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Petite escapade printanière
témoignages
Ce magazine étant celui du printemps, c’est à une virée de saison que vous invitent des personnalités aux origines bariolées, d’Anniviers ou d’ailleurs.
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Bas trois-quarts et petits souliers
Ce sont les premiers souvenirs qui apparaissent : enfin, à la St-Joseph, le 19 mars, on permettait à Louise de laisser tomber les collants pour les bas trois-quarts et de troquer les bottes d’hiver pour les souliers bas. Une vraie libération ! Les vaches commençaient à sortir, elles s’emballaient parfois tout excitées par l’air vivifiant du printemps. Les cabris quant à eux jouaient, sautaient à qui mieux mieux. Les enfants ramassaient des bouquets de chatons, ces soyeux bourgeons de saules, si doux. Puis on montait au mayen où une partie de la famille séjournait avant l’inalpe. Le printemps, pour Louise, dans les années quarante, représentait la légèreté, la renaissance de la nature, mais aussi l’aide aux travaux des champs et à la garde des troupeaux. De bien beaux souvenirs !
Au bord du lac
Enfant, Jules vivait sur la côte française du Léman. Le bétail séjournait toujours à l’extérieur, sauf par grand froid. Les ouvriers agricoles aidaient les fermiers, la 2ème guerre mondiale touchait à sa fin. L’occupation allemande se résumait au contrôle d’identité obligatoire de toute la famille chaque matin. Dans sa mémoire, la troupe se composait de braves types qui se languissaient d’être loin de chez eux. Ces deux mondes se côtoyaient tant bien que mal et tous se réjouissaient de voir enfin arriver le printemps, promesse de temps meilleurs.
A Nazareth
Pour Georgette, née à Nazareth, Palestinienne chrétienne d’Israël, le printemps signifiait la fin de l’humidité, incrustée par l’hiver dans les murs des maisons non chauffées. Tout poussait dès le mois de mars, grâce à la pluie tombée en hiver. La nature s’habillait du vert des oliviers, de celui des feuilles de vigne, d’orangers, de citronniers, de mandariniers. Les dents-de-lion avaient un goût plus doux que celui que nous connaissons ici. Cuites avec des oignons et mangées avec pain et yogourt, elles étaient très appréciées des enfants. Chaque famille apportait son propre « pain plat » à cuire au responsable du four banal chauffé au bois, une à deux fois par semaine. Le printemps ravissait toutes les générations, il représentait le privilège de vivre dans des contrées où quatre saisons rythment l’année.
En Anniviers, à l’époque des remuages
Pour Clotilde, 89 ans, fin de l’hiver et début du printemps sont liés. En effet, dès la mi-février, la famille se mettait en route pour Muraz. Deux ou trois familles s’organisaient à tour de rôle pour peler la neige sur le chemin entre St-Luc et Fang. Une année, il neigeait si fort, qu’il a fallu faire escale dans la famille du cantonnier Antille à Fang. Elle les a hébergés et a trouvé des solutions de fortune pour nourrir tout le monde, traire le bétail et le mettre à l’abri, sécher souliers et habits trempés. Le temps radieux du lendemain a permis au remuage de se poursuivre normalement. En bas, c’était encore un peu l’hiver, on utilisait les sarments pour chauffer les fourneaux. On préparait les jardins, les vignes, l’école reprenait son cours normal. La fête de Pâques se vivait toujours en bas. Mais quel cafard quand il fallait remonter au village : la fonte des neiges avait rendu les chemins boueux, tout était à nettoyer, autant dehors que dedans ! Et souvent, les souris avaient laissé de bien vilaines traces dans les maisons…
Merci à ces retraités d’avoir partagé des bribes de souvenirs pour cette petite escapade printanière !
Simone Salamin