Afs 01 13 f

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Recherche Agronomique Suisse 2 0 1 3

|

N u m é r o

2

Agroscope | OFAG | HAFL | AGRIDEA | ETH Zürich

F é v r i e r

Production animale Engraissement de poulets et de lapins de chair suisses; rejets d’azote, de phosphore et de ­potassium

Pages 60 et 92

Production végétale Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils ­limitants?

Page 74

Eclairage Surfaces nécessaires à l'alimentation de l’agglomération bâloise mises en image

Page 88


Sommaire Février 2013 | Numéro 2 Dans l’engraissement de poulets et de lapins de chair, les rejets d’azote, de phosphore et de potassium sont importants. Deux chercheurs (ALP-Haras et HAFL) ont analysé les teneurs en éléments nutritifs dans les aliments pour animaux, la viande et les rejets de poulets et de lapins de chair de production suisse. Leurs résultats sont résumés dans deux article du présent numéro. (Photo: Bell AG, Zell) Impressum Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz est une publication des stations de recherche agronomique Agroscope et de leurs partenaires. Cette publication paraît en allemand et en français. Elle s’adresse aux scientifiques, spécialistes de la recherche et de l’industrie, enseignants, organisations de conseil et de vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux, praticiens, politiciens et autres personnes intéressées. Editeur Agroscope Partenaires bA groscope (stations de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW; ­ Agroscope Liebefeld-Posieux et Haras national suisse ­A LP-Haras; Agroscope Reckenholz-Tänikon ART) b Office fédéral de l’agriculture OFAG, Berne b Haute école des sciences agronomiques forestières et alimentaires HAFL, Zollikofen b Centrale de vulgarisation AGRIDEA, Lausanne et Lindau b E cole polytechnique fédérale de Zurich ETH Zürich, Département des Sciences des Systèmes de l'Environnement Rédaction Andrea Leuenberger-Minger, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, Tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Judith Auer, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, Case postale 1012, 1260 Nyon 1, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch

59 Editorial 60

Production animale Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium Patrick Schlegel et Harald Menzi

Environnement 68 Symbiontes et arthropodes  –  quelles ­implications pour la lutte biologique? Alexandre Aebi et Renate Zindel Production végétale 74 Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants? Lucie Gunst, Walter Richner, Paul Mäder et Jochen Mayer Production végétale 82 Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides) Stéphanie Schürch et Thibaut Cordette Eclairage 88 Surfaces nécessaires à l'alimentation de ­l’agglomération bâloise mises en image Adrian Moser et Claude Lüscher

Team de rédaction Président: Jean-Philippe Mayor (Directeur général ACW), Sibylle Willi (ACW), Evelyne Fasnacht (ALP-Haras), Etel Keller-Doroszlai (ART), Karin Bovigny-Ackermann (OFAG), Beat Huber-Eicher (HAFL), Esther Weiss (AGRIDEA), Brigitte Dorn (ETH Zürich)

Eclairage 92 Teneurs en azote et en minéraux des ­poulets de chair Patrick Schlegel et Harald Menzi

Abonnements Tarifs Revue: CHF 61.–*, TVA et frais de port compris (étranger + CHF 20.– frais de port), en ligne: CHF 61.–* * Tarifs réduits voir: www.rechercheagronomiquesuisse.ch

Eclairage L’agriculture brésilienne a le vent en poupe 96 Urs Gantner

Adresse Nicole Boschung, Recherche Agronomique Suisse/Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Changement d'adresse e-mail: verkauf.zivil@bbl.admin.ch, Fax +41 31 325 50 58 Internet www.rechercheagronomiquesuisse.ch www.agrarforschungschweiz.ch ISSN infos ISSN 1663 – 7917 (imprimé) ISSN 1663 – 7925 (en ligne) Titre: Recherche Agronomique Suisse Titre abrégé: Rech. Agron. Suisse © Copyright Agroscope. Tous droits de reproduction et de traduction réservés. Toute reproduction ou traduction, partielle ou intégrale, doit faire l’objet d’un accord avec la rédaction.

Indexé: Web of Science, CAB Abstracts, AGRIS

99 Portrait 100 Actualités 103 Manifestations Listes variétales Encarts Listes recommandées des variétés de soja et pois protéagineux pour la récolte 2013 Raphaël Charles et Jürg Hiltbrunner Liste recommandée des variétés de tournesol pour la récolte 2013 Didier Pellet Liste recommandée des variétés de maïs ­ pour la récolte 2013 Alice Baux, Jürg Hiltbrunner, Jean-François Collaud, Ulrich Buchmann et Mario Bertossa


Editorial

R & D dans la culture du colza: coup d’œil dans le rétroviseur et perspectives Chère lectrice, cher lecteur,

Didier Pellet, chef de groupe Céréales panifiables, Oléagineux, Pomme de terre; Agroscope ­ACW

En Suisse, les surfaces de colza ont augmenté de 60 % ces 15 dernières années. Si l’utilisation industrielle de l’huile de colza comme bio carburant contribue à son expansion au niveau européen et mondial, c’est l’usage principalement alimentaire qui soutient son développement en Suisse. A l’heure où Agroscope organise un symposium international sur le colza du 28 avril au 1er mai 2013 à Changins, revenons sur l’évolution de la culture en Suisse et sur les résultats obtenus par Agroscope pour améliorer la productivité du colza et la qualité de son huile. Les rendements du colza ont progressé de 5 dt/ha en 12 ans et sont comparables à ceux obtenus en France, même si un quart des surfaces est cultivé en Suisse en «extenso». Le choix des variétés les mieux adaptées à nos conditions a significativement contribué à cette progression de productivité. L’adoption rapide de variétés hybrides par les agriculteurs suisses (87 % des surfaces en 2006, contre 25 % en France) a permis de réduire de 40 % les densités de semis élevées pratiquées antérieurement. Pour tenir compte de la progression des rendements, la norme de fumure azotée du colza a été relevée de 20 unités et atteint aujourd’hui, sous certaines conditions, 160 kg N/ha. Avec la baisse bienvenue des polluants soufrés dans l’air, des apports de 30 ou 60 kg S/ha sont désormais souvent nécessaires pour éviter les carences. Malgré l’affinement de ces techniques et d’autres succès en protection des végétaux, des variations annuelles de rendement de plus de 30 % restent encore difficiles à maîtriser. La météo durant la période de floraison du colza (rayonnement/température) explique la moitié de cette variabilité. En matière de qualité, la composition en acides gras de l’huile est essentielle. La teneur élevée en Omega-3 (8 à 10 %) du colza classique pour la cuisine froide est bénéfique pour la santé humaine. Le colza HOLL représente aujourd’hui 30 % des surfaces. Pour résister aux hautes températures de la friture, son huile doit avoir une teneur en Omega-3 aussi basse et stable que possible (actuellement 2,5 à 3 % ). On sait maintenant que le contrôle des repousses de colza classique dans un champ de colza HOLL et la température durant la croissance du grain sont les deux facteurs qui influencent le plus la teneur en Omega-3, donc la qualité et la valeur du produit. Ces prochaines années, il s’agira d’obtenir des teneurs inférieures à 2 % d’Omega-3 pour le colza HOLL, grâce à de nouvelles variétés, un contrôle encore plus efficace des repousses de colza classique et une meilleure compréhension des effets du climat sur la synthèse des acides gras. Pour les deux segments de marché, la proportion de colza dans la rotation devra être redéfinie et des techniques culturales toujours plus économes en intrants développées. A plus long terme, la R&D d’Agroscope devra contribuer à d’autres améliorations pour une agriculture compétitive et une alimentation saine au profit de notre société.

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 59, 2013

59


P r o d u c t i o n

a n i m a l e

Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium Patrick Schlegel1 et Harald Menzi2 Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP-Haras, 1725 Posieux, Suisse 2 Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL, 3052 Zollikofen, Suisse Renseignements: Patrick Schlegel, e-mail: patrick.schlegel@alp.admin.ch, tél. +41 26 407 72 75 1

production cunicole, le flux en éléments nutritifs de l’azote (N), du phosphore (P) et du potassium (K) issu de cette branche de production peut représenter une part essentielle des flux en éléments nutritifs de l’exploitation agricole. Les rejets d’éléments nutritifs s’appuient, selon les «Données de base pour la fumure des grandes cultures et des herbages» (Sinaj et al. 2009), sur des calculs de 1990 effectués à partir de données provenant d’exploitations cunicoles mixtes et sans consommation de fourrage. Certes, des valeurs séparées pour les lapines et les lapins d’engraissement ont été dérivées plus tard, mais sans l’intégration de nouvelles données de production ou d’indications relatives à l’alimentation (Agridea et OFAG 2010). Ce travail visait à relever, par le biais d’une enquête, les flux en éléments nutritifs de la production cunicole professionnelle. Les teneurs en éléments nutritifs des rations et des lapins prêts à l’abattage ont été réévaluées et les rejets de N, de P et de K ont été calculés séparément pour l’élevage et l’engraissement.

Matériel et méthodes

Portée de lapereaux nouveaux-nés. (Photo: ALP-Haras)

Introduction Au cours des 20 dernières années, la détention professionnelle de lapins s’est profondément modifiée en raison de la production séparée de l’élevage et de l’engraissement. De plus, avec l’apparition de grandes unités de

60

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

La présente enquête a été menée auprès de sept exploitations d’élevage et douze exploitations d’engraissement, affiliées à deux organisations de production. Sur chaque exploitation, on a recensé des données de production (mode de détention, génétique, alimentation et performances) de même que le nombre d’animaux et de places utilisées. Les données de production suivantes ont été relevées: a) poids vif (PV) moyen des lapines, cycle de saillie, nombre de portées par an, quantité de fourrage et d’aliment concentré distribuée par an, b) âge de sevrage des lapereaux, PV au sevrage, quantité de fourrage et d’aliment concentré distribuée par an, c) âge et PV des lapereaux lors du transfert à l’engraissement, nombre d’animaux transférés par an à l’engraissement, quantité de fourrage et d’aliment concentré distribuée par an, d) taux de remontes, quantité de fourrage et d’aliment concentré distribuée par an, e) nombre de places utilisées par des lapins d’engraissement, rotations annuelles, jours


Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium | Production animale

Ce travail visait à relever, par le biais d’une enquête, la consommation de fourrage et les rejets d’azote (N), de phosphore (P) et de potassium (K) dans des exploitations d’élevage et d’engraissement cunicole professionnel. Les lapines avaient en moyenne 6,4 portées par an. Les lapereaux étaient sevrés entre 24 et 35 jours en fonction du mode de détention post-sevrage. En engraissement, 5,2 rotations ont été effectuées par an, un poids à l’abattage de 2,9 kg a été obtenu avec un gain de poids de 42 g/jour et un indice de consommation de 4,17. Basées sur la matière fraîche, les teneurs corporelles en N, en P et en K s’élevaient à respectivement 30,4, 6,5 et 3,1 g/kg et les teneurs alimentaires à des valeurs entre 21,4 et 23,8 g N, 5,0 et 6,0 g P et entre 13,5 et 14,9 g K selon la catégorie animale. La part de fourrage dans la ration était de 20 % chez les lapines, 15 % chez les remontes et 9 % chez les lapins d’engraissement. Les rejets annuels de N et de P se sont révélés plus bas dans l’élevage et plus élevés dans l’engraissement que les valeurs utilisées jusqu’à présent. Les rejets annuels de K étaient sensiblement plus élevés dans la production cunicole que supposé jusqu’à présent.

Résumé

de vide sanitaire, âge et PV des animaux en début et en fin d’engraissement, taux de mortalité. Dans chaque exploitation, des échantillons des aliments concentrés distribués ont été prélevés et analysés quant à leur teneur en matière sèche (MS), en N, en P et en K. Les rejets d’éléments nutritifs (N, P et K) ont été déterminés au moyen d’un bilan import/export pour chaque exploitation, en tenant compte des données relatives à l’alimentation et aux performances spécifiques de chacune d’elles. Dans les exploitations d’élevage, la quantité de fourrage et d’aliment concentré distribuée aux lapines et aux lapereaux a été prise en compte pour l’import d’éléments nutritifs. Le PV des lapereaux lors du transfert à l’engraissement a été quant à lui pris en compte pour l’export d’éléments nutritifs. Dans les exploitations d’engraissement, c’est le PV de début d’engraissement et la quantité de fourrage et d’aliment concentré distribuée qui ont été pris en compte pour l’import d’éléments nutritifs et, pour l’export d’éléments nutritifs, le PV de fin d’engraissement, les jours d’engraissement et le taux de mortalité. La différence entre import et export d’éléments nutritifs représente la quantité rejetée d’éléments nutritifs issue de la production cunicole et accumulée sur l’exploitation agricole. Pour toutes les exploitations, les mêmes teneurs ont été utilisées pour le fourrage (foin extenso avec 69 g MA, 2 g P, 17 g K/kg MF) et pour les animaux. Les rejets d’éléments nutritifs ont été calculés pour quatre catégories: «lapine», «remonte âgée de < 100 jours», «remonte âgée de > 100 jours» et «lapin d’engraissement». Les rejets annuels d’éléments nutritifs des exploitations d’élevage ont été indiqués, pour les lapines, par lapine et par an ou par 100 lapereaux transférés à l’engraissement et, pour les remontes, par animal ou par lapine. Quant aux rejets annuels en éléments nutritifs des exploitations d’engraissement, ils ont été indiqués par place d’engraissement et par an de même que par 100 animaux vendus. La teneur en éléments nutritifs des lapins a été déterminée sur quatre lapins prélevés à l’abattoir (corps entiers, y compris abats, saignés, peau séparée du corps, congelés). Le sang n’a pas été récupéré. Avant la préparation des échantillons, les corps et les peaux ont été pesés. Les corps ont été dépecés en petits morceaux, congelés avec de l’azote liquide puis finement moulus (1 mm). Chaque morceau de corps moulu a été lyophilisé puis rassemblé en un seul échantillon par animal. Un échantillon a été coupé dans chaque peau de lapin. Les échantillons de corps et de peau ont été analysés quant à leur matière sèche (MS) et leurs teneurs en cendres brutes (CB), en N, en Ca, en P, en Mg, en K, en Na, en Cu, en Fe, en Mn et en Zn.

Tableau 1 | Teneur corporelle de lapins d'engraissement par kg MS

par kg MF

Ø

e-type

Ø 333

38

30,4

3,6 6,4

MS

[g]

N

[g]

91,3

10,8

e-type

CE

[g]

113,0

19,1

37,6

Ca

[g]

30,1

5,9

10,0

1,9

P

[g]

19,5

3,1

6,5

1,0

Mg

[g]

1,3

0,3

0,4

0,1

Na

[g]

3,5

0,6

1,2

0,2

K

[g]

9,2

0,9

3,1

0,3

Cu

[mg]

9,0

2,7

3,0

0,9

Fe

[mg]

111,9

23,1

37,2

7,7

Mn

[mg]

11,2

3,9

3,7

1,3

Zn

[mg]

82,1

15,3

27,3

5,1

norme1 25,0

5,0

2,0

Agridea et OFAG, 2010.

1

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

61


Production animale | Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium

Figure 1 | Lapines détenues en groupe. (Photo: ALP-Haras)

Après incinération, la teneur minérale a été analysée par spectrométrie d’émission optique à plasma et couplage inductif (ICP-OES, Optima 7300 DV Perkin-Elmer, Waaltham, USA). La teneur en N a été déterminée après digestion du matériel (Digestor, Foss; Suède) au moyen de la méthode de Kjeldahl (Kjeltec 2400/2460, Foss, Suède). La MS et les cendres brutes ont été déterminées à une seule reprise, les teneurs en minéraux et en N à deux reprises et la teneur en N de la peau à quatre reprises.

Résultats et discussion Performances de production Les performances de production des exploitations d’élevage figurent dans le tableau 2. Les exploitations d’élevage ayant participé à l’enquête (fig. 1) se différencient, selon l’organisation de production à laquelle elles sont affiliées, par le mode de détention (individuel ou en groupe) et la génétique (hybrides Zika et Hycole). Après

Tableau 2 | Performances de production des élevages cunicoles

Lapines

Lapereaux sevrés

unité

Ø

e-type

Min

Max

PV

[kg]

4,6

0,4

4,0

5,1

Cycle de saillie

[Jours]

38

7

32

51

Mises bas

[N/lapine/an]

6,4

1,1

4,5

7,8

Laperaux sevrés

[N/lapine/an]

45

10

33

60

Age de sevrage

[Jours]

28

4

24

35

PV laperaux sevrés

[kg]

0,60

0,18

0,45

0,90

0,60

Consommation

[g/jour]

376

54

274

446

400

Nombre

[N/lapine/an]

44

9

33

57

Consommation

[g/jour]

89

28

66

128

Gain de poids

[g/jour]

29

6

22

35

3,17

0,98

1,89

4,04

33

3

28

36

IC Age début engraissement

Remontes < 100 jours d'âge Remontes > 100 jours d'âge

[Jours]

PV début engraissement

[kg]

0,74

0,13

0,50

0,90

Nombre

[N/lapine/an]

0,36

0,16

0,12

0,46

Consommation

[g/jour]

125

15

111

143

Nombre

[N/lapine/an]

0,23

0,13

0,04

0,30

Consommation

[g/jour]

405

26

373

434

Agridea et OFAG, 2010.

1

62

norme1

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

40

3,20 0,60


Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium | Production animale

Figure 2 | Lapereaux détenus en nurserie durant une à deux semaines. (Photo: ALP-Haras)

le sevrage, les lapins ont été transférés directement dans les bâtiments d’engraissement (âge de sevrage entre 30 et 35 jours) ou détenus 6 à 11 jours supplémentaires dans une «nurserie» (âge de sevrage entre 24 à 26 jours; catégorie animale: lapereaux, fig. 2) avant d’être transférés dans les bâtiments d’engraissement. Le nombre de lapins sevrés par lapine et par an (Y) dépendait surtout du cycle de saillie ou du nombre de portées (Y = 10,5 + 0,92 × cycle de saillie, P = 0,08, R2 = 0,48; Y = 5,3 + 6,3 × nombre de portées, P = 0,06, R2 = 0,53), ce qui explique

sa grande variabilité (22 %). Lors du transfert à l’engraissement, le PV des lapins dépendait de l’âge et de la durée de séjour dans la nurserie. La remonte de lapines a été réalisée soit par élevage au sein même de l’exploitation (taux moyen: 60 %) et/ou par l’achat de jeunes lapines non portantes (âgées d’environ 100 jours). Les exploitations d’engraissement ayant participé à l’étude (fig. 3) détenaient leurs lapins en groupes avec un système de stabulation particulièrement respectueux des animaux (SRPA). La génétique utilisée étaient majo- 

Tableau 3 | Performances de production en engraissement cunicole unité

Ø

e-type

Min

Max

Animaux vendus

[N/an]

2562

1243

987

5401

Rotations

[N/an]

5,2

0,2

5,0

5,5

[jours/rotation]

53,3

6,3

42,6

63,0

Durée d'engraissement Vide sanitaire2 PV début engraissement

[jours entre rotations]

17,5

5,6

10,0

28,0

[kg/animal]

0,73

0,11

0,60

0,92

norme1 8,0

[kg/animal]

2,94

0,18

2,58

3,20

Gain de poids

[g/animal/jour]

42,0

6,4

33,5

59,4

49,0

Consommation3

[g/animal/jour]

175

35

134

254

210 4,29

PV fin engraissement

4,17

0,59

3,25

5,50

[%]

9,3

3,5

1,8

14,0

[kg/place/an]

11,4

1,2

9,4

13,9

IC Mortalité Production de PV4

Agridea et OFAG, 2010. 2 Vide sanitaire = (365 - durée d'engraissement × rotations) / rotations. 3 Dès la 2e semaine d'engraissement, le taux de mortalité était pris en compte pour la détermination des consommations. 4 Production de PV = Gain de poids × durée d'engraissement × rotations. 1

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

63


Production animale | Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium

Figure 3 | Lapins engraissés en groupe. (Photo: ALP-Haras)

ritairement l’hybride Zika, à l’exception de deux exploitations qui détenaient l’hybride Hycole. Les performances de production des 12 exploitations d’engraissement figurent dans le tableau 3. La consommation, le taux de mortalité et les jours de vide sanitaire présentent des coefficients de variation de plus de 20 %. La variation du taux de mortalité et de la consommation alimentaire a été influencée par une exploitation en particulier qui possédait un nouveau bâtiment d’engraissement, dans lequel les souillures, les bactéries et d’autres facteurs de stress immunitaires ne s’étaient pas encore établis et qui ont fort probablement contribué à un taux de mortalité faible et à une consommation élevée. L’indice de consommation (consommation alimentaire/gain de poids, IC) présente un coefficient de variation de 15 %. Celui-ci a été influencé par une exploitation en particulier, dans

64

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

laquelle la consommation de fourrage était importante (35 g/animal/jour). La taille des exploitations (nombre d’animaux vendus par an) n’a pas exercé d’influence sur les données de production. Teneurs et consommation de fourrage Les lapins pesaient 2,78 ± 0,19 kg et leurs teneurs en éléments nutritifs figurent dans le tableau 1. Les teneurs corporelles en N, en P et en K étaient légèrement plus élevées que les valeurs utilisées jusqu’à présent (respectivement 25, 5 et 2 g/kg PV, Agridea et OFAG, 2010). Ces dernières se situent toutefois dans l’intervalle des écarts types respectifs. Comparées aux teneurs utilisées jusqu’à présent pour le calcul des bilans (Agridea et OFAG 2010), les teneurs des rations d’élevage (tabl. 4) étaient inférieures de 12 % pour N et de 20 % pour P, et supérieures


Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium | Production animale

Tableau 4 | Teneurs des rations alimentaires [g/kg MF] Ø Lapines

Lapereaux sevrés

Remontes

Engraissement

e-type

Min

Max

norme1

N

23,0

1,5

20,1

24,8

26,2

P

5,6

0,3

5,0

5,9

6,7 9,0

K

13,5

1,8

10,7

14,8

N

23,6

0,4

23,3

24,1

P

5,2

0,1

5,1

5,4

K

14,9

0,1

14,9

15,0

N

21,4

1,3

20,3

23,3

P

5,0

0,2

4,7

5,2

K

14,3

1,5

11,5

15,1

N

23,8

0,7

22,4

24,7

P

6,0

0,2

5,5

6,3

6,7

K

13,8

1,2

10,1

14,6

9,0

26,2

Agridea et OFAG, 2010.

1

de 50 % pour K. Quant aux rations d’engraissement (tabl. 4), les teneurs étaient inférieures de 10 % pour N et P et supérieures de 54 % pour K par rapport aux teneurs utilisées jusqu’à présent pour le calcul des bilans (Agridea et OFAG 2010). Autrefois, la distri­ bution de fourrage, qui est caractérisé par des teneurs en N et en P plus basses et en K plus élevées que les aliments concentrés, était négligeable dans la production cunicole, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Avec 6,0 ± 0,2 g P / kg MF dans la ration d’engraissement (~ 88 % MS), on dispose encore de suffisamment de marge pour réduire les apports en P, car selon Lebas et al. (1998), aucun effet négatif sur la croissance et la résistance à la rupture de l’os n’a été observé avec une teneur alimentaire passant de 6,6 à 3,0 g P/kg. De même, Renouf et al. (2009) n’ont pas constaté de répercussion négative sur la croissance des lapins lorsque la ration d’engraissement était réduite de 6,0 à 3,5 g P/kg MF (~88 % MS). En revanche, les rejets de P ont été réduits de 50 %. La consommation de fourrage et les rejets d’éléments nutritifs des lapines (y compris les lapereaux), des remontes (âgées de >100 jours jusqu’à la 1re mise bas) et des lapins d’engraissement figurent dans le tableau 5. La part de fourrage de la ration s’élevait à 20 ± 9 % chez les lapines, à 14 ± 4 % chez les remontes âgées de >100 jours et à 8,9 ± 5 % chez les lapins d’engraissement. La variabilité des quantités de fourrage distribuées était toutefois élevée: 40 % chez les lapines, 63 % chez les remontes et 51 % dans les exploitations d’engraissement.

Rejets des exploitations d’élevage Les rejets annuels d’éléments nutritifs des lapines étaient accrus en fonction de l’augmentation du nombre de portées. Les rejets annuels de N et de P des lapines étaient de respectivement 19 et 25 % plus bas que les valeurs d’Agridea et de l’OFAG (2010), mais de respectivement 31 et 9 % plus élevés que les données communiquées par Qualinova (2008). Il en va de même lorsque les rejets sont exprimés par 100 lapereaux transférés à l’engraissement. Les différences des teneurs alimentaires et le PV supérieur de 18 % des lapereaux sont les raisons principales pouvant expliquer les différences avec les valeurs d’Agridea et de l’OFAG (2010). La part rejetée de N, de P et de K ingérés par les lapines est de respectivement 71, 75 et 95 %. Les rejets d’éléments nutritifs et la consommation de fourrage des remontes âgées de <100 jours s’élevaient en moyenne à 16,8 kg N, 3,9 kg P 11,7 kg K et à 1,39 dt MS par 100 animaux et correspondaient aux rejets des lapins d’engraissement. Les rejets de N, de P et de K et la consommation de fourrage des remontes entre le sevrage et la 1re mise bas (remontes âgées de < 100 jours et remontes âgées de > 100 jours) ne s’élevaient respectivement qu'à 4,9, 4,4, 5,2 et 3,1 % de ceux des lapines et se situaient dans l’intervalle de variation des valeurs relatives aux lapines. Rejets des exploitations d’engraissement Chez les lapins d’engraissement, les rejets annuels de N, de P et de K présentaient des coefficients de variation élevés (de 20 à 22 %). L’indice de consommation (IC) a influencé ces rejets de façon linéaire (N [kg / 100 ani- 

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

65


Production animale | Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium

Tableau 5 | Consommation de fourrage et rejets en éléments nutritifs en production cunicole

Par animal Lapines Par 100 lapereaux transférés en engraissement

Par animal Remontes > 100 jours d'âge à 1re mise bas Par lapine

Par 100 animaux Engraissement Par place d'engraissement

unité

Ø

e-type

Min

Max

N

[kg/an]

2,58

P

[kg/an]

0,65

K

[kg/an]

Fourrage N

norme1

0,64

1,76

3,26

3,20

0,14

0,41

0,78

0,86

2,05

0,53

1,05

2,55

1,27

[dt MS/an]

0,363

0,158

0,147

0,585

0,000

[kg]

6,07

1,91

3,23

9,61

8,00 2,15

P

[kg]

1,51

0,43

0,91

2,30

K

[kg]

4,74

1,28

3,15

6,77

3,17

Fourrage

[dt MS]

0,829

0,325

0,383

1,183

0,000

N

[kg]

0,252

0,068

0,192

0,320

P

[kg]

0,060

0,015

0,042

0,075

K

[kg]

0,258

0,059

0,181

0,313

Fourrage

[dt MS]

0,023

0,006

0,016

0,031

N

[kg/an]

0,062

0,039

0,008

0,091

P

[kg/an]

0,014

0,009

0,002

0,021

K

[kg/an]

0,065

0,039

0,008

0,095

Fourrage

[dt MS/an]

0,006

0,004

0,001

0,009

N

[kg]

15,22

3,21

8,87

20,88

14,10

P

[kg]

4,12

0,91

2,51

5,77

3,90

K

[kg]

12,04

2,38

8,54

16,92

6,40

Fourrage2

[dt MS]

0,820

0,467

0,221

2,086

0,000

N

[kg/an]

0,79

0,17

0,44

1,04

0,60

P

[kg/an]

0,21

0,05

0,13

0,29

0,16

K

[kg/an]

0,62

0,13

0,43

0,85

0,26

Fourrage2

[dt MS/an]

0,042

0,023

0,011

0,104

0,000

Agridea et OFAG, 2010. Dès la 2e semaine d'engraissement, le taux de mortalité était pris en compte pour la détermination des consommations.

1 2

maux] = 3,85 × IC (P<0,001, R2 = 0,99, ETR = 1,7; P [kg / 100 animaux] = 1,03 × IC (P<0,001, R2 = 0,99, ETR = 0,48; K [kg / 100 animaux] = 2,92 × IC (P<0,001, R2 = 0,99, ETR = 1,25). Les rejets de N, de P et de K des lapins d’engraissement (par place et par an) étaient de respectivement 31, 33 et 139 % plus élevés que les valeurs d’Agridea et de l’OFAG (2010). Le nombre de rotations annuelles plus élevé (5,2 contre 4,0 chez Agridea et l’OFAG, 2010) explique ces différences. Toutefois, lorsque les rejets sont exprimés sur la base de 100 animaux vendus, les rejets de N et de P étaient comparables (respectivement de + 8 et + 6 %), mais les rejets en K étaient sensiblement plus élevés (+ 88 %) par rapport à ceux d’Agridea et de l’OFAG (2010). Les rejets d’éléments nutritifs des lapins d’engraissement étaient comparables aux valeurs communiquées par Qualinova (2008). La part rejetée de N, de P et de K ingérés par les lapins d’engraissement est de respectivement 59, 65 et 93 %.

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 60–67, 2013

Conclusions ••Les résultats de cette enquête montrent que les teneurs corporelles en N, en P et en K des lapins d’engraissement étaient légèrement plus élevées que les valeurs utilisées jusqu’à présent. ••Les teneurs en N et en P des rations étaient plus basses et la teneur en K plus élevée que les valeurs utilisées jusqu’à présent. La part de fourrage dans la ration correspondait à respectivement 20, 15 et 9 % chez les lapines, les remontes âgées de >100 jours et les lapins d’engraissement. ••Dans l’élevage, les rejets annuels de N et de P étaient plus bas et dans l’engraissement plus élevés que les valeurs utilisées jusqu’à présent. ••Les rejets annuels de K étaient sensiblement plus élevés dans la production cunicole que supposé n jusqu’à présent.


Produzione svizzera di conigli e emissioni di azoto, fosforo e potassio L'obiettivo di questo lavoro era di rilevare, attraverso un'indagine tra le aziende, il consumo di foraggio grezzo e le emissioni di azoto (N), fosforo (P) e potassio (K) nella produzione di conigli professionalmente ripartita tra allevamento e ingrasso. Ogni anno le coniglie da allevamento registravano in media 6,4 nidiate. Gli animali giovani, a seconda della detenzione, sono stati venduti a un'età tra 24 e 35 giorni. Nell'ingrasso, sono stati eseguiti mediamente 5,2 cicli con una crescita media di 42 g al giorno, raggiungendo un peso finale di 2,9 kg e una valorizzazione di 4,17. Sulla base della sostanza fresca il contenuto corporeo in azoto, fosforo e potassio ammontava a 30.4, 6,4 e 3,1 g/kg e nei foraggi a dipendenza della categoria di animale tra 21,4 e 23,8 g di N, 5,0 e 6,0 g di P e 13,5 e 14,9 g di K. La parte di foraggio grezzo nella razione per coniglie da allevamento, rimonte e conigli da ingrasso è stato rispettivamente del 20, 15 e 9 per cento. I valori annuali di azoto e fosforo nelle deiezioni erano, contrariamente ai valori finora utilizzati, inferiori nell'allevamento, mentre risultavanosuperiori nell'ingrasso e quelli di potassio erano notevolmente superiori nella produzione di conigli rispetto a quanto finora supposto.

Bibliographie ▪▪ Agridea et Office fédéral de l‘agriculture, 2010. Guide Suisse-Bilanz 1.8, 1 – 24. ▪▪ Agroscope, 2009. Données de base pour la fumure des grandes cultures et des herbages (DBF-GCH). Revue suisse d’Agriculture 41 (1), 1–98. ▪▪ Lebas F., Lamboley-Gaüzère B., Delmas D. & Auvergne A., 1998. Incidence du taux de phosphore alimentaire sur la croissance des lapins, leurs caractéristiques à l'abattage et la résistance mécanique des os. 7èmes Journ. Rech. Cunicole, 171–174.

Summary

Riassunto

Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium | Production animale

Rabbit breeding and excretions of nitrogen, phosphorus and potassium The aim of this study was to evaluate, by means of a survey, the forage intake and nitrogen (N), phosphorus (P) and potassium (K) excretions in breeding and fattening rabbit farms. The does produced an average of 6,4 litters a year and kittens were weaned between 24 and 35 days. In the fattening units, 5,2 stock rotations were accomplished a year and a final weight of 2,9 kg was reached with an average gain of 42 g/d and a feed conversion ratio 4,17. Based on fresh matter, the N, P and K contents of rabbits were respectively 30,4, 6,5 and 3,1 g/kg. The dietary contents ranged between 21,4 and 23,8 g N, 5,0 and 6,0 g P and between 13,5 and 14,9 g K depending on the animal category. Forage intake represented 20, 15 and 9 % of total intake by does, young breeding stock and fattening rabbits respectively. The annual excretion of N and P was lower than the currently used standards in rabbit breeding but higher in rabbit fattening. The annual K excretion was considerably higher than currently believed in cuniculture. Key words: rabbit, excretion, nitrogen, phosphorus, potassium.

▪▪ Qualinova, 2008. Lettre à l’Office fédéral de l’agriculture «Anfrage ­B eurteilung Nährstoffbilanz Kaninchen». 12.09.2008. ▪▪ Renouf B., Mascot N. & Picot A., 2009. Réduction des apports de phosphore et de protéines dans l'alimentation des lapins en engraissement: Intérêt zootechnique et environnemental. Cuniculture Magazine 36, 9–11.

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E n v i r o n n e m e n t

Symbiontes et arthropodes – quelles ­implications pour la lutte biologique? Alexandre Aebi1 et Renate Zindel2 Université de Neuchâtel, 2000 Neuchâtel, Suisse 2 Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, 8046 Zurich, Suisse Renseignements: Alexandre Aebi, e-mail: alexandre.aebi@art.admin.ch, tél. +41 32 718 31 47

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Le régime alimentaire de l'acarien Rhizoglyphus robini dépend de la composition de son microbiome.

Introduction De nombreux arthropodes sont responsables de pertes économiques importantes en agriculture. L’émergence ou la réémergence de ravageurs de cultures représente un défi continu pour l’agriculture et l’environnement. La lutte biologique, qui consiste en l’utilisation des ennemis naturels (arthropodes, nématodes, bactéries, champignons ou virus) des ravageurs de culture, est couramment utilisée en Suisse, avec 53 espèces homologuées à ce jour. La majorité des arthropodes vivent en association avec de nombreuses bactéries endosymbiontiques (bactéries vivant à l’intérieur des cellules de leurs hôtes, souvent dans les tissus reproducteurs, voir fig. 1). Par exemple, les endosymbiontes (ES) Wolbachia et Cardinium infectent 66 % et 7 % (Zindel et al. 2011) des espèces d’insectes. En outre, 52 % des espèces de coccinelles (plusieurs espèces sont utilisées comme auxiliaires contre les pucerons) seraient infectées par au moins une des bactéries suivante: Wolbachia, Rickettsia ou Spiroplasma (Weinert et al. 2007). Les relations entre arthropodes et bactéries sont de plusieurs types. Les symbiontes obligatoires (ou primaires) sont impliqués dans les fonctions vitales de leurs hôtes. La perte de ces bac-

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 68–73, 2013

téries signifierait donc la mort de leurs hôtes. Par exemple, Buchnera aphidicola, le symbionte obligatoire du puceron du pois Acyrthosiphon pisum, lui fournit des acides aminés essentiels, absents de son régime alimentaire. Au contraire, les symbiontes facultatifs (ou secondaires), dont font partie les ES, ne sont pas indispensables à leur hôte; leur présence peut avoir un effet neutre, positif ou négatif sur la nutrition, reproduction ou la survie de leur hôte. Certains ES sont connus pour leur influence sur la stratégie reproductive de leurs hôtes (O’Neill et al. 1997). Comme ces bactéries sont transmises verticalement (de la mère à sa descendance), elles ont développé différentes stratégies afin de favoriser la reproduction des femelles infectées par rapport aux femelles non-infectées et de favoriser ainsi leur propre transmission. A l’image d’une souche de Wolbachia infectant un acarien phytophage du genre Bryobia, certains ES sont capables de transformer une espèce se reproduisant de manière sexuée en une espèce parthénogénétique (asexuée ou clonale). D’autres bactéries on le pouvoir d’empêcher le développement d’embryons issus du croisement entre mâles infectés et femelles non-infectées en induisant une incompatibilité cytoplasmique. Un tel phénomène a été décrit chez le parasitoïde hyménoptère Encarsia pergandiella infecté par Cardinium. Toujours dans le monde des parasitoïdes, une souche de Cardinium est capable de transformer un individu de l’espèce Encarsia hispida génétiquement mâle en une femelle fonctionnelle. Cet effet est appelé féminisation. Chez les arthropodes déposant leurs œufs de manière groupée, les individus fraîchement éclos représentent souvent un premier repas apprécié pour de jeunes larves. Chez la coccinelle Adalia bipunctata, plusieurs bactéries héritées de la mère tuent sélectivement les embryons mâles. Cet apport de nourriture permet au femelles, issues de la même mère infectée, de se développer plus rapidement et de ce fait augmente leur compétitivité par rapport aux femelles issues de mères non-infectées. Une autre stratégie pour se propager au sein de la population de son hôte est de se rendre indispensable à


celui-ci. En conférant à leurs hôtes une protection contre certains ennemis naturels comme des parasitoïdes hyménoptères, des nématodes, des champignons entomo-pathogènes, des bactéries, ou des virus, les ES favorisent leur maintien et leur propagation dans leur population. Certain ES seraient impliqués dans le développement de résistances de leurs hôtes contres certains pesticides et même dans certains mécanismes d’adaptation à des conditions environnementales défavorables à leurs hôtes (Zindel et al. 2011). Les ES peuvent donc fortement influencer le succès d’un programme de lutte biologique. Ces sous-locataires influents peuvent non seulement affecter l’élevage d’auxiliaires de luttes biologique (en modifiant le mode de reproduction de leurs hôtes) mais également influencer les interactions entre les agents de lutte biologique et leurs ravageurs de culture cible (induction de résistances contre certains ennemis naturels). Cet article, basé sur une «review» de Zindel et al. (2011) publiée dans le Journal of Applied Ecology, explique comment les ES peuvent jouer un rôle dans la mise en œuvre d’un programme de lutte biologique, donne quelques exemples pratiques en lien avec la lutte biologique en Suisse (tabl. 1) et propose une marche à suivre afin d’identifier les potentiels problèmes liés à leur présence. Induction de parthénogenèse et lutte biologique Certains hyménoptères parasitoïdes et acariens prédateurs sont d’importants auxiliaires de lutte biologique. Le déterminisme du sexe des certaines espèces apparte-

Des informations pour la lutte biologique Un catalogue gratuit, décrivant les associations connues entre les agents de lutte biologique les plus utilisés en Suisse et en Europe (EPPO Standard on Safe Use of Biological Control -PM6/3 – Version 2010) et plusieurs ES connus est publié sur le site internet «Symbionts in Control: Un catalogue d’auxiliaires de lutte biologique et leurs symbiontes». Accès: http://www.symbiontsincontrol.ch. Ce site internet a été développé afin d’informer les praticiens de la lutte biologiques sur les effets méconnus des ES sur les arthropodes et de leur fournir des outils afin de détecter leur présence dans le matériel utilisé dans un programme de lutte biologique.

Résumé

Symbiontes et arthropodes – quelles ­i mplications pour la lutte biologique? | Environnement

La majorité des arthropodes vivent en association avec de nombreuses bactéries. Alors que certaines bactéries sont impliquées dans les fonctions vitales de leurs hôtes, d’autres ne leur sont pas indispensables et leur présence peut avoir un effet neutre, positif ou négatif sur la nutrition, reproduction ou la survie de leur hôtes. Certains endosymbiontes sont connus pour leur influence sur la stratégie reproductive de leurs hôtes. Transmises verticalement, ces bactéries ont développé différentes stratégies pour favoriser la reproduction des femelles infectées par rapport aux femelles non-infectées et favoriser ainsi leur propre transmission. Une autre stratégie pour se propager au sein de la population de son hôte est de se rendre indispensable à celui-ci. En protégeant leurs hôtes contre certains ennemis naturels les endosymbiontes favorisent leur maintien et leur propagation dans leur population. Les endosymbiontes peuvent donc fortement influencer le succès d’un programme de lutte biologique. Cet article explique comment les endosymbiontes peuvent influencer la mise en œuvre d’un programme de lutte biologique, donne quelques exemples pratiques et propose une marche à suivre afin d’identifier les potentiels problèmes liés à leur présence.

nant à ces ordres est déterminé génétiquement. Dans ces groupes d’organismes haplo-diploïdes, les mâles sont haploïdes (1 set de chromosomes) et se développent à partir d’œufs non fécondés. Les femelles quant à elles sont diploïdes (2 sets de chromosomes) et leurs œufs sont généralement fécondés. L’induction de parthénogenèse pourrait augmenter le taux d’accroissement de population et faciliter l’élevage en masse de ces organismes en rendant les mâles obsolètes. L’induction de parthénogenèse par des ES pourrait fortement influencer le succès d’un programme de lutte biologique si les mâles et les femelles d’une espèce d’auxiliaire diffèrent dans leur efficacité à diminuer la population de l’espèce cible. Dans la plupart des cas (chez les hyménoptères parasitoïdes par exemple), seules les femelles jouent un rôle direct dans le contrôle d’une espèce nuisible (oviposition dans ou sur un individu de l’espèce cible). Les mâles ne seraient alors utiles que pour fertiliser les femelles. Théoriquement, une population d’hyménoptères parthénogénétiques d’une taille donnée aurait donc la capacité de parasiter deux fois plus d’hôtes 

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Environnement | Symbiontes et arthropodes – quelles ­i mplications pour la lutte biologique?

lâcher de mâles et de femelles. De plus, l’utilisation d’antibiotiques pour se débarrasser de bactéries pathogènes dans un élevage pourrait affecter ces ES bénéfiques.

Figure 1 | Bactéries (en rouge) à l’intérieur d’un œuf de l’acarien Rhizoglyphus robini. La technique FISH (Fluorescent In Situ Hybridization) permet de visualiser des bactéries dans les tissus de son hôte.

qu’une population sexuée (si le sex-ratio est 50 %: 50 %). Un agent de lutte biologique peut avoir un effet indésirable sur l’environnement (Bigler et al. 2006). Par exemple, une espèce de parasitoïde sexuée introduite dans un nouvel environnement pourrait former des hybrides avec des espèces natives et de ce fait affecter l’intégrité génétique de ces dernières. La formation d’hybrides avec des espèces natives figure parmi les effets non cibles sur l’environnement liés à l’introduction d’agents de lutte biologique. L’utilisation d’auxiliaires parthénogénétiques éviterait dès lors ce risque. Toutefois, l’utilisation d’espèces parthénogénétiques présente également des désavantages. En effet, il a été démontré que le taux de reproduction était plus élevé chez les lignées sexuées que chez une lignée asexuée en raison du fort taux de mortalité des juvéniles infectés par Wolbachia ou du délai imposé par l’ES sur le temps de développement. Les nombreuses discussions en cours sur l’évolution et la maintenance de reproduction sexuée et asexuée illustrent parfaitement les avantages et désavantages liés aux deux modes de reproduction. A ce jour, nous savons que Wolbachia, Cardinium et Rickettsia sont capables d’induire une parthénogenèse chez leurs hôtes. Lors d’élevages industriels d’espèces haplo-diploïdes, nous recommandons aux praticiens d’évaluer les effets potentiels de ces ES sur les populations d’agents de lutte biologique. En effet, en présence de parthénogenèse induite par un ES, un lâcher de femelles uniquement s’avérerai plus efficace qu’un

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 68–73, 2013

Incompatibilité cytoplasmique et lutte biologique L’incompatibilité cytoplasmique inhibe le développement des embryons issus du croisement entre un mâle infecté et une femelle non-infectée et peut donc être considéré comme une stratégie de stérilisation de population de ravageurs de culture (analogue à la technique de l’insecte stérile). La mouche méditerranéenne Ceratitis capitata cause d’importants dégâts aux cultures de nombreux pays. Des chercheurs grecs ont réussi à injecter une souche de Wolbachia (obtenue à partir d’hémolymphe de la mouche à fruit Rhagoletis cerasi, infectée) induisant une incompatibilité cytoplasmique à C. capitata. La bactérie s’est propagée dans la population de laboratoire et de nombreux mâles infectés ont pu être produits. Ainsi, en inondant une population test avec des mâles porteurs de Wolbachia, ils ont réussi à diminuer la taille de cette population de C. capitata en laboratoire (Zabalou et al. 2004). Des recherches sont en cours afin d’évaluer le potentiel de cette nouvelle stratégie de stérilisation de ravageurs de cultures en conditions naturelles. L’induction d’incompatibilité cytoplasmique par des ES peut aussi avoir un effet indirect sur un programme de lutte biologique par augmentation. Si le but est d’augmenter la population d’auxiliaires de lutte biologique naturellement présents dans un milieu donné, la présence de tels ES chez les individus élevés en masse et relâchés dans la nature pourrait empêcher tout croisement entre individus natifs et individus relâchés. De plus, la présence d’ES dans certaines souches de laboratoire d’agents de lutte biologique pourrait poser des problèmes lors d’échanges de matériel entre différents laboratoires ou site de production. En effet, un grand nombre d’échanges de matériel biologique ont lieu pour répondre aux demandes du marché mais aussi afin de rafraîchir les populations d’auxiliaires. La présence d’ES induisant une incompatibilité cytoplasmique, dans une des souches mises en contact, pourrait amener à une diminution importante de la population de laboratoire. Protection contre les stresses abiotiques Une protection contre des stress abiotiques peut être induite par des ES, augmentant ainsi la survie de leur hôtes dans certaines conditions environnementales. Un bon exemple est décrit chez la tique Ixodes scapularis, chez laquelle la bactérie pathogène Anaplasma phagocytophillum (l’agent de l’anaplasmose humaine) induit l’expression de protéines aux propriétés antigel, favori-


Symbiontes et arthropodes – quelles ­i mplications pour la lutte biologique? | Environnement

Tableau 1 | Endosymbiontes et effets connus présents chez les espèces d’insectes et d’acariens utilisées comme agents de lutte biologique en Suisse ou chez le ravageur de culture qui lui est associé Espèce

Taxonomie

Endosymbiontes et effets connus

Insecta Adalia bipunctata Anthocoris nemoralis Aphelinus abdominalis

Coccinelidae, Coleoptera Anthocoridae, Hemiptera Aphelinidae, Hymenoptera

W , R et S: mort sélective des mâle

Aphidius colemani*

Braconidae, Hymenoptera

Aphidius ervi* Aphidoletes aphidimyza Cryptolaemus montrouzieri Dacnusa sibirica Diglyphus isaea Encyrtus lecaniorum Eretmocerus eremicus Eretmocerus mundus Feltiella acarisuga Habrobracon hebetor Lariophagus distinguendus Leptomastidea abnormis Leptomastix dactylopii Macrolophus caliginosus Metaphycus helvolus Orius insidiosus Orius laevigatus Orius majusculus Pseudaphycus maculipennis Trichogramma brassicae Bezdenko Trichogramma cacoeciae Trichogramma evanescens Acarina Amblyseius californicus Amblyseius cucumeris Amblyseius degenerans Amblyseus barkeri (mackenziei) Phytoseiulus persimilis Typhlodromips swirskii

Braconidae, Hymenoptera Cecidomyidae, Diptera Coccinelidae, Coleoptera Braconidae, Hymenoptera Hymenoptera, Eulophidae Encyrtidae, Hymenoptera Hymenoptera (Aphelinidae) Hymenoptera (Aphelinidae) Cecidomyiidae, Diptera Braconidae, Hymenoptera Pteromalidae, Hymenoptera Encyrtidae, Hymenoptera Encyrtidae, Hymenoptera Miridae, Heteroptera Encyrtidae, Hymenoptera Anthocoridae, Hemiptera Anthocoridae, Hemiptera Anthocoridae, Hemiptera Encyrtidae, Hymenoptera Hymenoptera (Trichogrammatidae). Hymenoptera (Trichogrammatidae) Hymenoptera (Trichogrammatidae) Phytoseiidae, Mesostigmata Phytoseiidae, Mesostigmata Phytoseiidae, Mesostigmata Phytoseiidae, Mesostigmata Phytoseiidae, Mesostigmata Phytoseiidae, Mesostigmata

Hypoaspis aculeifer

Laelapidae, Mesostigmata

Hypoaspis miles

Laelapidae, Mesostigmata

Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour W: effet inconnu Regiella insecticola: protège son hôte (puceron) contre A. colemani Hamiltonella defensa: protège son hôte (puceron) contre A. ervi Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour W: effet inconnu Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour W: induction de parthénogenèse Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour W: induction d’incompatibilité cytoplasmique démontrée chez ­Macrolophus pygmaeus, une espèce souvent commercialisée sous le nom de M. caliginosus** Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour W: effet inconnu Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour W: induction de parthénogenèse W: induction de parthénogenèse, diminution de la «fitness» Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour R*** : effet inconnu Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour Aucun ES connu à ce jour R ***: effet inconnu S*** : effet inconnu C*** : effet inconnu S*** : effet inconnu

*ES= endosymbionte, W= Wolbachia, R= Rickettsia, S= Spiroplasma. **Machtelinckx T et al. (2009). ***Zindel et Aebi (données non publiées).

sant la survie des tiques à basse température (Neelakanta et al. 2010). Bien entendu, dans ce cas, la bactérie est un pathogène favorisant sa capacité vectorielle en influençant la survie de son hôte. Chez le puceron du pois Acyrthosiphon pisum, le symbionte Serratia symbiotica protège son hôte en cas de choc thermique en lui fournissant rapidement des métabolites essentiels provenant de sa propre lyse cellulaire (Burke et al. 2009). Au contraire, la présence de Rickettsia chez la mouche blanche Bemisia tabaci peut diminuer la résistance de cette dernière à certains pesticides (Kontsedalov et al. 2008).

Protection contre des parasitoïdes hyménoptères Des microbes peuvent interagir afin de protéger leur hôte contre ses ennemis naturels. La présence de quelques ES chez le puceron du pois protège ce dernier contre Aphidius ervi, un parasitoïde hyménoptère. Cet auxiliaire est utilisé dans le monde entier pour contrôler les populations de pucerons attaquants divers légumes et plantes ornementales. En 2003, des chercheurs américains ont démontré que les différences de résistances contre le parasitoïde chez différentes souches de pucerons étaient dues à différents niveaux d’infections par des ES secondaires (Oliver et al. 2003). Ils ont mis en évi- 

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Environnement | Symbiontes et arthropodes – quelles i­ mplications pour la lutte biologique?

dence que les bactéries Hamiltonella defensa et Regiella insecticola induisent une résistance contre A. ervi en empêchant ses larves de se développer. Des études récentes ont montré que des toxines capables de tuer les larves étaient produites par H. defensa et le virus bactériophage qui lui est associé (Oliver et al. 2009). La présence de ces microbes peut donc influencer le taux de résistance des pucerons et considérablement influencer le succès d’un programme de lutte biologique utilisant A. ervi sur le terrain. Protection contre des nématodes Plusieurs espèces d’arthropodes sont attaquées par des nématodes. Par exemple, Drosophila neotestacea devient stérile si les femelles sont infectées par le nématode Howardula aoronymphibium. Récemment, il a été démontré que l’ES Spiroplasma confère une protection contre le nématode en assurant le développement de la plupart des œufs produits par des drosophiles femelles infectées. Au vu de l’avantage sélectif conféré par sa présence, Spiroplasma s’est rapidement propagée au sein de la population de H. aoronymphibium (Jaenike et al. 2010). Protection contre des champignons entomo-pathogènes Les champignons entomo-pathogènes tel que Beauveria bassiana infectent un grand nombre d’arthropodes. Beauveria bassiana est très utilisé comme auxiliaire de lutte biologique contre de nombreuses espèces d’insectes nuisibles appartenant à une grande variété d’ordres. Une étude de laboratoire sur la mouche à fruits Drosophila melanogaster a démontré que le nombre d’individus survivant à une infection par le champignon B. bassiana était trois fois supérieur en présence de l’ES Wolbachia. Les individus portant cet ES étaient donc protégés contre le champignon. De plus, la présence de l’ES était corrélée à une modification de la préférence de substrat d’oviposition et les mâles infectés jouissaient d’un meilleur succès reproductif (Panteleev et al. 2007). Protection contre des virus Plusieurs virus causent une mortalité importante chez les insectes. Wolbachia peut également modifier la résistance de son hôte contre ces agents pathogènes, utilisés eux aussi comme agents de lutte biologique. Drosophila melanogaster a été utilisée comme modèle pour l’étude de la résistance des arthropodes aux virus. Deux groupes de recherche ont indépendamment démontré une résistance induite par Wolbachia contre le virus «Drosophila C Virus», et trois virus ARN («Cricket Paralysis Virus», «Nora Virus» et «Flock House Virus» ; Hedges et al. 2008; Teixeira et al. 2008). A ce jour, les mécanismes de telles

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inductions de résistance n’est pas connu. Il est très probable que de telles interactions entre bactéries symbiotiques et virus pathogènes soient courantes dans la nature, car les deux groupes de micro-organismes cohabitent dans l’espace intracellulaire.

Conclusions De nombreux facteurs biotiques et abiotiques peuvent affecter n’importe quel agent de lutte biologique ou arthropode nuisible, et de ce fait fortement influencer le succès d’un programme de lutte biologique. La présence et les interactions entre microbes (bactéries et virus) au sein des arthropodes impliqués représentent probablement un des facteurs les plus variables et les plus sous-estimés. En effet, les ES sont connus pour i) pouvoir influencer la dynamique de population de leurs hôtes (agent de lutte biologique ou ravageurs de culture), ii) jouer un rôle dans l’évolution de résistances contre des agents de lutte biologique communément utilisés, iii) induire une résistance contre les pesticides et iv) modifier la tolérance de leurs hôtes à des conditions environnementales stressantes. Nous suggérons donc d’inclure des études sur la présence et l’influence éventuelles d’ES dans le développement et la mise en œuvre de programmes de lutte biologique. Les microbes associés à des agents de lutte biologique sont considérés comme des contaminants qui pourraient influencer l’efficacité de l’agent de lutte biologique. La forte incidence des endosymbiontes décris dans la littérature et la grande diversité des agents de lutte biologique suggèrent que les effets observés pour l’instant ne représentent que la pointe de l’iceberg. Le tableau 1 démontre que 41 % des insectes et acariens utilisés dans des programmes de lutte biologique en Suisse sont infecté par un ou plusieurs ES et pour la moitié de ceux-ci (soit 21% des espèces utilisées), un effet décrit ci-dessus a été démontré. Pour ces raisons, nous encourageons la coopération entre les praticiens de lutte biologique et les scientifiques afin d’évaluer la présence d’ES qui pourrait affecter l’efficacité d’agent de lutte biologique positivement n ou négativement.


Simbionti e artropodi – quali implicazioni per la lotta biologica? La maggioranza degli artropodi vive in simbiosi con numerosi batteri. Alcuni di essisono implicati nelle funzioni vitali dei loro ospiti, mentre altri non sono indispensabili e la loro presenza può avere un effetto neutro, positivo o negativo su nutrizione, riproduzione o sopravvivenza dei loro ospiti. Alcuni endosimbionti sono conosciuti per l'influenza che esercitano sulla strategia riproduttiva dei loro ospiti. Trasmessi verticalmente, questi batteri hanno sviluppato strategie differenti per favorire la riproduzione delle femmine infette rispetto a quelle non infette così da agevolare la loro propria trasmissione. Un'altra strategia per propagarsi in seno alla popolazione del proprio ospite è rendersi indispensabili per quest'ultimo. Proteggendolo contro determinati nemici naturali gli endosimbionti assicurano contemporaneamente la loro permanenza e propagazione in seno alla popolazione. Gli endosimbionti possono quindi influenzare significativamente il successo di un programma di lotta biologica. Il presente articolo spiega come gli endosimbionti possono agire sull'attuazione di un programma di lotta biologica, fornendo alcuni esempi pratici e illustrando come procedere per identificare i potenziali problemi legati alla loro presenza.

Bibliographie ▪▪ Bigler F., Babendreier D. & Kuhlmann U., 2006. Environmental impact of invertebrates for biological control of arthropods: methods and risk ­a ssessment. CABI Publishing, Wallingford, 288 p. ▪▪ Burke G., Fiehn O. & Moran N., 2009. Effects of facultative symbionts and heat stress on the metabolome of pea aphids. The ISME Journal 4, 242–252. ▪▪ Hedges L. M., Brownlie J. C., O’Neill S. L. & Johnson K. N., 2008. Wolbachia and Virus Protection in Insects. Science 322, 702. ▪▪ Jaenike J., Unckless R., Cockburn S. N., Boelio L. M. & Perlman S. J., 2010. Adaptation via symbiosis: recent spread of a Drosophila defensive symbiont. Science 329, 212–215. ▪▪ Kontsedalov S., Zchori-Fein E., Chiel E., Gottlieb Y., Inbar M. & Ghanim M., 2008. The presence of Rickettsia is associated with increased susceptibility of Bemisia tabaci (Homoptera: Aleyrodidae) to insecticides. Pest Management Science 64, 789–792. ▪▪ Machtelinckx T, Van Leeuwen T., Vanholme B., Gehesquiere B., Dermauw W., Vandekerkhove B., Gheysen G. & De Clercq P., 2009. Wolbachia ­i nduces strong cytoplasmic incompatibility in the predatory bug Macrolophus pygmaeus. Insect Molecular Biology 18 (3), 373–381. ▪▪ Neelakanta G., Sultana H., Fish D., Anderson J. F. & Fikrig E., 2010. Anaplasma phagocytophilum induces Ixodes scapularis ticks to express an antifreeze glycoprotein gene that enhances their survival in the cold. The Journal of Clinical Investigation 120, 3179–3190. ▪▪ Oliver K. M., Russell J. A., Moran N. A. & Hunter M. S., 2003. Facultative bacterial symbionts in aphids confer resistance to parasitic wasps. Pro-

Summary

Riassunto

Symbiontes et arthropodes – quelles ­i mplications pour la lutte biologique? | Environnement

Symbionts and arthropods – potential implications for biological control Most arthropod species live in association with numerous bacteria. Their interactions can have different outcomes. While some bacteria are crucial for their host’s survival, others are facultative and their presence can have a negative, positive or neutral effect on the nutrition, reproduction or survival of their host. Some endosymbionts (such as Wolbachia for example) are known as reproduction manipulators. Vertically transmitted, these bacteria developed several strategies (such as parthenogenesis induction, cytoplasmic incompatibility) to increase the transmission of infected females in their host population, in comparison to un-infected females. Another way to ensure its propagation is to become crucially needed by its host. By protecting their host against natural enemies such as hymenopteran parasitoids, nematodes, entomopathogenic fungi, bacteria or viruses, endosymbionts achieved this goal. Endosymbionts may then greatly influence biological control programs. These influential house mates may not only affect the rearing of beneficial arthropods (by altering their reproduction mode) but also influence their interactions with target crop pest species (by inducing resistances for example). This paper explains how endosymbionts may influence biological control and provides practical examples and a protocol to follow to identify problems associated to their presence. Key words: symbiont, arthropod, biological control.

ceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America 100, 1803–1807. ▪▪ Oliver K. M., Degnan P. H., Hunter M. S. & Moran N. A., 2009. Bacteriophages Encode Factors Required for Protection in a Symbiotic Mutualism. Science 325, 992–994. ▪▪ O’Neill S. L., Hoffmann A. A. & Werren J. H., 1997. Influential Passengers. Oxford University Press Inc., New York, USA, 214 p. ▪▪ Panteleev D. Y., Goryacheva I. I., Andrianov B. V., Reznik N. L., Lazebny O. E. & Kulikov A. M., 2007. The endosymbiotic bacterium Wolbachia ­e nhances the nonspecific resistance to insect pathogens and alters ­b ehaviour of Drosophila melanogaster. Russian Journal of Genetics 43, 1066–1069. ▪▪ Teixeira L., Ferreira A. & Ashburner M., 2008. The Bacterial Symbiont Wolbachia Induces Resistance toRNA Viral Infections in Drosophila melanogaster. PLoS Biology 6, 2753–2763. ▪▪ Weinert L. A., Tinsley M. C., Temperley M. & Jiggins F. M., 2007. Are we underestimating the diversity and incidence of insect bacterial symbionts? A case study in ladybird beetles. Biology Letters 3, 678–681. ▪▪ Zabalou S., Riegler M., Theodorakopoulou M., Stauffer C., Savakis C. & Bourtzis K., 2004. Wolbachia-induced cytoplasmic incompatibility as a means for insect pest population control. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America 101, 15042–15045. ▪▪ Zindel R., Gottlieb Y. & Aebi A., 2011. Arthropod symbiosis, a neglected parameter in pest and disease control programs. Journal of Applied Ecology 48, 864–872.

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P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants? Lucie Gunst1, Walter Richner1, Paul Mäder2 et Jochen Mayer1 1 Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, 8046 Zurich, Suisse 2 Institut de recherche de l’agriculture biologique FiBL, 5070 Frick, Suisse Renseignements: Lucie Gunst, e-mail: lucie.gunst@art.admin.ch, tél. +41 44 377 74 31

potassium (K), le magnésium (Mg) et le calcium (Ca) peuvent être réintroduits en grande partie par les engrais de ferme ou puisés dans le sol (Berry et al. 2002). Le projet avait pour objectif d’étudier l’approvisionnement du blé d’automne en éléments nutritifs dans l’essai DOC pendant les quatre premières périodes d’assolement de 1978 à 2005 et de réunir des informations sur l’effet limitant des éléments nutritifs dans les systèmes culturaux biologiques. Pour y parvenir, les chercheurs ont analysé et comparé l’absorption d’éléments nutritifs et les teneurs en éléments nutritifs des grains et de la paille. Pour compléter, les teneurs en phosphore, potassium et magnésium disponibles pour les plantes ont également été relevées dans la couche superficielle du sol.

Matériel et méthodes Blé d'automne dans l'essai DOC. (Photo: ART)

Introduction Le but de l’essai comparatif DOC mis en place depuis 1978 à Therwil BL est de comparer un système biologique-dynamique (D), un système organique-biologique (O), un système conventionnel (C; fumure organique minérale) et un système conventionnel-minéral (M; fumure exclusivement minérale) dans la perspective de la production durable et de la fertilité du sol (tabl. 1). L’essai joue sur deux niveaux de fumure (tabl. 1). Les rendements se différencient nettement entre les niveaux de fumure ainsi qu’entre les systèmes de cultures biologiques et conventionnels. Avec le blé d’automne, les différences de rendement étaient de l’ordre de 15 % entre les procédés biologiques et conventionnels (Gunst et al. 2007). Les différences de rendement étaient légèrement moins prononcées entre les niveaux de fumure des procédés conventionnels (C1 vs. C2) qu’entre ceux de procédés biologiques (O1/D1 vs. O2/D2; Jossi et al. 2009). Dans l’agriculture biologique, on admet que l’azote (N) est le facteur limitant des rendements et que les autres éléments nutritifs essentiels comme le phosphore (P), le

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Dans l’essai comparatif DOC, l’assolement, le choix des variétés et le travail sont identiques dans tous les procédés. La fertilisation, la protection des plantes et le contrôle des adventices sont spécifiques aux systèmes culturaux dans les procédés conventionnels et biologiques (détails de l’essai, voir Gunst et al. 2007 et tabl. 1). Exploitation du blé d‘automne Durant les années étudiées, les variétés de blé d’automne cultivées étaient les suivantes: Probus (1979, 1983), Sardona (1986, 1989, 1990), Ramosa (1993), Tamaro (1996, 1997, 2000, 2002) et Titlis (2003). Les semences des systèmes C et M ont été traitées, dans les systèmes bio D, O et dans le procédé N0, par contre, la quantité de semences a été augmentée de 5 à 20 %. Seules les parcelles de blé avec des pommes de terre comme précédent cultural ont été évaluées car cette séquence d’assolement a pu être suivie sur l’ensemble de la période. En moyenne, on a épandu du compost de fumier et du lisier (10 t/ha/an; 21 m3/ha/an) dans le système D2, du lisier (20 m3/ha/an) dans le système O2 et des tourteaux de ricin (763 kg/ha/an) durant les trois premières années. Les systèmes C et M ont reçu des apports d’azote, de


Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants? | Production végétale

Résumé

phosphore et de potassium sous forme minérale (tabl. 2). Il faut savoir que la quantité d’azote minérale appliquée dans le système C était de 65 % plus élevée que dans les systèmes D et O. La quantité d’azote épandue lors du premier apport a été mesurée en déduisant les réserves de Nmin dans le sol au début de la période de végétation. Dans les systèmes D, O et dans le procédé N0, la protection des plantes s’est limitée à la lutte mécanique contre les adventices à l’aide d’une herse et à l’application de produits biodynamiques dans les systèmes D et N0. Dans les systèmes C et M, une application d’herbicides et une application de régulateurs de croissance ont été pratiquées, ainsi qu’un à deux traitements avec des fongicides. Prélèvement d’échantillons et analyses Les échantillons ont toujours été prélevés lors de la récolte. Après séchage et nettoyage des parties souillées, des barbes et des glumes, les grains et la paille ont été moulus et les teneurs en éléments nutritifs analysées. La teneur en azote a été déterminée selon Dumas, les teneurs en phosphore par spectrophotométrie et celles de potassium, de magnésium et de calcium par ICP-OES selon l’extraction des cendres dans HCl. Les teneurs en éléments nutritifs disponibles dans le sol (0–20 cm) ont été déterminées selon les méthodes de référence des stations de recherche Agroscope pour le phosphore, le potassium dans des extraits de CO2, pour le magnésium  dans des extraits de CaCl2 (Agroscope 2011).

L’essai longue durée DOC visant à comparer les systèmes culturaux a permis notamment d’étudier les effets des apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne de 1978 à 2003. Il doit fournir des informations sur le rôle joué par les éléments nutritifs sur le niveau des rendements dans les systèmes d’agriculture biologique. Des différences de rendements considérables entre les systèmes culturaux «biologiques» et «conventionnels» et les niveaux de fertilisation ont pu être expliquées essentiellement par l’approvisionnement des plantes en éléments nutritifs, notamment en azote. Le phosphore a pu être exclu des facteurs co-limitants car l’approvisionnement du sol en phosphore était suffisant dans tous les procédés DOC pendant toute la durée de l’essai. Les analyses de la paille et des grains ont indiqué des valeurs élevées en phosphore et de faibles différences, ce qui confirme les résultats du sol. Le potassium par contre a pu être identifié comme étant un facteur co-limitant de l’azote, dans les procédés bio avec niveau de fertilisation réduit ainsi que dans la parcelle témoin non fertilisée. La différence entre les teneurs en potassium dans la biomasse superficielle et le potassium disponible dans le sol l’indiquait également. Toutefois, les systèmes biodynamique et bioorganique montraient un apport équilibré en potassium avec un niveau de fumure élevé. Par conséquent, avec un niveau de fumure de ce type, les deux systèmes biologiques peuvent être considérés comme durables.

Tableau 1 | Site, structure de l'essai, systèmes culturaux et assolement de l'essai DOC Site et climat: Therwil BL, 300 m ü. M., 9,5 °C, 792 mm Sol: terre parabrune profonde sur loess, légèrement à pseudogley Structure de l’essai: carré latin, quatre répétitions, trois assolements identiques, mis en place parallèlement, mais décalés dans le temps Réalisation: Agroscope ART et FiBL D

Systèmes culturaux

O

C

M

Biologique-dynamique

Organique-biologique

Conventionnel2

Conventionnel2, apport d’engrais ­minéraux uniquement1

Compost de fumier / Lisier

Fumier décomposé / Lisier

Fumier frais / Lisier

Aucun engrais de ferme

D2

O2

C2

M2

Demi-fertilisation (1), 0,7 UGBF

D1

O1

C1

Sans fumure

N0

Exploitation Forme d’engrais de ferme Fertilisation selon les directives DBF-GCH (2), 1,4 UGBF3

Depuis 1985, auparavant sans fertilisation, 2depuis 1985 intégré et depuis 1999 exploité selon les directives des prestations écologiques requises, 31re et 2e période d’assolement (1978–1991): 1,2 resp. 0,6 UGBF, 4Etudié: blé d’automne 1 avec précédent cultural unique, pommes de terre, 1978–2005.

1

Périodes d’assolement (PA) de 1978 à 2005: 1re PA 1978–1984 2e PA 1985–1991 Pommes de terre Pommes de terre Blé d’automne 14 Blé d’automne 14 Chou blanc Betteraves rouges Blé d’automne 2 Blé d’automne 2 Orge d’automne Orge d’automne Prairie temporaire 1 Prairie temporaire 1 Prairie temporaire 2 Prairie temporaire 2

3e PA 1992–1998 Pommes de terre Blé d’automne 14 Betteraves rouges Blé d’automne 2 Prairie temporaire 1 Prairie temporaire 2 Prairie temporaire 3

4 e PA1999–2005 Pommes de terre Blé d’automne 14 Soja Maïs ensilage Blé d’automne 2 Prairie temporaire 1 Prairie temporaire 2

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Production végétale | Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants?

Dépouillement des données de l’essai A partir des teneurs en éléments nutritifs des grains et de la paille, la teneur globale de la biomasse superficielle récoltée a été calculée d’après les teneurs moyennes pondérées des grains et de la paille. Les systèmes D1/O1 et D2/O2 ainsi que C2/M2 n’affichaient aucune différence de teneurs d’un niveau de fumure à l’autre. C’est pourquoi la représentation s’appuie sur la moyenne des teneurs. Le taux annuel de variation des éléments nutritifs disponibles dans le sol (P, K et Mg) a été déterminé à partir de la différence entre les teneurs moyennes du sol en 2000, 2002 et 2003 après la culture du blé d’automne et la teneur initiale en 1977. L’état des éléments nutritifs du sol dans les différents systèmes culturaux a été évalué selon les directives DBF-GCH 2009. Les teneurs en éléments nutritifs du blé ont été évaluées à l’aide d’une analyse de variance à deux facteurs (facteurs année x système cultural). Les moyennes ont été comparées au moyen du test de Newman-Keuls.

Résultats et discussion Fertilisation et absorption d’éléments nutritifs Ce sont les systèmes C2, M2 et D2 qui ont reçu les quantités d’éléments nutritifs les plus élevées (tabl. 2). A noter que dans le système D, les engrais de ferme plus riches en éléments nutritifs, qui provenaient de fermes situées dans des régions où les sols sont riches en calcaire, se sont traduits par des apports moyens en azote, potassium et magnésium plus élevés dans le procédé D2 que dans C2. En 1999, un apport de chaux (2680 kg CaCO3 ha–1; tabl. 2) a permis de corriger le pH dans C1, C2 et M2. Sans cet apport supplémentaire de chaux, les apports de calcium par le biais des engrais auraient également été plus élevés dans le procédé D2. L’apport d’azote minéral dans le système O correspondait à celui du système D. En revanche, les apports d’azote total et de potassium étaient inférieurs de 50 % à ceux du système D, ceux de phosphore de 70 %, et ceux de calcium et de magnésium d’environ 85 %. C’est la conséquence de l’emploi de compost de fumier dans le système D et du lisier plutôt pauvre en éléments nutritifs dans la 3e période d’assolement (1993, 1996, 1997) utilisé dans le système O. De même, en ce qui concerne l’absorption d’éléments nutritifs issus de la biomasse superficielle (grains et paille; fig. 1 a–f), les systèmes C2 et M2 affichaient souvent les valeurs les plus élevées et le procédé N0 les valeurs les plus basses. L’absorption d’éléments nutritifs ne se distinguait pratiquement pas dans les deux systèmes bio contrairement à l’apport d’éléments nutritifs. En dépit des différences de rendements, tous les systèmes ont assimilé approximativement la même quantité de calcium et de magnésium.

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En général, tous éléments nutritifs confondus, l’absorption d’éléments nutritifs était plus importante au niveau de fumure 2 qu’au niveau 1. Avec le système C, ce phénomène était plus marqué (niveau 1: 81 % du niveau 2) que dans les deux systèmes bio (niveau 1: 87 % de niveau 2). Avec le procédé N0, l’absorption d’éléments nutritifs représentait encore 65 % des systèmes D2 et O2 et 52 % des systèmes C2 et M2. C’est pour le potassium que la différence entre les niveaux de fumure était la plus importante; elle était moins élevée pour l’azote et le phosphore et faible pour le calcium et le magnésium. Une augmentation de la fertilisation se traduisait donc par une augmentation de l’absorption de potassium, de phosphore et d‘azote, mais avait peu d’influence sur l’absorption de calcium et de magnésium. Les faibles différences entre les systèmes et les niveaux de fumure en ce qui concerne l’absorption de calcium et de magnésium peuvent s’expliquer par le bon approvisionnement du sol (tabl. 6). Il est possible aussi qu’avec un apport accru en potassium, il se soit produit des interactions antagonistes (concurrence des ions) ; ces dernières ont conduit à une absorption relativement limitée de calcium et de magnésium dans les procédés C2 et M2 caractérisés par une importante fumure en potassium. (Spiess et al. 1993). Les calculs des rapports entre apport et absorption des éléments nutritifs dans tous les procédés confirment les constats précédents. Ils indiquent des corrélations significatives pour l’azote total, l’azote minéral, le phosphore et le potassium avec des coefficients de corrélation compris entre r = 0,53 et r = 0,65 (tabl. 3). Le rapport était plus faible pour le magnésium et le calcium (r = 0,44 resp. r = 0,29). Les bilans apports-prélèvements pour le blé (fig. 1 a–f) montrent si la fumure était en mesure de couvrir le besoin en éléments nutritifs. En cas de bilans négatifs (valeurs audessus de la ligne de séparation), d’autres sources d’éléTableau 2 | Quantités d'éléments nutritifs apportés par les engrais (moyenne de la période 1979 – 2003) dans le blé d'automne 1 avec pommes de terre comme précédent cultural dans différents systèmes culturaux de l'essai DOC Quantité d'éléments nutritifs kg ha-1 N

N

total

minéral

P

K

Ca

Mg

N0

0

0

0

0

0

0

D1

40

10

9

56

70

9

O1

20

10

3

29

5

2

C1

30

30

18

51

88*

4

D2

80

20

18

112

139

19

O2

40

21

5

58

10

4

C2

59

59

35

101

175*

8

M2

81

81

30

118

165*

11

*Dans les procédés M2, C2, C1, un total de 2680 kg ha -1 de CaCO3 a été épandu en deux apports en 1999 sous forme de chaux d'acide carbonique (= 1070 kg ha -1 Ca).


A

240 220 200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0

+ 0

35

10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140 Fertilisation en kg ha-¹

20 15 10

D

200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0

10

20

20

40

10

50

60

E

80 100 120 140 Fertilisation en kg ha-¹

+

160

0

0

16

60

Calcium

15

50

100

Magnésium

14

200

300

350

10 8 6 4

+

2 180

150 200 250 Fertilisation en kg ha-¹

12

+ 0

10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140 Fertilisation en kg ha-¹

5

30 40 Fertilisation en kg ha-¹

Potassium

0

20

+ 0

+

25

Absorption en kg ha-¹

Absorption en kg ha-¹

C

0

Azote minéral

30

25

5

240 220 200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0

35

Phosphore

30

B

Absorption en kg ha-¹

Absorption en kg ha-¹

Azote total

Absorption en kg ha-¹

Absorption en kg ha-¹

Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants? | Production végétale

F

0

0

5

10

15 20 25 30 Fertilisation en kg ha-¹

35

40

M2 K2 O2 D2 K1 O1 D1 N0

Figure 1 a-f | Quantités annuelles d'éléments nutritifs apportés et absorption d'éléments nutritifs par le blé d'automne dans différents s­ ystèmes culturaux de l'essai DOC. (le côté "+" de la ligne correspond à un bilan positif des éléments nutritifs, le côté "–" à un bilan négatif)

ments nutritifs doivent être trouvées comme les réserves du sol ou les légumineuses fixant l’azote. Les bilans étaient toujours négatifs pour l’azote, ce qui s’explique d’une part, par les apports supplémentaires en azote par les légumineuses fixant l’azote, apports disponibles indirectement via l’azote fourni par le sol, et d’autre part par le dépôt atmosphérique d’azote. Les bilans du phosphore étaient positifs pour C2 et M2. Le niveau 1 de fumure, plus faible, ainsi que les systèmes bio, affichaient tous des soldes négatifs de phosphore. La situation était identique pour le potassium et le magnésium: les systèmes C2 et M2 affichent des soldes positifs et négatifs, tandis que les systèmes O2 et O1 affichent uniquement des soldes négatifs. Pour D2, les bilans sont en revanche presque toujours positifs, ce qui vient des apports d’engrais nettement plus élevés. Le calcium varie considérablement entre les systèmes C1, C2, M2, D2 et D1 avec des bilans

toujours positifs et O1 et O2 toujours négatifs. Cela vient des apports de chaux dans les systèmes C et M et du compost riche en calcium dans le système D. Si l’on associe les résultats de l’absorption d’éléments nutritifs avec les soldes des bilans, il est probable que l’approvisionnement en éléments nutritifs ait un effet limitant sur les rendements, dans le cas de l’azote, du phosphore et du potassium. Cela devrait transparaître dans les teneurs en éléments nutritifs des produits de récolte ainsi que dans les éléments nutritifs disponibles dans le sol. Teneurs en éléments nutritifs dans les grains et la paille Hormis la teneur en phosphore, les teneurs moyennes en éléments nutritifs de la biomasse superficielle (teneurs moyennes du grain et de la paille) se distinguaient considérablement les unes des autres pour tous les systèmes et sur l’ensemble de la durée de l’essai (tabl. 4; fig. 2 a–e). 

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77


Production végétale | Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants?

Tableau 3 | Coefficients de corrélation du rapport entre la quantité d'éléments nutritifs contenus dans les engrais et les éléments nutritifs absorbés par le blé dans la biomasse superficielle du sol Elément nutritif

Coefficient de corrélation

N total

0,53

N minéral

0,65

P

0,62

K

0,55

Ca

0,29

Mg

0,44

C’est avec le potassium que les influences du système sont les plus nettes. Là, les teneurs en potassium suivent l’intensité d’exploitation: C2/M2 affichent la teneur la plus élevée avec 9,3 g kg–1 de MS, tandis que les teneurs de D2/O2 ne représentent que 82 % de C2/M2, celles de D1/O1 68 % et celles de N0 54 %. Il est étonnant de constater que les teneurs en phosphore ne sont influencées que par C2/M2, tandis que les autres systèmes et le procédé N0 présentent les mêmes concentrations. Le calcium et le magnésium réagissent indifféremment et atteignent les valeurs les plus élevées dans le procédé N0. Avec l’augmentation de l’intensité de fumure, les teneurs de calcium et de magnésium ont tendance à baisser dans les procédés biologiques entre les niveaux de fumure 1 et 2. Les fortes teneurs en calcium dans les systèmes C2/ M2 sont dues aux apports en chaux. Le fait que les teneurs en calcium et en magnésium diminuent plus l’intensité augmente peut s’expliquer par l’effet de dilution suite à des rendements plus élevés en biomasse et est sans doute associé à des effets antagonistes en cas d’apport élevé en potassium (D2/O2; C2/M2).

Les teneurs en azote présentent des différences moindres, le procédé N0 étant celui qui affiche les deuxièmes plus hautes teneurs. Lorsque les plantes ont atteint la maturité nécessaire au battage, ces teneurs ne donnent que des informations relatives sur l’approvisionnement des cultures en éléments nutritifs. Ainsi, les systèmes C2/M2 étaient dans l’ensemble les mieux approvisionnés, mais le procédé N0 non fertilisé depuis 1978 affichait des teneurs en azote relativement élevées bien que les rendements en grains n’aient représenté en moyenne que 67 % de ceux de C2. Cela peut s’expliquer par la formation des rendements dans les cultures de blé. Dans le procédé N0 et les procédés bio, l’approvisionnement modéré des jeunes plantes de blé en azote au début de la période de végétation s’est traduit par une densité plus faible du peuplement. Aux stades de développement ultérieurs, les plantes disposaient toutefois d’une quantité suffisante d’azote. Cela a entraîné des teneurs relativement élevées en azote avec des rendements très faibles. On peut expliquer de la même manière la teneur plus élevée en azote des systèmes bio avec un niveau de fumure réduit (D1/O1) par rapport à ceux qui affichent un niveau de fumure plus élevé (D2/O2). Par conséquent, les différences des teneurs de potassium indiquent en premier lieu une co-limitation des rendements de blé par le potassium et l’azote. Afin de confirmer cette hypothèse, les teneurs en phosphore, potassium et magnésium ont été comparées avec les valeurs indicatives de l’agriculture suisse (DBF-GCH, Flisch et al. 2009). Les teneurs en éléments nutritifs qui sont mentionnées dans le tableau 60a de cette publication sont des valeurs moyennes tirées des données compilées à l’issue des

Tableau 4 | Teneurs moyennes totales des éléments nutritifs de la biomasse superficielle, calculées comme teneurs pondérées des ­é léments nutritifs des grains et de la paille de blé d'automne (années 1979–2003), dans différents systèmes culturaux de l'essai DOC N g/kg MS b

P %

g/kg MS

94

2,06

K %

g/kg MS

b

93

5,03

Ca %

g/kg MS

d

54

2,39

Mg %

g/kg MS

a

100

0,97

a

%

N0

13,64

D1/O1

13,22

c

91

2,08

b

94

6,27

c

68

1,94

c

81

0,92

b

95

D2/O2

12,92

d

89

2,07

b

93

7,59

b

82

1,81

d

76

0,87

d

90

C2/M2

14,51

a

100

2,21

a

100

9,28

a

100

2,04

b

85

0,90

c

92

Analyse de variance ** P<0,01; test Newman Keul: P=0,05 Procédé

**

**

**

**

**

Année

**

**

**

**

**

Procédé*Année

**

**

**

**

**

Le tableau indique les moyennes des systèmes D1/O1, D2/O2 et C2/M2. Différentes lettres dans les colonnes indiquent des différences de moyennes significatives.

78

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 74–81, 2013

100


18 16 14 12 10 8 6

Azote

Teneur en g kg-¹ MS

Teneur en g kg-¹ MS

Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants? | Production végétale

3,5 3,0 2,5 2,0 1,5 1,0 0.5

Calcium

Pro Pro Sar

Pro Pro Sar Sar Sar Ram Tam Tam Tam Tam Tit A

1979 1983 1986 1989 1990 1993 1996 1997 2000 2002 2003 Phosphore

Teneur en g kg-¹ MS

Teneur en g kg-¹ MS

3,0

D

2,5 2,0 1,5 1,0 0,5

1.6 1,4 1,2 1,0 0,8 0,6 0,4 0,2

Teneur en g kg-¹ MS

14 12 10 8 6 4 2 0

Sar

Sar Ram Tam Tam Tam Tam

Tit

1979 1983 1986 1989 1990 1993 1996 1997 2000 2002 2003

E

Potassium C2/M2 D2/O2 D1/O1 N0 Pro Pro Sar Sar Sar Ram Tam Tam Tam Tam

C

Tit

Magnésium

Pro Pro Sar

1979 1983 1986 1989 1990 1993 1996 1997 2000 2002 2003

Sar Ram Tam Tam Tam Tam

1979 1983 1986 1989 1990 1993 1996 1997 2000 2002 2003

Pro Pro Sar Sar Sar Ram Tam Tam Tam Tam Tit B

Sar

Tit

1979 1983 1986 1989 1990 1993 1996 1997 2000 2002 2003

Figure 2 a-e | Evolution dans le temps des teneurs totales en éléments nutritifs de la biomasse superficielle récoltée, calculées comme teneurs pondérées des éléments nutritifs des grains et de la paille de blé d'automne dans les années 1979– 2003, dans différents systèmes culturaux de l'essai DOC. Le tableau indique les moyennes des systèmes D1/O1, D2/O2 und C2/M2 par an. Pro: Probus, Sar: Sardona, Ram: Ramosa, Tam: Tamaro, Tit: Titlis.

essais des stations de recherche. La plage de teneurs indiquée montre dans quelle fourchette se situent les teneurs des éléments nutritifs des cultures en Suisse. Le phosphore et le magnésium sont généralement accumulés dans les grains, le potassium en revanche essentiellement dans la paille. Les teneurs en phosphore et en magnésium des grains de tous les procédés étaient proches de la moyenne DBF-GCH, en tout cas dans la fourchette observée avec les conditions typiques de la Suisse (tabl. 5; Spiess et al. 1995). Par contre, les teneurs en potassium de la

paille qui atteignaient 5,3 g kg –1 MS dans le procédé N0 se situaient nettement en dessous de la teneur minimale de 6,8 g kg –1 MS. Dans les procédés D1/O1 avec 7,4 g kg –1 MS et D2/O2 avec 9,4 g kg –1 MS, elles se situaient en dessous de la moyenne de 10,5 g kg –1 MS malgré des apports élevés en potassium dans D2. Eléments nutritifs disponibles pour les plantes dans le sol Les éléments nutritifs disponibles dans le sol confirment les résultats des analyses de plantes. Pour le phosphore, 

Tableau 5 | Teneurs moyennes des éléments nutritifs dans les grains et la paille et valeurs comparables des DBF-GCH 2009 (Flisch et al . 2009) Grains N

Grains P

N0

24,3

4,0

D1/O1

24,8

D2/O2

Grains K

Grains Ca

Grains Mg

Paille N

Paille P

Paille Ca

Paille Mg

4,7

0,6

1,3

6,6

0,7

4,2

4,5

0,5

1,4

5,9

0,8

5,3

3,6

0,8

7,4

2,9

25,1

4,2

4,4

0,4

1,3

6,1

0,6

0,9

9,4

2,6

C2/M2

26,7

4,2

4,4

0,4

1,3

0,6

7,1

1,0

12,3

3,0

Valeur moyenne

23,8

4,2

4,2

1,4

0,7

3,6

0,9

10,5

0,8

g/kg MS

DBF-GCH

Paille K g/kg MS

DBF-GCH

min.

17,6

3,6

2,9

0,9

3,5

0,5

6,8

0,7

DBF-GCH

max.

29,4

5,2

5,9

1,4

8,2

1,5

14,7

1,2

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 74–81, 2013

79


Production végétale | Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants?

Tableau 6 | Teneurs en éléments nutritifs du sol en mg/kg et classe de fertilité selon DBF-GCH 2009 (Flisch et al. 2009) pour 1977 et pour la moyenne des années 2000–2003 ainsi que variation annuelle des teneurs 1977–2003 P: 1977

Classe de fertilité

mg/kg

2003

K: Classe de fertilité

Variation taux/an

mg/kg

1977

Classe de fertilité

mg/kg

2003

Mg: Classe de fertilité

Variation taux/an

mg/kg

1977

Classe de fertilité

mg/kg

2003

Classe de fertilité

Variation taux/ an

mg/kg

N0

2,4

D

0,3

B

-0,08

7,1

B

3,0

A

-0,15

95,4

C

60,6

B

-1,29

D1

2,4

D

0,5

B

-0,07

7,0

B

5,7

A

-0,05

100,2

C

82,0

C

-0,67

O1

2,7

D

0,4

B

-0,08

8,1

B

5,5

A

-0,10

94,3

C

79,8

C

-0,54

C1

2,8

D

0,6

B

-0,08

7,8

B

5,0

A

-0,10

94,2

C

72,3

C

-0,81

D2

2,5

D

1,0

C

-0,05

6,9

B

10,7

B

0,14

101,5

C

97,8

C

-0,14

O2

2,6

D

0,9

C

-0,06

7,7

B

10,3

B

0,10

92,9

C

99,0

C

0,23

C2

2,6

D

1,4

C

-0,04

7,5

B

8,8

B

0,05

94,2

C

91,7

C

-0,09

M2

2,4

D

0,9

C

-0,06

6,8

B

9,8

B

0,11

98,3

C

101,3

C

0,11

L'approvisionnement du sol en éléments nutritifs a été représenté à l'aide des classes de fertilité A=pauvre, B=modéré C=suffisant D=riche; teneur moyenne en argile 15–20%.

les teneurs moyennes des années 2000 à 2003 avec niveau de fumure 2 se situent dans tous les systèmes dans la classe de fertilité C (suffisant; Flisch et al. 2009; tabl. 6). Avec un niveau de fumure 1, les valeurs atteignent la classe de fertilité B (modéré) même avec le procédé N0. Cette valeur est généralement considérée comme suffisante pour le niveau de rendement de l’agriculture biologique (Kolbe et Schuster 2011). Cela n’est pas étonnant, car les teneurs du sol en phosphore au début de l’essai en 1977 se situaient également à un niveau très élevé (classe de fertilité D, riche). Cependant au niveau de fumure 2, on observe une baisse continue par rapport à l’état initial. Ce n’est donc qu’une question de temps pour que l’approvisionnement en phosphore ait un effet limitant pour la croissance des plantes (tabl. 6). Dans le procédé N0 et au niveau de fumure 1, on a observé une nette baisse du magnésium disponible tandis qu’au niveau de fumure 2, les valeurs sont pratiquement restées constantes. Toutefois, les sols étaient tellement bien pourvus en magnésium qu’aujourd’hui encore, ils sont classés dans la catégorie C. Il n’y a que dans le procédé N0 que les teneurs ont baissé au point de passer dans la classe de fertilité B. La situation est totalement différente pour le potassium. Au début de l’essai, les teneurs en potassium disponible se situaient déjà à un niveau bas (classe de fertilité B). Au niveau de fumure 2, les teneurs ont même pu être légèrement relevées. Il faut cependant noter que ce phénomène était le plus marqué dans les deux systèmes bio D2 et O2. Cependant les teneurs ont considérablement baissé avec le niveau de fumure 1 et dans le procédé N0 pour passer dans le classe de fertilité A. Au niveau de fumure 1, elles n’atteignaient plus qu’environ 50  % des valeurs du niveau 2 et 30 % avec le procédé N0.

80

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 74–81, 2013

Conclusions Pour le blé d’automne de l’essai DOC, les différences autant dans les systèmes culturaux (D, O, C, M) que dans les niveaux de fumure ont une influence capitale sur les rendements. Ils dépendent avant tout de l’approvisionnement des plantes en azote, sachant que ce sont surtout les formes minérales d’engrais azoté qui contribuent à différencier les rendements. Le phosphore a pu être exclu des facteurs co-limitants, car l’approvisionnement en phosphore se situait à un haut niveau au début de l’essai. Malgré une baisse continue des éléments nutritifs disponibles dans le sol, en 2003, l’approvisionnement en phosphore est resté correct avec le niveau de fumure élevé et suffisant avec le niveau de fumure bas. La faible différence des teneurs en phosphore de la paille et des grains confirme ce constat. Par contre, le potassium a pu être identifié comme étant un facteur co-limitant de l’azote dans les cultures de blé, en cas d’apport réduit dans les procédés bio au niveau de fumure 1 et dans le procédé N0. C’est ce qu’indique la différence entre les teneurs de potassium dans la biomasse superficielle et les teneurs de potassium disponible dans le sol. Oberson et al. (2012) aboutissent à des résultats comparables dans leur étude sur la fixation biologique de N2 et le caractère limitant des éléments nutritifs dans la croissance du trèfle dans la prairie temporaire de l’essai DOC. Il faut toutefois souligner que les procédés bio au niveau de fumure 2 (soit 1,4 UGBF/ha) présentent un approvisionnement équilibré en potassium et que les deux systèmes biologiques peuvent être considérés comme durables avec ce niveau de fumure. Dans ce cas, l’amélioration des rendements passe essentiellement n par une amélioration de l’alimentation en azote.


Esperimento DOC: approvvigionamento in sostanze nutritive nelle colture di frumento autunnale - dove si evidenziano limitazioni? Il confronto tra sistemi su lungo periodo DOC si è concentrato anche sull'analisi dell'approvvigionamento in sostanze nutritive delle colture di frumento autunnale dal 1978 al 2003, al fine di fornire indicazioni sulle limitazioni di resa riconducibili alle sostanze nutritive nei sistemi agricoli biologici. I notevoli scarti di resa tra sistemi agricoli «biologici» e «convenzionali» e il livello di concimazione hanno potuto essere essenzialmente ricondotti all'approvvigionamento in sostanze nutritive delle piante, soprattutto in azoto. È stato escluso il ruolo di fattore co-limitante del fosforo, poiché il tenore di fosforo del suolo risultava sufficiente per tutta la durata dell'esperimento in tutti i processi DOC. Le analisi effettuate su paglia e chicchi indicano valori elevati di fosforo e una bassa differenziazione, confermando quindi i risultati ottenuti dall'analisi del suolo. Il potassio, invece, è stato identificato quale fattore co-limitante dell'approvvigionamento in azoto nei processi biologici a basso livello di concimazione e nelle superfici di controllo non concimate. Ciò è confermato dalla differenziazione dei tenori di potassio nella biomassa superficiale e quelli disponibili nel suolo. Tuttavia il sistema biologicodinamico e quello biologico-organico indicavano un approvvigionamento di potassio equilibrato a un livello di concimazione elevato. Entrambi i sistemi biologici possono pertanto essere ritenuti sostenibili a questo livello di concimazione.

Bibliographie ▪▪ Agroscope, 2011. Schweizerische Referenzmethoden der Eidg. landw. Forschungsanstalten, Band 1. ▪▪ Berry P. M., Sylvester_Bradley S., Philipps L., Hatch D. J., Cuttle S. P., Rayns F. W. & Gosling P., 2002. Is the productivity of organic farms restricted by the supply of available nitrogen? Soil Use and Management 18, 248–255. ▪▪ Flisch R., Sinaj S., Charles R. & Richner W., 2009. Données de base pour la fumure des grandes cultures et des herbages (DBF). Revue suisse d‘Agriculture 41 (1), 89–91. ▪▪ Gunst L., Jossi W., Zihlmann U., Mäder P. & Dubois D., 2007. DOK-Versuch: Erträge und Ertragsstabilität 1978 bis 2005. Agrarforschung 14, 542–547. ▪▪ Jossi W., Gunst L., Zihlmann U., Mäder P. & Dubois D., 2009. DOK-Versuch. Erträge bei halber und praxisüblicher Düngung. Agrarforschung 16, 296-301. ▪▪ Kolbe H. & Schuster M., 2011. Bodenfruchtbarkeit im Öko-Betrieb. Untersuchungsmethoden. Sächsisches Landesamt für Umwelt, Landwirtschaft und Geologie, Dresden. Accès: https://publikationen.sachsen.de/bdb/­ artikel/11877.

Summary

Riassunto

Apports en éléments nutritifs sur le blé d’automne – à partir de quand deviennent-ils limitants? | Production végétale

DOC trial: nutrient supply in winter wheat – where is the deficit? The nutrient supply of winter wheat was one of the topics investigated by the DOC long-term system comparison from 1978 to 2003. The aim of this trial is to provide evidence of nutrient-related yield limitations in organic farming systems. Substantial differences in yield between «organic» and «conventional» farming systems and different fertilisation intensities were primarily attributed to the delivery of nutrients – in particular, nitrogen – to the plants. Because the soil phosphorus supply was adequate in all DOC systems over the entire trial period, phosphorus was ruled out as a co-limiting factor. The plant analyses of straw and grain exhibited high figures and a low differentiation for phosphorus, thus confirming the soil findings. By contrast, potassium was identified along with nitrogen as a co-limiting factor in the organic systems at the low fertilisation intensity and in the unfertilised control. This was indicated by the differentiation of potassium content in the above-ground biomass and the available soil potassium content. Despite this, both the biodynamic and bio-organic system exhibited a balanced potassium supply at the high fertilisation intensity. Both bio-systems may therefore be considered sustainable at this fertilisation intensity. Key words: farming systems, organic farming, wheat, plant nutrition, nutrient limitation.

▪▪ Oberson A., Frossard E., Bühlmann C., Mayer J., Mäder P. & Lüscher A., 2012. Nitrogen fixation in grass-clover leys under organic and conventional cropping systems. Plant and Soil, submitted. ▪▪ Spiess E., Daniel R., Stauffer W., Niggli U. & Besson J.M., 1995. DOK-Versuch: Vergleichende Langzeit-Untersuchungen in den drei Anbausystemen biologisch-Dynamisch, Organisch-biologisch und Konventionell. V. Qualität der Ernteprodukte: Stickstoff- und Mineralstoffgehalte, 1. und 2. Fruchtfolgeperiode. Schweizerische Landwirtschaftliche Forschung, Sonderheft DOK Nr. 3, 1–33. ▪▪ Spiess E., Stauffer W., Niggli U. & Besson J. M., 1993. DOK-Versuch: Vergleichende Langzeit-Untersuchungen in den drei Anbausystemen biologisch-Dynamisch, Organisch-biologisch und Konventionell. IV. Aufwand und Ertrag: Nährstoffbilanzen, 1. und 2. Fruchtfolgeperiode. Schweizerische Landwirtschaftliche Forschung 32, 565–579.

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 74–81, 2013

81


P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides) Stéphanie Schürch1 et Thibaut Cordette2 Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, 1260 Nyon, Suisse 2 Université de Picardie Jules Vernes, 80000 Amiens, France Renseignements: Stéphanie Schürch, e-mail: stephanie.schuerch@acw.admin.ch, tél. +41 22 363 43 75 1

En Suisse, la moitié des céréales panifiables sont protégées contre les maladies foliaires par une application de fongicide.

Introduction La septoriose est une des plus importantes maladies fongiques du blé sous nos latitudes. La gestion de cette maladie est basée sur la culture de variétés peu sensibles, sur le travail du sol et sur l’application de fongicides. En Suisse, la moitié de la surface dédiée aux céréales panifiables est cultivée en mode conventionnel et est donc protégée contre les maladies foliaires par pulvérisation d’un produit fongicide. L’un des agents pathogènes de

82

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 82–87, 2013

la septoriose est Mycosphaerella graminicola (Fuckel) J. Schröt., aussi connu sous le nom de sa forme asexuée, Septoria tritici Rob. in Desm. Jusqu’à récemment, deux groupes de matières actives étaient utilisés pour lutter contre cette maladie: les Qol (Quinone Outside Inhibitors; strobilurines) et les DMI (Demethylation Inhibitors; dont les triazoles). Une mutation ponctuelle conférant la résistance aux QoI est rapidement apparue dans les populations de M. graminicola, rendant l’efficacité de ce groupe aléatoire. Le pathogène s’est aussi adapté


aux DMI par une perte de sensibilité graduelle, ce qui peut se traduire au champ par une érosion de l’efficacité des produits. Pour gérer ces phénomènes de résistance, le chlorothalonil, une matière active multi-sites, est régulièrement utilisé comme partenaire de mélange. Dès 2010, des fongicides à base de SDHI (Succinate Dehydrogenase Inhibitors) sont apparus sur le marché pour lutter contre la septoriose. Les SDHI, aussi appelés carboxamides, sont en fait une ancienne famille de fongicides utilisés depuis les années 1970 pour traiter les semences contre les Basidiomycètes (agents du charbon ou de la carie, par exemple; Rheinheimer 2012). La plus ancienne molécule de cette famille encore utilisée aujourd’hui est la carboxine, mise sur le marché en 1968. La découverte du boscalid en 2003 a donné un nouvel élan à cette famille puisque cette molécule est aussi active contre les Ascomycètes. Cet élargissement du spectre d’activité a rendu possible l’utilisation des SDHI contre les maladies foliaires des céréales. Ceci a suscité un regain d’intérêt consécutif des firmes phytopharmaceutiques pour cette famille et conduit au développement de nouvelles molécules, comme l’isopyrazam ou le bixafen. Vu le développement de résistances aux QoI et DMI, disposer d’un nouvel outil pour lutter contre la septoriose est intéressant. A ce jour, aucune souche de M. graminicola résistante aux carboxamides n’a été détectée en champ (FRAC 2012), mais des mutants résistants ont pu être obtenus en laboratoire (Skinner et al. 1998; Fraaije et al. 2012). De plus, des souches résistantes ont été trouvées au champ pour plusieurs autres pathogènes comme Botrytis cinerea ou Sclerotinia sclerotiorum (FRAC 2012). Les carboxamides inhibent au niveau des mitochondries un enzyme de la chaîne respiratoire (complexe II); un maillon indispensable de la production d’énergie dans les cellules fongiques. Chez les souches résistantes, cet enzyme est légèrement modifié (substitution d’un ou plusieurs acides aminés) de façon à ce que la molécule fongicide ne puisse plus se lier correctement à son site d’action. Le risque de développement de résistance chez M. graminicola vis-à-vis des SDHI est estimé moyen à élevé. Pour suivre l’évolution de la résistance chez ce pathogène, la sensibilité initiale (ligne de base) doit être connue. Ce point de départ est important pour évaluer l’efficacité des mesures de gestion de la résistance. Le but de la présente étude était de mettre au point dans notre laboratoire un test de sensibilité à grande échelle et de définir la ligne de base pour trois molécules appartenant aux SDHI: le boscalid, le bixafen et l’isopyrazam. Si, à l’avenir, une analyse de la résistance s’avérait nécessaire suite à d’éventuels doutes sur l’efficacité de ces molécules, un point de comparaison est  disponible.

Résumé

Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides) | Production végétale

Une nouvelle famille de fongicides, les carboxamides (ou SDHI), est disponible depuis peu pour lutter contre la septoriose du blé. Le risque de développement de résistances chez Mycosphaerella graminicola vis-à-vis de cette famille est estimé moyen à élevé. Des précautions d’utilisation sont donc nécessaires pour conserver le plus longtemps possible l’efficacité des carboxamides. Un suivi de la résistance pourrait être nécessaire si l’efficacité au champ n’est plus satisfaisante. Dans ce but, un protocole a été établi pour tester la sensibilité des souches à grande échelle. La sensibilité initiale de 117 souches de ce pathogène vis-à-vis de trois matières actives de la famille des SDHI a été évaluée in vitro. Ces données forment une «ligne de base» et pourront au besoin servir de point de comparaison. Dans un premier temps, pour prévenir et freiner le développement des résistances, les carboxamides ne sont appliquées sur céréales qu’une fois par culture et ne sont utilisées qu’en mélange avec des matières actives appartenant à un autre groupe de résistance.

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Production végétale | Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides)

1,8

Densité optique à 405 nm

1,6 1,4 1,2 1 0,8 EC 50 = 0,395 µg/ml

0,6 0,4 0,2 0 0,01

0,1

1

10

Concentration en boscalid (µg/ml) Figure 1 | Croissance de Mycosphaerella graminicola (souche 11-02) à sept concentrations de boscalid (ronds bleus) et EC 50 (triangle jaune), calculée par régression logistique (modèle = ligne noire).

Matériel et méthodes Un total de 127 souches de M. graminicola ont été isolées à partir de lésions foliaires. En 2008, le matériel végétal (variété Arina) provenait de Changins (VD) et Goumoëns-la-Ville (VD); en 2011, de ces deux mêmes lieux (variétés Arina et Tapidor) ainsi que de Satigny (variétés Zinal et Levis). Pour les tests de sensibilité (méthodologie d’après G. Stammler BASF, modifiée), les souches ont été incubées 7 jours sur yeast-malt-agar (YMA: 4 g d’extrait de levure, 4 g d’extrait de malt, 4 g de saccharose, 15 g d’agar, dans 1 l d’eau bidistillée, 50 mg d’auréomycine). La croissance levuriforme a été encouragée par exposition aux UV proches. Des spores prélevées à l’aide d’un coton-tige ont été mises en suspension dans un milieu liquide yeast-bacto-glycerol doublement concentré (YBG: 20 g d’extrait de levure, 20 g de bacto peptone, 40 ml de glycérol dans 1 l d’eau bidistillée). La concentration des spores a été ajustée à 1,6 × 104 spores/ml. Chacune des trois matières actives (Fluka) a été dissoute dans du diméthylsulfoxyde (DMSO) pour obtenir une solution mère à 1 g/l. Les concentrations finales des substances actives étaient de 0, 0,03, 0,1, 0,3, 1, 3, 6,5 et

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10 µg/ml avec une concentration constante de DMSO à 1 %. Dans des plaques de microtitration 96 puits, 50 µl de suspension de spores ont été mises en contact avec 50 µl de solution fongicide. Chaque test comportait un témoin négatif (milieu YBG sans spores) et a été répété trois fois. Après 7 jours d’incubation à 18 °C dans l’obscurité et sous agitation constante, la croissance a été évaluée par mesure de l’absorbance à 405 nm à l’aide d’un lecteur de plaque (MRX Reader, Dynex technologies). La sensibilité aux fongicides a été définie par la quantité de substance inhibant la croissance de 50 % (EC50), ellemême déterminée par une régression logistique à quatre paramètres (fig. 1) effectuée avec XLSTAT (Version 2011.2.04, Addinsoft 1995 – 2011).

Résultats La méthodologie a été adaptée afin d’obtenir des résultats fiables et reproductibles. Les tests de sensibilité ont été effectués en plaques de microtitration ce qui a rendu possible l’étude d’un relativement grand nombre (117) de souches de M. graminicola. Une plus grande quantité de boscalid était nécessaire pour inhiber la croissance de 50 % (EC50 entre 0,093 et 0,919 µg/ml, moyenne 0,388 µg/


Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides) | Production végétale

A

1

A

0,91

(µg/ml) EC 50EC Boscalid (µg/ml) EC 50 Boscalid (µg/ml) 50 Boscalid

A

0,9 0,8 1 0,8 0,7 0,9 0,7 0,6 0,8 0,6 0,5 0,7 0,5 0,4 0,6 0,4 0,3 0,5 0,3 0,2 0,4 0,2 0,1 0,3 0,1 0 0,2 0 0,1

B

0 1

B

0,91

(µg/ml) EC 50ECBixafen (µg/ml) EC 50 Bixafen (µg/ml) 50 Bixafen

B

0,9 0.8 1 0.8 0,7 0,9 0,7 0,6 0.8 0,6 0,5 0,7 0,5 0,4 0,6 0,4 0,3 0,5 0,3 0,2 0,4 0,2 0,1 0,3 0,10 0,2 0 0,1

n=22

n=24

n=31

n=19

n=21

n=24 Goumoëns

n=31 Changins

n=19 Goumoëns

n=21 Satigny

Goumoëns Changins 2008 n=22 n=24 2008 Goumoëns Changins

Changins n=31

Goumoëns2011 Satigny n=19 n=21 2011 Goumoëns Satigny

n=22 Changins

2008

1

n=24

n=31

n=19

n=21

n=22

n=24

n=31

n=19

n=21

n=22

n=24

n=31

n=19

n=21

Goumoëns

Changins

Goumoëns

Goumoëns Changins 2008

Changins

Goumoëns2011Satigny

2008 Goumoëns

Changins

Goumoëns

Changins

Changins

1 C 0,9

Isopyrazam (µg/ml) EC50 EC Isopyrazam (µg/ml) EC50 Isopyrazam 50 (µg/ml)

C

0,9 0,8 1 0,8 0,7 0,9 0,7 0,6 0,8 0,6 0,5 0,7 0,5 0,4 0,6 0,4 0,3 0,5 0,3 0,2 0,4 0,2 0,1 0,3 0,1 0 0,2 0 0,1

2011

n=22

0 C

Changins

2008

Satigny

2011 Satigny 2011

n=22

n=24

n=31

n=19

n=21

n=22

n=24

n=31

n=19

n=21

n=22

n=24

n=31

n=19

n=21

Satigny

Goumoëns

Changins

Goumoëns

Goumoëns Changins 2008

Changins

Goumoëns2011 Satigny

2008 Goumoëns

Changins

2011 Goumoëns Satigny

Changins

0 Changins

2008

2011

Figure 2 | Sensibilité de cinq populations de M. graminicola au (A) boscalid, (B) bixafen et (C) isopyrazam. (Boîtes à moustaches: 50 % des données dans le rectangle, ligne horizontale = médiane, croix rouge = moyenne).

ml) par rapport aux deux autres matières actives (Kruskal–Wallis K = 98,3, P < 0,0001; fig. 2). Le bixafen (EC50 entre 0,030 et 0,638 µg/ml, moyenne 0,217 µg/ml) était un peu moins efficace in vitro que l’isopyrazam (EC50 entre 0,018 et 0,626 µg/ml, moyenne 0,161 µg/ml). Il n’y avait pas de différence significative entre les deux années de prélèvement, 2008 et 2011. La résistance aux strobilurines des 46 souches collectées en 2008 était préalablement connue. Les souches résistantes et les souches sensibles aux strobilurines ne présentaient pas de profil de sensibilité aux carboxamides significativement différent. Entre carboxamides, par contre, la sensibilité était corrélée. La sensibilité au bixafen était liée le plus fortement à celle à l’isopyrazam (R2 = 0,47, P < 0,0001; fig. 3), alors que la corrélation entre boscalid et isopyrazam (R2 = 0,31, P < 0,0001) était un peu moins forte et celle entre bixafen et boscalid (R2 = 0,17, P < 0,0001) la plus faible.

Discussion Un protocole adapté à notre laboratoire et la sensibilité initiale aux carboxamides de souches suisses de M. graminicola ont été établis. Cette ligne de base est un point de comparaison indispensable à toute étude de sensibilité future. La fourchette de concentration de fongicide utilisée était adaptée à la sensibilité de la population. L’ajout de deux concentrations supplémentaires entre 0,1 et 1 µg/ml permettrait une estimation plus précise des EC50. Réunir les conditions induisant une croissance levuriforme et homogène (conditions indispensables à une mesure quantitative) de M. graminicola dans des puits de 6,5 mm de diamètre est relativement délicat. Les EC50 obtenues (moyennes et fourchettes) correspondent à celles décrites pour des souches de M. graminicola d’autres provenances (Sierotzki et al. 2010; Fraaije et al. 2012). Les fourchettes sont relativement larges. Une plus grande quantité de boscalid que de bixafen ou d’isopyrazam est nécessaire pour inhiber la croissance des souches. Selon un modèle structural des interactions entre les carboxamides et leur cible, l’affinité (force de liaison) du boscalid avec les protéines du complexe II serait inférieure à celles des deux autres molécules (Fraaije et al. 2012). Nous n’avons pas observé de résistance croisée entre les strobilurines et les carboxamides; deux familles de fongicides ayant un mode d’action différent. Par contre, la sensibilité aux carboxamides était intercorrélée, ce qui s’explique facilement vu que les trois molécules ont la même cible et le même mode d’action. On parle de sensibilité croisée. Pratiquement, cela signifie que si une souche venait à développer une résistance à une molécule, elle serait aussi résistante aux  deux autres.

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Production végétale | Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides)

0,7

0,6

EC50 Isopyrazam (µg/ml)

0,5

0,4

0,3

0,2

0,1

0 0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

EC50 Bixafen (µg/ml)

Figure 3 | Sensibilité croisée entre bixafen et isopyrazam chez M. graminicola (régression linéaire y = 0,55x + 0,04; n = 111).

Des mesures ont été prises pour limiter le risque de développement de résistance dans les populations naturelles de M. graminicola. Les carboxamides ne sont pas employées seules pour lutter contre la septoriose, mais en mélange avec des triazoles qui ont un mode d’action différent et avec lesquelles il n’y a pas de résistance croisée. L’application est limitée à un seul traitement contre les maladies foliaires sur céréales. Ces deux mesures devraient être suffisantes pour limiter le risque de prolifération des souches résistantes et conserver à long n terme l’efficacité des carboxamides.

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Sensibilità iniziale ai fungicidi SDHI (carbossamidici) della septoriosi del frumento E’ da poco disponibile una nuova famiglia di fungicidi, i carbossamidici o SDHI per lottare contro la septoriosi del frumento. Il rischio di sviluppare delle resistenze nella Mycosphaerella graminicola verso questa famiglia è stimato da medio a elevato. E’ dunque necessario prendere delle precauzioni nell’uso per conservare il più lungo possibile l’efficacia dei carbossamidici. Un monitoraggio delle resistenze potrebbe essere necessario se l’efficacia in campo non è più soddisfacente. A questo scopo è stato stabilito un protocollo per testare su larga scala la sensibilità dei ceppi. La sensibilità iniziale di 117 ceppi di questo patogeno verso tre sostanze attive della famiglia dei SDHI è stata valutata in vitro. Questi dati formano una «linea di base» e potrebbero, al bisogno, servire come punto di confronto. Per prevenire e frenare, in un primo tempo, lo sviluppo di resistenze, i carbossamidici sono applicati su cereali solo una volta per coltura e sono utilizzati unicamente miscelati con delle sostanze attive appartenenti a un altro gruppo di resistenza.

Summary

Riassunto

Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides) | Production végétale

Baseline sensitivity of septoria leaf blotch to SDHI fungicides Since recently, a new class of fungicides is available to control Septoria leaf blotch of wheat, the so-called carboxamides or SDHI. The risk of resistance development in Mycosphaerella graminicola to SDHI fungicides is estimated to be medium to high. Therefore the implementation of an anti-resistance strategy is necessary to preserve the efficacy of these fungicides. Sensitivity studies may be necessary in case field efficacy weakens. Thus, a method was established to conduct large-scale sensitivity tests in our laboratory. The sensitivity to three SDHI active substances (boscalid, bixafen and isopyrazam) of 117 Swiss M. graminicola strains was measured in vitro. These data describe the «baseline sensitivity» (initial sensitivity level prior to the introduction of the fungicides) and may be used in case of control failures to detect potential shifts in sensitivity. At the moment, to prevent resistance emergence and build up, SDHI fungicides are applied on cereals only once per crop and are used only in mixtures with partners having a different mode of action. Key words: EC50, baseline sensitivity, resistance, septoria leaf blotch, wheat.

Bibliographie ▪▪ Fraaije B. A., Bayon C., Atkins S., Cools H. J., Lucas J. A. & Fraaije M. W., 2012. Risk assessment studies on succinate dehydrogenase inhibitors, the new weapons in the battle to control Septoria leaf blotch in wheat. Molecular Plant Pathology 13 (3), 263–275. ▪▪ FRAC, 2012. Succinate dehydrogenase inhibitor (SDHI) working group. Minutes of the 5th meeting on December 6, 2011. Accès: http://www. frac.info [6 novembre 2012]. ▪▪ Rheinheimer J., 2012. Succinate dehydrogenase inhibitors: anilides. In: Modern crop protection compounds (éd. W. Krämer, U. Schirmer, P. ­J eschke & M. Witschel). Wiley, Weinheim , 627-639.

▪▪ Sierotzki H., Frey R., Morchoisne M., Olaya G., Mösch M. & Scalliet G., 2010. Sensitivity of fungal pathogens to SDHI fungicides. In: Modern fungicides and antifungal compounds VI (éd. H. W. Dehne, H. B. Deising, U. Gisi, K. H. Kuck, P. E. Russel & H. Lyr). DPG, Braunschweig, 179–186. ▪▪ Skinner T., Bailey A., Renwick A., Keon J., Gurr S. & Hargreaves J. A., 1998. A single aminoacid substitution in the iron-sulphur protein subunit of succinate dehydrogenase determines resistance to carboxin in Mycosphaerella graminicola. Current Genetics 34 (5), 393–398.

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E c l a i r a g e

Surfaces nécessaires à l'alimentation de l’agglomération bâloise mises en image Adrian Moser1 et Claude Lüscher2 1 Service de géoinformation Bâle-Ville, 4001 Bâle, Suisse 2 Haute école spécialisée de la Suisse du nord-ouest (FHNW), 4132 Muttenz, Suisse Renseignements: Adrian Moser, e-mail: admoser@gmx.ch, tél. +41 61 267 92 67

Pour nourrir une personne, la surface d'une table ne suffit pas. (Photo: Christian Koch/Ruth Schürmann tiré du Magazin Umwelt 2/2010)

La question de l’approvisionnement en denrées alimentaires joue de nouveau un rôle plus important. La Suisse peut-elle nourrir sa population actuelle de façon suffisante sur la base de l’alimentation actuelle? Quelle est la surface nécessaire moyenne pour nourrir une personne en Suisse? Cette surface peut-elle être optimisée par un régime alimentaire adapté? Comment se répartiraient les surfaces nécessaires pour nourrir la population de l’agglomération de Bâle, si toutes les denrées alimentaires devaient être produites localement? Tel était en résumé le thème d’un travail de Master à la Haute école spécialisée de la Suisse du nord-ouest. Une grande importance a été accordée sur la visualisation de la surface nécessaire, donc sur des cartes. Hypothèses Des calculs effectués par la Haute école spécialisée ont démontré qu’une personne aurait besoin d’une surface agricole de 1’800 m² pour son alimentation actuelle (sans boissons). Ceci est valable pour les denrées produites en Suisse sur la base de rendements actuels moyens. Ainsi, l’alimentation d’une personne nécessite-

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rait 47 % de la surface pour la production herbagère, 51 % pour les grandes cultures et 2 % pour l’approvisionnement en fruits. Au total et en incluant les surfaces herbagères, près de 80 % de la surface nécessaire seraient voués à une production fourragère (fig. 1). D’emblée, il a fallu développer un modèle basé sur des méthodes de géoinformatique et des dates géomatisées, pour pouvoir répartir correctement la surface agricole à disposition sur la population locale. Faute de données plus précises quant à l’aptitude du sol, le modèle est basé sur des données fournies par la statistique suisse de la superficie. Les surfaces répertoriées ont été allouées de façon itérative en se basant entre autres sur les distances afin de minimiser les transports. Dans le cas de l’agglomération de Bâle, une surface nécessaire pour nourrir 500 000 personnes a dû être allouée. Il fallait s’attendre à ce que la surface nécessaire dépasse de loin l’étendue de l’agglomération elle-même. Le nouveau modèle a permis de dresser des cartes qui montrent assez bien quelle serait l’étendue de la surface nécessaire si l’on se basait sur l’alimentation actuelle. La figure 2 montre donc l’extension de cette surface nécessaire pour nourrir un demi-million de personnes vivant dans l’agglomération bâloise. Il faut préciser que les personnes vivant en dehors de l’agglomération n’ont pas été prises en considération. Le modèle considère que les surfaces extérieures à l’agglomération sont inhabitées... En outre, la limite du système a été définie (frontières avec la France et l’Allemagne), car sans cette restriction le modèle se serait dispersé au nord. Il s’avère que le modèle peut être transposé sur d’autres régions. Deux scénarios Dans la deuxième partie du travail, il s’agissait d’optimiser le régime alimentaire actuel, essentiellement, en réduisant la surface individuelle tout en respectant les aspects nutritionnels physiologiques. Deux scénarios ont été calculés; le premier avait pour but de réduire la surface individuelle nécessaire au strict minimum. En réduisant la part de produits animaux et en les remplaçant par des cultures, la surface nécessaire individuelle a pu être réduite de près


Surfaces nécessaires à l'alimentation de l’agglomération bâloise mises en image | Eclairage

fruits 2%

produits laitiers 30%

viande bovine 23%

viande de porc 17%

grandes cultures 22%

fruits 1%

!"#$%&'()*"+,-./%0+ Surface totale 1764m²

produits laitiers 38%

œufs 4%

volaille 3%

grands cultures 44%

!"#$%&'()*"+,-./%0+ Surface totale 1087m²

œufs 3%

viande bovine 1% viande de porc 12% volaille 0%

Figure 1 | Parts des surfaces pour la production des divers produits agricoles par rapport à la surface totale nécessaire pour l’alimentation actuelle d’une personne.

Figure 3 | Parts des surfaces pour la production des divers produits par rapport à la surface nécessaire totale pour une personne, sur la base d’un régime alimentaire optimisé (visant une surface minimale).

de 40 % à quelques 1100 m2 par personne (fig. 3). C’est surtout la surface herbagère qui s’est vue réduite. La figure 4 montre la surface nécessaire pour nourrir la population de l’agglomération de Bâle sur la base d’un régime alimentaire optimisé (visant une surface minimale). La surface herbagère de l’agglomérationmême suffirait presque pour couvrir les besoins en produits laitiers et en viande, tandis que la surface nécessaire pour les grandes cultures s’étendrait toujours bien au-delà des limites de l’agglomération. Ce régime alimentaire presque végétarien ne correspond pas vraiment aux coutumes suisses. C’est pourquoi,

dans un deuxième scénario, on a essayé d’atteindre une meilleure utilisation des surfaces agricoles à disposition. Etant donné la situation géographique dans le Jura tabulaire, la Suisse du nord-ouest possède beaucoup de surfaces qui ne peuvent être utilisées raisonnablement que pour la production herbagère. Un régime alimentaire adapté devrait forcément prévoir une partie plus importante de produits laitiers et de viande, puisque dans le cas contraire on ne respecterait pas vraiment le potentiel producteur des monts jurassiens. Ceci ne correspondrait pas non plus à une politique de sécurité ali mentaire judicieuse.

Régime alimentaire actuel en Suisse aucune restriction spatiale

utilisation grandes cultures surfaces herbagères arboriculture Surface totale

total

par ­personne

[ha] 45 377 40 399 1236 86 952

m2 918 816 25 1759

Légende grandes cultures surfaces herbagères vergers

Figure 2 | Surfaces nécessaires pour nourrir la population de l’agglomération bâloise sur la base de l’alimentation ­a ctuelle, la surface totale étant divisée en surfaces herbagères, surfaces de grandes cultures et vergers. Les surfaces résidentielles, les forêts ainsi que les surfaces non agricoles ont été éclipsées. Mise à part la frontière avec l’étranger, aucune autre restriction n’a été prise en compte.

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Eclairage | Surfaces nécessaires à l'alimentation de l’agglomération bâloise mises en image

Régime alimentaire visant une surface minimale aucune restriction spatiale total utilisation grandes cultures surfaces herbagères arboriculture Surface totale

[ha] 36 430 15 347 1236 53 013

par ­personne m2 737 310 25 1072

Légende grandes cultures surfaces herbagères vergers

Figure 4 | Surfaces nécessaires pour alimenter la population de l’agglomération bâloise sur la base d’une alimentation minimale, divisées en surfaces herbagères, cultures et vergers. Les surfaces résidentielles, les forêts ainsi que les surfaces non agricoles ont été éclipsées. Mise à part la frontière avec l’étranger, aucune autre restriction n’a été prise en compte.

La ration de produits laitiers a donc été augmentée de 10 %, et la consommation de viande a été réduite de 25 %. Seule la viande de bœuf a été choisie, parce que la race bovine est particulièrement adaptée à une utilisation judicieuse des pâturages souvent très raides. La surface totale a été augmentée de 15  % environ à 2000 m2 par personne, en respectant autant que possible les exigences d’une alimentation physiologiquement acceptable basée sur des recommandations officielles. En comparaison avec le régime alimentaire actuel, la part des surfaces nécessaires à la production de viande augmente, ainsi que celle des cultures légèrement. Les sur-

produits laitieres 28%

fruits 2% !"#$%&'()*"+,-./%0+ Surface totale 2025m²

viande bovine 38%

grandes cultures 18% œufs 1%

viande de porc 12% volaille 1%

Figure 5 | Parts des surfaces pour la production des divers ­p roduits par rapport à la surface nécessaire totale, sur la base d’une alimentation avec optimisation de la surface.

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faces nécessaires pour la production de viande porcine et pour la volaille se voient fortement réduites (fig. 5). La figure 6 démontre que la surface cultivée atteint à peu près la même étendue que celle du calcul de base (fig. 2). Ceci s’explique par le fait, que tant qu’il reste de la surface herbagère pour couvrir les besoins de consommation en viande, une partie de la surface cultivée doit servir comme prairie artificielle (sinon il faudrait importer du fourrage). C’est seulement à partir du moment où toute la surface herbagère aura été allouée que les terres cultivées pourront être utilisées exclusivement à la production des cultures. Même si la surface totale augmente de 15 %, les régions recouvertes par l’utilisation agricole demeurent à un niveau semblable à celui d’aujourd’hui; donc ce régime alimentaire adapté respecte beaucoup mieux les conditions de production naturelles sans occuper davantage de surfaces. Optimisation possible de l’utilisation des surfaces L’étude montre de manière exemplaire où se situerait la surface agricole nécessaire pour la population de l’agglomération de Bâle, si tous les produits alimentaires étaient cultivés en Suisse. De plus, ces produits devraient être cultivés à proximité de l’agglomération pour éviter de longs transports. Le régime alimentaire actuel pourrait donc être amélioré en ce qui concerne l’utilisation des surfaces ainsi


Surfaces nécessaires à l'alimentation de l’agglomération bâloise mises en image | Eclairage

Régime alimentaire avec optimisation de la surface aucune restriction spatiale total utilisation grandes cultures surfaces herbagères arboriculture Surface totale

[ha] 37 418 61 341 2224 100 983

par ­personne m2 757 1241 45 2043

Légende grandes cultures surfaces herbagères vergers

Figure 6 | Surfaces nécessaires pour alimenter la population de l’agglomération bâloise avec un régime alimentaire optimisé, respectant le potentiel d’utilisation du Jura. Les surfaces résidentielles, les forêts ainsi que les surfaces non agricoles ont été éclipsées. Aucune restriction n’a été prise en compte à l’exception de la frontière.

que d’un point de vue alimentaire (par exemple réduire la consommation de viande). Un deuxième point concerne l’optimisation des surfaces nécessaires à un régime alimentaire défini et les conditions de production agricole locales. Les terres cultivées en Suisse sont limitées. En réduisant la part des prairies artificielles dans la rotation des cultures, en minimisant les pertes ou en modifiant le régime alimentaire, on arriverait à nourrir davantage de personnes avec la même surface agricole. Un point important concerne l’adaptation des modes de productions actuels, surtout par un régime de fourrage des ruminants basé sur de l’herbe et une réduction de la ration en fourrages concentrés (cultures, mais ensilé): on pourrait donc utiliser le potentiel producteur de la surface donnée de façon plus judicieuse. Tous les calculs ont été effectués sur la base d’une production conventionnelle. Une comparaison entre celle-ci et la production biologique par exemple ne faisait pas partie de la thèse. Perspectives Le nouveau modèle permet de calculer et de visualiser des modes d’alimentation divers et d’imaginer des scénarios variés, avec des régimes alimentaires très différents, et pour des régions et des populations plus ou moins grandes. Il est possible de «diriger» la production agricole dans l’une ou l’autre direction.

Le modèle a ses défauts: les données de la statistique suisse de la superficie étaient les seules à disposition pour évaluer le potentiel de production, en raison d’un manque de données pédologiques plus détaillées. La production de viande bovine ne correspond pas à la réalité suisse, où normalement on engraisse les bêtes. Quant aux ruminants, seule la race bovine a été abordée, toute autre race aurait compliqué les choses. Malgré tout, le modèle permet une approche réaliste et peut être transposé à d’autres régions. C’est important puisqu’il faut rendre conscients les hommes au sujet de la surface cultivable nécessaire pour produire du pain et de la viande. n

La thèse de Master d’Adrian Moser, ingénieur en géomatique et Master of Advanced Studies Umwelttechnik und –management, a été réalisée dans le cadre d’une formation post-grade en matière de protection d’environnement à la Haute école spécialisée de la Suisse du nord-ouest à Muttenz, Bâle-Campagne. Un groupe de travail a accompagné cette étude dont faisaient partie des spécialistes de l’Office fédéral de l’agriculture OFAG et des deux Office d’agriculture des cantons de Bâle-Ville et de Bâle-Campagne. Claude Lüscher enseigne au sein de cette formation et a accompagné l’étude. Bibliographie ▪▪ Adrian Moser; Ernährungsfläche der Agglomeration Basel – ein Versuch der Visualisierung: Masterthesis, Fachhochschule Nordwestschweiz, MAS-U, Muttenz, 2011/2012 (non publiée).

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E c l a i r a g e

Teneurs en azote et en minéraux des poulets de chair Patrick Schlegel1 et Harald Menzi2 Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP Haras, 1725 Posieux, Suisse 2 Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL, 3052 Zollikofen, Suisse Renseignements: Patrick Schlegel, e-mail: patrick.schlegel@alp.admin.ch, tél. +41 26 407 72 75 1

Figure 1 | Pesée du matériel frais pour la détermination de la ­m atière sèche. (Photo: ALP-Haras)

Les rejets d’azote (N), de phosphore (P) et de potassium (K) des poulets de chair ont été récemment réévalués (Menzi et Schlegel 2009; Agroscope 2009). Cette évaluation s’effectue par un bilan import-export. La quantité d’éléments ingérés moins la quantité d’éléments fixés par les poulets de chair lorsque ceux-ci sont vendus par l’exploitation, donne la quantité d’éléments rejetés par les animaux. Les teneurs en N, en P et en K de poulets utilisées jusqu’à présent pour les calculs de bilans nutritifs s’élevaitent à respectivement 26, 5,2 et 2,4 g / kg de poids vif (Agroscope 2009). Ces données proviennent d’une étude réalisée en 1974 (Furrer et Stauffer 1975). Or, la production de poulets de chair s’est profondément modifiée au cours des 40 dernières années (génétique, alimentation, performances,…), ce qui justifie de nouvelles analyses pour déterminer les teneurs corporelles des poulets. La production de poulets de chair suisse est, pour l’essentiel, effectuée de manière contractuelles selon des programmes d’engraissement prédéfinis, tels que coquelets, engraissement court et engraissement normal. Les poulets engraissés selon ces programmes sont abattus à un poids vif de respectivement 800, 1650 et 2150 g. L’engraissement extensif représente 8,5 % de la production suisse (Aviforum 2010). Ce travail avait pour objectif de déterminer les teneurs en azote et en minéraux des poulets de chair.

Matériel et méthodes Ce travail avait pour objectif de déterminer les teneurs en minéraux et en azote des poulets de chair. Les données de 27 poulets de chair élevés selon 4 programmes d’engraissement indiquent que les teneurs corporelles en matière sèche et en azote augmentent en fonction du poids vif des animaux, tandis que celle en sodium baisse. Pour un poulet de 2 kg, correspondant à un poids usuel d’abattage des poulets âgés d’environ 37 jours, les teneurs corporelles en azote, en calcium, en phosphore et en potassium s’élèvent à respectivement 29,1, 7,1 et 5,8 g/kg de poids vif et les teneurs en cuivre et en zinc à respectivement 1,7 et 21,3 mg/kg de poids vif.

92

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 92–95, 2013

Vingt-sept poulets de chair engraissés ont été utilisés pour cette étude. Les critères de sélection des poulets étaient les suivants: programme d’engraissement, organisation de production et exploitation agricole. Les poulets prélevés étaient en bonne santé et avaient un poids vif représentatif de l’élevage dont ils étaient issus. Les animaux provenaient de 14 exploitations agricoles, affiliées à quatre organisations de production et ont été engraissés selon quatre programmes (coquelets, engraissement court, normal et extensif). Les teneurs en énergie métabolisable (EM), en matière azotée (MA) et en P des aliments distribués ont été communiquées par les orga-


Teneurs en azote et en minéraux des poulets de chair | Eclairage

Tableau 1 | Valeur nutritive des aliments démarrage, croissance et finition pour poulets de chair

Programme d'engraissement

EM [MJ/kg] Dém.

Croiss.

MA [g/kg] Fin.

Coquelets Court

12,6

Normal

13,0

13,0

Extensif

P [g/kg]

Dém.

Croiss.

Fin.

Dém.

Croiss.

Fin.

225

189

190

6,5

5,7

5,5

223

205

198

6,5

5,6

5,4

223

191

192

6,5

5,6

5,5

216

198

200

6,4

5,5

5,5

nisations de production. La teneur en N des aliments a été calculée en divisant la teneur en MA par 6,25. Les poulets tués ont été pesés alors qu’ils étaient chauds ou légèrement refroidis (ce qui correspond au PV). Ils ont ensuite été broyés dans un hachoir à viande, pesés puis congelés (fig. 1). La masse congelée a été lyophilisée et la teneur en matière sèche de celle-ci déterminée (fig. 2). Chaque masse corporelle lyophilisée a été moulue (1 mm) afin d’obtenir une poudre homogène destinée à la réalisation des analyses chimiques. La teneur en eau résiduelle a été déterminée par gravimétrie (THG 601, LECO). La teneur en N quant à elle a été dosée par la méthode de Kjeldahl (Kjeltec 2400/2460, Foss, Suède) une fois le matériel digéré (Digestor, Foss; Suède). La teneur corporelle en MA a été obtenue en multipliant la teneur en N par 6,38. Après incinération, les minéraux (Ca, P, Mg, K, Na, Cu, Fe, Mn et Zn) ont été déterminés par spectrométrie (ICP-OES Optima 7300 DV Perkin-Elmer, Waaltham, USA). Toutes les analyses ont été effectuées à deux reprises, à l’exception de celles de la matière sèche (une seule fois) et de N (quatre fois).

Pour chaque animal, les éléments nutritifs analysés ont été calculés par kg de PV en matière sèche (MS) et en matière fraîche (MF). Une analyse de régression a été effectuée pour évaluer l’effet du poids vif sur les teneurs corporelles (Systat 2007).

Résultats et discussion Les teneurs moyennes en EM, en MA et en P des aliments distribués (aliment de démarrage, de croissance et de finition) figurent dans le tableau 1 selon les programmes d’engraissement. Les teneurs étaient semblables entre organisations de production. Les races Hubbard et JA étaient représentées en engraissement extensif alors que seule la race Ross (Hybride 308 et PM3) figurait dans les autres programmes d’engraissement. Le poids vif moyen des coquelets (n = 6), des poulets en engraissement court (n = 7), normal (n = 8) et extensif (n = 6) était de respectivement 0,84 ± 0,05 kg, 1,47 ± 0,22 kg, 2,09 ± 0,20 kg et 2,19 ± 0,27 kg. Le PV minimal et maximal était de respectivement 0,80 kg et 2,44 kg. 

Tableau 2 | Statistique descriptive de la teneur en matière sèche, en matière azotée et minérale du poulet Par kg PV en MS

Par kg PV en MF

Ø

e-type

Min

Médiane

Max

Ø

e-type

Min

Médiane

Max

MS

[g]

350

19

323

346

391

MA

[g]

523

28

473

517

583

183

10

169

181

200

N

[g]

82,0

4,3

74,2

81,0

91,4

28,7

1,5

26,4

28,4

31,4

CE

[g]

81,6

6,9

70,0

80,8

98,7

28,6

2,7

24,0

27,8

34,8

Ca

[g]

19,8

2,3

15,7

19,4

25,2

6,9

0,9

5,2

6,7

8,9

P

[g]

16,4

1,9

13,8

16,0

21,8

5,7

0,7

4,7

5,6

7,7

Mg

[g]

0,98

0,06

0,87

0,97

1,11

0,34

0,02

0,31

0,35

0,39

K

[g]

7,50

0,56

6,18

7,55

8,48

2,62

0,11

2,36

2,60

2,83

Na

[g]

3,16

0,32

2,61

3,12

3,76

1,10

0,07

0,92

1,09

1,23

Cu

[mg]

5,15

1,41

2,83

5,08

7,41

1,80

0,49

0,97

1,69

2,79 218

Fe

[mg]

236

155

106

168

654

82

53

40

59

Mn

[mg]

9,7

4,0

3,5

10,5

17,3

3,4

1,4

1,3

3,5

6,2

Zn

[mg]

60,5

5,7

50,9

60,2

76,0

21,8

4,0

17,8

21,0

39,8

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 92–95, 2013

93


Eclairage | Teneurs en azote et en minéraux des poulets de chair

Export en N [g]

80 60 40 20 0 0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

2,0

2,5

3,0

Poids vif [kg]

Figure 2 | Matériel séché et moulu prêt pour les analyses chimiques. (Photo: ALP-Haras)

Les teneurs moyennes en éléments nutritifs des poulets de chair figure dans le tableau 2, indépendamment du programme d’engraissement et du PV. Etant donné que les PV ne présentaient pas de distribution normale (Anderson-Darling: P = 0,045; Shapiro-Wilk: P = 0,02), une distorsion des teneurs moyennes est possible

Export en P [g]

20 16 12 8 4 0 0,0

0,5

1,0

1,5 Poids vif [kg]

Figure 3 | Export en azote et en phosphore en fonction du poids vif.

Tableau 3 | Export en éléments nutritifs de poulets de chair en fonction du poids vif [kg] Selon la matière fraîche Modèle MS [g] N [g] Ca [g] P [g] Mg [g] K [g] Na [g] Cu [mg] Fe [mg] Mn [mg] Zn [mg]

PV

PV2

Coeff.

313

22

P

***

*

Coeff.

26,5

1,3

P

***

*

Coeff.

7,10

P

***

Coeff.

5,83

P

***

Coeff.

0,35

P

***

Coeff.

2,62

P

***

n.s.

Coeff.

1,20

-0,06

P

***

*

Coeff.

1,74

P

***

Coeff.

84

P

*

Coeff.

3,36

P

+

Coeff.

21,3

P

***

n.s. n.s. n.s.

n.s. n.s. n.s. n.s.

Selon la matière sèche

R2

ET

0,998

30,7

0,998

2,10

0,987

0,159

0,990

0,114

0,997

0,004

0,998

0,022

0,997

0,116

0,929

0,098

0,727

10,1

0,844

0,283

0,990

0,42

R 2: Coefficient de détermination; ET: Erreur type; ***: P < 0,001; **: P<0,01 *: P<0,05; +: P<0,10; n.s.: P>0,10

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 92–95, 2013

PV

PV2

81,3 ***

n.s.

19,8 ***

n.s.

16,3 ***

n.s.

0,97 ***

n.s.

8,19

-1,22

***

*

3,82

-1,11

***

***

4,87 ***

n.s.

232 ***

n.s.

9,37 ***

n.s.

59,5 ***

n.s.

R2

ET

0,997

0,91

0,988

0,43

0,989

0,33

0,996

0,012

0,996

0,318

0,995

0,139

0,936

0,260

0,716

28,7

0,841

0,799

0,990

1,18


Teneurs en azote et en minéraux des poulets de chair | Eclairage

Bibliographie ▪▪ Agroscope, 2009. Données de base pour la fumure des grandes cultures et des herbages (DBF-GCH). Revue suisse d’Agriculture 2, 1–100. ▪▪ Aviforum 2010. Informations personnelles. ▪▪ Bregendahl K., Sell J. L. & Zimmerman D. R., 2002. Prediction of wholebody composition from the whole-body dry matter percentage of threeeek-old broiler chicks. Poultry Sci. 81, 1168–1171. ▪▪ Fatufe A. A. & Rodehutscord M., 2005. Growth, body composition and marginal efficiency of methionine utilization are affected by nonessential amino acid nitrogen supplementation in male broiler chicken. Poultry Sci. 84, 1584–1592. ▪▪ Furrer O. J. & Stauffer W., 1975. Menge und Zusammensetzung des in der Geflügelhaltung anfallenden Düngers. Schweiz. Landw. Monatshefte 53, 368–376. ▪▪ Hadorn R., 1994. Einfluss unterschiedlicher Nahrungsfaserträger (Soja und Hirseschalen) im Vergleich zu Weizenquellstärke auf die Nährstoffund Energieverwertung von wachsenden Schweinen und Broilern. Dissertation ETH, N° 10946.

25 20

400

N P K MS

350 300

15

250

10

200

5

150

0 0,0

0,5

1,0

1,5 Poids vif [kg]

2,0

2,5

Teneur en MS [g / kg PV]

30 Teneur en N, P et K [g / kg PV]

(tabl. 2), raison pour laquelle les teneurs corporelles ont été converties en quantité exportée (en g/animal) et reportées en fonction du PV en MS ou en MF (tabl.3, exemple avec N et P sous fig. 3). Basés sur la MS, les exports en K (effet quadratique, P < 0,001) et en Na (effet quadratique, P < 0,05) s’abaissaient avec un PV croissant. Basé sur la MF, l’export en MS et en N augmentait avec le PV croissant alors que celui en Na s’abaissait (effets quadratiques, P < 0,05). Ainsi, les teneurs en MS et en N augmentent et celle en Na baisse avec l’accroissement du PV des poulets, tandis que celles d’autres éléments, tels que le P et le K, restent constantes (fig. 4). Un poulet de 2 kg PV, correspondant à un poids de vente usuel d’un engraissement normal (environ 37 jours d’âge) exporte 58,2 g de N (26,5 g N/kg PV × 2,0 kg PV + 1,3 g N / kg PV2 × 2,02 kg PV = 58,2 g N, tabl. 3), ce qui représente 29,1 g N/kg PV (58,2/2 = 29,1 g N/kg PV). La teneur corporelle en N selon Hadorn (1994), Bregendahl et al. (2002), Hemme (2004), Fatufe et Rodehutscord (2005) et Javadi et al. (2007) est légèrement supérieure à la valeur utilisée jusqu’à aujourd’hui en Suisse, soit 26 g/kg PV (Agroscope 2009), et légèrement inférieure aux données de la présente étude. La teneur corporelle en P de 5,8 g/kg PV (tabl. 3) est d’environ 35 % plus élevée que celle de coquelets légers (530 g), selon Hemme (2004), ou de poulets de chair de 40 jours d’âge (Nys et al. 1997).

100 3,0

Figure 4 | Teneurs en MS, N, P, K [g/kg PV] de poulets de chair en fonction du poids vif.

Conclusions La présente étude sur les teneurs corporelles de poulets de chair a démontré que: ••basées sur la MS, les teneurs en K et en Na s’abaissaient en fonction de l’accroissement du PV; ••la teneur en MS augmentait en fonction de l’accroissement du PV; ••basées sur la MS, les teneurs en N et en Na s’abaissaient en fonction de l’accroissement du PV; ••la teneur en N, en P et en K de poulets de chair pesant 2 kg s’élevait à respectivement 29,1, 5,8 et 2,6 g / kg PV. Ces valeurs sont supérieures de respectivement 12 %, 12 % et 8 % à celles utilisées jusqu’à présent. n

▪▪ Hemme A., 2004. Untersuchungen an Broilern zum Einfluss verschiedener anorganischer P-Quellen im Futter auf Leistung, P-Retention, P-Gehalte im Blut sowie die Zusammensetzung und Bruchfestigkeit von Knochen. Thesis, Hannover, Deutschland. ▪▪ Javadi M., Geelen M. J. H., Everts H., Hovenier R., Javadi S., Kappert H. & Beynen A. C., 2007. Effect of dietary conjugated linoleic acid on body composition and energy balance in broiler chickens. Brit. J. of Nutr. 98, 1152–1158. ▪▪ Menzi H. & Schlegel P., 2009. Neue Hofdüngernormen für das Geflügel. Schweizerische Geflügelzeitung 4, 14–15. ▪▪ Nys Y., Guivarc’h F. & Chadi M., 1997. Variation de la composition des carcasses de poulets de chair en phosphore, en fonction de l’âge, du sexe et de la lignée. Journées de la Recherche Avicole 2, 177–180. ▪▪ Systat, 2007. Systat version 12.02. Systat Inc., Chicago, U.S.A.

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E c l a i r a g e

L’agriculture brésilienne a le vent en poupe Urs Gantner, Office fédéral de l’agriculture, 3003 Berne, Suisse Renseignements: Urs Gantner, e-mail: urs.gantner@blw.admin.ch, tél. +41 31 322 25 74

Pâturage dans le Pantanal. (Photo: Urs Gantner, OFAG)

L’agriculture brésilienne, axée sur les exportations, est moderne, efficiente et compétitive. Ce pays d’Amérique du Sud est le troisième exportateur ­mondial de produits agricoles. Le Brésil dispose de 338 millions d’hectares de terres fertiles, dont 90 millions d’hectares encore en friche. L’agriculture brésilienne contribue notablement à la création de valeur ajoutée dans les régions rurales. En revanche, la déforestation à grande échelle et l’affectation à la culture des terres défrichées sont écologiquement contestables. L’atout majeur de l’agriculture brésilienne est qu’elle repose sur une recherche agronomique dynamique1. En été 2012, j’ai participé à la Conférence internationale des agro-économistes, qui s’est tenue au Brésil, et j’ai ensuite parcouru le pays. Le présent rapport est basé sur les documents de la conférence. Le secteur agroalimentaire brésilien En 2010, le secteur agroalimentaire brésilien a contribué pour 22 % au produit intérieur brut (PIB), employé 37 % de la main-d’œuvre du pays et constitué plus de 38 % des exportations.

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 96–98, 2013

Ces dernières années, le Brésil a considérablement élargi sa production agricole. En 1991, la production céréalière s’est élevée à 60 millions de tonnes sur environ 38 millions d’hectares. Pour 2012, on s’attend à une production de 162 millions de tonnes sur 51 millions d’hectares. Le gain pour la production agricole devrait excéder 150 milliards US$. La production de viande, en particulier de viande de volaille, a elle aussi considérablement augmenté. Ces dernières années, l’énergie agricole s’est elle aussi remarquablement développée. L’utilisation des biocarburants progresse, au Brésil comme dans d’autres pays, ce qui explique l’essor de la demande de canne à sucre et, parallèlement, de bioénergie. La plantation d’essences à croissance rapide sur une surface de 6,5 millions d’hectares soutient l’approvisionnement énergétique et permet de couvrir en premier lieu la demande de l’industrie sidérurgique en charbon de bois. En 2011, le secteur agroalimentaire a exporté pour près de 95 milliards US$ et en 2012, le total des exportations devrait dépasser les 100 milliards US$ en termes de valeur, chiffres qui confirment la compétitivité du secteur agricole brésilien. 1 Geraldo Bueno et al., Brazilian agriculture, development and changes, Embrapa, Brasilia, DF 2012.


L’agriculture brésilienne a le vent en poupe | Eclairage

Le Brésil s’est hissé au rang de premier exportateur mondial de sucre, de café, de jus d’orange et de bioénergie. Entre-temps, ce pays est également devenu le principal exportateur de viande de volaille. Le potentiel de production de l’agriculture brésilienne est jugé considérable. On estime ainsi que partant de la période 2008/2009, la production de canne à sucre, de maïs et de soja augmentera de près de 2,5 % par an d’ici 2019/2020. Grâce à l’intensification de la production, on peut escompter deux, voire trois récoltes par an, et une augmentation des rendements par hectare. Selon les données officielles fournies par le Ministère de l’agriculture, de l’élevage et de l’alimentation, l’extension des surfaces cultivables ne sera désormais plus que de 0,7 % par an. L’intention est ici clairement de limiter la déforestation. Source de valeur ajoutée dans les régions rurales La part de l’agriculture au PIB du Brésil s’élève actuellement à environ 6 %, ce qui correspond approximativement à 180 milliards R$ (1 euro = 2,38 R$). Les ressources sont toutefois très inégalement réparties: 0,4 % seulement des exploitations agricoles génèrent près de 49 % des recettes de l’agriculture. La taille des exploitations familiales est en moyenne de 18 hectares (2006), alors que celle des exploitations non familiales est d’au moins 313 hectares. Aussi, 90 % des exploitations familiales sont qualifiées de «très pauvres». Protection du climat Le Brésil a promulgué une loi sur la protection du climat en 2009. D’ici 2020, le secteur agricole (y compris la production de biocarburants) devra réduire ses émissions polluantes de 226 mégatonnes d’équivalents-CO2, ce qui correspond à 21,5 % de la diminution totale envisagée. Une série d’objectifs ont été fixés, entre autres l’intensification de l’économie pastorale aux fins de stopper la

déforestation et le développement de systèmes climatcompatibles de gestion forestière, d’élevage et de culture des champs intégrée (sans labour). Le déboisement a régressé de 75 % entre 2003/2004 et 2008/2009. Il est actuellement d’environ 7000 km2 par an. Le Brésil veut réduire la déforestation de 80 % d’ici 2020, promouvoir l’utilisation des biocarburants et développer les énergies renouvelables. Production durable La question de la durabilité fait l’objet de discussions intensives, principalement au sujet de la production d’éthanol. Au Brésil, le carburant produit à partir de la canne à sucre est ainsi jugé clairement plus durable que celui tiré du maïs (US). L’éthanol tiré de la canne à sucre est le biocarburant qui a le rendement énergétique le plus élevé à l’hectare. Neuf litres au moins de bioéthanol peuvent être extraits par litre d’éthanol utilisé pour la production de canne à sucre. Aucune autre matière première agricole ne permet actuellement d’obtenir un tel gain énergétique. La production d’éthanol à partir de la canne à sucre génère ainsi près de deux fois plus d’énergie qu’investie dans la production de canne à sucre. Le Brésil prévoit de couvrir plus de 70 % de ses besoins en carburant avec de l’éthanol et d’augmenter ses exportations d’éthanol à 8,3 billions de litres d’ici 2017. Le pays attend de la production d’éthanol qu’elle génère des emplois et des recettes supplémentaires ainsi qu’une meilleure répartition des revenus dans le secteur agricole. Les autres avantages mis en avant sont la diversification de la production d’énergie et la réduction des gaz à effet de serre. Le rôle clé de la recherche agronomique Le Brésil attache une grande importance à la recherche agronomique appliquée, la science et la technologie ayant pour mission de dynamiser la production agricole.

Tableau 1 | Importance du Brésil en termes de production mondiale et d’exportations Production

Exportation

Principal acheteur

Sucre

Produit

1

1

Russie

Café

1

1

USA

Jus d’orange

1

1

Belgique

Soja

2

2

Chine

Viande de bœuf

2

3

Russie

Alcool

2

1

USA

Viande de volaille

3

1

Japon

Maïs

4

4

Iran

Viande de porc

4

4

Russie

Source: Ministério da Agricultura, Pecuária e Abastecimento (Mapa, AGE; Brésil).

Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 96–98, 2013

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Eclairage | L’agriculture brésilienne a le vent en poupe

Capacité de production agricole Les principaux facteurs influant sur la capacité de production sont le capital humain, les nouvelles technologies et leur diffusion, ainsi que des ressources naturelles en quantité suffisante et des conditions climatiques et météorologiques favorables. Aussi le Brésil met-il l’accent sur la formation, initiale et continue. Les conditions météorologiques permettent au moins une, et parfois jusqu’à trois récoltes, dans les régions climatiquement favorisées du pays. Grâce à de nouvelles technologies, la production a pu être considérablement augmentée, ce qui est illustré ci-après par deux exemples. Fixation biologique de l’azote: dans le cadre du programme brésilien de sélection des sojas, les variétés de soja utilisées sont sélectionnées depuis les années 60 en fonction de leur possibilité de fixation biologique de l’azote. La sélection de nouvelles variétés a permis de diminuer les coûts de production et la charge environnementale. C’est grâce à la sélection de ces nouvelles variétés plus performantes que le Brésil est passé au rang de deuxième producteur mondial de fèves de soja. Développement de la savane brésilienne (Cerrado): grâce à la mise en œuvre judicieuse de nouvelles technologies, le Cerrado est ­devenu une région de premier plan en matière de production céréalière et d’élevage de bovins. L’amélioration de la fertilité des sols, de nouvelles variétés végétales et de nouveaux hybrides végétaux, le choix de systèmes de culture sans labour ainsi que de systèmes de culture et d’élevage intégrés ont joué un rôle clé dans ce développement. De 1970 à 1990, les efforts ont surtout porté sur l’extension de la surface agricole utile. Par la suite, c’est la production qui s’est accrue, principalement grâce à l’augmentation des rendements. Les représentants des milieux agricoles font aussi valoir que des rendements plus élevés permettent de préserver la végétation et la forêt tropicale d’origine.

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 96–98, 2013

Le Brésil peut ainsi être qualifié à juste titre de pays pionnier en matière d’agriculture tropicale. Le Brésil investit 1,6 % de son PIB dans la recherche, dont 12 % dans la recherche agronomique, ce qui souligne l’importance de cette dernière. La recherche agronomique brésilienne mise sur les innovations qu’elle vise à imposer sur le marché également. Elle accorde une importance particulière au développement des connaissances technologiques, de même qu’à la collaboration bilatérale et aux accords multilatéraux dans ce domaine. Une importance nettement accrue est également accordée à la protection de l’environnement. Les scientifiques prônent ainsi la nécessité d’une agriculture «plus verte». L’agriculture doit devenir économe en ressources (resource-saving), climatiquement plus ingénieuse (climate smart) et les émissions de dioxyde de carbone doivent être réduites. Il convient de plus d’exploiter durablement les forêts. Les autres défis que le pays se propose de relever sont l’amélioration de la compétitivité, l’augmentation de la production, la promotion de la recherche et du développement ainsi que le transfert des technologies et l’échange et la mise en application des connaissances.

Conclusions L’agriculture brésilienne va poursuivre son développement, grâce surtout à l’augmentation de la productivité. La recherche scientifique remplit à cet égard une mission essentielle: contribuer à l’élargissement de la production des denrées vitales food, feed, fiber et biofuel (produits alimentaires, aliments pour animaux, fibres et biocarburants). L’intensification des systèmes pastoraux aura une importance capitale dans ce contexte. Selon les déclarations officielles, cela se fera dans une perspective de durabilité. Au cours de ces dernières années, le Brésil a prouvé qu’une agriculture efficiente et compétitive est possible dans les tropiques. Il est aujourd’hui en mesure de faire bénéficier d’autres pays de sa riche expérience, notamment l’Afrique subsaharienne. Le Brésil a pris la décision d’orienter son agriculture vers la durabilité et aussi d’améliorer la formation de sa population rurale. Le potentiel de production de l’agriculture brésilienne est considérable. Le Brésil va continuer de s’affirmer sur les marchés mondiaux et augmenter ses parts de marché. Ce faisant, il va apporter sa contribution à la réduction de la faim dans le monde et à la stabilisation des prix mondiaux. n


P o r t r a i t

Patrick Schlegel: le plaisir de la découverte Enfant de l’Ajoie, Patrick Schlegel a grandi dans une ferme à proximité de Courgenay. Dès sa plus tendre enfance, il développe une forte affinité avec le milieu agricole qui l’a tout naturellement amené à faire des études d’agronomie à l’EPFZ. Esprit optimiste, aiguisé par la curiosité, il témoigne très tôt d’un féroce appétit de découverte, en particulier du monde. Tout jeune étudiant au lycée de Porrentruy, il saisit l’occasion qui lui est offerte de faire une année d’échange linguistique au Texas. La confrontation avec l’art de vivre texan est un choc culturel saisissant pour le jeune gymnasien. Pendant ses études d’agronomie entre 1994 et 1999, la fièvre du voyage et la passion de la découverte le reprennent et le conduiront en Australie pour un stage dans une exploitation agricole avec vaches allaitantes et moutons mérinos. Son diplôme d’ingénieur agronome en poche, Patrick Schlegel débute sa carrière professionnelle dans une entreprise active dans le développement d’additifs alimentaires pour animaux de rente, notamment des oligo-éléments. Pour coordonner la recherche en alimentation animale et rencontrer ses clients, il sillonne l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Afrique du Sud, conjuguant ainsi sa passion des voyages et son activité professionnelle. Après huit ans de «pérégrinations professionnelles», Patrick Schlegel désire relever un nouveau challenge. La recherche l’attire. Il débute alors un travail de doctorat à l’INRA et, parallèlement, entre au service d’Agroscope en 2008. Il y conduit des projets portant sur l’alimentation minérale et vitaminique des animaux de rentes, principalement de la vache laitière et du porc. Actuellement, il travaille sur la détermination des teneurs minérales du fourrage et sur les antagonismes entre minéraux qui peuvent affecter les recommandations d’apports, par exemple, l’influence du calcium sur le statut en phosphore chez les porcs. Une autre responsabilité de Patrick Schlegel consiste à revoir les normes en matière de rejets en éléments nutritifs par les animaux de rente. Les derniers travaux en date sont publiés dans cette revue (lire articles en pages 60 et 94). Son activité de chercheur au service de la communauté agricole lui procure une grande satisfaction, surtout lorsqu’il s’agit de réaliser des essais avec les animaux et de mettre en valeur les données obtenues. Ayant grandi dans la campagne jurassienne, Patrick Schlegel a choisi de s’établir, avec sa famille, dans la campagne fribourgeoise, dans la Veveyse plus précisément. Très adroit de ses deux mains, il passe actuellement son

temps libre à l’aménagement de sa maison et consacre beaucoup de temps à ses deux enfants. Côté hobby, son sport de prédilection est le snowboard qu’il a enseigné à une kyrielle de petits Jurassiens à l’occasion de nombreux camps de ski. Evelyne Fasnacht, station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP-Haras

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A c t u a l i t é s

Actualités 2012

> L’environnement pratique

> Agriculture

> Eléments fertilisants et utilisation des engrais dans l’agriculture Un module de l’aide à l’exécution pour la protection de l’environnement dans l’agriculture

Eléments fertilisants et utilisation des ­engrais dans l’agriculture Un module de l’aide à l’exécution pour la protection de l’environnement dans l’agriculture La présente aide à l’exécution explicite les bases légales applicables pour la protection des eaux et de l’air en lien avec la gestion des éléments fertilisants et l’utilisation des engrais. Elle concrétise les notions juridiques non précisées en relation avec les éléments fertilisants dans l’agriculture comme le bilan des engrais, les valeurs limites maximales, les restrictions d’utilisation, l’épandage d’engrais azotés comme le lisier et les liquides riches en azote, les mesures contre les pertes par lessivage, ruissellement et volatilisation de l’ammoniac, la détention des animaux en plein air ou l’entreposage provisoire de fumier. Elle est destinée avant tout aux autorités d’exécution, conseillers agricoles, agro-entrepreneurs, ainsi qu’aux agriculteurs intéressés. Hans Ulrich Gujer, Office fédéral de l’environnement OFEV Markus Hardegger, Office fédéral de l’agriculture OFAG L’aide à l’exécution «Eléments fertilisants et utilisation des engrais» sera publiée uniquement sous forme électronique. Téléchargement: www.umwelt-schweiz.ch/uv-1225-f

Problèmes plus nombreux et nouveaux avec les mycotoxines Lors de la conférence du World Mycotoxin Forum à ­Rotterdam (NL) du 3 au 9.11.2012 qui a réuni plus de 400 participants représentant la recherche, la branche et l’industrie, un large éventail de thèmes ont été discutés: les nouvelles mycotoxines, les conséquences sur la santé, des stratégies de prévention et de réduction, le prélèvement d’échantillons et des nouvelles méthodes d’analyse, ainsi que les facteurs biotiques et abiotiques qui influencent la formation des toxines comme le changement climatique et des facteurs culturaux. De nouvelles études montrent qu’outre les toxines de Fusarium bien connues, dans les conditions culturales européennes, les

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toxines hautement toxiques des champignons Aspergillus, comme les aflatoxines, peuvent déjà se former au champ comme on en a détecté récemment dans des lots de maïs provenant de la vallée de Po en Italie. Il est donc nécessaire d’étudier l’apparition de ces champignons, l’écologie et l’épidémiologie, ainsi que le développement de stratégies culturales adaptées tout comme l’utilisation des antagonistes afin de minimiser le risque de contamination de nos denrées alimentaires et de nos aliments pour animaux par ces substances très toxiques. Susanne Vogelgsang et Hans-Rudolf Forrer Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART


A c t u a l i t é s

Nouvelles publications

Rapport ART 754

Rentabilité de la détention de moutons à viande dans les régions de montagne suisses Une analyse des coûts complets basée sur trois groupes d’exploitations de différentes tailles

Decembre 2012

Rentabilité de la ­détention de moutons à viande dans les ­régions de montagne suisses

Auteurs Lorenz Büchel und Victor Anspach, Forschungsanstalt Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, Tänikon 1, CH-8356 Ettenhausen; E-Mail: victor.anspach@art.admin.ch

Rapport ART 754 L’élevage de moutons est une branche de production répandue en région de montagne. Les moutons servent non seulement à la production de viande d’agneau, mais aussi au maintien du paysage rural typique. Toutefois, la demande de viande d’agneau est en baisse et la viande importée, de bonne qualité, est d’un prix plus abordable. Par conséquent, la production suisse doit relever un défi de taille. Sur la base de trois groupes d’exploitations de différentes tailles, des analyses de coûts complets ont été établies. Elles oscillent entre CHF 1619 et 3414 par 100 kg de viande d’agneau. On constate que pour un troupeau allant jusqu’à 200 brebis, il n’y a pratiquement pas d’effets d’échelle. En revanche, dans les effectifs plus importants, le potentiel de réduction de coûts est considérable. Ainsi, les exploitations qui comptent plus de 200 brebis affichent des coûts complets de CHF 1619 par 100 kg de poids vif d’agneau à viande, soit environ la moitié moins que les exploitations qui ont moins de 200 brebis. En outre, le canal de commercialisation exerce également une influence. Les exploitations de moins de 200 brebis commercialisent souvent la viande directement à leurs clients, tandis que les exploitations de plus de 200 brebis ne commercialisent leur viande que dans le canal traditionnel (revendeurs et marchés publics). La vente directe implique des coûts plus élevés (principalement des coûts calculés), mais aussi des recettes plus élevées par 100 kg de poids vif d’agneau à viande. Le calcul des coûts et profits indique qu’aucun groupe d’exploitations n’est en mesure de couvrir ses coûts complets avec le produit de la viande et les paiements directs. Par conséquent, le salaire horaire supposé de CHF 28.– n’est pas atteint. Le salaire horaire moyen est de CHF 13.–. Impressum

Edition: Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, Tänikon, CH-8356 Ettenhausen, Rédaction: Etel Keller, ART Traduction: Regula Wolz, ART

Les Rapports ART paraissent environ 20 fois par an. Abonnement annuel: Fr. 60.–. Commandes d‘abonnements et de numéros particuliers: ART, Bibliothèque, 8356 Ettenhausen T +41 (0)52 368 31 31 F +41 (0)52 365 11 90 doku@art.admin.ch Downloads: www.agroscope.ch ISSN 1661-7576

Fig. 1: L’élevage de moutons est une branche de production répandue dans l’agriculture des régions de montagne. (Photos: Christian Gazzarin, ART)

L’élevage de moutons est une branche de production répandue en région de montagne. Les moutons servent non seulement à la production de viande d’agneau, mais aussi au maintien du paysage rural typique. Toutefois, la demande de viande d’agneau est en baisse et la viande importée, de bonne qualité, est d’un prix plus abordable. Par conséquent, la production suisse doit relever un défi de taille. Sur la base de trois groupes d’exploitations de différentes tailles, des analyses de coûts complets ont été établies. Elles oscillent entre CHF 1619 et 3414 par 100 kg de viande d’agneau. On constate que pour un troupeau allant jusqu’à 200 brebis, il n’y a pratiquement pas d’effets d’échelle. En revanche, dans les effectifs plus importants, le potentiel de réduction de coûts est considérable. Ainsi, les exploitations qui comptent plus de 200 brebis affichent des coûts complets de CHF 1619 par 100 kg

de poids vif d’agneau à viande, soit environ la moitié moins que les exploitations qui ont moins de 200 brebis. En outre, le canal de commercialisation exerce également une influence. Les exploitations de moins de 200 brebis commercialisent souvent la viande directement à leurs clients, tandis que les exploitations de plus de 200 brebis ne commercialisent leur viande que dans le canal traditionnel (revendeurs et marchés publics). La vente directe implique des coûts plus élevés (principalement des coûts calculés), mais aussi des recettes plus élevées par 100 kg de poids vif d’agneau à viande. Le calcul des coûts et profits indique qu’aucun groupe d’exploitations n’est en mesure de couvrir ses coûts complets avec le produit de la viande et les paiements directs. Par conséquent, le salaire horaire supposé de CHF 28.– n’est pas atteint. Le salaire horaire moyen est de CHF 13.–.

Lorenz Büchel et Victor Anspach, Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART

Aires de repos perforées dans l’engrais­­sement porcin

Rapport ART 758

Aires de repos perforées dans l’engraissement porcin Propretés des boxes et des animaux

Novembre 2012

Auteurs Roland Weber1, Beat Wechsler2, Urs Marolf1, Felix Grob3, Werner Humbel3, Edi Peterhans3, Urs Thalmann4 1 Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, Centre spécialisé dans la détention convenable des ruminants et des porcs, CH-8356 Ettenhausen 2 Office vétérinaire fédéral, OVF, Centre spécialisé dans la détention convenable des ruminants et des porcs, CH-8356 Ettenhausen 3 Suisseporcs, Fédération suisse des éleveurs et producteurs de porcs, Allmend 8, CH-6204 Sempach 4 Krieger AG, Rütmattstrasse 6, CH-6017 Ruswil

Rapport ART 758 Depuis la révision de la législation sur la protection des animaux en 2008, les aires de repos présentant un petit pourcentage de perforations pour l’écoulement des liquides sont autorisées dans la production porcine. Pour les porcheries d’engraissement existantes, ce pourcentage de perforations ne doit pas dépasser 5%. Jusqu’à présent, aucune étude n’a été faite pour savoir si ce type d’aires de repos convenait pour la propreté des logettes et des animaux. L’étude réalisée par ART en collaboration avec Suisseporcs avait pour but d’examiner si les aires de repos avec un pourcentage réduit de perforations étaient adaptées aux porcs à l’engrais. Par conséquent, différentes aires de repos ont été installées dans quatre exploitations équipées de boxes à caillebotis intégral. Ces aires de repos présentaient des pourcentages de perforations variables et étaient construites dans des matériaux différents. Il s’agissait de grilles en béton d’un pourcentage de perforations de 5%, 6%, 6,4% et 8%, de tapis en caoutchouc d’un pourcentage de perforations de 5% et 10% ainsi que du système Click In (éléments en plastique pour obturer les fentes) avec un pourcentage de perforations de 5%. Les chefs d’exploitation eux-mêmes ainsi qu’un collaborateur d’ART ont évalué la propreté des sols et des animaux à intervalles réguliers pendant une année. Les résultats de l’étude montrent que les aires de repos et les animaux sont d’autant plus sales que le pourcentage de perforations est bas. Dans les boxes équipés de tapis en caoutchouc avec 10% de perforations, la saleté des aires de repos et des animaux était au même niveau que dans les boxes avec caillebotis intégral. De même avec les revêtements ayant 5% de performations, la saleté des aires de repos et des animaux se situait entre le niveau «propre» et le niveau «peu sale». Le pourcentage de perforations maximal prescrit par la législation sur la protection des animaux, à savoir 5%, n’a par conséquent pas conduit à un niveau de saleté qu’il faudrait considérer comme inacceptable du point de vue du bien-être des animaux. Impressum

Edition: Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, Tänikon, CH-8356 Ettenhausen, Rédaction: Etel Keller, ART Traduction: Regula Wolz, ART

Les Rapports ART paraissent environ 20 fois par an. Abonnement annuel: Fr. 60.–. Commandes d‘abonnements et de numéros particuliers: ART, Bibliothèque, 8356 Ettenhausen T +41 (0)52 368 31 31 F +41 (0)52 365 11 90 doku@art.admin.ch Downloads: www.agroscope.ch ISSN 1661-7576

Depuis la révision de la législation sur la protection des animaux en 2008, les aires de repos présentant un petit pourcentage de perforations pour l’écoulement des liquides sont autorisées dans la production porcine. Pour les porcheries d’engraissement existantes, ce pourcentage de perforations ne doit pas dépasser 5 %. Jusqu’à présent, aucune étude n’a été faite pour savoir si ce type d’aires de repos convenait pour la propreté des logettes et des animaux. L’étude réalisée par ART en collaboration avec Suisseporcs avait pour but d’examiner si les aires de repos avec un pourcentage réduit de perforations étaient adaptées aux porcs à l’engrais. Par conséquent, différentes aires de repos ont été installées dans quatre exploitations équipées de boxes à caillebotis intégral. Ces aires de repos présentaient des pourcentages de perforations variables et étaient construites dans des matériaux différents. Il s’agissait de grilles en béton d’un pourcentage de perforations de 5 %, 6 %, 6,4 % et 8 %, de tapis en caoutchouc d’un pourcentage de perforations de 5 % et

10 % ainsi que du système Click In (éléments en plastique pour obturer les fentes) avec un pourcentage de perforations de 5 %. Les chefs d’exploitation euxmêmes ainsi qu’un collaborateur d’ART ont évalué la propreté des sols et des animaux à intervalles réguliers pendant une année. Les résultats de l’étude montrent que les aires de repos et les animaux sont d’autant plus sales que le pourcentage de perforations est bas. Dans les boxes équipés de tapis en caoutchouc avec 10 % de perforations, la saleté des aires de repos et des animaux étaient au même niveau que dans les boxes avec caillebotis intégral. De même avec les revêtements ayant 5 % de performations, la saleté des aires de repos et des animaux se situait entre le niveau «propre» et le niveau «peu sale». Le pourcentage de perforations maximal prescrit par la législation sur la protection des animaux, à savoir 5 %, n’a par conséquent pas conduit à un niveau de saleté qu’il faudrait considérer comme inacceptable du point de vue du bien-être des animaux.

Roland Weber et al., Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 100–103, 2013

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Actualités

M C oem d ime un nmi iqtut e é isl ud ne gperne s s e

www.agroscope.admin.ch/medienmitteilungen www.agroscope.admin.ch/communiques 31.01.2013 18.12.2012 Publication du BEEBOOK – un standard pour ren- À la découverte du profil d'arômes de pommes forcer la recherche apicole internationale Peut-on toujours parler d'amour dès la première bouLe «BEEBOOK: standard methodologies for Apis mellifera research» (BEEBOOK: guide des méthodes standard pour la recherche apicole), dont la rédaction a été coordonnée et supervisée par Vincent Dietemann (Centre de recherche apicole, Agroscope), Peter Neumann (Université de Berne) et Jamie Ellis (Université de Floride, EtatsUnis), a été mis en ligne sur le site du journal scientifique Journal of Apicultural Research. Il sera aussi imprimé sous forme de livre pour être utilisé en laboratoire.

24.01.2013 Potentiel élevé des grandes cultures et de la ­production fourragère biologiques En Suisse, la demande de denrées alimentaires issues de la production biologique va croissant. Sachant qu’à peine six pourcents des terres assolées sont exploitées de cette manière, l’offre de produits de grandes cultures bio doit être complétée par des importations. Les derniers résultats de recherche d‘Agroscope, par exemple sur le travail du sol et la rotation des cultures ou encore la sélection d’Arcturus, la première graminée fourragère bio en Europe, renforcent l’agriculture biologique en Suisse dans les domaines des grandes cultures et de la production fourragère.

21.01.2013 Compensation écologique: les surfaces suffisent, mais pas la qualité L’agriculture doit fournir une large contribution au maintien et à la promotion de la biodiversité. En Suisse, il existe suffisamment de surfaces de compensation écologique pour y parvenir. Leur qualité est cependant insuffisante, de la région de plaine jusqu’à la zone de montagne II. C’est ce que montre la nouvelle étude réalisée sur l’opérationnalisation des objectifs environnementaux pour l’agriculture dans le domaine de la biodiversité.

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Recherche Agronomique Suisse 4 (2): 100–103, 2013

chée? Ou la pomme dévoile-t-elle au contraire son pouvoir de séduction progressivement, lorsqu'on lui en laisse le temps? Des experts sensoriels Agroscope ont analysé le développement des arômes des pommes. Et ce qu'ils ont découvert est surprenant: lorsque l'on prend le temps de la savourer jusqu'à la dernière bouchée, la pomme offre un véritable feu d'artifice d'arômes.

17.12.2012 Des codes-barres pour identifier les parasites A l’aéroport de Zurich, Paris ou Berlin, le contrôleur des douanes pourra désormais identifier l'empreinte génétique (code-barres d'ADN) d’un organisme inconnu dans un arrivage de plantes et, grâce à une base de données, savoir s'il s'agit ou non d’une espèce nuisible en agriculture. Depuis 2009, vingt organisations issues de quinze pays se sont attelées à concrétiser ce scénario. Aujourd'hui, le projet de recherche de l'Union européenne «QBOL» (Quarantine Barcoding of Life) a abouti et la base de données ADN est fonctionnelle. Des chercheurs d’Agroscope ont dirigé le groupe de travail «Nématodes».


Actualités

Liens internet

Manifestations

Un site pour s’orienter dans les marchés agricoles www.marktkompass.com Le site «Marktkompass» (uniquement en allemand) fournit des informations utiles sur tous les produits et les secteurs de production agricoles les plus importants. Il permet par ailleurs de consulter pour tout produit les prix actuels, des analyses du marché et des prévisions économiques.

Dans le prochain numéro Mars 2013 / Numéro 3 Les pâturages d’alpage et d’estivage façonnent le paysage agricole suisse. Les changements ­économiques, politiques et ­sociétaux en cours, de même que le changement climatique, entraînent une modification dans l’utilisation des régions d’estivage. Le programme de recherche AlpFUTUR est axé sur cette thématique. Dans le numéro actuel de la Recherche Agronomique Suisse et dans les numéros suivants paraîtront des articles sur le projet transversal AlpFUTUR. (Photo: Gabriela Brändle, ART)

••Efficience économique des alpages suisses, Thomas Blättler et al., HAFL ••ALPIS – Un concept pour un système d’information sur l’économie alpestre, Bernadette Oehen et al., FIBL ••Situation sociale de la population agricole en Suisse, Sigrid Haunberger, ART ••PRAMIG: un projet de développement pour mieux valoriser les prairies au sud des Alpes, Emiliano Nucera et al., Agridea, ACW, Ufficio Consulenza Agricola Canton Ticino et Scuola ed azienda agraria cantonale di Mezzana ••Grandes cultures bio sans bétail: observations après 12 ans de suivi de la ferme pilote de Mapraz, Josy Taramarcaz, Agridea ••Foodle.ch – La plateforme suisse sur les denrées alimentaires et l’alimentation, Judith Valentini, ALP-Haras

Février 2013 21. – 24.02.2013 Agroscope ART à Tier&Technik Agroscope Reckenholz-Tänikon ART St.-Gall 22.02.2013 Schweizer Obstkulturtag 2013 ACW, Agridea, NWW, Obstverbände SG et TG, SKOF, SOV, Swisscofel St.-Gall Mars 2013 20. – 21.03.2013 4. Täniker Melktechniktagung Agroscope Reckenholz-Tänikon ART Ettenhausen Avril 2013 25. April 2013 8e réunion annuelle du réseau de recherche équine en Suisse Haras national suisse HNS Avenches 28.04. – 01.05.2013 GCIRC technical meeting 2013 Agroscope Changins-Wädenswil ACW Nyon Mai 2013 07.05.2013 Frühjahrstagung: Sind hohe Leistungen ­«Bio-kompatibel»? Herausforderungen für die Tierernährung Manifestation commune de ETH Zurich, Vetsuisse ­Berne et Zurich, et d‘Agroscope ETH Zentrum, Zurich 30.05.2013 AGFF-Tagung AGFF / Agroscope Innereriz BE Juin 2013 07. – 08.06.2013 Journées porte ouverte 2013 Agroscope Changins-Wädenswil ACW Wädenswil

Informationen: Informations: www.agroscope.admin.ch/veranstaltungen www.agroscope.admin.ch/manifestations

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The International Consultative Group of Research on Rapeseed, GCIRC, is interested in scientific and technical advances made in the production and uses of oilseed rape and cruciferous crops. Participants to the technical meeting will be informed about the last progresses in the fields of economy, genetics/breeding, phytotechnics, analysis and uses of rapeseed, with oral presentations and poster papers.

with the support of : April 28th – May 1st Nyon / Switzerland

Will be held under the patronage of the Federal Office for Agriculture, FOAG

Schweizerische Eidgenossenschaft Confédération suisse Confederazione Svizzera Confederaziun svizra

Federal Department of Economic Affairs FDEA Agroscope Changins-Wädenswil Research Station ACW

Information : www.agroscope.admin.ch/GCIRC

Branchentreffen

im Rahmen der Tage der offenen Tür

Obst, Gemüse und Wein

Forschung erleben

Agroscope in Wädenswil Freitag, 7. Juni, 8.30 – 13 Uhr

Agroscope in Wädenswil, 7. und 8. Juni 2013

Gemüsebau, 8.30 – 11.30 Uhr, Aula der ZHAW, Wädenswil Grundlagen sowie phytopathologische und pflanzenbauliche Aspekte der Gründüngung.

Agroscope und die Zukunft, 11.45 Uhr, Agroscope Referat von Bernard Lehmann, Direktor des Bundesamtes für Landwirtschaft

Weinbau, 9.00 – 11.20 Uhr, Festzelt, Agroscope 18. Hefe- und Weinbautagung: Hefeversuche bei RieslingSilvaner und Blauburgunder. Blauburgunder-Klone im Vergleich. Anmeldung erforderlich: www.agroscope.ch Obstbau, 9.15 – 11.20 Uhr, Sandhof, Wädenswil Pflanzenschutzstrategien zur Rückstandsvermeidung, Totaleinnetzung, Einfluss von Pflanzenschutzstrategien auf Lagerung und Qualität. Für mehr Infos diesen QR Code mit Ihrem Smartphone scannen

Landwirtschaft – Lebensmittel – Umwelt

Gemeinsamer Apéro der Branchen, 12.15 Uhr, Agroscope. Freier Rundgang Tage der offenen Tür, ab 13 Uhr Anfahrt mit dem Auto: Ausfahrt Wädenswil und Wegweiser Parkplatz Geeren folgen. Shuttle-Bus zur Hochschule (Gemüsebau), zur Forschungsanstalt (Weinbau) und zum Sandhof (Obstbau). Anfahrt mit dem Zug: Bis Bahnhof Wädenswil, Bus 123, 126 oder 150 bis «Hochschule» (Gemüsebau); Bus 123 oder 126 bis «Forschungsanstalt» oder Bus 150 oder 160 bis «Mühlebach» (Weinbau); Bus 150 oder 160 bis «Sandhof» (Obstbau).

www.agroscope-forschung-erleben.ch Schweizerische Eidgenossenschaft Confédération suisse Confederazione Svizzera Confederaziun svizra

Eidgenössisches Departement für W irtschaft, Bildung und Forschung WBF Agroscope


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