général sous-évaluée (6 à 22 %) dans les échantillons oléagineux, probablement due à une extraction incomplète. La GT est aussi sous-évaluée dans les céréales (16 à 37 %), à l’exception de l’avoine (0 à 4 %). Par contre, dans les aliments complets, la méthode d’extraction peut donner des valeurs sous ou surévaluées. Exactitude et incertitude de la méthode GC-IS Il y a une bonne correspondance entre les déterminations par GC-IS et les valeurs certifiées du BCR-163 (tabl. 3). C’est seulement pour les acides oléique et linoléique, C18:1 et C18:2, que la différence de valeurs moyennes dépasse l’incertitude combinée élargie (∆m > U∆), mais dans ces cas la valeur GC-SI > la valeur certifiée, ce qui pourrait signifier que la méthode GC-SI est plus complète. L’incertitude calculée pour GT, SFA, MUFA et PUFA, dans quatre échantillons différents, montre des valeurs en-dessous de 12% (tabl. 4).

336

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

Conclusions La détermination de la graisse totale ainsi que de la composition des lipides dans différentes matières premières et des aliments pour animaux montre des résultats plus précis avec la méthode GC-IS qu’avec les méthodes GC-2E ou par extraction (uniquement MG), ce qui représente un avantage indéniable dans l’optimisation de l’aliment pour porc. Néanmoins, ces deux dernières méthodes peuvent donner des résultats corrects dans certains cas (échantillons composés majoritairement de triglycérides). La MG peut être avantageusement remplacée par GT déterminée par la méthode GC-IS. n


Composizione di acidi grassi negli alimenti per animali – metodi di analisi Il presente articolo illustra l’importanza del metodo analitico nella determinazione della composizione di acidi grassi negli alimenti per animali. In particolare nell’alimentazione dei suini in cui, in Svizzera, sono necessari per formulare una razione adatta a fornire una qualità ottimale di grasso nella carcassa del suino non solo il tenore in grasso ma anche il profilo di acidi grassi. Lo studio mostra che il metodo GC (cromatografia in fase gassosa) mediante transesterificazione in situ è più preciso e completo rispetto al metodo GC in due fasi (mediante estrazione dei corpi grassi, poi esterificazione) e al metodo empirico, mediante gravimetria, che consiste nell’estrazione dei composti solubili in un solvente dato.

Bibliographie ▪▪ Alves S. P., Cabrita A. R. J., Fonseca A. J. M. & Bessa R. J. B., 2008. Improved method for fatty acid analysis in herbage based on direct transesterification followed by solid-phase extraction. J. of Chromatography A. 1209, 212–219. ▪▪ Alves S. P., Cabrita A. R. J., Fonseca A. J. M. & Bessa R. J. B., 2009. Effect of a Purification Step and the Type of Internal Standard Used on Fatty Acid Determination of Grass and Maize Silages. J. Agric. Food Chem . 57, 10793–10797. ▪▪ Banaś A., Dębski H., Banaś W., Heneen W. K., Dahlqvist A., Bafor M,. Gummeson P.-O., Marttila S., Ekman Ǻ., Carlsson A. S. & Stymne S., 2007. Lipids in grain tissues of oat (Avena sativa): differences in content, time of deposition, and fatty acid composition. J. of Experimental Botany 58 (10), 2463–2470. ▪▪ Carrapiso A. I. & García C., 2000. Development in Lipid Analysis: Some New Extraction Techniques and in situ Transesterification. Lipids 35 (11), 1167–1177. ▪▪ Christen P., 2014. Nouveaux critères d’appréciation de la qualité de la graisse des porcs. Accès: http://www.schweizerfleisch.ch/fileadmin/dokumente/downloads/Medienmitteilung/2014/20140305/ Faktenblatt_f_20140224.pdf

Summary

Riassunto

Composition des acides gras dans l’alimentation animale – méthodes d’analyse | Production animale

Determination of fatty acid compo­ sition in feed – analytical methods This paper illustrates the importance of the analytical method for the determination of fatty acid composition in feed. In Switzerland, not only the lipid content but also the fatty acids profile are necessary to formulate a ration that will produce an optimum quality of fat in the pig carcass. Results of this study showed that the fatty acid profile obtained by gas chromatography (GC) with in situ transesterification was more accurate and complete than that obtained by a GC method in two steps (fat extraction followed by esterification) or by a gravimetric empirical method which employed the extraction of soluble compounds in a given solvent. Key words: FAME, fatty acid composition, GC-FID trans-esterification, total fat content.

▪▪ Christie W. W., 1993. Preparation of ester derivatives of fatty acids for chromatographic analysis. In: Advances in Lipid Methodology – Two (Ed. W. W. Christie). The Oily Press LTD. Vol 4, 69–112. ▪▪ Doreau M., Chilliard Y., Bauchart D. & Michalet-Doreau B., 1991. Influence of different fat supplements on digestibility and ruminal digestion in cows. Ann. Zootech . 40, 19–30. ▪▪ Eller F. J., 1999. Interference by methyl levulinate in determination of ­t otal fat in low-fat, high sugar products by gas chromatographic fatty acid methyl ester (GC-FAME) analysis. J. Assoc. of Anal. Chem. Int. 82, 766–769. ▪▪ Hammond E. W., 2001. Lipid analysis –a 20th century success?. J. Science & Food Agriculture 82, 5–11. ▪▪ Jenkins T. C., 2010. Technical note: Common analytical errors yielding ­i naccurate results during analysis of fatty acids in feed and digesta ­s amples. J. Dairy Sciences 93, 1170–1174. ▪▪ Murphy D. J. & Vance J., 1999. Mechanisms of lipid-body formation. Trends in Biochemical Sciences (TiBS) 24 – March), 109–115. ▪▪ Newman R. K. & Newman C. W., 2008. Lipids. In: Barley for Food and Health (Ed. J. Wiley & Sons) Technology & Engineering, 72–74. ▪▪ Palmquist D. L. & Jenkins T. C., 2003. Challenges with fats and fatty acid methods. J. of Animal Science 81, 3250–3254.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 330–337, 2014

337


S o c i é t é

Qui achète des aliments bio en Suisse? Franziska Götze et Ali Ferjani Agroscope, Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, 8356 Ettenhausen, Suisse Renseignements: Franziska Götze, e-mail: franziska.goetze@agroscope.admin.ch

Figure 1 | Une grande variété de produits bio est aujourd’hui disponible, non plus uniquement sur le marché des légumes, mais dans la plupart des groupes de denrées alimentaires. (Photo: Bio Suisse)

Introduction Le marché des aliments bio est un marché dynamique en perpétuelle évolution. Etant donné la demande croissante d’aliments bio, l’éventail et la variété des produits n’ont cessé de se développer sur le marché bio ces dernières années (fig. 1). L’évolution du chiffre d’affaires confirme cette tendance de croissance (Bio Suisse 2014). D’une part, il est utile de connaître le comportement des consommateurs, car cela permet de comprendre les décisions d’achat des consommateurs et des consommatrices. D’autre part, il est également important de comprendre les acheteurs et les acheteuses, ainsi que leurs motivations à acheter des aliments bio pour pouvoir adapter la politique agricole (suisse) de manière constructive. Cette analyse avait pour but d’identifier les facteurs qui déterminent l’achat d’aliments bio et de mesurer leur influence. Pour savoir quels facteurs sont impor-

338

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 338–343, 2014

tants pour l’achat d’aliments bio, pour la première fois depuis 2001, une série de données issues de l’enquête sur le budget des ménages (EBM) a été analysée.

Matériel et méthodes Base de données Depuis le début des années 1990, l’Office fédéral de la statistique (OFS) procède à des relevés de données sur le revenu et la consommation ainsi que sur les caractéristiques sociodémographiques des ménages privés suisses. Depuis 2000, ces relevés sont mensuels. Les ménages interrogés sont sélectionnés de manière aléatoire. Environ 3000 ménages participent chaque année. L’OFS veille à ce que la structure des ménages présents dans l’échantillon soit représentative de la population résidant en Suisse de manière permanente. Pendant la période de l’enquête, les ménages participants documentent leurs dépenses et leurs revenus. La participation des ménages à l’enquête se limite toutefois à un mois. Par conséquent,


il ne s’agit pas ici d’une enquête par panel, mais d’une enquête par coupes transversales répétées (repeated cross-section). Description de l’échantillon En 2006, l’enquête sur le budget des ménages a fait l’objet d’une révision. C’est pourquoi l’échantillon utilisé pour cette analyse provient des six années comprises entre 2006 et 2011. L’échantillon comprend au total 19 653 ménages privés résidant en Suisse, qui se répartissent sur les six ans à parts relativement égales. L’échantillon comprend d’une part des variables sociodémographiques, qui caractérisent les ménages. Ce sont les régions géographiques et linguistiques ainsi que les cantons, dans lesquels se trouvent les ménages. Par ailleurs, le revenu, la structure du ménage (nombre de personnes, nombre et âge des enfants, informations sur la personne qui contribue le plus au revenu du ménage [= personne de référence] etc.) et l’équipement en biens de consommation (p. ex. voitures et télévision) sont également documentés. Cette analyse n’utilise cependant que la partie des variables de l’EBM pertinente pour la problématique. L’enquête indique également les quantités et les dépenses de consommation des ménages. Hormis les aliments et les boissons, toutes les autres dépenses des ménages (p. ex. pour le logement, l’énergie et les vêtements) sont ainsi consignées. Les aliments et les boissons sont classés en produits «bio» et «conventionnels». Les aliments sont également répartis en neuf groupes qui sont chacun différenciés par produits (fig. 2). Les produits bio gagnent des parts de marché Le dépouillement des données de l’EBM indique une évolution positive des parts de marché des aliments bio pour la plupart des catégories de produits (fig. 2). Si les aliments bio représentaient moins de 7 % des dépenses en 2006, ce pourcentage a augmenté de plus d’un point en 2011. Mesurés en pourcentages de dépenses, en 2006, comme en 2011, ce sont les légumes qui constituent le produit bio le plus populaire, suivis par les produits laitiers et les œufs, ainsi que les fruits. Tous ces groupes de produits ont gagné des parts de marché au fil du temps. Cependant, ce classement ne permet pas de tirer de conclusions sur les dépenses moyennes par ménage et par mois pour le produit bio correspondant. Les principales dépenses des ménages concernaient les produits laitiers et les œufs bio (24.33 fr. par ménage et par mois), puis les légumes bio (23.39 fr.) et enfin les fruits bio (17.31 fr.). Il est intéressant de constater que les ménages qui ont acheté des produits laitiers et des œufs bio, ont également dépensé en moyenne plus pour les produits

Résumé

Qui achète des aliments bio en Suisse? | Société

Le marché des aliments bio s’est développé rapidement ces dernières années. Mais à ce jour, on sait encore peu de chose sur les facteurs qui déterminent l’achat d’aliments bio. Dans le cadre de cette étude, les données de ménages suisses sur la consommation de produits bio ont été analysées de manière descriptive et économétrique. La mise en valeur de ces données confirme la tendance croissante pour les aliments bio globalement, mais aussi pour les neuf groupes de produits considérés (pain et produits à base de céréales; viande; poisson; produits laitiers et œufs; graisses et huiles alimentaires; fruits; légumes; sucres et confiseries; épices et sauces). Les produits bio les plus populaires sont les légumes, les produits laitiers et les œufs ainsi que les fruits. C’est la consommation de légumes bio qui augmente le plus rapidement. L’analyse montre que la structure sociodémographique des ménages influence la décision d’acheter ou non des aliments bio. Plus le revenu est élevé, plus il est probable que les ménages achètent des aliments bio. L’âge de la personne de référence dans le ménage et la présence d’enfants jouent également un rôle. Les ménages sans enfant ont plus tendance à acheter des aliments bio que les ménages avec enfants.

conventionnels (91.11 fr. par mois) que les ménages qui n’ont pas acheté de produits laitiers bio (87,96 fr. par mois). C’est également valable pour les légumes et les fruits bio, à savoir que les ménages qui consommaient les produits bio, dépensaient en moyenne davantage pour la variante conventionnelle du produit. La viande bio est le produit qui a enregistré la plus faible variation de sa part de marché. Le pourcentage n’a que légèrement augmenté (moins d’un point de pourcentage), cependant dans ce groupe de produits, les dépenses mensuelles moyennes pour des produits conventionnels sont plus élevées que dans tous les autres groupes de produits. Méthodologie Afin d’identifier les facteurs déterminants pour la décision d’achat d’aliments bio, un modèle logit binominal mixte a été utilisé. Ce modèle prend en compte les effets fixes (fixed effects) qui correspondent aux coefficients de régression, mais aussi les effets aléatoires (random  effects).

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 338–343, 2014

339


SociÊtÊ | Qui achète des aliments bio en Suisse?

Source: Haushaltsbudgeterhebung (HABE), Bundesamt fĂźr Statistik, Neuenburg

14%

12%

10%

8%

6%

4%

0% 2006 2007 2008 2009 2010 2011

2006 2007 2008 2009 2010 2011

2%

DenrĂŠes Pain, produits Ă alimentaires, total base de cĂŠrĂŠales 6,54% 6,75% 7,01% 7,39% 7,50% 8,02%

6,45% 7,19% 6,75% 6,79% 7,15% 7,61%

Viande

Poisson

4,57% 4,60% 4,82% 4,99% 4,60% 4,91%

4,29% 4,37% 5,09% 6,43% 7,33% 6,33%

Lait, fromage, oeufs 9,02% 10,55% 9,26% 9,96% 10,11% 11,22%

Graisses, huiles alimentaires

Fruits

LĂŠgumes

8,30% 9,33% 8,38% 9,39% 9,77% 9,56%

8,52% 9,52% 8,96% 9,68% 9,91% 10,61%

9,26% 11,13% 11,12% 11,74% 11,63% 13,57%

Sucre, confitures, miel, confiseries, etc. 2,68% 3,03% 2,61% 2,81% 2,68% 3,07%

Sauces, sel, ĂŠpices, soupes, etc. 4,67% 4,85% 4,78% 5,13% 5,76% 5,17%

Figure 2 | Evolution des parts de marchĂŠ de diffĂŠrentes catĂŠgories d’aliments bio dans les donnĂŠes de l’enquĂŞte sur le budget des mĂŠnages (EBM 2006–2011), par rapport aux dĂŠpenses totales (bio et conventionnel). (Source: EnquĂŞte sur le budget des mĂŠnages (EBM), Office fĂŠdĂŠral de la statistique, Neuchâtel)

Pour estimer la probabilitĂŠ de succès des variables dĂŠpendantes, les mĂŠnages ont ĂŠtĂŠ rĂŠpartis en acheteurs et non-acheteurs d’aliments bio. La variable dĂŠpendante đ?‘Śđ?‘– a une valeur de 1 lorsque le mĂŠnage a achetĂŠ au moins un aliment bio durant le mois d’observation. Sinon, elle a une valeur 0. A partir de lĂ , la probabilitĂŠ d’achat a ĂŠtĂŠ estimĂŠe Ă l’aide du modèle suivant:

L’indice đ?‘– se rapporte au nombre de mĂŠnages considĂŠrĂŠs (19 653). Cela signifie qu’on estime la probabilitĂŠ que chaque mĂŠnage achète des aliments bio en fonction des effets fixes đ?‘Ľđ?‘˜đ?‘– et des effets alĂŠatoires đ?‘˘đ?‘– (đ?‘Śđ?‘– = 1). L’indice đ?‘˜ = 1, ‌, đ??ž dĂŠsigne les variables indĂŠpendantes prises en compte dans l’analyse. đ?œ–đ?‘– est le terme d’erreur du modèle. Les rĂŠsultats peuvent ĂŞtre indiquĂŠs sous forme de coefficients (đ?›˝đ?‘–) ou d’odds ratios (rapports de chance). L’indication des rĂŠsultats sous forme de coefficients ou d’odds ratios n’a cependant aucune influence sur la mĂŠthode. Les rapports de chance ou odds ratios sont des rapports de probabilitĂŠ qui indiquent dans quelle mesure une variable explicative influence la probabilitĂŠ de succès (đ?‘Śđ?‘– = 1) des variables (dĂŠpendantes) Ă expliquer (de manière positive ou nĂŠgative). Ils sont dĂŠfinis comme suit:

340

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 338–343, 2014

Dans cette analyse, le rapport de chance ou odds ratio (probabilitĂŠ de succès) de la variable dĂŠpendante se calcule en faisant le quotient de la probabilitĂŠ (Pr) qu’un mĂŠnage achète des aliments bio (đ?‘Śđ?‘– = 1), par la probabilitĂŠ contraire (dĂŠpenses pour les aliments bio = 0). Par rapport aux coefficients de rĂŠgression, les rapports de chance ou odds ratios ont l’avantage d’être plus faciles Ă interprĂŠter. Ils peuvent avoir une valeur ≼ 0. Si l’odds ratio est ĂŠgal Ă 1, la variable indĂŠpendante n’influe pas sur la variable dĂŠpendante, ni positivement, ni nĂŠgativement. Dans ce cas, la variable indĂŠpendante considĂŠrĂŠe ne ferait ni augmenter, ni baisser la probabilitĂŠ qu’un mĂŠnage achète des aliments bio. Si la variable est infĂŠrieure Ă 1, la probabilitĂŠ d’achat d’aliments bio diminue, lorsque la variable explicative s’applique au mĂŠnage. La probabilitĂŠ d’acheter des aliments bio baisserait par exemple de 50 % avec un odds ratio de 0,5, si la variable indĂŠpendante considĂŠrĂŠe s’applique au mĂŠnage. Si la valeur de l’odds ratio est supĂŠrieure Ă 1, la probabilitĂŠ d’achat augmente (un odds ratio de 2,5 signifie p. ex. une augmentation de 150 % de la probabilitĂŠ d’achat). Les facteurs d’influence explicatifs utilisĂŠs dans l’analyse sont d’une part, l’annĂŠe pendant laquelle le mĂŠnage concernĂŠ a participĂŠ Ă l’enquĂŞte sur le budget des


Qui achète des aliments bio en Suisse? | Société

Tableau 1 | Estimations des odds ratios de la régression logit binominale mixte pour l’influence des variables indépendantes sur la décision des ménages d’acheter des aliments bio

Variables indépendantes

Odds ratio (rapport de ­probabilité)

Année 2007 (oui = 1, sinon = 0)

1,060

Année 2008 (oui = 1, sinon = 0)

1,008

Année 2009 (oui = 1, sinon = 0)

1,036

P>|z|

Année 2010 (oui = 1, sinon = 0)

1,174

**

Année 2011 (oui = 1, sinon = 0)

1,238

***

Catégorie de revenu1 II (4827 – 7024.– fr.) (oui = 1, sinon = 0)

1,168

**

Catégorie de revenu III (7025 – 9494.– fr.) (oui = 1, sinon = 0)

1,278

***

Catégorie de revenu IV (9495 – 12 923.– fr.) (oui = 1, sinon = 0)

1,452

***

Catégorie de revenu V (≥ 12 924.– fr.) (oui = 1, sinon = 0)

1,673

***

Région linguistique I (allemand/romanche) (oui = 1, sinon = 0)

1,495

***

Région linguistique II (français) (oui = 1, sinon = 0)

0,730

***

Femme comme personne de référence2 (oui = 1, sinon = 0)

1,585

***

Enfant/s dans le ménage (oui = 1, sinon = 0)

0,843

***

Classe d’âge II (35 – 44 ans) (oui = 1, sinon = 0)

0,926

Classe d’âge III (45 – 54 ans) (oui = 1, sinon = 0)

0,852

Classe d’âge IV (55 – 64 ans) (oui = 1, sinon = 0)

0,934

Classe d’âge V (65 – 74 ans) (oui = 1, sinon = 0)

1,138

*

Classe d’âge VI (75 ans et plus) (oui = 1, sinon = 0)

1,246

**

Dépenses totales pour les denrées alimentaires (bio & conv.) en fr.

1,001

***

Dépenses de consommation totales en fr.

1,000

***

**

Signification (P>|z|): * < 0,05 (significatif); ** < 0,01 (très significatif); *** < 0,001 (extrêmement significatif) 1 Le revenu brut des ménages a été divisé en 5 cinquièmes (valeurs moyennes sur toutes les années). 2 L a personne de référence est la personne qui contribue le plus au revenu du ménage. Coefficient de détermination R 2 = 0,0896 Variables de référence: année 2006, catégorie de revenu I (1er cinquième < 4827 fr.), ménage dans la région italophone de la Suisse, homme comme personne de référence, aucun enfant dans le ménage, classe d’âge I (moins de 34 ans).

ménages et d’autre part, les caractéristiques sociodémographiques du ménage, comme la région linguistique, la catégorie de revenu, le sexe de la personne de référence dans le ménage et une variable muette pour la présence d’enfants dans le ménage. Le tableau de résultats (tabl. 1) fournit une liste détaillée des variables explicatives.

Résultats et discussion Facteurs influençant la consommation bio Comme scénario de référence, on a choisi un ménage sans enfant en Suisse italophone (région linguistique III) en 2006 avec un homme de moins de 35 ans (classe d’âge I) comme personne de référence, qui disposait d’un revenu brut de moins de 4827 fr. par mois (catégorie de revenu I). La pertinence du modèle, évaluée sur la base du coefficient de détermination (R2), est de 8,96 % (tabl. 1). Le coefficient de détermination indique comment l’équation de régression représente les données. C’est pourquoi pour l’évaluation des données des ménages et de leur consommation d’aliments, il faut s’attende à un R2 plutôt bas, car un grand nombre de facteurs d’influence peuvent jouer un rôle dans la décision d’achat. L’enquête sur le budget des ménages documente seulement certaines variables possibles. Par conséquent, on peut supposer que d’autres facteurs d’influence importants n’ont pas été saisis comme variables dans la série de données. Hormis les facteurs d’influence quantifiables qui n’ont éventuellement pas été documentés dans le cadre l’enquête sur les ménages pour une question de coûts, il faut également tenir compte du fait que des facteurs de nature qualitative sont importants pour l’achat de certains aliments ou plus précisément de certaines qualités d’aliments comme la qualité bio. Nous voulons parler p. ex. des valeurs de santé, de la conscience environnementale et du bien-être animal comme cela a déjà été constaté dans des études réalisées dans d’autres pays (Zepeda et Nie 2012; Hjelmar 2011; Roitner-Schobesberger et al. 2008; Harper et Makatouni 2002). L’EBM ne comporte pas non plus d’information sur le sujet, alors que ces facteurs peuvent jouer un rôle dans la décision des consommateurs. Le tableau 1 représente les résultats de l’estimation des rapports de chance ou odds ratios. Ces derniers indiquent comment la probabilité d’achat (bio) est influencée comparée au ménage de référence décrit plus haut, lorsque la variable explicative s’applique au ménage. On constate que la probabilité d’acheter des aliments bio augmente avec la catégorie de revenu des ménages. La probabilité est déjà plus importante dans les ménages de la catégorie de revenu II que dans la catégorie de revenu I. Elle est à son maximum dans la catégorie de revenu la plus élevée (tabl. 1). Les ménages de la catégorie de revenu V (revenu brut ≥ 12 924 fr. par mois) achètent des aliments bio avec une probabilité 67,3 % supérieure à celle des ménages appartenant à la catégorie de revenu la plus basse I (< 4827 fr. de revenu brut par mois). Etant donné les prix plus élevés des ali- 

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Société | Qui achète des aliments bio en Suisse?

ments bio et l’écart de prix par rapport aux produits conventionnels, ce résultat semble plausible. Par ailleurs, les ménages qui se trouvent en Suisse alémanique et romanche, achètent des aliments bio avec une probabilité environ 50 % plus élevée que les ménages de la région italophone. Les rapports de chances (odds ratios) des variables de revenu et le revenu disponible en moyenne plus élevé que dans les autres régions linguistiques1 (6915 fr.) confirment ce résultat. La probabilité d’achat d’aliments bio est par contre nettement plus faible en Suisse francophone qu’en Suisse italophone ou germanophone. Le tableau 1 indique également des probabilités d’achat différentes suivant la classe d’âge à laquelle appartient la personne de référence dans le ménage. Les ménages dont les personnes de référence sont âgées (plus de 64 ans) ont plutôt tendance à faire partie de ceux qui achètent bio que les jeunes ménages (avec une personne de référence de moins de 34 ans). Les ménages dont les personnes de référence sont d’âge moyen (entre 45 et 54) sont ceux où la probabilité d’acheter des produits bio est la plus faible. La probabilité est plus faible que chez les jeunes ménages, la probabilité la plus élevée se trouvant chez les ménages avec des personnes de référence âgées (plus de 64 ans). La probabilité d’achat plus élevée des personnes de références âgées va de pair avec la probabilité d’achat plus faible des ménages avec enfant. En effet, la probabilité d’acheter des aliments bio est plus faible dans les ménages avec un ou plusieurs enfants que dans les ménages sans enfant. L’influence des enfants dans le ménage a été un sujet très discuté dans les études réalisées jusqu’ici. Wier et al. (2008) ont par exemple constaté que la présence d’enfants dans le ménage faisait augmenter la probabilité d’achat alors que Zepeda et Li (2007) ont estimé que la probabilité était moindre. Afin de mieux évaluer l’influence des enfants dans le ménage, cette variable devrait être différenciée davantage car le niveau du rapport de chance peut varier en fonction du nombre et de l’âge des enfants vivant dans le ménage (Wier et al. 2008). Lorsque c’est la femme qui gagne le plus dans le ménage (personne de référence), la probabilité d’achat augmente de plus de la moitié par rapport à une personne de référence masculine. Le montant des dépenses totales pour les denrées alimentaires ainsi que celui des dépenses totales de consommation n’influencent toutefois pas ou quasiment pas les ménages dans leur décision d’acheter ou non des aliments bio. Le revenu moyen disponible par mois et par ménage est de 6503.– fr. en Suisse romande et de 6154.– fr. en Suisse italophone.

1

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Conclusions La mise en valeur des données de l’enquête sur le budget des ménages (EBM) pour les années 2006 à 2011 a montré que les produits bio pouvaient gagner des parts de marché quels que soient les groupes de produits considérés. Par ailleurs, l’évolution des différentes catégories de produits montre que les produits bio susceptibles de gagner des parts de marché sont ceux qui occupent déjà une part importante du marché (légumes, produits laitiers et œufs ainsi que fruits). Les produits représentant de petites parts de marché en 2006 affichaient des taux de croissance plus limités (p. ex. viande bio). L’étude a également permis de constater que la structure sociodémographique des ménages avait une influence significative sur la décision d’acheter ou non des aliments bio. On peut donc partir du principe que les ménages ayant un revenu plus élevé ont plutôt tendance à acheter des aliments bio que les ménages ayant un revenu inférieur. En outre, ce sont surtout les ménages avec une femme comme personne de référence qui achètent des aliments bio. Les ménages de la Suisse alémanique ont également une probabilité d’achat plus élevé que les ménages des autres régions linguistiques. Les jeunes ménages ont peu tendance à acheter des produits bio, ce qui va de pair avec la faible probabilité d’achat des ménages avec enfants. Une probabilité d’achat limitée caractérise encore davantage les ménages d’âge moyen. Les ménages âgés en revanche achètent plutôt «bio». Etant donné le nombre croissant de personnes âgées dans la société, ce peut être une opportunité pour le marché des aliments bio. Les caractéristiques sociodémographiques des ménages fournissent des informations sur ce qui motive les décisions d’achat. La fiabilité du modèle appliqué est cependant encore limitée étant donné le R2 relativement bas. Force est de supposer qu’il existe d’autres facteurs d’influence. Il reste donc à les identifier et à les tester. L’analyse d’une catégorie de produits si hétérogène que les aliments bio donne un premier aperçu des raisons qui motivent l’achat. La considération des produits séparément et des groupes de produits peut cependant apporter des informations plus précises sur les modèles de consommation. n


Chi compra alimenti biologici in Svizzera Negli ultimi anni il mercato degli alimenti biologici ha mostrato sviluppi molto positivi. Ad oggi, tuttavia, si sa poco su quali siano i fattori che influenzano l’acquisto di prodotti biologici. Questa analisi ha preso in esame i dati sul consumo di prodotti bio da parte delle famiglie svizzere per trarne conclusioni descrittive ed econometriche. L'esame di tali dati ha confermato non solo la tendenza alla crescita degli alimenti biologici in generale, ma anche quella delle nove categorie di prodotti prese in considerazione (pane e prodotti a base di cereali, carne, pesce, latticini e uova, oli e grassi alimentari, frutta, verdura, zucchero e dolciumi, spezie e condimenti). I cibi biologici preferiti risultano essere le verdure, i latticini e le uova, ma anche la frutta. Il consumo di verdure biologiche è quello che presenta la crescita più marcata. L’analisi econometrica indica che la struttura socio-demografica delle famiglie influenza la decisione di acquistare alimenti biologici. La probabilità di acquisto è direttamente proporzionale al reddito della famiglia. Influiscono anche l’età dei soggetti di riferimento all’interno delle famiglie e la presenza di figli. Le famiglie senza figli sono più propense ad acquistare cibo biologico rispetto a quelle con figli.

Summary

Riassunto

Qui achète des aliments bio en Suisse? | Société

Who buys organic foods in Switzerland? Over the past years, the Swiss market for organic foods has grown considerably. However, little is known about the factors that motivate consumers to purchase organic food products. Within the framework of this analysis, data from Swiss households on the consumption of organic foods were analysed descriptively and econometrically. The evaluation of these household data confirmed the growing trend for organic foods in general and for the nine product groups under consideration, namely Bread and Grain Products; Meat; Fish; Dairy Products and Eggs; Edible Fats and Oils; Fruit; Vegetables; Sugar and Confectionery; and Condiments and Sauces. The most popular organic products were vegetables, dairy products and eggs, and fruit, with the consumption of organic vegetables showing the strongest growth. The econometric analysis showed that the sociodemographic structure of the households influenced the decision to buy organic foods. As income increased, so did the likelihood that these households would purchase organic products. The age of the reference person of the household and the presence of children also played a role, with childless households being more likely to buy organic foods than those with children. Key words: demand for organic food, demand analysis, household data, mixed logit model.

Bibliographie ▪▪ Bio Suisse, 2014. La surface bio augmente de 5000 ha en Suisse – le ­marché bio dépasse pour la première fois 2 milliards de francs. Conférence de presse annuelle, Bio Suisse, Bâle, 9 avril 2014. ▪▪ Harper G. C. & Makatouni A., 2010. Consumer perception of organic food production and farm animal welfare. British Food Journal 104 (3), 287–299. ▪▪ Hjelmar U., 2011. Consumers’ purchase of organic food products. A matter of convenience and reflexive practices. Appetite 56 (2), 336–344.

▪▪ Wier M., O’Doherty Jensen K., Andersen L. M. & Millock K., 2008. The character of demand in mature organic food markets: Great Britain and Denmark compared. Food Policy 33 (5), 406–421. ▪▪ Zepeda L. & Li J., 2007. Characteristics of Organic Food Shoppers. Journal of Agricultural and Applied Economics 39 (1), 17–28. ▪▪ Zepeda L. & Nie C., 2012. What are the odds of being an organic or local food shopper? Multivariate analysis of US food shopper lifestyle segments. Agriculture and Human Values 29 (4), 467–480.

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E c o n o m i e

a g r i c o l e

Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard Andreas Hochuli, Esther Hidber et Mario Huber Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL), 3052 Zollikofen Renseignements: Andreas Hochuli, e-mail: andreas.hochuli@bfh.ch

Figure 1 | Le potentiel des spécialités de la région du Gothard est considéré comme intéressant. (photo: Caseificio del Gottardo)

Introduction Dans le cadre du programme San Gottardo 2020, le groupe Economie rurale de la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL) a réalisé une étude sur le potentiel des produits du terroir et des services touristiques dans la région du Gothard. Le périmètre de l’enquête englobe le canton d’Uri, les districts de Surselva aux Grisons et de Conches en Valais, ainsi que la région de Bellinzone et des Tre Valli au Tessin. Cet article présente les résultats de l’étude et les met en regard de la littérature spécialisée.

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Plusieurs auteurs s’accordent à dire que la capacité d’innovation et les compétences entrepreneuriales de l’agriculture peuvent fournir une contribution notable au développement de l’espace rural. Selon certains, la production et la vente de produits du terroir participent à la création de valeur dans les régions concernées. Ainsi, la «régionalisation des systèmes alimentaires» (Knox et Mayer 2009) inclut entre autres la fabrication de spécialités à partir de matières premières régionales, une valorisation qui peut être considérée per se comme une mesure de développement régional. Pacciani et al. (2001) voient même dans cette valorisation la base du dévelop-


pement de l’espace rural. La promotion du tourisme compte, elle aussi, parmi les principales stratégies de développement des régions rurales (Wilson et al. 2001). Ici également, l’agriculture joue un rôle de premier plan, d’une part en tant que jardinier du paysage (condition primordiale pour le tourisme rural), d’autre part en tant que prestataire de services agrotouristiques. Partant de ces préliminaires, l’influence de l’agriculture sur le développement rural est exposée ci-après, en prenant pour exemple la région du Gothard.

Méthode L’enquête, empirique, a été menée principalement au moyen d’interviews avec des acteurs du secteur alimentaire de la région du Gothard (représentants de l’agriculture, des entreprises de transformation, des circuits de distribution) et avec des experts reconnus du développement rural. Ces personnes ont été questionnées lors d’entretiens, par téléphone ou par écrit, en août et septembre 2013. Les auteurs ont utilisé une méthode mixte avec des interviews standardisées et semi-directives ouvertes. Des questions ont été formulées sur quatre thématiques: les potentiels, le rapport coûts-bénéfices, les problèmes et les défis, ainsi que les besoins. Chaque groupe d’acteurs (production, transformation, commercialisation/distribution et pouvoirs publics) a reçu un questionnaire différent: le nombre de réponses par question a donc varié. Pour mettre en valeur le sondage, il s’est agi, d’une part, de compter les réponses aux questions catégorielles; ces données ont été représentées sous forme graphique, puis commentées ou évaluées. D’autre part, les réponses aux questions ouvertes ont été synthétisées dans des tableaux avant d’être intégrées dans les évaluations qualitatives. Vu la méthode utilisée, les conclusions de l’étude ont un caractère purement qualitatif ou indicatif. Autrement dit, l’enquête ne prétend pas être représentative et ses résultats ne sont pas généralisables. Ils peuvent néanmoins enrichir la discussion sur l’importance, pour le développement régional, des systèmes locaux de production de denrées alimentaires.

Résumé

Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard | Economie agricole

La fabrication et la commercialisation de spécialités locales peut contribuer grandement au développement de l’espace rural. Telles sont les conclusions d’une étude menée dans la région du Gothard par la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL) – conclusions confirmées par la littérature spécialisée. Parmi les facteurs de succès, la qualité des produits et un label régional crédible revêtent une importance centrale. L’étude a identifié un besoin notable d’optimiser les circuits de distribution existants et d’en créer de nouveaux, aussi bien dans la région qu’audelà. Un rôle important revient ici notamment à l’agrotourisme: une offre bien développée dans ce secteur contribue non seulement à stimuler la vente de produits du terroir, mais aussi à rehausser l’attrait touristique de toute la région, créer une plus-value au niveau local et compléter le revenu des exploitations agricoles.

Résultats et discussion Spécialités régionales D’après la littérature consultée, le marché des spécialités régionales aurait un réel potentiel (Warschung et al. 2013; Henseleit et al. 2007). La demande relativement forte pour ce type de produits s’explique avant tout par des facteurs cognitifs (le «régional» est vu comme synonyme de qualité, de santé, de fraîcheur et d’écologie) et 

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Economie agricole | Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard

normatifs (acheter régional, c’est soutenir les producteurs locaux). Les résultats des interviews menées lors de l’étude confirment, dans une large mesure, ces énoncés. Les acteurs interrogés sont généralement d’avis que le marché des produits du terroir a un grand potentiel. Ils justifient cela en particulier par la disposition croissante des consommateurs à payer des prix plus élevés pour des denrées de qualité provenant de la région. Les touristes en seraient les principaux acheteurs, alors que les indigènes seraient, à leur avis, généralement moins intéressés. Plusieurs acteurs ont indiqué que la population locale n’était pas assez sensibilisée à l’achat de produits régionaux. Pour Petrini (2005; cité dans Knox et Mayer 2009), c’est l’identification des consommateurs aux filières de production régionales qui constitue la clé de l’acceptation des produits du terroir: «La consommation [est] le dernier échelon du processus de production […]». En tant que maillon dans ce processus, le client veut et doit savoir d’où vient le produit, comment et par qui il est transformé. Bien qu’il soit difficile de mesurer le volume du marché des produits régionaux (faute de définitions et de normes précises permettant de les caractériser), il apparaît que la «régionalité» est devenue un facteur d’achat déterminant, et que le manque de produits régionaux dans un assortiment est même considéré comme un désavantage concurrentiel (Warschung et al. 2013). Outre le potentiel de vente aux touristes, le potentiel d’exportation des spécialités de la région du Gothard est également considéré comme élevé. De manière générale, les participants à l’enquête pensent que celles-ci se vendraient bien dans le reste de la Suisse, surtout dans les centres urbains. En revanche, ils sont moins positifs pour ce qui est de l’exportation vers les grands centres européens. Dans la littérature spécialisée, la valorisation des produits du terroir est souvent considérée comme un facteur important pour le développement de l’espace rural (Knox et Mayer 2009; Pacciani et al. 2001). Par la poursuite active et engagée de leurs propres intérêts, les acteurs de ce secteur participent, souvent sans en avoir conscience, au cycle économique de la région (Ganzert et al. 2004). Pour Clancy et Ruhf (2010), un système alimentaire régional idéal est un système où autant de denrées que possibles sont manufacturées, transformées, distribuées et vendues dans la région, et ce à une multitude de niveaux et d’échelles, afin de ­satisfaire les besoins des consommateurs. Un tel système serait très résilient; il générerait une plus-value économique et sociale pour les acteurs de la filière alimentaire de proximité et permettrait de fortement limiter les importations. En outre, pour une région, l’existence

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d’un système alimentaire organisé à son échelle peut accroître la plus-value nette globale de son économie, créer des places de travail, préserver le paysage, contribuer à la protection du climat (en réduisant les émissions de CO2) et augmenter son capital social (Wiskerke 2009). De nombreuses matières premières agricoles sont produites dans la région étudiée, mais seule une petite partie y est également valorisée. S’agissant du lait de vache par exemple, la région traite environ 50 % de la production potentielle (fig. 2). Il en va de même pour la viande crue: 45 % de la production potentielle y est transformée en produits carnés, avec, toutefois, de grandes variations selon la sorte de viande. Alors qu’il faut importer de la viande de chèvre pour couvrir les besoins locaux (la production effective du secteur de la transformation correspond à 123 % de la production potentielle), seuls 17,4 % du mouton et du veau produits dans la région y sont valorisés. Comme une partie de ces matières premières exportées est transformée non loin du périmètre étudié (ce qui indique l’existence d’une sensibilité «régionale», même si ce qualificatif ne recouvre pas exactement la «région du Gothard» telle que définie ici), il faut faire preuve de prudence lors de l’appréciation de ces données. On peut néanmoins en conclure que la région du Gothard ne connaît pas encore un système alimentaire régional optimal (selon la définition de Clancy et Ruhf 2010). L’ampleur des exportations de matières premières agricoles pourrait s’expliquer par les forts coûts de production des spécialités régionales. La plupart des personnes interrogées estiment que, dans la région du Gothard, ces coûts sont «plutôt élevés» ou «élevés». Et il ne s’agit pas là de la seule pierre d’achoppement. D’après la majorité des avis exprimés, la commercialisation des produits du terroir revient, elle aussi, plutôt cher. Les autres obstacles à la transformation et la commercialisation locale qui ont été cités sont les prescriptions sanitaires et le caractère saisonnier de la production de matières premières. La plupart des acteurs interviewés connaissent les circuits de distribution des produits du terroir, qu’ils soient locaux ou plus éloignés, et ils en font usage. Seule exception: les plateformes Internet, qui semblent peu fréquentées. Le potentiel de vente via le secteur gastronomique est qualifié de conséquent, surtout en raison de l’importance du tourisme. Selon les sondés, les labels jouent un rôle clé dans la commercialisation de produits du terroir. Or, dans la littérature, leur rayonnement géographique fait l’objet d’un débat. En fait, l’efficacité des labels à caractère régional (en comparaison à d’autres) est très controversée. Hu et al. (2012), par exemple, ont trouvé que les


Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard | Economie agricole

Lait de vache, en tonnes/an Production potentielle Production effective

±

23 526 13 231 2221

4697

UR GR 6821 5706

3874

7268

284

2417

VS

TI 1265

145 10 981

2764

0

10

20 km

Définitions: Production potentielle: quantité maximale de matières premières agricoles que la région est en mesure de produire et qui pourraient être transformées en produits de qualité. Production effective: quantité de matières premières agricoles (donnée statistique) effectivement transformée dans la région. Sources: Production potentielle: calculs des auteurs. Production effective: TSM Treuhand GmbH, Berne. Base cartographique: ­Swisstopo. Produite le 26.11.2013, HAFL ©

Figure 2 | Potentiel de transformation du lait de vache dans la région du Gothard.

acheteurs préféraient les produits portant un label national à ceux étiquetés régional. En revanche, selon Gracia et al. (2011), un label régional peut motiver les clients à payer davantage. Les acteurs interrogés dans la présente étude ont clairement dit qu’un label crédible était très important pour la commercialisation de spécialités locales. Des personnes interrogées dans la catégorie «distribution», la moitié seulement estiment que la région du Gothard se vendrait bien sous une nouvelle image de marque harmonisée (fig. 3). Cette absence d’unanimité donne à penser que la région n’a pas une conscience identitaire suffisamment développée (voir section suivante) pour se reconnaître dans un tel label. Autrement dit: le sentiment d’appartenance pourrait être plus développé pour une autre unité géographique, par exemple le canton ou le district (Ganzert et al. 2004). Quant à la commercialisation des produits du terroir, les personnes interviewées attendent davantage de soutien, en raison de son coût relativement élevé. L’équipe de recherche a également recueilli les opinions concernant les critères de qualité que doivent

satisfaire des spécialités de la région du Gothard (indépendamment d’un label). Les acteurs du secteur alimentaire sont clairement d’avis que de telles spécialités doivent impérativement faire majoritairement usage de matières premières agricoles de la région. C’est ici que se pose le problème de la saisonnalité de ces matières, dont la livraison ne peut être garantie toute l’année. Une seule entreprise de transformation a répondu que les matières premières dont elle avait besoin pouvaient lui être fournies en tout temps. Enfin, la traçabilité jusqu’au producteur des matières premières agricoles entrant dans la composition des produits du terroir est jugée importante (voir figure 3). Une partie des sondés estime qu’il faudrait définir et standardiser les processus de fabrication. Services agrotouristiques La promotion du tourisme fait partie des principales mesures de développement économique dans les régions rurales (Wilson et al. 2001). L’agrotourisme, en particulier, se voit attribuer un grand potentiel de création de 

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Economie agricole | Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard

Un label crédible aux yeux des consommateurs est très important pour vendre des spécialités régionales.

Vous seriez prêt à vendre des spécialités régionales via vos propres circuits sous un nouveau label à définir.

Vous seriez prêt à vendre des spécialités régionales via vos propres circuits sous le label «Région du Gothard».

Les matières premières agricoles qui composent les spécialités régionales doivent impérativement provenir de la région du Gothard. D‘accord Les traçabilité jusqu'au producteur agricole doit être garantie pour les nouvelles spécialités régionales.

Partiellement d‘accord Pas d‘accord Ne sait pas 0

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Figure 3 | Mesures de commercialisation et critères de qualité pour les spécialités de la région du Gothard.

valeur dans l’environnement proche, que ce soit par les emplois créés, les rentrées fiscales additionnelles générées ou encore les bénéfices indirects pour les entreprises locales, notamment pour le commerce de détail et la gastronomie. Le maintien de la culture locale et le renforcement de l’identité rurale sont des effets positifs supplémentaires de l’agrotourisme. Pour une exploita-

tion agricole, mettre sur pied une offre dans ce secteur représente une possibilité de diversification, d’où une sécurité et une flexibilité accrues et, souvent, un revenu plus élevé et plus stable. En outre, une telle prestation permet d’occuper, en interne et de manière souple, des forces de travail libres. Des motifs non économiques, comme le souhait de garder le domaine dans la famille

Figure 4 | Produits du terroir et tourisme rural, une synergie fructueuse: le secteur touristique offre un débouché de plus aux spécialités régionales, lesquelles contribuent à diversifier la palette des activités proposées aux visiteurs. (Photo: ©Valais/Wallis Promotion – Pascal Gertschen)

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Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard | Economie agricole

La législation sur l'aménagement du territoire fait obstacle au développement de l'agrotourisme. Le développement de services agrotouristiques nécessite un investissement financier important. Vous proposez déjà de l'agrotourisme ou des prestations similaires. Vous êtes intéressé au développement de services agrotouristiques.

Le développement de services agrotouristiques exige beaucoup de travail.

D‘accord Partiellement d‘accord

Le revenu généré par les services agrotouristiques dépasse leurs coûts opérationnels.

Pas d‘accord Ne sait pas 0

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Figure 5 | Coûts et bénéfices des prestations agrotouristiques, le point de vue des exploitations agricoles (nombre de réponses).

ou l’envie de cultiver une activité annexe, jouent également un rôle dans le développement d’une offre agrotouristique (Tew et Barbieri 2012). Des services agrotouristiques de qualité et bien positionnés peuvent se traduire par un gain supplémentaire pour l’agriculture de la région du Gothard. Les acteurs questionnés le confirment. Cependant, il ne suffit pas que les prestations soient de haut niveau et qu’elles répondent à la demande de la clientèle. D’autres facteurs sont tout aussi importants, comme le contact personnel avec les hôtes ou encore le contexte (p. ex. la présence autres attractions touristiques dans la région). Mais, en fin de compte, ce sont souvent les obstacles légaux et l’ampleur de l’engagement requis qui freinent les initiatives dans ce secteur. Tant les restrictions imposées par la loi sur l’aménagement du territoire, que les coûts d’investissement et la charge de travail ont été connotés plutôt négativement, aussi bien par les agriculteurs que par les représentants des pouvoirs publics (fig. 5). Si ces derniers ou des tiers leur accordaient un soutien à la mesure de la tâche, les exploitations agricoles seraient en principe intéressées à développer des services agrotouristiques. Et ce, non

seulement pour des raisons financières, mais aussi pour nouer des contacts féconds avec des touristes et, par là, créer une proximité émotionnelle avec les produits régionaux. Il ressort de ces considérations que tourisme rural et production alimentaire régionale sont unis par un lien étroit (Boyne et al. 2003), qui profite aux deux parties: le secteur touristique représente un débouché supplémentaire pour les produits du terroir, lesquels enrichissent l’offre touristique (Sims 2009). Selon Tew et Barbieri (2012), les prestations agrotouristiques doivent servir d’instruments de marketing pour promouvoir les spécialités régionales, en sensibilisant les touristes aux aspects positifs d’acheter et de consommer local. La présente étude confirme les résultats des auteurs cités. Plusieurs des personnes interviewées ont explicitement mentionné le potentiel important du tourisme comme débouché pour les produits régionaux. Selon elles, les visiteurs et vacanciers seraient généralement prêts à débourser plus que la population locale pour des spécialités du terroir. Mais la médaille a son revers: le caractère saisonnier du tourisme et les mauvaises condi tions de vente dans la gastronomie.

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Economie agricole | Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard

Conclusions L’étude du groupe Economie rurale de la HAFL montre qu’il existe un marché potentiel intéressant pour les spécialités de la région du Gothard. Se fondant sur ces résultats, les auteurs ont identifié les trois stratégies de développement les plus prometteuses. Premièrement, ils recommandent d’optimiser la collaboration à toutes les étapes de la chaîne de création de valeur régionale. Deuxièmement, ils proposent, pour décharger les exploitations agricoles, de mieux exploiter les circuits de distribution et de commercialisation existants et d’en créer de nouveaux, non seulement dans la région même, mais aussi, et surtout, au-delà de ses frontières. Enfin, ils soulignent la nécessité d’élargir la palette des prestations agrotouristiques, pour promouvoir la vente directe de spécialités régionales, renforcer l’attractivité de la région, et, partant, améliorer le revenu des exploitations agricoles. n

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Potenziale dell’agricoltura nella regione del Gottardo Lo sviluppo regionale è legato direttamente alla produzione di prodotti alimentari regionali. Questa affermazione, che viene confermata da diversi studi e dalla letteratura specializzata, rappresenta un importante risultato scaturito da uno studio sul potenziale dell’agricoltura nella regione del San Gottardo. Il potenziale valore aggiunto generato dal settore alimentare sembrerebbe essere promettente. Di particolare importanza è stata definita la collaborazione tra i vari stakeholder nelle diverse fasi della catena di produzione, ad esempio per la definizione di criteri di qualità per prodotti alimentari regionali. Anche la definizione di nuovi canali per lo smercio dei prodotti regionali sia all’interno sia all'esterno della regione del Gottardo è stata definita importante. Inoltre, il turismo è identificato come un settore importante per lo sviluppo della regione del Gottardo, ad esempio per lo smercio di prodotti alimentari regionali, oppure come attività collaterale per le aziende agricole o anche per il valore aggiunto generato in altri settori economici.

Bibliographie ▪▪ Boyne S., Hall D. & Williams F., 2003. Policy, Support and Promotion for Food-Related Tourism Initiatives. Journal of Travel & Tourism Marketing 14 (3-4), 131–154. ▪▪ Clancy K. & Ruhf K., 2010. Is local enough? Some arguments for regional food systems. Choices 25 (1), 123–135. ▪▪ Ganzert C., Burdick B. & Scherhorn G., 2004. Empathie, Verantwortlichkeit, Gemeinwohl: Versuch über die Selbstbehauptungskräfte der Region. Ergebnisse eines Praxisforschungsprojekts zur Vermarktung regionaler Lebensmittel. Wuppertal papers (142), 1–68. ▪▪ Gracia A., Magistris T. d. & Nayga R. M., 2011. Willingness to pay for a local food label for lamb meat in Spain. 13th Congress of the EAAE, ­Z ürich. 12 p. ▪▪ Henseleit M., Kubitzki S. & Teuber R., 2007. Determinants of Consumer Preferences for Regional Food. 105th EAAE Seminar, Bologna. 14 p. ▪▪ Hu W., Batte M. T., Woods T. & Ernst S., 2012. Consumer preferences for local production and other value-added label claims for a processed food product. European Review of Agricultural Economics 39 (3), 489–510. ▪▪ Knox P. L. & Mayer H., 2009. Kleinstädte und Nachhaltigkeit. Birkhäuser, Basel. 192 p.

Summary

Riassunto

Potentiel de l’agriculture dans la région du Gothard | Economie agricole

The potential of agriculture in the Gotthard Region The production and marketing of regional speciality foods offers considerable potential for the development of rural areas. This potential was demonstrated by a study which the School of Agricultural, Forest and Food Sciences carried out in the Gotthard Region and was supported by a review of the pertinent literature. Results of the study showed that the quality of the product and a credible regional label were important components for the production and distribution of regional speciality foods. The study identified considerable potential for optimising existing distribution channels and finding new ones in the Gotthard Region and elsewhere. In this context, agritourism services were found to be of great importance. We predict that a well-developed range of agritourism services will promote not only regional speciality foods but also the overall attractiveness of the Gotthard Region to tourists, will add value to the region, and will increase the income of agricultural businesses. Key words: regional food supply chain, rural development, agricultural potential.

▪▪ Pacciani A., Belletti G., Marescotti A. & Scaramuzzi S., 2001. The role of typical products in fostering rural development and the effects of regulation (EEC) 2081/92. 73th EAAE Seminar, Ancona. 17 p. ▪▪ Petrini C., 2005. Slow Food Nation: Why Our Food Should Be Good, Clean and Fair. Rizzoli, New York. 192 p. ▪▪ Sims R., 2009. Food, place and authenticity: local food and the sustainable tourism experience. Journal of Sustainable Tourism 17 (3), 321–336. ▪▪ Tew C. & Barbieri C., 2012. The perceived benefits of agritourism: The provider’s perspective. Tourism Management 33 (1), 215–224. ▪▪ Warschung M., Rucker M., Glusac S. & Günther D., 2013. Lebensmittel: Regional ist gefragter als bio. A.T. Kearney, Düsseldorf. 8 p. ▪▪ Wilson S., Fesenmaier D. R., Fesenmaier J. & Van Es, John C, 2001. Factors for success in rural tourism development. Journal of Travel research 40 (2), 132–138. ▪▪ Wiskerke J. S., 2009. On Places Lost and Places Regained: Reflections on the Alternative Food Geography and Sustainable Regional Development. International Planning Studies 14 (4), 369–387.

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E c o n o m i e

a g r i c o l e

Calculs des coûts complets des travaux en régie Daniel Hoop, Anja Schwarz et Markus Lips Agroscope, Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, 8356 Ettenhausen, Suisse Renseignements: Daniel Hoop, e-mail: daniel.hoop@agroscope.admin.ch

Les travaux en régie sont très répandus: trois quarts des exploitations sont impliqués dans les travaux pour des tiers et la location de machines. Le pressage des balles est un exemple typique. ­( Photo: Gabriela Brändle, Agroscope)

Introduction La para-agriculture comprend des activités agricoles qui ne sont pas directement liées à la production agricole ou aux prestations écologiques (Hausheer Schnider 2010). Son importance s’est sans cesse accrue ces dix dernières années. Alors qu’en 2003, la prestation brute des travaux effectués pour des tiers, de la location de machines, de la vente directe et de l’agrotourisme était encore de 11 800 fr. par exploitation, elle a quasiment doublé depuis pour atteindre près de 20 600 fr. en 2012 (tabl. 1). Durant la même période, la part représentée par la para-agriculture dans la prestation brute totale

352

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de l’exploitation – et par conséquent son importance relative pour les exploitations – est montée de tout juste 5 % à plus de 6 %. Parmi les activités para-agricoles, la vente directe et la transformation (y compris la vinification) représentent plus de la moitié de la prestation brute (60 %). Les travaux effectués pour des tiers et la location de machines arrivent en deuxième position avec 30 %. La situation est complètement inverse en ce qui concerne la fréquence des deux activités dans les exploitations. Tandis que 13 % des exploitations pratiquent la vente directe ou la transformation, trois quarts d’entre elles sont impliquées dans des travaux pour des tiers ou la location de machines (Lips et Schmid 2013). Les travaux pour des tiers sont également appelés travaux en régie et représentent des prestations qui sont réalisées par une main-d’œuvre qualifiée. Typiquement, ce type de travaux requiert l’emploi de machines ou d’outils. Etant donné la diffusion des travaux en régie, il est particulièrement intéressant de connaitre leur rentabilité. Il s’agit notamment de calculer la valorisation du travail, c’est-à-dire le salaire horaire effectivement réalisé. Pour réaliser un tel calcul, il est nécessaire de considérer la branche de production dans sa globalité. C’est pourquoi des calculs de coûts complets ont été effectués pour différents travaux en régie dans le domaine des activités à l’extérieur de la ferme dans une série d’exploitations sélectionnées pour l’étude de cas. Les résultats des différentes branches de production ont ensuite été classés par groupes de travaux en régie typiques.

Méthode Sélection des exploitations étudiées A partir des exploitations du Dépouillement centralisé des données comptables d’Agroscope, les chercheurs ont identifié des exploitations affichant des prestations brutes de plus de 10 000 fr. dans le domaine des travaux effectués par des tiers. En vue d’effectuer des sondages auprès des chefs d’exploitation, on a cherché une région qui réunissait beaucoup d’exploitations de ce type et c’est le canton d’Argovie qui a été retenu. Par le biais des


Calculs des coûts complets des travaux en régie | Economie agricole

Calcul coûts/prestations Les chefs d’exploitation ont été interrogés oralement. Ils ont indiqué l’ampleur des prestations réalisées avec le nombre d’unités de travail (p. ex. balles rondes ou hectares) pour toutes les branches de production des travaux en régie. Le rendement moyen réalisé par unité de travail a permis de calculer la prestation brute ou le chiffre d’affaires. Pour le calcul des coûts complets, il est important de connaître le temps de travail et les coûts des machines. Outre le temps effectif consacré aux travaux des champs, les chefs d’exploitation ont également dû indiquer le temps consacré à la préparation de la machine ainsi que le temps de trajet. Les trois temps additionnés donnaient le temps de travail total. Celui-ci est évalué sur la base de coûts d’opportunité de 28 fr. de l’heure (Gazzarin et Lips 2013). Dans le calcul des coûts de machines, il s’agit de distinguer les coûts fixes des coûts variables. Les coûts variables se composent des coûts de réparation et d’entretien ainsi que des coûts des carburants et des lubrifiants et se rapportent à l’unité de travail. Les valeurs correspondantes ont été reprises du Rapport coûtsmachines (Gazzarin et Lips 2013), lorsque les chefs d’exploitation n’étaient pas en mesure de fournir des chiffres précis. Pour les coûts fixes annuels, deux des quatre postes de coûts proviennent également du Rapport

Résumé

deux fiduciaires «Agro-Treuhand Argovie» et «Treuhand und Schätzungen» de l’Union suisse des paysans, un total de douze exploitations a été contacté. Neuf d’entre elles étaient prêtes à répondre à des questions sur leur exploitation, parmi lesquelles huit effectuaient des travaux en régie à l’extérieur de la ferme. L’échantillon affiche une prestation brute moyenne de près de 28 100 fr. dans le domaine des travaux effectués pour des tiers (min. 10 900 fr., max. 41 000 fr.), tandis que la moyenne suisse pour 2012 est d’environ 5800 fr. La part représentée par les travaux effectués pour des tiers dans la prestation brute totale de ces exploitations est de 8,9 % par rapport à 2,2 % pour la moyenne suisse (propres calculs sur la base des exploitations de référence). Ces exploitations consacrent en moyenne 0,07 unités de main-d’œuvre annuelles à ce type de travaux.

Huit exploitations et 30 observations de branches de production ont servi à comparer les recettes et les coûts complets de sept groupes de travaux en régie, afin d’en déterminer la rentabilité. Les travaux en régie, effectués pour des tiers à l’extérieur de la ferme, comprenaient notamment des travaux de production végétale, de transport/logistique ou encore de service de déneigement. A l’exception du pressage des balles, toutes les branches de production ont permis une valorisation du travail horaire, nettement supérieure aux coûts d’opportunité qui s’élèvent à 28 fr. de l’heure, ce qui est en général le signe d’une bonne rentabilité. Les principaux facteurs d’influence sont le degré d’utilisation des machines, ainsi que la part représentée par les temps de préparation et de trajet dans le temps de travail total. A l’exception de la moisson et du battage, on a pu constater une structure des coûts comparable, sachant que les coûts fixes des machines représentent 40 % et la maind’œuvre ainsi que les autres coûts variables chacun 30 %. Bien que les machines étudiées soient utilisées à environ 50 % pour les travaux en régie ou la location, elles ne sont exploitées qu’à 83 % de leurs capacités, si l’on se réfère aux valeurs indicatives du Rapport coûts-machines (Gazzarin et Lips 2013).

coûts-machines: les intérêts du capital investi (taux d’intérêt: 3 %) ainsi que les coûts des assurances et des taxes. Les coûts des bâtiments ont été calculés à partir des sommes investies dans les garages et remises en prenant l’hypothèse d’une durée d’amortissement de 30 ans. La durée d’amortissement et les amortissements annuels qui en découlent pour chaque machine ont été adaptés en fonction du degré d’utilisation annuel effectif. On a demandé aux chefs d’exploitation quel était le degré d’utilisation des machines. Celui-ci englobe l’utilisation pour les travaux sur l’exploitation, l’utilisation 

Tableau 1 | Evolution de la prestation brute moyenne de la para-agriculture

Prestation brute para-agriculture % de la prestation brute totale

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

11 800

13 500

15 200

16 700

16 800

19 100

20 000

20 200

21 900

20 600

4,8

4,8

5,7

6,4

6

6,4

6,5

6,8

6,6

6,4

La para-agriculture se compose de travaux effectués pour des tiers, de la location de machines, de la vente directe et de l’agrotourisme. Source: propres calculs sur la base des moyennes pondérées des exploitations de référence du Dépouillement centralisé.

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353


Economie agricole | Calculs des coûts complets des travaux en régie

Les branches de production ont été structurées en groupes en fonction de leurs points communs. Pour ce faire, les prestations brutes et les coûts ont simplement été additionnés. Cette technique a permis une pondération implicite des différentes observations de branches de production selon la prestation brute, ce qui est voulu et empêche que des branches de production ayant des prestations brutes différentes soient traitées de la même manière.

Résultats Figure 1 | Dans le cas de la moisson et du battage, les coûts fixes sont plus élevés que pour les autres travaux en régie. Ils représentent environ 55 % des coûts totaux. (Photo: Christian Gazzarin, Agroscope)

entre plusieurs exploitations lorsque les machines sont partagées entre plusieurs propriétaires et l’utilisation pour les travaux en régie et la location. Compte tenu de la durée d’utilisation (technique) par unité de travail du Rapport coûts-machines, la durée d’utilisation a été convertie en années. En cas d’un degré d’utilisation annuel plus faible, la durée d’amortissement était prolongée et par conséquent les montants d’amortissements annuels étaient plus bas. Pour les machines motorisées (tracteurs et moissonneuses-batteuses) et les faucheuses, la durée d’utilisation a été augmentée de 50 % maximum, pour les autres machines de 100 % maximum. Lorsque la durée d’amortissement en années était prolongée, la valeur résiduelle était réduite proportionnellement, ce qui permettait de tenir compte de la perte de valeur de la machine plus elle était ancienne. En cas de prolongation de la durée d’utilisation de 50 % et plus, la valeur résiduelle a été fixée à zéro indépendamment du degré d’utilisation de la machine. Si le degré d’utilisation annuel de la machine était inférieur à la valeur figurant dans le Rapport coûtsmachines, la durée d’amortissement était raccourcie en conséquence. Regroupement des branches de production Comme les branches de production ont toutes des unités de travail différentes (heures, hectares, petites balles, balles rondes et bennes), il s’agit de définir une valeur de référence susceptible d’être comparée. En vue de la comparaison des branches de production, on a donc choisi la prestation brute (p. ex. coûts de machines par 10 000 fr. de prestation brute).

354

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Les 30 calculs de coûts complets ont été structurés en sept groupes: pressage des balles (4 branches de production), moisson-battage (2), protection phytosanitaire (grandes cultures, cultures fruitières et viticoles; 3), semis (6), transport/logistique (5), service de déneigement (6) et divers (4). Le groupe transport/logistique comprend le transport des petites balles et des copeaux de bois ainsi que les travaux avec le chargeur télescopique. Le service de déneigement comprend le déneigement proprement dit et le salage. Le groupe restant intitulé Divers comprend la fauche, l’ensilage du maïs, les travaux de mulchage ainsi que le broyage du bois, sachant que dans chaque cas, les résultats se basent sur une seule observation. Les exploitations interrogées présentaient entre deux et six branches de production avec travaux en régie, soit 3,25 branches de production en moyenne. Le tableau 2 présente les coûts complets par 10 000 fr. de prestation brute, les bénéfices réalisés ainsi que la valorisation du travail obtenue (salaire horaire). Il y a valorisation du travail lorsqu’on n’applique aucun coût d’opportunité pour le travail et qu’à la place on divise les bénéfices (sans coûts de main-d’œuvre) par le nombre d’heures de travail. A l’exception du pressage de balles, tous les groupes affichent une valorisation du travail de 37 fr. de l’heure ou plus, ce qui dépasse nettement les coûts d’opportunité. Par conséquent, ces groupes sont bénéficiaires. La part représentée par les coûts fixes dans l’ensemble des coûts oscille entre 35 % et 42 %. La moisson et le battage font exception avec 55 %. La main-d’œuvre représente entre 25 % et 34 % des coûts. La moisson et le battage font exception ici aussi, puisque la main-d’œuvre ne représente qu’environ 13 % des coûts. Sur une prestation brute de 10 000 fr., le pressage des balles affiche une perte calculée de 3416 fr., si l’on calcule à partir des coûts d’opportunité pour la main-d’œuvre. La valorisation effective du travail est de 3 fr. de l’heure, à noter qu’il s’agit de la moyenne pondérée entre la valorisation du travail négative du pressage des petites balles


Calculs des coûts complets des travaux en régie | Economie agricole

Tableau 2 | Calculs de coûts complets par 10 000 fr. de prestation brute Pressage des balles

Moisson et battage

Protection phytosanitaire

Semis

Transport/­ logistique

Service de ­déneigement

Divers

Moyenne pondérée

Nombre de branches de production

4

2

3

6

5

6

4

30

Degré d‘utilisation en ­pourcentage**

75

108

90

75

95

65

115

83

Fr. Prestation brute (recettes)

10 000

Amortissements

3436

%*

Fr.

%*

10 000 25,6

3506

Fr.

%*

10 000 39

2127

Fr.

%*

10 000

Fr.

%*

10 000

27,7

2154

27,8

2125

Fr.

%*

10 000

Fr.

%*

10 000

23,3

1427

24,1

2035

Fr.

%*

10 000 25,7

2351

29,1

Coûts des intérêts

775

5,8

806

9

555

7,2

532

6,9

598

6,6

374

6,3

474

6

574

7,1

Coûts des bâtiments

604

4,5

323

3,6

101

1,3

191

2,5

574

6,3

84

1,4

157

2

252

3,1

Assurances & taxes

429

3,2

294

3,3

285

3,7

172

2,2

212

2,3

194

3,3

247

3,1

242

3

Coûts fixes

5244

39,1

4929

54,8

3069

40

3049

39,4

3510

38,5

2079

35,1

2913

36,8

3420

42,4

Réparations et entretien

1892

14,1

1096

12,2

1007

13,1

1243

16

1460

16

570

9,6

1137

14,4

1072

13,3

Carburants & lubrifiants

2472

18,4

1841

20,5

973

12,7

1504

19,4

1344

14,7

1286

21,7

1188

15

1490

18,5

Travail en MOh

136

40

93

70

100

71

96

75

dont temps de trajet et de préparation

35

10

22

9

17

3

9

11

Travail en fr.

3807

28,4

1120

12,5

2618

34,1

1949

25,2

2804

30,8

1990

33,6

2677

33,8

2091

25,9

dont temps de trajet et de préparation

986

7,4

292

3,3

620

8,1

251

3,2

473

5,2

95

1,6

260

3,3

314

3,9

Coûts variables

8172

60,9

4058

45,2

4598

60

4695

60,6

5608

61,5

3846

64,9

5002

63,2

4654

57,6

Coûts totaux

13 416

8986

7667

7745

9118

5925

7914

8073

Bénéfices

-3416

1014

2333

2255

882

4075

2086

1927

3

53

53

60

37

85

50

54

Valorisation du travail en Fr./MOh***

Part représentée dans les coûts totaux. Degré d’utilisation des machines impliquées comparé au degré d’utilisation indiqué dans le Rapport coûts-machines (en pourcentage). Les machines intervenant dans différentes branches de production sont prises en compte plusieurs fois. La moyenne (dernière colonne) repose sur des valeurs non pondérées, sachant que chaque machine n’est prise en compte qu’une fois. *** MOh = heure de main-d'œuvre *

**

et la valorisation du travail positive du pressage des balles rondes. Ce résultat tient essentiellement au faible degré d’utilisation des presses à petites balles et au temps de préparation et de trajet, qui représentent à eux deux près d’un quart du temps de travail total. Ils sont aussi la conséquence de la petite taille des parcelles. En ce qui concerne la moisson et le battage, il est recommandé d’interpréter les résultats avec prudence car seules deux branches de production étaient disponibles pour l’étude dans l’échantillon et qu’en plus, elles étaient très différentes. L’une des exploitations utilisait largement les capacités de ses machines et réalisait une valorisation du travail de 65 fr. de l’heure, soit nettement plus que la deuxième exploitation où le degré d’utilisation des machines était plus bas et où le salaire horaire atteignait 15 fr. seulement. Dans la moyenne pondérée par prestation brute, les coûts fixes, dus en grande partie à des amortissements élevés, représentent

plus de la moitié des coûts totaux. Ici aussi, comme pour le pressage des balles, le temps de préparation et de trajet représente près du quart du temps de travail total. Dans le domaine de la protection phytosanitaire, le chef d’exploitation doit également se charger, en plus des travaux des champs proprement dits, de travaux impopulaires impliquant l’utilisation de produits chimiques. C’est une prestation complète qui est ainsi proposée: achat, stockage, épandage et élimination laborieuse des éventuels restes (ces travaux apparaissent sous la rubrique « Trajet » au tableau 2). Cette prestation augmente certes la charge de travail, mais justifie également des prix élevés et constitue un important argument commercial. La valorisation du travail est attrayante, à raison de 53 fr. de l’heure. La structure des coûts est celle où la main-d’œuvre représente le pourcentage le plus élevé de tous les groupes  étudiés, avec 34 %.

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Economie agricole | Calculs des coûts complets des travaux en régie

Le semis comprend les semoirs monograines ainsi que les combinaisons d’outils de semis. La structure des coûts et la rentabilité sont semblables à celles des travaux de protection phytosanitaire. La main-d’œuvre est rémunérée à raison de 60 fr. de l’heure. Les travaux en régie dans le domaine du transport et de la logistique s’avèrent d’une rentabilité fluctuante, comme le montrent les différences entre les cinq exploitations concernées. Tandis que le transport des petites balles affiche une valorisation du travail faible voire négative, l’utilisation de remorques à bennes basculantes pour le transport des copeaux de bois rapporte nettement plus. Cela tient avant tout à la clientèle nonagricole (communes et privés), qui paye bien. Le chargeur télescopique est lui aussi en grande partie utilisé pour un client non-agricole (menuiserie). La valorisation du travail pondérée est de 37 fr. de l’heure. Avec 85 fr. de l’heure, c’est le service de déneigement qui obtient la valorisation du travail la plus élevée, soit nettement au-dessus du tarif horaire moyen cité pour les travaux de déneigement de 65 fr. de l’heure (Gazzarin 2013). Du fait du degré d’utilisation annuel élevé des tracteurs, également grâce au service de déneigement, et des coûts d’acquisition relativement bas du chasseneige et de la saleuse, les coûts réels des machines sont quant à eux en dessous des tarifs recommandés par Gazzarin (2013) pour les travaux de déneigement. Le groupe «Divers» affiche une structure de coûts semblable à celle de la protection phytosanitaire ou du semis. La valorisation du travail est 50 fr. de l’heure. La moyenne pondérée par prestation brute des 30 observations de branches de production donne une valorisation du travail de 54 fr. de l’heure. Il faut tenir compte du fait qu’avec cette moyenne pondérée, les branches de production qui utilisent le mieux les capacités de leurs machines, qui génèrent par conséquent une prestation brute supérieure, qui ont des coûts fixes inférieurs par unité de travail et qui finalement affichent une valorisation du travail plus élevée, sont aussi celles qui pèsent le plus lourd dans la balance. La moyenne non pondérée est d’environ 50 fr. de l’heure. Pour compléter les calculs de coûts/prestations, les machines utilisées ont été étudiées de plus près. On a constaté que comparé au Rapport coûts-machines, le degré moyen d’utilisation des machines était de 83 %. Cela signifie que les machines ne sont pas utilisées au maximum de leurs capacités, malgré leur utilisation par plusieurs exploitations et bien qu’elles soient employées à moitié (49 %) pour les travaux en régie ou la location. On observe également que l’utilisation des machines répond à deux objectifs différents. D’un côté, des machines ont été acquises dans le but d’effectuer des

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travaux en régie (p. ex. moissonneuse-batteuse). Le pourcentage de l’utilisation propre dans le degré d’utilisation totale de la machine est donc relativement faible. D’un autre côté, certaines machines ont été achetées en premier lieu pour être utilisées sur l’exploitation. Dans ce cas, leur utilisation sur plusieurs exploitations a pour but d’accroître l’emploi de leurs capacités et donc de réduire les coûts fixes par unité de travail (p. ex. tracteur ou charrue). Par conséquent, pour ces machines, la part représentée par l’utilisation en dehors de l’exploitation par rapport à l’utilisation totale est plutôt faible.

Conclusions Les calculs de coûts/prestations des sept groupes de travaux en régie indiquent que la rentabilité des branches de production étudiées est bonne. A l’exception du pressage des balles, toutes les autres branches de production sont en mesure de valoriser le travail effectué au-delà des coûts d’opportunité de 28 fr. de l‘heure, qui ont été appliqués. Les deux principaux facteurs d’influence sur les revenus sont le degré d’utilisation des machines ainsi que la part représentée par le temps de préparation et de trajet dans le temps de travail total. A l’exception de la moisson et du battage, toutes les branches de production ont une structure de coûts similaires, avec 40 % pour les coûts fixes des machines, 30 % pour la main-d’œuvre et également 30 % pour les autres coûts. Pour interpréter les résultats, il faut néanmoins savoir que, dans de nombreux cas, la durée d’amortissement calculée est plus longue qu’habituellement dans la comptabilité et que les amortissements ne correspondent que rarement à ceux figurant dans la comptabilité. Le nombre relativement faible de huit études de cas pour un total de 30 branches de production dans le domaine des travaux en régie constitue une restriction supplémentaire. L’étude apporte une première contribution sur la rentabilité des travaux en régie dans l’agriculture, mais ne permet pas de tirer des conclusions pour l’ensemble des travaux en régie. Pour y parvenir, il faudrait procéder à des études de cas plus nombreuses et prendre en compte d’autres types de travaux en régie à l’intérieur de la ferme, comme les activités de conseil, les soins des onglons, le pressage et la pasteurisation des jus. n


Contabilità a costi integrali per i lavori salariati Sulla base di otto imprese e di 30 osservazioni di rami aziendali, per sette gruppi di lavori salariati nell'ambito dell'economia esterna (quali produzione vegetale, trasporti/ logistica o servizio invernale) vengono contrapposti entrate e costi integrali al fine di determinare la redditività. A eccezione della pressatura di balle, per tutti i rami aziendali è possibile realizzare retribuzioni orarie nettamente superiori al costo opportunità di fr. 28.–/ora, risultato che indica generalmente una buona redditività. I principali fattori che influenzano tale calcolo sono dati dallo sfruttamento massimo dei macchinari nonché dalla percentuale di ore destinate alla preparazione delle macchine e agli ­spostamenti rispetto all'orario di lavoro complessivo. A eccezione della mietitrebbiatura, è possibile osservare una struttura dei costi simile in cui i costi fissi dei macchinari incidono per il 40 per cento, mentre il lavoro e gli altri costi variabili per il 30 per cento. Sebbene poco meno della metà sia utilizzata per i lavori salariati o per il noleggio, i macchinari esaminati sono sfruttati solo all'83 per cento se paragonati ai valori indicativi del rapporto sui costi dei macchinari.

Bibliographie ▪▪ Hausheer Schnider J., 2010. Directives pour le catalogue de données du Dépouillement centralisé des données comptables. Agroscope, Ettenhausen. ▪▪ Lips M. & Schmid D., 2013. Agrarische Diversifikation aus ökonomischer Sicht: Entwicklung auf den schweizerischen Landwirtschaftsbetrieben. In: Agrarische Diversifikation – rechtliche Aspekte von Agrotourismus bis Energieerzeugung (Ed. R. Norer), Tagungsband der 3. Luzerner Agrarrechtstagung 2012, Schriften zum Recht des ländlichen Raums, Band 7, Dike Verlag, Zürich, 19–29.

Summary

Riassunto

Calculs des coûts complets des travaux en régie | Economie agricole

Full-Cost calculations for contract work Based on eight farms and 30 observations of farm enterprises, the revenues for seven categories of contract employment in the outdoor-work sector such as Plant Production, Transport/Logistics and Winter Road Clearance are compared to the full costs in order to determine their cost-efficiency. Except for bale-pressing, labour utilisation (i.e. the resultant hourly wage) significantly exceeding the opportunity costs of CHF 28 per hour can be achieved for all farm enterprises, which in general indicates good cost-efficiency. The most important influencing factors here are full utilisation of machinery and the proportion of total working time accounted for by set-up and travel times. With the exception of combineharvesting a comparable cost structure can be identified, with 40 per cent corresponding to the fixed costs of the machines and 30 per cent each corresponding to labour and to other variable costs. Although just under half of the machines studied are used for contract work or hired out, they are only used to 83 per cent capacity compared to the reference values of the Machine Costs report. Key words: agricultural related activities, machinery, contractor.

▪▪ Gazzarin Ch. & Lips M., 2013. Rapport coûts-machines 2013.Rapport ART n° 767, Agroscope, Ettenhausen. ▪▪ Gazzarin Ch., 2013. Indemnités à demander pour les travaux de déneigement. Agroscope, Ettenhausen. Accès: http://www.agrartechnik.ch/file/ downloads/Schneer%C3%A4umungen13_f.pdf [25.04.2014].

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 352–357, 2014

357


P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Essais de variétés de luzerne (2011-2013) Rainer Frick1, Eric Mosimann1, Philippe Aebi1, Daniel Suter2 et Hans-Ueli Hirschi2 1 Institut des sciences en production animale IPA, Agroscope, 1725 Posieux, Suisse 2 Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, Agroscope, 8046 Zurich, Suisse Renseignements: Rainer Frick, e-mail: rainer.frick@agroscope.admin.ch

Figure 1 | En plaine, la luzerne atteint le stade de floraison entre le 1er et le 15 juin.

Introduction La luzerne est une des plus importantes plantes fourragères au niveau mondial. Elle comprend deux espèces botaniques et leurs hybrides. Ces deux espèces, originaires de Perse, se sont propagées d’une part par la Méditerranée vers l’Espagne et la France (Medicago sativa L.) et d’autre part par la Sibérie du Sud et la Scandinavie vers l’Europe du Nord (Medicago falcata L.). La plupart des variétés cultivées sous nos latitudes sont de type «Flamand». Ce sont des hybrides, qui se sont formés là où les réseaux de propagation de Medicago sativa et

358

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

de Medicago falcata se recouvrent. Ces variétés de luzerne, dont les fleurs sont généralement violacées, ont principalement gardé les caractéristiques morphologiques de l’espèce sativa: une croissance haute, des tiges épaisses et un enracinement profond. La racine pivotante rend les plantes de luzerne peu sensibles à la sécheresse. De l’espèce falcata, elles ont hérité la tolérance au froid. A part le type «Flamand», il existe également des luzernes de types «Provence» et «Italien». Les variétés de type «Provence» se distinguent par une croissance plus basse, des tiges plus fines et des rendements moins élevés. Les luzernes «italiennes», issues de popula-


tions méditerranéennes, ont une plus faible dormance en hiver et, en conséquence, sont plus sensibles au gel (Nösberger et Opitz von Boberfeld 1987; Mauries 1994; Mosimann et al. 1995). La luzerne est sans doute la plante fourragère la plus productive en Suisse. Dans de bonnes conditions, les meilleures variétés de luzerne fournissent des rendements de 20 tonnes de matière sèche par ha et par année (Mosimann et al. 2001). C’est donc en priorité dans les régions séchardes et chaudes, par exemple au pied du Jura, en Valais ou localement sur des parcelles exposées plein sud, que la luzerne profite au mieux de son potentiel de rendement élevé. Exploitée au stade «début bourgeonnement», la luzerne peut fournir de très hauts rendements en protéine par unité de surface. En outre, quel que soit son stade de développement, elle présente des teneurs élevées en cellulose brute. En complément aux fourrages manquant de structure ou de protéines (ensilage d’herbe, foin et regain, maïs etc.), la luzerne peut cependant apporter les quantités de fibres et/ou de protéines nécessaires à la santé du bétail. Grâce à la fixation d’azote par les rhizobiums, la luzerne laisse des quantités non négligeables d’azote dans le sol après la culture et ses racines profondes assurent une bonne structure du sol. La luzerne exige des terres profondes, perméables et fertiles, sans eau stagnante tout au long de l’année. Le sol ne doit pas être acide. L’inoculation des semences est nécessaire lorsque le pH du sol est inférieur à 6,5 ou que

Résumé

Essais de variétés de luzerne (2011-2013) | Production végétale

De 2011 à 2013, Agroscope a examiné la valeur agronomique de 36 variétés de luzerne (Medicago sativa L.). Les semis ont été effectués en culture pure et en association avec des graminées. Les caractéristiques suivantes ont été évaluées: rendement en matière sèche, vitesse d’installation, impression générale, reprise au printemps, résistance à la verse, force de concurrence, persistance, digestibilité, résistance aux maladies (maladies foliaires, verticilliose), grosseur des tiges et adaptation à l’altitude. Le classement des variétés s’est effectué sur la base du calcul d’un indice global pondérant l’ensemble de ces critères. Quatre nouvelles obtentions (Catera, Eride, Artemis et Gea) ont atteint des résultats supérieurs à la moyenne et seront ajoutées à la Liste des variétés recommandées de plantes fourragères. En revanche, l’ancienne variété recommandée Vanda sera radiée, principalement en raison de la mauvaise structure des tiges. Elle pourra encore être commercialisée dans les mélanges standard jusqu’à fin 2016.

Figure 2 | Essai variétal de luzerne en culture pure à Changins dans la troisième année.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

359


Production végétale | Essais de variétés de luzerne (2011-2013)

Tableau 1 | Caractéristiques des essais de variétés de luzerne terminés en 2013

Lieu

Nombre de répétitions

Altitude (m)

Date de semis

Changins, VD

430

12/04/2011

3+1*

2

pur

1)

mélange

Coupes pesées 2)

2012

2013

5

5 –

Oensingen, SO

460

11/04/2011

4

3

4

Ellighausen, TG

520

15/04/2011

4

3

4

4

Goumoëns, VD

630

13/04/2011

3

0

5

4

Bassins, VD

840

12/08/2011

3

3

*pour la détermination de l'indice de précocité 1) culture pure: 250 g/are luzerne (variété témoin «Robot» pour la densité de semis) 2) culture en mélange: 150 g/are luzerne variété témoin «Robot» pour la densité de semis) + 60 g/are dactyle «Prato» + 60 g/are ray-grass hybride «Dorcas»

la parcelle n’a plus porté de luzerne durant les cinq dernières années. Pour améliorer sa persistance, il est recommandé de la laisser fleurir durant la troisième pousse et d’éviter des coupes rases à la fauche. Par rapport aux cultures pures, les mélanges luzernegraminées ont en général une production plus stable et durable. Pour cette raison, en Suisse, des semis de mélanges éprouvés composés de luzerne, trèfles et graminées (mélanges standard Mst 320, 323 et 325) sont recommandés. Dans des conditions très favorables à la luzerne, il est aussi possible de cultiver des associations simples comme par exemple luzerne-dactyle ou luzernefétuque élevée. Dans la pratique, il n’est pas toujours évident de maintenir une composition équilibrée entre graminées et luzerne sur une durée de trois ans. Le mode d’exploitation de la prairie (fréquence de coupe, fumure) peut avoir une influence très importante (Suter et al. 2012b).

sance au printemps, la résistance à la verse, la grosseur des tiges, l’adaptation à l’altitude et la persistance. La grosseur des tiges a été examinée lors de la deuxième pousse en deuxième et troisième année d’essai à l’aide d’un échantillon de 20 tiges par parcelle et par lieu et répétition (hauteur de coupe de 5 cm). L’épaisseur des tiges a été mesurée à 4 cm au-dessus de la base coupée. La digestibilité de la matière organique (MOD) a été déterminée lors des trois premières pousses de la deuxième année à Ellighausen. Les échantillons ont été analysés par spectrométrie dans le proche infrarouge NIRS (Norris et al. 1976), dont les valeurs ont été validées avec 

Matériel et méthodes De 2011 à 2013, les stations de recherche d‘Agroscope ont examiné la valeur agronomique de 36 variétés de luzerne dans des essais comparatifs. Les semis ont eu lieu au printemps, à l’exception de celui de Bassins. Le tableau 1 fournit des indications sur les lieux d’essais, les dates de semis et le nombre de coupes effectuées. Les variétés à tester ont été semées en culture pure et en association avec du dactyle et du ray-grass hybride sur des parcelles d’une grandeur de 9 m². Les mélanges luzerne-graminées ont été fertilisés avec 25 à 30 unités d’azote par pousse, tandis que les cultures pures n’ont reçu aucun apport d’azote. Les cultures pures ont fait l’objet de plusieurs observations, telles que la vitesse d’installation, l’aspect général (impression générale, densité, rapidité de repousse), la résistance aux maladies (maladies foliaires, verticilliose), la reprise de la crois-

360

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

Figure 3 | La verticilliose, causée par le champignon Verticillium alboatrum , peut fortement gêner la croissance en été et à l’automne.


Essais de variétés de luzerne (2011-2013) | Production végétale

Tableau 2 | Provenance, précocité et classement des variétés de luzerne testées

Variété

Obtenteur, pays

Indice de précocité1)

Catégorie2)

1

Timbale

GIE Grass, FR

61b

1

2

Cannelle

R2n, FR

61b

1

3

Fraver

Schmidt-Gambazza, FR

62a

1

4

Sanditi

Barenbrug, NL

61b

1

5

Robot

CRA-FLC, IT

61b

1

6

Vanda

SCPV VÚRV, SK

61b

7

Catera

SZ-Steinach, DE

61b

1

8

Eride

Continental, IT

61a

1

9

Artemis

Barenbrug, NL

61a

1

10

Gea

Continental, IT

61a

1

11

Azzurra

SIS, IT

61b

3

12

Fleetwood

SZ-Steinach, DE

61b

3

13

Voie Lacteé

Jouffray-Drillaud, FR

61b

3

14

Frigos

Padana, IT

62a

3

15

Galaxie

Jouffray-Drillaud, FR

62a

3

2/3

16

Sandra

Euro Grass, DE

62a

3

17

Rachel

Caussade, FR

61a

3

18

Costanza

Semfor, IT

61a

3

19

Alexis

Barenbrug, NL

61a

3

20

Felicia

Jouffray-Drillaud, FR

61b

3

21

Salsa

Semences Vertes, FR

61b

3

22

Sovrana

Sivam, IT

62a

3

23

Prosementi Bologna

fenaco, CH

62a

3

24

Giulia

Mediterranea, IT

61b

3

25

Carélite

Carneau, FR

61b

3

26

Fusion

Schmidt-Gambazza, FR

61b

3

27

Roxana

Euro Grass, DE

62a

3

28

Plato

Freudenberger, DE

61b

3

29

Minerva

fenaco, CH

61b

3

30

Premariacco

Mediterranea, IT

62a

3

31

Medoc

Jouffray-Drillaud, FR

62a

3

32

Neptune

Carneau, FR

61b

3

33

Exquise

Caussade, FR

61a

3 3

34

Madalina

Euro Grass, DE

62a

35

Fiesta

Schmidt-Gambazza, FR

62a

4

36

Kamila

NPZ-Lembke, DE

62a

4

Variétés en caractères gras = anciennes variétés recommandées 1) Indice de précocité: Période à laquelle débute la floraison. Le premier chiffre indique le mois, le second la décade et la lettre la partie de la décade (a = début, b = fin). Exemple: 61a = début floraison du 1er au 05 juin 2) Classement des variétés basé sur les résultats des essais: Catégorie 1: Variété recommandée en Suisse. Catégorie 2/3: Ancienne variété recommandée déclassée en vue d'une radiation dès le 1er janvier 2017. Catégorie 3: Variété moyenne et non recommandée en Suisse, sans caractéristique particulièrement intéressante. Catégorie 4: Variété ne convenant pas à la culture en Suisse.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

361


Production végétale | Essais de variétés de luzerne (2011-2013)

Figure 4 | Les mélanges luzerne-graminées de trois ans fournissent des fourrages avec des t­ eneurs élevées en protéine et en fibres, aussi en périodes sèches.

la méthode in vitro de Tilley et Terry (1963). La force de concurrence des différentes variétés a pu être observée dans les cultures mixtes luzerne-graminées; le pourcentage de la part de luzerne par rapport au rendement total du mélange a été estimé, afin de pouvoir déterminer un indice pour la force de concurrence selon la formule suivante: Force de concurrence = 9 – 0,08 × part du rendement en %. Les observations dans des semis purs fauchés plus tard au printemps ont servi à déterminer les stades phénologiques des différentes variétés, en particulier leur date de floraison. Celles-ci ont été effectuées à Changins durant les deuxième et troisième années d’essai. Pour le classement des variétés, toutes les notations ont été prises en compte sous forme d’un indice global, selon une échelle de 1 à 9, 1 étant la meilleure et 9 la moins bonne note. Les récoltes des parcelles en culture pure ont été pesées à l’aide d’une récolteuse automotrice. Les rendements annuels en matière sèche ont été convertis en notes de 1 à 9 selon un traitement statistique. Le même procédé a été appliqué pour les valeurs de la digestibilité (MOD) et l’épaisseur des tiges, afin de disposer d’une échelle d’évaluation commune à l’ensemble des critères examinés.

362

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

Résultats Comparaison des variétés testées Le classement des 36 variétés testées (tabl. 2) s’effectue sur la base de l’indice global, une valeur moyenne, qui résulte de l’ensemble des critères examinées (tabl. 3) et qui permet de comparer les différentes variétés entre elles. Plus la valeur est basse, plus la variété est meilleure sous l’angle des caractéristiques examinées. Selon l’espèce, certains critères ont un poids plus important que d’autres et comptent double dans cette évaluation. Dans le cas de la luzerne, il s’agit du rendement en matière sèche, de l’impression générale, de la résistance à la verticilliose et de la grosseur des tiges. Une nouvelle variété est recommandée si sa valeur d’indice globale est de 0,2 points meilleure que la moyenne des variétés témoins, anciennement inscrites à la Liste des variétés recommandées de plantes fourragères (valeur inférieure = meilleure). Une ancienne variété est éliminée si son indice global est supérieur de 0,2 points à la moyenne des témoins. De plus, une variété est écartée si sa note pour l’une des caractéristiques s’écarte positivement de 1,5 points de la moyenne. Quatre nouvelles obtentions qui se distinguent Quatre des 30 variétés nouvellement testées remplissent les exigences pour être recommandées avec un indice 


Essais de variétés de luzerne (2011-2013) | Production végétale

Force de concurrence

Persistance

Reprise de la croissance au printemps

maladies foliaires

verticilliose*

MOD2)

Résistance à la verse

3,8

3,4

5,0

5,0

4,9

2,8

2,0

4,7

4,0

3,5

3,7

3,91

5,0

3,6

3,3

5,1

4,2

4,7

3,1

1,9

4,3

5,3

4,3

3,9

3,96

3

Fraver

5,0

3,8

4,4

5,6

4,8

5,0

2,8

1,6

4,7

1,3

5,0

4,1

3,97

Indice

Vitesse d'installation

5,3

Adaptation à l'altitude

Aspect général*

Timbale Cannelle

Grosseur des tiges*

Rendement1*

1 2

Variété

Résistances aux maladies:

Tableau 3 | Résultats des essais variétaux de luzerne 2011–2013: rendements et notations

4

Sanditi

4,9

3,4

3,2

4,7

4,4

4,4

3,0

2,3

4,7

4,4

5,3

3,7

4,00

5

Robot

4,8

2,8

2,7

4,6

3,3

3,8

2,9

1,7

5,3

8,0

6,8

2,9

4,10

6

Vanda

4,8

3,1

3,3

4,8

4,4

4,5

3,2

2,2

4,7

4,5

7,0

3,7

4,19

5,0

3,4

3,4

5,0

4,4

4,6

2,9

1,9

4,7

4,6

5,3

3,6

4,02

Moyenne des témoins 7

Catera

5,4

3,2

3,8

4,9

4,2

5,3

3,1

2,0

4,3

1,9

1,5

3,2

3,44

8

Eride

5,2

3,1

3,5

4,8

3,8

4,5

2,8

1,9

5,3

1,3

5,5

3,2

3,77

9

Artemis

4,7

3,0

3,5

4,6

3,1

4,4

2,6

1,5

5,0

3,5

5,8

3,8

3,78

10

Gea

4,0

2,5

2,8

4,3

3,0

3,6

3,1

2,9

5,7

6,0

5,3

3,0

3,79 3,91

11

Azzurra

4,5

2,4

2,8

4,1

3,7

3,7

2,9

2,7

5,3

7,4

5,5

2,4

12

Fleetwood

6,3

3,5

3,8

5,3

4,4

5,8

3,1

2,5

4,3

3,9

1,8

3,9

3,92

13

Voie Lacteé

4,6

3,3

3,7

4,7

3,8

4,8

2,8

1,6

5,3

4,8

5,0

4,1

3,94 3,96

14

Frigos

4,7

2,8

2,5

3,8

3,7

4,1

3,6

2,4

6,0

8,5

4,5

2,6

15

Galaxie

4,9

3,5

3,8

4,9

4,3

4,6

3,1

1,7

5,0

4,0

5,0

3,7

3,98

16

Sandra

5,7

4,1

4,0

5,0

4,4

5,2

2,6

1,7

5,3

5,8

2,0

4,7

3,99

17

Rachel

5,1

3,6

3,5

4,5

4,2

4,9

2,9

1,8

5,0

4,5

4,8

4,0

4,00

18

Costanza

4,7

2,4

2,3

4,1

3,6

3,2

2,8

2,4

6,7

8,0

6,3

1,9

4,00

19

Alexis

4,6

3,4

3,0

4,4

3,7

4,5

2,8

1,6

5,0

5,3

6,0

4,3

4,01

20

Felicia

4,4

3,9

3,9

4,9

4,8

4,7

2,5

1,7

4,0

4,8

5,0

4,9

4,03

21

Salsa

5,8

3,7

3,6

5,3

4,6

5,1

3,4

2,1

5,0

1,3

5,0

3,7

4,05

22

Sovrana

4,5

2,8

2,7

4,2

3,8

3,7

3,0

2,4

5,7

8,4

5,5

3,3

4,08

23

Prosementi Bologna

4,5

2,9

2,7

4,2

3,8

4,2

3,6

2,4

5,3

7,5

5,8

2,7

4,08

24

Giulia

4,5

3,2

2,8

4,5

3,9

4,2

3,4

2,6

6,3

8,0

4,3

3,3

4,09

25

Carélite

5,8

4,0

3,8

5,4

4,7

5,1

3,3

2,0

5,0

2,9

4,3

4,3

4,14

26

Fusion

5,5

4,2

4,0

5,1

4,6

5,3

2,9

1,6

3,7

4,5

4,5

5,0

4,18

27

Roxana

5,1

3,7

3,6

4,9

4,2

4,9

2,9

1,5

4,7

6,9

5,3

3,8

4,20

28

Plato

5,4

4,0

3,8

5,2

4,5

5,3

3,2

2,0

4,3

4,9

4,5

4,3

4,20

29

Minerva

4,4

3,0

3,2

4,2

3,6

4,1

2,8

2,1

6,3

7,8

6,5

3,3

4,20

30

Premariacco

5,0

3,0

3,2

4,0

3,5

4,2

3,1

2,5

5,7

8,0

6,0

2,8

4,21

31

Medoc

4,7

3,9

3,6

5,2

4,5

5,1

2,9

1,7

5,0

7,5

4,5

4,4

4,23

32

Neptune

5,7

3,7

3,9

5,3

4,6

5,2

3,3

2,0

5,0

3,1

5,5

3,9

4,26 4,30

33

Exquise

5,3

3,6

3,6

4,6

4,4

4,8

3,9

2,4

4,3

4,0

6,5

3,4

34

Madalina

5,6

3,9

3,9

4,8

4,8

5,1

3,1

2,1

4,7

5,5

4,8

4,3

4,31

35

Fiesta

5,2

4,8

6,0

6,0

5,9

5,9

2,6

1,8

3,0

2,0

4,5

6,1

4,37

36

Kamila

5,1

3,5

3,5

4,6

5,0

4,9

3,7

2,3

4,7

5,5

7,5

4,1

4,56

Variétés en caractères gras = anciennes variétés recommandées. Notes: 1 = très élevé, très bon; 9 = très faible, très mauvais. 1) Notes de rendement annuel de 4 lieux (2012) et de 3 lieux (2013), 4 à 5 coupes pesées. 2) MOD = matière organique digestible: moyenne de 3 prélèvements en 2012 à Ellighausen. * Caractéristiques comptant double dans le calcul de l'indice.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

363


Production végétale | Essais de variétés de luzerne (2011-2013)

global de plus de 0,2 points en-dessous de la moyenne des témoins. Le meilleur indice a été atteint par la nouvelle obtention Catera, et ceci principalement grâce à des valeurs extraordinaires pour la résistance à la verse et pour la grosseur des tiges. Elle figure aussi parmi les meilleures variétés pour la digestibilité de la matière organique. En revanche, elle est plutôt médiocre au niveau du rendement et de la croissance après le semis et au printemps. Eride se distingue par une bonne persistance et une excellente résistance à la verse, deux caractéristiques pour lesquelles seule la variété recommandée Fraver est à la même hauteur. Le rendement en matière sèche et la digestibilité de Eride ne se situent pas à un très haut niveau. Artemis, une autre nouvelle obtention, présente des atouts intéressants concernant la persistance et le rendement élevé, ainsi que la résistance à la verticilliose et aux maladies foliaires. De plus, elle offre une bonne résistance à la verse. Eride et Artemis ont d’ailleurs des qualités similaires. La quatrième nouvelle obtention à recommander, Gea, a montré de très bons résultats pour plusieurs critères: rendement en matière sèche, aspect général, force de concurrence, persistance, vitesse d’installation et aptitude à l’altitude. Comme elle repousse vite au printemps, le risque de subir des dégâts de gel au printemps est assez élevé, surtout si la parcelle se trouve dans une «cuvette». Elle est plutôt médiocre concernant la résistance à la verse et à la verticilliose et la digestibilité. En plus de ces quatre variétés, d’autres nouvelles obtentions ont livré des résultats intéressants, même si elles ne remplissent pas tout à fait les exigences pour être recommandées. A mentionner par exemple les variétés Azzurra et Frigos, qui disposent de caractéristiques similaires à Gea, à l’exception de la résistance à la verse qui n’est pas très bonne. Voie Lactée a montré de bons résultats au niveau du rendement et de la résistance à la verticilliose, mais moins satisfaisants pour les autres critères. La variété Fleetwood se distingue par une excellente structure des tiges, mais n’est pas assez productive. Anciennes variétés: Vanda déclassée dès 2017 De manière générale, les résultats révèlent l’homogénéité de l’assortiment testé, car les valeurs de l’indice global oscillent dans un intervalle relativement étroit de 0,4 points seulement (à l’exception des deux variétés Fiesta et Kamila). Toutefois, une ancienne variété, Vanda, est déclassée. Même si elle remplit toujours les exigences au niveau de l’indice global, elle ne peut plus être retenue en raison d’une valeur défavorable de 7,0 pour la grosseur des tiges, qui dépasse la moyenne des témoins de plus de 1,5 points (tabl. 3). Robot, une autre ancienne

364

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

variété, montre la même faiblesse et se caractérise en plus par une mauvaise résistance à la verse (valeur de 8,0). Même si elle devrait en principe être éliminée en raison de ce critère important, sa recommandation est maintenue, en raison de ses autres atouts (productivité, aspect général, force de concurrence, résistance à la verticilliose). De plus, c’est une variété qui est bien appréciée au Tessin où elle est cultivée avec succès. En comparaison avec Robot, Timbale dispose des caractéristiques presque opposées: des rendements en MS et une persistance moyennes et en revanche une bonne résistance à la verse et des tiges fines. A l’exception de Robot, les six anciennes variétés se distinguent d’ailleurs par une bonne digestibilité de la matière organique.

Conclusions ••Les résultats des essais variétaux de luzerne des années 2011 à 2013 permettent de tirer les conclusions suivantes: ••Les 36 variétés de luzerne testées ont montré des résultats assez homogènes. Ceci prouve que la sélection de cette espèce de légumineuse importante a atteint un niveau très élevé. ••Les différences les plus importantes sont à relever pour les deux critères «résistance à la verse» et «grosseur des tiges». ••La variété Vanda, recommandée depuis 2001, sera éliminée de la Liste des variétés recommandées, car ses tiges sont trop grossières. Pour les mélanges standard, elle peut encore être utilisée jusqu’au 31 décembre 2016. ••Sur la base des résultats obtenus, la Liste des variétés recommandées sera complétée par quatre nouvelles obtentions de luzerne: Catera, Eride, Artemis et Gea. En conséquence, neuf variétés recommandées de luzerne figurent actuellement sur la Liste des variétés recommandées (Suter et al. 2012a). Il existe donc un choix important et varié de variétés performantes de luzerne pour la composition de mélanges standard du type «L». n


Risultati delle prove varietali dell’erba medica (2011-2013) Il valore agronomico e culturale delle 36 varietà di erba medica (Medicago sativa L.) è stato valutato nelle prove varietali dal 2011 al 2013. Le semine sono state realizzate in colture pure e in associazione semplice con due graminacee. Le seguenti caratteristiche sono state considerate: rendimento in materia secca, velocità di attecchimento, impressione generale, sviluppo primaverile, resistenza alle piogge intense, capacità di concorrenza, persistenza, resistenza alle malattie, grandezza degli steli e attitudine per la coltura in quota. La classificazione delle varietà testate è stata effettuata sulla base del calcolo di un indice globale ponderante l’insieme dei criteri sopra elencati. Quattro nuove varietà (Catera, Eride, Artemis e Gea) hanno mostrato risultati superiori alla media e saranno, perciò, iscritte nella «Lista delle varietà raccomandate». La precedente varietà raccomandata Vanda sarà, invece, ritirata dall’assortimento essenzialmente a causa del non adeguato spessore degli steli; tuttavia potrà ancora essere commercializzata fino alla fine del 2016.

Bibliographie ▪▪ Mosimann E., Chalet C., Lehmann J., Schubiger F.X. & Briner H.U., 1995. Essais de variétés de luzerne 1992-1994. Revue Suisse Agric. 27 (2), 107–110. ▪▪ Mosimann E., Bertossa M., Lehmann J. & Briner H. U., 2001. Essais de variétés de luzerne (1998-2000). Revue Suisse Agric. 33 (4), 153–155. ▪▪ Norris K. H., Barnes R. F., Moore J. E. & Shenk J. S., 1976. Predicting ­f orage quality by infrared reflectance spectroscopy. Journal of Animal Science 43, 889–897. ▪▪ Nösberger J. & Opitz von Boberfeld W., 1987. Grundfutterproduktion, Verlag Paul Parey, Berlin/Hamburg.

Summary

Riassunto

Essais de variétés de luzerne (2011-2013) | Production végétale

Alfalfa variety trials (2011-2013) From 2011 through 2013, 36 varieties of alfalfa (Medicago sativa L.) were examined in comparative variety trials at five experimental sites. All varieties were grown in pure stands and in mixture with gramineous plants. The parameters assessed were dry matter yield, juvenile development, regrowth speed, general impression, stem thickness, competitive ability, persistence, digestibility of organic matter, and resistance to leaf diseases and winter conditions. For each variety, an index-value based on measurements and observations of yield was calculated, allowing an accurate comparison of the varieties. According to the results, four new varieties of alfalfa (Catera, Eride, Artemis and Gea) will be added to the «List of Recommended Varieties of Forage Plants». The previously recommended variety Vanda was removed from the list, owing to the bad quality of stem thickness, but may be used in commerce until the end of 2016. Key words: Medicago sativa L., alfalfa, variety test, list of recommended varieties.

▪▪ Frick R., Bertossa M., Suter D. & Hirschi H. U., 2012a. Liste 2013–2014 des variétés recommandées de plantes fourragères. Recherche Agronomique Suisse 3 (10), 1–8. ▪▪ Mauries M., 1994. La luzerne aujourd’hui. Edition France Agricole, 254 p. ▪▪ Mosimann E., Frick R., Suter D. & Rosenberg E., 2012b. Mélanges standard pour la production fourragère. Révision 2013–2016. Recherche ­a gronomique Suisse 3 (10), 1–12. ▪▪ Tilley J. & Terry R., 1963. A two stage technique for the in vitro digestion of forage crops. Journal of the British Grassland Society 18, 104–111.

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 358–365, 2014

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P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­temporelle et thématique de la situation Achim Walter, Christoph Grieder, Luisa Last, Beat Keller, Andreas Hund et Bruno Studer Institut d’agronomie, EPF Zurich, 8092 Zurich, Suisse Renseignements: Bruno Studer, e-mail: bruno.studer@usys.ethz.ch

Parcelles d’essai de blé et de sarrasin à la station de recherche d’EPF à Lindau-Eschikon.

Introduction Le présent article analyse la situation de la sélection végétale en Suisse tout en la replaçant dans le contexte international contemporain et futur. Il se base sur une vaste étude effectuée sur mandat de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG), laquelle doit contribuer à créer les bases pour l’élaboration d’une stratégie sur la sélection végétale en Suisse pour ces prochaines décennies. Evolution des principales cultures agricoles Le blé représente la base de notre culture alimentaire. Avec une surface cultivée en Suisse qui oscille entre 80 000 et 100 000 ha depuis les années 1980, il occupe une place de premier plan parmi les céréales cultivées en Suisse. Dans l’ensemble, la surface cultivée en céréales en Suisse est restée relativement stable au cours des 50 dernières années, tout comme en France et en Allemagne (fig. 1a). Ce n’est pas le cas dans tous les pays comparables, par exemple en Italie, qui connaît une forte dimi-

366

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 366–373, 2014

nution de l’importance de la culture céréalière locale. Durant les décennies passées, et ce malgré l’énorme augmentation de la population, la Suisse a pu conserver son taux d’autosuffisance brute à environ 60 % (y compris la production à partir de fourrages importés) justement grâce aux progrès faits dans la sélection de ses propres variétés de blé. Le recul continu des surfaces cultivées de racines et de tubercules (fig. 1b) est avant tout dû à une moindre demande en pommes de terre, la principale espèce de ce groupe de cultures. Cette diminution de la demande s’explique d’une part par la baisse de la consommation directe de pommes de terre, d’autre part par la disparition progressive des pommes de terre et des betteraves fourragères de l’alimentation animale. Par contre, l’augmentation de la culture des oléagineux et des légumineuses (fig. 1c et 1d) n’est pas due à une hausse générale de la demande, mais surtout à de nombreuses améliorations en matière de sélection d’espèces importantes au sein de ces groupes de cultures. Il faut nommer ici en premier lieu l’évolution de la sélection du


colza. Par la mise à disposition de variétés exemptes d’acide érucique («colza 0», années 1970) et la diminution de la teneur en glucosinolates («colza 00», années 1980), l’huile de colza jusqu’alors relativement peu comestible a pu être utilisée pour l’alimentation humaine, et les tourteaux ont pris de l’importance dans l’alimentation animale. La tolérance au froid du colza le rend idéal particulièrement pour la culture et l’assolement sous nos latitudes – le colza est la seule plante oléagineuse importante pouvant être cultivée en hiver. En ce qui concerne les légumineuses, l’évolution du soja est particulièrement intéressante. De grands succès obtenus dans la sélection nationale ont permis de développer en Suisse des variétés très précoces qui peuvent être cultivées avec de bons résultats chez nous et dans les pays voisins aux conditions climatiques similaires, et qui apportent une importante contribution aussi bien pour la production d’huile (objectif principal de la culture du soja en Suisse) que pour la production de protéines. Pondération des différents groupes de culture Dans le ballet des quatre grands groupes de cultures mentionnés ci-dessus, les céréales tiennent la vedette avec 72 % de la surface cultivée annuellement (fig. 2), suivies par les oléagineux (13 %), les racines et les tubercules (5,5 %) et les légumineuses (2 %). Un peu moins de 8 % des surfaces cultivées sont consacrées à la culture 

800 1000 1200

Oléagineux

1960

400

600

c)

200

Surface cultivée par rapport à 1961 (%) 80 100 120 60

Céréales a)

1970 1980

1990 2000 2010 France

1960

Allemagne

Italie

1960

1990 2000 2010 Suisse

d)

400

600

800

Légumineuses

Le spectre des plantes cultivées demandées, ainsi que leur capacité de rendement, se modifient avec le temps. En Suisse, la culture des céréales, les cultures spéciales et la culture de plantes fourragères jouent traditionnellement un grand rôle. Il est capital de conserver la capacité de rendement de ces plantes dans le contexte économique et de production de demain. Mais se focaliser sur ces plantes uniquement serait faire preuve d’une vision à trop court terme et priverait la Suisse de possibilités agronomiques dans le domaine d’autres espèces cultivables encore peu étudiées, susceptibles de générer de grands profits. L’amélioration des plantes de culture se fait par le processus de la sélection. La sélection végétale exerce une influence sur le rendement et la qualité, ainsi que sur la résistance aux maladies et au stress environnemental. Les évolutions au niveau des techniques culturales, de la transformation agro-alimentaire et de la sélection ont également un impact, tout comme la mondialisation du secteur agro-alimentaire. Il est difficile de prédire comment vont évoluer exactement les besoins en matière de sélection et la direction que prendra cette dernière en Suisse au cours des prochaines décennies. La Confédération peut toutefois avoir une influence décisive sur ces évolutions par le biais de prescriptions légales et d’incitations financières. Elle peut démarrer des processus qui renforceront la position de la Suisse dans le système alimentaire mondial dans un avenir proche et qui correspondent à l’image que la Suisse se fait d’elle-même: un pays à l’économie exemplaire, orientée sur la durabilité, la satisfaction de la population et le succès économique.

200

Surface cultivée par rapport à 1961 (%) 40 20 60 80 100

Racines et tubercules b)

1970 1980

Résumé

Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation | Production végétale

1970 1980 1990 2000 2010 Année

1960

1970 1980 1990 2000 2010 Année

Figure 1 | Evolution relative de la surface cultivée des principales cultures en Suisse, France, Allemagne et Italie depuis 1961 (légumineuses en Suisse par rapport à 1973). (Source: FAOSTAT 2013)

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 366–373, 2014

367


Production végétale | Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation

Monde

1216 mio.ha

EU-27

Suisse

80 mio.ha

0,205 mio.ha

Céréales (58% / 71% / 72%)

Légumes (4,5% / 3% / 7,5%)

Légumineuses (6,5% / 2,0% / 2,0%)

Oléagineux (23% / 21% / 13%)

Racines et tubercules (4,5% / 2,5% / 5,5%)

Cultures de plantes à fibres (3,5% / 0,5% / 0%)

Figure 2 | Pourcentage des surfaces des principales cultures dans le monde, l’Union européenne (UE-27) et la Suisse. (Source: FAOSTAT 2013)

de divers légumes. La part des céréales par rapport aux autres cultures est nettement plus élevée en Suisse et en Europe qu’ailleurs dans le monde. En Suisse, les 200 000 ha de terres ouvertes font face à des surfaces herbagères d’un peu plus de 1 million ha. Ce rapport surfaces herbagères / terres ouvertes distingue la Suisse de la plupart des autres nations. Les cultures spéciales comme l’arboriculture (env. 6500 ha, en majorité des pommes) et la vigne (15 000 ha) sont également relativement importantes. Des cultures plus «exotiques» comme les pseudo-céréales (sarrasin, < 100 ha), les plantes énergétiques (Miscanthus, < 100 ha) et les plantes médici-

Valeur ajoutée pour le secteur agricole

nales et aromatiques (250 ha) ne jouent pas un grand rôle pour le moment, mais disposent d’un potentiel futur intéressant. La valeur ajoutée réalisée par les différents groupes de cultures cités auparavant dépend pour l’essentiel des surfaces cultivées et de la valeur du produit principal généré par le groupe (fig. 3). En 2012, la valeur de tous les services et marchandises produits par l’agriculture (valeur ajoutée) s’élevait à ~10 milliards de francs. A peine 3,7 % étaient dus aux céréales; le vin et les fruits, ainsi que les plantes fourragères représentaient chacun 10 %, et les produits des cultures maraîchères et des jar-

Valeur ajoutée pour la production végétale

998 mio. CHF

427 mio. CHF

Céréales (3,7% / 8,7%)

Légumineuses (0,1% / 0,2%)

Produits animaux (46,7%)

Oléagineux (0,9% / 2,1%)

Plantes fourragères (10,4% / 24,4%)

Services (6,8%)

Légumes et hortic. (13,9% / 32,6%)

Fruits et vins (9,7% / 22,7%)

Activités annexes (3,7%)

Racines et tubercules (3,2% / 7,4%)

Autres (0,9% / 1,9%)

Figure 3 | Les parts en pourcent des principales cultures à la création de valeur ajoutée totale dans le secteur agricole ainsi qu’à la création de valeur ajoutée générée par la production végétale. (Source: Office fédéral de la statistique 2014).

368

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 366–373, 2014


Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation | Production végétale

Extension de la variabilité génétique Accélération de la phase de sélection Augmentation de la réussite en matière de sélection Phénotypage Génotypage Variation dans le jardin de sélection Statistique / bioinformatique - Double Haploïde - Marker Assisted Selection - Sélection génomique

Croisement Sélection

Nouveau matériel - Variabilité génétique naturelle - Sélection de mutation / TILLING - Hybridation somatique - Organismes génétiquement modifiés

Examen Nouvelle variété

Figure 4 | Représentation schématique du cycle de sélection. Les champs colorés décrivent les moyens d’augmenter l’efficacité du processus de sélection.

dins environ 14 %. Dans tous les groupes, on trouve aussi bien le mode de culture suivant les directives de l’agriculture biologique (env. 12 %, suivant le type de culture et la région de 5 à 18 %), que celui suivant les directives des bonne pratiques agricoles sur la base de la réglementation valable pour l’obtention des paiements directs. Evolution par sélection végétale des plantes cultivées L’évolution et l’amélioration systématique des plantes cultivées citées ci-dessus se fait par sélection végétale; ce processus vise à améliorer le bagage génétique de la plante considérée au niveau de nombreuses caractéristiques. Quelles que soient les caractéristiques recherchées, l’espèce cultivée et la méthodologie de sélection utilisée, le schéma de base reste le même. A partir de la variabilité génétique produite par de nouveaux croisements, le sélectionneur doit caractériser le matériel pour son ensemble de caractères observables (phénotype) et éventuellement aussi pour ses propriétés héréditaires (génotype) (fig. 4, noir). Les données recueillies sont ensuite traitées au moyen de procédés statistiques et bioinformatiques pour pouvoir sélectionner les plantes ayant les meilleures caractéristiques pour la phase de sélection suivante. Après un examen minutieux, les plantes sélectionnées constitueront une nouvelle variété améliorée ou serviront de parents (éventuellement avec du nouveau matériel introduit dans le cycle) pour de nouveaux croisements et ainsi de base pour le prochain tour du cycle de sélection. En raison des progrès réalisés dans des domaines technologiques très divers – de la technique de culture jusqu’à la transformation des aliments – les objectifs de

sélection sont en constante mutation. Pour les prochaines décennies, il s’agit avant tout de générer des systèmes de production végétale plus efficaces pour une intensification de l’agriculture respectant les critères de durabilité. Cela requiert la mise au point de plantes cultivées pouvant atteindre un rendement élevé et relativement fiable avec de plus faibles quantités d’engrais, de pesticides et d’eau. A l’avenir, ce sera moins le rendement absolu qui primera dans les programmes de sélection que la garantie de pouvoir atteindre un rendement comparativement élevé dans des situations climatiques extrêmes (en particulier chaleur, sécheresse et inondation). Bien sûr, la résistance aux maladies et aux parasites continuera à jouer un rôle primordial, notamment parce que la modification du spectre de parasites et d’organismes pathogènes va également se modifier en réponse au changement climatique. Exemple du blé En Suisse, on utilise depuis longtemps pour la sélection du blé un programme montre de belles réussites auquel collaborent Agroscope et Delley semences et plantes SA (DSP). A l’aide de méthodes de sélection conventionnelles, ce programme a surtout permis de développer des variétés de grande qualité permettant de fournir de la farine panifiable et à contenu protéique élevé. La culture indigène de blé, dont la semence est exportée en quantités non négligeables, se base en grande partie sur ces variétés. Sans une adaptation continuelle par sélection de ces variétés, il ne serait pas possible de conserver le positionnement de la Suisse dans le secteur du blé. Au niveau international également, la sélection du blé joue 

Recherche Agronomique Suisse 5 (9): 366–373, 2014

369


Production végétale | Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation

Sélection d'hybrides

Double haploïde

Accélération de la floraison

Marker Assisted Selection

Sélection génomique

Hybridation somatique

Organismes génétiquement modifiés

Apomixie

0,0 0,0 0,0 0,0

2,0 2,0 2,0 1,0

5,0 3,0 2,3 2,0

2,5 2,0 0,3 2,7

0,0 0,0 0,3 5,0

1,8 2,0 1,7 2,3

4,8 6,0 5,0 3,3

0,0 0,0 0,0 0,0

1,5 2,0 0,3 2,0

0,0 0,0 0,0 0,0

5,3 0,0 0,0 4,0

0,0 6,0 6,0 6,0

Soja Pois chiches

0,0 0,0

2,0 2,0

5,5 0,0

5,5 1,0

5,0 0,0

2,0 5,0

4,0 5,0

0,0 0,0

4,0 5,0

0,0 0,0

3,5 0,0

6,0 0,0

Colza Tournesol

0,0 0,0

2,0 0,0

2,5 2,0

2,5 6,0

0,0 0,0

2,0 2,0

3,5 4,0

0,0 0,0

3,0 1,0

3,0 1,0

3,0 5,0

6,0 0,0

Pomme de terre Betterave sucrière

2,0 0,0

0,0 0,5

0,0 2,0

0,0 5,0

0,0 5,0

2,5 2,0

6,0 4,5

3,0 3,0

3,0 6,0

2,0 0,0

2,5 5,0

0,0 6,0

Pomme

2,0

0,0

0,0

0,0

2,0

3,0

6,0

0,0

3,0

0,0

4,0

0,0

Trèfle violet Trèfle blanc Ray-grass

0,0 0,0 0,0

2,0 2,0 2,0

1,0 1,0 5,0

0,0 0,0 0,0

0,0 0,0 0,0

3,0 3,0 3,0

5,0 5,0 4,0

2,0 2,0 2,0

5,0 5,0 4,0

0,0 0,0 0,0

0,0 0,0 6,0

0,0 0,0 6,0

Type de culture Blé Orge Seigle Maïs

0 1 2 3 4 5 6

Changement du degré de ploïdie Sélection de mutation / TILLING

Sélection de populations / lignées

Utilisation de techniques de sélection

Clonage

Catégorie de sélection

Ne joue aucun rôle Plus / rarement utilisé Standard dans les grandes et petites entreprises Standard dans les grandes entreprises, est lentement mis en place dans les petites Seulement dans les grandes entreprises Attendu à court ou moyen terme dans les grandes entreprises Seulement attendu à long terme

Figure 5 | Utilisation de technologies de sélection modernes dans la sélection végétale. L’importance relative de certaines méthodes et technologies a été évaluée sur une échelle de 0 à 6 (sondage spécifique) par 8 experts des différents types de culture.

un grand rôle. Dans ce domaine règne une collaboration étroite, qui fait appel à des technologies de sélection de pointe. Un bel exemple en est la sélection du blé en Allemagne: on y dénombre 39 entreprises actives dans la sélection des céréales (BDP 2013), et 20,2 % des surfaces de sélection (sans compter les plantes fourragères) sont réservées au blé (Noleppa et von Witzke 2013). Les projets de recherche actuellement en cours comprennent par exemple le développement de marqueurs moléculaires pour des propriétés importantes du blé au niveau agronomique (2 projets, 3,5 millions d’euros), la durabilité en matière d’azote pour les céréales (2 projets, 2 millions d’euros), la tolérance au gel (1,1 million d’euros), les blés hybrides (2 projets, 3,6 millions d’euros), ainsi que la tolérance face aux stress biotique (3 projets, 5,8 millions d’euros) et abiotique (4 projets, 3,1 millions d’euros)1. En tout 6,7 millions d’euros par an sont investis dans ces programmes de recherche (presque 20 millions d’euros sur la durée totale de tous les projets), en majorité au niveau de l’utilisation et du développement de http://www.pflanzenforschung.de/de/plant-2030/fachinformationen/ projektdatenbank (état au 6.9.2013)

méthodes de sélection modernes. Outre ces entreprises, des hautes écoles, ainsi que des institutions de recherche agricole et d’autres partenaires de recherche participent également à ces activités. La communauté pour la promotion de la sélection végétale allemande (Gemeinschaft zur Förderung der privaten deutschen Pflanzenzüchtung, GFP) a en outre démarré le programme «ProWeizen», dans le cadre de la «Wheat Initiative» mondiale, qui touche les thèmes de l’hybridation, de la physiologie du rendement et du phénotypage dans des réseaux de recherche mondiaux2. Une percée dans l’hybridation pourrait en particulier conférer une nouvelle dynamique à la sélection du blé (Hund et al. 2014). Outre les grands investissements réalisés dans la recherche et le développement de technologies par les entreprises de sélection privées, le soutien public de la sélection se fait chez notre voisin par le biais de programmes de promotion et de recherche (PLANT 2030, Wheat Initiative, BREEDWHEAT, etc.). Bien que la pérennité de ces programmes de promotion ne soit de par leur

1

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http://www.proweizen.de/ (état au 6. 9.2013)

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Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation | Production végétale

Agroscope / DSP(CH) DLF-Trifolium (DK) Centrum výskumu rastlinnej výroby Pieštany (SK) Malopolska Hodowla Roslin HBP (PL) Lantmännen SW Seed AB (SE) Selgen A.S.(CZ) Norddeutsche Pflanzenzucht (DE) Statiunea de Cercetare-Dezvoltare Agricola (RO) Oseva UNI, a.s. (CZ) Graminor AS (NO) LUA Agency Research Instituteof Agriculture (LV) Agrogen (CZ) Agri-Obtentions (FR) Institute of Agriculture (LT) Jõgeva Plant Breeding Institute (EE) Aberystwyth University (UK) 0

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Nombre de variétés enregistrées (OCVV, depuis 2000) Figure 6 | Liste des institutions de sélection et de conservation, avec le nombre des variétés de trèfle des prés enregistrées sur la liste du CPVO (Community Plant Variety Office) depuis 2000. S’ajoutent à cela 31 autres institutions avec moins de trois variétés enregistrées depuis 2000.

nature pas garantie – leur existence dépendant fortement du contexte politique – ils ont une grande importance: souvent, ces grands programmes permettent de développer et d’utiliser des technologies innovantes et coûteuses pour la sélection végétale. Ces technologies peuvent aussi être rendues accessibles aux entreprises de sélection de taille moyenne à petite et contribuer à leur succès. Le recours à des technologies dernier cri et à des méthodes moléculaires dans la sélection végétale a très fortement augmenté, et il est probable que le développement de la technologie joue un rôle clé dans l’évolution future de la sélection végétale (fig. 5). Pour la Suisse également, il deviendra important dans les prochaines décennies de promouvoir une sélection végétale innovante et de répondre au besoin d’un revenu fiable pour les agriculteurs, tout en allant audevant des besoins des consommateurs pour des aliments de haute qualité. Ainsi, la valeur ajoutée pourra provenir non pas uniquement de la culture indigène, mais aussi dans une proportion non négligeable de la vente des semences et du transfert de connaissances sur la fabrication de ces semences à l’étranger. Si cette position doit être conservée pour le blé, un recours plus fréquent à des technologies de sélection modernes – dont seule une petite proportion est du domaine de la technologie génétique (fig. 5) – ainsi qu’une étroite collaboration avec des consortiums internationaux sera indispensable aussi en Suisse.

Exemple du trèfle des prés La production animale occupe une place prééminente dans l’agriculture suisse, raison pour laquelle les mélanges de plantes fourragères y ont une énorme importance. En ce qui concerne le trèfle des prés, la sélection suisse d’Agroscope en collaboration avec DSP est très bien positionnée dans la culture fourragère indigène comme européenne (fig. 6). La liste 2013/2014 des variétés recommandées pour la Suisse est dominée avant tout par les variétés d’Agroscope/DSP (Agroscope 2013). L’augmentation du rendement et de la qualité constitue un objectif de sélection important, avec au premier plan des critères de sapidité et de teneur élevée en protéines. La rusticité et la résistance aux maladies, p. ex. contre Fusarium ou Sclerotinia, jouent également un grand rôle. Une meilleure efficience au niveau de l’eau et de l’azote contribue à tirer un meilleur profit des ressources et permet la culture dans des zones plus sèches. Dans l’ensemble, la sélection vise à créer des variétés pouvant être cultivées dans de nombreux endroits et sous différentes conditions de stress (DLF-Trifolium3). Dans le domaine de la sélection de plantes fourragères également, de grandes entreprises comme DLFTrifolium (Danemark, part de marché mondiale atteignant 20  %) utilisent de nos jours aussi bien des  3 http://www.dlf.com/R_D/Grass_seeds_Forage_Breeding.aspx (état au 13.11.2013)

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Production végétale | Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation

méthodes de sélection conventionnelles que des méthodes basées sur des marqueurs ADN. Les méthodes conventionnelles comprennent des croisements par paires et de masse (polycrosses) ainsi que la sélection phénotypique en tenant compte des différents sites de production. Le recours à des analyses basées sur l’ADN implique l’utilisation des marqueurs polymorphismes mononucléotidiques (SNP) pour la sélection assistée par marqueur (ou Marker Assisted Selection). La «sélection génomique», qui se base non seulement sur quelques marqueurs mais sur la totalité de l’information génétique (en règle générale plusieurs centaines de milliers de SNP), a ici une importance particulière pour prédire les caractéristiques (quantitatives) au moyen de procédés à variables multiples. Pour des raisons politiques et économiques, et bien qu’il s’agisse d’une technologie établie, DLF n’utilise pas les méthodes de sélection qui requièrent une modification de l’organisme faisant appel à la technologie génétique. Cultures de niche et diversité dans les systèmes agricoles La poursuite des progrès en sélection ne peut se faire qu’en faisant appel à des technologies modernes et des coopérations efficaces au niveau national et international. Les exemples du blé et du trèfle le montrent; on aurait tout aussi bien pu prendre l’exemple de la pomme, pour laquelle de gros progrès sont réalisés actuellement, entre autres en matière de résistance au feu bactérien, par la participation de la Suisse à des consortiums internationaux. Il serait pourtant un peu sommaire de ne considérer que les cultures principales pour analyser l’engagement public dans la recherche en matière de sélection. Au niveau mondial, on observe un comportement alimentaire de plus en plus similaire des populations de divers pays et régions, ce qui entraîne une perte en diversité agricole (Khoury et al. 2014). Pour garantir, voire améliorer la résilience de nos systèmes agricoles, il est donc nécessaire d’encourager aussi bien le travail de sélection sur nos cultures principales que l’utilisation renforcée à long terme des cultures aujourd’hui de niche, dont l’adaptation par sélection aux conditions de production modernes peut durer des décennies (Stamp et al. 2012): pour obtenir une plus grande diversité dans les assolements, une production de protéines végétales et une production locale de plantes de qualité au niveau diététique en respectant les critères de durabilité, il est indispensable que l’on consacre aussi des moyens à la sélection des cultures actuellement de niche, comme les pseudo-céréales, les légumineuses, divers fruits et légumes ou des plantes aromatiques et médicinales. Pour ces cultures, l’investissement public revêt une grande importance, car pour une institution de sélection

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privée, la période de retour sur investissement est souvent trop longue. Les investissements publics dans la sélection des cultures de niche peuvent toutefois se révéler payants à moyen terme (Maredia et al. 2010), en apportant une précieuse contribution à la résilience de nos systèmes agricoles, ainsi qu’à la diversité du portefeuille commercial et du menu des consommateurs. L’évolution du colza et du soja est un bel exemple de la portée économique des améliorations sélectives de cultures peu prisées autrefois. Les variétés de soja développées en Suisse connaissent actuellement une hausse de la demande dans le cadre de l’Initiative Danube Soja pour la production de fourrage européen. Coopération entre institutions publiques et privées Avec des modèles de coopération appropriés, il est possible d’unir les forces nationales et internationales, ainsi que privées et publiques, pour rendre la sélection végétale encore plus efficace et concurrentielle. Il n’est toutefois pas encore possible de déterminer si à l’avenir, la sélection végétale, qui sera de plus en plus marquée par le progrès technologique, ne requerra pas des conditions plus flexibles et plus globales, intégrant la recherche, le développement et l’utilisation de technologies, la sélection végétale pratique et la formation dans des centres de compétences. Des centres de ce genre offrent une plateforme idéale pour réussir à lancer des programmes inter- et transdisciplinaires dans la sélection végétale et développer de nouvelles variétés, comme le démontre le succès de centres existants, situés pour la plupart aux Etats-Unis4,5. Ils permettent de réagir plus rapidement et plus efficacement à un environnement en constante mutation (demande de certaines espèces, objectifs de sélection, technologies). Pour l’échange de connaissances et la formation, éléments indispensables pour assurer des générations futures bien formées capables de relever les défis de la sélection végétale, il faut arriver à une masse critique d’experts multidisciplinaires. n

Remerciements

Les auteurs remercient l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) pour le soutien financier accordé pour la réalisation de cette analyse.

4

http://www.plantbreedingcenter.ncsu.edu/index.html http://plantbreeding.illinois.edu/

5


Il miglioramento genetico vegetale in Svizzera – un’ analisi spaziale, temporale e tematica La varietà di piante coltivate in Svizzera e l’efficienza che queste hanno in termini agricoli sta cambiando nel tempo. Tradizionalmente, le produzioni cerealicole, orticole e foraggiere hanno giocato un ruolo privilegiato nell’agricoltura Svizzera ed è quindi fondamentale mantenere la loro produttività viste le future condizioni socioeconomiche e ambientali. Tuttavia, continuare a focalizzare l’attenzione solo sulle specie economicamente rilevanti potrebbe impedire di sfruttare appieno le possibilità che la riscoperta di colture dimenticate e poco utilizzate offre alla Svizzera. Il miglioramento genetico delle piante coltivate è ottenuto tramite il cosiddetto breeding vegetale. Un processo di miglioramento genetico innovativo ed efficiente è determinante al fine di produrre nuove varietà che si rivelino superiori per caratteristiche come resa, qualità, resistenza a malattie e stress ambientali. Miglioramenti tecnici nel settore agricolo, in quello della trasformazione dei prodotti alimentari e nel settore del breeding influenzano in maniera netta le relazioni tra le possibilità del breeding vegetale e le caratteristiche ricercate, rendendo difficili le previsioni sul futuro di tali ricerche in Svizzera nei prossimi decenni. Tuttavia, il Governo Svizzero può influenzare notevolmente le attività di miglioramento genetico vegetale attraverso adeguamenti strutturali, programmi di sviluppo e finanziamenti statali al fine di supportare programmi di breeding per specie agricole accuratamente selezionate. Tali misure possono aiutare a migliorare la sostenibilità ambientale, la soddisfazione dei consumatori e il successo economico svizzero e porteranno di conseguenza al rafforzamento del ruolo della Confederazione all’interno del sistema alimentare mondiale.

Bibliographie ▪▪ Agroscope, 2013. Liste 2013-2014 des variétés recommandées de plantes fourragères. Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil (ACW) et Agroscope Reckenholz-Tänikon (ART). ▪▪ BDP, 2013. Geschäftsbericht. Bundesverband Deutscher Pflanzenzüchter e.V. (BDP), Bonn, Allemagne. ▪▪ Hund A., Fossati D., Mascher F. & Stamp P., 2014. Hybridgetreide hat ­Z ukunft. Agrarforschung, in press. ▪▪ Khoury C. K., Bjorkman A. D., Dempewolf H., Ramirez-Villegas J., ­G uarino L., Jarvis A., Rieseberg L. H., Struik P. C., 2014. Increasing homogeneity in global food supplies and the implications for food security. Proc Natl Acad Sci USA 111 (11), 4001-4006. doi:10.1073/pnas.1313490111.

Summary

Riassunto

Sélection végétale suisse – analyse spatiale, ­t emporelle et thématique de la situation | Production végétale

The Swiss plant breeding sector – a spatial, temporal and thematic analysis The spectrum of crop species grown within Switzerland as well as their agricultural performance is changing over time. Traditionally, cereal, horticultural and forage production play a major role in Swiss agriculture, and it is crucial to maintain the productivity of these crops under future socio-economic and environmental conditions. However, to focus on only these economically important crops might prevent the realisation of beneficial options that neglected and underutilised crop species offer for Switzerland. Continuous improvement of crops is achieved through plant breeding. Plant breeding is crucial to producing novel varieties that are superior in traits such as yield, quality and resistance to diseases and environmental stresses. Technical developments in farming, food processing and breeding affect the relation between plant breeding possibilities and desired traits — and so does the global nature of the agro-food sector. It is difficult to predict how the requirements and the focus of Swiss plant breeding efforts will develop in the coming decades. Yet, the Swiss Government can influence plant breeding activities by structural adjustments, development programmes and state funding to launch and maintain breeding programmes for well-chosen crops. Such activities could help improve sustainability, consumer satisfaction and economic success in Switzerland and would further strengthen the position of the country within the world food system. Key words: crops, plant breeding, plant production, word food system.

▪▪ Maredia M. K., Bernsten R., Ragasa C., 2010. Returns to public sector plant breeding in the presence of spillins and private goods: The case of bean research in Michigan. Agricultural Economics 41 (5), 425–442. ▪▪ Noleppa S., von Witzke H., 2013. Die gesellschaftliche Bedeutung der Pflanzenzüchtung in Deutschland. Einfluss auf soziale Wohlfahrt, Ernährungssicherung, Klima- und Ressourcenschutz. HFFA Working Paper 02/2013. Humblodt Forum for Food and Agriculture e.V. (HFFA), Berlin, Deutschland. ▪▪ Stamp P., Messmer R. & Walter A., 2012. Competitive underutilized crops will depend on the state funding of breeding programmes: An opinion on the example of Europe. Plant Breeding 131 (4), 461–464.

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E c l a i r a g e

Charbon de l’orge: sensibilité variétale et ­alternatives de lutte Heinz Krebs1, Andreas Kägi1, Irene Bänziger1, Christine Herzog2, Thomas Hebeisen2, Susanne Vogelgsang1 et ­L aure Weisskopf1 1 Agroscope, Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, 8046 Zurich, Suisse 2 Agroscope, Institut des sciences en production végétale IPV, 1260 Nyon, Suisse Renseignements: Laure Weisskopf, e-mail: laure.weisskopf@agroscope.admin.ch

Figure 1 | Epis atteints par le charbon dans l’essai sur l’orge d’automne réalisé en 2014 à Rümlang: au lieu de graines saines, des spores du charbon se développent et sont diffusées par le vent ou lessivées par la pluie, de sorte qu’il ne reste plus finalement que la tige verticale de l’épi. (Photo: Gabriela Brändle, Agroscope)

Jusqu’à ce jour, il n’existe pas de méthode de traitement des semences efficace et pratique pour lutter contre le charbon dans les cultures biologiques. C’est pourquoi Agroscope a testé la sensibilité au charbon de différentes variétés d’orge d’automne ainsi que des méthodes alternatives de traitement des semences. Outre le traitement à l’eau chaude, les applications d’éthanol se sont avérées très prometteuses, bien qu’elles aient réduit la faculté germinative des semences traitées.

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Hormis la recherche sur la sélection des céréales à Darzau et au Dottenfelderhof, la sensibilité au charbon n’est pas un critère de sélection, car cette maladie peut être régulée efficacement et sans trop de frais à l’aide de p ­ roduits de traitement systémiques. Cependant, les semences destinées aux cultures biologiques doivent, conformément aux directives bio (Bio-Suisse 2014), être obtenues sans utilisation de produits de traitement chimiques de synthèse. Du fait de cette règle, ces dernières années, certains lots de cultures de multiplication d’orge n’ont pas été reconnus à cause d’une trop forte infestation par le charbon (> 5 épis cariés par 100 m²). Les spores de l’agent pathogène du charbon Ustilago nuda infectent l’orge au stade de la floraison et le mycélium qui se développe alors survit dans l’embryon des graines jusqu’au semis. Il n’existe à ce jour aucune méthode d’identification du charbon dans les semences qui soit simple à appliquer, de sorte que l’infestation des semences ne peut être constatée qu’à l’épiaison. Lorsque les semences sont contaminées, les plantes forment des épis cariés au lieu d’épis sains (fig. 1). Les spores du charbon diffusées par le vent gagnent les épis en fleurs des plantes saines et infectent les embryons des nouvelles graines. A l’extérieur, rien n’indique que les graines sont infectées, c’est pourquoi elles ne peuvent pas être éliminées lors du tri des semences. Il n’existe pas encore de méthode de traitement des semences efficace et pratique pour lutter contre le charbon dans les cultures biologiques. Le produit biologique à base de Pseudomonas, Cedomon® (Heinonen 2011) ou le traitement physique à l’air chaud ThermoSeed® (Forsberg 2004) ne permettent pas de maîtriser efficacement la maladie. Le seul traitement efficace et biocompatible pour atteindre le mycélium dans l’embryon de la graine est le traitement à l’eau chaude, bien qu’il ne se soit pas encore bien établi dans la pratique. Pour la multiplication des semences d’orge bio, il est donc urgent de trouver des variétés peu sensibles au charbon, ainsi qu’une


Charbon de l’orge: sensibilité variétale et ­a lternatives de lutte | Eclairage

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Infestation par le charbon en %

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Figure 2 | Charbon dans l’orge d’automne: essai sur la sensibilité des variétés en 2013 et 2014. Infestation par le c­ harbon: moyenne de trois répétitions avec écart-type.

méthode pratique de traitement des semences, permettant de contrôler efficacement l’infestation des semences. Cet article présente les résultats d’un essai sur la sensibilité des variétés et sur différentes approches évaluées pour maîtriser le charbon en traitant les semences. Examen variétal En 2011, 20 variétés, qui étaient testées parallèlement dans l’examen variétal, ont été semées en petites parcelles (7 m²) entre deux lignes des variétés Ulla et Express, toutes deux atteintes de charbon. Toutes les variétés étaient donc soumises aux mêmes conditions d’infection pendant la floraison. La semence préparée à partir de ces 20 variétés testées a ensuite été semée en automne 2012 lors d’un essai avec trois répétitions sur petites parcelles, avec une variante de semences non traitées et une variante de semences traitées avec 40 ml/kg de Lebermooser®. L’infestation de charbon par parcelle a été déterminée en été 2013 après l’épiaison. L’essai sur la sensibilité des variétés a été réitéré à l’automne 2013 et l’infestation par le charbon a été contrôlée en mai 2014. Essais avec différentes méthodes de traitement Le produit Lebermooser® est un extrait éthanolique de mousse (70 % EtOH) qui agit contre le charbon de l’orge (Jahn 2010). Dans un autre essai sur petites parcelles avec

la variété Ulla atteinte de charbon, l’efficacité du traitement au Lebermooser® (40 ml/kg) a été comparée avec un traitement à base d’éthanol à 70 % (40 ml/kg) et un traitement à l’eau chaude (2 h à 45 °C). Les traitements au Lebermooser® et à l’éthanol ont été testés en deux variantes: la première consistait à emballer les semences traitées immédiatement après l’application et à les sceller, et la deuxième à laisser les semences traitées à l’air libre pendant une heure avant de les ensacher. L’année suivante (automne 2013), un essai a été mis en place sur une petite parcelle avec la variété Ulla. Il s’agissait de tester l’efficacité de deux traitements à l’éthanol faiblement dosé (20 resp. 30 ml/kg) et de deux traitements à l’éthanol et à l’air chaud; (1 ou 2 jours à 65 °C) – ceci en comparaison avec un traitement à la vapeur d’eau (2 min. à 65 °C) et un traitement à la vapeur d’éthanol (2 min. à 65 °C également) ainsi qu’un traitement à l’eau chaude (2 h à 45 °C). Il s’agissait enfin de déterminer la tolérance des semences à ces traitements. Dans les deux variantes à l’éthanol et à l’air chaud, les semences étaient exposées à l’air enrichi d’éthanol. Dans tous les procédés utilisés pour les essais sur le terrain, la faculté germinative des semences a été déterminée. Pour ce faire, 200 graines ont été placées entre du papier filtre humide et d’abord refroidies à 10 °C pendant cinq jours dans l’obscurité, puis incubées pendant trois jours à 20 °C avec une alternance jour/nuit de 8h/16h.  Ensuite, le nombre de graines germées a été compté.

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Eclairage | Charbon de l’orge: sensibilité variétale et ­a lternatives de lutte

Ethanol à 70 % 40 ml/kg fermé

E

Ethanol à 70 % 40 ml/kg ouvert

B

Lebermooser® 40 ml/kg fermé

E

Lebermooser® 40 ml/kg ouvert

C

Eau chaude 45 °C 2h

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Non traité

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Faculté germinative (%)

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Infestation par le charbon (%)

Figure 3 | Traitements contre le charbon en 2013 dans l’orge d’automne Ulla. Infestation par le charbon: moyennes de quatre répétitions avec écart-type (des lettres différentes indiquent des différences significatives entre les procédés, test Duncan, P < 0,05), faculté germinative: moyenne de 200 graines analysées.

Variété Cassiopee, infestation minimale Lors des essais variétaux avec l’orge d’automne, les deux années d’essais ont donné en moyenne de nettes différences entre les espèces en ce qui concerne la sensibilité au charbon (fig. 2). La variété Cassiopee était la moins touchée, avec 0,8 %, tandis que la variété Sandra était de loin la plus infestée, avec 21,0 %. Le traitement avec Lebermooser® a permis de réduire l’infestation par le charbon de plus de 90 % pour toutes les variétés. Cepen-

dant, avec un dosage de 40 ml de Lebermooser® par kg, la faculté germinative de toutes les variétés a baissé en moyenne de 97 à 72 %. L’éthanol inhibe le charbon – et la faculté germinative D’autres essais sur le charbon, effectués en 2013 avec la variété Ulla et qui comprenaient un témoin d’éthanol, ont clairement montré que le très bon résultat contre le charbon obtenu avec Lebermooser® n’était pas dû

Ethanol à 70 % Air chaud 65 °C 2 jours

A

Ethanol à 70 % Air chaud 65 °C 1 jour

A

Ethanol 70 % Vapeur 65 °C 2 minutes

C

Vapeur d’eau 65 °C 2 minutes

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Ethanol à 70 % 30 ml/kg

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Ethanol à 70 % 20 ml/kg

B

Eau chaude 45 °C 2h

C A

Non traité 100

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Faculté germinative (%)

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Infestation par le charbon (%)

Figure 4 | Traitements contre le charbon en 2014 dans l’orge d’automne Ulla. Infestation par le charbon: moyennes de quatre répétitions avec écart-type (des lettres différentes indiquent des différences significatives entre les procédés, test Duncan, P < 0,05), faculté germinative: moyenne de 200 graines analysées.

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Charbon de l’orge: sensibilité variétale et ­a lternatives de lutte | Eclairage

exclusivement, mais en grande partie, à l’éthanol contenu dans le produit (fig. 3). La tolérance limitée à l’éthanol était également manifeste. Si par exemple, les semences étaient fermées hermétiquement immédiatement après le traitement au Lebermooser® ou à l’éthanol, leur faculté germinative était drastiquement diminuée. Il est intéressant de remarquer que pour les deux variantes de traitement «ouvertes», l’efficacité du Lebermooser® était significativement plus élevée que celle de l’éthanol. Cela s’explique sans doute par l’effet fongicide des composants de mousse, qui ne s’évaporent pas comme l’éthanol. Ethanol efficace uniquement à hautes concentrations Etant donné la tolérance limitée des semences à l’éthanol, durant l’année d’essai 2014, le dosage a été réduit à 30 resp. 20 ml/kg. Les dosages plus bas d’éthanol ont effectivement été mieux tolérés (fig. 4). Le traitement à l’éthanol en dosage de 20 ml/kg était cependant moins efficace contre le charbon que le traitement en dosage de 30 ml/kg. Ce dernier dosage de 30 ml/kg d’éthanol a permis d’obtenir un résultat comparable au traitement à l’eau chaude. S’il est efficace, le traitement à la vapeur d’éthanol à 65 °C pendant 2 minutes perturbe cependant la faculté germinative. Au contraire, les procédés à base d’air chaud étaient mieux tolérés mais n’étaient pas efficaces contre le charbon, peut-être parce que l’air chaud enrichi en éthanol ne pénètre pas jusqu’à l’embryon infecté.

Conclusions A l’exception des procédés à air chaud, les applications à l’éthanol étaient efficaces jusqu’à 86 % contre le charbon de l’orge. Ces résultats confirment ceux d’une étude réalisée dans le cadre d’un projet de recherche allemand, qui montre que les traitements à base d’éthanol ou leurs combinaisons avec des extraits végétaux ont un effet protecteur contre le charbon (Koch 2012). L’effet positif de l’éthanol est cependant limité par la tolérance des semences. Au contraire, le traitement à l’eau chaude est très efficace et bien toléré par les semences. Tant que cette méthode efficace ne se sera pas imposée en pratique, les procédés basés sur l’éthanol resteront une solution possible pour contrôler l’infestation des semences par le charbon. La faculté germinative plus basse lors de la multiplication des semences peut être compensée en augmentant la quantité de semis. Etant donné les degrés d’efficacité inférieurs des traitements alternatifs par rapport au traitement chimique (70 % au lieu de 95 %), la question de la sensibilité des variétés au charbon est d’autant plus cruciale. Les recommandations de variétés, notamment pour les cultures d’orge biologique, doivent donc considérer une sensibilité plus faible au charbon comme un n élément important.

Bibliographie ▪▪ Bio Suisse, 2014. Cahier des charges pour la production, la transformation et le commerce des produits Bourgeon, p. 48. ▪▪ Forsberg G., 2004. Control of Cereal Seed-borne Diseases by Hot Humid Air Seed Treatment. PhD thesis. Swedish University of Agricultural Sciences, Uppsala, 49 p. ▪▪ Heinonen U., 2011. Cereals / Control of leaf diseases. Comparison of seed treatment fungicides on the market in finland in spring barley. Herbicides, fungicides and insecticides. MTT Agrifood Research Finland, Jokioinen, p. 4. ▪▪ Jahn M., 2010. Saatgutbehandlung im ökologischen Landbau. ­J ulius-Kühn-Institut, Kleinmachnow. ▪▪ Koch E., 2012. Optimierung von Saatgutbehandlungsmitteln mit Wirkung gegen Flugbrand an Gerste und Weizen ( Ustilago nuda , U. tritici ) unter Nutzung verbesserter Verfahren zum Nachweis der Erreger. Julius Kühn Institut 2012, p. 38

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E c l a i r a g e

World Café «Croissance dans l’agriculture» Linda Reissig, Agroscope, Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, 8046 Zurich, Suisse Renseignements: Linda Reissig, e-mail: linda.reissig@agroscope.admin.ch

La méthode du World Café permet des discussions intensives en petits groupes. (Photo: Michel Roux, SVIAL)

Lors de la conférence «Croissance dans l’agriculture et la filière alimentaire», qui a eu lieu en avril 2014 à Zollikofen, des représentants de la recherche, de la vulgarisation et de la pratique ont discuté des stratégies de croissance des exploitations familiales dans le cadre d’un World Café. La collaboration entre exploitations, l’emploi de la technologie et des connaissances, ainsi que les aspects sociaux et émotionnels des communautés d’exploitation sont quelques-uns des sujets qui ont nourri les échanges.

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A l’occasion de l’Année internationale de l’agriculture familiale, une conférence s’est tenue les 24 et 25 avril 2014 à Zollikofen (BE) sur le thème de la «Croissance dans l’agriculture et la filière alimentaire». La conférence a été organisée par cinq institutions scientifiques agronomiques et par l’Association suisse des ingénieurs agronomes et des ingénieurs en technologie alimentaire (ASIAT). A l’issue de la conférence, les participants et participantes de la recherche, la vulgarisation et la pratique ont discuté dans le cadre d’un World Café (cf. encadré)


World Café «Croissance dans l’agriculture»

Le World Café La méthode du World Café est souvent employée pour créer un espace de dialogue entre différents acteurs et les mettre en réseau. Elle permet des discussions intensives en petits groupes. Des questions portant sur le thème traité sont discutées à plusieurs tables. Une des caractéristiques typiques du World Café est le changement régulier des participants de table en table et par conséquent le mélange des groupes. Les principales contributions sont affichées sur des panneaux (fig. 1). A la fin, les hôtes des différentes tables présentent leurs résultats à l’assemblée. Informations complémentaires: http://www.theworldcafe.com/translations/ cafe_a_emporter.pdf

des enjeux auxquels devaient faire face les familles paysannes qui s’étaient fixées pour but de gagner leur vie essentiellement avec la production et la commercialisation de denrées alimentaires. Trois stratégies de croissance possibles ont été présentées pour trois exemples concrets d’exploitations (tabl. 1). Pour chaque exploitation, les participants et participantes ont discuté des sujets suivants: «Conditions-cadres hors exploitation», «Technique et savoir» ainsi que «Aspects sociaux et émotionnels». Voici un résumé des principaux résultats des échanges qui ont eu lieu autour des neuf tables. Conditions-cadres hors exploitation Les modes de collaboration constituent une possibilité de croissance, mais peu nombreuses sont les exploitations qui suivent cette voie. Outre les conditions-cadres à l’échelle étatique et sociale, d’autres facteurs jouent également un rôle comme la personnalité de l’agriculteur ou de l’agricultrice (cf. aspects sociaux et émotion-

| Eclairage

nels). Car pour réaliser de tels projets, il faut avoir de l’esprit d’entreprise, du plaisir à innover, le goût du risque et de la persévérance. De plus, la collaboration commence d’abord dans la tête. L’individualisme des exploitations familiales paysannes a été identifié comme l’un des principaux obstacles. C’est pourquoi la solution choisie pour accroître les revenus est souvent celle d’une activité annexe et d’une alternative hors exploitation. Pourtant, une collaboration a différents avantages: dans une communauté, plusieurs partenaires apportent davantage de connaissances dans l’exploitation, ce qui permet de se spécialiser et de se compléter. Une seule machine en commun revient également moins cher qu’une machine sur chaque exploitation. Certes, il faut que le financement soit assuré, mais en général, il existe des aides financières pour les projets de coopération selon l’ordonnance sur les améliorations structurelles. Parfois, des étapes intermédiaires sont aussi nécessaires. Dans le World Café, les représentants de la pratique ont fait part de leur souhait de voir la politique agricole ne pas se mêler des modes de collaboration, sans les encourager spécialement, ni les empêcher non plus. Il faut éventuellement s’attendre à ce que la croissance soit freinée par les possibilités financières ou par les exigences de l’aménagement du territoire et de l’ordonnance sur la protection de l’air. Le nouveau système de points mis en place pour évaluer et surveiller l’érosion des parcelles cultivées représente également un obstacle. La mobilité des surfaces est très difficile à encourager avec les dispositions légales. La loi fédérale sur le droit foncier rural devrait être révisée de manière critique, sachant qu’un assouplissement supplémentaire pourrait avoir des conséquences négatives sur l’agriculture productive. Il est en tous cas très utile que les agriculteurs et les agricultrices s’engagent dans les différentes autorités décisionnelles. La stratégie basée sur l’union des forces offre, elle aussi, des chances sur le marché. Deux partenaires ou plus sont des partenaires commerciaux plus forts, sur le marché de l’approvisionnement comme sur celui des ventes. Un changement nécessaire est de prolonger la chaîne de création de valeur dans les secteurs situés en 

Tableau 1 | Stratégies de croissance et exploitations-types Stratégie de croissance possible

Exploitation-type

A

Augmenter l’efficience des ressources, par exemple en utilisant une ­technologie plus moderne

Communauté d’exploitation avec 220 vaches, technologie à coût avantageux

B

Augmenter les quantités produites, par exemple en développant la ­surface ou les effectifs animaux

3 exploitations avec 260 ha de SAU au total, qui produisent 50 ha de pommes de terre dans le cadre d’une communauté, technologie très développée

C

Augmenter la valeur ajoutée, par exemple en amélioration la qualité et la transformation

Exploitation d’élevage porcin avec 220 truies-mères, commercialisation sous label

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Eclairage | World Café «Croissance dans l’agriculture»

Figure 1 | Exemple de résultats du World Café. (Photo: Sandra Contzen)

aval. En outre, des cycles devraient être fermés. La position des consommateurs et consommatrices par rapport à la taille des exploitations a été sujette à controverses. L’important est que la relation avec tous les partenaires soit loyale. Technique et savoir La croissance nécessite aussi de nouvelles capacités et de nouvelles connaissances. Générer de la valeur ajoutée suppose généralement que l’agriculteur acquiert et développe ses connaissances techniques. Des années d’introduction avant la reprise de l’exploitation ou la participation à des groupes de travail apportent l’élan et les connaissances techniques nécessaires. Les nouveaux canaux d’information (notamment par Internet) prennent de plus en plus d’importance. De plus, la croissance signifie généralement l’engagement de personnel supplémentaire. Cela demande de la part du chef ou de la cheffe d’exploitation des capacités de direction, des compétences sociales, une aptitude à la communication ainsi que la confiance dans les partenaires et les collaborateurs. Il est indispensable d’être en permanence prêt à apprendre.

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Enfin, les enjeux techniques doivent être surmontés. Les différents processus de l’exploitation sont de plus en plus basés sur la technique et la technologie de l’information. La mise en réseau des données peut encore être largement améliorée. On manque par exemple de logiciels simples et flexibles. La technique nécessaire n’est généralement pas disponible en solution toute faite. L’utilisation de la technique moderne exige de plus en plus d’avoir des collaborateurs très bien formés. Or, ces derniers sont rares et chers. Dans ces conditions, il est pratiquement impossible de prévoir des remplaçants. L’exploitation est de plus en plus dépendante des fournisseurs technologiques. La croissance pose aussi des exigences spécifiques en termes de vulgarisation et de recherche appliquée. Malgré tout, les conseillers doivent avoir une bonne vue d’ensemble et être indépendants. La discussion a montré que les prestations de conseil indépendantes, de qualité étaient rares. Des offres supracantonales ou spécifiques aux cultures pourraient apporter une amélioration ici (p. ex. groupements de professionnels). Les transferts horizontaux de connaissances et d’expériences entre les chefs d’exploitations apportent de précieuses


World Café «Croissance dans l’agriculture»

informations. La recherche devrait avoir plusieurs années d’avance sur la pratique et présenter les nouveaux résultats et les nouvelles connaissances de manière à ce que la pratique en prenne conscience. La recherche devrait être appliquée et être axée sur les besoins de l’agriculture suisse. Aspects sociaux et émotionnels La constitution d’une communauté d’exploitation ou d’autres formes de collaboration est, du point de vue des participants, la seule façon de s’agrandir tout en conservant une qualité de vie. Mais: les communautés d’exploitation posent des exigences élevées notamment dans le domaine social et émotionnel. En effet, la coopération d’exploitations est très exigeante sur le plan humain et nécessite, outre des règles précises, une bonne aptitude à la communication de la part de tous les partenaires. Les aspects humains sont décisifs pour le bon fonctionnement des communautés d’exploitation. L’important est que les deux parties soient des partenaires équivalents, qui se font mutuellement confiance, se tolèrent et s’acceptent. Une communauté d’exploitation est une communauté de longue durée. Le changement de génération est notamment une phase critique pour les communautés d’exploitation. Le choix de s’agrandir a plusieurs sources. D’une part, le plaisir au travail joue un grand rôle. D’autre part, la volonté de dégager du temps libre pour soi et pour la famille est une motivation très importante. Mais l’envie de s’engager dans une nouvelle voie a également été citée. Par ailleurs, pour certains agriculteurs et agricultrices, la croissance est aussi une question de prestige. Par contre, l’envie des exploitations voisines qui ne permettent pas qu’une exploitation se développe et ait du succès, peut freiner la motivation. L’envie semble toutefois être un phénomène qui n’a pas la même ampleur suivant les régions.

| Eclairage

En termes de croissance, la charge de travail de plus en plus élevée est aussi un point important. Lorsque les agriculteurs, les agricultrices et leurs familles atteignent leurs limites, les signes sont les mêmes que dans la population non-agricole, selon les participants: irritabilité, nombreuses absences pour maladies chez les employés et déclarations de la famille annonçant que cela suffit. Lorsqu’il n’y a plus ni loisirs, ni vacances, il est temps de tirer la sonnette d’alarme. Par conséquent, il est très important de connaître ses propres limites. La croissance avec une communauté d’exploitation pose aussi des exigences en matière de communication et de respect des participants, au sein des exploitations et entre les exploitations partenaires. Une communication ouverte n’est pas seulement importante pour les communautés d’exploitation et pas seulement pour la croissance, mais aussi en général, au sein des familles. Les modes de communication doivent être clarifiés: comment et quand communique-t-on? Il est bon d’avoir un plan en cas de crise: où trouver de l’aide? La prise de conscience de l’importance de la communication devrait être encouragée. Croissance – aucun doute? Que signifie la croissance? La croissance à quelle dimension et à quel niveau? Ces questions ont peu été abordées dans le cadre du World Café. Le gain d’autonomie et de temps libre était une autre dimension cible pardelà la croissance économique. Dans le contexte de la conférence – l’Année internationale de l’agriculture familiale décrétée par l’ONU – il aurait certainement été intéressant de s’interroger sur les effets secondaires indésirables de la croissance dans le domaine social ou écologique. En résumé, on peut dire que les stratégies de croissance discutées lors de la conférence mettent les exploin tations et leurs familles face à de multiples défis.

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P o r t r a i t

Beat Reidy: du chercheur en herbe au s­pécialiste des herbages Sa fascination pour l’agriculture, Beat Reidy la nourrit depuis l’enfance. Seul fils d’une famille de six personnes, ayant grandi à la ferme, sa voie semblait toute tracée: travailler dans le secteur agricole. Et c’est le chemin qu’il a choisi, puisqu’il est aujourd’hui professeur en élevage de ruminants et cultures fourragères à la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL. Dans son parcours, il ne s’est toutefois pas laissé influencer par les attentes de son entourage: «J’ai toujours suivi mes intérêts. Le hasard a fait le reste», explique-t-il. Les parcelles d’essai ou l’atelier? Il aurait pu en être tout autrement. Après le gymnase, Beat Reidy passe en revue un large éventail de possibilités – comprenant aussi bien des études en ingénierie qu’une formation en arts appliqués – avant d’opter pour ce qu’il préfère, l’agriculture. Et il sait qu’il se focalisera sur les plantes, pas sur les animaux, dans sa formation à l’EPF de Zurich: «J’ai grandi dans une exploitation mixte produisant des semences. Il est vrai que la production animale était au cœur des activités. Mais j’étais fasciné par les plantes avant mes études. Ce sont les producteurs primaires. Sans elles, il n’y a rien.» De la recherche au secteur privé Ses études terminées, il a la possibilité de faire une thèse à l’EPFZ. Une occasion en or, qu’il s’empresse de saisir. Il se plonge dans la recherche fondamentale et se spécialise dans deux domaines, les sciences des herbages et l’écophysiologie. Son titre de docteur en poche, et après un postdoctorat à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) à Montpellier, il vient une première fois à la HAFL. «Le poste de collaborateur scientifique était exactement ce qu’il me fallait à ce moment-là. Il m’a ramené à la production agricole et m’a permis de me rapprocher à nouveau de la pratique», se rappelle-t-il. Néanmoins, après cinq ans, Beat Reidy souhaite s’enrichir de nouvelles expériences et évoluer professionnellement. C’est ainsi que, chez Eric Schweizer SA puis chez Calcium agro SA, il se consacre principalement à des tâches de conduite et aux chiffres de vente. Chercheur à nouveau Même si cette expérience dans l’économie privée lui a été très profitable, il décide de revenir à la HAFL quelques années plus tard. «La combinaison entre l’enseignement

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et la recherche appliquée laisse une grande place à la créativité et à des intérêts variés.» Beat Reidy apprécie le contact étroit avec la pratique: «Etre près de la base a toujours été important pour moi. En fin de compte, ce sont bien les agriculteurs et agricultrices qui doivent être au centre de notre labeur.» Ses projets de recherche reflètent également cette manière de voir. Son équipe et lui tentent de trouver des solutions pour le secteur agricole. Leurs efforts visent une production laitière rentable, privilégiant une utilisation efficace des ressources; pour cela, ils se penchent aussi bien sur des questions globales que sur des problèmes concrets en matière de production de fourrages. Actuellement, l’un des sujets d’étude porte sur les pratiques en matière d’affourragement dans des exploitations suisses productrices de lait et sur les causes des différences de rendement dans le cadre d’une alimentation à base d’herbe pâturée. Fidèle à lui-même, Beat Reidy se donne corps et âme à son travail. Matthias Zobrist, Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL


A c t u a l i t é s

Actualités Stratégie pour la sélection végétale en Suisse Pour être durablement efficace, le secteur agroalimentaire est tributaire de variétés de plantes de très haute qualité. Afin que de telles variétés soient disponibles à long terme en Suisse, l’Office fédéral de l’agriculture OFAG élabore actuellement une stratégie pour la sélection végétale qui soit assurée par la Confédération ou avec son soutien. Réalisée en collaboration avec les experts des domaines de la recherche et de l’économie ainsi qu’avec les milieux intéressés, cette stratégie est conçue comme une aide pour les responsables de l’orientation de la sélection végétale et vise à la transparence: pour quels objectifs et selon quels critères la Confédération engage-t-elle des fonds publics dans le domaine de la sélection végétale? Ceci concerne non seulement la recherche effectuée par Agroscope, mais également les projets réalisés en coopération avec des partenaires privés ou publics, en Suisse ou à l’étranger. Selon une enquête réalisée en 2013 par l'OFAG, il existe en Suisse un organisme public (Agroscope) et six organismes privés qui pratiquent la sélection végétale. Leurs 44 programmes de re-cherche, pour la plupart de petite envergure, concernent 40 espèces végétales et représentent un investissement annuel de dix millions de francs, dont quatre millions sont financés par des fonds publics et six millions par des fonds privés. La sélection végétale est une entreprise de longue haleine, qui s’inscrit dans le très long terme. Elle comporte aussi de nombreuses incertitudes, dues notamment au fait qu’elle doit anticiper les évolutions à venir. L’OFAG a par conséquent mandaté l’Institut d’économie agraire de l’EPF de Zurich pour évaluer aussi précisément que possible le contexte futur. Les résultats de l’analyse de l’environnement, réalisée à cet effet dans le cadre du développement de la stratégie, sont publiés dans le présent numéro (lire en page 366). Outre les bases scientifiques, les connaissances, les appréciations et les besoins des milieux intéressés et concernés sont importants pour

l’élaboration d’une stratégie. L’OFAG tient à les intégrer dans toute la mesure du possible. Les représentants des milieux intéressés ont ainsi pu donner leur point de vue lors d’un atelier qui a eu lieu en novembre 2013. Le 25 novembre 2014 (Berne, 14 h – 17 h), l’OFAG présentera l’avancement du projet de la stratégie et une audition informelle suivra pour recueillir les avis à ce sujet. Des informations supplémentaires au sujet de la rencontre de 2012 sur le thème de la sélection végétale et de l’atelier de novembre 2013 susmentionné se trouvent sur le site internet de l’OFAG à la rubrique «Thèmes» > Variétés de plantes, sélection, ressources génétiques > Sélection végétale. Peter Latus, Office fédéral de l’agriculture OFAG

A Reckenholz (ZH), Agroscope réalise des tests de sélection de plantes fourragères en plein champ en combinaison avec un GPS, ce qui permet de semer des lignes de trèfle et de graminées sans risque de mélange et avec un personnel réduit. Le déclenchement automatique du semis au début de la parcelle est commandé par le GPS avec une précision de 2,5 cm. Des lignes individuelles semées avec exactitude permettent de sélectionner les meilleurs éléments des nouvelles variétés de graminées et de trèfles. (Photo: Gabriela Brändle, Agroscope)

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Actualités

Nouvelles publications

Quelle est la rentabilité du robot? Economie Agroscope Transfer | N° 3

Quelle est la rentabilité du robot? Coûts et utilité des dispositifs d’automatisation dans la détention de bétail laitier

Mars 2014

Auteurs

Christian Gazzarin, Agroscope

Christian Gazzarin, Franz Nydegger et Michael Zähner

Une comparaison des modèles de systèmes de production laitière avec et sans auto­ matisation des dispositifs de traite ou d’af­ fouragement a permis de calculer les inves­ tissements, le temps de travail nécessaire, les coûts de production ainsi que le revenu en rapport au travail et à la surface. Les systèmes de traite automatiques (AMS) impliquent dans l’ensemble des investisse­ ments supérieurs de 6 à 20 % et permettent de réduire le temps de travail de 10 à 19 %. Pour les systèmes d’affouragement auto­ matiques (AFS), les investissements néces­ saires sont 11 à 20 % supérieurs dans l’en­ semble pour une économie de temps de travail de 5 %. Les différences de coûts des systèmes com­ parés sont relativement minimes pour des troupeaux de même taille. En termes de valorisation du travail, les systèmes de pro­ duction AMS, lorsqu’ils sont utilisés à 100 % (60–70 vaches), sont économique­ ment plus avantageux que les systèmes de référence comparables (salles de traite en épi, remorque mélangeuse).

Il faut néanmoins savoir que par rapport au système de référence, l’AMS perd au moins 8 % de revenu lorsque le taux d’utilisation de l’installation est bon et 25 % lorsqu’il est moins bon (40 vaches). Une combinaison de ce système et de la détention au pâturage peut améliorer le résultat. Pour les systè­ mes d’affouragement automatiques (AFS), le taux d’utilisation minimum pour que le dispositif soit rentable est nettement plus élevé. La rentabilité de ces systèmes dépend avant tout de leur taux d’utilisation, du prix du lait, mais aussi des alternatives d’emploi de la main­d’œuvre ainsi disponible. Plus le prix du lait est élevé, plus l’agricul­ teur peut valoriser son travail, et plus les procédés d’automatisation sont rentables. Inversement, les importants investisse­ ments liés à ces dispositifs représentent de gros risques, qu’il faut pouvoir assumer avec suffisamment de liquidités notam­ ment lorsque les prix du lait sont bas.

Agroscope Transfer | N° 3 Une comparaison des modèles de systèmes de production laitière avec et sans automatisation des dispositifs de traite ou d’affouragement a permis de calculer les investissements, le temps de travail nécessaire, les coûts de production ainsi que le revenu en rapport au travail et à la surface. Les systèmes de traite automatiques (AMS) impliquent dans l’ensemble des investissements supérieurs de 6 à 20 % et permettent de réduire le temps de travail de 10 à 19 %. Pour les systèmes d’affouragement automatiques (AFS), les investissements nécessaires sont de 11 à 20 % supérieurs dans l’ensemble pour une économie de temps de travail de 5 %. Les différences de coûts des systèmes comparés sont relativement minimes pour des troupeaux de même taille. En termes de valorisation du travail, les systèmes de production AMS, lorsqu’ils sont utilisés à 100 % (60–70 vaches), sont économiquement plus avantageux que les systèmes de référence comparables (salles de traite en épi, remorque mélangeuse). Il faut néanmoins savoir que par rapport au système de référence, l’AMS perd au moins 8 % de revenu lorsque le taux d’utilisation de l’installation est bon et 25 %lorsqu’il est moins bon (40 vaches). Une combinaison de ce système et de la détention au pâturage peut améliorer le résultat. Pour les systèmes d’affouragement automatiques (AFS), le taux d’utilisation minimum pour que le dispositif soit rentable est nettement plus élevé. La rentabilité de ces systèmes dépend avant tout de leur taux d’utilisation, du prix du lait, mais aussi des alternatives d’emploi de la main d’œuvre ainsi disponible. Plus le prix du lait est élevé, plus l’agriculteur peut valoriser son travail, et plus les procédés d’automatisation sont rentables. Inversement, les importants investissements liés à ces dispositifs représentent de gros risques, qu’il faut pouvoir assumer avec suffisamment de liquidités notamment lorsque les prix du lait sont bas. Christian Gazzarin, Franz Nydegger et Michael Zähner, Agroscope

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Actualités

Nouveauté en matière de diagnostic des mammites dues à Staphylococcus aureus

Denrées alimentaires Agroscope Transfer | n° 25

Nouveauté en matière de diagnostic des mammites dues à Staphylococcus aureus Août 2014

Auteurs

Renate Boss, Agroscope

Renate Boss Hans Graber

Les mammites sont la maladie la plus fréquente de la vache laitière et engendrent des pertes annuelles pour l’industrie laitière suisse d’un montant de CHF 130 millions de francs. Parmi les agents pathogènes les plus répandus, on trouve Staphylococcus aureus (abrégé Staph. aureus). Chez les humains, ce microorganisme peut provoquer des intoxications alimentaires. Agroscope a élaboré une nouvelle méthode de détection issue de la biologie moléculaire et destinée à l’agriculture et à l’industrie laitière.

Comment Staphylococcus aureus parvient-il dans le lait? Le lait d’une vache saine est exempt de germes. D’où proviennent alors les Staphylococcus aureus? Généralement de l’environnement, d’où ils passent ensuite

dans le lait lors de la traite. Ils proviennent aussi du lait de vaches atteintes de mammite (infection). Dans le premier cas, on peut agir assez simplement par l’application de mesures d’hygiène strictes dans l’exploitation et éviter ainsi une contamination. Par contre, le dépistage d’une vache atteinte de mammite est plus difficile. Pour qu’une mammite se déclare, plusieurs facteurs doivent être réunis (maladie factorielle). Une hygiène et une technique de traite insuffisantes, une installation de traite défectueuse et une mauvaise gestion de la traite sont des facteurs favorisants. Si l’un ou plusieurs de ces facteurs entrent en jeu, certaines bactéries, en particulier Staph. aureus, peuvent s’installer et provoquer une mammite.

Agroscope Transfer | N° 25 Les mammites sont la maladie la plus fréquente de la vache laitière et engendrent des pertes annuelles pour l’industrie laitière suisse d’un montant de 130 millions de francs. Parmi les agents pathogènes les plus répandus, on trouve Staphylococcus aureus (abrégé Staph. aureus). Chez les humains, ce microorganisme peut provoquer des intoxications alimentaires. Agroscope a élaboré une nouvelle méthode de détection issue de la biologie moléculaire et destinée à l’agriculture et à l’industrie laitière. Comment Staphylococcus aureus parvient-il dans le lait? Le lait d’une vache saine est exempt de germes. D’où proviennent alors les Staphylococcus aureus? Généralement de l’environnement, d’où ils passent ensuite dans le lait lors de la traite. Ils proviennent aussi du lait de vaches atteintes de mammite (infection). Dans le premier cas, on peut agir assez simplement par l’application de mesures d’hygiène strictes dans l’exploitation et éviter ainsi une contamination. Par contre, le dépistage d’une vache atteinte de mammite est plus difficile. Pour qu’une mammite se déclare, plusieurs facteurs doivent être réunis (maladie factorielle). Une hygiène et une technique de traite insuffisantes, une installation de traite défectueuse et une mauvaise gestion de la traite sont des facteurs favorisants. Si l’un ou plusieurs de ces facteurs entrent en jeu, certaines bactéries, en particulier Staph. aureus, peuvent s’installer et provoquer une mammite. Renate Boss et Hans Graber, Agroscope

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Actualités

Communiqués de presse

www.agroscope.admin.ch/medienmitteilungen www.agroscope.admin.ch/communiques 12.08.2014 Première pour les variétés suisses de pâturin des prés

29.07.2014 Urée foliaire: comment optimiser son impact sur la teneur en azote assimilable des moûts?

En 2014, avec Sepia et Selista, des variétés suisses de pâturin des prés ont pour la première fois fait leur entrée dans le catalogue national des variétés et également dans la liste des variétés recommandées de plantes fourragères. Ce succès est le fruit de plus de trente années de développement à Agroscope, sur les sites de Changins et de Reckenholz. Il faudra encore attendre environ cinq ans de multiplication, jusqu’à ce que les nouvelles variétés puissent couvrir les besoins du marché suisse en semences.

Une gestion adéquate de l’alimentation azotée de la vigne est essentielle pour produire des vins de qualité. Un minimum de 200 mg/l d’azote assimilable par les levures (indice de formol 14) assure aux moûts de Chasselas une bonne fermentescibilité et favorise la présence d’arômes variétaux dans les vins. L’apport d’urée foliaire à la véraison est une solution efficace de dernier recours pour éviter les conséquences dues aux carences azotées des moûts. Agroscope étudie les mécanismes de distribution de l’azote dans la vigne afin d’optimiser l’apport d’urée foliaire lorsqu’il est nécessaire.

AGRAR FORSCHUNG SCHWEIZ RECHERCHE AGRONOMIQUE SUISSE Recherche Agronomique Suisse/ Agrarforschung Schweiz est une publication des stations de recherche agronomique Agroscope et de leurs partenaires. Les partenaires sont l’Office fédéral de l’agriculture OFAG, la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL, AGRIDEA Lausanne & Lindau, l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich ETH Zürich, Département des Sciences des Systèmes de l’Environnement et l'institut de recherche de l'agriculture biologique FiBL. Agroscope est l’éditeur. Cette publication paraît en allemand et en français. Elle s’adresse aux scientifiques, spécialistes de la recherche et de l’industrie, enseignants, organisations de conseil et de vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux, praticiens, politiciens et autres personnes intéressées.

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Informations actuelles de la recherche pour le conseil et la pratique : Recherche Agronomique Suisse paraît 10 fois par année et informe sur les avancées en production végétale, production animale, économie agraire, techniques agricoles, denrées alimentaires, environnement et société. Recherche Agronomique Suisse est également disponible on-line sous www.rechercheagronomiquesuisse.ch Commandez un numéro gratuit! Nom / Société Prénom Rue/N° Code postal / Ville Profession E-Mail Date Signature Talon réponse à envoyer à: Rédaction Recherche Agronomique Suisse, Agroscope Liebefeld-Posieux ALP-Haras, Case postale 64, 1725 Posieux, Tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch www.rechercheagronomiquesuisse.ch

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Actualités

Liens internet

Manifestations

Agroscope Transfer

Septembre 2014

www.agroscope.ch/transfer/fr

11.09.2014 37. Informationstagung Agrarökonomie Agroscope Agroscope IDU, 8365 Ettenhausen Conference of Agricultural Engineering

Agroscope Transfer met les travaux actuels de recherche d'Agroscope à disposition de la pratique, de la vulgarisation et du grand public sous une forme courte et axée sur les applications. Chaque numéro peut être téléchargé en format PDF.

V Doa rnssc hl ea up r o c h a i n n u m é r o Octobre 2014 / Numéro 10 Le mildiou de la pomme de terre est l’une des maladies de la pomme de terre les plus importantes à l’échelle mondiale. Des chercheuses et chercheurs d’Agroscope ont isolé des bactéries de plants de pomme de terre et évalué leur potentiel inhibiteur contre l’agent du mildiou pour la culture biologique suisse de pommes de terre. (Photo: Carole Parodi, Agroscope)

••Les bactéries de la rhizosphère freinent le mildiou des pommes de terre, Denise Bönisch et al., Agroscope ••Support Obst Arbo: résultats pour les arboriculteurs professionnels, Esther Bravin et al., Agroscope et Agridea ••Prédiction de la charge des pommiers, Simon Schweizer et al., Agroscope et Hochschule Geisenheim, Allemagne ••Sélection de variétés de pommes tolérantes au feu bactérien, Markus Kellerhals et al., Agroscope et ETH Zürich ••Diversité des champignons mycorhiziens arbusculaires dans les cultures sous semis direct et sous labour, Claudia Maurer et al., Service de la protection des sols du canton de Berne et Agroscope

17.09.2014 Journée Semis direct Agroscope Agroscope IPV, Changins 19. – 21.09.2014 Equus helveticus Manifestation commune du Haras national suisse (HNS), de l’Institut équestre national Avenches (IENA), de la Fédération suisse du cheval de sport CH (FECH) et de la Fédération suisse du franches-montagnes (FSFM) Avenches Octobre 2014 2.10.2014 Journée de la production animale Agroscope ­(autrefois nommée Journée d'information ALP) Agroscope IPA, 1725 Posieux Novembre 2014 13.11.2014 BioForschungstagung Agroscope – FiBL: Grandes cultures Agroscope, FiBL Changins 18.11.2014 Journée de la recherche Profi-Lait 2014 Profi-Lait, Agroscope, Agridea, HAFL Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL, Zollikofen BE

••Diversité des papillons diurnes et des zygènes dans les herbages de basse montagne, Renate Heinzelmann et al., Agroscope ••Les installations d’irrigation, causes de l’intensification de l’exploitation des zones herbagères en Engadine, Roman Graf, Station ornithologique suisse Sempach ••Liste 2015–2016 des variétés recommandées de plantes fourragères, Daniel Suter et al. Agroscope

Informationen: Informations: www.agroscope.admin.ch/veranstaltungen www.agroscope.admin.ch/manifestations

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Du 19 au 21 septembre prochain, Avenches sera une nouvelle fois placée sous le signe du cheval grâce à Equus helveticus, festival équestre devenu incontournable. Avec le National FM, finales suisses de sport et d’élevage des franches-montagnes, le Championnat suisse des chevaux de sport CH, de même que des courses de trot et de galop, près de mille chevaux et vingt fois plus de visiteuses et visiteurs sont attendus à Avenches.

www.equus-helveticus.ch

Jeudi, 2 octobre 2014

Journée de la production animale Agroscope 2014

Nous avons le plaisir d’accueillir un intervenant de « Wageningen University and Research Center » : Prof Dr Oene Oenema avec le thème « L’efficacité de l’azote dans l’agriculture européenne ». Les autres thèmes de la journée seront les suivants : • L’efficacité de l’azote dans les exploitations agricoles helvétiques • L’efficacité de l’azote chez les vaches laitières • LegumePlus : influence des substances bioactives dans les légumineuses sur le bilan azoté chez la vache laitière • L’efficacité de l’azote de la production fourragère à la pâture • Influence de l’apport en protéines et en acides aminés sur la composition corporelle et le bilan azoté chez le porc

DÉVELOPPE M ENT DE L’AGRICULTURE ET DE L’ESPACE RURAL

Lieu : Agroscope, salle de conférence, Tioleyre 4, 1725 Posieux Inscription : jusqu’au 19.09.14: Agridea, cours, Jordils 1, 1000 Lausanne 6 www.agridea.ch cours@agridea.ch

www.agroscope.ch


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