Recherche Agronomique Suisse, numéro 5, mai 2015

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RECHERCHE AGRONOMIQUE SUISSE 2 0 1 5

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N u m é r o

5

Agroscope | OFAG | HAFL | AGRIDEA | ETH Zürich | FiBL

M a i

Environnement Encouragement de la biodiversité axé sur les résultats: acceptation en région de montagne Page 188 Economie agricole Influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses Page 196 Eclairage

Congrès inter­national sur la reproduction humaine et animale Page 224


Sommaire Mai 2015 | Numéro 5 Dans les régions de montagne suisses, la biodiversité représente une ressource importante à divers points de vue. Les chercheurs et chercheuses de l’ETH Zurich et du FiBL ont i­ nterrogé des exploitants de montagne au sujet des deux a­ pproches mises en place par la Confédération pour promouvoir la biodiversité: l’approche axée sur les mesures et ­l’approche axée sur les ­résultats. (Photo: G ­ abriela Brändle, Agroscope)

187 Editorial Environnement Encouragement de la biodiversité axé sur 188

les résultats: acceptation en région de montagne Sophia Rudin, Otto Schmid et Florian Knaus

Impressum Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz est une publication des stations de recherche agronomique Agroscope et de leurs partenaires. Cette publication paraît en allemand et en français. Elle s’adresse aux scientifiques, spécialistes de la recherche et de l’industrie, enseignants, organisations de conseil et de vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux, praticiens, politiciens et autres personnes intéressées.

196

sur les exportations agroalimentaires suisses?

Editeur Agroscope Partenaires bA groscope (Institut des sciences en production végétale IPV; Institut des sciences en p­ roduction animale IPA; Institut des sciences en denrées alimentaires IDA; Institut des ­s ciences en durabilité agronomique IDU), www.agroscope.ch b Office fédéral de l’agriculture OFAG, Berne, www.ofag.ch b Haute école des sciences agronomiques forestières et alimentaires HAFL, Zollikofen, www.hafl.ch b Centrale de vulgarisation AGRIDEA, Lausanne et Lindau, www.agridea.ch b E cole polytechnique fédérale de Zurich ETH Zürich, Département des Sciences des Systèmes de l'Environnement, www.usys.ethz.ch b Institut de recherche de l'agriculture biologique FiBL, www.fibl.org Rédaction Direction et rédaction germanophone Andrea Leuenberger-Minger, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Agroscope, case postale 64, 1725 Posieux, tél. +41 58 466 72 21, fax +41 58 466 73 00 Rédaction francophone Sibylle Willi, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Agroscope, case postale 1012, 1260 Nyon 1, tél. +41 58 460 41 57 Suppléance Judith Auer, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Agroscope, case postale 1012, 1260 Nyon 1, tél. +41 58 460 41 82 e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Team de rédaction Président: Jean-Philippe Mayor (Responsable Corporate Communication Agroscope), Evelyne Fasnacht, Erika Meili et Sibylle Willi (Agroscope), Karin Bovigny-Ackermann (OFAG), Beat Huber-Eicher (HAFL), Esther Weiss (AGRIDEA), Brigitte Dorn (ETH Zürich), Thomas Alföldi (FiBL). Abonnements Tarifs Revue: CHF 61.–*, TVA et frais de port compris (étranger + CHF 20.– frais de port), en ligne/App: CHF 61.–* * Tarifs réduits voir: www.rechercheagronomiquesuisse.ch Adresse Nicole Boschung, Recherche Agronomique Suisse/Agrarforschung Schweiz, Agroscope, case postale 64, 1725 Posieux e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch, fax +41 26 407 73 00 Changement d'adresse e-mail: verkauf.zivil@bbl.admin.ch, fax +41 31 325 50 58

Economie agricole uelle est l’influence du taux de change Q

Andreas Kohler et Ali Ferjani Economie agricole Classes ou labels? Prix et qualité de la 202

viande bovine Stefan Mann et Daniel Erdin 210

Production végétale amularia collo-cygni – un nouveau R

­champignon pathogène de l’orge Peter Frei et Katia Gindro Société Réorganisation du système de connais218

sances agricoles en Suisse Robert Obrist, Heidrun Moschitz et Robert Home Eclairage Du laboratoire à la pratique: congrès 224

inter­national sur la reproduction humaine et animale David Kradolfer, Martin Kaske et Susanne E. Ulbrich Eclairage Sécurité microbiologique et chimique des 228

aliments Marc Mühlemann

Internet www.rechercheagronomiquesuisse.ch www.agrarforschungschweiz.ch

231 Actualités

ISSN infos ISSN 1663 – 7917 (imprimé) ISSN 1663 – 7925 (en ligne) Titre: Recherche Agronomique Suisse Titre abrégé: Rech. Agron. Suisse

235 Manifestations

© Copyright Agroscope. Tous droits de reproduction et de traduction réservés. Toute reproduction ou traduction, partielle ou intégrale, doit faire l’objet d’un accord avec la rédaction.

Indexé: Web of Science, CAB Abstracts, AGRIS

232 Interview Liste variétale Liste recommandée des variétés de colza Encart

d’automne pour la récolte 2016 Alice Baux, Carolin Luginbühl et Yves Grosjean


Editorial

Diversité génétique et efficience en sélection Chère lectrice, cher lecteur,

Jean-Philippe Mayor et Arnold Schori, Agroscope

La diversification du blé remonte au Néolithique et aux débuts de l’agriculture. L’évolution du blé vers les formes actuelles a été initiée dans le Croissant fertile par croisements spontanés entre trois graminées sauvages. Le talent des agriculteurs, les migrations humaines et les échanges de semences ont favorisé l’apparition et l’utilisation par l’homme des mutations les plus utiles, aboutissant à la vaste diversité actuelle du blé et de sa culture, bien au-delà de sa zone d’origine. La diversité génétique est la matière première de tout progrès en création variétale. Les gènes (et non les variétés), intéressent le sélectionneur, car ils peuvent être combinés par croisement. Pour la conservation de ce patrimoine, on parle justement de banques de gènes, et non de collections de variétés. Collaborations internationales Le sélectionneur privilégie les gènes intéressants présents dans des variétés les plus proches de ses objectifs de sélection. Il organise pour cela des échanges de géniteurs au niveau planétaire. Ces échanges sont actuellement fragilisés par de nouveaux systèmes de protection variétale, par la concentration de la sélection auprès de quelques acteurs majeurs et partiellement par le Protocole de Nagoya. Celui-ci considère les ressources génétiques comme «patrimoine national» et non plus comme «patrimoine commun de l’humanité», avec les dérives possibles vers la marchandisation du vivant. Enfin, le développement fulgurant de la transgénèse, actuellement liée au brevet, interdit l’utilisation en sélection d’une part croissante de variétés modernes. Ainsi, sur soja, la quasi-totalité des nouvelles variétés nord-américaines ne sont plus utilisables en croisement, en raison des brevets et des différences de législation concernant la culture des OGM. Les sélectionneurs d’Agroscope entretiennent un vaste réseau de collaboration et d’échange de matériel génétique avec les acteurs des domaines publics et privés de l’amélioration variétale, dans le monde entier et pour certains depuis des décennies. Ainsi, 57 % des blés d’automne et 100 % des sojas d’Agroscope ont au moins un ascendant étranger. Ces échanges représentent une situation gagnant-gagnant pour les partenaires et sont d’une absolue nécessité pour la poursuite du progrès génétique et la relève des défis à venir, comme l’adaptation aux nouvelles maladies, au changement climatique ou à l’intensification écologique. Une collaboration entre Agroscope, l’obtenteur allemand Deutsche Saatveredelung AG et Delley Semences et Plantes SA sur blé de printemps verra le jour cette année. Ce rapprochement impliquera un programme de croisement commun, le partage du matériel génétique disponible, des lieux de sélection et d’infrastructures ainsi qu’une mise en commun des compétences. Cette collaboration aboutira à la co-obtention de variétés, à un renforcement et à une meilleure efficience du programme suisse, élargissant ainsi notre impact vers de nouveaux marchés. Notre mission de servir en priorité les besoins suisses et nos objectifs à long terme (rusticité et résistances, qualité et rendement) seront renforcés, de même que notre contribution à la sélection mondiale.

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E n v i r o n n e m e n t

Encouragement de la biodiversité axé sur les ­résultats: acceptation en région de montagne Sophia Rudin1, Otto Schmid2 et Florian Knaus1 1 Ecosystem Management, Département des sciences des systèmes de l’environnement, ETH Zurich, 8092 Zurich, Suisse 2 Institut de recherche de l'agriculture biologique FiBL, 5070 Frick, Suisse Renseignements: Sophia Rudin, e-mail: sophia.rudin@gmail.com

Mesures en faveur de la biodiversité en cours de réalisation, axées sur les résultats: prairie extensive en montagne, de qualité écologique 2 pour des espèces cibles et caractéristiques entourée de ­b osquets d’épineux indigènes, d’arbres isolés et de lisières de forêt étagées comme éléments de mise en réseau écologique. (Photo: Florian Knaus)

Introduction Dans les régions de montagne Suisses, la biodiversité représente une ressource importante à divers points de vue car ces régions, en tant que hauts lieux de biodiversité uniques, contiennent un riche réservoir génétique, une faune et une flore diversifiées et développent les milieux les plus divers (Klaus 2013). Dans les régions de montagne, la biodiversité est actuellement menacée d’une part par l’intensification des surfaces favorables et d’autre part par l’abandon des surfaces marginales (Peter et al. 2009; Dietschi et al. 2007; MacDonald et al. 2000; Tasser et al. 2002).

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Pour contrer la diminution de la biodiversité dans les zones agricoles suisses, la Confédération paie des contributions pour la biodiversité selon une approche axée sur les mesures (AAM) et une approche axée sur les résultats (AAR) (Conseil fédéral 2014). L’AAM permet aux agricultrices et agriculteurs de recevoir des paiements directs quand ils mettent en œuvre des mesures d’exploitation précisément définies (Burton et al. 2013). La réalisation insuffisante des objectifs écologiques avec l’AAM a provoqué l’introduction supplémentaire de l’AAR – en Suisse dans le cadre de l’ordonnance sur la qualité écologique (Lachat et al. 2010; Mann 2010).


Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne | Environnement

Résumé

L’AAR permet aux paysannes et paysans de recevoir des contributions pour la biodiversité s’ils obtiennent des résultats écologiques, comme par exemple l’apparition de certaines espèces cibles (Burton et al. 2013). Les agriculteurs décident eux-mêmes des mesures à prendre pour atteindre le résultat écologique souhaité. Vu qu’on cherche à favoriser spécifiquement certaines espèces cibles et caractéristiques, cette approche permet d’atteindre des résultats écologiques importants pour la biodiversité avec plus d’efficacité qu’avec l’AAM (Sabatier et al. 2012). Les paysannes et paysans de montagne suisses doivent faire preuve d’un grand engagement pour réaliser les mesures axées sur les résultats. Cet engagement ne peut se développer que si l’AAR jouit d’une bonne acceptation. On ne sait cependant pas encore si les paysans de montagne suisses acceptent l’AAR parce qu’il n’y a pas encore d’études empiriques. Le présent travail doit combler cette lacune en étudiant l’acceptation de l’AAR par les paysans de montagne suisses par rapport à l’AAM, et en analysant les raisons et les facteurs qui influencent la disposition en faveur de cette approche. Le travail résume aussi les conditions-cadres que les paysans de montagne considèrent comme nécessaires pour renforcer l’encouragement de la biodiversité. En font partie des facteurs comme la vulgarisation et la formation en écologie ainsi que certains aspects de la politique agricole.

Matériel et méthodes Pour répondre aux questions posées au début, un questionnaire de huit pages a été élaboré en allemand. Il comportait des questions sur des caractéristiques sociodémographiques et gestionnelles, l’engagement actuel des paysans de montagne pour encourager la biodiversité, l’acceptation de l’AAR, la disposition à s’engager à l’avenir pour un encouragement de la biodiversité axé sur les résultats, ainsi que le soutien désiré pour atteindre cet objectif. L’intensité de la production a été évaluée par la charge en bétail et la fréquence des coupes des prairies. L’engagement actuel pour l’encouragement de la biodiversité a été évalué à l’aide de la proportion de SPB de différents niveaux de qualité en comparaison avec l’ensemble de la surface agricole utile. La disposition à s’engager pour un encouragement de la biodiversité axé sur les résultats a été enregistrée via des questions sur des mesures concrètes d’encouragement de la biodiversité axées sur les résultats. Les questions étaient de type fermé, les réponses multiples ont été notées sur une échelle de cinq degrés (1 = pas juste, 2= pas vraiment juste, 3 = partiellement juste, 4 = assez juste, 5 = juste).

Pour maintenir et encourager la biodiversité dans la zone agricole, la Confédération soutient les surfaces de promotion de la biodiversité (SPB) en suivant deux approches différentes: avec l’approche axée sur les mesures (AAM), les agricultrices et agriculteurs sont dédommagés pour des mesures définies; avec l’approche axée sur les résultats (AAR) ils le sont pour des résultats définis. On attend de cette deuxième approche, qui dans l’ordonnance sur les paiements directs se fonde sur l’AAM, une plus grande efficacité. C’est particulièrement important en zone de montagne, où on s’attend à une aggravation des pertes de biodiversité. La réussite des mesures axées sur les résultats nécessite un grand engagement des agriculteurs de montagne et leur adhésion à cette approche. L’acceptation de l’AAR comparée à l’AAM a été analysée dans cette étude, ainsi que la disposition des agriculteurs de montagne à s’engager dans cette voie. Sur les 146 agriculteurs suisses-allemands de montagne interrogés par questionnaire écrit, trois quarts d’entre eux préfèrent l’AAM à l’AAR pour l’encouragement de la biodiversité, au motif qu’elle implique moins de contrôles et garantit mieux le versement des paiements directs. Les agriculteurs de montagne qui pratiquent une agriculture biologique et/ou extensive sont plus disposés à appliquer l’AAR. Tous les sondés demandent une prolongation des horizons de planification et une augmentation des contributions pour les SPB avant de s’engager plus fortement pour l’AAR comme pour l’AAM. Ces résultats pourraient être utilisés par les pouvoirs publics pour élaborer des concepts de communication et de formation plus efficaces, plus adaptés aux besoins de différents groupes de paysans, et plus conformes aux objectifs pour les agriculteurs de montagne.

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Environnement | Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne

L’AAR se trouve en partie dans l’ordonnance fédérale sur la qualité écologique, au chapitre des surfaces de promotion de la biodiversité (SPB) du niveau de qualité 2 (définition d’un nombre minimal d’espèces cibles), et en partie dans les projets de mises en réseau (Conseil fédéral 2014). Il y a en Allemagne et en France des AAR purs (Nitsch 2014). En Suisse, l’AAR et couplée à l’AAM parce que la condition de base pour l’obtention des paiements directs est le respect de certaines mesures des SPB de niveau de qualité 1 (prescriptions entre autres sur la proportion minimale de la surface agricole, sur les dates et la fréquence des coupes et des utilisations des prairies et des pâturages). L’intérêt pour l’AAR a augmenté dans toute l’Europe au cours de la dernière décennie (Burton et al. 2013): Des projets de recherche sont en cours, comme celui cofinancé par l’Office fédéral de l’agriculture – le projet de l’UE MERIT, Merit-based income from sustainable land management in mountain farming (MERIT 2014). L’Institut de recherche de l'agriculture biologique (FiBL) de Frick et des partenaires de quatre pays européens de l’Arc alpin (Autriche, France, Italie et Slovénie) étudient si des systèmes étatiques et privés d’encouragement de la diversité naturelle, davantage axés sur les résultats que sur les mesures, pourraient s’avérer particulièrement intéressants pour les agriculteurs et pour la politique. Le département de l’environnement de la Commission européenne a en outre organisé fin septembre 2014 à Bruxelles une conférence sur le thèmes des paiements pour la biodiversité axés sur les résultats dans les programmes agro-environnementaux et a réalisé sur son site internet une plateforme d’information avec des exemples (RBAPS 2014).

Le questionnaire a été testé au printemps 2014 dans une étude préliminaire qualitative comprenant 21 paysans de montagne lucernois participant au projet MERIT pour vérifier la pertinence des questions et les compléter du point de vue de la pratique. Le questionnaire révisé a ensuite été envoyé à 1000 paysans de montagne suisses-allemands ayant droit aux paiements directs,

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Résultats Nette préférence pour l’approche axée sur les mesures Trois quarts des paysans de montagne interrogés préfèrent l’AAM à l’AAR pour l’encouragement de la biodiversité, indépendamment des caractéristiques sociodémographiques et entrepreneuriales (fig. 1). Les agriculteurs

80 70 Pourcentages des agriculteurs [%]

Approche axé sur les résultats: Comparaison Suisse-Europe

choisis au hasard dans la banque suisse des données agricoles. Sur les 1000 questionnaires, 257 ont été envoyés en Suisse orientale (y compris Zurich), 302 en Suisse centrale, 13 en Suisse du nord-ouest et 428 dans les parties germanophones de l’Espace Mittelland (cantons de Berne, Fribourg, Soleure, Neuchâtel et Jura) et du Valais. L’échantillon a été stratifié selon les critères zone de montagne (zones de montagne I à IV) et système de production (production biologique ou non biologique). Le choix au hasard stratifié a été effectué par l’Office fédéral de l’agriculture. Un total de 146 questionnaires remplis ont été mis en valeur statistiquement (retour 20 %). L’échantillon est représentatif du point de vue de l’âge, de la surface agricole et de la charge en bétail. L’échantillon n’est pas représentatif pour la proportion de producteurs biologiques; les fermes bio sont surreprésentées dans l’échantillon (moyenne suisse en zone de montagne: 18 %, échantillon 35 %). Les questionnaires ont été mis en valeur à l’aide de statistiques descriptives et de tests statiques (tests t pour les raisons du choix de l’AAR et de l’AAM et corrélation de Pearson resp. test du khi carré pour l’analyse des facteurs d’influence). Tous les calculs ont été effectués avec le programme SPSS (Version 22.0., Armonk, NY: IBM Corporation).

60 50 40 30 20 10 0

Approche axée sur les résultats (AAR)

Approche axée sur les mesures (AAM)

Figure 1 | Préférences des agriculteurs de montagne interrogés concernant les types d’approche pour l’encouragement de la ­b iodiversité (n = 146).


Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne | Environnement

Tableau 1 | Raisons expliquant la préférence pour l’AAR ou l’AAM du point de vue des agriculteurs de montagne interrogés (n = 146) Raison

Approche

Valeur moyenne1

Cette approche favorise plus directement et plus efficacement la biodiversité.

MOA

3,42

ROA

4,09

Cette approche me montre mieux ce que je dois faire pour avoir les paiements directs.

MOA

4,19

ROA

3,53

Cette approche nécessite moins de contrôles et de spécialistes pour la mise en valeur des résultats des mesures.

MOA

4,10

ROA

2,87

Cette approche me donne une meilleure garantie de recevoir vraiment les paiements directs.

MOA

4,11

ROA

3,31

Cette approche est plus simple à contrôler et offre donc les mêmes conditions à tous les agriculteurs.

MOA

Valeur-p2 *** ** *** **

4,19

**

3,47

Valeurs de l’échelle: 1 = pas juste, 2= pas vraiment juste, 3 = partiellement juste, 4 = assez juste, 5 = juste Test t qui compare les valeurs de la préférence pour l’AAR et l’AAM. Niveau de signification: *p < 0,05, ** p < 0,01, *** p < 0,001.

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de montagne qui préfèrent l’AAM ne se différencient pas significativement des agriculteurs de montagne qui préfèrent l’AAR. Il existe cependant de petites différences non significatives entre les deux groupes: il y a davantage d’agriculteurs de montagne biologiques parmi les agriculteurs de montagne qui soutiennent l’AAR (43%) que parmi les agriculteurs de montagne préférant l’AAM (35 %). Les agriculteurs de montagne qui préfèrent l’AAR ont une charge en bétail un peu plus faible (1,1 UGBF) que les agriculteurs de montagne qui préfèrent l’AAM (1,3 UGBF). Les raisons de préférer l’une des deux approches différentes sont multiples (tabl. 1). Les agriculteurs de montagne qui préfèrent l’AAM pensent que cette approche nécessite moins de contrôles et de spécialistes pour la mise en valeur des résultats des mesures, qu’elle est plus simple à contrôler et qu’elle offre donc les mêmes conditions à tous les agriculteurs. L’AAM apporte à ces agri-

culteurs de montagne une explication plus claire de ce qu’ils doivent faire pour avoir les paiements directs et une meilleure garantie de recevoir vraiment les paiements directs. Les agriculteurs de montagne qui préfèrent l’AAR pensent que celle-ci favorise plus directement et efficacement la biodiversité. Exploitations bio et extensives plus engagées La disposition des agriculteurs de montagne à réaliser des mesures d’encouragement de la biodiversité axées sur les résultats est influencée significativement par leur engagement actuel pour l’encouragement de la biodiversité, leur mode de production et l’intensité de leur production (tabl. 2). Plus les agriculteurs de montagne s’engagent déjà pour la biodiversité avec des SPB de tous les niveaux de qualité, plus ils auront tendance à vouloir s’engager ensuite pour un encouragement de la biodiversité axé sur les résultats. Les agricul- 

Tableau 2 | Facteurs influençant la disposition des agriculteurs de montagne interrogés à réaliser des mesures d’encouragement de la biodiversité axées sur les résultats (n = 146) Valeur Pearson resp. valeur du khi carré

Valeur P

Engagement actuel pour les surfaces de promotion de la biodiversité (SPB)

0,234 a

**

Engagement actuel pour les mesures d’encouragement de la biodiversité axées sur les résultats

18,964 b

***

Production biologique selon Bio Suisse versus production intégrée selon IP-Suisse

5,413 b

*

Production biologique selon Bio Suisse versus production conventionnelle selon les prestations écologiques requises (PER)

8,610 b

**

Charge en bétail [UGBF/ha]

‒0,264 a

**

Fréquence des coupes dans les prairies intensives

‒0,250 a

**

Facteurs d’influence

Corrélation Pearson, b test du khi carré. Niveau de signification: *p < 0,05, ** p <0,01, *** p < 0,001.

a

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Environnement | Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne

Proportions de paysans de montagne

25%

20%

15%

10%

5%

Agriculteurs de montagne qui préfèrent l'approche axée sur les mesures Agriculteurs de montagne qui préfèrent l'approche axée sur les résultats

Gr

de and pla e s nifi écu ca rit tio é Pa n iem en ts dir ec ts Vu lga ris at ion Fo rte de m an Fo de rm at ion co In nt cit inu at e ion sp ar un Re lab co nn el ais sa nc es C oc su ana ial pp ux e lém d' en éco u ta le ire m s en Et t ro ite co lla bo ra tio n

0%

Figure 2 | Facteurs cités par les agriculteurs de montagne concernant le soutien de la réalisation de l’encouragement de la biodiversité (n = 146; réponses multiples possibles).

teurs de montagne qui travaillent en bio sont davantage prêts à favoriser la biodiversité avec des AAR que les agriculteurs de montagne qui produisent des denrées alimentaires en intégré selon les directives d’IP-Suisse ou en conventionnel selon les prestations écologiques requises (PER). Les agriculteurs de montagne qui font de la production intensive sont moins prêts à s’engager pour un encouragement de la biodiversité axé sur les résultats que les agriculteurs de montagne qui cultivent leurs terres de manière plus extensive. Sécurité de planification à plus long terme exigée Une sécurité de planification à plus long terme est exigée dans le domaine des paiements directs, afin d’augmenter les mesures d’encouragement de la biodiversité. Les agriculteurs de montagne préfèrent en outre des contributions pour la biodiversité plus élevées, une bonne vulgarisation et une augmentation de la demande pour leurs produits (fig. 2). Les canaux de vulgarisation préférés sont les services cantonaux de vulgarisation, les revues agricoles spécialisées, le préposé local à l’agriculture (agriculteur qui fonctionne comme intermédiaire entre l’agriculture et la commune) et l’union paysanne régionale. Pour les agriculteurs de

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montagne qui préfèrent les AAR, les formations continues, l’acceptation sociale des mesures (par la famille, les voisins, les collègues et la société) et une étroite collaboration avec d’autres agriculteurs de montagne sont plus importantes que pour les agriculteurs de montagne préférant les AAM.

Discussion La majorité des agricultrices et agriculteurs de montagne interrogés préfèrent les mesures d’encouragement de la biodiversité axées sur les mesures avant tout pour des motifs financiers, pour la clarté des instructions pour l’exploitation et pour la meilleure garantie de recevoir les contributions pour les SPB. Une minorité des agriculteurs de montagne interrogés est prête à se préoccuper davantage des résultats écologiques (espèces cibles définies) et des mesures d’encouragement de la biodiversité qui sont nécessaires pour cela dans leur exploitation. Ils pensent en effet que cela permet de favoriser plus efficacement la biodiversité. La préférence des agriculteurs de montagne est vraisemblablement faussée en direction de l’AAR par la surreprésentation des agriculteurs biologiques. Il n’y a pas de chiffres comparables en Suisse. Dans une étude faite


Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne | Environnement

Figure 3 | Étude de la flore et de la faune sur le terrain dans la région d’Entlebuch, dans le cadre du projet MERIT, pour déterminer le potentiel de multiplication des mesures d’encouragement de la biodiversité axées sur les résultats (qualité écologique 2). (Photo: Otto Schmid)

dans le sud de l’Allemagne, dans laquelle les agriculteurs biologiques étaient aussi surreprésentés, 36 % des agriculteurs de montagne interrogés préféraient l’AAR (Matzdorf et al. 2010). Les agriculteurs biologiques montrent une forte disposition à s’engager pour l’encouragement de la biodiversité et ils ont tendance à consacrer de plus grandes proportions de leur surface agricole utile aux SPB (Schader et al. 2008). Plus la charge en bétail est donc l’intensité de la production est élevée, moins il est probable qu’un agriculteur s’investisse pour l’encouragement de la biodiversité (Dupraz et al. 2003; Wilson et al. 2000). Cela signifie que la production biologique peut influencer positivement l’encouragement de la biodiversité tandis que l’exploitation intensive l’influence plutôt négativement. Les réponses concernant les conditions-cadres pour l’encouragement de la biodiversité révèlent que la proportion de SPB dans la surface agricole utile peut être augmentée si la sécurité de planification des agriculteurs est améliorée. Il faut pour cela que la politique agricole soit définie à plus long terme (pour plus longtemps que les quatre années actuellement usuelles).

L’augmentation des paiements directs écologiques peut en plus obtenir un élargissement ou une amélioration des SPB. Des incitations pourraient être créées par un élargissement des paiements, surtout pour les prairies et pâturages extensifs et peu intensifs, ou par un déplacement des paiements directs vers la qualité et la mise en réseau des SPB. Outre les aspects financiers, la vulgarisation faite par les vulgarisateurs régionaux, les préposés communaux à l’agriculture ou les associations paysannes locales est utile pour montrer les possibilités et l’utilité de l’encouragement de la biodiversité dans les exploitations. Pour les agriculteurs qui préfèrent l’AAR, la vulgarisation devrait plutôt porter davantage sur les interactions écologiques et les besoins des espèces cibles et caractéristiques. Pour interpeller les agriculteurs qui préfèrent l’AAM, il faudrait focaliser la vulgarisation sur la compatibilité de l’économie et de l’écologie dans les exploitations. Comme l’avaient montré plusieurs discussions avec des agriculteurs de montagne pendant l’étude préliminaire, les possibilités de réalisation de mesures d’encouragement de la biodiversité dans l’exploitation et leurs effets positifs pourraient être intégrés de manière 

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Environnement | Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne

plus importante dans la formation des futurs agriculteurs. Cela favoriserait à long terme l’acceptation des approches axées sur les mesures aussi bien que sur les résultats.

Conclusions Une intervention bénéficiant d’un large soutien est nécessaire pour contrer la réussite insuffisante de la compensation écologique (Lachat et al. 2010) et l’aggravation attendue de la régression de la biodiversité dans les régions de montagne (Peter et al. 2009). Les offres de vulgarisation et de formation devraient tenir compte des différentes attentes et points de vue des agricul-

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teurs en ce qui concerne l’AAR et l’AAM. Le soutien spécialisé devrait s’orienter davantage en fonction des groupes-cibles et des producteurs individuels. Les connaissances de base sur l’écologie et la biodiversité devraient trouver une place plus importante dans les plans de formation des formations agricoles. La politique agricole, qui devrait permettre aux agriculteurs une meilleure planification à long terme, représente un pilier particulièrement important. Elle devrait placer plus au centre l’encouragement ciblé de la biodiversité, c’est-à-dire augmenter les paiements directs écologiques pour les SPB, surtout ceux pour la qualité et la mise en réseau. n

▪▪ MERIT, 2014. Merit-based income from sustainable land management in mountain farming. Accès: http://www.umweltbuero-klagenfurt.at/merit [9.6.14]. ▪▪ Nitsch H., 2014. Review on result-oriented measures for sustainable land management in alpine agriculture & comparison of case study areas. ­Report of Work package 1. MERIT-Project. RURAGRI Research Programme 2013–2016. Accès: http://www.umweltbuero-klagenfurt.at/merit/reports/EU-MERIT_WP1-Report_Review_Result-oriented-measures_ Nov2014.pdf [6.2.15]. ▪▪ Peter M., Gigon A., Edwards P.J. & Luscher A., 2009. Changes over three decades in the floristic composition of nutrient-poor grasslands in the Swiss Alps. Biodiversity and Conservation 18 (3), 547–567. ▪▪ RBAPS, 2014. Result-based agri-environment schemes: payments for biodiversity achievements in agriculture. Accès: http://ec.europa.eu/environment/nature/rbaps/ [9.6.14]. ▪▪ Sabatier R., Doyen L. & Tichit M., 2012. Action versus Result-Oriented Schemes in a Grassland Agroecosystem: A Dynamic Modelling Approach. Plos One 7 (4), e33257. ▪▪ Schader C., Pfiffner L., Stolze M. und Schlatter C., 2008. Umsetzung von Ökomassnahmen auf Bio- und ÖLN-Betrieben. Agrarforschung 15 (10), 506–511, 2008 ▪▪ Tasser E. & Tappeiner U., 2002. Impact of land use changes on mountain vegetation. Applied Vegetation Science 5 (2), 173–184. ▪▪ Wilson G. A. & Hart K., 2000. Financial imperative or conservation concern? EU farmers' motivations for participation in voluntary agri-environmental schemes. Environment and Planning A 32 (12), 2161–2185.


Approccio orientato ai risultati per la promozione della biodiversità: accoglienza nelle regioni di montagna Per conservare e promuovere la biodiversità nelle zone agricole la Confederazione sostiene le superfici per la promozione della biodiversità (SPB) con due approcci diversi. Per quanto riguarda il metodo basato sulle misure (MBM), i contadini sono indennizzati per misure definite mentre per quanto riguarda il metodo basato sul risultato (MBR) sono indennizzati per risultati definiti. Da questo secondo approccio, che nell’Ordinanza sui pagamenti diretti svizzera si fonda sul MBM, ci si aspetta una maggiore efficacia ed efficienza. Ciò è importante soprattutto nelle regioni di montagna nelle quali si prevedono maggiori perdite di biodiversità. Affinché sia possibile realizzare con esito positivo le misure basate sul risultato è necessario un grande impegno da parte dei contadini di montagna che può rinforzarsi solo se vi è consenso per il MBR. Sono pertanto stati analizzati il consenso per questo metodo rispetto al MBM e la disponibilità alla realizzazione di misure orientate al risultato da parte dei contadini di montagna. A questo scopo è stato inviato un questionario a 146 contadini della Svizzera tedesca nelle regioni di montagna da I a IV. Tre quarti dei contadini di montagna intervistati prediligono il MBM rispetto al MBR per la promozione della biodiversità perché comporta meno controlli e perché è un modo più sicuro per ottenere i pagamenti diretti. I contadini di montagna che gestiscono la propria azienda in modo biologico ed estensivo sono maggiormente disposti ad applicare il MBR. Per un maggior impegno nell’applicazione del MBR ma anche del MBM, tutti gli intervistati chiedono orizzonti di pianificazione più lunghi e contributi per SBP più elevati. I contadini di montagna che preferiscono il MBR propendono per altre condizioni quadro specifiche per la realizzazione con esito positivo delle misure basate sul risultato rispetto ai contadini che prediligono il MBM. Questi risultati potrebbero essere utilizzati dagli enti pubblici per elaborare strategie di comunicazione e di formazione più mirate ed efficaci per i contadini di montagna.

Summary

Riassunto

Encouragement de la biodiversité axé sur les ­r ésultats: acceptation en région de montagne | Environnement

Results-oriented approach to biodiversity promotion: acceptance among Swiss mountain farmers To conserve and enhance biodiversity in agricultural areas, the Swiss Confederation uses two different approaches that support biodiversity enhancement areas (Biodiversitäts-Förderflächen, BFF). The action-oriented approach (Massnahmen-orientierter Ansatz, MOA) compensates farmers for prescribed management measures, whereas the result-oriented approach (Resultat-orientierter Ansatz, ROA) compensates farmers for proven ecological results. This second approach, which in the Swiss Ordinance on Direct Payments in Agriculture builds on the MOA, is expected to be more effective and efficient. This is of particular significance in the mountain regions where future biodiversity losses are expected to increase. The successful implementation of result-oriented measures demands much commitment and initiative of the mountain farmers. To develop such commitment, farmers must first accept the ROA. To assess how mountain farmers perceive the ROA compared with the MOA and if they are willing to implement result-oriented measures, 146 Swiss German farmers in mountain zones I–IV were interviewed using a written questionnaire. Three out of four farmers interviewed prefer the MOA over the ROA for biodiversity enhancement because they think the MOA involves fewer inspections and assures more direct payments than the ROA. Organic and low-input mountain farmers are more willing to implement the ROA than conventional farmers. All respondents call for a more long-term planning horizon and higher payments for biodiversity enhancement areas to compensate them for any increased commitment with respect to both the ROA and the MOA. Mountain farmers who prefer the ROA prefer other specific framework conditions for the successful implementation of result-oriented measures than mountain farmers who prefer the MOA. These results can be used to deliver targeted and effective communications to the public sector and educational programmes to mountain farmers. Key words: result-oriented measures, biodiversity measures, ecological compensation area, Swiss mountain farmers.

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E c o n o m i e

a g r i c o l e

Quelle est l’influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses? Andreas Kohler et Ali Ferjani Agroscope, Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, 8356 Ettenhausen, Suisse Renseignements: Andreas Kohler, e-mail: andreas.kohler@agroscope.admin.ch

Terminal à conteneurs à Hambourg: les exportations du secteur agricole et agroalimentaire suisse s’avèrent remarquablement résilientes face aux fluctuations du taux de change. (Photo: Hapag-Lloyd AG, Hambourg)

Introduction Depuis la crise financière mondiale en 2008, le franc suisse s’est considérablement revalorisé en termes réels par rapport aux monnaies des plus importants partenaires commerciaux de la Suisse. La revalorisation a certes été stoppée par la fixation le 6 septembre 2011 d’un taux plancher par rapport à l’Euro par la Banque nationale suisse (BNS). Mais le 15 janvier 2015, surprise totale: la BNS annonce la suppression immédiate du taux plancher en place depuis un peu plus de trois ans; le cours du franc suisse par rapport à l’euro est de nouveau déterminé librement par les marchés monétaires internationaux. Comme les acteurs du marché ne s’attendent pas apparemment à ce que la zone euro résolve ses pro-

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blèmes économiques dans un avenir proche, et que la reprise économique aux Etats-Unis est encore lente sept ans après la crise financière, beaucoup considèrent encore le franc suisse comme une valeur refuge. C’est ce qui explique qu’immédiatement après l’annonce de la BNS, la valeur du franc suisse ait augmenté de près de 20 % par rapport à l’euro et au dollar américain. Même si cette envolée du franc suisse n’était qu’une réaction démesurée des marchés au départ, il est difficile de savoir à quel point le franc suisse est surévalué et comment sa valeur évoluera à l’avenir. La question de la répercussion des fluctuations du taux de change sur la compétitivité des entreprises suisses à l’étranger attire donc de nouveau l’attention publique et politique. On peut se demander notamment


comment les exportations réagissent à une réévaluation du franc suisse. A l’aide de modèles économétriques, cet article étudie la réaction des exploitations agricoles et agroalimentaires suisses aux fluctuations du taux de change. Nous voulons savoir de combien les exportations baissent en moyenne, si la valeur du franc suisse augmente. Le but est d’estimer la réaction de l’ensemble du secteur pour pouvoir la comparer avec la réaction des exportations des autres secteurs économiques.

Matériel et méthodes Pour savoir à quel point les exportations du secteur agricole et agroalimentaire réagissent à une réévaluation du franc suisse, plusieurs sources d’information ont été utilisées: nous utilisons la statistique des exportations de l’Administration fédérale des douanes (AFD), les taux de change de la BNS et de l’Office statistique de l’Union européenne (Eurostat) ainsi que les chiffres du produit intérieur brut (PIB) des partenaires commerciaux, mis à disposition par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Au total, l’analyse a porté sur les données de 36 partenaires commerciaux, comprenant tous les pays faisant partie de l’OCDE (hormis le Chili et la Grèce) ainsi que le Brésil, la Russie, l’Inde, l’Afrique du Sud et l’Indonésie, pour chaque trimestre de 1999 à 2012. Pendant cette période, entre 80 % et 90 % de toutes les exportations agricoles et agroalimentaires de la Suisse allaient vers ces 36 pays. L’Europe est de loin le marché le plus important, suivi par l’Asie et l’Amérique. Nous avons notamment étudié les chapitres douaniers 01 à 24, qui comprennent toutes les exportations agricoles et agroalimentaires de la Suisse. Ces chapitres englobent aussi bien les produits bruts que les produits transformés. De 1999 à 2012, les sept chapitres douaniers suivants représentaient entre 80 % et 90 % des exportations agricoles et agroalimentaires (mesurées en francs suisses): ••04: lait, oeufs, miel (les exportations de fromage dominent dans cette catégorie) ••09: café, thé, épices (capsules de café Nespresso) ••18: cacao (chocolat) ••19: préparations à base de céréales (aliments pour bébé, produits de boulangerie) ••21: préparations alimentaires diverses (concentrés) ••22: boissons et liquides alcooliques (boisson énergétique Red Bull et vins) ••24: tabac et succédanés de tabac fabriqués De 1999 à 2012, les pourcentages ont considérablement changé dans ces sept chapitres douaniers. Tandis que le pourcentage de café et de boissons ne représentait par

Résumé

Quelle est l’influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses? | Economie agricole

Ces dernières années et depuis la suppression du taux plancher de l'Euro par la Banque nationale suisse en janvier 2015, le franc suisse est devenu nettement plus fort que toutes les monnaies des principaux partenaires commerciaux de la Suisse. Cet article analyse, à l’aide de modèles empiriques, comment les exportations du secteur agricole et agroalimentaire réagissent à une appréciation du franc suisse. Selon cette étude, une appréciation ponctuelle de 1 % entraîne un recul provisoire des exportations d’env. 0,8 % en moyenne au bout de quatre trimestres. Cet effet différé est probablement dû aux contrats de longue durée et aux changements lents des habitudes de consommation. Une réévaluation continue impliquant une appréciation du franc suisse de 1 % chaque trimestre, conduit par contre à un recul permanent des exportations d’environ 0,9 % par trimestre. L’estimation des effets du taux de change sur les exportations agricoles et agroalimentaires montre qu’ils se situent donc dans le même ordre de grandeur que les effets ressentis par l’ensemble des exportations suisses. Par conséquent, les exportations du secteur agricole et agroalimentaire s’avèrent remarquablement résilientes face aux fluctuations du taux de change. Ce phénomène est sans doute dû au fait que dans ce secteur aussi, les entreprises réussissent à différencier leurs produits par la qualité qu’elles proposent, et qu’elles peuvent ainsi, au moins partiellement, échapper à la concurrence par les prix à l’étranger.

exemple qu’environ 7 % des exportations en 2002, il en représentait environ 43 % en 2012 (cf. Kohler 2015 pour une analyse détaillée de la structure des exportations). La statistique d’exportation de la Suisse est dominée par les produits manufacturés comme les capsules de café Nespresso, le Red Bull, le chocolat et le fromage, derrière lesquels se tiennent des grandes entreprises comme Nestlé Suisse, Red Bull SARL, Lindt & Sprüngli, Mondelez International ou Emmi SA. Ceci doit être pris en compte lors de l’interprétation des résultats. Dans l’analyse, les valeurs des exportations (en francs suisses) sont déflatées, c’est-à-dire qu’elles sont divisées par l’indice des valeurs moyennes des produits agricoles et des denrées 

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Economie agricole | Quelle est l’influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses?

Valeur réelle exportée (lissée)

100 110 Indice du taux de change réel effectif

1,4 1,2 1 0,8

90

0,6

Valeur réelle exportée (milliards, CHF)

120

1,6

Indice du taux de change réel effectif

1999q1

2000q4

2002q3

2004q2

2006q1

2007q4

2009q3

2011q2

2013q1

Sources: AFD, BNS, Eurostat, OCDE. Remarque: les valeurs d’exportation réelles sont lissées sur la base d’une moyenne mobile.

Figure 1 | Evolution de l’indice du taux de change et des exportations agricoles et agroalimentaires réelles (1999q1: 1er trimestre 1999).

alimentaires de l’AFD, pour supprimer l’impact des variations de prix. Cette méthode permet de se prononcer sur l’évolution réelle des exportations (cf. AFD 2006). Pour représenter l’influence du taux de change, un indice de taux de change réel effectif a été calculé, qui représente la valeur extérieure du franc suisse par rapport aux 23 monnaies nationales officielles des 36 pays mentionnés. L’indice de taux de change réel effectif est corrigé de l’inflation et pondère le rapport d’échange entre le franc suisse et les 23 monnaies nationales différentes avec les pourcentages d’exportation des pays correspondants (Fluri et Müller 2001). Comme la part des exportations dans la zone euro est très élevée, l’évolution de l’indice reflète en grande partie l’évolution de la valeur du franc suisse par rapport à l’euro. Outre les variations de prix relatives réelles, décrites par l’indice de taux de change réel effectif, les fluctuations de la demande étrangère de produits agricoles et de denrées alimentaires suisses sont également prises en compte. La fluctuation de la demande étrangère réelle est estimée à partir des variations du PIB réel des 36 pays considérés, sachant que chaque PIB a été pondéré par le pourcentage d’exportations correspondant (moyenne géométrique pondérée). Comme les exportations suisses se font principalement avec l’Allemagne, la France et l’Italie, le PIB respectif de ces pays reçoit une pondération proportionnellement élevée. Afin d’estimer l’impact des fluctuations du taux de change sur les exportations du secteur agricole et agroalimentaire suisse, nous utilisons à la fois des modèles de

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séries chronologiques et des modèles avec données de panel (Kohler et Ferjani 2015). Nous apprécions particulièrement les modèles dits «autoregressive-distributedlag» selon la méthode des moindres carrés (Wooldridge 2009) et les modèles dynamiques avec données de panel selon la méthode d’Arellano et Bond (1991). La comparaison entre les modèles de séries chronologiques et les modèles avec données de panel permet d’évaluer la sensibilité des résultats par rapport à la spécification du modèle et à la méthode d’estimation. Les modèles décrivent les variations des exportations dans le temps en fonction des variations des exportations ces dernières années et des variations de l’indice de taux de change et du PIB. Nous admettons également de manière explicite que les variations du taux de change tout comme les fluctuations de la demande étrangère peuvent avoir des effets retardés. Enfin, cette analyse tient également compte des effets saisonniers ainsi que de l’introduction du cours plancher franc-euro.

Résultats et discussion Avant d’aborder les résultats de l’analyse empirique, il est important de jeter un œil sur les données. La figure 1 montre l’évolution des exportations agricoles et agroalimentaires et de l’indice du taux de change, une courbe ascendante indiquant une réévaluation du franc. L’analyse descriptive montre que les exportations réelles ont continué à augmenter de 2008 à 2011, même pendant la forte réévaluation du franc suisse, toutefois à un taux


Quelle est l’influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses? | Economie agricole

Pourcentage de variation des exportations par trimestre t

0,5 0 −0,5 −1 −1,5

Pourcentage de variation des exportations réelles

1

Intervalle de confiance de 95 %

0

1

2

Sources: AFD, BNS, Eurostat, OCDE

3

4

5

6 trimestre

7

8

9

10

11

12

Figure 2 | Effet temporaire estimé du taux de change provenant du modèle dit autoregressive-distributed-lag .

moins soutenu que par le passé. L’analyse empirique permet d’estimer l’influence du taux de change sur les exportations et de la quantifier. Les modèles de séries chronologiques et les modèles avec données de panel, discutés précédemment, permettent de distinguer les effets temporaires des effets permanents. Plus précisément, ils permettent de différencier les effets d’une réévaluation ponctuelle du franc de ceux d’une réévaluation continue. On constate que les résultats ne dépendent pas de la spécification du modèle, ni de la méthode d’estimation. En d’autres termes, les effets estimés sont très semblables quel que soit le modèle. La figure 2 indique la réaction des exportations à une appréciation ponctuelle du franc suisse de 1 % au moment de la réévaluation (trimestre 0) ainsi qu’un à douze trimestres plus tard. On constate qu’au bout de quatre trimestres, une appréciation ponctuelle du franc suisse de 1 % conduit à une baisse provisoire des exportations agricoles et agroalimentaires de 0,8  % en moyenne. La réaction des exportations après quatre trimestres atteint le seuil de significativité de 5 % et est donc statistiquement significative. Les réactions dans tous les autres trimestres ne sont pas statistiquement significatives (c.-à-d. que le zéro tombe dans l’intervalle de confiance de 95 % en grisé à la fig. 2).1 En d’autres termes, lorsque le franc suisse est réévalué de 20 % et reste ensuite à ce niveau, il faut attendre une année

avant que les exportations n’accusent une baisse unique d’environ 16 %. Cette situation est comparable à celle qui a suivi la suppression du cours plancher, lorsque le franc suisse s’est immédiatement apprécié d’environ 20 % d’un seul coup par rapport à l’euro et au dollar américain. La réaction retardée des exportations s’explique sans doute par les contrats de longue durée et par la lenteur avec laquelle les habitudes de consommation changent. En outre, les gros exportateurs comme Nestlé Suisse, Red Bull SARL, Lindt & Sprüngli et Emmi SA couvrent certainement leurs risques de change sur les marchés monétaires. Par contre, si le franc suisse s’apprécie d’1 % à chaque trimestre, les exportations agricoles et agroalimentaires baissent en moyenne de 0,9 % par trimestre (significatif pour un seuil de significativité de 5 %). Une réévaluation continue du franc suisse de 1 % se traduit donc par une baisse trimestrielle permanente des exportations d’env. 0,9 %. Cependant, cet effet est davantage le fruit d’une approche hypothétique que le reflet d’une situa- 

1 La probabilité d‘erreur (ou seuil de significativité) et l’intervalle de confiance sont deux valeurs statistiques qui indiquent quelle confiance on peut avoir dans les effets estimés. La probabilité d’erreur montre quelle est la probabilité que l’hypothèse nulle (c.-à-d. que l’effet estimé soit nul) ait été rejetée à tort bien qu’elle soit juste en réalité. Un intervalle de confiance de 95 % signifie que nous pouvons avoir la certitude à 95 % que le véritable effet de taux de change se situe dans notre intervalle de confiance construit. Plus précisément, 95 % de tous les intervalles de confiance construits contiennent l’effet de taux de change effectif.

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Economie agricole | Quelle est l’influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses?

tion réelle. Les périodes très longues de réévaluation continue sont plutôt rares et ne traduisent pas un équilibre de marché. Selon la théorie économique, le taux de change devrait se stabiliser à long terme de façon à ce que les monnaies aient le même pouvoir d’achat dans deux espaces monétaires (parité du pouvoir d’achat). Cette hypothèse n’en reste pas moins intéressante dans le cas de la Suisse; puisque le franc suisse s’est apprécié d’environ 2 % par trimestre en moyenne depuis le début de la crise financière mondiale et la mise en place du taux plancher franc-euro. Cela correspond à une réévaluation réelle de près de 30 % en un peu plus de trois ans. La résilience des exportations de produits agricoles et de denrées alimentaires suisses par rapport aux fluctuations du taux de change est remarquable. Les exportations agricoles et agroalimentaires réagissent donc en moyenne comme l’ensemble des exportations suisses. Différentes études montrent que les exportations baissent en moyenne d’un peu moins de 1 %, lorsque le franc suisse s’apprécie de 1 % (SECO 2010; Tressel et Arda 2011; Hanslin et al. 2014). Selon Hanslin et al. (2014), la réaction des exportations agricoles et agroalimentaires se situe dans le même ordre de grandeur que celles des exportations de machines, d’instruments de précision, d’horlogerie et de bijouterie ainsi que du textile. La réaction des exportations de produits chimiques et pharmaceutiques est moindre. Ceci suggère que les produits agricoles et agroalimentaires suisses sont relativement difficiles à substituer à l’étranger, ce qui permet aux entreprises d’imposer de légères hausses de prix (p. ex. lors de la conclusion de nouveaux contrats de livraison). Le manque de possibilités de substitution tient sans doute à ce que les entreprises misent sur une qualité élevée pour démarquer leurs produits par rapport à leurs concurrents. Les appellations d’origine contrôlée (p. ex. pour le fromage AOC ou les produits carnés), la suissitude (p. ex. chocolat suisse) ou les marques premium (p. ex. Nespresso ou Red Bull) parviennent manifestement à communiquer avec succès les différences de qualité. La politique agricole suisse avec sa stratégie qualité y contribue aussi en créant les incitations et les conditions-cadres propres à stimuler les producteurs de matières premières indigènes. Grâce à une stratégie compétitive axée sur la différenciation des produits par leur qualité, les entreprises semblent pourvoir échapper, tout au moins partiellement, à la concurrence par les prix à l’étranger. Le fait que le coût des intrants importés (p. ex. cacao, café ou tabac) ait tendance à baisser en cas de réévaluation du franc suisse pourrait avoir pour effet de freiner la réaction des exportations. Avec les produits comme le fromage et les produits de boulangerie, qui utilisent des

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matières premières indigènes comme le lait et le beurre, les contributions à l’exportation de produits agricoles transformés («Loi chocolatière») jouent sans doute également un rôle compensatoire.2 Enfin, les entreprises semblent aussi réussir à conquérir de nouveaux marchés, afin de réduire les risques de change en misant sur la diversification. Le pourcentage des exportations vers l’Asie et l’Amérique a ainsi augmenté entre 2002 et 2012, tandis que celui des exportations vers l’Europe a baissé (Kohler 2015).

Conclusions Les exportations du secteur agricole et agroalimentaire suisse ne réagissent, en moyenne, pas excessivement aux variations temporaires et permanentes de taux de change. Leur réaction est donc du même ordre de grandeur que celle de l’ensemble des exportations suisses. Faut-il en conclure que les fluctuations de taux de change ne posent aucun problème à la compétitivité du secteur agricole et agroalimentaire suisse? Partiellement seulement, car les exportations d’un secteur ne sont qu’un indicateur de sa compétitivité parmi d’autres. D’autres indicateurs sont les coûts relatifs de la maind’œuvre et le taux d’occupation qui en dépend. Cette analyse ne permet pas de tirer de conclusions sur les répercussions des fluctuations du taux de change sur ces indicateurs. Cependant les résultats permettent d’espérer que ces répercussions seront moins graves que supposées à première vue, puisque les ventes à l’étranger de ce secteur semblent remarquablement résilientes en moyenne. Une étude approfondie sur la réaction de lignes particulières de tarifs douaniers (groupes de produits) parmi les exportations agricoles et agroalimentaires permettrait d’avoir une vision plus détaillée de la situation. n 2 Dans le cadre de la «Loi chocolatière», les exportateurs peuvent demander des contributions à l’exportation en faisant état de la différence entre le prix des matières premières en Suisse et à l’étranger (prix de référence). Le budget annuel est compris entre 70 et 80 millions de francs suisses (AFD 2015).


In che misura il tasso di cambio influenza le esportazioni svizzere di prodotti agricoli e alimentari? Negli ultimi anni e da quando, nel gennaio 2015, la Banca nazionale svizzera ha abolito il cambio minimo, il franco svizzero si è nettamente apprezzato rispetto a tutte le valute dei principali partner commerciali. Con l'ausilio di modelli empirici, analizziamo in che misura le esportazioni aggregate del settore agricolo e alimentare reagiscono a una rivalutazione del franco svizzero. Secondo la nostra analisi, una rivalutazione una tantum dell'1 per cento comporta dopo quattro trimestri una temporanea contrazione delle esportazioni pari in media allo 0,8 per cento circa. Questo effetto ritardato potrebbe essere la conseguenza di contratti a lungo termine e di abitudini di consumo in lento mutamento. Una rivalutazione persistente, vale a dire se il franco svizzero si rivaluta dell'1 per cento ogni trimestre, porta invece in media a una contrazione permanente delle esportazioni dello 0,9 per cento circa a trimestre. Gli effetti stimati del tasso di cambio sulle esportazioni di prodotti agricoli e alimentari sono pertanto in linea con gli effetti sulle esportazioni complessive della Svizzera. Di conseguenza, anche le esportazioni del settore agricolo e alimentare si presentano notevolmente resilienti alle fluttuazioni del tasso di cambio. Il motivo potrebbe essere che anche le imprese di questo settore riescono a differenziare efficacemente i propri prodotti grazie all'elevata qualità, sottraendosi così almeno in parte alla concorrenza dei prezzi che caratterizza i mercati esteri.

Bibliographie ▪▪ Arellano M. & Bond S., 1991. Some Tests of Specification for Panel Data: Monte Carlo Evidence and an Application to Employment Equations. ­ The Review of Economic Studies 2 (2), 277–297. ▪▪ AFD, 2006. Indices de commerce extérieur suisse – Guide d’utilisateur. Administration fédérale des douanes, AFD, Berne. ▪▪ AFD, 2015. Contributions à l’exportation de produits agricoles transformés. Administration fédérale des douanes, AFD, Berne. Accès: http:// www.ezv.admin.ch/zollinfo_firmen/04021/index.html?lang=fr [30.1.2015] ▪▪ Fluri R. & Müller R., 2001. La révision des indices du cours du franc ­suisse, nominaux et réels, pondérés par les exportations. Banque Nationale Suisse, Zurich. Bulletin trimestriel 19 (3), 42–47. ▪▪ Hanslin S., Lein S. M. & Schmidt C., 2014. Exchange Rate and Foreign GDP Elasticities of Swiss Exports Across Sectors and Destination Countries. Working Paper. Banque Nationale Suisse, Zurich.

Summary

Riassunto

Quelle est l’influence du taux de change sur les exportations agroalimentaires suisses? | Economie agricole

How strongly does the exchange rate influence Swiss agri-food exports? In the last few years, and since the abolition of the minimum exchange rate by the Swiss National Bank in January 2015, the Swiss franc has appreciated strongly against all currencies of Switzerland’s most important trading partners. With the help of empirical models, we analyse how strongly aggregate exports of the agri-food sector react to an appreciation of the Swiss franc. According to our analysis, a one-time appreciation of 1 % leads on average to a temporary decline in exports of approx. 0.8 % after four quarters. This lagged effect could be the result of long-term contracts and inert consumption habits. By contrast, a sustained appreciation in which the Swiss franc appreciates by 1 % each quarter leads on average to a permanent decrease in exports of approx. 0.9 % per quarter. The estimated exchange rate effects for agri-food exports are therefore of the same order of magnitude as those for aggregate Swiss exports. Hence, agri-food sector exports also prove remarkably resilient to exchange rate fluctuations. The reason for this may be that businesses in this sector are also able to successfully differentiate their products on the basis of quality, and hence are able – at least in part – to avoid price competition abroad. Key words: exchange rate, exports, agriculture and food sector.

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E c o n o m i e

a g r i c o l e

Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine Stefan Mann1 et Daniel Erdin2 Agroscope, Institut des sciences en durabilité agronomique IDU, 8356 Ettenhausen, Suisse 2 Union suisse des paysans, 5201 Brugg, Suisse Renseignements: Stefan Mann, e-mail: stefan.mann@agroscope.admin.ch 1

Viande de bœuf et de veau: les différences de prix entre les classes de qualité augmentent, tandis qu’elles s’amenuisent entre les labels de qualité. (Photo: Proviande, Berne)

Introduction

Le positionnement de la Suisse sur les marchés internationaux étant devenu de plus en plus explicite du fait de la globalisation, l’opinion s’est largement répandue que la Suisse pouvait subsister uniquement grâce à son leadership en matière de qualité (Ortner 2000; Lobsiger et Wyss 2008; Bystricky et al. 2014). Cet article décrit la montée de la prise de conscience par rapport à la qualité dans le secteur agricole en prenant l’exemple de la politique des prix sur le marché de la viande bovine. Contrai-

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rement à de nombreux autres marchés, la définition des différentes qualités sur le marché de la viande se fait moins par les concepts de marques que par les labels qualité attribués en fonction des processus de production d’une part, et par la répartition des carcasses en différentes classes d’autre part. Ce travail développe et vérifie la thèse selon laquelle la logique de la qualité sur le marché de la viande suisse suit deux courants contraires: on suppose d’un côté que les différences de prix entre les classes de qualité augmentent avec le temps, car il s’agit de standards de plus en plus largement acceptés. On suppose d’un autre côté


que les labels jouent un rôle moins important dans la détermination des prix, car ils ne se répercutent qu’indirectement sur la qualité de la viande et que par conséquent, à long terme, ils seront inférieurs aux classes, lesquelles sont directement associées à la qualité de la viande. Pour vérifier cette thèse, nous feront d’abord un aperçu sur les classes et les labels suisses ainsi que sur l’impact de la classification et de son organisation dans la littérature. La deuxième partie sera consacrée à la présentation des données et des modèles économétriques utilisés, puis les résultats seront abordés dans une troisième partie. L’article s’achèvera par des conclusions sur le rôle du système suisse d’assurance qualité CH-TAX et des différents labels. Classes et labels sur le marché bovin Les Etats-Unis sont clairement les pionniers de l’évaluation systématique des carcasses puisqu’ils ont publié les premières recommandations sur les standards de qualité dès 1916 (USDA 1997). Depuis le début des années 1980, l’Union européenne utilise le système dit EUROP-System (Fisher 2007). Le système similaire en Suisse, du nom de CH-TAX, a été conçu sur la base des travaux de Leuenberger (1980) et de Schläpfer (1988). Il est appliqué pour les bovins et les ovins depuis les années 1990. La classe C est la plus élevée et décrit des animaux très bien en viande, que l’on reconnait chez les bovins par des cuisses et des lombaires particulièrement larges et des épaules très prononcées. Inversement, X est la classe de produits la plus basse et est attribuée à des bovins ayant des cuisses faiblement développées, des lombaires étroits et des épaules plates. Tandis que les bovins à viande ne sont pratiquement jamais taxés d’un X, les vaches laitières destinées à la transformation sont généralement réparties dans les classes T, A et X. Jusqu’en 1999, les abattoirs étaient euxmêmes responsables du classement. Depuis 2000, l’organisation interprofessionnelle Proviande est investie d’un mandat de prestations et est présente lors de la taxation aussi bien sur les marchés de bétail que dans les abattoirs. Le marché de la viande suisse est également diversifié en termes de qualité grâce à l’attribution de labels. Le label sans doute le plus traditionnel pour désigner les produits biologiques est le label du bourgeon, qui est attribué depuis 1981 en Suisse par l’organisation interprofessionnelle Bio Suisse, un groupement d’organisations cantonales et régionales. Les principales conditions requises pour la détention des bovins sont l’affourragement d’aliments bio et les restrictions en matière d’utilisation d’antibiotiques. Le label TerraSuisse (Birrer et al. 2012) est l’exemple typique d’un nouveau développement. Il est utilisé exclusivement par le distributeur Migros et se situe donc 

Résumé

Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine | Economie agricole

Les classes de qualité sont attribuées au résultat de production proprement dit, tandis que les labels de qualité sont attribués à un processus de production. Comme les labels sont toujours associés à des idéologies (à l’exemple du label Bio contre le productivisme) et que les idéologies ont de moins en moins de poids dans la société, on pourrait penser que les différences de prix ente les classes de qualité se creuseraient, tandis que celles entre les labels qualité auraient plutôt tendance à se réduire. Des régressions faites sur le marché des veaux et sur 4180 séries de données du marché bovin ont largement confirmé cette tendance dans la période de 2000 à 2014. Pendant la période d’observation, les différences de prix se sont creusées entre les classes du système suisse d’estimation et d’assurance de la qualité CH-TAX, alors que les suppléments de prix dont bénéficiaient les produits bio ont fondu. Pour les labels «TerraSuisse» et «AQ-Viande Suisse», aucune discrimination par les prix n’a pu être identifiée d’emblée.

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Economie agricole | Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine

Labels

Classes

Méthodes de production

Résultat de production

Figure 1 | Différence entre les labels et les classes.

un peu entre le label et la marque. Dans le programme TerraSuisse, les agriculteurs sont tenus de participer aux deux programmes nationaux de bien-être animal, «Systèmes de stabulation particulièrement respectueux des animaux» (SST) et «Sorties régulières en plein air d’animaux de rente» (SRPA). En outre, il est interdit à l’exploitation d’exporter du fumier et du lisier. Comme dernier exemple d’un label de qualité, il faut mentionner encore le programme coordonné par l’Union suisse des paysans, «AQ Viande Suisse» (AQ). Ce label ne va pas au-delà des exigences fixées par la législation, mais suppose un contrôle plus intensif du respect de ces directives. Qu’est-ce qui distingue les classes des labels? Bien que les points de recoupement soient rares dans la littérature entre classes et labels de qualité, il est cependant possible de dégager quelques points communs et différences en associant les deux domaines de recherche. VanDyke (2000) déclarait ainsi avec optimisme: «When agricultural grades and standards are clearly defined and used, they provide the common language for defining product value» («Lorsque les classes et les standards sont clairement définis et utilisés, ils établissent un langage commun permettant de définir la valeur du produit»). Ces attentes élevées sont indirectement confirmées par des études qui critiquent le fait que la teneur en matière grasse de la viande (un paramètre important pour les consommateurs) ne soit pas prise en compte dans le système de classification actuel (Cox et al. 1990).

204

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L’aspect important de la fiabilité du classement qualité est mis en lumière par Chalfant et Sexton (2002). Ils constatent que la classification floue du système conduira à une baisse de la différenciation des prix. Cette réflexion – considérant le niveau des différences de prix comme un indicateur de la fiabilité du système – est particulièrement importante pour notre problématique. Il s’agit ici d’un parallèle par rapport aux labels pour qui la fiabilité est également une condition importante de la valeur économique (Jahn et al. 2005). La principale différence entre les labels et les classes est cependant illustrée dans la figure 1: contrairement à la classe, le label ne se réfère jamais aux propriétés du produit luimême, mais à des propriétés convenues et contrôlées du processus de production. A priori, on pourrait donc supposer que les labels ne peuvent pas refléter de manière aussi précise la qualité d’un produit que les classes de qualité. L’exemple du label bio dévoile cependant encore une autre différence entre les labels et les classes: les différences de méthode de production ont souvent aussi des composantes d’origine culturelle. L’agriculture biologique a ainsi fait figure de défi du système productiviste (Clunies-Ross et al. 1994) ou de lutte contre la matérialisation (Darnhofer 2005). Les classes de qualité n’ont pas une telle fonction de symbole. A l’échelle macro-économique, depuis la fin de la guerre froide, on argumente occasionnellement que les idéologies perdraient de leur importance (Betz 1992;


Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine | Economie agricole

Kälber QM CHTA

18

Fr./kg de poids à l’abattage

16

14

12 Axe des ordonnées: Fr./kg de poids à l’abattage Classe C Classe H Classe T Classe A 2014−01

2013−01

2012−01

2011−01

2010−01

2009−01

2008−01

2007−01

2006−01

2005−01

2004−01

2003−01

2002−01

2001−01

10

Figure 2 | Prix de la viande de veau en 2000−2014 (C = classe supérieure, A = classe inférieure).

Kalinovsky et Radchenko 2011). On est amené à penser que cette évolution sociale se retrouve également à l’échelle micro-économique. Cependant, à partir des relations observées, les classes de qualité sont certainement plus éloignées de ces divisions idéologiques que les divers labels qui postulent quasiment a priori la supériorité d’un mode de production déterminé. Il s’agit donc de montrer ici que ces dernières années, en matière de formation des prix, l’importance des labels a diminué tandis que celle des classes de qualité a augmenté.

Méthode L’étude se base sur les prix mensuels de la viande de bœuf et de veau exprimés en fr. par kg de poids à l’abattage et relevés par l’Union suisse des paysans durant la période 2000 à 2014. Dans ces données, les prix sont différenciés par espèce animale, classe de qualité et label employés. Dans une première phase de l’étude, on est parti de l’exemple de la viande de veau, qui se situe généralement dans les quatre classes de qualité supérieures, pour expliquer de manière économétrique la différence de prix des classes de qualité C, H et A par rapport à la classe T, qui est la classe de qualité la plus fréquente. La deuxième phase consistait en une explication plus approfondie des prix de la viande de bœuf. Les prix les plus équilibrés possibles ont été extraits des données dis-

ponibles sur des périodes de temps les plus longues possibles, ce qui a permis d’obtenir une compilation de 4180 prix, qui ont été expliqués de manière économétrique. Un petit échantillon de ces données est représenté sous forme graphique dans la figure 2, à partir de l’exemple des veaux produits selon l’AQ appartenant aux classes qualité C, H, T et A. Les fluctuations saisonnières des prix sont visibles au premier coup d’œil. En outre, on constate que les prix ont globalement augmenté en 2004 une fois que la confiance des consommateurs a été rétablie sur le marché de la viande de veau après la crise de la vache folle (ESB). Le graphique permet également d’observer une différence croissante entre les prix des classes de qualité. L’explication économétrique des différents prix observés s’appuie sur les variables données dans le tableau 1. L’analyse graphique montre également la nécessité des variables saisonnières (rupture structurelle en 2004 d’une part, aspect saisonnier d’autre part). L’automne sert de saison de référence. Il est également évident que l’espèce des bovins exerce elle aussi une influence sur le niveau des prix. La viande de veau et la viande de fabrication sont des marchés que les consommateurs perçoivent comme totalement distincts. Par conséquent, des modèles d’explication ont été estimés séparément pour ces deux marchés ainsi que pour le marché «résiduel» du bétail. De plus, le fait que des prix 

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205


Economie agricole | Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine

Tableau 1 | Statistique descriptive Variable

Signification

Durée

Continu à partir de 1 = janvier 2000 (unité = mois)

95,01

Juin 2004

Après juin 2004 = 1, sinon 0

0,73

Hiver

Prix des mois de décembre, janvier, février

0,25

Printemps

Prix des mois de mars, avril, mai

0,25

Eté

Prix des mois de juin, juillet, août

0,25

Veaux

Viande de veau = 1, sinon 0

0,20

Transformation

Vaches destinées à la transformation = 1, sinon 0

0,18

Taurillons

Taurillons = 1, sinon 0

0,24

Bœufs

Bœufs = 1, sinon 0

0,20

Marché

Vente sur les marchés de bétail = 1, sinon 0

0,16

Franco

Prix y compris livraison à l’abattoir = 1, sinon 0

0,27

Bio

Production biologique = 1, sinon 0

0,17

AQ

AQ Viande Suisse = 1, sinon 0

0,70

TerraSuisse

Label Migros = 1, sinon 0

0,05

C

Classe C = 1, sinon 0

0,08

T

Classe T = 1, sinon 0

0,51

A

Classe A = 1, sinon 0

0,20

X

Classe X = 1, sinon 0

0,05

systématiquement différents des prix de référence soient payés pour les bœufs et les taurillons a également été pris en compte. Deux autres variables concernent les circuits de commercialisation des animaux. Les marchés de bétail sur lesquels une partie des animaux est vendue ont été pris en compte. En outre, certains agriculteurs fournissent leurs produits franco à l’abattoir, ce qui laisse supposer un supplément de prix. Les autres variables concernent directement notre problématique. Les labels décrits (Bio, TerraSuisse et AQ) ainsi que les classes de qualité C, T, A, et X (avec H comme référence) sont utilisés pour expliquer les différences de prix. Ces sept variables ont également été multipliés par la variable temps pour savoir si les hausses et baisses de prix variaient avec le temps. Tableau 2 | Résultats des calculs de régression du prix de la viande de veau, 2001−2014 Variable

Coefficient

Classe C

0,623** (16,78)

Classe H

0,403** (10,86)

Classe A

−0,491** (−13,22)

Classe C*temps

0,00456** (12.21)

Classe H*temps

0,00334** (8,94)

Classe A*temps

−0,0072** (−19,26)

**p < 0,01; valeurs t entre parenthèses.

206

Moyenne

Recherche Agronomique Suisse 6 (5): 202–209, 2015

Résultats L’analyse exploratoire à partir de l’exemple de la viande de veau montre déjà qu’entre 2001 et 2014, toutes les classes de qualité étudiées se sont démarquées de plus en plus de la classe T, vers le haut pour les classes C et H bien entendu, et vers le bas pour la classe A. Le tableau 3 présente le modèle de régression plus complet des prix de la viande bovine qui confirme la différence croissante également pour les autres types de viande bovine. Les différences par rapport à la classe H décrites ici augmentent par exemple d’un tiers de centime par kilo chaque mois dans le cas de la classe T. Pour les veaux, la différence entre les prix des classes T et H augmente même d’un demi-centime par kilo et par mois. Une telle évolution ne peut pas être observée pour les labels qualité. On constate certes un supplément de prix initial de près de deux francs par kilo pour la viande bio, mais il baisse d’environ un demi-centime par mois. La situation est encore plus précaire pour les autres labels. En effet, il n’est pas possible de constater un supplément de prix systématique par rapport à la marchandise conventionnelle ni pour TerraSuisse ni pour AQ, qui représente de plus en plus la qualité de base. Les résultats montrent au contraire que les prix  des produits AQ sont de plus en plus bas.


Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine | Economie agricole

Tableau 3 | Résultats des calculs de régression de l’ensemble du modèle

n Temps Juin 2004 Hiver Printemps Eté Veaux Transformation Taurillons Bœufs Marché Franco Bio AQ TerraSuisse Classe C Classe T Classe A Classe X Bio*temps QM*temps TerraSuisse*temps Klasse C*temps Classe T*temps Classe A*temps Classe X*temps Constant R2 †p

Total

Transformation

Veaux

Reste

4180

754

854

2572

0,00688**

0,0

0,00585**

0,00620**

−5,6

−1,4

−3,8

−5

0,811**

0,916**

1,37**

0,603**

−18,3

−10,2

−13,5

−14,0

−0,262**

−0,0400

−0,216**

−0,340**

(−7,54)

(−0,57)

(−2,63)

(−10,16)

−0,546**

0,434**

−1,74**

−0,438**

(−15,78)

−6,2

(−21,33)

(−13,12)

−0,518**

0,452**

−1,96**

−0,323**

(−14,99)

−6,4

(−24,05)

−9,7

5,42** −132,5 −1,39** (−25,74) −0,153**

−0,170**

(−3,62)

(−4,90)

0,704**

0,715**

−14,6 0,418**

−17,1 −0,189

0,126*

−5,6

(−1,25)

−2,0

−0,309**

0,529**

−0,532

(−6,77)

−4,0

(−11,81)

1,84**

1,93**

−14,5

−15,0

−0,149

−0,885**

−0,379**

(−1,27)

(−5,01)

(−2,95)

0,4

0,3

−1,1

−0,9

0,329**

0,2

−2,8

−0,1

−0,941**

2,50**

0,699** −5,8 −0,876**

−9,5

−19,5

−0,938**

1,04**

−0,785**

−1,01†

(−10,29)

−7,3

(−3,82)

(−1,76)

−2,27** −17,9

(−10,13)

Référence

−0,00466**

−0,00806**

(−4,49)

(−6,93)

−0,00265**

−0,00237*

(−2,62)

(−2,22)

0,0

−0,00291

−1,5

(−1,30)

0,00192†

0,0

−1,7 −0,00312**

−0,000707

−0,000990

−0,6

(−0,89)

−0,00585**

−0,00163*

−9,5

(−0,55)

(−3,62)

(−2,27)

−0,00352**

−0,00104

−0,106**

−0,00139*

(−4,14)

(−0,71)

(−5,49)

(−1,76)

7,90**

3,02**

14,31**

8,21**

−57,6

−24,1

−126,9

−59,2

0,9

0,8

0,7

0,7

−0,00560** (−17,94)

< 0,1; *p < 0,05; **p < 0,01; valeurs t entre parenthèses.

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Economie agricole | Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine

Les variables explicatives dans le modèle fournissent quelques informations supplémentaires intéressantes. La différence des fluctuations saisonnières des prix en fait partie. Tandis que les veaux se vendent à leur prix le plus élevé en hiver, il est préférable de vendre les vaches destinées à la fabrication au printemps ou en été pour obtenir un bon prix. Sur le marché de la viande bovine, les bœufs atteignent généralement 70 centimes de plus que les génisses qui se situent légèrement au-dessus des taurillons. Enfin, tandis que la vente sur les marchés de bétail semble être rentable du point de vue agricole, la livraison aux abattoirs ne l’est pas. Les animaux livrés franco sont payés en moyenne 30 centimes/kg de moins.

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Conclusions Les résultats empiriques confirment largement la thèse selon laquelle les différences de prix entre les classes de qualité augmentent, tandis que celles entre les labels qualité s’affaiblissent. La seule restriction qui doit être faite est que certains labels qualité, comme «AQ Viande Suisse» ou «TerraSuisse», ne permettent pas d’emblée une discrimination positive par les prix. Depuis 2000, la Confédération investit chaque année quatre millions de francs pour que les bovins et les porcs soient taxés par un organe indépendant. Les différences de prix croissantes entre les classes de qualité semblent indiquer que ces fonds soutiennent la stratégie qualité de l’agriculture suisse en ce qui concerne le marché des n bovins.


Classi o marchi? Prezzi della carne di manzo e qualità La differenza tra classi di qualità e marchi di qualità consiste nel fatto che questi ultimi vengono assegnati sulla base del processo produttivo, le prime, invece, sulla base dell'effettivo risultato della produzione. Poiché i marchi sono costantemente legati anche a ideologie (per esempio la contrapposizione tra biologico e produttivismo) e queste ultime rivestono sempre meno importanza nella società, è lecito presupporre che, mentre le differenze di prezzo tra le classi di qualità continuano ad aumentare, quelle tra i marchi di qualità tenderanno a ridursi. Le analisi di regressione effettuate sul mercato dei vitelli, da una parte, e su 4180 set di dati del mercato dei bovini, dall'altra, confermano ampiamente questo schema tra il 2000 e il 2014. Nel periodo di osservazione, si registra infatti un ampliamento del range dei prezzi tra le singole classi del sistema di qualità svizzero CH-TAX, mentre diminuisce il rincaro dei prodotti biologici. Per i marchi «TerraSuisse» e «GQ Carne Svizzera» non viene, fin da principio, rilevata nessuna discriminazione di prezzo.

Bibliographie ▪▪ Betz H.-G., 1992. Postmodernism and the New Middle Class. Theory, Culture & Society 9 (2), 93−114. ▪▪ Birrer S., Balmer O., Chevillat V., Graf R., Hagist D., Jahrl I., Jenny M., Pfiffner L. & Zellweger-Fischer J., 2012. Mit Vielfalt punkten – Jahresbericht 2011, Schweizerische Vogelwarte, Sempach & Forschungsinstitut für biologischen Landbau, Frick. ▪▪ Bystricky M., Alig M., Nemecek T. & Gaillard G., 2014. Ökobilanz ausgewählter Schweizer Landwirtschaftsprodukte im Vergleich zum Import. Agroscope Science 2. Agroscope, Zurich. ▪▪ Bowbrick P., 1992. The Economics of Quality, Grades and Brands. Routledge, London. 344 p. ▪▪ Chalfant J.A. & Sexton R.J., 2002. Marketing Orders, Grading Errors and Price Discrimination. American Journal of Agricultural Economics 84 (1), 53−66. ▪▪ Clunies-Ross T., Cox G. & Lowe P., 1994. Challenging the Productivist Paradigm: Organic Farming and the Politics of Agricultural Change. In: Regulating Agriculture (Ed. P. Lowe, T. Marsden & S. Whatmore). David Fulton Publishers, London. ▪▪ Cox L.J., McMullen B.S. & Garrod P.V., 1990. An Analysis of the Use of Grades and House Brand Labels in the Retail Beef Market. Western Journal of Agricultural Economics 15 (2), 245−253. ▪▪ Darnhofer I., 2005. Organic Farming and Rural Development: Some Evidence from Austria. Sociologia Ruralis 45 (4), 308−323.

Summary

Riassunto

Classes ou labels? Prix et qualité de la viande bovine | Economie agricole

Grades or labels? Beef prices and quality The difference between quality grades and quality labels is that the latter are awarded on the basis of production processes, whilst the former are conferred on the strength of the actual production results. In the course of a de-ideologisation of society, it might be assumed that the price differences between quality grades would grow larger and larger, while those between quality labels would tend to shrink. Regressions for the calf market on the one hand and for 4180 cattle-market datasets on the other largely confirm this pattern between 2000 and 2014. In the period under consideration, a price spread occurs between the individual grades of the CH-TAX system, whilst the surcharge for organic products shrinks. No price discrimination is identified a priori for ‘Terrasuisse’ and ‘QM’ labels. Key words: labels, grades, beef, quality.

▪▪ Fisher A., 2007. Beef carcass classification in the EU: an historical perspective. In: Evaluation of Carcass and Meat Quality in Cattle and Sheep (Ed. C. Lazzaroni, S. Gigli & D. Gabina). Wageningen Academic Publications, Wageningen. ▪▪ Jahn G., Schramm M. & Spiller A., 2005. The Reliability of Certification: Quality Labels as a Consumer Policy Tool. Journal of Consumer Policy 28 (1), 53−73. ▪▪ Kalinovsky A. M. & Radchenko S., 2011. The End of the Cold War and the Third World. Taylor and Francis, New York. ▪▪ Leuenberger H., 1980. Schlachtkörperwert und Fleischqualität verschiedener Rassen und Kreuzungen des Rindes. ETH Zurich, Zurich. ▪▪ Lobsiger M. & Wyss U., 2008. Werte und Image der graslandbasierten Milchproduktion. Accès: http://www.lfl.bayern.de/mam/cms07/ipz/­ dateien/aggf_2008_lobsiger_wyss.pdf [12.12.2014]. ▪▪ Ortner H. M., 2000. The human factor in quality management. Accreditation and Quality Assurance 5 (4), 130−141. ▪▪ Schläpfer E., 1988. Bewertung und Einschätzung von Schlachttieren der Kategorien Kühe, Jungbullen und Kälber unter schweizerischen Verhältnissen. ETH Zurich, Zurich. ▪▪ USDA, 1997. United States Standards for Grades of Carcass Beef. U.S. ­D epartment of Agriculture, Washington. ▪▪ VanDyke J. E., 2000. The role of grades and standards. In: China in the Global Economy (Ed: Organisation for Economic Cooperation and Development OECD, Paris.)

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P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Ramularia collo-cygni – un nouveau ­champignon pathogène de l’orge Peter Frei et Katia Gindro Agroscope, Institut des sciences en production végétale IPV, 1260 Nyon, Suisse Renseignements: Peter Frei, e-mail: peter.frei@agroscope.admin.ch

Forte attaque de Ramularia collo-cygni sur orge de printemps ­(variété Célika).

Introduction Au nord des Alpes, les grillures de l’orge sont signalées dès le début des années 90 et depuis lors ne cessent de gagner du terrain. Les symptômes foliaires apparaissent d’abord comme des petites taches nécrotiques de quelques millimètres de diamètre sur les feuilles les plus exposées à la lumière, au moment de l’épiaison (BBCH51) et après la floraison de la culture (>BBCH61). Si les condi-

210

Recherche Agronomique Suisse 6 (5): 210–217, 2015

tions climatiques s’y prêtent, et notamment lors d’alternance d’épisodes très ensoleillés et couverts, ces nécroses peuvent s’étendre très rapidement sur toute la surface foliaire, en provoquant la sénescence précoce de la feuille et la perte de ses fonctions photosynthétiques et métaboliques. Ce développement drastique des nécroses foliaires entraîne des chutes de rendement, sur le plan quantitatif et qualitatif, pouvant dépasser 20%. Pendant longtemps, les grillures foliaires des céréales ont été imputées à des troubles d’ordre physiologique. A la fin du 19e siècle, Cavara (Cavara 1892) décrit un nouveau champignon présent dans les nécroses foliaires de cultures d’orge du nord de l’Italie, qu’il nomme Ophiocladium hordei. Dès 1986, la présence de ce champignon est mentionnée en Suisse, puis dans tous les pays du nord des Alpes. Entre temps, Ophiocladium hordei a changé de nom pour s’appeler désormais Ramularia collo-cygni. Les grillures de l’orge sont principalement causées par Ramularia collo-cygni qui produit une molécule phytotoxique, la rubelline D (Miethbauer et al. 2003). Mais elles peuvent aussi être dues à des stress physiologiques liés aux conditions climatiques. Il reste toutefois difficile d’attribuer la formation des nécroses à des stress biotiques ou abiotiques en l’absence de sporulation du champignon. Depuis 2002, les grillures ont un statut officiel de maladie, assorti d’un seuil d’intervention à l’apparition des premières nécroses visibles sur les trois dernières feuilles. Le chlorothalonil a été le premier fongicide homologué en Suisse en 2003 contre les grillures. Ce contexte a motivé Agroscope à entamer des recherches afin de mieux comprendre la biologie, l’épidémiologie et la transmission de cette maladie, ou encore son implication avec des nécroses d’origine physiologique.

Résultats Grillures physiologiques et pathologiques Grillures dues à Ramularia collo-cygni Les recherches effectuées ont déjà livré certaines données sur la biologie et le cycle de vie de Ramularia collocygni (fig. 1). Toutefois, certains points restent encore à


élucider. Ce champignon peut être considéré comme un endophyte qui se développe de façon asymptomatique dans la plante hôte. L’éventail de ses plantes hôtes est vaste et ne cesse de s’agrandir. Les principales cultures touchées sont les céréales, l’orge, le blé, le triticale, l’avoine et le maïs (Huss 2008), ainsi que de nombreuses autres graminées telles que l’orge des rats (Hordeum murium), le chiendent (Agropyron repens), le raygrass (Lolium sp.), le pâturin (Poa sp.) et l’agrostis jouet-du-vent (Apera spica-venti). Des essais d’infections artificielles en conditions contrôlées ont montré qu’une même souche de R. collo-cygni peut infecter un grand nombre de plantes hôtes différentes, sans montrer de préférence particulière. Les premiers symptômes sur l’orge apparaissent sur les feuilles exposées à la lumière entre l’épiaison et la fin de la floraison. Par temps humide, le champignon produit des spores en abondance sur la face inférieure des feuilles, sous forme de petites touffes blanches de conidophores émergeant des stomates et ne portant chacun qu’une seule spore. Au niveau microscopique, les conidophores ont la forme d’un cou de cygne, particularité qui a donné son nom au champignon (collo-cygni = cou de cygne). Les spores peuvent alors infecter d’autres plantes. Seule cette étape de sporulation permet d’attribuer avec certitude les symptômes de grillure à la présence du champignon. En cas de fortes attaques, des taches peuvent aussi être observées sur les barbes, les

BBCH 0 Présence dans les grains

BBCH 12 Détectable par PCR mais sans symptômes

Résumé

Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge | Production végétale

Les grillures constituent une menace pour la culture de l’orge et mènent à d’importantes pertes de rendement sur le plan quantitatif et qualitatif. Ces symptômes peuvent être dus à un stress d’ordre physiologique, mais avant tout à la présence du champignon Ramularia collo-cygni. En l’absence de sporulation, ces deux types de nécrose foliaire sont pratiquement impossibles à distinguer. Afin de combattre ce pathogène, Agroscope a lancé une vaste étude pour mieux connaître sa biologie. Le champignon a été suivi par analyse moléculaire depuis les stades les plus précoces de la culture, ce qui a permis d’établir qu’il pouvait être transmis par les graines. De nouvelles formes de dissémination ont également été découvertes, dont le rôle doit encore être précisé dans l’épidémiologie et la survie du champignon. Des essais fongicides ont été réalisés avec différentes stratégies d’application. Ils ont montré que, en l’absence d’autres maladies foliaires dans la culture, un seul traitement à partir du stade BBCH37 suffit pour combattre efficacement les grillures de l’orge.

BBCH 25–31 Sporulation sur feuilles sénescentes

BBCH 37–51 Protection par un traitement fongicide

BBCH >77

BBCH 69–73

Sporulation abondante sur feuilles sénescentes

Symptômes sur épis et barbes

BBCH (41)–51 Symptômes sur feuilles

Figure 1 | Cycle de développement de Ramularia collo-cygni selon Walters modifié (Walters et al. 2008).

Recherche Agronomique Suisse 6 (5): 210–217, 2015

211


Production végétale | Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge

Figure 2 | Structures de dissémination de Ramularia collo-cygni produites sur milieu nutritif gélosé. A. Sclérotes (20–40 µ m). B. Microconidies (2 µ m) portées par des microconidiophores. C. Chlamydospores (6–10 µ m). D. Détail de C.

graines et les gaines des feuilles au niveau de la tige. Dans de plus rares cas, les premières taches peuvent être observées sur les feuilles sénescentes à la base des plantes au printemps, aux stades fin de tallage et redressement (BBCH25 à BBCH32). Dans ce cas, ces taches sporulantes sont légèrement rougeâtres, ce qui permet d’éviter toute confusion avec les symptômes d’autres maladies connues de l’orge, telles que l’helmintosporiose (Pyrenophora teres), la rynchosporiose (Rhynchosporium secalis) et l’oïdium (Erysiphe graminis). Des outils moléculaires ont été adaptés pour détecter très précocement le champignon, avant même que les symptômes apparaissent (Havis et al. 2006; Frei et al. 2007). Les plantules peuvent être contaminées soit par des spores pro-

duites en automne, soit par la graine, ce qui a été démontré et confirmé en laboratoire. L’ADN du champignon a été détecté en effet dans le péricarpe, le corps farineux et l’embryon des graines. Ce fait signifierait que le champignon peut se développer en même temps que la graine germe, en colonisant progressivement les tissus de la plante au fur et à mesure que la plantule se développe. Le mycélium de R. collo-cygni est intercellulaire et ne détruit pas les cellules de la plante hôte. La nécrotisation de la feuille est principalement due aux toxines photodynamiques produites par le champignon. Ces molécules de la famille des rubellines (Miethbauer et al. 2003), une fois activées par la lumière, détruisent les membranes cellulaires. Ce

Tableau 1 | Fongicides utilisés dans les essais de traitement de l’orge contre Ramularia collo-cygni Produit

212

Dose / ha

Bravo 500

1,5 l

Proline

Matière active

2007

2008

2009

2010

2011

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Chlorothalonil 41,0 % (500g/l)

X

0,8 l

Prothioconazole 25,0 % (250 g/l)

Opera

1,75 l

Pyraclostrobin 12,5 % (133g/l) Epoxiconazol 4,7 % (50g/l)

Cherokee

2,5 l

Propiconazol 5,17 % (62,5 g/l) Cyproconazol 4,13 % (50,0 g/l) Chlorothalonil 31,0 % (375 g/l)

Aviator Xpro

1,25 l

Bixafen 7,5 % (75 g/l) Prothioconazole 15,0 % (150 g/l)

Bell

1,5 l

Boscalid 20,8 % (233 g/l) Epoxiconazole 6,0 % (67 g/l)

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2012

2013

X

X

X

X

X X X


Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge | Production végétale

Tableau 2 | Rendements relatifs des essais sur orge menés à Goumoëns-la-Ville entre 2007 et 2013 selon différentes stratégies de lutte contre Ramularia collo-cygni (non traité = 100 %) 2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

Produit dose

37–41

45–51

37–41

45–51

37–41

45–51

37–41

45–51

37–41

45–51

Proline 0,8 l/ha

138

129

120

128

106

110

106

110

116

114

Opera 1,75 l/ha

119

131

110

122

107

104

107

104

115

111

Bell 1,5 l/ha

129

129

Bravo 1,5 l/ha

120

112

Cherokee 2,5 l/ha

119

37–41

45–51

37–41

45–51

131

120

119

117

123

121

120

117

122

Aviator Xpro 1,25 l/ha

99

104

Cellules bleu clair: augmentation statistiquement significative du rendement.

processus explique pourquoi les feuilles du haut, plus exposées à la lumière, sont les premières à présenter les symptômes typiques de taches nécrotiques brunes de quelques millimètres, oblongues et cerclées de jaune. R. collo-cygni est difficile à isoler car cette opération n’est possible que lors de la sporulation du champignon. Les cultures mycéliennes se font essentiellement sur des milieux nutritifs gélosés tels que le PDA (Potato Dextrose Agar), ou sur SBA (Straw Bran Agar, paille et son de blé), pour la production de spores. Des observations microscopiques effectuées sur de vieilles

cultures en milieu PDA ont montré que le champignon peut produire différents types de spores telles que des chlamydospores, des conidies et des microconidies (fig. 2) considérées comme rares (Salamati et Raitan 2006). Sur SBA, il est possible d’observer la formation de très nombreux sclérotes de petite dimension (100 à 300 µm). Le rôle de ces différentes propagules dans le cycle épidémiologique de R. collo-cygni reste encore à élucider. De même, il se pourrait que les microconidies jouent le rôle de spermatie dans la formation de la structure sexuée du champignon, mais cela reste encore à démontrer.

Tableau 3 | Rendements relatifs des essais sur orge menés à Changins entre 2007 et 2013 selon différentes stratégies de lutte contre ­R amularia collo-cygni (non traité = 100 %). Les essais 2007 et 2013 n’ont pas été récoltés à cause des conditions climatiques défavorables 2008

2009

2010

2011

2012

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

traitement BBCH

Produit dose

37–41

45–51

37–41

45–51

37–41

45–51

37–41

45–51

Proline 0,8 l/ha

136

133

103

108

105

108

103

108

Opera 1,75 l/ha

124

126

103

103

101

108

105

108

Bell 1,5 l/ha

37–41

45–51

109

106

100

101

Bravo 1,5 l/ha Cherokee 2,5 l/ha Aviator Xpro 1,25 l/ha

132

135 107

103

Cellules bleu clair: augmentation statistiquement significative du rendement.

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Production végétale | Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge

Tableau 4 | Taux d’attaque des maladies foliaires de l’orge dans les parcelles non traitées des essais sur orge à Changins (CHA) et ­G oumoëns-la-Ville (GIV) de 2007 à 2013 selon différentes stratégies de lutte contre Ramularia collo-cygni Année 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

Lieu

Rhynchosporiose

Helminthosporiose

Grillures

CHA

---

---

---

GlV

Faible

Forte

Forte

CHA

Très faible

Très faible

Forte

GlV

Très faible

Très faible

Forte

CHA

Très faible

Très faible

Faible

GlV

Très faible

Très faible

Faible

CHA

Très faible

Très faible

Faible

GlV

Très faible

Très faible

Faible

CHA

Très faible

Très faible

Faible

GlV

Très faible

Très faible

Faible

CHA

Très faible

Très faible

Faible

GlV

Très faible

Très faible

Faible

CHA

Très forte

Faible

Forte

GlV

Très forte

Faible

Faible

Grillures d’origine physiologique PLS Les taches physiologiques, aussi appelées taches de pollen, ont longtemps passé pour la cause principale du dessèchement des feuilles. Les PLS (Physiological leaf spots) sont des taches d’origine physiologique, ce qui signifie qu’aucun microorganisme n’est impliqué dans le développement des symptômes (Obst et al. 1995); Wu et v. Tiedemann 2002). Ces derniers peuvent être observés lors de brusques alternances entre temps couvert et fort rayonnement solaire. Durant ces rapides transitions climatiques, les stomates ne s’ouvrent pas instantanément, ce qui provoque l’accumulation très rapide de radicaux libres (radicaux d’oxygène = ROS) phytotoxiques (Obst et al. 1995).

Ces molécules, en détruisant les membranes des cellules, provoquent ainsi des nécroses sur les feuilles exposées. L’interaction des ROS et des rubellines produites par R. collo-cygni mène à une déstructuration progressive des membranes et de l’intégrité cellulaires, et ainsi à la réduction drastique de la capacité photosynthétique des feuilles (Miethbauer et al. 2003). Lutte contre les grillures Sensibilité variétale Pour le moment, aucune différence de sensibilité n’a été décrite entre les variétés d’orge de printemps et d’orge d’automne. Le seul changement observé est la période

50 P. teres F

taux d’attaque en %

45 40

R. secalis F-2

35

P. teres F-1

30

Grillures F

25

P. teres F-2

20

Grillures F-1

15

R. secalis F

10

Grillures F-2

5

R. secalis F-1

0 2008

2009

2010 2011 année d’observation

2012

2013

Figure 3 | Taux d’attaque, moyenne en % de la surface foliaire atteinte de 50 feuilles par étage foliaire des différentes maladies foliaires de l’orge dans les essais non traités à Changins (BBCH 69-73). P. teres: Pyrenophora teres (helminthosporiose); R. secalis: Rhynchosporium secalis (rynchosporiose); grillures: Ramularia collo-cygni (ramulariose). F: feuille étendard; F-1: deuxième feuille; F-2: troisième feuille.

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Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge | Production végétale

d’apparition des grillures, liée à la précocité des variétés. Les grillures apparaissant toujours à la fin de la floraison, et se manifestent ainsi plus tôt chez les variétés hâtives. Une trentaine de variétés européennes d’orge de printemps et d’automne ont été semées chaque année (2006 – 2009) sur différents sites de cinq pays européens, l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, l’Ecosse et la Suisse, dont deux sites en Suisse romande (Nyon et Goumoëns-la-Ville). Vu la grande différence de précocité entre les variétés, ces essais ont été contrôlés trois fois durant la période de culture (BBCH51, 69 et 83). La synthèse des observations (BBCH 51 à BBCH 83) montre que toutes les variété sont plus ou moins sensibles aux grillures causées par R. collo-cygni. Essais fongicides Dans le cadre des essais d’homologation d’Agroscope (2007 à 2013), deux programmes de traitement ont été évalués. Une première série a été traitée au stade BBCH37 (apparition de la feuille étendard) ou au seuil d’intervention défini pour les maladies foliaires (apparition des premières grillures sur les trois dernières feuilles); une autre série a été traitée à partir du stade BBCH45 (gonflement de la gaine de la feuille étendard), en privilégiant le positionnement d’un unique traitement à la limite du dernier stade autorisé BBCH51 (début épiaison, barbes apparentes). Chaque année, des essais randomisés (4 répétitions par procédé, variété Plaisant) ont été menés sur les domaines d’Agroscope à Changins (CHA) et Goumoëns-la-Ville (GlV). Les par-

celles d’une surface de 9 m² ont été traitées au pulvérisateur à dos (300 l/ha) avec les produits présentés dans le tableau 1. Un suivi épidémiologique a été effectué chaque année dans les parcelles non traitées et les résultats publiés sur le site www.agrometeo.ch, rubrique grandes cultures / orge. Deux essais ont dû être abandonnés à Changins à la suite d’une forte attaque du virus de la jaunisse nanisante (2007) et de la tempête de grêle du 21 juin 2013. Sur les sept années d’expérimentation, cinq essais de Goumoëns-la-Ville ont fourni des rendements significativement supérieurs au témoin non traité, avec un gain maximal de 38 % en 2007 (tabl. 2). À Changins en revanche, le rendement n’a été amélioré par le traitement qu’une seule fois, et de peu, en 2008 (tabl. 3). Ces résultats s’expliquent par la pression des différentes maladies foliaires de l’orge, résumées dans le tableau 4, et par le taux de grillures présent dans les essais (fig. 3 et 4).

Conclusions En dépit des nouvelles connaissances acquises sur la biologie et l’épidémiologie de Ramularia collo-cygni, ainsi que des outils moléculaires développés pour détecter très tôt le pathogène, plusieurs questions restent encore ouvertes pour assurer une lutte plus ciblée. Cela importe d’autant plus que la transmission peut se faire d’une culture à l’autre par la semence et que le champignon est présent dans l’embryon de façon latente. Les facteurs 

50 45

P. teres F R. secalis F Grillures F

taux d’attaque en %

40 35 30

P. teres F-1 R. secalis F-1 Grillures F-1

25 20 15

P. teres F-2 R. secalis F-2 Grillures F-2

10 5 0 2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

année d’observation Figure 4 | Taux d’attaque, moyenne en % de la surface foliaire atteinte de 50 feuilles par étage foliaire des différentes maladies foliaires de l’orge dans les parcelles non traitées à Goumoëns-la-Ville (BBCH 69-73). P. teres : Pyrenophora teres (helminthosporiose); R. secalis: Rhynchosporium secalis (rynchosporiose); grillures: Ramularia collo-cygni (ramulariose) et PLS (physiological leaf spots). F: feuille étendard; F-1: deuxième feuille; F-2: troisième feuille.

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Production végétale | Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge

physiologiques qui ont permis le passage de l’état d’endophyte à l’état de pathogène ne sont pas connus mais ont été déterminants pour la propagation du champignon et ses conséquences sur les rendements. Une étude en Allemagne a montré que R. collo-cygni était déjà présent dans les semences en 1960 (Hess M., communication personnelle). De même, le rôle exact de la toxine produite par le champignon, notamment dans sa virulence sur l’orge, doit encore être élucidé. En ce qui concerne la lutte, les fongicides autorisés mis à disposition sont efficaces. Les essais d’Agroscope ont montré qu’une seule application après le stade

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BBCH37 suffit en général à limiter le développement du champignon. Si la parcelle n’est pas atteinte avant le stade BBCH37 par des attaques massives de rhynchosporiose, helminthosporiose, oïdium ou rouille naine, cet unique traitement qui protège la feuille étendard s’avère efficace. Quand la pression de ces maladies est importante avant le stade BBCH37, un traitement spécifique est alors conseillé. n


Ramularia collo-cygni, un nuovo patogeno fungino dell’orzo Essendo causa di cali significativi di resa, sia sul piano quantitativo che qualitativo, le bruciature fogliari rappresentano una seria minaccia per le colture di orzo. Benché gli stessi sintomi possano anche essere dovuti a uno stato di stress di natura fisiologica, le cause sono da ricercare in primo luogo nella presenza del fungo Ramularia collo-cygni. In mancanza della sporulazione, tuttavia, è praticamente impossibile distinguere tra questi due tipi di necrosi fogliare. Per combattere questo patogeno, Agroscope ha avviato un ampio studio volto ad approfondire le conoscenze sulla sua biologia. Grazie a un monitoraggio del fungo fin dalle primissime fasi della coltivazione per mezzo di un esame genetico-molecolare, è stato possibile scoprire che la trasmissione può avvenire attraverso i semi. Sono state poi individuate anche altre modalità di diffusione, pur restando ancora da chiarire quale ruolo svolgano sul piano epidemiologico e della sopravvivenza del fungo. Una serie di test fungicidi, realizzati mettendo in atto differenti strategie d’applicazione, ha dimostrato che, in assenza di altre malattie fogliari nella coltivazione, un unico trattamento a partire dalla fase BBCH37 è del tutto sufficiente per risolvere con efficacia il problema delle bruciature fogliari dell’orzo.

Bibliographie ▪▪ Cavara F., 1892. Ueber einige parasitische Pilze auf dem Getreide. Zeitschrift für Pflanzenkrankheiten III, 16–25. ▪▪ Frei P., Gindro K. G., Richter H. & Schürch S., 2007. Direct-PCR detection and epidemiology of Ramularia collo-cygni associated with barley ­n ecrotic leaf spots. Journal of Phytopathology 155, 281–8. ▪▪ Havis N., Oxley S. J. P. , Piper S. R. & Langrell S. R. H., 2006. Rapid nested PCR-based detection of Ramularia collo-cygny direct from barley. FEMS Microbiology Letters 256, 217–23. ▪▪ Huss H., 2008. Die Sprenkelkrankheit nun auch auf Mais. Der Pflanzenarzt 11–12, 6–7. ▪▪ Miethbauer S., Heiser I. & Liebermann B., 2003. The phytopathogenic fungus Ramularia collo-cygni produces Biologically active Rubellins on infected barely leaves. Journal of Phytopathology 151, 665-8.

Summary

Riassunto

Ramularia collo-cygni – un nouveau champignon pathogène de l’orge | Production végétale

Ramularia collo-cygni, a new pathogenic fungus of barley Leaf spot constitutes a threat to barley cultivation, leading to significant quantitative and qualitative yield losses. Although these symptoms can be due to physiological stress, they are primarily caused by infestation with the Ramularia collo-cygni fungus. In the absence of sporulation, these two types of leaf necrosis are practically impossible to tell apart. In order to control the pathogen Ramularia collo-cygni, Agroscope has launched a major study to learn more about its biology. The fungus was monitored by molecular analysis from the earliest stages of cultivation, allowing us to ascertain that it can be transmitted by seed. New forms of transmission of the disease have also been discovered whose roles in the epidemiology and survival of the fungus have yet to be determined. Fungicide trials have been conducted with different application strategies. These have shown that, in the absence of other leaf diseases in the crop, a single treatment from the BBCH 37 (flag-leaf) stage onwards is sufficient for the effective control of barley leaf spot. Key words: Ramularia collo-cygni, biology, barley, fungicides.

▪▪ Obst A., Baumer M. & Huber G., 1995. Nichtparasitär bedingte Blattverbräunungen bei Gerste- ein Problem mit zunehmender Bedeutung. ­G esunde Pflanzen 74, 308–14. ▪▪ Salamati S. & Raitan L., 2006. Ramularia collo-cygni on spring barley, an overview of its biology and epidemiology. Proccedings, 1 European ­R amularia Workshop Göttingen, 19–35. ▪▪ Walters D., Havis N. & Oxley S. P., 2008. Ramularia collo-cygni: the biology of an emerging pathogen of barley. FEMS Microbiology Letters 279, 1–8. ▪▪ Wu Y-X & von Tiedemann A., 2002. Evidence for oxidative stress invoved in physological leaf spot formation in winter and spring barley. Phytopathology 145, 145–55.

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S o c i é t é

Réorganisation du système de connaissances agricoles en Suisse Robert Obrist, Heidrun Moschitz et Robert Home Institut de recherche de l’agriculture biologique FiBL, 5070 Frick, Suisse Renseignements: Robert Obrist, e-mail: robert.obrist@fibl.org

Échange de connaissances à l’occasion d’une démonstration de machines agricoles. (Photo: Marion Nitsch)

Introduction Nouveaux buts des systèmes de connaissances agricoles Les systèmes de connaissances agricoles (SCA) englobent l’ensemble des institutions et organisations publiques et privées chargées de la recherche, de la formation et de la vulgarisation dans le secteur agricole (Buess et al. 2011; Hermans et al. 2015). Dans le cadre des réformes de la politique agricole introduites à la fin du 20e siècle, le centre d’intérêt des SCA s’est déplacé vers le développement durable de l’espace rural. Les objectifs ont été redéfinis, qu’il s’agisse des thématiques orientées vers les techniques de production ou des questions liées à l’environnement. Des activités nécessitant des compétences en économie et en gestion ont été développées (Brunori et al. 2013). Ce glissement du centre d’intérêt découle de la subordination des paiements directs au respect des prestations écologiques requises en Suisse depuis 1999 (OFAG 2009). Le SCA suisse s’efforce actuellement de développer des

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connaissances fondamentales tant pour la production de denrées alimentaires de haute qualité que pour la préservation des biens collectifs, notamment la protection des animaux ainsi que le maintien de paysages ruraux et de la vitalité de l’espace rural (Conseil fédéral suisse 2012). Le concept d’un «système intégré d’alimentation», fondé sur la durabilité et résistant aux perturbations externes (Lötscher 2012), est devenu le principe directeur. Promouvoir un développement durable cons­titue une tâche complexe impliquant de nouvelles approches afin que l’agriculture puisse poursuivre simultanément plusieurs objectifs. C’est l’association de conditions-cadres politiques, de découvertes scientifiques et de l’expérience pratique qui génèrera des innovations aboutissant à des solutions durables et adaptées au contexte local (Moschitz et al. 2015). Cet article montre comment le SCA en Suisse s’efforce de relever ces défis afin de promouvoir un développement rural durable. Comme cette étude prend en compte l’ensemble du système de connaissances agri-


coles, elle est axée sur les interactions entre les différents acteurs et sur les facteurs qui favorisent ou qui entravent ces interactions. La situation actuelle du SCA en Suisse est tout d’abord présentée ainsi que les résultats d’un atelier sur les facteurs qui favorisent ou qui freinent le développement durable dans le SCA. Des suggestions sont ensuite formulées sur la base de ces constatations afin d’assurer la poursuite du développement du SCA. Système actuel de connaissances agricoles suisse L’échange d’informations entre les institutions chargées de l’application des lois et des décrets se fait de manière régulière et bien formalisée (avec des listes officielles de participants, des ordres du jour et des procès-verbaux). Ces rencontres assurent une remontée d’informations de «bas» (niveau cantonal) en «haut» (niveau fédéral), ce qui est nécessaire car la politique agricole est en grande partie élaborée au niveau fédéral mais mise en œuvre au niveau cantonal. Les plateformes et les groupes de travail les plus importants réunissent les directions, les comités directeurs ou les représentations des différents départements concernés (p. ex. conférence des services d’agriculture cantonaux, différents groupes de travail au niveau fédéral chargés de l’amélioration structurelle, de l’efficacité de l’utilisation des ressources, des paiements directs, etc.). En outre, des représentants des autorités fédérales sont habituellement invités à participer à ces réunions. L’échange de connaissances sur des questions relatives aux techniques de production a lieu principalement au niveau des communautés de travail et des plateformes de communication et de coopération. Ces plateformes, coordonnées par différentes institutions, servent en premier lieu à l’échange d’expériences et aux discussions sur des projets communs et des développements techniques dans le domaine agricole. Les projets novateurs sont souvent portés par des plateformes et des groupes de travail spécialisés et peuvent, à l’initiative d’une ou plusieurs institutions du SCA, être lancés par les cantons ou des acteurs particuliers (Barjolle 2011; Buess et al. 2011). Comme exemple de projets novateurs de ce type, citons les marchés paysans ou les projets ASC (agriculture soutenue par la communauté). De plus en plus souvent, d’autres acteurs sont également impliqués. Ainsi, lors des séminaires professionnels du FiBL, des gestionnaires de produits de l’organisation faîtière (Bio Suisse), des transformateurs (p. ex., meuneries agricoles) et des distributeurs (grossistes) sont amenés à jouer un rôle actif. Cette approche favorise la compréhension réciproque et la disposition à trouver une solution commune aux problèmes.

Résumé

Réorganisation du système de connaissances agricoles en Suisse | Société

Le système de connaissances agricoles (SCA) en Europe était et est aujourd’hui encore conçu comme un transfert linéaire de connaissances des scientifiques vers les agriculteurs. Avec le changement de la politique agricole et l’introduction du couplage entre les performances environnementales et les paiements directs à la fin du 20e siècle, de nouvelles structures se sont développées, en particulier en Suisse. Cet article identifie les facteurs qui influent sur la transformation actuelle du SCA en Suisse afin de promouvoir un développement agricole multifonctionnel et durable. Lors d’un atelier réunissant des représentants des différents acteurs du SCA, une «matrice de performance du système d’innovation» a été élaborée. Les résultats révèlent une évolution en cours dans la conception du rôle des scientifiques, des vulgarisateurs et des formateurs: leur mission ne se limite plus à la transmission du savoir mais se mue en un rôle de modérateurs, générant ainsi des connaissances nouvelles par un effort commun de différents acteurs. Ce changement de paradigme implique la poursuite du développement du SCA en Suisse. L’approche dans le choix des thèmes de recherche, la poursuite efficace d’une recherche orientée vers la pratique, la présentation claire des résultats de la recherche et leur discussion avec les parties prenantes ainsi que la mise en pratique concertée des conclusions doivent encore être organisées plus précisément.

Méthode Pour déterminer quels facteurs du SCA favorisent ou entravent un soutien plus efficace à une agriculture durable et à un développement de l’espace rural, un atelier a été organisé dans le cadre du projet européen de recherche SOLINSA1 (www.solinsa.net), avec douze acteurs représentant différents groupes d’intérêt du SCA. Au cours de l’atelier, la méthode de la «matrice collective de performance du système d’innovation» a été 

1 Le projet de recherche SOLINSA (Agricultural Knowledge Systems in Transition: Towards a more effective and efficient support of learning and innovation networks for sustainable agriculture, www. solinsa.net) – Développement de réseaux de formation et d’innovation pour une agriculture durable – a bénéficié d’un soutien financier de la Commission européenne (7e programme-cadre pour des actions de recherche, convention de subvention N° 266306).

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Société | Réorganisation du système de connaissances agricoles en Suisse

Recherche appliquée, plateformes

Formation

Environnement

Cantons

EPF Recherche fondamentale

EPFZ

OFAG Recherche et vulgarisation

Agroscope FiBL

Conférence des directeurs cantonaux de l’agriculture

Services agricoles

SEFRI Formation, recherche et innovation

Universités, hautes écoles

Hautes écoles spécialisées (agric, alim, org. travail)

Écoles d'agriculture

OFEV/OFAG Environnement

EPFZ et universités

AGRIDEA FiBL

Offices de protection de la nature

SECO Développement rural

Universités, hautes écoles

regiosuisse

Offices cantonaux

OSAV Santé animale

Universités

Services de santé

Vétérinaire cantonal

OFSP Santé publique

EPFZ

Développement rural

Vétérinaires

Santé publique

Nutrinet

Privé

Services cantonaux de vulgarisation

Chimistes cantonaux

Médias, ONG, conseils privés et entreprises, organisations professionnelles, organismes privés de contrôle et de certification

Recherche

Inter-cantonal

Exploitations agricoles

Confédération

Figure 1 | Le système de connaissances agricoles en Suisse, classé par sources de financement (d’après Barjolle 2011).

appliquée, comme décrit dans le manuel Reflexive Monitoring in Action (Mierlo et al. 2010). La figure 1 présente la structure du SCA, tandis que cette matrice permet d’analyser de manière systématique les fonctions et les interactions au sein du SCA pour identifier les facteurs qui stimulent ou qui freinent le développement durable (tabl. 1). Dans les colonnes figurent les acteurs concernés du système (associations paysannes, organismes de vulgarisation, écoles d’agriculture, etc.), tandis que les lignes représentent différents aspects du système: ••Dans le SCA, «Infrastructure» signifie infrastructures physiques, par exemple les structures de communication entre instituts et exploitations agricoles, les voies de transport, les établissements de recherche et de développement ou le financement de la recherche publique et privée. ••Le «Cadre législatif» comprend l’ensemble des règles formalisées du système, tels que les paiements agricoles directs. ••Les «Institutions sociales» sont les valeurs, les normes et les aspects culturels qui influencent la façon de communiquer des acteurs, la manière d’interpréter «bonnes pratiques» et la façon dont s’effectuent les échanges. ••«Interactions» désigne la façon dont les acteurs interagissent et coopèrent. Il peut s’agir de liens informels ou de réseaux étroitement imbriqués. Il s’agit à la fois de relations verticales (entre les acteurs

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Recherche Agronomique Suisse 6 (5): 218–223, 2015

à différents niveaux) et horizontales (entre acteurs d’un même niveau). ••«Aptitudes» représente les aptitudes techniques et organisationnelles des acteurs leur permettant de s’adapter aux nouveautés et, le cas échéant, de les intégrer dans la pratique. Parmi elles figurent notamment l’esprit entrepreneurial et une formation appropriée. ••La «Structure du marché» se réfère aux interactions entre les acteurs du marché, en l’occurrence, entre diffuseurs et demandeurs de connaissances. La trame de la matrice du SCA a été présentée sur un grand poster. Tous les participants ont alors été priés d’indiquer dans la trame, au moyen d’étiquettes adhésives, les facteurs du SCA qui, selon eux, stimulent ou entravent un soutien plus efficace au développement durable de l’espace rural. Les résultats ont ensuite été discutés, les étiquettes ont été regroupées ou leur contenu a été reformulé. À l’issue de cet échange apparaît une matrice qui reflète l’ensemble des points de vue des acteurs présents sur la situation du SCA en Suisse. Outre ce résultat élaboré et reconnu par l’ensemble des participants, un autre effet de cette approche participative est de permettre à tous les acteurs de connaître le point de vue des autres participants. Bien que la méthode choisie demande explicitement de nommer aussi les faiblesses du système, l’absence d’anonymat dans le


Réorganisation du système de connaissances agricoles en Suisse | Société

Tableau 1 | «Matrice de performance du système d’innovation» du SCA en Suisse et facteurs favorisant (+) ou freinant (–) le soutien d’un ­d éveloppement durable Acteurs Agriculteurs

Associations paysannes

Associations sectorielles

Organismes ­publics

Aspects Infrastructure Cadre ­législatif Institutions sociales Interactions Aptitudes Structure du marché

+

– +

Écoles de Services de formation vulgarisaprofessiontion nelles +

+

Établissements d’enseignement supérieur

Instituts de recherche

+

+

Acteurs de la chaîne de valeur ajoutée

Soustraitants

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Le nombre de (+) ou de (–) reflète la quantité de facteurs stimulants ou inhibiteurs: ( ) aucun; (+) 1–2; (+)(+) 3–4; (+)(+)(+) 5 et plus.

contexte de l’atelier pousse à souligner plus fortement les aspects positifs. Les critiques acerbes des institutions représentées ont été évitées lors de l’atelier.

Résultats Le tableau 1 présente une vue d’ensemble succincte des résultats de la «matrice de performance du système d’innovation» pour le SCA en Suisse. Il indique les facteurs du SCA en Suisse qui favorisent (+) ou freinent (–) les innovations en faveur d’un développement durable de l’espace rural. Les principaux freins et moteurs sont décrits ci-après; par manque de place, tous les facteurs ne peuvent être présentés dans cet article.2 Les facteurs ayant les effets les plus stimulants dans le SCA en Suisse se situent, selon les participants à l’atelier, dans les quatre aspects «Infrastructure», «Institutions sociales», «Interactions» et «Structure du marché». Une dotation appropriée en ressources et une stabilité de l’infrastructure financière, notamment en faveur des établissements de formation et de recherche, permettent d’engager des personnes très compétentes et motivées. Les paiements directs garantis par l’État assurent aux agriculteurs des ressources financières leur permettant de concrétiser des idées nouvelles. Fondamentalement, tous les acteurs sont disposés à apprendre les uns des autres et à collaborer entre eux, ce qui est une condition essentielle pour l’innovation. Les agriculteurs sont généralement décrits comme favorables à l’expérimentation. En plus de ces points positifs dans 2

Pour plus de détails, voir Home et al. (2013), où tous les facteurs sont présentés.

l’aspect «Institutions sociales», les interactions entre les acteurs sont considérées comme positives par de nombreux participants. Ainsi, les services de vulgarisation et les écoles de formation professionnelle paraissent entretenir de bonnes relations avec la recherche et la pratique, même si celles-ci pourraient être intensifiées. L’échange d’informations entre les institutions chargées de l’application des lois et des décrets a lieu de manière régulière, est bien formalisé et assure la communication entre le niveau cantonal et le niveau fédéral. L’échange de connaissances sur les questions relatives aux techniques de production a principalement lieu au sein des groupements de travail et des plateformes de communication et de coopération qui sont coordonnés par différentes institutions. Ces plateformes servent en premier lieu à l’échange d’expériences et aux discussions sur des projets communs et des développements techniques dans le domaine agricole (Barjolle 2011). Cependant, les contacts informels entre les acteurs jouent également un rôle important et favorisent souvent les innovations. Le niveau de formation généralement élevé des agriculteurs (aspect «Aptitudes») et l’ancrage du principe de durabilité dans la politique suisse (aspect «Cadre législatif») sont d’autres facteurs positifs importants. Les principaux freins au développement durable sont des facteurs qui limitent la propension à la prise de risque. Ces facteurs concernent les aspects «Cadre législatif», «Structure du marché» et à nouveau «Interactions» – abordés sous différents angles. Les réglementations contraignantes dans l’agriculture se traduisent par la lourdeur des tâches juridiques et administratives pour tous les acteurs, ce qui les rend moins disponibles pour

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Société | Réorganisation du système de connaissances agricoles en Suisse

le développement créatif et l’expérimentation. Sur le «marché des connaissances», la concurrence entre l’offre et la demande augmente certes la qualité de l’offre, mais en période de changement du système de connaissances, de nombreux acteurs ont un comportement défensif et sont peu enclins à l’innovation, car ils considèrent que cette attitude augmente leurs chances de survie. En ce qui concerne les services de vulgarisation, on remarque qu’il est difficile de «vendre» les cours axés sur l’acquisition de compétences méthodologiques, alors qu’ils constituent une clé des innovations durables. Selon les parties prenantes, les principaux freins à l’innovation dans l’aspect «Interactions» sont principalement le peu d’échanges entre organismes publics ainsi qu’entre les acteurs de la vulgarisation, les établissements d’enseignement supérieur et les instituts de recherche dans leurs domaines respectifs. En outre, les acteurs sont souvent trop peu ouverts à la collaboration en dehors des réseaux existants; par exemple, l’absence de financement de la recherche par les organisations agricoles a été soulignée. Par ailleurs, il n’y a pas de feedback entre les acteurs de la chaîne de valeur ajoutée et ceux de la recherche. Un autre frein mérite d’être remarqué: malgré la bonne formation reconnue des agriculteurs, leur formation entrepreneuriale est insuffisante, ce qui entrave leur comportement novateur en faveur du développement durable.

Discussion et conclusions Actuellement, les services de vulgarisation agricole en Suisse se concentrent en premier lieu sur les aspects relatifs aux techniques de production. Les conseils s’inscrivent principalement dans une optique de commercialisation et portent sur les moyens de production (engrais, produits phytosanitaires, aliments pour animaux, etc.). Les conseils relatifs au développement et à la stratégie de l’exploitation sont généralement prodigués à l’occasion des changements générationnels. Aujourd’hui déjà et certainement aussi à l’avenir, l’évolution des ­conditions-cadres est toujours plus rapide sous l’effet de la politique (p. ex. libéralisation des marchés), de la société (p. ex. demande de prestations environnementales) ou de changements naturels (p. ex. changement climatique). Dès lors, des compétences entrepreneuriales accrues sont attendues des chefs d’exploitation. De plus en plus, l’élaboration de stratégies individuelles pour les exploitations est mise en avant. Il est donc essentiel de connaître les forces et les faiblesses de ses collaborateurs. À l’avenir, l’offre diversifiée de formation permanente existant dans le domaine de la gestion et du développement d’entreprises devrait être davantage exploitée.

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Les aptitudes des apprentis sont prises en compte dans la formation de base avec les deux cursus sanctionnés par un «Certificat fédéral de capacité» et une «Attestation de formation». Comme l’enseignement a lieu dans des classes séparées, les petites écoles ont de plus en plus de difficultés à atteindre le nombre minimal d’élèves requis. Le nombre d’exploitations agricoles diminue d’année en année. Elles se spécialisent de plus en plus, tant dans le secteur de la production végétale que celui de l’élevage. Les services cantonaux de vulgarisation doivent s’adapter à ces évolutions en se spécialisant eux-mêmes en conséquence et en acquérant de nouvelles compétences. Les défis actuels et surtout futurs de la formation et de la vulgarisation ne pourront être relevés que par une coopération renforcée entre les cantons. À cet égard, les vulgarisateurs actuellement en activité et les vulgarisateurs futurs au service des cantons doivent acquérir des compétences supplémentaires. En plus des spécialistes des techniques de production et des experts en gestion et développement d’entreprises, il faudra pouvoir disposer à l’avenir de spécialistes capables de jouer un rôle de médiateurs, d’initier et de soutenir les évolutions susceptibles d’améliorer le développement durable dans l’agriculture. Dans la recherche, davantage d’incitations et de possibilités doivent être ménagées pour intégrer les connaissances fondées sur l’expérience de la pratique agricole dans les projets. Comme Home et Moschitz (2013) l’ont montré, un ensemble de mesures sont nécessaires à cet effet, visant à la fois les chercheurs à titre individuel et les conditions-cadres politiques et institutionnelles. Ces mesures pourraient, par exemple, avoir pour effet de ne plus retenir l’excellence scientifique des requérants comme unique critère de soutien aux projets de recherche, mais également leurs capacités à coopérer avec les praticiens. De même, les projets incluant une coopération entre recherche et pratique devraient être davantage soutenus. Toutefois, cette approche ne peut aboutir que si l’échange de connaissances entre la recherche et la pratique est une dimension intégrée dans la formation des chercheurs, des vulgarisateurs et des agriculteurs. Tous les acteurs doivent devenir capables d’échanger au-delà des limites de leur domaine professionnel et de développer des innovations en associant les cultures du savoir des uns et des autres en un processus d’apprentissage commun (voir également Fry et al. 2011; Moschitz et al. 2015). n


Ridefinire il sistema della conoscenza in agricoltura in Svizzera Il sistema della conoscenza in agricoltura (SCA) in Europa era ed è tuttora spesso caratterizzato dall’idea del trasferimento lineare delle conoscenze dalla scienza agli agricoltori. Con la svolta della politica agricola e con l’introduzione della relazione tra prestazioni ambientali e pagamenti diretti alla fine del 20° secolo si sono sviluppate, soprattutto in Svizzera, nuove strutture. L’obiettivo del presente contributo è di indicare i fattori che influiscono sul rinnovamento dell’attuale SCA in Svizzera affinché possano essere sostenute innovazioni per uno sviluppo rurale multifunzionale e sostenibile. In un workshop con rappresentanti dei diversi attori dello SCA è stata elaborata una collettiva «Innovation System Performance Matrix». I risultati permettono di concludere che è in corso un cambiamento della percezione dei ruoli da parte dei partecipanti per quanto riguarda la scienza, la consulenza e la formazione: da semplici trasmettitori di informazioni a moderatori che producono nuove conoscenze assieme a diversi attori. Per realizzare questo cambiamento d’impostazione è necessario che lo SCA si sviluppi ulteriormente in tal senso anche in Svizzera. Il procedimento per quanto riguarda la scelta dei temi di ricerca, l’attuazione efficace e incisiva della ricerca orientata alla pratica, l’elaborazione dei risultati della ricerca, la discussione con le parti interessate e la realizzazione comune va ulteriormente definito.

Summary

Riassunto

Réorganisation du système de connaissances agricoles en Suisse | Société

Reconfiguring the agricultural knowledge system in Switzerland The Agricultural Knowledge System (AKS) in Europe has been, and often continues to be, characterised by the idea of linear knowledge transfer from science to farmers. Particularly in Switzerland, new structures have arisen as a result of the turnaround in agricultural policy and the introduction at the end of the twentieth century of cross-compliance between the provision of environmental services and direct farm payments. The aim of this paper is to illustrate the factors impacting on the reform of Switzerland’s current AKS, with a view to supporting innovation for multifunctional and sustainable rural development. A collective Innovation System Performance matrix was developed in a workshop with representatives of the various AKS stakeholder groups. From the results, we can reasonably conclude that a change is underway in the understanding of the role of stakeholders in science, extension and education, with the latter progressing from mere conveyors of information to facilitators who generate new knowledge jointly with the various actors. In Switzerland as elsewhere, the AKS must be reconfigured in order to achieve this paradigm change. There is still a need to shape more clearly the choice of research topics, the efficient and effective performance of practice-oriented research, the processing of research results, stakeholder discussions, and joint implementation. Key words: agricultural knowledge system, innovation, system performance matrix, stakeholder interactions.

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E c l a i r a g e

Du laboratoire à la pratique: congrès inter­ national sur la reproduction humaine et animale David Kradolfer1, Martin Kaske2 et Susanne E. Ulbrich1 ETH Zurich, Institut des sciences agronomiques, chaire de physiologie animale, 8092 Zurich, Suisse 2 Service sanitaire bovin, Faculté Vetsuisse Zurich, 8057 Zurich, Suisse Renseignements: Susanne E. Ulbrich, e-mail: seu@ethz.ch

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Les participants au congrès de février dans le bâtiment des sciences agronomiques LFW de l’ETH Zurich. (Photo: Jochen Bick)

Plus de 200 spécialistes internationaux de la recherche fondamentale en sciences agronomiques, en biomédecine et en médecine vétérinaire clinique se sont rencontrés lors de la Conférence de février (Februartagung), du 11 au 14 février 2015 à Zurich, pour échanger des connaissances sur les progrès les plus récents dans les domaines de la physiologie et de la pathologie de la reproduction. Un cours de formation continue sur la fertilité de la vache laitière a ensuite été donné au Tierspital.

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Avec 216 participants issus de 13 pays, l’intérêt suscité par la Conférence de février 2015 a dépassé toutes les attentes. La diversité était au rendez-vous, tant dans la provenance des participants que dans les domaines de recherche présentés. Outre la médecine humaine, de nombreuses contributions portaient sur la reproduction des animaux de rente tels que les bovins, les porcs et les chevaux. Mais les présentations ont également porté sur les nouvelles connaissances relatives aux lapins, chiens, lynx et dromadaires.


Du laboratoire à la pratique: congrès inter­n ational sur la reproduction humaine et animale | Eclairage

Recherche fondamentale et recherche clinique Les organisateurs avaient particulièrement à cœur de promouvoir la collaboration entre la recherche fondamentale et la recherche clinique. Les deux approches peuvent être considérées comme complémentaires car elles abordent parfois les mêmes problèmes avec les mêmes outils, mais avec des motivations très différentes. Les uns se concentrent sur l’application clinique d’une problématique, et s’intéressent prioritairement aux aspects liés à la thérapie du malade. Les autres en revanche s’attachent à expliquer les mécanismes à l’origine de la santé. Ces mécanismes peuvent n’avoir aucune application clinique dans un premier temps, mais servir de base pour de nouvelles préparations efficaces en clinique. Pour les aspects touchant à la physiologie et à la pathologie de la reproduction chez l’homme et chez l’animal, ces deux approches sont indispensables. Les différents modèles animaux utilisés sont également très utiles pour établir de nouvelles hypothèses pour l’espèce animale concernée ainsi que pour l’homme. Dans la médecine de la reproduction de l’homme et de l’animal, la demande de traitements ne cesse d’augmenter, mais de nombreux mécanismes de régulation fondamentaux sont parfois insuffisamment expliqués, voire totalement inexpliqués. La reconnaissance des compétences réciproques permet de contribuer au progrès commun dans le domaine très complexe de la reproduction. Rôle du système immunitaire dans la reproduction Le congrès a notamment mis l’accent sur le système immunitaire maternel, un élément très important pour la fertilité. La conférencière Claire Wathes (Royal Veterinary College, Herts, UK) a ouvert les feux sur le sujet, avec un exposé sur l’influence du stress métabolique sur le système immunitaire des vaches laitières. Durant la période périnatale, la consommation d’énergie d’une vache est tellement élevée qu’elle ne peut être couverte que par la mobilisation des réserves corporelles de la mère. Cela conduit à une diminution du nombre de certaines cellules immunitaires spécialisées, les granulocytes neutrophiles, dans le sang, et donc à une sensibilité accrue de la vache aux infections. C’est un problème particulièrement préoccupant car durant la mise-bas et la période post-partum, les bactéries peuvent pénétrer dans le système reproducteur par le canal pelvien ouvert. Après la mise-bas, environ 20 à 30 % des vaches développent une métrite, une inflammation de la couche musculaire de l’utérus, puis une endométrite, une inflammation de la muqueuse de l’utérus qui diminue leur fertilité. Des études indiquent que les virus jouent également un rôle important dans l’apparition d’endo-

métrites et de problèmes de fertilité. Il a ainsi été montré qu’une infection due au BVDV, un virus largement répandu qui peut provoquer de fortes diarrhées, peut empêcher l’activation des gènes nécessaires aux défenses immunitaires et au maintien de la gestation à son début. Un autre conférencier invité, Mats Troedsson (University of Kentucky, USA), a présenté un autre aspect de l’endométrite. Chez les juments, l’insémination provoque une inflammation passagère de la muqueuse de l’utérus qui disparaît après 24 à 36 heures chez les juments fertiles. Ce processus physiologique normal libère l’utérus des spermatozoïdes et des bactéries qui s’y sont introduits. Près de 10% des juments, le plus souvent des animaux âgés, développent toutefois une endométrite qui dure plus longtemps. Si cette inflammation n’a pas encore disparu cinq jours après l’ovulation, c’est-à-dire au moment où l’embryon passe de l’oviducte à l’utérus, cela conduit à une diminution du taux de gestation. Grossesse et diabète Anne Navarrete Santos (Université Martin Luther, HalleWittenberg, Allemagne) a expliqué l’effet du diabète durant la grossesse. Chez les femmes, le diabète de type I provoque plus de troubles de fertilité et de complications durant la grossesse. Outre ces impacts directs sur l‘embryon, il y a aussi des effets à long terme via la programmation métabolique. Les enfants et les adultes sont ainsi plus souvent atteints de surpoids et de diabète si leur mère souffrait de diabète durant sa grossesse. Le développement embryonnaire du lapin ressemble beau- 

Encadré 1 | Conférence de février 2015 Du 11 au 14 février 2015, la Conférence de ­février 2015 (Februartagung 2015) chapeautait deux rencontres scientifiques internationales: le 48e congrès annuel international de physiologie et pathologie de la reproduction, ainsi que la 40e conférence de médecine humaine et vétérinaire, organisés par l’ETH Zurich (groupe de physiologie animale, prof. Susanne Ulbrich) et par l’Université de Zurich (clinique pour la médecine de la reproduction, prof. Heiner ­Bollwein). Deux symposiums satellite ont en outre été mis sur pied à cette occasion, sur les thèmes de la reproduction du cheval et la fertilité de la vache laitière.

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Eclairage | Du laboratoire à la pratique: congrès inter­n ational sur la reproduction humaine et animale

Figure 1 | Les organisateurs du congrès Heiner Bollwein (clinique pour la médecine de la reproduction de l’Université de Zurich) et Susanne Ulbrich (chaire de physiologie animale de l’ETH Zurich) entourent les trois lauréats (de gauche à droite): Jochen Bick (meilleur poster, ETH Zurich), Jan-Dirk Haeger (meilleur exposé Postdoc, Haute école vétérinaire de Hanovre) et Killian Simmet (meilleur exposé des doctorants, Université Ludwig-Maximilian, Munich). (Photo: Stefan Bauersachs)

coup à celui de l’homme, raison pour laquelle le lapin convient bien comme modèle animal. L’utilisation de lapins diabétiques a ainsi permis d’étudier les modifications moléculaires qui se produisent dans l’embryon durant la gestation. C’est une condition essentielle pour trouver le traitement optimal du diabète de gestation pour l’embryon et pour la mère. Formation sur la fertilité de la vache laitière Après la clôture de ce congrès qui fut une réussite, une formation continue d’un jour organisée par le Service sanitaire bovin suisse (SSB), destinée spécifiquement aux vétérinaires praticiens, a eu lieu à la Faculté Vetsuisse de Zurich. L’accent était mis sur la fertilité de la vache laitière. Les praticiens suisses ont fait preuve d’un intérêt bien plus grand que prévu. Martin Kaske, responsable du SSB, a souhaité la bienvenue à plus de 100 propriétaires de cabinet pour gros animaux, assistants et étudiants; de nombreuses inscriptions ont effectivement malheureusement dû être refusées en raison de la capacité limitée de l’auditoire.

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Heiner Bollwein (Université de Zurich) a consacré son exposé au sens et au non-sens des différentes thérapies hormonales chez les vaches souffrant de troubles ovariens dus à une inactivité des ovaires, une ovulation retardée ou à des follicules kystiques des ovaires. A l’aide d’exemples tirés de la littérature et des résultats de ses propres études, il a pu prouver de manière impressionnante que si l’indication est claire, l’utilisation réfléchie de prostaglandines, de GnRH et de suppléments de progestérone peut augmenter fortement les chances de réussite d’une insémination; d’autre part, il existe également de nombreux protocoles de synchronisation du cycle et d’insémination qui sont utilisés en pratique mais dont l’efficacité n’a jamais pu être démontrée. Les participants ont ensuite pu suivre des exposés consacrés aux options thérapeutiques en cas d’endométrite chronique et à la valeur du diagnostic par échographie au moment de l’insémination. Ulrich Witschi (Swissgenetics) a présenté de nouveaux résultats qui prouvent que le sperme sexé conduit à des succès d’insémination satisfaisants en pratique, de sorte que son utilisation s’avère tout à fait


Du laboratoire à la pratique: congrès inter­n ational sur la reproduction humaine et animale | Eclairage

rentable et judicieuse pour le client. Les expériences faites jusqu’ici avec l’utilisation de SpermVital ne sont pas encore évidentes; les évaluations indiquent toutefois un succès meilleur en cas d’insémination trop précoce. Marion Piechotta (Haute école vétérinaire de Hanovre), a présenté le potentiel et les limites du diagnostic de gestation effectué par détermination de la concentration des PAG (Pregnancy Associated Glycoproteins) dans le lait des vaches. Cette méthode va assurément gagner en importance à l’avenir. Les thèmes présentés après la pause de midi concernaient davantage l’approche à l’échelle du troupeau que celle à l’échelle de l’animal individuel. Maren Feldmann (Haute école vétérinaire de Hanovre) a montré l’importance des chiffres-clé de la fertilité pour évaluer la fertilité actuelle du troupeau et pour identifier les problèmes spécifiques. Les valeurs moyennes du temps de repos, de la période de service, du succès de la première insémination et du taux de réforme dû à l’infertilité donnent une bonne vue d’ensemble, les chiffres étant presque tous fortement influencés par le taux de détection des chaleurs. Dans leurs exposés, Rupert Bruckmaier (Physiologie vétérinaire de l’Université de Berne), et Martin Kaske (Faculté Vetsuisse de Zurich) ont souligné le rôle très important de l’état métabolique des vaches au début de la lactation pour la fertilité. L’impact négatif d’une production laitière moyenne croissante sur les chiffres-clés de la fertilité du troupeau peut effectivement être prouvé. Le bilan énergétique négatif des vaches à haute performance joue un rôle essentiel durant les premières

semaines de lactation. Les maladies inflammatoires qui débutent dans la mamelle ou la matrice constituent également des causes importantes pour des résultats d’insémination insatisfaisants. Mais on observe que dans les exploitations ayant une production laitière supérieure à la moyenne, la fertilité du troupeau s’avère souvent satisfaisante – un indice clair de l’importance énorme du management pour la compatibilité entre la santé animale, la fertilité, une période d’utilisation plus longue et des performances élevées. Ces deux exposés ont ainsi présenté d’une part les possibilités de surveillance du métabolisme à l’aide des résultats du contrôle laitier ainsi que les options permettant de minimiser le défi métabolique lié à la lactation chez les vaches à haute performance grâce à une amélioration du management. L’ambiance studieuse, les nombreuses discussions et les échos très positifs des participants ont montré que ce symposium a permis de susciter de nombreuses réflexions et propositions pour les praticiens en médecine bovine. Pour le SSB, c’était un lancement parfait pour les journées de formation continue planifiées plus tard dans l’année. Synthèse Durant ces quatre jours, le thème de la reproduction a été considéré sous des angles complètement différents et on a pu avoir une perspective de l’orientation que prendra la recherche à l’avenir. L’ETH Zurich et l’Université de Zurich fourniront conjointement d’autres contributions importantes pour les sciences agronomiques et la médecine vétérinaire. n

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E c l a i r a g e

Sécurité microbiologique et chimique des ­aliments Marc Mühlemann Agroscope, Institut des sciences en denrées alimentaires IDA, 3003 Berne, Suisse Renseignements: Marc Mühlemann, e-mail: marc.mühlemann@agroscope.admin.ch

que les produits subissent pendant la transformation, le transport et l’entreposage chez les fabricants et les distributeurs, mais aussi pendant le transport et l’entreposage par les ménages privés. La sécurité alimentaire ne prend fin qu’à l’expiration de la date de consommation ou à la préparation et la consommation du produit par le consommateur. Les fabricants doivent garantir la sécurité de leurs produits jusqu’à ce moment-là. C’est pourquoi on tient compte, dans les calculs, de l’ingestion orale d’impuretés par les consommateurs, mais aussi de l’ingestion par inhalation ou par contact avec la peau des utilisateurs de produits chimiques. Cela s’effectue à l’aide de systèmes de modélisation assistés par ordinateur ainsi que de banques de données sur la sécurité alimentaire et la santé publique.

Exemple de contaminations microbiologiques dans une boîte de Pétri.

Les denrées alimentaires peuvent être contaminées par diverses impuretés chimiques et microbiologiques. Grâce à des systèmes éprouvés en matière de sécurité alimentaire, il est possible de les limiter à un niveau non préjudiciable pour la santé. Cet article présente quelques banques de données sur la sécurité alimentaire et la santé publique. Les méthodes de calcul de base et les systèmes assistés par ordinateur pour le calcul du risque chimique et microbiologique y sont brièvement présentés. Deux méthodes de comparaison des divers risques et classes de risque sont également mentionnées. La sécurité alimentaire basée sur le risque couvre l’ensemble de la chaîne alimentaire, de la production primaire des matières premières jusqu’à la consommation des produits finis. Elle tient compte des modifications

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Bases de la sécurité alimentaire microbiologique Il existe différents systèmes de modélisation pour la sécurité alimentaire microbiologique comme par exemple le PMP, le ComBase ou le SymPrevius pour illustrer la multiplication ou la diminution de microorganismes pathogènes. La formule mathématique (1) utilisée à cet effet est simple: Ho–R+I ≤ FSO où: FSO = Objectif de sécurité alimentaire Ho = Niveau de contamination initial R = Réduction cumulée totale de la contamination initiale I = Croissance cumulée de la contamination initiale Cela peut être formulé de la manière suivante: la contamination microbiologique de la matière première moins la somme de tous les effets réduisant la contamination plus la somme de tous les effets augmentant la contamination doit s’élever au maximum à l’objectif de sécurité alimentaire. Cette formulation a été choisie de sorte à éviter toute conséquence négative sur la santé du consommateur. En général, les modèles présentent la multiplication ou la destruction de microorganismes pathogènes attendue lors des différentes conditions de fabrication


Sécurité microbiologique et chimique des ­a liments | Eclairage

Figure 1 | Capture d’écran de la page d’accueil du système de ­m odélisation ComBase.

et de stockage des denrées alimentaires. Aussi bien le PMP que le ComBase (fig. 1) se basent sur la croissance de microorganismes cultivés en laboratoire sur des milieux nutritifs. Par rapport à la croissance de micro­ organismes issus de l’environnement de la production, ils montrent une croissance plus fréquente et plus importante dans des matrices naturelles. Le programme payant SymPrevius permet de disposer d’une estimation proche de la pratique lors de situations données pour des aliments et des processus de production spécifiques. Bases de la sécurité chimique des aliments Toute une série de paramètres sont particulièrement importants pour l’évaluation de produits chimiques: a) données relatives à l’absorption, à la répartition, au métabolisme et à l’élimination chez les mammifères; b) données relatives à la toxicité aiguë et à long terme chez les animaux de laboratoire; c) mode d’action toxique; d) test in vivo et in vitro par rapport à la cancérogénicité, à la génotoxicité, à la neurotoxicité, à la toxicité sur la reproduction et le développement;

e) exposition à des substances chimiques ou absorption de produits chimiques et f) accès à des données concernant des études épidémiologiques sur l’homme. Pour les substances avec un seuil toxicologique, on définit des quantités d’absorption acceptables, voire tolérables; il s’agit des valeurs ADI (acceptable daily intake) et TDI (tolerable daily intake). Celles-ci représentent les quantités ingérables quotidiennement durant toute la vie sans risque mesurable pour la santé. Les valeurs en question sont calculées avec prudence à partir de données d’animaux de laboratoire et en utilisant un facteur de risque de 100. En revanche, des substances cancérigènes et génotoxiques peuvent avoir un effet dommageable pour la santé à long terme même en doses infimes. Elles sont évaluées à l’aide du concept MoE (margin of exposure). Cette valeur permet de calculer le rapport entre une dose provoquant une tumeur chez les animaux et l’absorption de cette substance par l’homme. Cela signifie que, plus la quantité de cette substance absorbée par l’homme est faible, plus le MOE y relatif est élevé et la substance analysée a un impact moindre à court terme sur la santé humaine. Pour les calculs, on peut utiliser par exemple le modèle BMD, le ConsExpo et la base de données PRIMo ainsi que le modèle PROAST pour les statisticiens. Le modèle BMD découle des principes cités préalablement. Le PRIMo utilise toutes les données de consommation nationales au sein de l’UE. Le ConsExpo évalue en revanche aussi bien l’ingestion orale d’une substance que l’absorption cutanée. Il ne sert donc pas à l’évaluation des produits chimiques dans les aliments, mais à celle dans les objets usuels et les biens de consommation, par exemple des substances (semi) volatiles, des biocides, des cosmétiques, des jouets et des aérosols. Priorisation des risques La comparaison de divers risques et différentes classes de risque comme par exemple les risques microbiologiques et chimiques représentent des problèmes connus et d’un caractère urgent. Pour surmonter ce problème, des systèmes de priorisation ont été développés récemment par la FDA (Food and Drug Administration, USA) et l’EPF de Zurich en collaboration avec l’Office fédéral de la santé publique. Il s’agit de systèmes dits experts qui requièrent de nombreuses données spécifiques de toxicologie, d’épidémiologie, de calcul de probabilités et de consommation de denrées alimentaires. En outre, Agroscope a développé un modèle pratique qui utilise les caractéristiques indirectes des risques et qui fait partie du savoir actuel des gestionnaires du risque. Comme principal indicateur pour l’analyse des risques, on utilise le concept DALY (disability adjusted life years). Le concept DALY, 

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Eclairage | Sécurité microbiologique et chimique des ­a liments

Product x Hazard x Processing-> FLEXIBILITY

1 Human Health & 6 Exposure Criteria

Other Legitimate Criteria: relevant for value chain

Figure 2 | Capture d’écran du modèle convivial de priorisation de divers risques et classes de risque.

développé par la Banque mondiale, doit permettre de mesurer l’impact de diverses maladies sur la société. Il permet d’enregistrer non seulement la mortalité, mais aussi l’atteinte portée à une vie normale sans douleurs liées à une maladie. Cette valeur de référence est ensuite modélisée à l’aide de deux facteurs d’influence, regroupés en blocs séparés, par rapport au produit et à la contamination. Un bloc regroupe les facteurs d’influence relatifs à l’exposition et l’autre contient des indications concernant la manière dont une société pourrait réagir face à un risque (fig. 2). n

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Bibliographie ▪▪ Cole M., 2004. Food safety objectives – Concept and current status. Mitt. Lebensm. Hyg . 95, 13–20. ▪▪ ComBase Consortium`s ComBase. Accès: http://www.combase.cc/index. php/en/. ▪▪ Lampen A., 2010. Lebensmittel. In: Vohr, H. W. (éd.) Toxikologie Band 1, 377–406. Wiley-VCH: Weinheim. ▪▪ Mühlemann M., 2013. Practitioner framework for the evaluation and prioritization of food and feed safety hazards and related research needs. ALP science 545, 1–12. Accès: http://www.agroscope.admin.ch/publikationen/suche/index.html?sb_pubsearch=1&pubkeywords=&pubautor=m %C3%BChlemann&pubjahrvon=&pubjahrbis=&pubtyp=&pubsprache= &lang=de&pubsuche=Suchen). ▪▪ Food and Drug Administration Center for Food Safety and Applied Nutrition (FDA/CFSAN), Joint Institute for Food Safety and Applied Nutrition (JIFSAN) and Risk Sciences International (RSI). 2012. FDA-iRISK version 1.0. FDA CFSAN. College Park, Maryland. Accès: http://irisk.foodrisk.org/


A c t u a l i t é s

Sonntag, 31. Mai, 9.30 Uhr Aktuelles Breitenhof-Tagung 2015

Agroscope Steinobstzentrum Breitenhof in Wintersingen BL

Referate Begrüssung zur Breitenhof-Tagung

Betriebsrundgang Die Kirschessigfliege – Zahlen und Fakten

Robert Baur, Agroscope, Leiter Pflanzenschutz und Extension Obst- und Gemüsebau und Vorsitz Beirat Steinobstzentrum Breitenhof

Ausblick auf die Schweizer Steinobsternte und Vermarktung 2015 Hansruedi Wirz, Früchtezentrum Basel

Bewässerung bei Süsskirschen – so funktioniert’s! Massenware versus blaue Qualität – Zwetschgenanbau quo vadis? Ausstellung und Infostände Informationen – Gespräche – Gemütlichkeit www.agroscope.ch

Fe wirt stsc ab 1 haft 1:3 im Z 0 elt

6.6.2015 GENETIK DER TIERE

10:00 –17:00

BIENEN VORGESTELLT

VERBAND AM PFERD

TIERSCHUTZ

PONYREITEN

FORSCHUNG AM TIERSPITAL

TIERARZTSTUDIUM DAS SKILLS-LAB

PFERDEFORTPFLANZUNG

LAUFENDER OPERATIONSSAAL

HERZGERÄUSCHE SEHEN & HÖREN

RÖNTGEN RATESPIEL

im tierspital bern NEURO-UNTERSUCHUNG AM KLEINTIER

WEITERE INFOS: WWW.VETSUISSE.UNIBE.CH

WOHER KOMMT DIE MILCH?

STREICHELZOO SCHWEIN

ENTWICKLUNG ZEBRAFISCH

WILDTIER ECKE

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I n t e r v i e w

Heidrun Moschitz: «Les villes devraient s’intéresser davantage à l’alimentation» ration de la jeunesse rurale allemande à Berlin. J’ai ensuite cherché un autre emploi pour me rapprocher des montagnes et j’ai été embauchée au FiBL. Vous avez répondu à une offre d’emploi? Oui, mais je pense que c’est mon mémoire de fin d’études «Gestion durable des sols dans les Alpes» qui m’a ouvert les portes. Il s’intégrait dans un projet européen auquel participait également le FiBL. J’ai ainsi fait la connaissance de collaborateurs du FiBL où l’on ne m’avait pas oubliée quand je me suis manifestée après avoir travaillé six mois sur un projet au Nigeria et un an à Berlin. J’ai obtenu un contrat de deux ans dans le cadre d’un projet européen sur la politique en matière d’agriculture biologique en Europe centrale et orientale.

Heidrun Moschitz travaille depuis douze ans au FiBL, au département des sciences économiques et sociales. Les principales thématiques de cette agronome bavaroise de 40 ans sont les systèmes alimentaires urbains (Urban Food Systems), la sociologie rurale et les questions en lien avec la politique agricole. Outre son intérêt pour l’agriculture biologique, c’est sa passion pour les montagnes qui a motivé sa venue en Suisse. Heidrun Moschitz, vous êtes née dans une petite ville et vous n’avez pas de racines paysannes. Comment se faitil que vous travailliez dans un institut de recherche agronomique? Je me suis toujours intéressée à la politique. Les sciences agronomiques étaient une des orientations possibles dans mes études. Pendant mon premier semestre à l’Université de Weihenstephan, j’envisageais encore de m’investir dans d’autres domaines. Le facteur décisif a été ma rencontre avec d’autres étudiants, qui ont eu l’initiative de créer un cursus associant agriculture et environnement. Il était axé sur l’interface entre l’utilisation du sol, l’écologie et le développement rural, ce qui m’a convaincue. Après mes études, j’ai d’abord travaillé pour la fédé-

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La thèse de doctorat était donc la suite logique de votre activité au FiBL? Oui, pour moi c’était clair, je voulais obtenir le doctorat. Quand j’ai commencé au département des sciences économiques et sociales, nous n’étions qu’une demi-douzaine de chercheurs et pratiquement personne n’était docteur. Mon projet a donc rapidement éveillé l’intérêt de Matthias Stolze, responsable du département. Ma décision a été rapide également: j’étais fascinée par le travail au FiBL où je souhaitais rester et approfondir l’étude des relations entre les politiques. Mon sujet de thèse était «Les réseaux politiques dans l’agriculture biologique européenne». Le directeur actuel de l’OFAG, Bernard Lehmann, qui était alors titulaire de la chaire d’économie agricole à l’ETH Zurich, s’est montré ouvert à ma demande et m’a prise sous son aile, alors que le projet dans lequel s’insérait le travail était déjà très avancé. C’était une bonne chose tant pour moi que pour le département des sciences économiques et sociales du FiBL, car un premier contact a ainsi été établi avec cette chaire de l’ETH Zurich. Vous avez déjà mentionné à plusieurs reprises votre intérêt pour les relations entre les politiques, quelles sont vos motivations? Je ne sais pas exactement ce qui a suscité mon intérêt, mais je me suis engagée très jeune dans des activités politiques et des associations. Avant mes études, je dirigeais un groupe d’enfants pour la Ligue bavaroise de protection de la nature. Pendant mes études, j’ai été


I n t e r v i e w

membre du Comité directeur de l’organisation pour la jeunesse de la Ligue qui compte plus de 25 000 membres. Nous y avons mené de nombreuses discussions politiques et organisé des actions, par exemple sur le thème des OGM et de l’étanchéification de la surface des sols. J’ai ainsi appris beaucoup de choses dans les domaines de la gestion de projets, du développement d’organisations et de la conduite de réunions. Aujourd’hui encore, elles me sont très utiles au FiBL. Comment s’est développé le département des sciences économiques et sociales du FiBL au cours des douze dernières années? D’abord, le nombre de collaborateurs a fortement augmenté. Ensuite, beaucoup de choses ont changé également sur le plan du contenu. Quand j’ai commencé, le département offrait des services de conseils en gestion d’exploitation et en marketing. Depuis cette époque, nous nous sommes fortement développés en tant que département de recherche; les aspects sciences sociales et politiques sont devenus beaucoup plus importants. La durabilité et son évaluation sont de nouveaux éléments qui se sont ajoutés à notre activité depuis que mon collègue Christian Schader a montré dans sa thèse que l’agriculture biologique était un instrument efficace pour atteindre l’ensemble des objectifs majeurs du développement durable. Mon champ d’activité s’est également élargi du fait de ma plus forte implication dans des sujets traitant de sociologie et de sciences politiques. Quelles sont aujourd’hui les principales orientations de votre travail au FiBL? Actuellement, je m’occupe principalement de systèmes alimentaires urbains (Urban Food Systems) dans le cadre de trois projets: «Supurbfood», «Système d’alimentation de Bâle» et «Better Gardens». À cela s’ajoutent, à plus petite échelle, des projets portant sur des modèles innovants de commercialisation de céréales rares et sur le potentiel de l’agriculture biologique en Bulgarie pour le développement des zones rurales, qui comptent parmi les plus pauvres d’Europe. Dans mes recherches, j’accorde également une grande importance à la participation des acteurs concernés et à une approche transdisciplinaire. Il est intéressant d’observer comment différents points de vue peuvent influencer un problème et ses solutions et comment un consensus peut finalement être dégagé.

possibilité d’acquérir une expérience concrète. Toutefois, le système alimentaire urbain est bien davantage que la somme de projets d’agriculture urbaine: c’est la façon dont une ville assure son alimentation. Les trois-quarts de la population suisse vivent aujourd’hui dans des villes et disposent donc d’un potentiel énorme pour influencer le mode de production des aliments. Ce potentiel est encore peu utilisé actuellement. Quelles approches envisagez-vous? Une approche importante consiste à impliquer les responsables publics des achats qui gèrent l’approvisionnement des administrations, des écoles, des hôpitaux et d’autres institutions de soins. Notre politique nutritionnelle doit également devenir plus active. Il est de plus en plus paradoxal qu’à peine 2 % de la population agricole doivent résoudre tous les problèmes. Actuellement, la politique nutritionnelle est principalement une politique agricole. Les consommateurs et leur santé ne sont guère pris en compte. Les politiques agricole, environnementale, sanitaire et de l’aménagement du territoire sont fortement déconnectées les unes des autres. L’alimentation est cependant beaucoup plus que la gestion des sols. Les villes devraient donc s’intéresser davantage à cette question et mettre en place des plateformes permettant un échange entre consommateurs et producteurs. Nous y travaillons en coopération avec les autorités des villes, les utilisateurs de jardins familiaux, les «jardiniers citadins» (Urban Gardeners), les consommateurs, mais aussi avec les agriculteurs. Un des objectifs du FiBL est la transposition rapide des résultats de la recherche dans la pratique, par la vulgarisation. Que pouvez-vous apporter à vos partenaires? Dans le cadre du projet «Solinsa»*, par exemple, nous avons essayé d’identifier les éléments qui freinent la transposition des innovations dans la pratique. Cependant, les résultats de notre travail ne sont pas toujours conçus en vue de la pratique paysanne, nous travaillons souvent avec un objectif politique et cherchons à exercer une influence par cette approche. n Adrian Krebs, FiBL Support of Learning and Innovation Networks for Sustainable Agriculture, (développement de réseaux de formation et d’innovation pour une agriculture durable), projet européen 2011–2014.

*

L’agriculture urbaine est actuellement très en vogue. Effectivement, c’est un bon moyen d’attirer l’attention des citadins sur la question de la nourriture et de l’alimentation. Par ailleurs, l’agriculture urbaine offre la

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Actualités

Nouvelles publications

Rentabilité de la vente directe

Economie Agroscope Transfer | N° 61 / 2015

Rentabilité de la vente directe Prestations brutes et coûts complets de cinq groupes de produits et de quatre catégories de prestations brutes

Plantes Agroscope Fiche technique | N° 19 / 2015

Stratégie de lutte contre Drosophila suzukii en vergers haute-tige Auteurs: Groupe de travail Drosophile du cerisier (Groupe d’accompagnement Arboriculture)

Avril 2015

Afin d’étudier la rentabilité de la vente directe, huit exploitations dont la prestation brute de la vente directe est supérieure à Fr. 10 000.– ont été analysées. Les prestations réalisées ont été comparées aux coûts complets des cinq groupes de produits suivants: fruits et légumes, oeufs, viande, jus et moûts ainsi que vins et spiritueux. Tandis que les trois groupes de produits oeufs, viande, vins et spiritueux ont permis une valorisation du travail, c.-à d. une indemnisation du travail fourni par la main-d’œuvre familiale de plus de Fr. 28.– de l’heure (coûts d’opportunité), les deux autres groupes de produits fruits et légumes ainsi que jus et moûts se situaient en dessous de ce seuil. Par conséquent, la rentabilité étant très hétérogène d’un groupe de produits à l’autre, il n’est pas possible de tirer de conclusions sur la rentabilité des produits transformés et non transformés en général. L’évaluation des huit exploitations par catégorie de prestations brutes (chiffres d’affaires) donne un résultat similaire. Il n’est pas possible d’observer un net effet d’échelle, car la catégorie de prestation brute moyenne atteint, avec Fr. 45.80 par heure de main-d’oeuvre (MOh), une valorisation du travail nettement meilleure que la catégorie supérieure qui affiche une prestation environ deux fois plus élevée, mais une valorisation du travail de Fr. 27.40 par MOh. L’influence des canaux de commercialisation qui demandent peu de travail (p. ex. livraison à domicile ou livraison à des détaillants) et l’assortiment proposé jouent apparemment un plus grand rôle que les économies liées à la taille de l’exploitation. La structure des coûts est dominée par les coûts spécifiques de la marchandise vendue (deux tiers) et le travail investi (un quart). Les autres postes de coûts comme la part de frais généraux de l’exploitation ne représentent pas plus de 10 %. Sommaire

Auteurs

Hauke Reitz Daniel Hoop Markus Lips

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Photo: Lukas Egloff, Agroscope

Introduction Méthode Résultats Conclusions Bibliographie Remerciements Impressum

En termes de prestation brute, la commercialisation directe est le plus important secteur de la para-agriculture.

Afin d’étudier la rentabilité de la vente directe, huit exploitations dont la prestation brute de la vente directe est supérieure à Fr. 10 000.– ont été analysées. Les prestations réalisées ont été comparées aux coûts complets des cinq groupes de produits suivants: fruits et légumes, œufs, viande, jus et moûts ainsi que vins et spiritueux. Tandis que les trois groupes de produits œufs, viande ainsi que vins et spiritueux ont permis une valorisation du travail, c.-àd. une indemnisation du travail fourni par la main-d’œuvre familiale de plus de Fr. 28.– de l’heure (coûts d’opportunité), les deux autres groupes de produits fruits et légumes ainsi que jus et moûts se situaient en dessous de ce seuil. Par conséquent, la rentabilité étant très hétérogène d’un groupe de produits à l’autre, il n’est pas possible de tirer de conclusions sur la rentabilité des produits transformés et non transformés en général. L’évaluation des huit exploitations

par catégorie de prestations brutes (chiffres d’affaires) donne un résultat similaire. Il n’est pas possible d’observer un net effet d’échelle, car la catégorie de prestation brute moyenne atteint, avec Fr. 45.80 par heure de main-d’œuvre (MOh), une valorisation du travail nettement meilleure que la catégorie supérieure qui affiche une prestation environ deux fois plus élevée, mais une valorisation du travail de Fr. 27.40 par MOh. L’influence des canaux de commercialisation qui demandent peu de travail (p. ex. livraison à domicile ou livraison à des détaillants) et l’assortiment proposé jouent apparemment un plus grand rôle que les économies liées à la taille de l’exploitation. La structure des coûts est dominée par les coûts spécifiques de la marchandise vendue (deux tiers) et le travail investi (un quart). Les autres postes de coûts comme la part de frais généraux de l’exploitation ne représentent pas plus de 10 %.

Hauke Reitz, Daniel Hoop et Markus Lips

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Mars 2015 En 2014, la drosophile du cerisier (DC) a occasionné d’importants dégâts dans le s vergers haut e-tige de cerises et de prune s. Avec une récolte abondante, de nombreux fruits destinés à la distillation ou à la conserve ont éclatés suite à la météo défavorable du mois de juillet. Beaucoup de fru its ont été réc oltés trop tard o u pas d u tout, ce qui a favorisé le développement massif de DC. Afin d’éviter pareille situation à l’avenir, les mes ures clé d e protection et d’accompagnement sont pr ésentées ci-après. Objectif: limiter le développement des populations de DC tôt da ns l’année et ne pas créer des conditions de multiplication favorables. Les arbres non-récoltés sont des viviers pour DC et mettent e n danger les arbres et cultures vo isins à matur ité plus tar dive. La responsabilité ainsi que la mise en place de mesures d’hygiène et de la gestion de la récolte sont du ressort des producteurs.

Surveillance: Piège Riga, Piège Agroscope, Piège en PET avec des trous de 3mm

1. Surveillance: Pour la détection précoce de DC, les arbres situés en bordure et proches d’ habitats naturels (haies, forêts, etc.) peuvent être surveillés à l’aide de plusieurs pièges Riga ou modèles comparables et c ontrôlés hebdomadairement pour la présence de l’insecte. En c as de c apture, il faut s’ attendre à des dégâts sur les fruits. Tamiser le liq uide, faire tomber les insectes dans une cuvette blanche et diluer avec de l’eau. Identifier les mâles à leurs caractéristiques et les com pter. Le niv eau des captures peut également être comparé à celles enregistrées régulièrement sur www.drosophilasuzukii.agroscope.ch. 2. Contrôles d‘attaque: Des contrôles réguliers d’au moins 50 fruits par éch antillon aident à détecter les infestations précoces et permettent d’adapter rapidement la gestion de la r écolte et de la protection phytosanitaires, d’intensifier les mesures d’hygiène et d’anticiper la récolte si nécessaire. Contrôler les échantillons pour les pontes et les piqûres de pontes et/ou l es placer 2h dans de l’eau tiède salée et contrôler les asticots. 3. Mesures d‘hygiène: Les arbres no n-récoltés ou récoltés trop tard sont des foyers de multiplication pour DC et mettent en danger les cultures plus tar dives. Les fruit s mûrs doiv ent être régulièrement récoltés a u moment optimal. Eliminer les fruits attaqués (fosse à lisier, tonneau de fermentation, usine d’incinération, installation de biogaz; ne pas composter!).

Les vergers haute-tige sont très attractifs pour DC

Femelle sur une cerise

Drosophila suzukii: quatre nouvelles fiches techniques publiées en français, allemand et italien ••Drosophila suzukii en viticulture. Recommandations 2015 ••Stratégie de lutte contre Drosophila suzukii dans les fruits à noyaux ••Stratégie de lutte contre Drosophila suzukii en vergers haute-tige ••Drosophila suzukii. Stratégie 2015 pour les petits fruits Disponibles sous: www.agroscope.ch/publikationen ou dans l’application publications Agroscope.


Actualités

Liens internet

Manifestations

Blog du futur de l’ETH de Zurich

Mai 2015

www.ethz.ch/zukunftsblog

13.05.2015 Gesunde und leistungsfähige Nutztiere: Futter an ­Genotyp oder Genotyp an Futter anpassen? Fachtagung ETH Zürich, Vetsuisse Zürich und Bern, Agroscope INT ETH-Zentrum

Le blog du futur de l’ETH de Zurich publie des faits et des points de vue sur la durabilité, en particulier dans les domaines suivants: changement climatique, alimentation mondiale, villes du futur, énergie et ressources naturelles. On trouve parmi les 50 auteur-e-s qui participent au blog du futur de l’ETH non seulement des professeur-e-s de l’ETH et d’autres universités, spécialistes en durabilité, mais aussi des étudiant-e-s de même que des rédacteurs-trices invités du monde politique, économique, des OGN et des autorités.

V Doa rnssc hl ea up r o c h a i n n u m é r o Juin 2015 / Numéro 6 Les céréales sont indispensables à l’alimentation ­humaine et animale. Le numéro de juin de Recherche Agro­ nomique Suisse contient un ­article sur la qualité des ­semences de seigle et de triticale, ainsi que la liste des variétés de céréales recommandées pour la récolte de 2016.

••Causes de la qualité inconstante des semences de seigle et de triticale, Thomas Hebeisen et al., Agroscope ••Examen du ray-grass d’Italie: 37 variétés à l’épreuve, Daniel Suter et al., Agroscope •• Pomme de terre: l’Empire Pectobacterium contreattaque, Patrice de Werra et al., HAFL et Agroscope ••Analyse du cycle de vie des produits agricoles suisses en comparaison avec des produits importés, Maria Bystricky et al., Agroscope •• Potentiel quantitatif de valorisation du petit-lait dans l’alimentation humaine en Suisse, Katrin Kopf-Bolanz, HAFL, Agroscope et ESU-services GmbH ••La santé des abeilles en Suisse, Anja Ebener et ­Benjamin Dainat, Service sanitaire apicole SSA ••Le phosphore dans l’agriculture, Klaus Jarnosch, ETH Zurich ••Pleins feux sur les questions de semences, Thomas Hebeisen, Agroscope ••Liste recommandée des variétés de céréales pour la récolte 2016, Agroscope

31.05.2015 Breitenhof-Tagung 2015, Treffpunkt der Steinobstbranche Agroscope Steinobstzentrum Breitenhof, Wintersingen Juni 2015 06.06.2015 Tag der offenen Türe VetSuisse Fakultät Uni Bern Vetsuisse-Fakultäten Bern und Zürich, Agroscope Tierspital Bern 13.06.2015 Journée suisse des Grandes Cultures Bio FRI, Ebenrain, Bio Suisse, agridea, FiBL et Sativa Courtételle JU Informations: www.grandes-cultures-bio.ch 14. – 17.06.2015 54. IALB-Tagung ( Internationale Akademie landund hauswirtschaftlicher Beraterinnen und Berater) 3. EUFRAS-Konferenz Effizienz in der Land- und Ernährungswirtschaft Agridea Solothurn Informations: http://url.agridea.ch/IALB2015 25.06.2015 Agroscope: 125 Jahre Forschung in Wädenswil Agroscope Wädenswil Octobre 2015 29.10.2015 Selection and spread of antibiotic resistances in ­agro-ecosystems and food production environments Agroscope IPA Institut agricole de Grangeneuve IAG, 1725 Posieux

Informationen: Informations: www.agroscope.admin.ch/veranstaltungen www.agroscope.admin.ch/manifestations

Recherche Agronomique Suisse 6 (5): 234–235, 2015

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Journée suisse des Grandes Cultures Bio 13 juin 2015 à Courtételle JU • Démonstrations de machines • Techniques culturales • Variétés et fumure • Pour Bio et PER

Profitez d’une visite guidée et découvrez trois exploitations biologiques de pointe de la région le vendredi 12 juin.

Plus d’informations sur la visite d’exploitations (vendredi) et sur la journée des grandes cultures (samedi) sur www.grandes-cultures-bio.ch.

Organisateurs

Jeudi, 29 octobre 2015

Selection and spread of antibiotic resistances in agro-ecosystems and food production environments

Topics: • Fate and effects of antibiotics in organic fertilizers on soil bacteria: Dr Kornelia Smalla • Antibiotic resistance in environmental microbiomes and their selective transfer: Dr Fiona Walsh • Rational antimicrobial use in animals: from theory to practice, Dr Luca Guarabassi • Preliminary results of the Agroscope research program “REDYMO”, which emphasizes on the reduction and dynamics of antibiotic-resistant and persistent microorganisms along the food chain, and other Swiss research projects on antibiotic resistance in the environment

Public-cible scientifique: agronomes, vétérinaires, microbiologistes, spécialistes de l’environnement, autres personnes intéressées Langue: anglais Lieu: Institut agricole de Grangeneuve IAG, 1725 Posieux Durée: de 9h00 à 15h00 Frais: Repas de midi à la charge des participant-e-s Inscription et renseignements: sophie.thanner@agroscope.admin.ch Délai d’inscription: 30.9.2015


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