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Recherche Agronomique Suisse 2 0 1 3

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N u m é r o

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Agroscope | OFAG | HAFL | AGRIDEA | ETH Zürich

J a n v i e r

Production animale Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage

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Production végétale Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir

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Production végétale Le flétrissement bactérien – une maladie ­mystérieuse des graminées fourragères

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Le pâturage estival en montagne entretient le paysage unique des alpages, prévient le développement de buissons et contribue à préserver la biodiversité. Une expérience a été conduite par des chercheurs de l’ETH Zurich de comparer deux systèmes de pâturage (tournant et permanent) en termes de performances d’engraissement et d’abattage, et de qualité de la viande d’agneaux d’alpage. (Photo: Christian Gazzarin, ART) Impressum Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz est une publication des stations de recherche agronomique Agroscope et de leurs partenaires. Cette publication paraît en allemand et en français. Elle s’adresse aux scientifiques, spécialistes de la recherche et de l’industrie, enseignants, organisations de conseil et de vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux, praticiens, politiciens et autres personnes intéressées. Editeur Agroscope Partenaires bA groscope (stations de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW; ­ Agroscope Liebefeld-Posieux et Haras national suisse ­A LP-Haras; Agroscope Reckenholz-Tänikon ART) b Office fédéral de l’agriculture OFAG, Berne b Haute école des sciences agronomiques forestières et alimentaires HAFL, Zollikofen b Centrale de vulgarisation AGRIDEA, Lausanne et Lindau b E cole polytechnique fédérale de Zurich ETH Zürich, Département des Sciences des Systèmes de l'Environnement Rédaction Andrea Leuenberger-Minger, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, Tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Judith Auer, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, Case postale 1012, 1260 Nyon 1, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Team de rédaction Président: Jean-Philippe Mayor (Directeur général ACW), Sibylle Willi (ACW), Evelyne Fasnacht (ALP-Haras), Etel Keller-Doroszlai (ART), Karin Bovigny-Ackermann (OFAG), Beat Huber-Eicher (HAFL), Esther Weiss (AGRIDEA), Brigitte Dorn (ETH Zürich) Abonnements Tarifs Revue: CHF 61.–*, TVA et frais de port compris (étranger + CHF 20.– frais de port), en ligne: CHF 61.–* * Tarifs réduits voir: www.rechercheagronomiquesuisse.ch Adresse Nicole Boschung, Recherche Agronomique Suisse/Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.ch Changement d'adresse e-mail: verkauf.zivil@bbl.admin.ch, Fax +41 31 325 50 58 Internet www.rechercheagronomiquesuisse.ch www.agrarforschungschweiz.ch ISSN infos ISSN 1663 – 7917 (imprimé) ISSN 1663 – 7925 (en ligne) Titre: Recherche Agronomique Suisse Titre abrégé: Rech. Agron. Suisse © Copyright Agroscope. Tous droits de reproduction et de traduction réservés. Toute reproduction ou traduction, partielle ou intégrale, doit faire l’objet d’un accord avec la rédaction.

Indexé: Web of Science, CAB Abstracts, AGRIS

Sommaire Janvier 2013 | Numéro 1 3 Editorial 4

Production animale Le système de pâturage influence le

poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux Helen Willems, Cornel Werder, Michael Kreuzer et Florian Leiber Production animale L’efficacité de l’azote dans l’engraisse10

ment des porcs Edith Sollberger, Annelies Bracher, Christine Burren et Peter Spring Production végétale Ressources génétiques d'espèces frui16

tières: de la diversité pour l'avenir Kaspar Hunziker, Sandra Noser, Anke Ingenfeld, Jürg E. Frey et Markus Kellerhals Production végétale La lutte contre la chrysomèle des racines 24

du maïs est un succès à ce jour Mario Bertossa, Romina Morisoli et ­ Luigi Colombi Production végétale Le flétrissement bactérien – une maladie 32

­mystérieuse des graminées fourragères Roland Kölliker et al. Production végétale Le procédé de fumure azotée CULTAN 40

testé en conditions de culture suisses René Flisch, Urs Zihlmann, Peter Briner et­ ­Walter Richner Eclairage A Sense of Inspiration, ou quand 48

l’inspiration et les sciences sensorielles ­se rencontrent Patrizia Piccinali 51 Portrait 52 Actualités 55 Manifestations


Editorial

Du nouveau dans les Sciences ­Agronomiques ETH Zurich Chère lectrice, cher lecteur,

Silvia Dorn, Professeure à ­l'institut des Sciences ­A gronomique, ETH Zurich

Quelques craintes ont été émises à propos du rattachement, il y a un an, des Sciences Agronomiques ETH Zurich dans une nouvelle structure: comment la petite unité agronomique pourrait-elle maintenir sa place une fois fusionnée avec la plus large unité des sciences environnementales pour donner le nouveau Département des Sciences des Systèmes Environnementaux (D-USYS)? Le bilan actuel est encourageant. Il a été décidé d’un commun accord de maintenir les deux cursus existants pour les Sciences Agronomiques et pour les Sciences Environnementales. Ils correspondent à un besoin réel; nous avons besoin de spécialistes au bénéfice d’une formation universitaire solide pour ces deux secteurs. Aujourd’hui déjà, nos étudiants profitent de la possibilité de suivre certains cours qui recoupent des éléments de ces disciplines voisines, et la collaboration au niveau de la recherche entre les groupes des sciences environnementales et agronomiques va encore s’intensifier à l’avenir. La phase de fusion, avec ses nombreuses séances, est désormais derrière nous. La conférence du Département au sein de la nouvelle entité D-USYS est toutefois devenue si vaste que la préparation des décisions doit le plus souvent être déléguée aux instituts et aux commissions. Ceci valorise l’Institut des Sciences Agronomiques avec ses spécialistes des plantes et des animaux de rente, qui regroupe, avec les chaires associées d’Economie Agricole et de Pathologie Végétale, tous les principaux responsables de la recherche et de l’enseignement en Sciences Agronomiques. Notre cursus sur les Sciences Agronomiques est géré par cet institut. Nous travaillons en faveur d’un système plus durable d’approvisionnement de la planète en denrées alimentaires et continuons donc ainsi à collaborer avec nos collègues du secteur des sciences alimentaires et nutritionnelles. Pour nos étudiants, cela donne une perspective très intéressante. Nous attirons ainsi beaucoup de bacheliers prêts à faire changer les choses dans le monde. Pour la troisième fois déjà, le nombre de nouveaux étudiants a atteint ou même franchi la barre des 50. Cette dynamique réjouissante pose cependant des exigences particulières au niveau de l‘enseignement. Nous avons besoin de renforcer notre dotation en professeurs. Grâce à une donation importante, il sera possible de mettre en place dès 2013 une nouvelle chaire en «Agroécosystèmes Durables». A cela s’ajoutent les deux postes de professeurs assistants en sciences végétales récemment créés. En outre, de nouveaux professeurs seront engagés pour repourvoir les postes dans les secteurs de l’économie agricole et des animaux de rente. Je serai moi-même à la retraite à partir de fin janvier 2013, et une relève est également prévue pour mon domaine de spécialisation. Durant mes plus de 20 ans d’activité comme professeure à l'ETH Zurich, j’ai vécu de nombreux changements, et je suis convaincue que les Sciences Agronomiques ETH sont sur la bonne voie.

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 3, 2013

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P r o d u c t i o n

a n i m a l e

Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage Helen Willems1, Cornel Werder2, Michael Kreuzer1 et Florian Leiber1 ETH Zurich, Institut für Agrarwissenschaften, 8092 Zurich, Suisse 2 Büro Alpe Beratung, 3053 Lätti, Suisse Renseignements: Michael Kreuzer, e-mail: michael.kreuzer@usys.ethz.ch, tél. +41 44 632 59 72 1

Figure 1 | Agneaux de la race Mouton d’Engadine et Nez Noir du Valais, pendant l’expérience sur le pâturage Crepido aurea-Festucum rebrae , sur l’alpe de Weissenstein. (Photo: Cornel Werder)

Introduction Le pâturage estival en montagne entretient le paysage unique des alpages, prévient le développement de buissons et contribue à la préservation de la biodiversité. Le choix du système de pâturage détermine le degré et l’efficacité de la conservation du paysage. Ceci est pris en compte par la régulation suisse sur les contributions d’estivage (OCest); les systèmes de pâturage qui permettent un pâturage uniforme des prairies alpines et diminuent ainsi le surpâturage ou la sous-utilisation des

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Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 4–9, 2013

prairies sont plus fortement subventionnés. Le système de pâturage a aussi un effet sur les performances des animaux. L’installation de clôtures qui restreignent la surface disponible influence le comportement alimentaire des animaux. Le but de cette étude était d’évaluer expérimentalement l’impact du système de pâturage en alpage sur les performances d’engraissement et d’abattage ainsi que sur la qualité de la viande d’agneaux. Afin d’élargir le spectre de l’étude, l’expérience a été conduite avec deux races de moutons pâturant chacune deux types de végétations.


Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage | Production animale

Animaux, systèmes de pâturage et types de végétations L’expérience a été conduite sur des agneaux mâles castrés de races extensives helvétiques Mouton d’Engadine (ME, n=28) et Nez Noir du Valais (NN, n=27). Les agneaux ont été pesés un mois après l’achat et répartis en quatre groupes de 14 animaux chacun (NN: un groupe avec seulement 13 animaux). ME et NN pesaient alors 35,5±3,9 et 36,8±4,5 kg et étaient âgés de 26±2 et 27±3 semaines, respectivement. Les agneaux ont été transportés sur la station de recherche de l’ETH sur l’alpe de Weissenstein (GR) et répartis sur deux types de végétations alpines caractéristiques: l’une riche en nutriments, Crepido aurea-Festucum rebrae (CF), à 1950 m d’altitude, et l’autre pauvre en nutriments, Geo montani-Nardetum (GN), 2200 m d’altitude. Sur chaque type de végétation, un pâturage permanent (P) et un pâturage tournant (T) ont été comparés. Au total, quatre traitements ont donc été comparés (CFP, CFT, GNP et GNT). Du fait de la précocité de la végétation CF sur la végétation GN, les animaux des groupes CFP et CFT ont été mis à pâturer une semaine avant les animaux des groupes GNP et GNT (fig. 1). Chaque groupe disposait d’une parcelle d’environ 0,7 hectare. Pour le pâturage permanent, les agneaux disposaient en permanence de la surface totale de la parcelle tandis que la surface destinée au pâturage tournant était divisée en quatre sous-parcelles (environ 30×30 m) pâturées successivement. Deux rotations complètes ont été effectuées sur le pâturage tournant avec une durée de 10 jours (première rotation) puis 6 jours (deuxième rotation) par sous-parcelle. Quatre prélèvements de biomasse ont été réalisés sur le pâturage P à intervalles de trois semaines (jours 0, 21, 42 et 63). Pour cela, six surfaces de 50×100 cm représentatives de la parcelle ont été sélectionnées, la biomasse récoltée puis pesée, séchée (48 h à 60 °C) et ultérieurement broyée (1 mm). Des prélèvements de biomasse ont aussi été réalisés sur les pâturages tournants le jour précédant la rotation dans la nouvelle sous-parcelle et à l’issue de l’expérience (jours 0, 10, 20, 30, 40, 46, 52, 58 et 63). Ainsi, la biomasse disponible par agneau a pu être estimée de même que le pâturage restant. Les agneaux avaient libre accès à l’eau, à un bloc de sel pour animaux et à un abri. Collecte des données et des échantillons, analyses en laboratoire Le gain de poids moyen des agneaux a été calculé à partir du poids vifs des agneaux avant et après les 9 semaines de pâturage. Les agneaux ont été transportés sur 180 km jusqu’à Zurich et abattus après un étourdissement par pistolet à cheville percutante. Les carcasses ont été classi-

Résumé

Matériel et méthodes

En Suisse, la production d’agneaux d’alpage est soutenue par des paiements directs qui dépendent du système du pâturage. Ainsi, le pâturage tournant est mieux subventionné que le pâturage permanent. Une expérience a été conduite afin de comparer ces deux systèmes de pâturage en termes de performances d’engraissement et de qualité de la viande d’agneaux d’alpage. Cinquante-cinq agneaux mâles castrés (36,2±4,2 kg et 27±3 semaines) de deux races suisses (Moutons d’Engadine, ME; et Nez Noir du Valais, NN) ont été engraissés soit sur un pâturage riche en nutriments (Festucetum rubrae) soit sur un pâturage pauvre en nutriments (Geo montani-Nardetum). Ces deux types de végétations étaient disponibles soit comme pâturage tournant soit comme pâturage permanent. Six à sept agneaux étaient présents par race, type de végétation et système de pâturage. Le gain de poids, le rendement carcasse et la conformation de la carcasse (CHTAX) étaient supérieurs dans le système de pâturage tournant par rapport au système de pâturage permanent, pour les deux races. Néanmoins, le type de végétation a eu une plus forte influence que le système de pâturage sur le gain moyen quotidien et le poids carcasse. La qualité de la viande a été influencée par le système de pâturage. Les ME du pâturage tournant ont eu une perte d’eau à la cuisson supérieure et une force de cisaillement inférieure aux ME du pâturage permanent. Pour les NN, l’écart des forces de cisaillement était moins prononcé. Considérant les subsides plus importants, les meilleures performances des animaux et la qualité supérieure de la viande pour certains aspects, le pâturage tournant est donc le système de choix pour engraisser les agneaux d’alpage.

Figure 2 | Analyse de la force de cisaillement de la viande d’agneau (indicateur de tendreté) en laboratoire. (Photo: Helen Willems)

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Production animale | Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage

[g]

Tageszuwachs

200

150

100

50

0

ab

a

a

a

c

c

c

bc

ME

NN

ME

NN

ME

NN

ME

NN

pâturage permanent pâturage tournant riche en nutriments

0,035 système type de vég. < 0,001 race n.s.

pâturage permanent pâturage tournant pauvre en nutriments

Figure 3 | Gain de poids journalier (en grammes) en fonction du système de pâturage (permanent vs. tournant) et de la race (Mouton d’Engadine ME vs. Nez Noir du Valais NN) (n=55).

[%]

Schlachtausbeute

60 50 40 30 20 ab

cd

a

c

c

e

bc

de 0,004 système type de vég. < 0,001 < 0,001 race

10 0

ME

NN

pâturage permanent

ME

NN

pâturage tournant

ME

NN

pâturage permanent

riche en nutriments

ME

NN

pâturage tournant

pauvre en nutriments

Figure 4 | Rendement carcasse (en %) en fonction du système de pâturage (permanent vs. tournant) et de la race (Mouton d’Engadine ME vs. Nez Noir du Valais NN) (n=55).

[kg]

Schlachtgewicht

25 20 15 10 5 0

a

abc

a

ab

bcd

d

abcd

cd système n.s. type de vég. < 0,001 race 0,040

ME

NN

ME

NN

pâturage permanent pâturage tournant riche en nutriments

ME

NN

ME

NN

pâturage permanent pâturage tournant pauvre en nutriments

Figure 5 | Poids carcasse (en kg) en fonction du système de pâturage (permanent vs. tournant) et de la race (­ Mouton d’Engadine ME vs. Nez Noir du Valais NN) (n=55).

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Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage | Production animale

système [0,083] type de vég. <0,001 Race <0,001

système n.s. type de vég. <0,001 Race 0,008

conformation carcasse

pauvre en nutriments

riche en nutriments

[%] pâturage permanent pâturage tournant pâturage permanent pâturage tournant

C –

H –

– –

état d’engraissement

T 100

A –

X –

5 –

4 –

3 86

2 14

1 –

57

43

43

57

100

86

14

71

29

86

14

57

43

14

29

57

14

43

43

14

86

86

14

43

57

17

83

17

83

Figure 6 | Classification des carcasses CH-TAX (en %) en fonction du système de pâturage (permanent vs. tournant) et de la race (Mouton d’Engadine ME vs. Nez Noir du Valais (NN) (n=55).

fiées par un technicien approuvé selon le système de classification Suisse CH-TAX (OFAG 1999). Les carcasses ont ensuite été conservées à 4 °C. Des échantillons de viande ont été pris 24 heures après l’abattage au niveau de la côte-filet (Musculus longissimus dorsi, LD), entre la première et la sixième vertèbre. Une part a été conservée à -20 °C et une autre part a été maturée sous vide à 4 °C pendant 25 jours. La capacité de rétention d’eau de la viande a été mesurée après cuisson au bain-marie (72 °C) pendant 45 minutes. Le même morceau a été utilisé après refroidissement pour mesurer la force de cisaillement de la viande selon la méthode Warner-Bratzler (fig. 2) (Stable Micro Systems Ltd. TA-HD, Surrey, Royaume-Uni). La composition nutritionnelle de l’herbe pâturée et de la viande échantillonnée (après homogénéisation avec une Moulinette - Moulinex, type 643, Ecully, France) a été analysée selon des procédures standardisées (AOAC 1997). La teneur en eau, cendres, protéines, matière grasse (viande uniquement) et fibres (herbe uniquement; d’après Van Soest et al. 1991) a été analysée. Calculs et analyses statistiques Les données ont été analysées par une analyse de variance sur SAS (version 9,2, SAS Institute, Cary, NC, États-Unis) avec race (ME, NN), type de végétation (CF, GN) et système de pâturage (P, T) comme facteurs fixes et en considérant toutes leurs interactions. Les moyennes ont ensuite été comparées par le Tukey test.

Résultats et discussion Biomasse disponible et composition du fourrage Les agneaux disposaient en moyenne de 4,4, 3,2, 6,7 et 4,7 kg MS/animal/jour sur le CFP, CFT, GNP et GNT, respectivement. Les animaux disposaient donc d’assez de four-

rage pour une alimentation à volonté (consommation attendue: 1,4 kg MS/animal/jour; Daccord et Kessler 1999). La teneur en fibres et en protéines brutes de l’herbe a montré que la qualité fourragère de l’herbe s’était accrue au cours de la saison dans le pâturage tournant en comparaison au pâturage permanent. Ceci est dû au fait que les agneaux disposaient de moins d’espace dans le pâturage tournant et étaient ainsi forcés à pâturer uniformément la parcelle, ce qui a permis d’avoir une herbe jeune lors de la deuxième rotation. Performances d’engraissement et qualité des carcasses Le système de pâturage a influencé les performances d’engraissement des agneaux: le gain de poids journalier (fig. 3) et le rendement carcasse (fig. 4) étaient significativement plus élevés avec le pâturage tournant qu’avec le pâturage permanent. Le poids carcasse des agneaux était cependant similaire pour les deux types de pâturages (fig. 5). Au regard du rendement carcasse, les agneaux des pâturages tournants avaient, pour un même poids vif, un poids carcasse plus élevé, et ce pour les deux races. De plus, les agneaux des pâturages tournants ont obtenu tendanciellement une meilleure note de conformation carcasse que les agneaux des pâturages permanents (fig. 6). La note d’état d’engraissement n’a cependant pas été influencée par le type de pâturage. Aucune interaction significative n’a été trouvée entre le système de pâturage et le type de végétation ou la race. Le paiement des carcasses étant dépendant du poids, de la conformation de la carcasse et de l’état d’engraissement, le choix du système de pâturage a une portée économique pour l’éleveur. Néanmoins, la végétation a été le facteur le plus influant sur les performances d’engraissement des agneaux. Comme attendu, toutes les variables des per- 

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Production animale | Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage

système type de vég. race S×R

[N] 80

0,008 0,035 0,004 0,058

30

60

20

40 20 0

a

b

b

b

ab

b

b

b

ME NN ME NN ME NN ME NN pâturage permanent pâturage tournant pâturage permanent pâturage tournant riche en nutriments pauvre en nutriments

10 0

b

ab

ab

ab

ab

a

a

a

ME NN ME NN ME NN ME NN pâturage permanent pâturage tournant pâturage permanent pâturage tournant riche en nutriments pauvre en nutriments

Figure 7 | Force de cisaillement de la viande cuite (en Newtons) en fonction du système de pâturage (permanent vs. tournant) et de la race (Mouton d’Engadine ME vs. Nez Noir du Valais NN) (n=55).

Figure 8 | Pertes d’eau de la viande (en %) en fonction du système de pâturage (permanent vs. tournant) et de la race (Mouton d’Engadine (ME) vs. Nez Noir du Valais NN) (n=55).

formances d’engraissement et d’abattage étaient en faveur de CF, la végétation la plus riche en nutriments par rapport à GN. Le choix de la race des agneaux a aussi été décisive pour les performances d’engraissement, en accord avec les résultats de précédentes études sur des races de moutons suisses (Lüchinger Wüest 1995; Heckendorn et al. 2009). Bien que la présente étude ait été menée avec deux races extensives de montagne, les différences étaient notables: les ME ont atteint de meilleures performances d’abattage, bien que les gains journaliers n’étaient pas significativement différents des NN, voire inférieurs.

Conclusions

Qualité de la viande La côte-filet de la présente étude avait une teneur moyenne en eau (74,4  %), en protéines (22,6  %) et cendres (1,6 %), mais une teneur en matières grasses réduite (2,3 %; en comparaison à Gerber, 2007). Ce dernier point était attendu compte tenu de l’utilisation de pâturages extensifs sans supplémentation (Ådnøy et al. 2005). La viande d’agneaux de pâturages tournants avait une force de cisaillement inférieure à la viande d’agneaux de pâturages permanents et était donc plus tendre (fig. 7). Il y avait tendanciellement (P < 0,1) une interaction entre le système de pâturage et la race pour la force de cisaillement (fig. 7) et la perte d’eau à la cuisson (fig. 8). Ainsi, la qualité de la viande des ME a réagi plus sensiblement au système de pâturage que celle des NN. Les ME ont aussi montré une perte d’eau à la cuisson plus élevée et une viande clairement plus tendre dans le système de pâturage tournant que dans le système de pâturage permanent. Pour les NN, le système de pâturage n‘a eu au contraire que peu d’influence sur la force de cisaillement et pratiquement aucune influence sur la perte d’eau à la cuisson.

8

système n.s. type de vég. < 0,001 race 0,031 0,106 S×R

[%] 40

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Cette expérience de pâturage contrôlé a permis de prouver les effets du système de pâturage sur les performances d’engraissement et d’abattage, et sur la qualité de la viande d’agneaux d’alpage. Le système de pâturage tournant a eu un effet positif sur le gain de poids, le rendement carcasse et tendanciellement aussi sur la classification de la carcasse en comparaison au système de pâturage permanent. La qualité de la viande a été relativement meilleure dans le système de pâturage tournant. Les deux races d’agneaux ont réagi de manières différentes au système de pâturage. Des agneaux ME sur un pâturage tournant seraient le système d’élevage de choix en considérant les paiements directs plus élevés pour ce système de pâturage. Le choix du type de végétation est néanmoins plus important que le système de pâturage pour les performances d’engraissement et d’abattage et pour la qualité de la viande n d’agneaux d’alpage.

www.alpfutur.ch Remerciements

Cette étude fait partie du module 3 «Performances d’engraissement et d’abattage et qualité de la viande d’agneaux d’alpage» du projet 24 «SchafAlp» de AlpFUTUR. L’ETH Zurich (ETH-fonds de la recherche ETH-24 09-3), le Büro Alpe, Agridea, la Fédération suisse d’élevage ovin, Pro Natura, World Wildlife Fund (WWF), l’Office vétérinaire fédéral, l’Office fédéral de l’agriculture, et l’Office fédéral de l’environnement sont remerciés pour leur soutien financier.


Influsso del sistema di pascolo sull’ingrasso come pure sulla qualità della carne di agnelli in regioni di estivazione alpina In Svizzera i contributi d’estivazione per ovini differiscono in base al tipo di pascolo impiegato: i pascoli a rotazione sono più incentivati rispetto ai pascoli permanenti. In questo studio sono stati confrontati l’ingrasso e la qualità della carne di ovini ottenuti con questi sistemi di pascolo sopra menzionati. A questo scopo 55 agnelli maschi castrati appartenenti alle due razze alpine svizzere «Pecora Engadinese» e «Pecora dal naso nero Vallesana» (massa: 36,2±4,2 kg; età: 27±3 settimane) sono stati collocati su pascoli grassi (Crepido aurea-Festucetum rubrae) o magri (Geo montani-Nardetum). Su entrambe le vegetazioni sono stati stabiliti sia pascoli permanenti, sia pascoli a rotazione e ad ognuno di essi sono stati attribuiti da 6 a 7 animali per razza. Per entrambe le razze sono stati raggiunti livelli di crescita giornaliera, resa al macello e qualità della carne (secondo il sistema CH-TAX) più alti su pascoli a rotazione rispetto a pascoli permanenti. Tuttavia, la crescita giornaliera degli ovini e il peso delle carcasse sono stati influenzati maggiormente dal tipo di vegetazione che dal sistema di pascolo impiegato. Per quanto riguarda la qualità della carne, le due razze considerate hanno reagito diversamente in base al tipo di pascolo. L’estivazione su pascoli a rotazione comporta per entrambe le razze una minore resistenza al taglio rispetto a pascoli permanenti. Inoltre comporta nel caso della «Pecora Engadinese» maggiori perdite durante la cottura. D’altra parte il sistema di pascolo alpino a rotazione è preferibile per quanto riguarda l’ingrasso e la resa al macello degli ovini di entrambe le razze.

Bibliographie ▪▪ Ådnøy T., Haug A., Sørheim O., Thomassen M. S., Varszegi Z. & Eik L. O., 2005. Grazing on mountain pastures – does it affect meat quality in lambs? Livest. Prod. Sci. 94 (1 – 2), 25–31. ▪▪ AOAC (Association of Official Analytical Chemists), 1997. Official Methods of Analysis, AOAC, Arlington, VA, USA. ▪▪ Daccord R. & Kessler J., 1999. Fütterungsempfehlungen für das Schaf. In Fütterungsempfehlungen und Nährwerttabellen für Wiederkäuer. (4. Überarb. Aufl.), Zollikofen, Landwirtschaftliche Lehrmittelzentrale, 163–184. ▪▪ Gerber N., 2007. The role of meat in human nutrition for the supply with nutrients, particularly functional long-chain n-3 fatty acids. ETH Dissertation Nr. 17232, Zurich. ▪▪ Heckendorn F., Probst J., & Leiber F., 2009. Lammfleischqualität von vier Schweizer Schafrassen. Forum Kleinwiederkäuer H. 8, 11–13.

Summary

Riassunto

Le système de pâturage influence le poids d’abattage et la qualité de la viande d’agneaux d’alpage | Production animale

Effect of grazing system on fattening performance and meat quality of lambs grazing alpine summer pastures In Switzerland, the level of subsidy provided for summer grazing of sheep differs between grazing systems. They are higher for rotational grazing than for permanent pasture systems. In this controlled alpine grazing experiment, fattening performance and meat quality were compared between these two grazing systems. Fifty-five castrated male lambs (36.2±4.2 kg live weight, 27±3 weeks of age) of the Swiss alpine breeds Engadine Sheep (ES) and Valaisian Black Nose Sheep (WS) were allocated to a nutrientrich Crepido aurea-Festucetum rubrae and a nutrient-poor Geo montani-Nardetum pasture. On each vegetation type, permanent and rotation pastures were established with groups of six to seven lambs from each breed. Daily gains, dressing percentage and, as a trend, meat conformation scores were higher for both breeds in the rotational compared to the permanent system. Nevertheless, the vegetation type had a stronger influence on daily gains and carcass weight than the grazing system. Meat from Engadine sheep had higher cooking losses and lower shear forces with rotation than with the permanent system. For the Valaisian Black Nose sheep, a corresponding trend was only obvious for shear force. Thus, the two breeds responded differently to the grazing system in terms of meat quality. With regard to fattening performance, the alpine rotational grazing system was superior to the permanent grazing system for both breeds. Key words: grazing system, sheep breed, vegetation type, mountain.

▪▪ Lüchinger Wüest R., 1995. Mast- und Schlachtleistung verschiedener Lämmertypen bei unterschiedlichen Haltungssystemen. ETH Dissertation Nr. 11132, Zurich. ▪▪ OFAG, 1999. Ordonnance de l’OFAG sur l’estimation et la classification des animaux des espèces bovine, chevaline, ovine et caprine. Accès: http://www.admin.ch/ch/d/sr/916_341_22/app3.html [22 août 2012]. ▪▪ SöBV (Sömmerungsbeitragsverordnung), 2007. Verordnung über Sömmerungsbeiträge. Accès: www.admin.ch/ch/d/sr/9/910.133.de.pdf [22 août 2012]. ▪▪ Van Soest P. J., Robertson J. B., & Lewis B. A., 1991. Methods for dietary fiber, neutral detergent fiber, and nonstarch polysaccharides in relation to animal nutrition. Journal of Dairy Science 74 (10), 3583–3597.

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P r o d u c t i o n

a n i m a l e

L’efficacité de l’azote dans l’engraissement des porcs Edith Sollberger1, Annelies Bracher1,2, Christine Burren1 et Peter Spring1 Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL, 3052 Zollikofen, Suisse 2 Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, 1725 Posieux, Suisse Renseignements: Peter Spring, e-mail: peter.spring@bfh.ch, tél. + 41 31 910 21 61

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fourragement actuelles en Suisse. Dans cet objectif, des données provenant de l’industrie des fourrages et des données IMPEX du canton de Lucerne ont été prélevées et analysées. Cet article résume les informations des données IMPEX.

Matériel et méthodes

Des animaux en bonne santé sont indispensables pour une bonne efficacité de l’azote.

Introduction Dans les régions à forte densité animale, le bilan import/ export (IMPEX) est utilisé pour dépister l’emploi d’aliments appauvris en N et P (aliments NPr) et révéler les rejets de fertilisants différents des valeurs standard (Agridea 2010). Le bilan IMPEX indique et décrit les flux d’azote dans les exploitations et permet de calculer l’efficacité de l’azote. Cette valeur exprime la quantité d’azote des aliments (MA = matières azotées) accumulée sous forme de protéines dans le corps. Les protéines qui ne sont pas retenues dans le corps sont éliminées par le biais de l’urine et des fèces, dont une part s’échappe dans l’atmosphère sous forme d’ammoniac à l’étable, au stockage et à l’épandage du lisier (Canh et al. 1998; Jongbloed et al. 2007). Afin d’évaluer le potentiel de réduction des entrées de N, des rejets de N (excrétions) et des émissions d’ammoniac que recèle l’alimentation des porcs, une enquête a été effectuée sur les pratiques d’af-

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Les données analysées concernent l’année 2008. Elles recensent les entrées de fertilisants provenant des mélanges d’aliments achetés, des sous-produits affourragés, des achats d’animaux et les exportations de rejets dues aux départs d’animaux. Le calcul suppose 24,6 g N (<60 kg PV), resp. 22,2 g N (>60 kg PV) par kg de poids vif. Ces données relevées sur 1665 exploitations du canton de Lucerne ont été enregistrées dans une banque de données. Un classement suivant le type d’exploitations, les catégories d’animaux, les types d’aliments et de fourrage et les stratégies d’affourragement permet de tirer des conclusions différenciées sur la composition des rations et d’en déduire ainsi l’efficacité de l’azote (export/import N) pour chaque exploitation. Dans les exploitations mixtes élevage/engraissement, il n’a pas toujours été possible d’attribuer explicitement les aliments aux catégories animales définies. Ainsi les rejets de N par porc à l’engrais standard n’ont été calculés que dans les exploitations purement d’engraissement (n=899). L’engraissement d’un porc à l’engrais standard comprend la tranche de poids entre 26 et 108 kg PV et une exportation d’azote de 1,758 kg N (différence entre la quantité d’azote du poids final et celle du poids à l’installation à la porcherie). Les données des différentes catégories animales sont décrites selon la statistique descriptive.

Résultats et discussion Bonne concordance des données concernant les teneurs L’analyse des bilans IMPEX a révélé que pour l’ensemble des exploitations, l’aliment complet constitue 73 % de la matière sèche consommée au total. Le type et la quantité de sous-produits et fourrages grossiers utilisés


varient selon le type d’exploitation. Dans les exploitations d’engraissement, l’influence du petit lait est plus grande, puisque celui-ci constitue en moyenne 10 % de la ration (MS). Dans les exploitations d’élevage, les fourrages grossiers tels que le foin, l’ensilage d’herbe ou de maïs jouent aussi un rôle (fig. 1). Le tableau 1 présente les teneurs des rations totales et l’efficacité de l’azote (export/import de N). A l’exception des exploitations qui produisent leurs propres mélanges, la teneur moyenne en matières azotées (MA) des rations de tous les types d’exploitation est inférieure à 170 g/kg. Il ne faut pas oublier que ces données proviennent d’une région à haute densité animale où l’on emploie principalement des aliments NPr (NPr = appauvris en N et P). Il ne faut donc pas les interpréter comme standard suisse. Basée sur des données de l’industrie des aliments pour animaux, l’étude en parallèle de Bracher et Spring (2011) montre que des aliments d’engraissement NPr à teneur énergétique de 13,72 MJ EDP ont une teneur en MA de 158 g/kg. Les données d’autres catégories d’aliments révèlent également une très bonne concordance avec les aliments NPr correspondants. Les teneurs en MA pour les truies allaitantes et les porcelets correspondent aux normes. Dans la production de porcelets, l’efficacité de N atteint 47 % (56 % dans certains cas), alors que dans les exploitations qui ne comptent que des truies portantes (truies taries) l’efficacité de N n’atteint que 15 %. Les teneurs en éléments fertilisants des aliments composés pour truies taries dépassent en moyenne les normes d’affourragement pour la matière azotée (10 g/MJ EDP) et la lysine (0,48 g/MJ EDP). Il faut toutefois remarquer que la norme de 10 g/MJ EDP est une valeur théorique, à dépasser dans la pratique pour assurer la couverture de tous les besoins en acides aminés essentiels (isoleucine en particulier) à un prix qui correspond au marché. Quasi aucune influence de la stratégie d’affouragement Les 887 exploitations d’engraissement (exploitations produisant leurs propres mélanges exclues) ont été classées selon leurs stratégies d’affourragement et analysées séparément suivant l’importance des variations de la composition des rations, ainsi que d’autres sources possibles de variation de l’efficacité de N. Les résultats n’ont, en moyenne, pas révélé de grandes différences dans les teneurs en MA des rations totales ou dans l’efficacité de N (tabl. 2). Il faut toutefois remarquer la légère supériorité des exploitations d’engraissement utilisant le petit lait comme sous-produit. Dans les exploitations avec complément de petit lait, l’efficacité de N atteint 33 %, contre 31 – 32 % dans les autres sous-groupes. Les exploitations avec petit lait montrent tendanciellement une teneur

Résumé

L’efficacité de l’azote dans l’engraissement des porcs | Production animale

Dans les régions à densité animale élevée, le bilan import/export est utilisé pour dépister l’emploi de fourrages appauvris en phosphore et azote de chaque exploitation et relever les rejets de fertilisants différents de la valeur standard. Le travail présenté ici analyse les bilans import/export de 1665 exploitations porcines du canton de Lucerne pour l’année 2008; ils ont été enregistrés dans une banque de données Access créée spécialement. Les 899 exploitations d’engraissement ont été soumises à une analyse détaillée. L’efficacité moyenne de l’azote (export/import N) de ces exploitations s’élève à 32 % pour une teneur moyenne en matière azotée de 159 g par kg de ration totale (13,74 MJ EDP). Les résultats révèlent une influence importante et fondamentale de l’exploitation sur l’efficacité et les rejets d’azote, même à affourragement similaire. Il existe manifestement un potentiel d’optimisation considérable du côté des techniques de production, de la santé et de la gestion. L’efficacité de l’azote dans les exploitations d’engraissement pourrait servir d’indicateur pour quantifier les effets des mesures de bonnes pratiques agricoles. Malheureusement, il semble difficile, dans des exploitations mixtes élevage/engraissement, d’estimer cet indice pour l’engraissement uniquement.

en MA un peu plus faible dans la ration totale. Ceci s’explique entre autres par le fait que ces exploitations utilisent souvent des aliments complets. Le petit lait étant un aliment énergétique qui contient moins de protéine, la teneur en MA de la ration totale baisse légèrement. Ce léger surplus d’efficacité ne doit toutefois pas être survalorisé: les relevés des quantités de petit lait administrées étant moins exacts que ceux de l’aliment complet, ils sont probablement plutôt sous-estimés. Dans les exploitations avec plusieurs sous-produits, il est intéressant de constater des variations plus élevées, autant pour l’efficacité de N que pour la teneur en MA dans la ration totale. Il est étonnant que des exploitations avec affourragement par phase montrent une teneur en MA en moyenne plus élevée que des exploitations utilisant le même aliment pour toute la durée de l’engraissement. Une analyse des données de l’industrie des aliments pour animaux (Bracher et Spring 2011) montre que la teneur en MA dans l’engraissement de finition ne baisse que de 2 g/kg (aliment complet: 158 g MA/kg vs aliment 

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 10–15, 2013

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Production animale | L’efficacité de l’azote dans l’engraissement des porcs

6 000 000

kg MS

5 000 000 Additifs Sucre/SP sous-produits d‘abattage Fourrage Oléagineux/tourteaux Fruits/SP SP laitière Produits de l'IAlim Pdt/SP SP de céréales Céréales SP de restauration Poisson Graisses/huiles

4 000 000 3 000 000 2 000 000 1 000 000

r ng +E EL

+E EL M EP

M EP

EL

ng

r

gr En

gr En

rie s

Tr u

ies

ta

CE

C +E E EL ng po r rc

ele t

s

EL

0

(CE = cercle d’éleveurs; EL = élevage; Engr = exploitations d’engraissement; EPM = exploitations produisant leurs propres mélanges; SP = sous-produits; IAlim = industrie alimentaire; pdt = pomme de terre)

Figure 1 | Emploi de sous-produits et de fourrages grossiers selon le type d’exploitation (données IMPEX Lucerne 2008).

de finition: 156 g MA/kg). Les aliments de finition comportent davantage de MA surpassant les normes. Il est aussi probable que les exploitations qui pratiquent l’affourragement par phase obtiennent, grâce à un meilleur approvisionnement en protéines (= MA) pendant la phase de croissance, une proportion de viande maigre légèrement plus élevée et exportent ainsi davantage de N par le biais des ventes d’animaux. Le bilan avec un taux fixe de N de 22,2 g N/kg PV à la vente ne pas prend pas en compte cet éventuel excédent d’exportation (Agri-

dea 2010). La question de l’ampleur et de la marge de variation de la teneur en N dans le corps entier fait actuellement l’objet d’un projet de recherche en cours à l’Agroscope. L’avenir montrera très prochainement, si une adaptation de la valeur fixe est nécessaire. Grande variation au sein de la stratégie d’affouragement Les exploitations qui utilisent des sous-produits ne se distinguent pas en moyenne des exploitations avec aliment complet (tabl. 2), mais les variations des teneurs en éner-

Tableau 1 | Teneurs pondérées des rations totales et efficacité de N selon le type d’exploitation Type d’exploitation (n)

EDP MJ/kg

MA g/kg

P g/kg

g MA/MJ EDP

Efficacité de N %

Cercle d’éleveurs* porcelet aliment complet (15)

13,78

163,7

4,99

11,88

46,9

Cercle d’éleveurs* porcelets et engraissement AC (7)

13,63

162,4

4,47

11,01

36,3

Cercle d’éleveurs* porcelets et engraissement avec SP (3)

13,30

161,8

4,55

12,16

35,9

Cercle d’éleveurs* aliment complet

13,78

169,9

5,07

12,33

35,7

Cercle d’éleveurs* avec SP

13,29

163,7

4,99

12,32

34,7

Exploitations de truies taries AC (10)

12,43

141,4

4,37

11,38

14,4

Exploitations de truies taries avec SP (34)

12,45

143,3

4,66

11,51

15,9

Exploitations d’engraissement AC (626)

13,75

159,7

4,16

11,62

31,6

Exploitations d’engraissement avec SP (261)

13,74

158,3

4,39

11,52

32,6

Exploitations d’élevage AC (69)

13,51

164,8

4,87

12,20

32,7

Exploitations d’élevage avec SP (373)

13,06

159,1

4,79

12,19

29,3

Elevage et engraissement AC (20)

13,58

160,9

4,50

11,85

31,9

Elevage et engraissement avec SP (138)

13,38

161,2

4,65

12,05

30,5

Engraissement mélanges propres avec SP (11)

13,90

172,3

4,42

12,40

30,4

Elevage et engraissement mélanges propres avec SP (9)

13,68

165,3

4,57

12,08

30,2

Cercle d’éleveurs* = RTTP (répartition du travail dans la production de porcelets), AC = aliment complet, SP = sous-produits, EDP = énergie digestible porc, MA = matière azotée, P = phosphore.

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L’efficacité de l’azote dans l’engraissement des porcs | Production animale

Tableau 2 | Aperçu de l’efficacité de N et des teneurs en MA de toutes les exploitations d’engraissement Nombre n

Efficacité de N %

Teneur en MA g/kg

Toutes les exploitations d’engraissement (sans les exploitations produisant leurs propres mélanges)

887

31,97 ± 2,34

158,8 ± 6,9

Même aliment complet pour toute la durée de l’engraissement

134

31,37 ± 2,40

158,3 ± 5,5

Aliment de démarrage et ensuite même aliment complet pour toute la durée de l’engraissement

343

31,83 ± 2,03

159,2 ± 5,9

Affourragement par phase

149

31,40 ± 2,15

160,7 ± 4,8

Aliment complet plus petit lait

191

33,04 ± 2,19

155,6 ± 5,8

Aliment complet plus petit lait et autres sous-produits

70

32,08 ± 3,33

162,6 ± 13,4

gie et en matière azotée de la ration totale augmentent (fig. 2). Même si elles ne sont pas très répandues, les exploitations qui produisent leurs propres mélanges ne doivent pas être négligées du point de vue des émissions, car ce sont des exploitations plus grandes que la moyenne et avec des teneurs en MA dépassant de plus de 10 g/kg la moyenne des autres exploitations d’engraissement. Dans l’ensemble, des teneurs en MA de plus de 180 g/kg de ration sont exceptionnelles. Il s’agit là d’exploitations qui n’utilisent pas de fourrage NPr ou dont l’affourragement complémentaire pourrait encore être optimisé. La teneur en énergie élevée de 15,5 MJ EDP s’explique par une forte proportion de déchets de restauration dans la ration. L’efficacité de l’azote obtenue dans les exploitations d’engraissement (import/export de N) montre sa dépendance (R2 = 0,23 – 0,49 selon la stratégie d’affourragement) de la teneur en matière azotée en lien avec l’énergie (g MA/MJ EDP), sans toutefois que cette relation ne soit très étroite (fig. 3). La relation faible pourrait être expliquée par le fait que l’apport en matière azotée des exploitations se situent dans une zone plutôt étroite et que d’autres facteurs peuvent influencer l’efficacité de

l’azote. Les effets du type de rations et de la stratégie d’affourragement disparaissent en partie sous l’influence apparemment grande de l’exploitation. Dans l’ensemble, les pentes des droites de régression évoluent toutes dans le même sens. Les rejets de N-fertilisant par porc à l’engrais peuvent être calculés en déterminant la différence entre les entrées de N via les aliments et l’accumulation de N par porc produit. Pour un poids vif supérieur à 60 kg, on compte une teneur en N de 22,2 g/kg PV. Ceci permet une certaine standardisation, les rejets de N calculés se rapportent donc aux quantités de N excrétées par un porc à l’engrais standard tout au long de l’engraissement et sont ainsi étroitement liés à l’efficacité de l’azote. Il existe à la base un rapport positif entre les rejets de N-fertilisant et la teneur en MA de la ration, avec toutefois une variabilité restante importante (fig. 4). Dans les conditions réelles d’une région où les aliments NPr sont très répandus, les rejets de N par porc à l’engrais varient entre 2,4 kg N et 5,4 kg N, Dans les exploitations avec aliment complet, ils sont en moyenne de 3,63 kg N ± 0,38 par porc, dans les exploitations d’engraissement avec sous-produits, de 3,64 kg N ± 0,44 par porc, et dans les 

190

MA g/kg

170

AC = aliment complet SP = sous-produit EPM = exploitations produisant leurs propres mélanges

150

130

ration AC ration +SP EPM

110 12,5

13

13,5

14 MJ EDP

14,5

15

15,5

Figure 2 | Teneurs en énergie et matière azotée de la ration totale pour les exploitations d’engraissement (n=899) avec ou sans sous-produits.

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Production animale | L’efficacité de l’azote dans l’engraissement des porcs

SP = -2,7194x EDP = -2,6127x SP = -2,7194x + 63,991+ 63,991 EDP = -2,6127x + 62,447+ 62,447 R² = 0,4866 R² = 0,4866 R² = 0,4353 R² = 0,4353 SP = -2,7194x + 63,991 EDP = -2,6127x + 62,447 AC = 0,0298x - 0,923 AC = -2,4331x ACR²==-2,4331x + 59,833+ 59,833 0,4866 R² = 0,4353 R² = 0,2008 R² = 0,2273 R² = 0,2273 AC = -2,4331x + 59,833 SP = 0,0296x - 1,021 R² = 0,2273 R² = 0,3631 40 40 6

30

30

25

5,5

35 Rejets de N en kg

35

35

Efficacité de l‘azote %

Efficacité de l‘azote %

Efficacité de l‘azote %

40

30

25

4,5 4 3,5

8

20 8

9

10

2,5

20

20

11 12 MA/MJ EDP

89

9 10 13

1011 1112 12 2 13 MA/MJ EDP MA/MJ EDP 110 14 15

Engr. +SP Engr. ACEngr. AC EPM Engr. +SP

14

5

3

25

Engr. +SP

EPM = 0,014x + 1,6955 R² = 0,097

EPM

1314

120

Engr. +SP Engr. +SP

1415

130

140

15

150 160 170 MA g/kg de ration

Engr. ACEngr. AC EPM

180

190

200

EPM

AC = aliment complet, Engr. +SP Engr. ACSP = sous-produit, EPM EPM = exploitations produisant leurs propres mélanges) Engr.(Engr. AC = exploitations EPM d’engraissement,

Figure 3 | Efficacité de N dans des exploitations d’engraissement (n = 899) avec ou sans sous-produits en fonction de la teneur en MA par MJ EDP.

Figure 4 | Rejets de N-fertilisant par porc à l’engrais standard ­p roduit (26 – 108 kg PV) en fonction de la teneur en MA de la ration totale dans des exploitations d'engraissement (n = 899).

exploitations produisant leurs propres mélanges de 4,06 kg N ± 0,70, Si l’on admet 3,3 rotations annuelles, une exploitation rejette 2,4 kg de N par porc à l’engrais et 7,92 kg N par place d’engraissement et an. Ces valeurs sont légèrement en dessous des minima d’excrétions fixés actuellement dans les directives d’IMPEX. L’efficacité de N, tout comme les excrétions de N, dépendent des teneurs des aliments, mais aussi très fortement d’autres facteurs: le niveau de performance, la génétique animale, l’adaptation de l’alimentation à la capacité d’accumulation de N au cours de l’engraissement, l’hygiène sur l’exploitation, l’état de santé (Holck et al. 1998), la technique de production et la gestion ont vraisemblablement aussi une influence décisive. Optimiser les techniques de production devrait permettre de réduire les émissions. Il s’agit maintenant d’étudier plus précisément l’influence des différents facteurs pour pouvoir mieux tracer les raisons de ces variations et implémenter des mesures d’amélioration ciblées.

Conclusions

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 10–15, 2013

••Les aliments appauvris en azote et en phosphore se sont fortement répandus dans les régions à haute densité animale. Un autre potentiel de réduction des entrées de N réside dans l’introduction systématique de l’affourragement par phase, autant pour les porcs à l’engrais que pour les truies portantes. ••L’analyse détaillée des 1665 bilans import/export pour chaque exploitation montre clairement une influence fondamentale de l’exploitation sur l’efficacité de N et les rejets de N fertilisant, même avec un affourragement similaire. Il existe manifestement un potentiel d’optimisation considérable du côté des techniques de production, de la santé et de la gestion. ••L’efficacité de N pourrait servir d’indicateur pour quantifier l’effet des mesures de bonnes pratiques agricoles. ••Les rejets de N par porc à l’engrais ne peuvent pas être suffisamment caractérisés par des valeurs standard pour servir au calcul des émissions d’ammoniac. ••La teneur en N du corps entier devrait être vérifiée – analyses de corps de porcs entiers – pour correspondre à l’état actuel de la génétique animale n (viande plus maigre).


L’efficacia dell’azoto nell’ingrasso di maiali Nelle regioni a elevata densità di animali, il bilancio import/export è utilizzato come strumento per monitorare l’uso di foraggio impoverito in fosforo e azoto a livello di singola azienda agricola e rilevare i rifiuti di fertilizzanti diversi dal valore standard. Nell’ambito del presente lavoro si è analizzato i bilanci import/export di 1665 aziende con allevamento di suini del canton Lucerna per l’anno 2008 registrandoli in una banca dati Acces creata appositamente. Le 899 aziende d’ingrasso sono state sottomesse a un analisi dettagliata. L’efficacia media dell’azoto (export/import N) di queste aziende raggiunge il 32 % per un tenore medio in materia azotata di 159 g per kg di razione totale (13,74 MJ EDP). Le valutazioni rilevano un’influenza importante e fondamentale delle aziende sull’efficacia e i rifiuti di azoto, anche a foraggiamento simile. Vi è chiaramente un notevole potenziale di ottimizzazione delle tecniche di produzione, della salute e della gestione. L’efficacia dell’azoto nelle aziende da ingrasso potrebbe servire come indicatore per quantificare gli effetti delle misure di buone pratiche agricole. Purtroppo, nelle aziende miste allevamento/ingrasso sembra essere difficile stimare unicamente questo indice per l’ingrasso.

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Summary

Riassunto

L’efficacité de l’azote dans l’engraissement des porcs | Production animale

N-Efficacy in fattening pigs In regions with high density of animal production, Import/Export-balances (IMPEX) are used to monitor the use of diets with reduced P- and N- concentrations. Based on the IMPEX data, the farms can claim a reduction in waste nutrients. The aim of the presentment study was to analyze 1665 IMPEX-­ balances from pig farms in the state of Lucerne (Switzerland). All data were from 2008. The data from 899 grower/finisher farms were analyzed in more detail and N-efficiencies (N-Export/N-import) estimated. The average N-efficiency for grower/finisher farms was 32 % with an average dietary crude protein (CP) concentration of 159 g/kg (13,74 MJ DE). The between farm comparison showed a large farm effect on both, N-efficiency and N-output as manure. Only a minor portion of this variation could be explained by feeding strategy. The data suggest that a large optimization potential for N-efficiency exists with respect to production technique, animal health and overall farm management. The N-efficiency in grower/finisher farm is a good indicator for the evaluation of good farm practices. However, in farrowto finish operations, it is very difficult to evaluate the N-efficiency for different production phases. Key words: pig nutrition, protein, ammonia, nitrogen efficiency.

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P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir Kaspar Hunziker, Sandra Noser, Anke Ingenfeld, Jürg E. Frey et Markus Kellerhals Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, 8820 Wädenswil, Suisse Renseignements: Kaspar Hunziker, e-mail: kaspar.hunziker@acw.admin.ch, tél. +41 44 783 61 80

La Suisse dispose d'une grande richesse de ressources phytogénétiques d'espèces fruitières. (Montage: Kaspar Hunziker)

Introduction 150 pays au total, dont la Suisse, ont adopté en 1996 à Leipzig un plan d’action mondial proposé par la FAO pour la conservation et l’utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture. En 1997, un groupe de travail mandaté par l’Office fédéral de l’agriculture OFAG a établi un rapport sur la mise en œuvre, dans notre pays, de ce plan d’action mondial, soit un «Plan d’action national» (PAN). L’objectif du PAN consiste à préserver une large diversité génétique dans l’assortiment des plantes cultivées en Suisse et des espèces sauvages apparentées. D’une part, les ressources phytogénétiques représentent une base essentielle des programmes de sélection, et d’autre part elles ont une importance écologique et culturelle.

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Le Plan d’action national pour la conservation et l’utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (PAN-RPGAA) a été mis en œuvre en phases quadriennales et se trouve actuellement en phase IV. Au cours de la première phase, priorité a été donnée à l’élaboration du concept et à l’établissement d’un inventaire de la diversité variétale des différentes espèces cultivées. Les phases suivantes ont été consacrées à combler des lacunes dans les inventaires, à transférer les variétés dans des collections ainsi qu’à décrire les propriétés des espèces et variétés selon des descripteurs prédéfinis. À côté de ces travaux, le PANRPGAA attache une grande importance à la sensibilisation du grand public à cette problématique. Depuis 1999, les organisations privées et les institutions publiques (entre autres Fructus, ZHAW, Inforama, PSR, Rétropomme, Capriasca Ambiente) ont la possibi-


lité de soumettre à l’OFAG des projets favorisant la conservation et l’utilisation durable de plantes cultivées ou utilisées par l’agriculture. L’OFAG porte la responsabilité du PAN-RPGAA, c’est-à-dire l’acceptation des projets, la conclusion de contrats avec leurs responsables et la coordination avec les participants. La responsabilité des aspects scientifiques des projets PAN a été confiée à la station de recherche Agroscope ACW. En tant que responsable de la coordination et de l’information, la Commission suisse pour la conservation des plantes cultivées (CPC) prend une importance centrale dans ce contexte.

Matériel et méthodes Inventaire national des espèces fruitières La Suisse bénéficie d’une diversité particulièrement riche dans le domaine des plantes fruitières. Dans le cadre du PAN-RPGAA, l’Association Fructus, associée à ACW et à des organisations privées, a procédé de janvier 2000 à mars 2005 à un inventaire des variétés d’espèces à fruits et à baies. L’objectif de ce projet était d’établir un état de la diversité des espèces fruitières (baies y compris). Les variétés menacées de disparition ont fait l’objet d’une collecte de matériel de multiplication destiné à les préserver dans des collections. Les recherches se sont focalisées prioritairement sur les espèces principales telles que pommier, poirier, cerisier et prunier (y compris le mirabellier et le reine-­ claudier). Des espèces d’importance secondaire ont cependant été considérées également: abricotier, pêcher, cognassier, diverses espèces à baies, châtaignier, noyer et noisetier (Gantner et Egger 2005). Plus de 2000 variétés fruitières menacées ont ainsi été identifiées puis mises en sécurité dans des collections de diverses organisations de conservation sur tout le territoire suisse. Aujourd’hui, ces collections constituent la base d’une préservation à long terme des ressources génétiques d’espèces fruitières en Suisse. Selon leur classification, les variétés sont maintenues dans différents types de collections. Sont préservées en collections dites primaires des variétés dont l’identification est certaine. Ces collections sont maintenues greffées sur arbres à haute tige ou à demitige censés leur garantir une préservation à long terme. Les collections dites d’introduction regroupent des variétés dont la détermination est encore incertaine, par exemple parce que l’absence de descriptions pomologiques n’a pas permis de vérifier leur statut de variété bien caractérisée et délimitée. Lorsque tous les descripteurs obligatoires figurent au dossier, les variétés considérées comme méritant la préservation sont également 

Résumé

Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir | Production végétale

Dans le cadre du Plan d'action national pour le maintien et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture (PAN-RPGAA), l'Office fédéral de l'agriculture soutient depuis 1999 la récolte, la préservation et la description d'anciennes variétés fruitières. En collaboration avec Agroscope ACW et d'autres partenaires, l’association Fructus a réussi à préserver plus de 2000 variétés dans des collections au champ. La caractérisation de cette diversité variétale a commencé en 2007 avec le projet quadriennal «Description de ressources génétiques d'espèces fruitières» (DREF, PAN 03 – 21). La vaste collection variétale a fait l'objet d'un examen exhaustif: description agronomique et pomologique, établissement du profil génétique, tests de sensibilité aux maladies. Un financement de l'OFAG a permis de lancer en 2011 la deuxième phase quadriennale du projet (04-PANP21), qui se concentre sur l'identification moléculaire, les descriptions morphologiques et la poursuite des tests de sensibilité aux maladies. Le maintien de la diversité et la connaissance des propriétés relatives aux variétés revêtent une grande importance à long terme pour la sélection, mais aussi pour les producteurs et les consommateurs.

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Production végétale | Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir

Direction du projet Y.c. coordination & communication

Module 1 Typage génétique

• Pommier • Cerisier • Prunier • Poirier

Module 2 Description morphologique

• Propriétés de l’arbre • Propriétés du fruit • Pour commencer, 1 description par variété

Module 3 Tests de sensibilité aux maladies Fruits à pépins

• Feu bactérien 18 variétés/an • Tavelure/oïdium 600 accessions

Figure 1 | Le projet DREF II (04-PAN-P21) est basé sur trois modules.

transférées dans des collections primaires. Depuis 2005, ces travaux de description sont réalisés par diverses organisations de conservation œuvrant dans différents projets. Les travaux en cours dans chacun des projets sont coordonnés par la CPC. Les travaux de description suivent les directives du manuel «Descripteurs d’espèces fruitières PAN» (Szalatnay 2006) établi dans le cadre du projet PAN 02 – 22 selon les directives internationales ECPGR et UPOV. Ce manuel comprend tous les descripteurs nécessaires à une caractérisation exhaustive (particularités de l’arbre et du fruit) et sert de clé de détermination variétale pour les plus importantes espèces fruitières (pommier, poirier, prunier et cerisier). Description des ressources génétiques Au début de 2007, l’association Fructus (www.fructus.ch) s’est engagée dans le programme quadriennal «Description de ressources génétiques des espèces fruitières» (DREF, PAN 03 – 21). Les travaux ont été attribués à la station de recherches ACW à Wädenswil et organisés en quatre modules: description des variétés, identification des variétés, tests phytopathologiques, essais d’adéquation de variétés anciennes pour la transformation. Le programme DREF devait contribuer de manière importante à la description exhaustive selon les descripteurs obligatoires, mais aussi à la mise en évidence des chances d’utilisation de ces variétés. Le DREF a été achevé à fin 2010. Les travaux de descriptions sont poursuivis depuis 2011 dans le cadre d’un nouveau projet (DREF II, 04-PAN-P21) constitué de trois modules qui se complètent (fig. 1). Ce projet, le plus important du PAN dans le domaine des espèces fruitières, est décrit ci-après.

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Typage génétique Un profil génétique est établi, dans le cadre du DREF II, pour toutes les variétés des espèces fruitières principales présentes dans les collections PAN. On dispose ainsi d’une base permettant d’identifier les variétés identiques connues sous différents noms (synonymes), ainsi que les variétés différentes mises en collections sous la même désignation (homonymes). Les collections variétales sont ainsi consolidées. L’identification moléculaire complète la description pomologique et l’identification des variétés d’espèces fruitières. Elle permet en particulier de lever les incertitudes de détermination, par exemple pour certifier que deux variétés sont identiques ou non. Comme la méthode est basée sur l’analyse de l’ADN, son résultat est indépendant des facteurs extérieurs tels le site, l’âge de la plante ou son état sanitaire qui peuvent influencer la détermination classique. L’analyse de l’ADN ne nécessite qu’une petite quantité de tissu végétal. Nous utilisons généralement des feuilles jeunes, prélevées au printemps sur des accessions de collections variétales (accession = individu d’une variété inventoriée, propagée végétativement) et congelées aussi rapidement que possible. Ainsi, le matériel peut être conservé durablement et analysé indépendamment de la saison. Le processus comporte une extraction de l’ADN puis sa réplication (amplification) par PCR (Polymerase Chain Reaction). Selon l’espèce étudiée, 6 à 14 marqueurs microsatellites (SSR = Simple Sequence Repeats) sont utilisés pour l’analyse. Ces marqueurs, identiques pour tous les individus d’une variété, sont des séquences déterminées de brins d’ADN. Lorsque tous les marqueurs correspondent chez deux ou plusieurs accessions et donnent le même profil,


Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir | Production végétale

Tableau 1 | Nombre d'accessions de prunier parmi les profils de marqueurs. Nombre d'accessions / groupe génétique

Nombre de groupes génétiques

Total des accessions analysées

unique

183

183

2

19

38

3

8

24

4

2

8

5

1

5

6

1

6

7

1

7

8

1

8

216

279

il s’agit selon toute probabilité de la même variété. Pour déterminer la généalogie d’une variété, il ne suffit toutefois pas de 6 à 14 marqueurs mais la correspondance des profils donne des indications quant à une vraisemblable parenté (Frei et al. 2010). Tous les profils de marqueurs des accessions analysées sont compilés dans un tableau pour constituer une banque de données de référence. À moyen terme, l’objectif est d’homogénéiser et de collationner de telles banques de données sur le plan international afin d’identifier le plus grand nombre possible de variétés encore inconnues. La condition préalable à une telle entreprise est la disponibilité d’un choix de marqueurs SSR utilisables pour le typage, car les profils ne peuvent être comparés que sur la base des mêmes marqueurs. Dans le projet DREF, on utilise 14 marqueurs SSR (sur plus de 150 existants) pour le pommier, 10 pour le cerisier, 6 pour le prunier. Pour le poirier, on en utilisera probablement 14. Tous les marqueurs ont été proposés par le groupe d’experts de l’ECPGR (European Cooperative Programme for Plant Genetic Resources) et devraient permettre de comparer nos résultats avec ceux d’autres laboratoires sur le plan international (Frei et al. 2010). Jusqu’ici, les analyses pratiquées dans le cadre des deux projets DREF ont permis de caractériser quelque 2000 accessions de pommier, 450 de cerisier et 279 de prunier (tabl. 1). Les analyses d’accessions de pommier sont terminées à 95%, alors que l’on s’attend à devoir traiter cette année encore quelque 350 accessions supplémentaires de cerisier. On a constaté pour le pommier et le poirier que 50% des variétés présumées dans les collections étaient des doublons, c’est-à-dire des individus de la même variété portant des noms différents. La situation se présente un peu différemment pour le prunier, où n’ont été identifiés comme doublons qu’un tiers

«seulement» des accessions étudiées (60 % environ de l’effectif des collections; tabl. 1). Ces constatations peuvent avoir une grande influence sur la préservation à long terme des variétés au champ, car une seule accession de chaque doublon sera maintenue en collection. Description agronomique et pomologique Les caractéristiques fruitières et végétatives de 1200 accessions PAN-RPGAA seront enregistrées d’ici à l’achèvement du projet. Les méthodes moléculaires n’ont pas dévalorisé cette méthode classique et éprouvée de la caractérisation, qui reste la condition de base d’une description variétale exhaustive. Les données de cette description seront mises à disposition de la collectivité dans la base de données nationale pour la conservation et l’utilisation durable des ressources phytogénétiques dans l’alimentation et l’agriculture (www.bdn.ch). Selon l’espèce fruitière, elles comportent 30 à 40 caractères distinctifs et sont complétées de quatre à sept photos de fruits (fig. 2) par variété. Comme les caractéristiques agronomiques et pomologiques d’une variété peuvent différer selon le site et l’année de leur description, on établira à long terme trois descriptions complètes pour chaque génotype. Pour les accessions qui se sont avérées génétiquement identiques, une description sera établie trois fois pour une des accessions et une fois pour les autres dans chaque groupe de typage génétique. Cela permet d’assurer que d’éventuelles mutations (de couleur, par exemple) soient aussi préservées, car elles ne sont jusqu’ici pas identifiables par les méthodes moléculaires. Les fruits utilisés pour les descriptions proviennent de diverses collections d’introduction et primaires gérées par Fructus ou par des organisations partenaires. Description de la sensibilité aux maladies La sensibilité aux maladies est un caractère distinctif variétal d’importance, surtout s’il s’agit de choisir une variété pour la mise en place d’une nouvelle culture. Dans le cadre des projets DREF, l’attention s’est focalisée sur l’examen de la sensibilité aux principales maladies des fruits à pépin: le feu bactérien (Erwinia amylovora) ainsi que les maladies fongiques que sont la tavelure (Venturia inaequalis) et l’oïdium (Podosphaera leucotricha). Le feu bactérien Depuis 2007, on procède chaque année à un test de sensibilité des rameaux à la maladie du feu bactérien sur un échantillon de variétés inventoriées PAN (tabl. 2). Les variétés de pommier sont les premières concernées en raison de l’importance de l’espèce dans l’assortiment des 

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Production végétale | Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir

Figure 2 | Toutes les descriptions morphologiques des fruits sont complétées d'une photo en couleurs prise sous des angles précisément définis. (Photo: ACW)

Tableau 2 | 10 variétés de pommier du projet PAN-RPGAA peu ­s ensibles au feu bactérien

Variété

Aargauer Jubiläum Alant Chüsenrainer Heimenhofer Niederhelfenschwiler Beeriapfel Schneiderapfel Schweizer Orange Södliapfel Sternapi Waldhöfler

20

Année

Ø Longueur de la lésion en % de la longueur totale du rameau

Évaluation de la sensibilité

2008

35

basse

2010

47,4

basse

2010

16,9

très basse

2011

0,7

très basse

2007

22,9

basse

2008

37,8

basse

2007

23,9

basse

2008

14,2

très basse

2008

27,6

basse

2010

36,5

très basse

2007

12

très basse

2008

13,4

très basse

2007

26,4

basse

2008

24,4

très basse

2007

21,1

basse

2008

40,2

basse

2008

38,9

basse

2010

40,7

basse

2008

15,5

très basse

2010

32,2

très basse

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fruits cultivés. Le poirier vient en deuxième priorité. Quarante variétés ont été examinées chaque année dans le cadre du PAN 03 – 21, et vingt dans le projet actuel. Deux variétés témoins sont utilisées pour chaque série de tests: Gala (sensible) et Schneiderapfel, respectivement Enterprise dès 2011 (tolérante). La procédure d’inoculation des rameaux établie à la station ACW (et utilisée dans d’autres projets) a fait ses preuves et permet de comparer entre eux les résultats obtenus dans d’autres projets. Pour définir avec certitude qu’une variété est tolérante, il faut au moins deux résultats significatifs. Pour cette raison, 24 variétés ont été testées deux fois jusqu’ici. Les essais réalisés dans la serre de quarantaine de la station ACW de Wädenswil font appel à des rameauxgreffons prélevés en hiver et greffés sur des portegreffes M9. Ils sont ensuite forcés dans des tubes plastiques (diamètre 7 cm, longueur 35 cm) à 18 – 25 °C de température et 70% d’hygrométrie. Après quatre à cinq semaines, les pousses des jeunes arbres sont éclaircies et les arbres sont transplantés dans une serre de quarantaine. La longueur totale de chaque pousse est alors mesurée. Les pousses sont ensuite inoculées, au niveau de la première feuille entièrement développée, avec une suspension de la souche ‹ACW610› d’E. amylovora à la


Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir | Production végétale

Figure 3 | Comparaison de la longueur des lésions sur Alant (à gauche) et sur Gala. (Photo: ACW)

concentration de 109 cfu/ml. Le procédé consiste à percer la pousse au moyen d’une seringue médicale pour déposer une goutte de la suspension bactérienne au point d’émergence de l’aiguille (Kellerhals et al. 2012). Dès l’inoculation, on mesure trois fois à intervalles d’une semaine la longueur de la lésion visible causée par les bactéries (portion de la pousse de teinte brunâtre à noire). Comme la longueur des pousses peut varier fortement d’une variété à l’autre, mais aussi entre les répétitions d’une même variété, la sensibilité de la pousse est exprimée par la longueur de la lésion en proportion (%) de la longueur totale de la pousse. Le test parallèle des variétés témoins Gala et Enterprise dans chaque série permet d’évaluer la sensibilité de chaque variété ainsi que de comparer les résultats d’une année à l’autre.

Résultats L’interprétation des résultats doit tenir compte du fait qu’ils indiquent la sensibilité des rameaux d’une variété, mais sans aucune indication sur la sensibilité des inflorescences. Les infections de fleurs réalisées à la station ACW révèlent cependant que la sensibilité des inflorescences et celle des rameaux sont souvent corrélées (Baumgartner et al. 2012). De plus, les résultats correspondent en général avec les observations faites au champ (Hunziker et Szalatnay 2008). L’évaluation de la sensibilité des rameaux ne donne pas toujours un résultat aussi net que pour la variété de pomme Alant, testée en 2010 et 2011 (fig. 2), qui se distingue clairement de toutes les autres variétés avec une longueur de lésion extrêmement réduite. Bien que la même méthode soit utilisée chaque année et que le travail en serre permette de standardiser de nombreux paramètres, les longueurs proportionnelles des lésions

chez les variétés témoins diffèrent parfois considérablement (fig. 3). Les causes de telles différences n’ont pas pu être établies avec certitude. On suppose que les résultats ont pu être influencés par les problèmes survenus dans la régulation thermique de la serre de quarantaine, surtout au cours des premières années des essais, et par l’époque de l’inoculation. La qualité des rameauxgreffons pourrait aussi se traduire par des différences dans la progression de la lésion. En raison de ces variations constatées d’une année à l’autre, les résultats ne sont pas interprétés selon leur valeur absolue mais en rapport avec ceux de la variété témoin Gala. Cette procédure de classification (fig. 4) a été développée dans le cadre du DREF I pour être encore vérifiée et adaptée éventuellement aux résultats plus anciens. Les variétés classées très peu ou peu sensibles au cours d’une année (fig. 4) seront testées une deuxième fois pour consolider  le premier résultat (Kellerhals et al. 2010).

Tableau 3 | Échelle d'évaluation des dégâts de tavelure et d'oïdium selon Lateur et Populer (1994) Échelle d'estimation

Symptômes

1

Pas de symptômes visibles

2

Dégâts atteignant jusqu'à 1 % des organes à l'examen détaillé

3

Dégâts immédiatement visibles atteignant 15 % des organes

4

Situation intermédiaire

5

Dégâts touchant 25 % de tous les organes

6

Situation intermédiaire

7

Infection sévère touchant environ 50 % des organes

8

Situation intermédiaire

9

Infection très sévère touchant plus de 90 % de tous les organes

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Production végétale | Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir

très basse

Longueur de la lésion < 50 %

basse

Longueur de la lésion 50 – 75 %

moyenne

Longueur de la lésion 75 – 100 %

haute

Longueur de la lésion 100 – 125 %

très haute

> 125%

Figure 4 | Sensibilité des rameaux en comparaison de la variété Gala.

La tavelure et l’oïdium Dans le cadre d’un essai de plein champ sur une parcelle ACW située à Au (Wädenswil), 608 accessions de pommier du projet d’inventaire sont examinées quant à leur sensibilité à la tavelure et à l’oïdium (tabl. 3). Le choix des variétés utilisées dans cet essai de longue durée a été conditionné surtout par la disponibilité de rameauxgreffons: seul du matériel provenant des accessions inventoriées et plantées au cours des années 2000 à 2002 a pu être prélevé, car les arbres des années d’inventaire 2003 et 2004 étaient encore trop petits. Les accessions examinées proviennent donc principalement du nordouest de la Suisse. En plus des variétés de référence telles Berlepsch, Bohnapfel, Boskoop, Jonathan, Goldparmäne et Sauergrauech, les variétés Golden Delicious (sensible à la tavelure) et Gravensteiner (sensible à l’oïdium) plantées en 36 exemplaires chacune à distances régulières servent de témoins. La parcelle expérimentale a été plantée en 2008. Jusqu’en 2014, les symptômes visibles des deux maladies sont évalués chaque année. Les données de 2009 à 2012 disponibles à ce jour permettent d’identifier les premières tendances de sensibilité à ces maladies, mais la base de données est souvent trop lacunaire pour autoriser un diagnostic assuré de la sensibilité à la tavelure et à l’oïdium. C’est pourquoi l’évaluation détaillée de cet essai de longue durée sera vraisemblablement entreprise en 2014 seulement (Hunziker et al. 2011).

Discussion et conclusions Les données acquises dans le cadre du DREF et d’autres projets de description doivent permettre la consolidation des collections d’introduction et leur transfert dans des collections primaires. Il en résultera en priorité une meilleure maîtrise des coûts. Pour les espèces à fruits à noyaux au moins, il devrait être possible de réaliser le transfert au champ au cours de la phase PAN V dès 2015. Pour les pommiers, le transfert partiel devrait être possible sur la base des données disponibles. Par contre, la mise à jour des collections de poirier traitées en dernière

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priorité devrait prendre un peu plus de temps. Mais les analyses moléculaires devraient être achevées aussi pour cette espèce d’ici à fin 2014. Par contre, les descriptions morphologiques sont encore peu avancées. Les variétés génétiquement originales au moins devraient pouvoir être transférées dans les collections de longue durée même sans description morphologique, pour autant qu’elles ne se trouvent pas déjà dans une collection primaire. Les descriptions morphologiques éventuellement manquantes pourront être complétées par la suite dans les collections primaires. Les travaux de description accomplis dans le cadre des divers projets PAN mettent en évidence l’importance de la préservation de notre riche diversité génétique dans le domaine des variétés fruitières. Certaines variétés, comme «Alant», mentionnée ci-dessus, sont exemplaires par leurs propriétés positives telles la bonne qualité des fruits et la résistance aux maladies. De telles variétés sont intéressantes pour le développement de nouvelles variétés dans des programmes de sélection aussi bien que pour la production et, grâce à leur potentiel économique, il y a lieu d’espérer qu’elles retrouveront une certaine place dans les vergers et une préservation assurée, même sans aide fédérale. Par contre, de nombreuses variétés ne présentent pas les caractéristiques exigées en termes de qualité des fruits, d’aptitude à la conservation, d’adaptation aux méthodes de production, etc. Certaines de leurs particularités pourraient cependant s’avérer précieuses à l’avenir, par exemple une teneur élevée de phénols totaux (Hunziker et al. 2010) ou des propriétés intéressantes pour la sélection (résistance à certaines maladies, robustesse dans certaines conditions climatiques). La préservation de cette diversité génétique et les connaissances acquises au sujet des propriétés correspondantes des diverses variétés seront utiles à l’avenir, par exemple pour réagir à brève échéance à des changements tels une modification des habitudes de consommation, une altération du climat ou une évolution des menaces de maladies et ravageurs. Toutes ces raisons soulignent le grand intérêt, pour toute la collectivité, des travaux n menés dans le cadre du PAN-RPGAA.

Remerciements

Le projet 04-PAN-P21 «DREF II» est soutenu par l'Office fédéral de l'agriculture dans le cadre du Plan d'action national pour le maintien et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture (PAN_RPGAA). Les responsables du projet expriment à l'OFAG leur reconnaissance pour le soutien financier accordé aux projets DREF I et DREF II.


Risorse genetiche della frutta: la diversità per il futuro Dal 1999 l’Ufficio Federale per l’Agricoltura sostiene la raccolta, il salvataggio e la descrizione di varietà antiche di frutta nell’ambito del piano d’azione nazionale per la conservazione e l’uso sostenibile delle risorse genetiche vegetali (NAP-PGREL). Nell’ambito della stesura di un inventario delle varietà frutticole, l’associazione Fructus (in collaborazione con ACW ed altri partner), è riuscita a preservare in una collezione oltre duemila varietà repertoriate in campo. Il progetto quadriennale NAP «Descrizioni delle risorse genetiche della frutta» (BEVOG, NAP 03 – 21) ha preso avvio nel 2007 con la caratterizzazione di questa diversità varietale. In questo ambito è stato svolto uno studio approfondito incentrato sulla descrizione agronomica e pomologica nonché sulla genotipizzazione della vasta gamma di varietà a disposizione. Un ulteriore importante tema era costituito da test relativi alla sensibilità alle malattie. Grazie ai finanziamenti dell’UFAG è stato possibile iniziare nel 2011 un’ulteriore fase quadriennale del progetto (04-NAP-P21) durante la quale, oltre alla prosecuzione dei test sulle malattie, l’identificazione varietale mediante tecniche molecolari e le descrizioni varietali morfologiche sono state poste al centro del lavoro di caratterizzazione. La conservazione della diversità e la conoscenza relativa alle peculiarità delle singole varietà andranno a vantaggio dei processi di selezione e coltivazione, con importanti benefici per produttori e consumatori.

Bibliographie ▪▪ Baumgartner I. O., Leumann L. R., Frey J. E., Joos M., Voegele R. T. & Kellerhals M., 2012. Breeding apples to withstand infection pressure by fire blight and other diseases. Proceedings of the 15th International Conference on Organic Fruit-Growing (Ed. Fördergemeinschaft Ökologischer Obstbau e.V.). Weinsberg, 14–20. ▪▪ Frei A., Szalatnay D., Zollinger T., Frey & J. E., 2010. Molecular characterisation of the national collection of Swiss cherry cultivars. Journal of Horticultural Science & Biotechnology 85 (4), 277–282. ▪▪ Gantner S. & Egger S., 2005. Erfolgreiche Inventarisierung von Obst- und Beerensorten in der Schweiz. Schweizerische Zeitschrift für Obst- und Weinbau 141 (9), 6–9. ▪▪ Hunziker K. & Szalatnay D., 2008. Umfrage zur Feuerbrandanfälligkeit alter Kernobstsorten im Kanton Thurgau. Schweizerische Zeitschrift für Obst- und Weinbau 144 (6), 10–13. ▪▪ Hunziker K., Szalatnay D. & Silvestri G., 2010. Eignung alter Apfelsorten für die Verarbeitung. Schweizerische Zeitschrift für Obst- und Weinbau 146 (9), 8–11.

Summary

Riassunto

Ressources génétiques d'espèces fruitières: de la diversité pour l'avenir | Production végétale

Fruit genetic resources: diversity for the future Since 1999, the Federal Office of Agriculture (BLW) supports the collection, conservation and description of old fruit varieties within the framework of the National Plan of Action (NAP) for the Conservation and Sustainable Use of Plant Genetic Resources for Food and Agriculture (PGRFA). In the course of the nationwide fruit inventory in the years 2000 to 2005, the association Fructus together with ACW and other partners could save more than 2000 varieties in field collections. The four-year NAP-project «Description of fruit genetic resources» (short «BEVOG», NAP 03 – 21) started the characterization of this diversity in 2007. The broad spectrum of old varieties was thereby thoroughly: central issues were agronomic and pomological description as well as genotyping of the varieties. A further important subject comprised the testing of disease susceptibility. Thanks to funding by the BLW, in 2011 the project could pass on to another four-year phase (04-NAP-P21). The preservation of fruit genetic resources and the knowledge of the varieties’ characteristics will benefit fruit breeding programs as well as consumers and producers today and in the future. Key words: NAP, biodiversity, fruit genetic resources, disease resistance.

▪▪ Hunziker K., Noser S. & Szalatnay D., 2011. Beschreibung von Obstgenressourcen wird weitergeführt. Schweizerische Zeitschrift für Obst- und Weinbau 147 (13), 11 – 14. ▪▪ Kellerhals M., Szalatnay D., Hunziker K., Duffy B., Nybom H., AhmadiAfzadi M., Höfer M., Richter K. & M. Lateur, 2012. Diversity in European pome fruit genetic resources evaluated for disease resistance. Trees 26, 179–189. DOI: 10.1007/s00468 – 011 – 0660 – 9. ▪▪ Kellerhals M., Szalatnay D. & Hunziker K., 2010. Conservation, description and sustainable use of temperate fruit biodiversity. Mitteilungen Klosterneuburg . 60, 435–441. ▪▪ Lateur M. & Populer C., 1994. Screening fruit tree genetic resources in Belgium for disease resistance and other desirable characters. In: Progress in temperate fruit breeding. Schmidt, H. & Kellerhals, M. (eds). ­K luwer Academic Publishers, Dordrecht-Boston-London, 425–431. ▪▪ Szalatnay D. & Bauermeister R., 2006. Obst-Deskriptoren NAP. Agroscope Changins-Wädenswil ACW und Vereinigung Fructus (Hrsg.).

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v é g é t a l e

La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour Mario Bertossa1, Romina Morisoli1 et Luigi Colombi2 1 Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, 6593 Cadenazzo, Suisse 2 Servizio fitosanitario cantone Ticino, 6500 Bellinzona, Suisse Renseignements: Mario Bertossa, e-mail: mario.bertossa@acw.admin.ch, tél. +41 91 850 20 34

L'adulte de la chrysomèle des racines du maïs mesure environ 5 – 7 mm. Ses élytres ont des rayures noires. (Photo: ACW)

Introduction La chrysomèle des racines du maïs Diabrotica virgifera virgifera LeConte (Coleoptera: Chrysomelidae) est depuis longtemps reconnue comme le plus important ravageur du maïs à l’échelle mondiale. L’Organisation européenne pour la protection des plantes OEPP a mis ce coléoptère sur la liste A2 des organismes de quarantaine. Aux EtatsUnis, les dégâts causés et les coûts occasionnés par la lutte dépassent le milliard de dollars. C’est l’homme qui a fait de la chrysomèle un ravageur des cultures, car elle ne peut se multiplier massivement que dans un système de monoculture de maïs. En Europe, la chrysomèle a été découverte en 1992 dans la région de Belgrade à la suite

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de dégâts constatés sur des plantes. Comme il avait fallu qu’une population suffisamment grande se soit constituée, on suppose que ce ravageur avait déjà été introduit au début des années 1980 par voie aérienne. Les recherches génétiques menées sur la chrysomèle ont révélé cinq invasions indépendantes ayant abouti à la constitution de populations dans les Balkans, en Lombardie, etc. La chrysomèle s’est propagée dans 22 pays d’Europe au cours des 20 dernières années. Les dommages économiques se sont chiffrés par millions d’euros dans les régions où de grandes populations se sont établies. En Suisse, la chrysomèle des racines du maïs a été repérée pour la première fois en 2000 près de l’aéroport de Lugano-Agno (TI). L’année suivante, le foyer principal


a été identifié dans la ville frontière de Chiasso. Comme les populations peuvent croître de manière exponentielle au cours des premières années, le réseau de pièges a été étendu à toute la Suisse dès 2003. Cet article expose le développement et le comportement de la chrysomèle des racines du maïs au Tessin depuis son apparition; il décrit aussi les mesures prises et vise à établir scientifiquement leur efficacité. Biologie de la chrysomèle des racines du maïs Cette espèce univoltine de coléoptère de la famille des chrysomélidés est originaire du Mexique. Ses œufs hivernent dans le sol et les larves éclosent au printemps. Les trois stades larvaires ne se nourrissent quasiment qu’aux dépens des racines de maïs (fig. 1). Elles s’attaquent toutefois à des racines d’autres espèces de plantes, mais, selon notre expérience, celles-ci ne jouent qu’un rôle mineur dans l’alimentation des larves. Contrairement aux larves, les adultes se nourrissent de diverses espèces végétales. Ils migrent des champs de maïs vers d’autres cultures ou colonisent d’autres champs de maïs. La chrysomèle est un migrateur efficace; lorsque les conditions météorologiques et topographiques sont favorables, le déplacement de l’espèce peut atteindre 200 km par année. Selon nos observations, cette valeur est en moyenne de 50 – 70 km. Cela correspond à un déplacement depuis la région frontalière jusque dans le haut Val Blenio. Les femelles fécondées pondent leurs œufs dans le sol d’un champ de maïs. En conditions de laboratoire, une ponte peut compter jusqu’à 1100 œufs. et en conditions naturelles entre 300 – 500 œufs par  femelle et par an.

Résumé

La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour | Production végétale

Depuis l'an 2000, la Suisse fait partie des 22 pays européens touchés par le ravageur de quarantaine Diabrotica virgifera virgifera LeConte, la chrysomèle des racines du maïs. Il s'agit du plus important ravageur du maïs, causant dans le monde entier des dommages estimés à 1,5 milliards de dollars. En Suisse, ce coléoptère ne s'est établi qu'au Tessin. L'établissement d'une population locale a pu être empêché jusqu'ici au nord des Alpes. Le dépouillement des données collectées durant 12 ans sur l'apparition et la distribution de l'espèce permet d'affirmer qu'il s'agit au Tessin d'une population migrant chaque année depuis les foyers principaux de Lombardie. La stratégie de lutte adoptée en Suisse se base essentiellement sur des restrictions sévères apportées aux rotations et renonce à la lutte chimique telle que prévue par exemple dans l'Union européenne. L'efficacité de la rotation des cultures contre la chrysomèle des racines du maïs a été mise à l'épreuve dans un essai de cinq ans au champ. Les résultats montrent que les systèmes de rotation peuvent empêcher durablement le développement de populations susceptibles de causer des dégâts d'importance économique.

Figure 1 | Résultat de l'activité de nourrissement des larves, Mezzana 2005. (Photo: ACW)

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Production végétale | La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour

sont équipés d’un dispensateur de phéromone femelle (pièges PAL). Sous nos latitudes, la plante est encore trop petite à l’apparition des premières chrysomèles; c’est pourquoi le piège a été fixé à un piquet de bois à la hauteur de 120 cm (fig. 2). Les contrôles ont été espacés d’une semaine et doublés au cours des périodes de pointe. La date de mise en place des pièges a été dé­terminée à l’aide d’un modèle de sommes de températures développé par Agroscope. Elle était d’environ 520 degrés-jours (base: -10,5 °C). Les adultes étaient attendus à 600 ± 40 degrés-jours. Comparaison des systèmes monoculture-rotations La parcelle de monoculture de maïs de 60 ares se trouvait à Balerna, dans le périmètre de l’Ecole d’agriculture de Mezzana (coordonnées: E-721203/N-79224). Les quatre parcelles de comparaison de rotations se trouvaient dans des champs de maïs situés dans des régions du Mendrisiotto éloignées les unes des autres, à distance maximale de 4,4 km à vol d’oiseau de la parcelle de monoculture. La détermination des gradients de populations dans le canton du Tessin a été faite sur la base de nos données et de celles du service phytosanitaire cantonal. Toutes ont été acquises au moyen des pièges Csalomon® -PAL.

Figure 2 | Piège Csalomon ® -PAL. (Photo: ACW)

Matériel et méthodes

Résultats

Dynamique des populations La surveillance des attaques a été assurée au moyen de pièges à phéromone Csalomon®-PAL, pièges standards utilisés dans les contrôles en Europe. Ces pièges développés en Hongrie sont constitués d’une feuille engluée de plastique mou transparent ou jaune de 23 × 35 cm. Ils

Densité de population et distribution au Tessin Le nombre de captures de chrysomèles a été calculé en nombre d’individus par piège et par jour (fig. 3). Ce mode de calcul permet de tenir compte du nombre variable de pièges au cours de l’année ainsi que de la période de vol différente d’une année à l’autre.

Nombre total d'individus par piège et par jour

2,5

2

1,5

1

0,5

0 2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Figure 3 | Populations de la chrysomèle dans le canton du Tessin de 2001 à 2012.

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2010

2011

2012


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Nombre de captures par piège, myoanne de 12 ans

500 y = 454,15x-2,442 R² = 0,9436 400

300

200

100

0 Novazzano

Rancate

Breganzona

Cadenazzo

Camorino

Lumino

Malvaglia

Iragna

Castro

Figure 4 | Occurrence de chrysomèles sur un axe sud-nord (gauche-droite), moyenne (2001 – 2012). La ­ istance à vol d'oiseau de Novazzano à Castro est de 70 km. d

Jusqu’en 2003, l’obligation de rotation s’appliquait par région selon le degré d’infestation. Dès 2004, la rotation après maïs été déclarée obligatoire pour tout le canton. Deux individus par piège et par jour correspondent à un effectif total d’environ 5400 chrysomèles. C’est en 2003 que l’effectif des captures a été le plus élevé, et en 2012 le plus réduit avec 527 individus. Plus on s’approche de la frontière avec l’Italie, plus l’effectif des captures augmente (fig. 4). Depuis l’introduction de l’obligation des rotations en 2004, on a trouvé en moyenne 79,6 % des chrysomèles dans le district du Mendrisiotto. Plus haut dans le canton, c’était 12,7 % dans le district de Lugano et 7,7 % dans le Sopraceneri.

Dynamique des populations Les modes d’occurrence et les courbes de vol de la chrysomèle des racines du maïs sont représentés ci-après. La période annuelle de vol s’est étendue en moyenne sur 91 jours (fig. 5). Les premiers adultes sont éclos du sol au plus tôt au début de la troisième décade de juin, et au plus tard jusqu’à la fin de la première décade de juillet. La prédiction de somme de températures de 600 ±40 degrés-jours a été pratiquement toujours confirmée, ce qui a permis de consolider le modèle. L’effectif maximal de la population a été enregistré régulièrement au cours de la période du 20 juillet au 10 août, la plus chaude de l’année. Les derniers adultes 

600

Nombre d'individus par semaine

500 400 300 200 100 0 25

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27

28

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30

31

32

33

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35

36

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39

Semaine n°.

Figure 5 | Courbe moyenne de vol durant les 12 dernières années, calculée sur la base des captures hebdomadaires de tous les pièges du réseau officiel cantonal.

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Production végétale | La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour

160000 R² = 0,82923

Coordonnées GPS Nord

140000

120000

100000

80000

60000

40000 26

27

28

29

30

31

Semaine n°.

Figure 6 | Relation entre le moment de l'apparition et la latitude nord selon les coordonnées GPS N (n=27), moyenne de 11 ans.

ont été encore observés au mois de septembre, et même au début d’octobre en 2010. La figure 6 montre la relation entre la latitude N (coordonnées GPS) de l’emplacement des pièges et la date (semaine) de l’apparition des chrysomèles dans les pièges. En regardant de plus près le nuage de points, on peut individualiser les régions. Partant de la gauche, Mendrisiotto (semaine 27), Lugano (semaine 28) et plaine de Magadino (semaine 29). On peut en déduire avec 83 % de certitude que la chrysomèle des racines du maïs apparaît à Cadenazzo en moyenne deux semaines plus tard qu’à Chiasso, bien qu’en moyenne les sommes des températures affichent selon MétéoSuisse de meilleures valeurs à Cadenazzo qu’à Stabio et Lugano. Validation de la stratégie des rotations dans un essai au champ Après avoir décidé d’élaborer une stratégie de lutte contre la chrysomèle des racines du maïs excluant l’utilisation d’insecticides (voir encadré), il était important d’en vérifier l’efficacité. Comme des populations de chrysomèles étaient toujours observées dans la région malgré l’interdiction de monoculture visible dans le graphique des populations au Tessin (fig. 3), il était justifié

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Mesures de lutte adoptées en Suisse contre Diabrotica v. virgifera • Lors d'une capture, on définit autour de l'endroit une zone centrale (d'un rayon de 5 km) et une zone de sécurité (ce même rayon augmenté de 5 km). • Dans la zone centrale et la zone de sécurité, une rotation d'une année après maïs est obligatoire. • Zone centrale: les repousses de maïs dans la culture suivante doivent être éliminées. • Zone centrale: interdiction de transport de maïs à ensiler vers l'extérieur de la zone. • Zone centrale: le nettoyage des machines est recommandé. • Mettre en place davantage de pièges.


La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour | Production végétale

Flugkurven Vergleich 2003 – 2007 80

Moyenne nb. adultes par piège par semaine, 5 ans

monoculture 70 rotation 60 50 40 30 20 10 0 25

26

27

28

29

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31

32

33

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35

36

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Semaine n°.

Figure 7 | Comparaison des courbes de vol associés à deux systèmes de culture. La ligne bleue correspond à la moyenne hebdomadaire de 4 pièges en système de monoculture, la courbe rouge à la moyenne dans le système de rotation. La période d'observation s'étend sur 5 ans (2003 – 2007).

de douter de l’efficacité de la mesure. Le graphique suivant montre la comparaison des deux courbes de vol dans le système monoculture et rotation. La réaction des populations de chrysomèle à l’interdiction de la monoculture est évidente. Dans une première phase, la population de monoculture montre des taux exponentiels de croissance, alors que les populations des cultures en rotation n’augmentent que plus lentement et tardivement. Le nombre total d’individus capturés par année est 13,5 fois plus élevé en monoculture qu’en système de rotation. Ce qui frappe aussi dans les courbes annuelles, mais qui est moins évident dans la courbes des moyennes (fig. 7), est la diminution de l’activité de vol au cours des périodes de mauvais temps.

Discussion Dynamique des populations Les effectifs de populations représentés dans la fig. 3 suscitent quelques questions. L’obligation d’appliquer des rotations dès 2004 est-elle suffisamment efficace? Pourquoi le nombre d’adultes a-t-il varié fortement, par exemple en 2008 et 2009? Ces faits pourraient être expliqués par un élément important: la mortalité parmi les œufs et des larves. Si l’on admet que dès 2004 les popu-

lations avaient très vraisemblablement migré depuis le sud, les conditions d’hivernage et les taux de mortalité dans les régions de provenance devraient avoir exercé une influence prépondérante sur les effectifs des populations de départ. Les facteurs de mortalité des œufs de chrysomèle sont influencés principalement par les facteurs abiotiques de leur environnement. Au cours de l’hivernage, les paramètres importants sont les températures du sol inférieures à -7 °C et leur durée, la couverture neigeuse et les longues périodes de sécheresse. En Europe, une mortalité des larves pouvant atteindre 98% a été constatée, ce qui entraîne une réduction massive des populations fondatrices, dans notre cas le foyer principal de Lombardie. Les interventions humaines ne jouent ici aucun rôle. La relation avec la distance à la frontière, telle qu’on peut la voir à la fig. 4 et la fig. 6, qu’il s’agisse du nombre d’adultes ou de l’époque de leur apparition, semble accréditer l’hypothèse de la migration à l’origine de l’invasion de chrysomèles au Tessin. De plus, les populations de la Lombardie et du Tessin sont génétiquement identiques et ont pu être différenciées des quatre autres invasions susmentionnées. On peut donc admettre l’hypothèse que les populations tessinoises proviennent des  environs des aéroports milanais.

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Production végétale | La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour

Efficacité de la rotation D’une façon générale, la rotation des cultures est depuis longtemps jugée efficace pour lutter contre la chrysomèle des racines du maïs. Mais dans la Corn Belt, l’apparition d’une sous-espèce de Diabrotica v. virgifera «résistante» aux rotations a été décrite, susceptible de causer des dommages au maïs à l’intérieur d’une rotation. La cause en est vraisemblablement l’application d’une rotation maïs-soja à grande échelle, causant une grande pression sur les populations. Cette situation a favorisé, dans la population de chrysomèles, quelques individus ayant une aptitude réduite à la ponte dans les champs de maïs. Il en est résulté une population dite de «variants», tendant à préférer pondre dans les champs de soja. L’année suivante, les larves se développent dans le même champ planté alors de maïs. C’est pourquoi la rotation n’est pas considérée aux Etats-Unis comme la seule solution efficace, et c’est aussi une des raisons pour lesquelles nous avons voulu mettre à l’épreuve cette stratégie dans les conditions suisses. Les résultats décrits à la fig. 7 confirment de la très bonne efficacité de cette mesure. L’apparition plus tardive de la chrysomèle dans les parcelles en rotation peut être interprétée comme un signe du temps nécessaire à la migration depuis le foyer d’origine à l’endroit des captures. Les rotations plus complexes et les populations réduites ne favorisent pas l’apparition en Suisse de chrysomèles «résistantes aux rotations».

Conclusions Les observations réalisées durant douze ans confèrent une bonne crédibilité aux résultats. L’efficacité de la rotation comme moyen de lutte contre la chrysomèle des racines du maïs a été confirmée scientifiquement durant plusieurs années. Elle est maintenant appliquée avec succès dans la pratique. Dans un système de monoculture durant deux ou trois ans, l’accroissement de la population peut être exponentiel si les conditions d’hivernage sont idéales. Une année d’interruption réduit presque à zéro la population du ravageur. La stratégie choisie conditionnera le choix d’une rotation stricte 1:1, ou d’une variante 2:1 avec 2 ans consécutifs de maïs suivis d’une interruption. Seule la première est envisageable si l’on vise une éradication. Par contre, la deuxième est une bonne option si l’on adopte une stratégie d’endiguement. En effet, il faut certainement trois ans ou même davantage de culture de maïs pour qu’une population causant des dégâts d’importance économique s’établisse à nouveau. La colonisation de nouvelles régions de culture est stimulée, en raison de la rapidité de la dissémination de l’espèce. Les dimensions

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réduites de notre territoire impliqueraient un dépassement rapide des frontières nationales actuelles. Au Tessin, la variante 1:1 assure actuellement une bonne garantie de limitation des populations, même en cas de très forte pression d’invasion. Pour le versant nord des Alpes, cette stratégie a même permis d’obtenir une éradication pour plusieurs années. Le fait de n’avoir pas appliqué un gramme d’insecticide donne à l’agriculture suisse une image utile à sa présence sur le marché, sans même mentionner les avantages généraux de la rotation des cultures. Malgré tous les constats d’efficacité établis sur la base des présents résultats, il faut se souvenir que la chrysomèle est une espèce très dynamique et flexible, susceptible d’envahir un continent, car habituée à développer des résistances à diverses substances chimiques et à se propager dans une rotation simple aux Etats-Unis, et même à survivre à une stratégie de lutte à l’aide de maïs OGM, comme cela semble se présenter actuellement aux USA. Il est donc indispensable de surveiller attentivement les populations de chrysomèle des racines du maïs pour prévenir d’éventuelles mauvaises surprises. n


La lotta contro la diabrotica del mais in Svizzera, finora una storia di successo Dal 2000 la Svizzera appartiene ai 22 paesi europei nei quali è stata scoperto l’organismo di quarantena Diabrotica virgifera virgifera LeConte, diabrotica del mais. Si tratta del maggiore fitofago del mais in quanto crea un danno pari a ca. 1,5 Miliardi di dollari a livello mondiale. In Svizzera è presente solo nel Canton Ticino, mentre al nord delle Alpi appaiano sporadicamente solo pochi coleotteri. Le osservazioni fatte durante 12 anni, mostrano che la popolazione in Ticino deriva da migrazioni annue dai fuochi principali della vicina Lombardia. Le correlazioni concernenti lo spazio e il tempo, relative alla distanza dalla frontiera dello stato non lasciano dubbi. La strategia di lotta scelta dalla Svizzera si basa sostanzialmente sull’imposizione di una rotazione colturale senza l’impiego di insetticidi come p.es nell’Unione Europea. L’effetto della rotazione colturale sulla diabrotica è stata testata in una prova durata 5 anni. I risultati rivelano che essa evita la costituzione di popolazioni di diabrotica economicamente nocive per un tempo indeterminato.

Bibliographie ▪▪ Ball H. J.,1957. On the biology and egg-laying habits of the western corn rootworm. Journal of Economic Entomology 50, 126–128. ▪▪ Bertossa M., 2009. Chrysomèle des racines du maïs: un ravageur sous contrôle en Suisse. Revue suisse d’Agriculture 41, 190–190. ▪▪ Breitenbach S., Heimbach U. & Lauer K. F., 2005. Field tests on the host range of the larvae of the western corn rootworm ( Diabrotica virgifera virgifera LeConte 1868, Chrysomelidae, Coleoptera). Nachrichtenblatt des Deutschen Pflanzenschutzdienstes 57, 241–244. ▪▪ Chiang H. C. & Flaskerd R. G., 1969. Northern and western corn rootworms in Minnesota. Journal of the Minnesota Academy of Science 36, 48 – 51. ▪▪ Ciosi M., Miller N. J., Kim K. S., Giordano R., Estoup A. & Guillemaud T., 2008. Invasion of Europe by the western corn rootworm, Diabrotica virgifera virgifera: multiple transatlantic introductions with various reductions of genetic diversity. Molecular Ecology 17, 3614–3627. DOI: 10.1111 /j.1365 – 294X.2008.03866.x. ▪▪ Derron J. O., Bertossa M., Brunetti R. & Colombi L., 2005. Phénologie du vol de la chrysomèle des racines du maïs ( Diabrotica virgifera virgifera) dans le sud des Alpes suisses. Revue suisse d’Agriculture 37, 61–64. ▪▪ Gassmann A. J., Petzold-Maxwell J. L., Keweshan R. S. & Dunbar M. W., 2011. Field-Evolved Resistance to Bt Maize by Western Corn Rootworm. Plos One 6. DOI: 10.1371/journal.pone.0022629. ▪▪ Gray M. E., Levine E. & Oloumi-Sadeghi H., 1998. Adaptation to crop ­r otation: Western and northern corn rootworms respond uniquely to a cultural practice. Recent Research Developments in Entomology 2, 19–31.

Summary

Riassunto

La lutte contre la chrysomèle des racines du maïs est un succès à ce jour | Production végétale

Western corn rootworm control in Switzerland, yet a successful story Since 2000 Switzerland belongs to the 22 European countries where the quarantine pest Diabrotica virgifera virgifera LeConte, Western corn rootworm, has been detected. It’s reported to be the most important maize pest worldwide with an economical damage up to 1,5 Billion $. In Switzerland, it’s constantly present in the southern part of the Alps, while few beetles are sporadically found in the northern part. Observations during 12 years allowed to determine that the populations in the southern part of the Alps are generated by yearly migrations from the principal foci of neighbored Lombardy. The correlations referred to space and time versus the distance to the south border are hardly leaving doubts. Control measures enacted by Swiss authorities were principally based on a severe crop rotation without the use of chemicals as in the European Union. The effect of crop rotation has been tested in a 5 year field trial. Results showed that no economic population has been built up during this period in the crop rotation treatment, confirming observations of the actual practice. Key words: Chrysomelidae, Western corn rootworm, population dynamics, monitoring, crop rotation, maize.

▪▪ Krysan J. L., Miller T. A. & Andersen J. F., 1986. Methods for the study of pest Diabrotica. Springer-Verlag, New York. ▪▪ Levine E. & Oloumi-Sadeghi H., 1991. Management of diabroticite rootworms in corn. Annual Review of Entomology 36, 229–255. ▪▪ Meinke L. J., Sappington T. W., Onstad D. W., Guillemaud T., Miller N. J., Judith K., Nora L., Furlan L., Jozsef K. & Ferenc T., 2009. Western corn rootworm ( Diabrotica virgifera virgifera LeConte) population dynamics. Agricultural and Forest Entomology 11, 29–46. DOI: 10.1111/j.1461 – 9563.2008.00419.x. ▪▪ Sappington T. W., Siegfried B. D. & Guillemaud T., 2006. Coordinated ­D iabrotica genetics research: Accelerating progress on an urgent insect pest problem. American Entomologist 52, 90–97. ▪▪ Spencer J. L., Hibbard B. E., Moeser J. & Onstad D. W., 2009. Behaviour and ecology of the western corn rootworm ( Diabrotica virgifera virgifera LeConte). Agricultural and Forest Entomology 11, 9 – 27. DOI: 10.1111/j.1461 – 9563.2008.00399.x. ▪▪ Szalai M., Komaromi J. P., Bazok R., Barcic J. I., Kiss J. & Toepfer S., 2011. Generational growth rate estimates of Diabrotica virgifera virgifera populations (Coleoptera: Chrysomelidae). Journal of Pest Science 84, 133–142. DOI: 10.1007/s10340 – 010 – 0336-z. ▪▪ Toepfer S. & Kuhlmann U., 2005. Natural mortality factors acting on western corn rootworm populations: a comparison between the United States and Central Europe. Western corn rootworm. CABI Publishing, Wallingford. 95 – 119, ISBN 0 – 85199 – 817 – 8.

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P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Le flétrissement bactérien – une maladie ­mystérieuse des graminées fourragères Roland Kölliker1, Fabienne Wichmann1,2, Frank-Jörg Vorhölter3, Constanze Conradin1, Sonja Reinhard1, Beat Boller1 et Franco Widmer1 1 Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, 8046 Zurich, Suisse 2 Yale University, Molecular, Cellular and Developmental Biology, 06511 New Haven, CT, USA 3 Université de Bielefeld, CeBiTec, 33615 Bielefeld, Allemagne Renseignements: Roland Kölliker, e-mail: roland.koelliker@art.admin.ch, tél. +41 44 377 7345

Figure 1 | Des coupes fréquentes peuvent favoriser le flétrissement bactérien. (Photo: Cornel Stutz, ART)

Introduction Le flétrissement bactérien est une des principales maladies de nos graminées fourragères et peut entraîner des pertes de rendements allant jusqu’à 20 % (Egli et Schmidt 1982). La maladie est causée par la bactérie Xanthomonas translucens pv. graminis (Xtg). Cet agent pathogène est le pathovar qui infecte le plus fréquemment les graminées fourragères. Il contamine différentes espèces comme Lolium multiflorum, L. perenne, Festuca pratensis, Phleum pratense et Poa pratensis. La maladie se transmet principalement par des lésions tissulaires. C’est pourquoi des espèces comme L. multiflorum, qui sont coupées souvent, sont particulièrement exposées (fig. 1).

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Comme la protection phytosanitaire n’est généralement pas souhaitée dans les herbages et qu’aucun moyen efficace n’est connu, la sélection de variétés résistantes ou tolérantes reste la seule possibilité de contrôler la maladie. Bien que la résistance des nouvelles variétés se soit considérablement accrue grâce à une sélection systématique (Hirschi et al. 2010), l’amélioration continue de la résistance au flétrissement bactérien reste un enjeu de taille (Boller et al. 2005). Pour avoir à l’avenir également des variétés de première qualité, très résistantes dans les futures conditions environnementales, il est indispensable d’améliorer sans cesse les processus de sélection. Pour ce faire, il faut connaître en détail les interactions entre le pathogène et la plante. Le but de nos recherches


est de comprendre le contrôle génétique de la résistance dans le cas de L. multiflorum (Lm) et de la virulence de Xtg, c’est-à-dire l’interaction Lm x Xtg, afin de développer des outils de génétique moléculaire pour permettre une sélection efficace des résistances. Gènes de résistance de L. multiflorum (Lm) Dans une population dite de cartographie de Lm, basée sur le croisement d’une plante sensible de la variété Adret et d’une plante résistante du programme de sélection de la station de recherche Agroscope ReckenholzTänikon ART, la résistance a été contrôlée par un ou quelques loci du génome (Studer et al. 2006). Sur le terrain comme en serre, un locus de ce type présentait entre 43 et 84 % de la résistance totale. Ceci indique en général une résistance qualitative, spécifique, dans laquelle un gène de résistance de la plante interagit avec des facteurs de virulence hautement spécifiques d’isolats bactériens déterminés (Jones et Dangl 2006). Il est cependant intéressant de constater qu’une comparaison de plantes Lm infectées et non infectées n’a permis d’identifier aucune différence dans l’expression des gènes de résistances spécifiques connus (Wichmann et al. 2011a). Par contre, différents gènes importants dans les réactions de résistance non spécifiques se sont davantage exprimés dans les plantes infectées. Le premier objectif de l’étude était donc de savoir si l’interaction Lm x Xtg était une résistance spécifique ou non.

Résumé

Le flétrissement bactérien – une maladie ­m ystérieuse des graminées fourragères | Production végétale

Le flétrissement bactérien des graminées fourragères est causé par la bactérie Xanthomonas translucens pv. graminis (Xtg) et occasionne de lourds dommages dans les prairies et les pâturages. Pour permettre de sélectionner des variétés résistantes, nous étudions les principes génétiques de l’interaction entre les bactéries et les plantes. Il s’est avéré que cette interaction présentait certaines particularités par rapport à d’autres maladies causées par des espèces de Xanthomonas touchant le riz, la tomate ou le citron. Aucun signe d’interaction spécifique n’a pu être trouvé entre les isolats de bactéries et les phytogénotypes, interaction typique des gènes de résistance classiques. Le séquencement du génome Xtg a montré que ce pathogène possédait un nombre extraordinairement important de séquences d’insertion. De plus, l‘organisation d’un facteur de virulence capital se distingue fondamentalement des autres espèces de Xanthomonas. Bien que la suppression spécifique de ce facteur de virulence ait conduit à une large perte de la virulence, les bactéries ont tout de même pu se multiplier dans la plante. Ces découvertes apportent des éléments précieux pour le développement de méthodes de sélection efficaces.

Facteurs de virulence de X. t. pv. graminis (Xtg) Pour coloniser une plante, éviter la réaction de son système immunitaire et prélever ses éléments nutritifs, les pathogènes produisent ce qu’on appelle des protéines effectrices, qui sont issues de systèmes de sécrétion spécifiques. Les composants de ce système sont appelés facteurs de virulence. Chez les xanthomonades, le système de sécrétion de type 3 (T3SS) est responsable de la sécrétion des différentes protéines effectrices (Büttner et Bonas 2010), qui font souvent partie d’une identification spécifique de la race par les pathogènes spécifiques, avec réaction de résistance ultérieure. Bien qu’il existe des similitudes entre les facteurs de virulence parmi les xanthomonades, les mécanismes de sécrétion et les protéines effectrices varient considérablement d’une espèce et d’un pathovar à l’autre (White et al. 2009). Comme Xtg n’est apparenté que de loin aux espèces caractéristiques de Xanthomonas, on peut s’attendre à ce que les facteurs de virulence se différencient considérablement eux aussi. Le deuxième objectif de l’étude consistait à savoir si le T3SS est indispensable à la virulence de Xtg. Nous souhaitions également caractériser les différents  composants du système T3SS.

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Figure 2 | Infection artificielle à l’aide de ciseaux plongés dans la suspension bactérienne. (Photo: ART)

Matériel et méthodes Caractérisation de la résistance de Lm Un essai en serre a été organisé afin d’étudier s’il existe une interaction spécifique entre différents génotypes de Lm et des isolats de X. t. pv. graminis. Pour l’infection artificielle, six isolats bactériens (Xtg3, Xtg5, Xtg8, Xtg9, Xtg19, Xtg29) basés sur une virulence, une origine et une diversité génétique différentes ont été sélectionnés (Kölliker et al. 2006). Le matériel végétal se composait de soixante-deux génotypes de Lm différents sélectionnés dans des variétés, des écotypes et des populations expérimentales présentant une résistance variable au flétrissement bactérien (Wichmann et al. 2011b). Dix-huit clones de chaque génotype ont été isolés et plantés dans la serre à raison de 372 plantes en quatre répétitions. Au bout de huit semaines, les plantes ont été infectées avec chacun des six isolats bactériens. Les symptômes de la maladie ont été évalués 15, 21 et 28 jours après l’infection. L’infection a été pratiquée selon la méthode décrite par Rechsteiner et al. (2006), en coupant la plante à l’aide de ciseaux plongés dans une suspension bactérienne (fig. 2). A partir d’une échelle d’estimation allant de 1 (plante saine) à 9 (plante morte), la zone située sous la courbe de progression de la maladie (en anglais: area under desease progress curve, valeur AUDPC) a été calculée et utilisée pour l’évaluation statistique.

Le gène hrpG est un élément régulateur important du T3SS chez les xanthamonades (Büttner et Bonas 2010). A partir de la séquence hrpG de Xtg29, on a créé une construction génétique ΔhrpG, composée uniquement de séquences flanquantes, mais pas de véritables séquences génétiques de hrpG. Cette construction a été clonée dans le vecteur pCC101 (fig. 3; Wichmann et al. 2012). Xtg29 a été transformé par électroporation et double recombinaison homologue. On a ensuite vérifié que les mutants obtenus étaient des mutants ΔhrpG (sans la séquence hrpG) à l’aide d’une réaction en chaîne par polymérase. La virulence des mutants et du type sauvage Xtg29 a été testée en quatre répétitions sur un génotype Lm très sensible de la variété Adret, selon la méthode décrite plus haut. De surcroît, l’aptitude à la survie dans la plante a été étudiée dans le cadre de deux expériences. Pour ce faire, 0, 4, 7 et 14 jours après l’infection (expérience 1), ainsi que 14, 17, 21 et 28 jours après l’infection (expérience 2), des feuilles de plantes infectées ont été recueillies, stérilisées superficiellement et placées sur des plaques d’Agar. Le nombre de colonies développées par gramme de matériel végétal a été déterminé après sept jours d’incubation à 28 °C. Une ébauche du génome Xtg29 a été réalisée à l’aide du séquencement 454 (Roche). L’ADN et les séquences protéiques des éléments du T3SS ont été comparés avec des séquences d’autres xanthomonades à l’aide de BLASTn, BLASTx et BLASTp (Altschul et al. 1990).

BAM H1

∆hrpG

sacB BAM H1

pcC101

Caractérisation de la virulence de X.t. pv. graminis L’importance de T3SS comme facteur de virulence de Xtg a été étudiée en deux temps. Premièrement, un isolat de Xtg a été modifié de façon à ce qu’un gène important pour la régulation de T3SS lui fasse défaut. Ces mutants ont été testés afin de déterminer leur capacité à causer les symptômes de la maladie et leur aptitude à survivre dans la plante. Deuxièmement, l’ensemble du génome de Xtg a été séquencé et étudié afin d’identifier la présence de composants de T3SS. Pour ces essais, on a utilisé l’isolat standard d’ART, à savoir Xtg29 (Kölliker et al. 2006).

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8295 bp

insB strAB

oriT R6Kori Figure 3 | Vecteur avec le fragment Δ hrpG utilisé pour la mutation de Xtg29.


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Résultats

Tableau 1 | Analyse de variance de AUDPC (zone située sous la courbe de progression de la maladie) valeurs de 62 génotypes L. multiflorum (Lm) ayant été infectés par six isolats X. t. pv. graminis (Xtg) (tiré de Wichmann et al . 2011b)

Grande variabilité de la résistance Les notes moyennes de l’estimation variaient de 2,67 ± 0,97 (15 jours après l’infection) à 3,66 ± 1,16 (28 jours après l’infection). Aucune résistance complète n’a été observée sur aucune plante. Une comparaison des valeurs AUDPC des six isolats a montré que la résistance des génotypes de Lm tout comme la virulence des isolats de Xtg variait considérablement. En ce qui concerne la capacité à causer les symptômes de la maladie, l’isolat Xtg9 était celui qui affichait la plus grande virulence et l’isolat Xtg3 celui qui affichait la virulence la plus faible, tandis que Xtg29 présentait une virulence moyenne à élevée (fig. 4). Les génotypes G-04 (écotype), L-03 (variété Axis) et B-01 (variété candidate) étaient ceux qui avaient la résistance moyenne la plus élevée contre les six isolats bactériens avec des valeurs AUDPC comprises entre 30,1 et 31,4. Les trois génotypes K-01 à K-03 (variété Adret) présentaient la résistance moyenne la plus basse avec des valeurs AUDPC de 77,3 à 83,7. Une répartition des génotypes en trois catégories, sensible (AUDPC ≥ 60), moyennement sensible (60 < AUDPC > 39) et résistant (AUDPC ≤ 39) a montré que seuls deux génotypes étaient résistants à un ou plusieurs isolats tout en étant sensibles à d’autres isolats. Les 60 autres génotypes Lm présentaient soit la même réaction à tous les isolats,

Source de variation

DL

MC

Valeur F

Répétition

3

4725

62,94***

Génotype Lm

61

2941

39,18***

Isolat Xtg Isolat

5

999

13,31***

Génotype Lm x isolat Xtg

305

63

0,95ns

Erreur

1113

75

*** P < 0,001, ns P ≥ 0,05

soit se distinguaient tout au plus pour une catégorie de résistance. L’influence des génotypes Lm tout comme celle des isolats Xtg étant toutefois hautement significative statistiquement parlant, il n’a pas été possible d’identifier une interaction significative entre les génotypes de Lm et les isolats Xtg (tabl. 1). Signification et composants de T3SS du type Xtg Une double recombinaison homologue avec le vecteur pCC101 (fig. 2) a permis de créer un mutant ΔhrpG, qui ne peut plus produire la protéine régulatrice HrpG. La méthode RCP a permis de montrer que ce mutant ne possédait pas la séquence du gène hrpG. Dans leur croissance en milieu Agar, les mutants ne se distinguaient pas 

90 80 ●

70

Moyenne des six isolats Xtg 9 Xtg 29 Xtg 3

● ●

valeurs AUDPC

60 ●

● ●

50 ●

40 30

● ●

● ● ●

● ●

● ● ● ● ● ● ●

● ●

● ●

● ● ●

● ●

● ● ●

● ●

● ● ●

● ●

● ●

● ● ●

● ●

● ●

● ●

SF = 0,37 G−04 L−03 B−01 I−03 B−05 A−01 I−01 A−10 J−03 A−03 A−05 G−02 H−03 C−01 I−02 C−04 C−02 F−04 L−04 L−05 A−12 B−02 B−03 H−02 A−04 F−02 A−11 J−02 H−04 D−03 B−04 A−06 A−07 E−04 H−01 C−03 G−01 L−02 C−05 K−05 D−04 D−02 D−01 E−03 L−01 G−03 J−05 E−02 F−01 K−04 A−08 A−02 A−09 F−03 I−04 E−01 J−01 K−06 J−04 K−02 K−03 K−01

20

génotypes L. multiflorum

Figure 4 | Résistance moyenne de 62 génotypes Lm à six isolats Xtg et aux isolats Xtg 3, Xtg 9 et Xtg29 (selon Wichmann et al . 2011b).

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Δ hrpG

type sauvage

Figure 5 | Forme de croissance des mutants Δ hrpG et du type sauvage Xtg29 sur agar.

Δ hrpG

type sauvage

témoin

Figure 6 | Symptômes de maladie causés par le type sauvage Xtg29; aucun symptôme clair sur le mutant Δ hrpG et le témoin H2O.

du type sauvage Xtg29 (fig. 5). Par contre, le mutant ΔhrpG ne causait pas ou très peu de symptômes de la maladie sur les génotypes Lm sensibles (fig. 6). Tandis que les symptômes causés par le type sauvage avaient une note de résistance de 3,25 ± 1,71 (7 jours après l’infection) à 5,5 ± 1,73 (28 jours), les valeurs du mutant ΔhrpG étaient comprises entre 1,00 ± 0,58 et 2,50 ± 0,58 (fig. 7). Afin de constater si les mutants étaient en mesure de survivre dans la plante, on a procédé à des rétro-isolations. Six heures après l’infection (jour 0), la densité de population dans les plantes infectées par ΔhrpG étaient 10 % plus basse que dans les plantes infectées par le type sauvage (fig. 8). Jusqu’au jour 7, la densité a augmenté considérablement pour les deux isolats, mais pour ΔhrpG, qui affichait une valeur 8,51 ± 0,50 log10, elle était d'environ 55 % plus basse que pour le type sauvage (9,31 ± 0,20). Dans la phase de développe-

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ment ultérieur, la densité de population a eu tendance à baisser pour les deux isolats, sachant qu’une légère réaugmentation a été observée sur le type sauvage au bout de 21 jours (fig. 8). Une analyse provisoire de la séquence du génome de Xtg29 a permis d’estimer la taille du génome à 5,01 mégabases. Différents loci génétiques présentaient d’importantes similitudes par rapport à d’autres espèces de Xanthomonas. Les principaux composants connus de T3SS ont également été trouvés dans le génome Xtg29 (fig. 9). Contrairement aux autres xanthomonades, les gènes régulateurs hrpG et hrpX se situent directement dans le cluster de gènes de hrp et non dans un cluster séparé (fig. 9). Une disposition semblable a été trouvée sur Ralstonia solanacearum, le responsable du flétrissement bactérien des morelles, où le hrpB correspond au hrpX des xanthomonades.


● ∆ hrpG

● témoin

5

4

● ●

● ●

1 7

14 21 jours après l‘infection

28

Figure 7 | Résistance d’un génotype Lm sensible infecté par le type sauvage Xtg29, le mutant Δ hrpG et le témoin H2O. Les valeurs d’évaluation vont de 1 (résistant) à 9 (sensible).

Discussion et conclusions

11

11

6

5 0

développement développement précoce précoce

6

5

0

4

4

7

7

jours après joursl‘infection après l‘infection

14

14

10

9

28

28

8

7

7

8

● ●

● ∆hrpG ● ∆hrpG type ● sauvage type sauvage

développement développement ultérieurultérieur

6

10

9

6

7 8 9 10 nbre de colonies / g plante (log)

● ∆hrpG ● ∆hrpG type ● sauvage type sauvage

5

nbre de colonies / g plante (log)

nbre de colonies / g plante (log)

11

Aucune indication claire de spécificité Pour maîtriser durablement le flétrissement bactérien dans les systèmes herbagers, il est important de bien comprendre l’existence des mécanismes de résistance spécifiques. Comme la résistance spécifique n’est normalement efficace que contre certaines populations de

5

2

3

pathogènes, des modifications génétiques des pathogènes ou la migration de pathogènes d’autres régions peuvent rendre la résistance inefficace. Nous n’avons pu mettre en évidence aucune influence significative de l’interaction entre les génotypes de Lm et les isolats Xtg. De plus, la résistance variait plus ou moins dans les mêmes plages pour tous les 62 génotypes étudiés, indépendamment des isolats de bactéries employés. C’est le signe très net que ce ne sont pas des gènes de résistance spécifiques, mais des mécanismes de résistance non spécifiques, qui sont les premiers responsables de la résistance de Lm au flétrissement bactérien. Les interactions spécifiques dans d’autres espèces de Xanthomonas sont souvent accompagnées d’une très grande diversité dans les populations pathogènes (Hu et al. 2007). Les populations de Xtg en revanche semblent se caractériser par une variabilité génétique extrêmement faible (Kölliker et al. 2006). La grande variabilité génétique de Lm associée au fait que les graminées sont souvent mises en place dans des mélanges comprenant des légumineuses et des herbacées, pourrait expliquer que la pression de sélection pour la formation d’interactions spécifiques soit trop faible. Même avec l’agent pathogène fongique Puccinia coronata (rouille couronnée), avec lequel des résistances spécifiques sont connues, des essais de plusieurs années sur plus de trente sites en Europe n’ont pas permis de montrer une variation régionale ou temporelle  des races de champignons (Schubiger et al. 2010).

7 8 9 10 nbre de colonies / g plante (log)

note

6

7

8

● type sauvage

11

9

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14

14

17

17

21

21

jours après joursl‘infection après l‘infection

Figure 8 | Colonisation de Lm par le type sauvage Xtg29 et le mutant Δ hrpG 0 – 14 jours (développement précoce) et 14 – 28 jours (développement ultérieur) après l’infection.

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2 1 7 4 cT pB rcN rcL rpB rcJ rpB rpB rcU hr hr h h h h h h h

cC

hr

cV

hr

6 aP rcQ rcR rcS paA rcD rcDrpEpaB h h h h h h h h

hp

aF

pF

hr

hp

Xoo

hrpX

IS 1 IS 1 12

hrpG

Xtg

hrpX

hrpG

Rs

hrpB

hrpG

similitude des séquences avec Xtg < 30% 30 – 50%

50 – 70% > 70%

prhJ

prhR

prhl

Xoo = Xanthomonasoryzae pv. oryzae Xtg = Xanthomonastranslucens pv. translucens Rs = Ralstoniasolanacearum

Figure 9 | Disposition et similitude des gènes hrp, hrc et hpa de X. oryzae pv. oryzae (pourriture bactérienne du riz), Xtg29 (flétrissement bactérien des graminées fourragères) et Ralstonia solanacearum (flétrissement bactérien des morelles).

Virulence très amoindrie sans T3SS L’absence de gène hrpG dans Xtg a considérablement freiné le développement de symptômes sur Lm. C’est le signe qu’un T3SS complet est nécessaire pour que le pouvoir pathogène et la virulence de Xtg s’expriment. Un développement très faible de symptômes sur les mutations de T3SS a également été décrit sur d’autres espèces de Xanthomonas (Büttner et Bonas 2010). Dans la présente étude, le mutant ΔhrpG de Xtg a déclenché des symptômes certes faibles, mais clairement différenciables du témoin. On ne peut donc pas exclure qu’à côté de T3SS d’autres facteurs, comme les polysaccarides extracellulaires ou des protéines issues du système de sécrétion de type 2, jouent un rôle dans la virulence. Les mutants ΔhrpG se sont développés presque aussi vite dans la plante que le type sauvage Xtg29, ce qui est étonnant. C’est la preuve que le T3SS n’est pas nécessaire à la survie de Xtg. Xtg – une xanthomonade unique La plupart des composants de T3SS ont été trouvés dans Xtg. La disposition des éléments régulateurs hrpG et hrpX est toutefois unique. Sur toutes les autres espèces de Xanthomonas séquencées, ces gènes se situent nettement en dehors du cluster de gènes hrp. Cette disposition spéciale permet de supposer une possible similitude des mécanismes de virulence avec Ralstonia solanacearum. Bien que les séquences des gènes hrc, hrp et hpa de Xtg soient plus semblables à celles des xanthomonades qu’à celles de R. solanacearum, ils se distinguent néanmoins considérablement des premières.

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Notre étude a montré que les mécanismes de virulence et de résistance dans l’interaction Lm x Xtg se distinguent à plus d’un titre de ceux des autres maladies causées par les xanthomonades. Bien qu’aucun gène de résistance spécifique n’ait pu être identifié, l’importance de T3SS pour la virulence indique un rôle important des effecteurs sécrétés. n


Batteriosi vascolare: una malattia enigmatica delle graminacee foraggere Nelle graminacee foraggere, la batteriosi vascolare è scatenata dal batterio Xanthomonas translucens pv. graminis (Xtg) e genera ingenti danni a pascoli e prati. Al fine di selezionare varietà resistenti, si è condotta un'analisi sulle basi genetiche dell'interazione tra batteri e piante, dalla quale è emerso che tale interazione presenta alcune particolarità rispetto ad altre malattie di riso, pomodori o limoni causate da specie Xanthomonas. Non si sono potute individuare, pertanto, indicazioni su un'interazione caratteristica della razza tra i singoli isolati di batteri e i genotipi delle piante, come tipicamente accade per i geni classici della resistenza. Dal sequenziamento del genoma Xtg è emerso che, stranamente, tale patogeno ha molte sequenze di inserzione. Inoltre, l'organizzazione di un importante fattore di virulenza si differenzia nettamente da altre specie di Xanthomonas. Una soppressione specifica di tale fattore di virulenza ha sì generato un'ingente perdita di virulenza, ma i batteri erano ancora in grado di riprodursi nella pianta. Tali risultati forniscono basi preziose per lo sviluppo di efficaci metodi di selezione.

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Summary

Riassunto

Le flétrissement bactérien – une maladie ­m ystérieuse des graminées fourragères | Production végétale

Bacterial wilt – a puzzling disease of forage grasses Bacterial wilt of forage grasses is caused by the bacterium Xanthomonas translucens pv. graminis (Xtg) and leads to major damage in meadows and pastures. To support the breeding of resistant cultivars, we are studying the genetic bases of the interaction between bacteria and plants. In doing so, we have learnt that this interaction exhibits a number of unique features when compared with other diseases of rice, tomatoes or lemons caused by Xanthomonas species. For one thing, no indications were found of a strain-specific interaction between individual bacterial isolates and plant genotypes, as is characteristic for typical resistance genes. The sequencing of the Xtg genome has shown that this pathogen possesses an unusually high number of insertion sequences. In addition, the organisation of an important virulence factor differs noticeably from other Xanthomonas species. Although knock-out mutation of this virulence factor led to a significant reduction of virulence, the bacteria were still able to reproduce in the plant. These findings provide valuable bases for the further development of efficient breeding methods. Key words: bacterial wilt, resistance genes, virulence factors.

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P r o d u c t i o n

v é g é t a l e

Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses René Flisch1, Urs Zihlmann1, Peter Briner2 et Walter Richner1 Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, 8046 Zurich, Suisse 2 Peter Briner AG, Farmerprodukte und Dienstleistungen, 8523 Hagenbuch, Suisse Renseignements: René Flisch, e-mail: rene.flisch@art.admin.ch, tél. +41 44 377 73 23

1

Application d'azote au moyen d'un engin équipé de roues d'injection en étoile. (Photo: Peter Briner)

Introduction En agriculture, l’azote (N) est un facteur de production qui joue un rôle important dans la formation du rendement des cultures et dans la qualité des récoltes. Il peut avoir en même temps des effets indésirables sur l’environnement (eau et air). Par conséquent, une utilisation ciblée et efficiente de l’azote, en tenant compte du potentiel de rendement, de la qualité du produit et des effets environnementaux, est un objectif important pour une production agricole durable. Le système CULTAN – Controlled Uptake Long Term Ammonium Nutrition (nutrition à l’ammonium contrôlée sur la durée) – est censé apporter de nombreux avantages par rapport aux méthodes de fumure usuelles, tant au niveau de la production végétale que de l’économie

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et de l’écologie, en tablant sur une meilleure efficience de l’azote. Jusqu’à maintenant, les résultats d’essais et les recommandations d’utilisation du système CULTAN provenaient la plupart du temps de régions plutôt sèches du nord et de l’est de l’Europe (Kozlovský et al. 2009), une disponibilité suffisante de l’ammonium (NH4) étant assurée même si l’humidité du sol est faible. Au cours de ces dernières années, le système est aussi utilisé en Suisse, toutefois sans disposer d’informations fondées quant au fonctionnement du système dans les conditions culturales, climatiques et pédologiques du pays. La Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART a jugé nécessaire d’expérimenter le système de fumure CULTAN en le comparant aux techniques d’application usuelles sur blé d’automne et sur maïs, en mesurant les effets sur le rendement et sur la qualité de la récolte.


Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses | Production végétale

Dispositif expérimental Au cours des années 2008 à 2010, des essais parcellaires sur cultures de blé d’automne et de maïs grain ont été installés dans des exploitations agricoles typiques du Plateau suisse. Les sites d’essais sont décrits dans le tableau 1. Pour éviter l’interférence d’arrière-effets de réserves d’azote, on a veillé à ce que la culture précédente ne soit pas suivie d’un engrais vert, d’une culture dérobée ni d’une fumure organique. Pour la même raison, on a évité la prairie temporaire comme précédent cultural. Le système de fumure CULTAN, qui repose sur l’application de sulfate d’ammonium sous forme liquide, a été comparé à une fumure usuelle au nitrate d’ammoniaque à 27 % N (NAS), au sulfate d’ammoniaque granulé à 21 % N (NSu), ainsi qu’à un témoin sans azote (0N ). La prise en compte du sulfate d’ammoniaque parallèlement au nitrate d’ammoniaque avait pour but de mettre en évidence un éventuel effet de la forme de l’azote, le système CULTAN utilisant aussi du sulfate d’ammoniaque, mais sous forme liquide. La quantité d’azote apportée était la même pour les trois procédés de fumure; cependant, le niveau de fumure azotée était adapté à chaque site. En culture de maïs, le procédé Nmin a été fixé d’après la teneur du sol en azote minéral (Méthode Nmin selon Flisch et al. 2009). Le dispositif expérimental reposait sur la méthode des blocs avec quatre répétitions. La randomisation des procédés a toutefois dû être adaptée aux contraintes de la culture et de la mécanisation. Compte tenu de la largeur de travail des machines, la largeur des  parcelles a été fixée à 6 m pour une longueur de 20 m.

Résumé

Matériel et méthodes

Le système de fumure azotée CULTAN (Controlled Uptake Long Term Ammonium Nutrition) a été testé au cours des années 2008 à 2010 dans différentes exploitations agricoles du Plateau suisse. Dans des essais parcellaires cultivés en blé d'automne ou en maïs grain, on a appliqué un seul apport de sulfate d'ammoniaque liquide, selon le système CULTAN, que l'on a comparé au nitrate d'ammoniaque et au sulfate d'ammoniaque épandu en surface au moyen d'un semoir pneumatique, en deux à trois apports. Aucune différence de rendement ni de teneur en protéines n’a été constatée sur le blé d'automne. Le rendement en paille a été légèrement plus élevé dans le procédé CULTAN à cause d'une densité de tiges supérieure. Sur le maïs grain également, aucune différence de rendement ni de teneur en azote dans le grain n'a été constatée entre le système CULTAN et les procédés de fumure usuels. Tout au plus a-t-on observé dans le procédé CULTAN un rendement en matière sèche sur plantes entières légèrement plus élevé, dû au poids des tiges. Le principe du procédé CULTAN consistant à créer des dépôts d'ammonium dans le sol et, à partir de ceux-ci, d'alimenter les plantes en ammonium en continu et de manière soutenue, n'a pas pu être vérifié dans ces essais. Les mesures d'ammonium et de nitrates dans le sol ont révélé que l'ammonium est presque totalement nitrifié en quelques semaines.

Tableau 1 | Description des sites d'expérimentation

Années

Sites

Précipitations Altitude annuelles1 mm

Température annuelle1 (°C)

Niveau de fertilité2

Type de sol2 Culture

Humus Argile % %

Limon %

pH

Calcaire

Test P

TestK

TestMg

2008

8115

Metttmenhasli

420

1040

8,5

BA

2,6

23

36

6,8

8,3

1,9

10,4

2008

8544

Bertschikon

510

1070

8,2

BA

2,8

19

29

7,0

22,8

4,8

9,9

2009

8182

Hochfelden

450

1030

8,5

BA

2,2

20

47

6,0

10,2

5,6

6,1

2009

8544

Attikon

455

1070

8,2

BA

4,8

26

31

7,2

+

46,0

6,7

16,4

2010

8182

Hochfelden

450

1030

8,5

BA

2,7

17

47

6,2

11,9

2,9

7,3

2010

8543

Gundetswil

470

1070

8,2

BA

3,5

26

36

6,9

9,2

1,8

22,7

2008

8115

Metttmenhasli

420

1040

8,5

MG

1,7

14

36

7,2

+

11,3

4,3

7,0

2008

8544

Bertschikon

510

1070

8,2

MG

2,2

14

31

6,7

14,1

5,2

7,8

2009

8404

Winterthur

450

1070

8,2

MG

3,7

20

34

6,9

27,5

8,8

10,1

2009

8425

Oberembrach

455

1030

8,5

MG

3,8

32

31

6,6

12,3

4,5

30,2

2010

8415

Berg am Irchel

450

1050

8,5

MG

3,7

24

22

7,6

+

23,5

8,7

12,6

2010

8544

Bertschikon

470

1070

8,2

MG

3,4

23

34

7,1

+

8,4

2,8

27,2

Moyennes régionales pluriannuelles. 2Analyses du sol selon les méthodes de référence des Stations de recherche Agroscope, 1996. BA: blé d'autommne MG: maïs grain 1

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 40–47, 2013

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Production végétale | Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses

Tableau 2 | Paramètres de rendement et de qualité du blé d'automne

Procédés

Rendement grain1 (dt/ha)

Rendement paille1 (dt/ha)

PMG2 (g)

Protéines sur grain (g/kg MS1)

Epis par m²

Grains par épi

340

26

B

114,3

27

AB

135,4

Prélèvement N (kg N/ha)

Fumure N (kg N/ha)

2008: Mettmenhasli, Variété Ludwig 0N

33,6

CULTAN

52,9

B

42,7

NAS

54,2

A

66,8

A

42,8

B

523

A

28

AB

NSu

53,6

A

66,3

A

43,3

B

495

A

29

A

46,5

B

412

46,5

B

546

A

68,3

B

44,8

A

43,1

A B

538

B A

B

84

B

0

A

160

A

120

132,5

A

162

A

120

128,0

A

159

A

120

2008: Bertschikon, Variété Siala 0N

53,8

CULTAN

80,1

A

B

78,2

46,7

AB

C

NAS

80,7

A

72,5

AB

47,9

A

494

NSu

82,2

A

71,1

B

48,3

A

478

49,2

A

B

33

B

106,3

37

AB

128,9

A

B

40

A

126,1

B

42

A

128,1

A

B

117

B

0

220

A

120

A

211

A

120

A

218

A

120

2009: Hochfelden, Variété Zinal 0N

40,2

CULTAN

67,5

A

B

64,7

33,4

C

NAS

66,7

A

58,6

B

47,4

B

NSu

69,4

A

59,2

B

47,5

B

49,9

BC

459

49,4

BC

633

A

46,4

375 C

588

B

25

C B

99,0 107,9

C B

81 154

B

0

A

29

A

152

545

A

30

AB

112,7

A

157

A

150

538

A

32

A

112,7

A

163

A

150

2009: Attikon, Variété Siala 0N

38,9

CULTAN

69,4

A

C

NAS

66,4

A

NSu

62,5

37,4 66,1

B

D A

C A

21

B

26

A

100,2

B

116,6

A

82

C

0

170

A

118

57,9

BC

50,4

AB

503

BC

31

A

115,1

A

157

AB

120

54,9

C

51,0

A

476

BC

30

A

110,6

A

144

B

120

39,3

A

2010: Hochfelden, Variété Zinal 0N

29,2

CULTAN

43,8

C B

28,7 63,6

C AB

34,0

326 C

C

540

AB

27

A

105,5

28

A

134,4

C A

65 161

C A

0 162

NAS

50,9

A

58,4

B

35,9

B

534

AB

31

A

128,5

B

150

B

160

NSu

49,4

A

60,0

B

35,5

B

488

B

35

A

128,0

B

151

B

160

2010: Gundetswil, Variété Arina 0N

37,9

CULTAN

57,6

A

B

39,8 70,8

NAS

54,4

A

61,3

NSu

54,8

A

61,6

C

41,9

A

384

41,5

A

566

B

41,5

A

484

B

41,6

A

485

45,2

A

A

C

27

B

118,8

29

AB

132,2

B

32

A

123,3

B

140

B

105

B

32

A

126,1

AB

144

B

105

A

B

93

A

161

C A

0 103

Moyenne de tous les lieux 0N

38,9

CULTAN

61,9

B

NAS

62,2

A

62,6

B

44,3

B

514

B

32

A

123,0

A

163

B

129

NSu

62,0

A

62,2

B

44,5

B

493

B

33

A

122,3

A

163

B

129

A

38,1 68,6

C A

43,5

383 C

568

C A

27 29

C B

107,4 125,9

C A

87 171

D A

1 Matière sèche. 2Poids de 1000 grains. (Les valeurs qui ne sont pas assorties de lettres communes sont statistiquement différentes les unes des autres au seuil de probabilité d'erreur de 5% selon le test de Duncan).

42

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 40–47, 2013

0 129


Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses | Production végétale

Le sulfate d’ammoniaque liquide a été appliqué au moyen d’un engin équipé de roues d’injection en étoile, mis à disposition par l’entreprise de travaux agricoles Peter Briner AG. Cette application a été réalisée à la reprise de la végétation pour le blé d’automne et au semis pour le maïs, ceci sous forme de «dépôts ponctuels» à 5–7 cm de profondeur. Les engrais minéraux granulés ont été épandus au moyen d’un distributeur pneumatique, en trois apports sur le blé et en un ou deux apports sur le maïs, conformément aux «Données de base pour la fumure des grandes cultures et des herbages» (DBF; Flisch et al. 2009). L’importance des apports d’azote ainsi que les mesures phytosanitaires ont été définies par les exploitants. Dans tous les essais, on a prélevé des échantillons de sol (0–90 cm) afin de déterminer les teneurs en Nmin avant la fumure et après la récolte. En blé d’automne, on a récolté 30 m² (1,5 m × 20 m) par parcelle au moyen d’une moissonneuse-batteuse d’expérimentation «Wintersteiger». Le rendement en paille a été calculé à partir du rapport grain:paille défini par échantillonnage. En maïs grain, on a récolté les quatre rangs du milieu sur 10 m de long, soit une surface de 3 m × 10 m. Saisie des données et analyses statistiques Les parties des plantes ont été mesurées séparément (grain et paille pour le blé; grain; tiges et rafles pour le maïs). Les composantes du rendement du blé ont aussi été déterminées: nombre d’épis par mètre carré, nombre de grains par épi. Comme critère de qualité, on a retenu la teneur en azote des parties de plantes récoltées, mesurée selon la méthode DUMAS. A partir de cette mesure, on peut calculer la teneur en protéines des grains. Sur la base des éléments récoltés et des teneurs en azote, on a calculé la quantité totale d’azote prélevée par la culture. Pour mettre en évidence d’éventuelles différences entre les procédés, les résultats ont été soumis à une analyse de variance selon la méthode ANOVA, complétée par le test de Duncan.

Résultats et discussion Rendement et qualité du blé Dans l’ensemble des variantes fertilisées, le rendement en grain du blé d’automne variait fortement d’un site à l’autre, allant de 50 à 80 kg de matière sèche (MS) par hectare. Le niveau du rendement a été influencé tout particulièrement par les facteurs année, site et variété. Les rendements du système CULTAN n’ont pas été différents de ceux des procédés de fumure classiques à base de NAS et de NSu où l’engrais est épandu en surface en trois apports (tabl. 2).

Le rendement du procédé 0N se situait à environ 60 % de celui des procédés avec azote. A Gundetswil, en 2010, où la fumure a été réduite à 105 kg N/ha par rapport à la norme (Flisch et al. 2009), la variante 0N a atteint 70 % du rendement des variantes avec azote. Ceci laisse supposer que, dans ce cas, le rendement optimal n’a pas été atteint. Aucun avantage décisif du système CULTAN n’a pu être confirmé tant en situation de fumure N réduite (Sommer 2003) que dans toute la série d’essais. Des essais pluriannuels conduits en Allemagne aboutissent aux mêmes conclusions (Kücke 2003). En situation de fumure renforcée par rapport à la norme suisse, on n’a pas observé de différences non plus entre les procédés (tabl. 2). Les paramètres importants pour la formation du rendement sont: le nombre d’épis par mètre carré, le nombre de grains par épi et le poids de mille grains (PMG). Comparé aux procédés de fumure N classiques, le système CULTAN comptait en moyenne 50 épis supplémentaires au m²; en revanche, le nombre de grains par épi et plus particulièrement le PMG étaient inférieurs. La densité d’épis supérieure est probablement à mettre en relation avec un fort tallage favorisé par l’apport d’azote précoce, unique et élevé, inhérent au système CULTAN; surtout lorsque les conditions de croissance sont favorables et l’eau disponible en suffisance, comme ce fut le cas au cours des années 2008 à 2010. Selon Kozlovský et al. (2009) divers auteurs ont constaté que la densité d’épis était la même dans le système CULTAN qu’avec les apports d’azote en surface et fractionnés; le nombre de grains par épis était plus élevé mais le PMG significativement inférieur, ce qui aboutissait à un rendement, identique voire plutôt inférieur. L’argument largement répandu selon lequel le système CULTAN permettrait d’atteindre une meilleure efficience de l’azote en conditions sèches, l’engrais étant déposé près des racines, n’a pas été confirmé par les auteurs cités. En ce qui concerne les teneurs en protéines dans le grain, aucune différence entre procédés de fumure n’a été observée. Ce constat confirme la plupart des résultats obtenus dans les essais étrangers. Dans les témoins 0N, les teneurs en protéines étaient inférieures de 2 % (en valeur absolue) à celles des procédés avec azote. L’apport de sulfate d’ammoniaque sous forme granulés, en une seule fois à la reprise de la végétation, aboutit aussi à des teneurs en protéines significativement inférieures (résultats non présentés dans cette publication). Les autres paramètres mesurés n’ont pas révélé de différences entre le système CULTAN et les procédés de fumure classiques. Le prélèvement total d’azote était significativement plus élevé (10 kg N/ha) dans le système CULTAN que dans les procédés NAS et NSu (tabl. 2), en raison d’une pro duction de paille significativement supérieure.

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 40–47, 2013

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Production végétale | Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses

160 140

kg de grain/a (15% H2O)

120 100 80 60 40 20 0 Mettmenhasli (2008)

Bertschikon (2008)

sans azote

Winterthur (2009) CULTAN

Oberembrach (2009) NAS

Berg am Irchel (2010) NSu

Bertschikon (2010) Nmin

Figure 1 | Rendement en grain du maïs selon les procédés de fumure N dans les différents sites d'expérimentation.

Rendement et qualité du maïs grain Il est bien connu que le rendement du maïs peut être fortement influencé par les conditions de l’année, le terroir ainsi que par les différences variétales. Bustamante Morales (2009) a mis en évidence des interactions entre variétés, conditions environnementales et formes de fumure; une nutrition azotée ammoniacale comparée à la forme nitrique pouvait aboutir à des résultats tantôt supérieurs, tantôt inférieurs. Dans la série d’essais qui sont l’objet de cette publication, des rendements en grain très élevés (110 à 140 dt/ha à 15 % H2O) ont été enregistrés, bien supérieurs à la moyenne pluriannuelle suisse (Flisch et al. 2009). Le rendement en grain dans les parcelles sans azote atteignait 100 à 130 dt/ha, donc peu en-dessous de celui des procédés avec fumure N. Toutefois, sans fumure azotée, le rendement en matière sèche mesuré sur plantes entières se situait nettement en-dessous de celui des procédés avec fumure N, ceci à cause d’un moindre rendement en tiges. En comparant les moyennes de rendement entre procédés de fumure N, on ne constate aucune différence significative. D’un site à l’autre, c’était parfois un procédé, parfois un autre qui présentait un léger avantage (fig. 1); bien que significatives, ces différences n’ont guère d’intérêt pour la pratique car elles sont plus petites que les variations de rendement inhérentes au terroir et aux conditions de l’année. Les rendements en plante entière du système CULTAN dépassaient de 10 dt/ha, en moyenne, ceux des procédés de fumure usuels; ceci était à mettre en relation avec une production de tiges plus élevée, parfois

44

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 40–47, 2013

même significativement supérieure. Dans des essais placés dans le sud de l’Allemagne (Breisgau), Maier et al. (2011) ont fait les mêmes constatations, tant pour le rendement en grain que pour le rendement en plante entière. Les teneurs en azote dans les grains de maïs étaient pratiquement identiques dans tous les procédés de fumure (15,5 ± 0,1 g/kg MS). Dans les parcelles sans azote, les teneurs étaient inférieures d’environ 1 g/kg de MS, toutefois proches des valeurs supérieures admises dans les DBF (Flisch et al. 2009). Il faut noter que le procédé fertilisé selon la méthode Nmin, qui apportait en moyenne de tous les essais 50 kg N/ha de moins, a fourni les mêmes rendements et la même qualité. On peut en déduire que le niveau de fumure choisi par les exploitants, qui dépassait en moyenne de 10 kg N/ha la dose recommandée (Flisch et al. 2009), était trop généreux dans la plupart des cas. Les dépôts d’ammonium dans le sol Dans le système CULTAN, l’azote est toujours apporté en une seule fois et sous forme d’ammonium (NH4) au début de la période de végétation. L’injection crée des dépôts d’azote ammoniacal à proximité des racines des plantes. Selon Sommer (2003), la forte concentration d’ammonium dans la zone des dépôts inhibe la nitrification microbienne de l’azote ammoniacal. Il en résulte un déroulement continu et optimum de l’absorption de l’azote par les plantes et le dépôt d’azote ammoniacal échappe au risque de lixiviation dans le sol. Dans nos essais sur blé d’automne, les teneurs en Nmin dans le sol, avant le second et le troisième apport d’azote,


Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses | Production végétale

250,0 plus de 90% de nitrates

kg Nmin par ha

200,0

150,0

100,0

plus de 80% de nitrates

50,0

Avant mont.

Avant épiaison

Après récolte

Blé d'automne

4-5 feuilles

Sulfate d'amm.

CULTAN

Nitrate d'amm

Sans azote

Sulfate d'amm.

CULTAN

Nitrate d'amm

Sans azote

Nitrate d'amm

Semis

Sulfate d'amm.

CULTAN

Sans azote

Nitrate d'amm

Sulfate d'amm.

CULTAN

Sans azote

Sulfate d'amm.

CULTAN

Nitrate d'amm

Sans azote

Sulfate d'amm.

CULTAN

Nitrate d'amm

Sans azote

Nitrate d'amm

Début vég.

Sulfate d'amm.

CULTAN

Sans azote

0,0

Après récolte

Maïs grain

Figure 2 | Evolution des teneurs en N min selon les différents procédés de fumure N en cultures de blé d'automne et de maïs grain. Moyennes de six essais.

se situaient entre 30 et 60 kg N/ha. Des valeurs plus élevées ont été mesurées en 2010 où, en raison des conditions météorologiques, le premier apport d’azote a été très tardif, proche du second. Des valeurs Nmin relativement basses ont aussi été observées dans le système CULTAN; toutefois, elles avaient tendance à n’être que légèrement supérieures (10−15 kg N/ha) à celles des procédés de fumure classiques, et l’azote se trouvait en grande partie sous forme nitrique. Manifestement, le blé d’automne a été capable, dans le système CULTAN, d’absorber une grande quantité d’azote en peu de temps, avec pour effets un fort tallage et un aspect vert foncé des plantes. On n’a toutefois pas analysé si l’azote a été absorbé sous forme de nitrate ou d’ammonium. Les reliquats de Nmin mesurés après la récolte du blé se situaient entre 20 et 40 kg N/ha dans tous les procédés de fumure (fig. 2). En culture de maïs, l’azote destiné aux procédés classiques a été apporté au stade 4–6 feuilles. Les doses supérieures à 80 kg N/ha ont été épandues en deux fois à quelque 10 jours d’intervalle. A ce stade, les teneurs en Nmin dans le système CULTAN atteignaient 180 à 250 kg N/ha, soit 100 à 150 kg N/ha de plus que dans les procédés de fumure classiques et approximativement la même

quantité d’azote que celle qui avait été apportée au semis dans ce système (fig. 2). Plus de 90 % de l’azote minéral mesuré dans le sol se trouvait sous la forme nitrique; ainsi, l’ammonium a été presque entièrement nitrifié en l’espace de 4 à 6 semaines. De ce fait, l’inhibition de la nitrification fondée sur les fortes concentrations en NH4, la stabilité du dépôt de NH4 ainsi que la nutrition des plantes soutenue (Sommer 2003) sont des arguments qui ne se sont pas vérifiés. Dans l’expérimentation de longue durée «Ober­ acker» Rütti/Zollikofen (Sturny et al. 2007), le système CULTAN est appliqué depuis 2007. Les dépôts d’ammonium sont placés dans le sol par un système d’injection monté sur une roue en étoile. Un échantillon de terre est prélevé à proximité des dépôts au moyen d’un soc creux (diamètre 2,6 cm, profondeur 15 cm) et la concentration en N ammoniacal est mesurée. L’échantillonnage et les mesures sont effectués à intervalles de une à deux semaines à partir de l’apport d’engrais. Les résultats montrent une rapide baisse de la concentration en azote ammoniacal dans la zone des dépôts (fig. 3). Aucune des séries de mesures effectuées avec cette méthode de prélèvement n’a confirmé la stabilité temporelle des dépôts  d’ammonium.

Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 40–47, 2013

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Production végétale | Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses

1000 900 800

ppm NH4 -N

700 600 500 400 300 200 100

7/7/2009

6/27/2009

6/17/2009

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Figure 3 | Evolution de la concentration en azote ammoniacal dans les dépôts d'ammonium et dans la terre environnante sous maïs en semis direct dans l'essai «Oberacker» de Rütti/Zollikofen. Semis: 22.4.2009; mise en œuvre du système CULTAN: 13.5.2009; profondeur de prélèvement: 0–15 cm pour un volume de sol de 80 cm 3; 110 kg de N-NH 4 /ha localisé en 80 000 dépôts par hectare.

Conclusions et perspectives Les procédés de fumure comparés ont fourni des résultats très semblables, tant en ce qui concerne le rendement que la qualité des récoltes, que ce soit sur blé ou maïs. Même si les cultures fertilisées selon le système CULTAN présentent souvent un aspect plus vert que les autres, il n’en résulte pas un rendement supérieur ni une meilleure valorisation de l’azote. Une quantité importante d’azote apportée tôt sur les cultures est à considérer de façon critique, quelle que soit la technique de fumure. Dans le système CULTAN, un «effet dépôt» n’a pas pu être vérifié. En cultures sarclées tout particulièrement, les besoins des plantes en azote sont très modestes en début de végétation. Si les quantités d’azote disponible sont importantes à ce stade (et elles sont aussi en grande partie sous forme de nitrates dans le système CULTAN), une forte proportion est inutilisée, ce qui accroît les risques de pertes. Pour que le système CULTAN soit plus conforme à la courbe d’absorption de l’azote par les plantes et aux exigences environnementales, il faudrait pouvoir modifier le système d’application afin d’apporter le sulfate d’ammoniaque plus tard, au stade adéquat. Ainsi, l’azote disponible dans le sol pourrait être mieux pris en compte (méthode Nmin) et la quantité d’azote à apporter serait réellement adaptée aux besoins des cultures.

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Un projet pilote à la station d’épuration des eaux de Kloten/Opfikon montre que le processus d’épuration ­ engendre un gros potentiel de récupération d’azote sous forme de sulfate d’ammoniaque, qui pourrait être valorisé en agriculture par le système CULTAN. Dans la perspective du développement de cycles des éléments nutritifs aussi fermés que possible, cette forme de récupération et de valorisation en agriculture devrait être soutenue. Face à la raréfaction des ressources naturelles et à la hausse des prix des engrais auxquelles il faut s’attendre, la récupération de l’azote dans les stations d’épuration des eaux et sa valorisation en agriculture pourrait représenter une alternative économiquement n intéressante.

Remerciements

Nos remerciements s'adressent au Service de la protection des sols du canton de Berne et à la Haute école d'agronomie, foresterie et alimentation (HAFL) pour leur contribution dans l'expérimentation «Oberacker», ainsi qu'aux agriculteurs W. Landert (Hochfelden), H. Meier (Niederhasli) et à la Communauté d'exploitants Ammann et Briner (Attikon) pour la mise à disposition des surfaces et leur participation à la conduite des essais.


Procedura CULTAN nel test attitudinale per la campicoltura svizzera La procedura CULTAN (Controlled Uptake Long Term Ammonium Nutrition) è stata testata nella pratica, nell'Altipiano svizzero, tra il 2008 e il 2010. Negli esperimenti particellari con frumento autunnale e mais da granella è stato applicato in un'unica dose solfato di ammonio con la procedura CULTAN e confrontato con nitrato di ammonio e solfato di ammonio, distribuiti con uno spandiconcime pneumatico su un'ampia superficie. Per il frumento autunnale non si sono riscontrate differenze tra le due procedure applicate né nella resa in grani, né nel contenuto proteico. Con la procedura CULTAN si è ottenuta una resa in paglia leggermente superiore, poiché si sono formati più culmi per unità di superficie. Anche nel caso del mais da granella, la resa e il tenore di azoto dei grani non hanno presentato differenze a seconda che si sia fatto ricorso alla procedura CULTAN o alla concimazione tradizionale. Le rese superiori degli steli hanno però generato una sostanza secca totale leggermente superiore nel caso della procedura CULTAN. La formazione di depositi di ammonio nel suolo, prevista con la procedura CULTAN, e il relativo apporto continuo a lungo termine di ammonio alle piante, non hanno potuto essere confermati dagli esperimenti. Dai rilevamenti di nitrato e ammonio nel suolo è emerso che la nitrificazione dell'ammonio è praticamente completa nel giro di poche settimane.

Bibliographie ▪▪ Bustamante Morales O. E., 2009. Water Relations and Drought Tolerance of Different Zea mays Cultivars as Influenced by Nitrogen Form and ­A pplication. Dissertation an der Hohen Landwirtschaftlichen Fakultät der Rheinischen Friedrich-Wilhelms-Universität zu Bonn. ▪▪ Flisch R., Sinaj S., Charles R. & Richner W., 2009. DBF 2009 – Données de base pour la fumure des grandes cultures et des herbages. Revue suisse d'Agriculture 41 (1), 1–98. ▪▪ Kozlovský O. et al., 2009. Influence of nitrogen fertilizer injection (CULTAN) on yield, yield components formation and quality of winter wheat grain. Plant Soil Environm. 55 (12), 536–543. ▪▪ Kücke M., 2003. Ertrag und Kornqualität von Winterweizen und Winterroggen nach N-Injektionsdüngung – Feldversuchsergebnisse 2001. In: Kücke M. (éd.), Anbauverfahren mit N-Injektion (CULTAN): Ergebnisse, Perspektiven, Erfahrungen. Landbauforschung Völkenrode, FAL Agricultural Research, ISBN 3 – 933140 – 67 – 6, p. 71–83.

Summary

Riassunto

Le procédé de fumure azotée CULTAN testé en conditions de culture suisses | Production végétale

The CULTAN system in a screening test for Swiss arable farming The CULTAN (Controlled Uptake Long Term Ammonium Nutrition) system was tested on farmers fields in the Swiss Midlands from 2008 to 2010. In plot trials with winter wheat and grain maize, liquid ammonium sulphate was applied in a single dose according to the CULTAN system and compared with ammonium nitrate and ammonium sulphate, which were spread over the whole area with a pneumatic fertiliser spreader. For winter wheat, no differences were detected between the systems tested in terms of either grain yield or protein content. Straw yield was slightly higher with the CULTAN system, since more stalks per unit of area were formed. Nor did we find any differences for grain maize in terms of grain yield and nitrogen content between the CULTAN and conventional fertilising systems. Total dry-matter yields for the CULTAN system were slightly higher owing to the higher stalk yields. The placement of ammonium deposits in the soil, and hence the steady, long-term feeding of the plants with ammonium intended by the CULTAN system, could not be confirmed in the trials. Ammonium and nitrate measurements in the soil have shown that the ammonium is almost completely nitrified within just a few weeks. Key words: CULTAN, winter wheat, maize, nitrogen, ammonium injection.

▪▪ Maier J. et al., 2011. Platzierung von Harnstoff-Ammoniumsulfat-Lösung bei Mais und Kartoffel am Oberrhein. Accès:https://www.badenova.de/ mediapool/media/dokumente/unternehmensbereiche_1/stab_1/innovationsfonds/abschlussberichte/2008_5/2008 – 02_AB_CULTAN.pdf ▪▪ Sommer K. & Fischer D., 1993. Ergebnisse aus 6-jährigen Fruchtfolge­ versuchen: Z-Rüben, W-Weizen und W-Gerste bei einer N-Düngung nach dem «CULTAN»-Verfahren. In: VDLUFA-Kongressband, 37, 75–78. ▪▪ Sommer K., 2003. Grundlagen des CULTAN-Verfahrens. In: Kücke M. (éd.), Anbauverfahren mit N-Injektion (CULTAN): Ergebnisse, Perspektiven, Erfahrungen. Landbauforschung Völkenrode FAL Agricultural ­Research, ISBN 3 – 933140 – 67 – 6, Braunschweig, 1–23. ▪▪ Sturny W. G. et al., 2007. Direktsaat und Pflug im Systemvergleich – eine Synthese. Agrarforschung 14 (08), 350–357.

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E c l a i r a g e

A Sense of Inspiration, ou quand l’inspiration et les sciences sensorielles se rencontrent Patrizia Piccinali, station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP-Haras, 3003 Berne, Suisse Renseignements: Patrizia Piccinali, e-mail patrizia.piccinali@alp.admin.ch, tél. +41 31 323 81 62

Figure 1 | Les organisatrices du congrès, Patrizia Piccinali (Agroscope) et Annette Bongartz (ZHAW).

La 5e Conférence européenne d’analyse sensorielle et d’études consommateurs s’est déroulée du 9 au 12 septembre à Berne. Les 570 participant-e-s en provenance de 46 pays différents ont pu assister à huit conférences principales («keynote»), à 49 exposés et découvrir 380 posters. Placée sous la devise «A Sense of Inspiration», cette édition a mis l’accent sur l’approche multidisciplinaire afin de mieux comprendre les besoins des consommateurs-trices. L’analyse sensorielle a connu une grande évolution au cours de ces 20 dernières années. Si au début des années 1990 on insistait sur la stricte séparation entre l’analyse sensorielle axée produit et la recherche de marché axée consommateur, depuis quelque temps on privilégie la voie de l’approche multidisciplinaire.

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Les scientifiques actifs dans le domaine des sciences sensorielles sont conscients que pour offrir des produits répondants aux besoins des consommateurs-trices, il est nécessaire de comprendre pleinement les décisions à la base de leurs choix. Ces décisions, bien que motivées par une appréciation momentanée du produit à consommer, sont principalement le fruit d’un ensemble complexe de facteurs liés au produit, à l’individu et au contexte de consommation. Autrement dit, des caractéristiques intrinsèques du produit, telles que l’apparence, la texture, la flaveur et les ingrédients, de même qu’extrinsèques, telles que le prix, la marque et l’emballage pour n’en citer que quelques-unes, interagissent avec des caractéristiques liées d’une part à l’individu (âge, tissu social, perception sensorielle, préférences, expérience, émotions, motivation, traits de caractères, etc.) et,


A Sense of Inspiration, ou quand l’inspiration et les sciences sensorielles se rencontrent | Eclairage

d’autre part, propres au moment de consommation (lieu, endroit, heure, etc.) pour aboutir plus ou moins consciemment au choix du produit. Ce n’est qu’en utilisant des approches nouvelles et multidisciplinaires que nous sommes en mesure de saisir, dans toute sa complexité, le comportement du consommateur vis-à-vis d’un produit et de répondre ainsi à ses besoins. C’est dans cette optique d’approche multidisciplinaire que le programme de la conférence de 2012 a été élaboré. Le comité d’organisation a choisi l’inspiration comme leitmotiv, conscient de l’importance de facteurs tels que la curiosité, la créativité et l’apport de nouvelles idées pour le développement de méthodes, de technologies, de processus et de produits. La conférence était organisée par Agroscope et par l’Institut de Life Science de la Haute Ecole des Sciences Appliquées de Zurich avec le support logistique du groupe Elsevier. Un extrait des exposés est présenté ici. Un développement de produits plus performant N. Martin (Nestlé Research Center, Suisse) a donné dans sa conférence une vue d’ensemble extrêmement intéressante de la situation actuelle de l’analyse sensorielle et des études consommateurs. Elle a souligné l’importance d’une approche globale lors du développement de produits couronné de succès. Celui-ci commence par l’analyse des attentes des consommateurs-trices envers le futur produit. Pour que ce produit soit accepté, la perception ponctuelle pendant la consommation n’est pas le seul facteur sensoriel important, la perception dynamique est tout aussi essentielle. En conséquence, des évaluations tant sensorielles qu’hédoniques (liées au caractère agréable/désagréable de la sensation) doivent être entreprises à différents moments de la consommation ou, encore mieux, tout au long de la consommation. De même, il est important que les appréciations ne soient pas effectuées au moyen d’un seul morceau ou bouchées, mais de portions de taille réelle, afin de pouvoir étudier des réactions comme l’aversion ou l’adaptation. N. Martin a également évoqué la supériorité des méthodes d’observation par rapport aux méthodes «self-report» lorsque l’on relève des données de nature hédonique ou comportementale (par ex. questionnaire). Propriétés sensorielles d’un produit et nutrition Le professeur K. de Graaf (Université de Wageningen, Hollande) s’est exprimé sur l’influence des propriétés sensorielles d’un produit et de la situation de consommation sur la sensation de satiété. Il est intéressant de constater que les calories consommées sous forme liquide, par exemple en softdrinks, sont perçues comme faiblement saturantes, par rapport aux calories prises

sous forme solide. Cette différente perception de satiété peut être expliquée par le bref séjour du liquide dans la bouche. La durée de séjour d’un aliment dans la bouche semble donc jouer un rôle important dans la sensation de satiété. En outre, la viscosité d’une denrée alimentaire de même que le type d’ingestion (sonde gastrique, paille, cuillère) influencent aussi la sensation de satiété. Etant donné que les calories consommées en liquide contribuent à la prise de poids, de telles connaissances sont importantes pour le développement de nouveaux produits qui, en dépit d’une teneur basse en énergie, peuvent augmenter la sensation de satiété. Perception sensorielle chez les personnes âgées La réduction de la perception olfactive et gustative chez les personnes âgées et les conséquences qui en découlent pour le développement de produits destinés au troisième âge est un thème d’actualité dans les sciences sensorielles. Aussi a-t-il fait l’objet de plusieurs contributions orales et écrites lors du congrès. C. Arganini (INRAN, Italie) a présenté les résultats d’une étude réalisée avec 94 personnes de plus de 65 ans, qui montrent une corrélation positive entre d’une part la réduction de la perception sensorielle dûment mesurée et, d’autre part, l’âge, la diminution naturelle de l’appétit et les affirmations des sujets à l’égard de leur perception. En plus, le pourcentage de personnes qui déclarent avoir une perception sensorielle réduite est inférieur au pourcentage réellement mesuré. S. Kremer (Université de Wageningen, Hollande) a montré que les seniors avec une perception olfactive normale sont plus critiques vis-à-vis du goût des mets que les personnes du même âge avec une perception olfactive réduite. Les émotions Le rôle important des émotions dans les choix faits par les consommateurs-trices était le thème de plusieurs exposés. Ainsi, P. Desmet (Delft University of Technology, Hollande) a parlé de l’influence du design sur les émotions et en particulier sur le bonheur. Selon lui, les sentiments nous incitent ou devraient nous inciter à entretenir un rapport sain avec notre environnement. Autrement dit, ils nous orientent vers ce qui est bon pour nous et nous tiennent éloignés de ce qui est néfaste. L’exposé de P. Desmet a mis en évidence le point suivant, fort intéressant: le bien-être matériel a fortement augmenté au cours des 60 dernières années, au contraire du bien-être subjectif qui s’est, comparativement, très peu accru. «Design for Happiness» poursuit le but d’offrir aux consommateurs-trices des produits qui, par leur design, contribuent à augmenter la sensation de bonheur.

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Eclairage | A Sense of Inspiration, ou quand l’inspiration et les sciences sensorielles se rencontrent

Figure 2 | Les séances poster donnent une possibilité d’échanges inspirants.

Quelques exemples de produits ont été montrés lors de la présentation, tout en relevant le manque de méthodes pour en mesurer l’impact sur le long terme. D. Sander (Université de Genève, Suisse) s’est penché pour sa part sur la neuroscience pour expliquer l’importance des émotions lors de la prise de décisions. Il a entre autres montré les parties du cerveau impliquées dans les mécanismes à la base de la génération et du traitement des émotions et expliqué le rôle de l’amygdale, dans le traitement de la pertinence affective. Ces connaissances sont très importantes par exemple pour comprendre pourquoi différents individus réagissent à un même stimulus avec des émotions différentes. L’environnement Il est reconnu que l’environnement influence notre consommation. Pour mieux étudier cette influence, des restaurants, des bars et des cuisines expérimentales permettant d’observer la réaction des consommateurs dans des situations de consommation particulières ont été créés au cours des dernières années. Selon les résultats d’une étude portant sur 500 consommateurs-trices et présentés par A. Giboreau (Institut Paul Bocuse, France), l’environnement influence nos préférences et nos émotions vis-à-vis d’un repas. Dans un restaurant expérimental de l’institut, on a servi un repas précédé d’un apéritif. Le repas était toujours le même, mais on variait la couleur de la salle à manger. Les consommateurs-trices ont réagi de façon significativement différente dans leur appréciation du repas en fonction de la couleur. Ainsi, par exemple, l’apéritif consommé en ambiance rouge était significativement moins apprécié que celui pris en ambiance de contrôle.

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Le futur… digital La conférence s’est terminée avec une section intitulée «What’s next? … Netnography ?». A cet égard, D. Piper (Université de Rennes, France; Mars, Allemagne) a parlé du «nouveau consommateur», du rôle des médias sur ses choix et du fait que les méthodes classiques utilisées dans la recherche consommateurs ne sont plus suffisantes pour comprendre ces choix. Au moyen de divers exemples, deux points importants sont ressortis de cet exposé très divertissant: 1. Le consommateur ne dit pas la vérité (c’est-à-dire qu’il y a une différence entre ce qu’on affirme et ce qu’on fait); 2. Croire qu’il suffit d’une segmentation démographique pour mieux saisir les différents types de consommateurs, c’est passer à côté de la réalité. L’importance croissante du monde virtuel dans notre vie et dans nos choix et comportements a été soulignée. Ainsi, par exemple, il ressort d’enquêtes auprès d’internautes que pour 90 % d’entre eux l’avis d’amis ou de connaissances sur facebook, twitter, etc., est plus déterminant que la publicité dans leur choix d’un produit. Afin d’obtenir des informations fiables sur les tendances futures et les besoins des consommateurs-trices, la netnographie (ethnographie par Internet) va devenir un instrument toujours plus important. Or, celui-ci est déjà largement utilisé par de grandes entreprises sous la forme d’«open Innovation/Co Creation» et d’enquêtes structurées de façon ludique. n

Lien

http://www.eurosense.elsevier.com/index.html


P o r t r a i t

Kaspar Hunziker: ingénieur en environnement, ­petit paysan et vendeur au marché Le dernier arbre connu de la variété suisse de pommes Alant a disparu, voici quelques années, victime d’une tempête. Par chance, la variété avait été mise en collection dans le cadre du projet «Plan d’action national pour la préservation des ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (PAN-RPGAA)». Kaspar Hunziker, ingénieur en environnement, est l’un des collaborateurs de ce projet depuis 2008. «De nombreuses variétés de pommes sont uniques et n’ont qu’une diffusion locale. Si l’on n’avait pas pu sauver Alant, c’est une variété très prometteuse qui aurait été perdue pour toujours». Elle se distingue surtout par une bonne qualité des fruits et une résistance au feu bactérien, ce qui ressort de l’article qu’il a rédigé sur le projet 04 PAN-P21 dans cette édition de Recherche Agronomique Suisse. L’OFAG a confié la gestion de ce projet à l’Association Fructus, et la mise en œuvre revient à Agroscope à Wädenswil, avec pour chef de projet Kaspar Hunziker. Un travail de diplôme sur la culture de kakis en Suisse Kaspar Hunziker est en quelque sorte né dans un verger. Il a grandi dans la ferme familiale qu’il a héritée entretemps. Avec son père retraité, il gère trente-trois hectares de cultures fruitières. Son assortiment n’est pas limité aux pommes et aux poires, il comprend aussi des fruits à noyau, des baies, des figues et des kiwis. Ces deux dernières espèces témoignent de son intérêt pour les cultures alternatives. Il a d’ailleurs terminé ses études à l’école d’ingénieurs ZHAW à Wädenswil par un travail de diplôme sur la culture de kakis en Suisse. «Les fruits sont des produits passionnants. Ils sont sains, digestes, variés et j’en suis très friand. Il est très important pour moi que je sois convaincu de ce que je fais dans mes travaux de recherche et dans la production de mon entreprise». C’est dans un langage très vivant qu’il décrit le marché hebdomadaire traditionnel de Rapperswil où il vend ses fruits. Il ajoute: «Mon grand-père a organisé dans les années septante un des premiers services de livraison de fruits à domicile. Aujourd’hui, je livre encore quelques clients qui se fournissaient déjà chez lui». Compétence et flexibilité Les temps ont changé, dans la recherche aussi. Alors qu’avant l’on se contentait d’une description pomologique, il faut aujourd’hui une caractérisation génétique moléculaire pour donner à une variété de pommes sa

place dans l’inventaire national du patrimoine fruitier. Kaspar Hunziker est heureux d’avoir eu l’occasion de travailler durant six mois dans l’équipe de biologie moléculaire: «J’y ai appris les bases des procédés d’analyse génétique et même si je ne les fais pas moi-même, je suis en mesure d’en interpréter les résultats». Ce jeune père de famille est reconnaissant à la station Agroscope de lui avoir dispensé des connaissances scientifiques, mais aussi de lui ménager des conditions flexibles de travail. Engagé à 50 %, il consacre l’autre moitié de son activité à la gestion de son exploitation et à l’approvisionnement du marché hebdomadaire. Mercredi est son jour fixe à Agroscope; il répartit le reste de son temps de présence de manière à pouvoir équilibrer harmonieusement ses obligations de chercheur, d’entrepreneur et de père de famille. La vie de Kaspar Hunziker ne tourne cependant pas qu’autour des fruits. En plus du temps consacré à sa famille, il se détend dans la pratique du sport, la construction de modèles réduits et des contributions bénévoles de rédacteur musical auprès de l’émetteur Internet zurichois piratenradio.ch: il prépare chaque mois quelque 20 chansons de musicien(ne)s peu connus pour la plupart. Ses intérêts couvrent aussi bien la nouveauté (en musique comme en arboriculture fruitière) que l’héritage du passé: ainsi pour l’ancienne variété de pommes Alant, dont on entendra sûrement beaucoup parler à l’avenir. Carole Enz, Agroscope Changins-Wädenswil ACW

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A c t u a l i t é s

Actualités

Emission impossible – Le jeu du climat pour l’agriculture «Emission impossible» est le nom d’un jeu informatique destiné à sensibiliser les jeunes agriculteurs à la protection du climat. Ce jeu sera introduit dans les écoles d’agriculture de toute la Suisse, à l’intention de leurs apprentis. Il consiste à décider des mesures appropriées pour permettre à une exploitation agricole de réduire tant que possible ses émissions de gaz à effet de serre – sans perdre de vue les réalités économiques. Le bon joueur sera donc celui qui prendra ses décisions en pensant aussi à son portemonnaie. Une mission difficile, mais pas impossible! Le projet, lancé par le Centre Oeschger pour la recherche sur le changement climatique de l’Université de Berne, aborde les grands défis à relever par les agriculteurs pour protéger le climat. L’agriculture n’est pas seulement touchée par le changement climatique, elle en est aussi l’une des causes importantes. En Suisse, les exploitations agricoles contribuent pour un bon 10 % aux émissions de gaz à effet de serre. C’est pourquoi elles sont appelées à prendre des mesures en faveur du climat. L’Office fédéral de l’agriculture vise, d’ici 2050, une réduction d’au moins un tiers des gaz préjudiciables au climat.

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Le jeu «Emission impossible» a été conçu avec la participation scientifique de la Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART et a bénéficié des conseils ­spécialisés du centre de formation, de vulgarisation et de conférences INFORAMA. Le jeu est basé sur des données scientifiques et combine pour la première fois, de manière réaliste, les flux d’une exploitation agricole et un environnement ludique. Une partie du projet consiste en un site internet (www.emission-impossible. ch), qui fournit en arrière-plan des informations et du matériel didactique. Le jeu peut être téléchargé gratuitement sur le site. Avec ce jeu développé par le département Gamedesign de la Haute école d’art de Zurich (ZHdK) et l’entreprise Nothing, le projet a bénéficié d’un financement du Fonds national suisse FNS dans le cadre d’AGORA, programme de soutien aux formats innovants de communication scientifique. Jürg Fuhrer, ART Kaspar Meuli, Centre Oeschger pour la recherche sur le changement climatique


A c t u a l i t é s

Nouvelles publications

Rapport ART 756

Utilité des systèmes de guidage automatique Organisation du travail et ergonomie| Vue d’ensemble de la technique

Octobre 2012

Utilité des systèmes de guidage automatique

Rapport ART 756 Les systèmes de guidage automatique par satellite sont censés permettre une grande précision de manœuvre et faciliter la tâche du conducteur ou de la conductrice. Mais comment chiffrer leur impact sur l’organisation et l’ergonomie dans la pratique? La station de recherche Agroscope ReckenholzTänikon ART a étudié cette question en collaboration avec l’Université tchèque des sciences de la vie à Prague ainsi qu’avec l’Université de Kassel, Technique agricole Witzenhausen, dans le cadre d’un essai de terrain de grande envergure dans les conditions de la pratique. Dix-sept conducteurs ont été observés et évalués pendant les opérations de travail primaire du sol, de préparation du lit de semences, et de semis avec et sans système de guidage automatique. Les résultats ont montré que les vitesses de progression, les temps de manœuvre, et l‘utilisation de toute la largeur de travail étaient parfois légèrement plus avantageux avec le système de guidage, mais ne se différenciaient pas de manière significative. Les écarts dus au conducteur, à la forme de la parcelle et aux bordures de champ avaient un impact plus important sur les résultats que l’emploi des systèmes de guidage. Deux valeurs mesurées se distinguent cependant de manière significative. Premièrement, la précision de manœuvre s’est accrue avec le système de guidage. L’effet était nettement plus marqué avec les grandes largeurs de travail sans traceur que pour le semis avec des largeurs de travail moindres et avec traceur. Deuxièmement, les systèmes de guidage ont permis de soulager le conducteur. En cas de conduite avec système de guidage, la fréquence cardiaque, utilisée comme indicateur de la sollicitation du conducteur, était plus basse. En résumé, les systèmes de guidage augmentent le confort et l’ergonomie des postes de travail à bord des tracteurs. Les conducteurs restent performants plus longtemps et la qualité du tr vail reste à un niveau élevé constant.

Besoins en eau d’irrigation et ressources disponibles dans les conditions climatiques actuelles et futures

Auteurs

Martin Holpp, Thomas Anken, Monika Sauter, ART

Milan Kroulík, Zdeněk Kvíz, Université tchèque des sciences de la vie, Praque

Oliver Hensel, Université Kassel, Technique agricole Witzenhausen martin.holpp@art.admin.ch Impressum

Edition: Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, Tänikon, CH-8356 Ettenhausen, Rédaction: Etel Keller, ART Traduction: Regula Wolz, ART

Les Rapports ART paraissent environ 20 fois par an. Abonnement annuel: Fr. 60.–. Commandes d’abonnements et de numéros particuliers: ART, Bibliothèque, 8356 Ettenhausen T +41 (0)52 368 31 31 F +41 (0)52 365 11 90 doku@art.admin.ch Downloads: www.agroscope.ch ISSN 1661–7576

Agroscope a étudié l’utilité des systèmes de guidage automatique précis en termes d’organisation du travail et d‘ergonomie. (Photo: M. Kroulik)

Les systèmes de guidage automatique par satellite sont censés permettre une grande précision de manœuvre et faciliter la tâche du conducteur ou de la conductrice. Mais comment chiffrer leur impact sur l’organisation et l’ergonomie dans la pratique? La station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART a étudié cette question en collaboration avec l’Université tchèque des sciences de la vie à Prague ainsi qu’avec l’Université de Kassel, Technique agricole Witzenhausen, dans le cadre d’un essai de terrain de grande envergure dans les conditions de la pratique. Dix-sept conducteurs ont été observés et évalués pendant les opérations de travail primaire du sol, de préparation du lit de semences, et de semis avec et sans système de guidage automatique. Les résultats ont montré que les vitesses de progression, les temps de manœuvre, et l‘utilisation de toute la largeur de travail étaient parfois légèrement plus avantageux avec le système de guidage, mais ne se différenciaient pas de

manière significative. Les écarts dus au conducteur, à la forme de la parcelle et aux bordures de champ avaient un impact plus important sur les résultats que l’emploi des systèmes de guidage. Deux valeurs mesurées se distinguent cependant de manière significative. Premièrement, la précision de manœuvre s’est accrue avec le système de guidage. L’effet était nettement plus marqué avec les grandes largeurs de travail sans traceur que pour le semis avec des largeurs de travail moindres et avec traceur. Deuxièmement, les systèmes de guidage ont permis de soulager le conducteur. En cas de conduite avec système de guidage, la fréquence cardiaque, utilisée comme indicateur de la sollicitation du conducteur, était plus basse. En résumé, les systèmes de guidage augmentent le confort et l’ergonomie des postes de travail à bord des tracteurs. Les conducteurs restent performants plus longtemps et la qualité du travail reste à un niveau élevé constant.

Le modèle hydrologique WaSiM-ETH a servi à calculer la quantité d’eau dont les surfaces agricoles ont eu potentiellement besoin durant les mois de juin, juillet et août des années 1981 à 2010 dans des bassins versants de taille moyenne et permis de comparer avec les débits. Pour les zones dans lesquelles le rapport entre les ressources et les besoins est critique, des projections supplémentaires ont été effectuées jusqu’en 2050. Sur la base de deux scénarios climatiques régionaux, ces calculs ont montré qu’avec le changement climatique, la pénurie d’eau pourrait devenir nettement plus sévère dans les régions de la Broye-Mentue et de la Birse, ce qui pourrait conduire à une recrudescence des conflits d’utilisation, si les pratiques d’arrosage ne sont pas adaptées. Jürg Fuhrer, ART

Martin Holpp, Thomas Anken, Monika Sauter, ART

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Actualités

M C oem d ime un nmi iqtut e é isl ud ne gperne s s e

www.agroscope.admin.ch/medienmitteilungen www.agroscope.admin.ch/communiques 11.12.2012 Sherlock Holmes au pays des fruits et légumes Agroscope assainit et diffuse des variétés de plantes, anciennes ou plus modernes, confiées par des institutions publiques et privées: un travail essentiel pour sauvegarder la biodiversité. Mais, pour cela, l’identité de ces variétés doit être assurée afin d’éviter les nombreux doublons ou les mélanges dus à des importations d’origine douteuse, comme il arrive parfois. Les chercheurs d’Agroscope mettent au point des outils qui permettent de reconnaître chacune des variétés de plantes cultivées par leur empreinte génétique.

10.12.2012 «La Belle au bois dormant» – une levure a fait ses preuves dans la pratique

avaient subsisté 113 ans dans la bouteille (communiqué du 26.10.2009). Les chercheurs savent aujourd'hui comment ce fut possible: leur survie en dépendant, les levures dans la bouteille utilisèrent une autre source d'énergie que le glucose. Cette flexibilité des levures est utilisée aujourd'hui pour éviter ou rectifier ce que l'on appelle un arrêt de fermentation – en l'occurrence un état pendant lequel le processus de fermentation s'interrompt occasionnant une teneur en sucres résiduels du vin non souhaitée. Cette découverte des experts d’Agroscope contribue à prévenir les pertes financières du secteur vinicole suisse. Cette levure a également été utilisée avec succès pour créer de nouveaux produits de qualité, notamment dans les distillats et la fermentation en bouteille de vin mousseux et de champagne.

En 2008, un millésime 1895 fit sensation: des microbio­ logistes d’Agroscope y trouvèrent des levures de vin qui

Donnerstag, 7. Februar 2013, 9:00 –16:00, Forschungsanstalt Agroscope Freitag, 8. Februar 2013, 8:00 –15:45, Forschungsanstalt Agroscope

BGS-Jahrestagung 2013: Kohlenstoff im Boden

Themen • Methodische Entwicklung in Analytik und Modellierung • Datenverfügbarkeit, Monitoring und Modellierung • C-Umsatz und C-Austausch Boden-Atmosphäre • Exogene organische Einträge • Organischer Kohlenstoff und Bodenfunktionen

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Recherche Agronomique Suisse 4 (1): 52–55, 2013

Tagungsort Forschungsanstalt Agroscope Reckenholzstrasse 191, 8046 Zürich Detailprogramm und Anmeldung www.soil.ch/fachgesellschaft/veranstaltungen.html Anmeldeschluss Teilnahme: 18 Januar 2013

Schweizerische Eidgenossenschaft Confédération suisse Confederazione Svizzera Confederaziun svizra

Eidgenössisches Departement für W irtschaft, Bildung und Forschung WBF Agroscope

06.12.2012 15:51:16


Actualités

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2013: Année internationale de la coopération dans le domaine de l’eau www.unwater.org; www.unesco.de L’ONU a déclaré 2013 l’Année internationale de la ­col­laboration dans le domaine de l’eau. Consommation croissante d’eau, pénurie, mauvaise répartition, contamination de l’eau potable – voici quelquesuns des défis dans le domaine de l’eau auxquels la population mondiale se verra de plus en plus confrontée au cours des années à venir.

Dans le prochain numéro Février 2013 / Numéro 2 Dans l’engraissement de poulets et de lapins de chair, les rejets d’azote, de phosphore et de potassium sont importants. Deux chercheurs (ALPHaras et HAFL) ont analysé les teneurs en éléments nutritifs dans les aliments pour animaux, la viande et les rejets de poulets et de lapins de chair de production suisse. Leurs résultats sont résumés dans deux article du présent numéro.

••Performances en production cunicole suisse et rejets d’azote, de phosphore et de potassium, Patrick Schlegel et Harald Menzi, ALP-Haras et HAFL ••Composition corporelle en azote, en macro et en oligoéléments des poulets de chair, Patrick Schlegel et Harald Menzi, ALP-Haras et HAFL ••Sensibilité initiale de la septoriose du blé aux fongicides SDHI (carboxamides), Stéphanie Schürch et Thibaut Cordette, ACW et Université de Picardie Jules Vernes ••Surface alimentaire de l’agglomération bâloise – Essai de visualisation, Adrian Moser et Claude Lüscher, service de géo-information de Bâle-Ville et Haute école de Life Sciences (HLS) FHNW ••Symbiontes et arthropodes Quelles implications pour la lutte biologique?, Alexandre Aebi et Renate Zindel, ART ••Essai DOC: Apports en élément nutritifs sur le blé d’automne – A partir de quand deviennent-ils limitants? Lucie Gunst et al., ART et FiBL ••L’agriculture brésilienne a le vent en poupe, Urs Gantner, OFAG ••Listes recommandées des variétés de soja, tournesol, pois protéagineux et maïs pour la récolte 2013

Janvier 2013 19.01.2013 Journée d`information HAFL Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL Zollikofen Informations: www.hafl.bfh.ch 24.01.2013 ART-Tagung: Bio-Landwirtschaft Agroscope Reckenholz-Tänikon ART Zurich Février 2013 07. – 08.02.2013 BGS-Jahrestagung 2013: Kohlenstoff im Boden Agroscope Reckenholz-Tänikon ART Zurich 08.02.2013 Journée Agriculture 2013 Agroscope Changins-Wädenswil ACW Nyon Mars 2013 20. – 21.03.2013 4. Täniker Melktechniktagung Agroscope Reckenholz-Tänikon ART Ettenhausen Avril 2013 25.04 2013 8e réunion annuelle du réseau de recherche équine en Suisse Haras national suisse HNS Avenches 28.04. – 01.05.2013 GCIRC technical meeting 2013 Agroscope Changins-Wädenswil ACW Nyon Juin 2013 07. – 08.06.2013 Journées portes ouvertes 2013 Agroscope Changins-Wädenswil ACW Wädenswil

Informationen: Informations: www.agroscope.admin.ch/veranstaltungen www.agroscope.admin.ch/manifestations

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Haute école spécialisée bernoise Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires bant neuf iment flam dans le bât

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Journée d’information, 19 janvier 2013 bachelor en technologie alimentaire formation diversifiée Food Science & Management

www.hafl.bfh.ch

bachelor en foresterie seule filière de foresterie en Suisse

bachelor en agronomie par exemple avec spécialisation en sciences équines

master en Life Sciences sciences appliquées agronomiques et forestières

Donnerstag, 24. Januar 2013, 9:00–16.15 Uhr

ART-Tagung 2013 Acker- und Futterbau: Aktuelles für den Biolandbau

Themen • Reduzierte Bodenbearbeitung • Biologische Bekämpfung von Drahtwürmern • Bio-Futterpflanzenzüchtung • Stickstoff-Fixierung von Klee-Gras-Mischungen • Wurzelausscheidungen • Boden-Biodiversität – eine wichtige Komponente? • Arbeitszeitbedarf: Vergleich Bio/Konventionell • Ökobilanzen im Bioacker- und -futterbau • Nutzen für die Beratung – Praxis-Bestätigung Infomarkt

Tagungsort Forschungsanstalt Agroscope, Vortragssaal Reckenholzstrasse 191, 8046 Zürich Anmeldeschluss Anmeldung bis 15.1. 2013 auf www.agroscope.admin.ch/ veranstaltungen/00522/ Auskunft Priska Gassmann, ART Reckenholzstrasse 191, CH-8046 Zürich Telefon +41 (0)44 377 72 53 Schweizerische Eidgenossenschaft Confédération suisse Confederazione Svizzera Confederaziun svizra

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