YEGG JUILLET-AOÛT 2014

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N°27 JUILLET-AOÛT 2014

YEGGMAG.FR

LE FÉMININ RENNAIS

YEGG . . .

HARCÈLEMENT SEXUEL

IT GRATU N O U V E L L E G É N É R AT I O N

UN FLÉAU DIFFICILE À CERNER ? PAGE 12


© CÉLIAN RAMIS


Celle qui

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est la chef de Zil

ne coiffe indienne sur la tête, un boa orange, un vieux téléphone fixe orange, un Pez Bob l’éponge… Malgré les apparences, Elise B. ne sort pas tout droit d’une tribu indienne ayant survécu aux années 70. Du haut de ses 26 ans, elle est la chanteuse du groupe rennais Zil Selance dont l’EP Elle est partie (Madame la Fée) est sorti le 14 février dernier. « En 2010, j’avais enregistré mes chansons et je les avais mises sur MySpace. Puis j’ai postulé pour jouer à la fête de la musique. Et je cherchais quelqu’un pour monter sur scène avec moi », explique celle que l’on surnomme Zil. Ainsi, un premier contact se crée avec Christophe, batteur. « Mais finalement, j’ai joué avec un ami. Et puis, un an plus tard, Christophe m’a recontactée ». Ils se rencontrent, décident de retravailler ensemble les chansons, font venir Bruno à la basse et Olivier au clavier. C’est alors que Zil se lance dans une formation musicale qui navigue entre les styles mêlant pop, rock, électro et disco. Un mélange rétro-actuel et entrainant. La jeune femme, originaire du Mans, qui a bourlingué entre Aix, Marseille et Rennes pour ses études, compose les textes au gré de ses humeurs : « Je ne peux pas écrire sur tout, il faut que cela me touche. De l’énervement au sentiment amoureux… Je pose, lors des créations, l’ambiance pour amener ensuite mon texte. Et ce sont les gars qui proposent et produisent les sons. Avec des samples par exemple de

Boney M, de Claude François. C’est délirant je trouve », s’amuse Elise. Des influences new wave d’Olivier, pop rock de Christophe et branchées côté électro de Bruno résultent un ensemble dynamique, original et parfaitement travaillé auquel Zil ajoute une fraicheur vocale et son univers éclectique allant de M à Otis Redding en passant par Julien Doré. « J’ai beaucoup travaillé chez moi en autodidacte. Avant, c’était catastrophique, le tempo partait dans tous les sens, je ne l’entendais même pas », rigole-t-elle. Et sous ses apparences de légèreté et d’insouciance, elle redouble de travail pour arriver à un résultat qu’elle qualifie de semi-professionnel. Elle bosse sur sa guitare et prends des cours de chant. « C’est primordial et je continuerais de le travailler longtemps », précise-t-elle. Pour la musique, elle y consacre son année, menant en parallèle un petit boulot alimentaire et son travail de graphiste free-lance : « On travaille beaucoup au sein du groupe, on fait de la scène – et on adore ça, c’est vraiment notre objectif de faire de la scène – mais je fais attention à ne pas être perchée dans mon univers ». Après avoir joué dans différents bars de Rennes, de la métropole et au-delà, Zil et ses musiciens poursuivent leur chemin discrètement mais assurément : ils seront à l’Avant-Scène, à Rennes, le 12 juillet, et le 2 août au festival Les trolls en folie, à Jupilles, près du Mans. Un agréable retour aux sources pour cette chanteuse à l’énergie contagieuse. I MARINE COMBE

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ÉDITO l L’ÉTÉ RIME AVEC INSÉCURITÉ ? PAR MARINE COMBE, RÉDACTRICE EN CHEF

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a rue serait-elle le symbole de la domination masculine ? C’est la question que soulèvent les nombreux témoignages, articles, reportages, conférences, etc. relatifs à la récente – dans les médias – problématique du harcèlement de rue. Si certain-e-s veulent parler d’effet de mode ou de buzz, et si certain-e-s veulent parler (ou faussement dénoncer) de fond de commerce pour les petit-e-s rusé-es prêt-e-s à s’en mettre plein les fouilles sur le dos de celles qui subissent et souffrent, alors laissons-les cancaner. Mais rappelons que les remarques et autres actes d’approche non consenties et non consentantes sont des atteintes à la dignité des personnes qui les reçoivent. Et ce peu importe la manière de s’habiller ou l’attitude, pré-supposée, affichée. On pourrait banaliser et dédramatiser la situation, tenter de se dire que le sentiment d’insécurité touche chaque citoyen-ne à un moment donné. Que certains contextes - qu’ils soient politiques, économiques ou encore géographiques - appellent à développer ce fameux sentiment d’insécurité. Mais pourquoi perpétuer les stratégies d’évitement que nous n’avons que trop longtemps usées et abusées ? Est-il normal de culpabiliser à cause de notre tenue ? Du trajet emprunté pour rentrer chez nous ? Parce qu’à un moment on a levé les yeux et croisé le regard d’une autre personne ? Parce que l’on s’est senties faibles et impuissantes face à une remarque déstabilisante ? Non, rien de tout cela n’est normal, ni même amusant. Mais si l’on brandit l’humour comme arme de défense, n’estce pas parce qu’elle est notre seule et unique arme ? Parce que finalement la parole n’est pas si libérée et parce que la situation est critique, YEGG a enquêté sur les solutions apportées aux femmes en matière de lutte contre harcèlement. Pas seulement dans la rue mais aussi au travail et au sein du couple. Parce que le harcèlement sexuel est un fléau qu’il faut combattre.

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SAUTES D’HUMEUR . . .

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ì L A C OL ÈR E

VOUS VA SI BIEN

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n matière de lutte pour les droits des femmes, nombreuses sont les actions qui passent inaperçues. Heureusement, certaines arrivent à traverser l’écran de fumée – noire – qui nous sépare de la prise de conscience ! C’est le cas de l’association nantaise Colère : nom féminin, créée en mai dernier, qui a lancé une campagne contre le harcèlement de rue, et on ne peut que s’en réjouir ! « Je fais partie des « chanceuses » qui n’ont subi que l’agression verbale. En pleine aprèsmidi, on m’a traité de « viande à viol » », explique Laura, à l’initiative de cette campagne qui prend la forme d’un message percutant et punchy, inscrit sur des tote bags ou des débardeurs : Ta main sur mon cul, ma main sur ta gueule. Pour elle, pas question de résoudre le problème en un coup de sac à main, ni d’engendrer de la violence gratuite, mais il est essentiel que chacun soit sensibilisé au sujet afin de se sentir concerné par ce fléau qui envahit les rues depuis trop longtemps : « Quand les gens le voient, ils en parlent, ça déclenche une discussion, un débat. C’est déjà beaucoup ! » Et c’est déjà beaucoup en effet, les membres de l’association ont été très rapidement saturés de commandes – plus de 1000 en à peine un mois. Sur les revenus engendrés par les ventes, 50% devraient être reversés à des associations – les 50% restants servant à la fabrication des produits. Pour l’heure, l’argent a servi à payer des cours de krav-maga, qui seront donnés cet été à Nantes auprès de 100 femmes et 7 hommes. Vous aussi prenez le taureau par les cornes : colerenomfeminin. bigcartel.com ! I MARINE COMBE

C ’ E S T Q U O I L’ P R O B L È M E ?

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I MORGANE SOULARUE

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KILOS SOUS PRESSION

es ayatollahs de la minceur ont une nouvelle cible : la mère. Leur but ? Que la toute fraîche accouchée retrouve sa ligne fissa-fissa. Voire qu’elle devienne plus mince qu’avant, tant qu’à faire. Mais bien sûr ! Ces barbares malsains s’inspirent des stars qui se délestent de leurs kilos de grossesse en un temps record – avec l’aide, il ne faudrait pas l’oublier, de coachs en tout genre et à domicile (prof de fitness, diététicien, gourou yogi… etc). Si certaines ne récupèrent pas assez vite leur ligne, la presse les assassine. L’actrice et jeune maman Olivia Wilde est ainsi la proie des critiques qui évoquent « le fait qu’elle ait gonflé autant enceinte et n’a pas fondu rapidement (…) ses gros poteaux plein de cellulite » - article empli de finesse publié sur Premiere.fr et depuis supprimé – C’est ordurier et abject. Les femmes elles-mêmes se jettent dans la compétition, comme Maria Kang, dite « Fit Mum », et son stupide, odieux et culpabilisant « What’s your excuse ? » au dessus d’une photo d’elle mince et galbée, entourée de ses trois jeunes enfants. À la maison, la pression vient des maris, mères, belles-mères, sœurs et copines. Stop ! Qu’on leur fiche la paix ! Qu’on laisse leur corps se remettre du bouleversement qu’il vient de vivre. D’autant que cette « mode » entraine parfois des pertes de poids trop rapides et trop importantes, mettant en danger la santé de la femme. Mais de cela, s’en soucient-ils seulement, ces crétin-e-s ? On en doute fort.


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SOMMAIRE l JUILLET-AOÛT 2014

Tête de chef indienne . page 2 Lâchez-nous, lâchez-vous ! . page 6 Crèches bondées : on fait quoi ? . page 8 La politique en bref . page 9 L’anorexie au menu de la Recherche . page 10 Harcèlement sexuel : le fléau tabou . page 12 Tous les corps sont beaux ?! . page 22 La culture en bref . page 24 En bonus à Hédé…. page 25 Jugement dernier . page 26 Ayez l’attitude Burger . page 27 Distribution sanguine . page 28

LA RÉDACTION l NUMÉRO 27

YEGG l 7 RUE DE L’HÔTEL DIEU 35000 RENNES

MARINE COMBE l RÉDACTRICE EN CHEF, DIRECTRICE DE PUBLICATION l marine.combe@yeggmag.fr CÉLIAN RAMIS l PHOTOGRAPHE, CRITIQUE CINÉMA l celian.ramis@yeggmag.fr MORGANE SOULARUE l JOURNALISTE l morgane.soularue@yeggmag.fr MARIE LE LEVIER l JOURNALISTE l marie.lelevier@yeggmag.fr JUSTINE GOURLAY l JOURNALISTE l justine.gourlay@yeggmag.fr CHLOÉ RÉBILLARD l JOURNALISTE l chloe.rebillard@yeggmag.fr LAURA LAMASSOURRE l JOURNALISTE l laura.lamassourre@yeggmag.fr ANNAÏG COMBE l CRITIQUE MUSIQUE & LIVRES l annaig.combe@yeggmag.fr SOPHIE BAREL l MAQUETTISTE & ILLUSTRATIONS l sophie.barel@yeggmag.fr PHOTO DE UNE l CÉLIAN RAMIS

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DÉCRYPTAGE . . .

JOIE D’ÊTRE PARENTS, GALÈRE DE LA GARDE D’ENFANTS

© CÉLIAN RAMIS

Depuis 15 ans, la France est championne d’Europe de la natalité, mais les pouvoirs publics n’ont jamais vraiment appréhendé le phénomène. À Rennes – pourtant pas mauvaise élève en la matière - comme ailleurs, le manque de places en crèche complique la vie des parents, contraints de trouver des alternatives.

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l manquerait, en France, 350 000 à 500 000 places en par le Conseil Général, elle reçoit jusqu’à 4 enfants chez elle. crèche. Une pénurie liée au coût de fonctionnement de Depuis 2010, ces asmat peuvent se regrouper au sein d’une ces structures, fixé par des normes d’hygiène et de sécu- maison d’assistantes maternelles (MAM). L’agrément dérité drastiques. « En 2012 à Rennes, hors aide de la CAF, le pend aussi du Conseil Général, qui se montre ici beaucoup coût horaire par enfant était de 7,57 €, avec un écot moyen plus défiant : « Deux ans et demi de bras de fer pour pouvoir par famille de 1,16 € », révèle Laurence Guéguen, respon- ouvrir notre MAM Poppins à la Courrouze ! Le Conseil Gésable de la direction des crèches. Ici, les réponses posi- néral a tout fait pour nous décourager, exigeant des clauses tives aux demandes d’accueil en crèche sont supérieures très strictes même pas appliquées dans le public ! Et puis, il à la moyenne nationale, avec 1 593 places dans les 17 ne nous a délivré que 3 agréments par asmat, au lieu de 4. Je crèches municipales, 6 parentales, comprends ses craintes, puisqu’il prend ici 4 d’entreprises, 6 associatives et « En 2012 à Rennes, hors aide de une forte responsabilité, mais il a été trop 6 micro-crèches. Les attributions loin dans notre cas », confie Stéphanie la CAF, le coût horaire par enfant Batti. Sa MAM croule sous les demandes, découlent des places libérées et était de 7,57 €, avec un écot il est donc navrant de constater que l’attide l’âge des enfants qui partent. « Les directrices indiquent alors les moyen par famille de 1,16 € » tude du CG35 freine les créations de ces âges des bébés qu’elles peuvent maisons. recevoir : grands, petits… », note Laurence Guéguen. Puis, Autre solution, la garde partagée : 2 foyers pour 1 nounou. le temps d’accueil demandé, plein ou partiel, est pris en Le salaire est alors partagé, il est de 7,47 € net de l’heure, compte. La ville a ensuite des attentions particulières pour sans compter les charges sociales ! Une aide de la CAF et les enfants handicapés, pour ceux dont le bien-être en dé- un crédit d’impôts de 50 % l’année suivante, permettant d’y pend, les foyers mono-parentaux, les parents étudiants ou faire face. Ni crèche, ni asmat, ni garde partagée ? Restent handicapés. Quant à la mixité sociale, elle est réelle. Une les 2 demies journées hebdomadaires accordées dans l’une étude montre que parmi les ménages accédant aux crèches des 10 haltes garderies (171 places) de la ville. Ces accueils en septembre 2012, 306 avaient des revenus inférieurs à prévus pour soulager les mères au foyer, sont devenus des 1 000 €, 348 entre 1 000 et 2 999 € et 324 supérieurs à 3 000 modes de garde d’urgence. D’ici 2017, 4 projets de crèches, €. Ceux qui n’en font pas partie se tournent dès lors vers l’as- à la Courrouze, au Blosne, quartier Saint-Louis et près du sistante maternelle (asmat). Spécialiste diplômée et agréée CHGR, doivent voir le jour. Bonne nouvelle ! I MORGANE SOULARUE

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AU COEUR DE LA RENNES . . .

bref

bref

CAS DE RAGE CHEZ LES FÉMINISTES ANTICAPITALISTES…

« Macho branché on va te la couper ». C’est le tag qui a été inscrit sur les locaux de l’association La Petite Rennes, mi-juin. Une dégradation murale accompagnée d’une lettre signée « Nous féministes anticapitalistes, meufs, gouines, trans, on a la rage ! » qui survient quelques jours avant la première Ladies night de l’association, organisée le 19 juin dernier. Plusieurs lettres identiques ont également été collées dans les rues de la capitale bretonne.

chiffre

du

mois

PRIORITÉ

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2 000 €

C’est le montant de la subvention votée par le conseil municipal de Rennes le 30 juin dernier en soutien à l’ASFAD, association rennaise qui lutte contre les violences faites

. . . aux femmes.

chiffre

ÉDUCATION À L’ÉGALITÉ : PAS UNE

du

mois

Quelques jours avant les vacances scolaires, l’Éducation était mise à mal. Après la gronde des parents et enseignants concernant la mise en place jugée précipitée de la réforme des rythmes scolaires – toujours en discussion – voilà que Benoit Hamon, ministre de l’Éducation, et Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, ont enterré l’application des ABCD de l’égalité à toutes les académies, préférant mettre en place un plan d’actions visant à former les enseignants à l’égalité des sexes. bref

bref

le tweet du mois sur

la

toile

#Rennes Ça y est les filles sont en short ! (Et qu’est ce qu’elles ont besoin d’un peu de couleurs !)

sur

la

toile

Gatté @Winterake / 06-06-2014 à 14H

L’ACTU FÉMININE

EST À SUIVRE SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX !

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@Yeggmag sur

Yegg Mag Rennes sur

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3

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3 QUESTIONS À . . .

Dans le cadre de la Journée de la recherche 2014 « Faire corps », le 12 juin dernier à l’Université Rennes 2, Emmanuelle Borgnis-Desbordes a tenu une conférence sur « L’anorexie des jeunes filles au XXIème siècle », l’occasion d’évoquer ce mal en recrudescence dans notre société.

© CÉLIAN RAMIS

EMMANUELLE BORGNIS-DESBORDES MAÎTRE DE CONFÉRENCES EN PSYCHOLOGIE CLINIQUE ET PSYCHOPATHOLOGIE À L’UNIVERSITÉ RENNES 2

L’anorexie est-elle un mal de notre L’anorexie touche les adultes, les enfants, les hommes, pourquoi évoquetemps ? t-on principalement celle des jeunes Nous constatons une inflation du filles ? symptôme de l’anorexie chez les jeunes filles ; les pédiatres notamment ont remarqué depuis quelques années une recrudescence des consultations et ce, de plus en plus jeunes, c’est-à-dire dès neuf ou dix ans. Les signes de la puberté émergent plus tôt qu’avant et c’est à cette étape de la vie que les jeunes filles découvrent leur corps, la féminité et celles-ci sont aujourd’hui très au fait sur la question : faut-il qu’elles mettent ou non leur corps au pas, est-ce un nouvel idéal ? Je ne pense pas que la mode, les magazines ou même internet soient créateurs d’anorexie mais il est évident que ces nouveaux idéaux alimentent, façonnent ce symptôme. L’anorexie s’inscrit dans une série de symptômes, un espèce de vacillement subjectif qui pousse le sujet vers une prise de risque et une manière de gérer ce débordement pulsionnel est de s’identifier à un groupe, on parle par exemple du phénomène du thigh gap* : certains sujets vont pouvoir glisser très aisément avec ce type de tendance et commencer à s’isoler.

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L’anorexie est historiquement une question féminine et on va distinguer l’anorexie des jeunes filles des autres cas puisqu’elle n’est pas du même ordre, on peut dire qu’elle est sensiblement psychotique : ces jeunes filles se posent, à la puberté, la question de leur position sexuée au niveau de l’inconscient. Il est très difficile pour certains sujets de l’assumer dans leur rapport à l’autre, que ce soit leur famille, leurs amis, leurs professeurs : ils ne savent pas comment trouver leur place. Communément on a eu tendance à penser que ces patientes avaient des difficultés à se positionner vis-à-vis de leurs mères, de dire non aux signes de la féminité qu’elles renvoient mais maintenant c’est plutôt autre chose. La question finale pour elles est : est-ce que quelqu’un peut me désirer ? Comment est-ce que j’existe pour l’autre ? Il ne faut pas associer l’anorexie déclarée au comportement de restriction alimentaire dit « anorectique », l’anorexie est au départ une restriction certes mais le retrait en est également une grande caractéristique.

Traite-t-on efficacement l’anorexie en France ?

La pente facile du côté de l’accompagnement est la rééducation du comportement, orientation qui nous vient des États-Unis principalement. On parle alors de thérapies brèves, comportementales, rabattues sur le comportement alimentaire, visant à pousser les sujets à manger et à reprendre du poids : des contrats de soins sont signés par les patients qu’on enferme très concrètement. C’est très en vogue ces temps-ci même si, depuis une dizaine d’années, cette méthode montre peu à peu ses impasses. La France a une culture latine de l’humanisme dans le soin; c’est au un par un des services de médecine mais les personnes engagées désirent favoriser l’expression de chacun, sa souffrance, c’est quasiment un engagement politique pour nous. * Littéralement « le fossé entre les cuisses », le thigh gap désigne l’écart, symbole de minceur, tant recherché pour certaines jeunes filles ou femmes sur de nombreux blogs. I LAURA LAMASSOURRE

« L’anorexie est le symptôme de la modernité.»


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Libérer la parole face au harcèlement sexuel

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arcèlement sexuel. Une notion que chacun-e a dans la tête avec une définition plus ou moins précise. Une notion dont tout le monde parle. Dont de nombreuses femmes sont victimes - souvent sans en être conscientes – mais que peu dénoncent. Qu’il s’agisse de harcèlement sexuel au travail, de harcèlement moral au sein du couple ou de harcèlement de rue, les appellations – officielles ou officieuses – différent mais désignent toutes une forme de violence à l’encontre des femmes. Symbole de domination, peur de l’abandon, besoin d’asseoir une emprise sur l’autre…le harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel, s’instaure souvent de manière progressive, pour des raisons diverses et multiples, laissant les femmes victimes à leurs sentiments de honte, de culpabilité, d’humiliation. Une violence psychologique inouïe se dégage de ce fléau terriblement difficile et délicat à percer à jour, y compris dans les structures spécialisées. La loi du 6 août 2012 réactualise le délit de harcèlement sexuel, puni par le code pénal depuis 1992, et le défini dans les articles 222-33-I, II et III : « I. ― Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. II. ― Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. III. ― Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende. » Mais le harcèlement sexuel est pernicieux en cela qu’il résulte de l’intimité d’une personne et qu’il en va de la subjectivité de chacun. Où placer l’intolérable ? Peut-on attribuer une norme à la sexualité d’un individu ou d’un couple ? Comment repérer le harcèlement et se prémunir de ce fléau ? YEGG a enquêté sur le territoire rennais.

I PAR MARINE COMBE ET JUSTINE GOURLAY I PHOTOGRAPHIES DE CÉLIAN RAMIS I INFOGRAPHIES DE SOPHIE BAREL


focus

Figure N°1 :

Pression au travail

S

i le harcèlement sexuel au travail semble être de plus en plus connu, il est malgré tout tabou et incarne une des formes de violence des plus délicates à dénoncer. Souvent tétanisées face à ce fléau, les femmes ressentent honte et culpabilité. Comment identifier le harcèlement sexuel dans le cadre du travail et vers qui peut-on se tourner pour agir et réagir ?

A

llusions sexistes, blagues potaches un peu lourdes, encore 1 femme sur 5. Le 24 mars dernier, un communiqué tentatives de drague... Lorsque ces faits deviennent de l’AVFT annonçait ne plus pouvoir recevoir de dossier répétitifs et portent atteinte à la dignité et à la bonne santé en raison de la saturation des demandes, jusqu’à ce que d’une personne, cela relève d’un l’association le puisse à nouveau; « Ces femmes vont consulter car délit puni par la loi. Les femmes « le problème n’étant pas que elles se trouvent dans un tel état de nous ne soyons pas assez sont de plus en plus nombreuses à oser en parler. En 2013, près de souffrance qu’elles souhaitent en sortir nombreuses pour répondre à 37% des femmes qui témoignent les sollicitations mais qu’il le plus rapidement possible, mais ne toutes auprès de l’AVFT (Association y a trop d’agresseurs et donc trop européenne contre les Violences pensent pas forcément être victimes de de victimes ». Seule association faites aux Femmes au Travail) spécialisée dans la lutte contre harcèlement sexuel. » sont confrontées au harcèlement les violences sexistes et sexuelles sexuel. Pire encore, selon les résultats de l’enquête établie au travail en France – qui en 1999 était l’un des pays où le par le Défenseur des Droits en février 2014, ce fléau touche taux des violences sexistes ou sexuelles sur le lieu de travail Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 14


focus est le plus élevé, selon une étude du Bureau International du de symptômes auxquels s’ajoutent d’autres troubles Travail - elle se mobilise également dans le Grand Ouest et peut psychosomatiques tels que les insomnies ou les pertes de intervenir aux côtés du CIDFF de Rennes. mémoire... Ces derniers doivent alerter la personne concernée Pourtant, « elles ont encore beaucoup de mal à expliquer ou son entourage proche, afin de trouver une échappatoire à la cause de leur détresse psychologique », explique cette situation qui peut paraître sans issue. « Il est nécessaire Frédérique Chartier, psychologue du travail formée au CNAM pour la victime de trouver un espace d’écoute à son vécu et (Conservatoire National des Arts et Métiers) de Paris en clinique de l’aider à comprendre ce qui s’est passé pour elle dans cette du travail, installée à Rennes et proposant une consultation situation, afin de l’aider à en sortir puis de restaurer ce qui a été spécialisée « santé et souffrance au travail ». « Ces femmes vont cassé », explique Frédérique Chartier qui reçoit régulièrement consulter car elles se trouvent dans un tel état de souffrance des patientes confrontées au harcèlement sexuel. « Une part qu’elles souhaitent en sortir le plus rapidement possible, mais du processus d’accompagnement psychologique va consister ne pensent pas forcément être victimes à identifier la situation de harcèlement, de harcèlement sexuel. » En effet, à la «Attention. Si le licenciement est lié à notamment sexuel, en repérant le difficulté d’analyser une situation qui processus à l’œuvre, le nommant pour leur est anxiogène voire insoutenable, la base au harcèlement sexuel, on peut le mettre progressivement à distance. s’ajoute parfois la honte et la saisir le tribunal des Prud’hommes Mon rôle est aussi de crédibiliser culpabilité, leur faisant se sentir pour licenciement abusif, puisqu’il est la parole des victimes », précise-t- à tort – en partie responsables. elle. Elle insiste sur l’importance de sans cause réelle et sérieuse, » « Les victimes peinent à garder retrouver des repères, de déculpabiliser leurs repères, car le harceleur et de retrouver confiance afin qu’elles joue beaucoup sur la déstabilisation », ajoute t-elle. puissent reprendre la main et se projeter dans un devenir Mais qu’est-ce que le harcèlement sexuel exactement ? différent, y compris à l’extérieur de l’entreprise. Il est nécessaire L’article L1153-1 du code du travail le définit et interdit les de protéger la victime en la sortant de la situation délétère, « agissements de harcèlement de toute personne dans le avec l’appui d’autres professionnels, notamment le médecin but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit du travail et le médecin traitant. Aucune sphère professionnelle ou au profit d’un tiers ». Et précise dans l’article L1153n’est épargnée. Même si certains milieux sont identifiés comme 2 qu’«aucun salarié, aucun candidat à un recrutement, potentiellement plus propices au harcèlement sexuel, comme à un stage ou à une période de formation en entreprise les environnements où la proportion femmes/hommes est ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une très inégalitaire et où la référence à la virilité peut faire partie mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment de certaines cultures de métier, auxquelles il est difficile de ne en matière de rémunération, formation, de reclassement, pas adhérer sous peine de rejet. Néanmoins, la professionnelle d’affectation, de qualification, de classification, nous précise que la majorité des femmes qui viennent la de promotion professionnelle, de mutation ou de consulter ont généralement des postes à responsabilité et se renouvellement de contrat pour avoir subi trouvent à des niveaux hiérarchiques aussi ou refusé de subir des agissements de Plusieurs psychologues travaillent « les situations parfois élevés. à Rennes sur cette même problématique, harcèlement sexuel ». ambigües sur le lieu de apportant à ces femmes un véritable recours à mpêcher la victime de bénéfi- travail peuvent peser en la leur traumatisme.

E

cier du soutien des autres

défaveur de la victime »

Les mêmes situations reviennent fréquemment, comme des plaisanteries sexistes ou des questions très intrusives sur la vie personnelle et sur le conjoint… Il peut y avoir des regards malsains, une présence insistante, des gestes déplacés ou des attitudes qui jouent sur la proximité physique. Le/ la harceleur-euse peut très bien être le/la patron-ne, un-e supérieur-e ou un-e collègue de bureau. Les sources sont multiples, rendant la situation encore plus complexe. « On retrouve très souvent un processus d’isolement social, physique associé à un processus de déstabilisation dans quasiment chaque situation. Le harceleur tente de couper la victime du soutien du collectif de travail, ce qui l’amène à se replier socialement », constate Frédérique Chartier. Une telle pression crée rapidement un environnement de travail cauchemardesque. Quel autre recours que de se faire arrêter par le médecin traitant afin de préserver sa santé mentale ? Et cela peut parfois aller plus loin et mener à l’inaptitude professionnelle et au licenciement. Un véritable cercle vicieux ! « Attention. Si le licenciement est lié à la base au harcèlement sexuel, on peut saisir le tribunal des Prud’hommes pour licenciement abusif, puisqu’il est sans cause réelle et sérieuse. » précise Maître Lara Bakhos, avocat au barreau de Rennes, experte en droit du travail.

D

épression, stress, honte, insomnies… Dépression,

crises

d’angoisse,

honte,

autant

N

égocier une rupture conventionnelle

S’il est bénéfique pour les victimes de harcèlement sexuel de se faire aider psychologiquement, celles-ci ne vont que très rarement devant les Prud’hommes. Ne se sentant pas toujours capables de faire face au long processus juridique qui les attend, souhaitant sortir au plus vite de cette situation. Mais souvent aussi pour manque de preuves inexistantes, comme le déplore Lara Bakhos, les témoins ne voulant pas se prononcer, préférant nier la situation plutôt que risquer de perdre leur emploi. Et d’ajouter que « les situations parfois ambigües sur le lieu de travail peuvent peser en la défaveur de la victime ». Les pré-supposés jeux de séduction n’ont en effet pas de traces écrites et lorsque les seules preuves de harcèlement sont orales, elles sont non recevables devant un tribunal. Valérie Kerauffret, membre de la CGT (Confédération Générale du Travail) de Rennes, regrette elle aussi la longue procédure. « La plupart préfère négocier une rupture conventionnelle, quant elles n’ont pas déjà démissionné, car elles sont tellement traumatisées qu’elles ne peuvent pas continuer. On pousse beaucoup sur l’indemnisation pour réparer le préjudice, même si ce n’est pas ce que l’on aimerait, mais pour l’instant on fait avec », explique t-elle. Il est impératif que l’employeur ainsi que les délégués du personnel en soient avertis le plus vite possible. « Parfois, cela suffit à arrêter le harceleur, ajoute Lara Bakhos, surtout dans de grosses structures. J’ai eu le cas d’une hôtesse d’accueil Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 15


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dans la plupart des cas, les victimes préfèrent démissionner qui recevait des sms salaces sur son portable. Elle a alerté son plutôt que de se lancer dans des procédures juridictionnelles patron qui a réussi à identifier le harceleur grâce au numéro à n’en plus finir. Certaines doutent de la recevabilité de leur de téléphone d’où provenaient les sms. » Le CHSCT (Comité plainte, ayant souvent ce réflexe infondé de se demander d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail), le CE ou si elles ne l’ont pas cherché. « Elles en viennent quelquefois encore les élus du personnel peuvent également être alertés. à se demander ce qu’elles ont bien pu faire pour attirer Si, malgré tout l’employeur ne semble pas agir pour faire cette situation, si elles ne sont pas en cesser les faits dénoncés, la victime peut se retourner contre lui pour manquement « Elles en viennent quelquefois partie responsables ou consentantes », observe Frédérique Chartier, insistant à son devoir de protection envers elle, en à se demander ce qu’elles référence à la circulaire du 4 mars 2014, qui ont bien pu faire pour attirer sur la nécessité de se défaire de cette culpabilité et de l’emprise psychologique rappelle « les obligations des employeurs et leur nécessaire mobilisation dans la cette situation, si elles ne sont du processus à l’œuvre. La psychologue mise en place des mesures préventives à pas en partie responsables ou constate par ailleurs que le harcèlement sexuel est souvent englobé dans d’autres l’encontre des faits de harcèlement ». consentantes » formes de violence ou situations délétères. Il est tout de même nécessaire de savoir Un processus de harcèlement moral peut s’enclencher aussi que les juridictions compétentes à saisir en cas de harcèlement après un refus à des sollicitations plus directes. sexuel au travail sont soit le tribunal des Prud’hommes, au Bien que les femmes trouvent plus ou moins des parades, quel cas la victime attaque l’entreprise pour faire respecter les appelées stratégies d’évitement, en évitant les conflits au sein conditions de travail et demande des dommages et intérêts; de leur entreprise, ce n’est aujourd’hui plus suffisant pour soit le tribunal correctionnel qui oppose la victime à l’auteur, combattre ce mal. L’hyper-sensibilisation et la prévention à le coupable encourant une peine de prison de 2 ans et d’une outrance seraient-ils les seuls moyens de casser le système amende de 30 000€. de domination qui infuse à tous les niveaux de la société ? À Rennes, comme ailleurs, la mobilisation se poursuit – mise en algré la recrudescence importante de cas de harcèlement place du site stop-harcelement-sexuel.gouv.fr par le ministère sexuel dans le cadre du travail, les compétences des Droits des femmes et actions quotidiennes des structures juridictionnelles sont encore bien sourdes face aux victimes. et organismes compétents en matière de droits des femmes « Les salariés en parlent de plus en plus, c’est un fait, un peu - mais avec un visible manque de moyens visant à inciter les comme un effet de mode », conclu Lara Bakhos. À la différence que ce fléau n’a rien d’éphémère ou de ponctuel. Pourtant, femmes à dénoncer les violences subies.

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Figure N°2 :

La spirale infernale au sein du couple

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a question du harcèlement sexuel dans le couple est certainement la plus complexe et la plus épineuse à cerner et à dénoncer. D’une part puisqu’elle touche à l’intimité profonde d’une personne, et d’autre part car elle se confronte alors au problème de la norme concernant la sexualité d’un couple. Concrètement, comment agir ?

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es voies de lutte contre le harcèlement sexuel au sein d’un couple sont tumultueuses, voire obscures. Il semble même que la problématique se heurte au mutisme des femmes qui en sont victimes soit parce qu’elles n’en ont pas conscience, soit parce qu’elles se trouvent démunies de solutions et de recours. « Souvent la femme n’identifie pas le harcèlement sexuel mais elle emploie beaucoup d’énergie

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à éviter l’acte sexuel », explique Solen Degabriel, juriste au Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles (CIDFF) depuis 6 ans. Et pour éviter l’acte sexuel non consenti, les femmes mettent en place des stratégies d’évitement : « Ne pas aller se coucher en même temps, ne pas se retrouver seule avec lui, attendre qu’il se soit assoupi pour aller au lit si jamais il boit, faire chambre à part… Tout


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dépend du niveau de contrôle de sa vie, de ses actes. Il se peut même qu’elle s’enferme à clé dans sa chambre car elle a pu déjà être réveillée par une relation sexuelle forcée. » Bien souvent, le processus de harcèlement est lent et évolutif. Difficile à repérer car le conjoint, pacsé, concubin passe par des phases dans lesquelles il se montre attentionné, aimant et à l’écoute. Outre le fait qu’il soit extrêmement complexe de dénoncer son partenaire, il est compliqué de le formuler. « Quand les femmes viennent nous parler, notre rôle est de voir où elles en sont à ce moment précis et quels sont leurs freins. Mais nous avons très peu de cas de femmes qui viennent nous parler d’un problème de harcèlement sexuel », précise la juriste. Et les cas ne sont quasiment pas chiffrés ou chiffrables. Même son de cloches du côté de l’Asfad, association rennaise spécialisée contre les violences faites aux femmes, qui a inauguré fin novembre 2013 son accueil de jour. Virginie Thoby, éducatrice employée par la structure, comptabilise 2 situations de harcèlement sexuel sur une centaine de femmes reçue depuis l’ouverture du lieu. « La qualification du fait est compliquée. Le harcèlement sexuel ne figure même pas dans les fiches que nous remplissons après chaque entretien. Il faut cocher la case Autres », nous dit-elle.

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dentifier le problème

« C’est la forme de violence dont les femmes ont le plus de mal à parler et pourtant elle est très souvent présente. La violence sexuelle comprend un spectre très large allant du harcèlement sexuel à l’exploitation sexuelle, en passant par le viol conjugal ». C’est ainsi qu’est définie la violence sexuelle dans l’ouvrage Femmes sous emprise – les ressorts de la violence dans le couple, écrit par la psychiatre et docteur en médecine Marie-France Hirigoyen. Diffcile de l’identifier et le reconnaitre : « Souvent, elles vont dire « Il ne va pas me lâcher jusqu’à la relation sexuelle » ou alors « il revient constamment à la charge » », déclare Solen Degabriel. Et la compagne va céder pour éviter la crise, apaiser le conflit et espérer une paix temporaire, un répit. Pour Virginie Thoby, « c’est un mode de règlement de crise. Refuser la sexualité de son conjoint, c’est prendre le risque qu’une crise éclate, explose ». Un moyen donc de se sortir d’une situation de harcèlement. Un harcèlement qui manquait de confiance en elle et était en incapacité de poser prend des formes diverses selon la personne qui peut exiger des limites aux demandes sexuelles de son compagnon : « Il de regarder à deux des pornos, alimenter la relation d’objets, exige que, le soir, elle mette des tenues sexy (porte-jarretelles, vouloir que sa compagne porte des tenues spéciales, etc. bas fins, chaussures à talons très hauts…). « Au début, je le Rien de choquant pour qui consent et s’épanouit librement faisais pour lui faire plaisir, maintenant je le dans la relation. « Cela peut se jouer dans l’attitude, les paroles, les gestes, il peut « Souvent la femme n’identifie fais pour avoir la paix car, sinon, il finit par aussi simplement la frôler pour exercer une pas le harcèlement sexuel mais être violent. » » forme de pression tout en faisant croire qu’il a question de la norme sexuelle s’agit d’un jeu de séduction », ajoute Solen elle emploie beaucoup d’énergie L’obligation de ne pas dire oui signifie Degabriel. Tout cela, va alors peser sur la à éviter l’acte sexuel.» donc pouvoir dire non. Et non, c’est non. femme qui, elle, ne s’épanouit pas dans la Une évidence malgré tout bien difficile à mettre en place sexualité imposée par son partenaire. Dans son livre, Marielorsque l’on subit un telle menace au sein de son couple. France Hirigoyen explique que la « relation sexuelle imposée « Quand une femme vient parler de harcèlement sexuel, c’est est souvent passée sous silence parce qu’elle fait partie du vraiment que c’est insupportable, intolérable ! », déclare Virginie « devoir conjugal », considéré aujourd’hui comme un droit pour Thoby, qui insiste sur le caractère subjectif du ressenti. « Ce l’homme et une obligation pour la femme ». Car en 2005, au qui est invivable pour l’une ne l’est pas nécessairement pour moment de la parution du livre, le devoir conjugal est toujours l’autre », ajoute-t-elle. Et c’est malheureusement là que se niche inscrit dans le code civil. Depuis, en 2006, la mention a été le problème. Comment définir, aux yeux de la loi et dans les retirée. Mais elle n’en est pas moins gravée dans les mémoires. consciences, le harcèlement sexuel si ce n’est en imposant « Si on a retiré la notion de devoir conjugal pour la notion de une norme visant à contraindre la sexualité des couples à respect, il n’en reste pas moins que les femmes ont du mal à des conventions acceptables ou non ? Et comment définir parler de violence sexuelle à cause de ça. C’est très ancré dans l’épanouissement sexuel d’une femme ? L’atteinte à l’intégrité les idées, alors qu’aujourd’hui il n’y a plus d’obligation de dire et à la dignité n’est alors pas perçue de la même manière et la oui », ajoute la juriste du CIDFF. Dans un témoignage que relate sonnette d’alarme ne peut venir que de celle qui la subit. « C’est la psychiatre, elle décrit une situation dans laquelle Sophie

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Au Planning Familial de Rennes, une psychologue (contactée, elle n’a pas souhaité s’exprimer sur son travail) et une conseillère conjugale animent également un groupe de paroles sur les problèmes de

une expression très personnelle et très personnalisée. Dans mon travail, je ne suis pas dans le domaine juridique mais dans l’échange, le ressenti. Certaines femmes ont l’esprit très marqué par la violence. Il

violences. « On fait un entretien individuel et ensuite on n’y a pas de marques physiques, elles n’ont pas été peut choisir de les intégrer au groupe. Pour le harcèlement agressées physiquement mais ont des traumatismes bien sexuel, c’est très compliqué, nous avons peu d’informations plus profonds », détaille-t-elle. Honte, culpabilité, perte de là-dessus et peu de femmes qui en parlent », nous confie confiance… les signaux et symptômes sont identiques à Brigitte Rocher, directrice du Planning Familial 35, qui ceux du harcèlement moral. Et c’est d’ailleurs en harcèlement précise : « Ici, nous recevons toutes les personnes qui passent moral que qualifie le code pénal de cette violence conjugale, la porte et ensuite si cela dépasse nos compétences, nous les dans l’article 222-33-2-1 : « Le fait de harceler son conjoint, orientons vers un partenaire de la plateforme violence ». son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se e dépôt de plainte : une difficulté supplémentraduisant par une altération de sa santé physique ou mentale taire ». Un délit passible de trois ans d’emprisonnement et de 45 Le harcèlement sexuel a donc quelque chose de pernicieux, 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité infiltrant la plus grande intimité du couple, maintenant le totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont partenaire harcelé dans une spirale cauchemardesque, la entraîné aucune incapacité de travail séparation n’étant pas une solution pour « Refuser la sexualité de son et de cinq ans d’emprisonnement toutes les femmes. N’osant pas dans un et de 75 000 € d’amende lorsqu’ils conjoint, c’est prendre le risque premier temps en parler et encore moins ont causé une incapacité totale de qu’une crise éclate, explose.» le dénoncer devant un officier de police travail supérieure à huit jours. « S’il y a et un tribunal. Selon Solen Degabriel, agression sexuelle, c’est le fait le plus grave qui sera retenu « elles ont parfois peur des représailles. Ou parfois, elles devant un tribunal. Mais c’est très très rare d’ailleurs qu’une veulent juste que ça s’arrête. Elles souhaitent alors se séparer femme aille devant le tribunal pour harcèlement sexuel, en mais ne pas attaquer leur conjoint ou ex-conjoint puisque le général, il y a eu agression ou viol conjugal », précise Solenn harcèlement ne s’arrête pas forcément lors de la séparation Degabriel. – et cela est également condamné par le code pénal. » La procédure judiciaire n’est donc pas une volonté de toutes emme, objet sexuel les victimes, préférant tourner la page au plus vite, souvent L’objectif des structures spécialisées dans les violences à après plusieurs années de harcèlement. « L’accueil à l’Hôtel l’encontre des femmes est alors de déculpabiliser la victime, de police… Ce n’est pas évident d’aller porter plainte mais de les aider à identifier qu’il s’agit de violence conjugale et alors en plus quand on arrive dans un hall avec une vitre pour les aider à se reconnecter avec leurs émotions. « Quand on parler au policier d’accueil, à qui il faut crier la raison de notre impose une sexualité à quelqu’un, qu’on l’oblige à parler venue et que tout le monde peut nous entendre ! », s’indigne d’une manière particulière, souvent crue, qu’on lui parle de Virginie Thoby. Un accueil déshumanisé, un manque de sexe de manière pornographique, etc. on réduit la personne proximité et un manque de confidentialité. L’Asfad emploie un à un objet. Nous sommes là pour écouter la personne, mettre assistant social, Dominique Boitard, pour pallier la difficulté de des mots sur ce qu’elle subit et l’aider à se réattribuer le droit l’exercice. « Il retrace les éléments qui montrent de la violence. de dire non », explique Solen Degabriel. « Toute violence Cela permet d’être plus claire et précise lorsque la femme se sexuelle constitue un traumatisme majeur. Il peut se faire présente devant l’agent chargé de recueillir sa plainte », nous qu’une personne à qui l’on a imposé une violence sexuelle explique Hubert Lemonnier, chef de service à l’Asfad. Mais vive désormais avec la conviction « Si on a retiré la notion de devoir même une fois cette étape franchie, qu’elle est méprisable et qu’aucun l’apport de preuves sera une autre paire partenaire désormais ne l’acceptera », conjugal, il n’en reste pas moins de manches. Si l’objectif du ministère alerte la psychiatre. Définir la situation que les femmes ont du mal à parler aux Droits des femmes est d’amener sans mettre la femme dans une situation la victime à déposer plainte, l’institution de violence sexuelle. » dangereuse, lui apprendre à se protéger est bien consciente que c’est un travail et à redevenir actrice de sa vie. Les structures proposant de très longue haleine, qui se heurte au final « aux limites du également des suivis psychologiques ou des groupes de droit, du harcèlement moral à l’agression sexuelle en passant parole dans certains cas. « Je reçois la personne pour un par des faits de harcèlement aggravés, toujours avec des premier entretien et je la revois quelques temps plus tard. Je preuves quasi impossibles à apporter ». Sans oublier que les peux parfois orienter vers ma collègue psychologue, selon les langues ne sont pas prêtes à se délier même dans l’intimité cas. Après pour les groupes de parole, c’est délicat d’intégrer d’une structure adaptée. une nouvelle personne à un groupe qui travaille ensemble. L’espoir des politiques publiques repose alors sur les Mais ça arrive. Après, le groupe n’est pas spécifique au collectivités locales, les structures spécialisées et la plateforme harcèlement sexuel mais plus largement aux violences », téléphonique, 3919, permettant de parler et d’être orientées précise Virginie Thoby. Des séances importantes et délicates vers des professionnels. Un système qui existe également au pour ces femmes qui même des années après la fin des actes niveau local – 02 99 54 44 88 – et qui représente un premier de violences restent encore profondément émues. Aucune pas vers la prise de conscience et l’accompagnement des participantes à l’espace de paroles du CIDFF n’a été personnalisé pour se sortir d’une situation dont personne en mesure de répondre à nos questions pour cette raison. n’arrive encore à parler librement.

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Figure N°3 :

Humiliation sur l’espace public

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ur la voie publique, ce que l’on nomme harcèlement de rue fait rage. Témoignages, coups de gueule et actions se multiplient pour faire front face à cette calamité qui peut engendrer de sérieux traumatismes chez celles qui subissent réflexions, remarques et menaces d’ordre sexuel. À l’échelle d’une ville comme Rennes, comment lutter contre ce phénomène ?

«Salope !»

Hey, tu

Hey miss ! t’as un

suc.. Joliiiiii...

06 ?

TEUPUH.

«

Se pose forcément la question de la domination Sans dire que le vent tourne et ne s’abatte dans la figure d’un sexe sur l’autre. C’est le reflet de l’inégalité des de ceux pour qui une réflexion faite à une femme dans la sexes. Travailler l’égalité, c’est désamorcer les formes de rue est un compliment. Et que l’absence de réponse à ce domination », explique Geneviève Letourneux, conseillère compliment les autorise à proférer une ou des insultes municipale à Rennes, déléguée aux droits des femmes et nauséabondes. Ainsi, les medium pour dénoncer ce fléau à l’égalité. Elles ont le goût amer de l’humiliation, résonnent et faire comprendre l’impact qu’il peut avoir sur les femmes comme des atteintes à la dignité et engendrent une peur affluent. Éléonore Pourriat, en 2010, réinvente l’Histoire dans de la rue, ces remarques faites dans la rue. Destinées à le film court Majorité opprimée en imaginant une société dans séduire, à draguer, à importuner ou encore à dominer… il laquelle les hommes sont victimes de la domination féminine. est indéniable que les supposés effets sont nombreux et Deux ans plus tard, une étudiante belge, Sofie Peeters, variables selon celui qui contraint l’autre à la relation. Qui réalise un documentaire en caméra cachée, Femmes de la ramènent les femmes à un statut d’objet. rue, pour démontrer la férocité de ces Sexuel qui plus est puisque la nature de « Hey mademoiselle, tu me interpellations, le machisme et le sexisme la réflexion est basée sur le physique et ambiants dans son quartier, à Bruxelles. fais une petite gâterie ?» se rapporte souvent à l’acte sexuel. Si Plus récemment, les internautes se sont les atteintes sont portées sur l’espace public, c’est souvent épris du blog de l’illustratrice Diglee, qui explique avec sur Internet que les langues se délient, comme sur le tumblr ferveur et humour ce qu’éprouvent les femmes victimes Paye ta schnek ou comme le témoignage de Jack Parker de harcèlement de rue. Entre honte, culpabilité et peur de à la suite de son agression – à caractère sexuel – dans le rétorquer… Épris aussi du Projet Crocodile dans lequel métro, rapportant ainsi les propos et les faits subis qu’ils Thomas Mathieu illustre des situations vécues par les soient de l’ordre du quotidien ou ponctuels. Le traumatisme femmes en BD. La toile est florissante mais l’objectif est s’établissant selon la fréquence et/ou selon la gravité de unique : viser la prise de conscience en sensibilisant à cette l’acte. Si certains crient à la psychose naissante, on ne peut problématique rébarbative qui, au delà de l’exaspération et pourtant nié qu’une prise de conscience éclot au même de la lassitude exprimée par la gente féminine, a de lourdes moment de la part des femmes et des hommes. conséquences sur l’espace public, vidé à certains endroits Un ras-le-bol général souffle sur la condition féminine qui et certaines heures, des femmes éprouvant un sentiment souhaite que le vent prenne enfin une direction différente. d’angoisse et d’insécurité. Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 19


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lles disent NON

permettent de s’extraire d’une situation dangereuse que ce soit au niveau psychologique ou physique. Le but est aussi Du « T’es charmante » au « Hey mademoiselle, tu me de partager les vécus et de travailler sur ces expériences », fais une petite gâterie ? » en passant par « Grosse salope, explique Isabelle Pineau, coordinatrice de Questions d’égat’as des grosses cuisses, j’aime bien. Ça te dirait que lité. Car si la plupart des femmes craignent l’agression phyj’t’encule ?! », ce n’est pas l’inspiration qui manque, comme le sique – et sexuelle notamment – elles sont nombreuses à souligne Bérangère Krief dans son sketch Cours de répartie garder un violent traumatisme psychologique. Face au haranti-relous, ou Noémie de Lattre dans sa chronique du 23 cèlement de rue, l’humiliation et le sentiment d’impuissance, juin sur France Inter, Cons des rues. Mais du côté des outils de domination, marquent profondément et s’ancrent dans la de lutte, il semblerait qu’il y ait une panne sèche à première mémoire de chaque personne qui en est ou en a été victime. vue. Pas tout à fait en réalité. Traitée dans la rue de « viande L’auto-défense semble alors être un remède approprié et coà viol », Laura fonde en mai dernier l’association Colère : hérent. (Re)prendre confiance. Ne plus, ou moins, craindre la nom féminin, à Nantes, et lance une collection de sacs à rue. Depuis le 1er juillet, l’association teste à titre expérimenmains et de débardeurs sur lesquels figurent l’inscription : Ta tal des stages d’auto-défense intellectuelle « pour un sens main sur mon cul, ma main sur ta gueule (lire notre Coup de de la répartie et la construction d’un argumentaire contre les cœur p.6). « Moi, c’est quand je me suis fait cracher sur les valeurs et discours sexistes, anti-féministes ». Six séances jambes, dans un bus bondé et que personne n’a réagi que de travail sont organisées durant le second semestre 2014, j’ai eu envie de faire quelque chose », nous précise Alexia avec une petite dizaine de femmes, sensibilisées à la quesGiannerini. Début juin, elle lance, avec Maud Renusson, tion. L’objectif étant de raconter l’expérience dans un blog et le collectif Stop au harcèlement de rue Rennes, reprenant un livret mais aussi de rendre compte de l’ampleur du travail la ligne de conduite du collectif éponyme parisien. Leur à l’occasion du 8 mars 2015. « On voudrait faire une scène objectif : « Qu’on ait en France une loi contre le harcèlement slam avec Slam Connexion en lien également », dévoile de rue, sur le modèle de celle qu’ils ont en Belgique ». En Isabelle Pineau. effet, le maire de Bruxelles a instauré en 2012 des amendes pour insultes sexistes allant de 75 à 250€. Le dépôt de arches pour la dignité plainte ou le flagrant délit étant évidemment obligatoires. Le L’association avait en janvier 2011 évoqué le sujet ministère aux Droits des femmes rappelle, outre l’absence du harcèlement de rue dans une conférence intitulée de définition officielle du harcèlement de rue, qu’en France, « Comment mettre fin aux violences contre les femmes dans la loi prévoit également des sanctions en cas d’injure les espaces publics ? », animée par la sociologue Dominique publique (invective, expression outrageante ou méprisante, Poggi, également formatrice et animatrice de marches non précédée d’une provocation et qui n’impute aucun fait exploratoires de femmes. Des marches exploratoires qui ne précis à la victime). Une législation spécifique n’est donc pas sont généralisées en France que maintenant – au Québec, à l’ordre du jour dans l’Hexagone, la ministre Najat Vallaudles marches sont préconisées depuis les années 90. Le Belkacem insistant sur l’importance de « s’interroger sur les ministère aux Droits des femmes – et de la Ville - devrait causes et mettre l’accent sur l’éducation. Son outil ? L’ABCD prochainement annoncer son de l’égalité », écrit-elle le 22 avril dernier sur son site officiel. Un outil « Il faut savoir s’adapter aux situations calendrier concernant la mise en selon le moment, le contexte, le place de ces marches dans une enterré début juillet par le ministre dizaine de villes prioritaires. Rennes de l’Éducation mais une ligne de gabarit de la personne… » figurera-t-elle dans la liste ? Rien conduite qui semble rester intacte, n’est encore officiellement défini. Mais on sait déjà que la celle de l’éducation au respect. C’est d’ailleurs ce que capitale bretonne projette d’en organiser, cela figurant dans prône l’association rennaise Liberté Couleurs, en organisant le plan d’actions, validé en juillet 2013 par le conseil municipal chaque année Le printemps de la jupe et du respect auprès de Rennes, qui lui-même découle de la Charte européenne des 13-25 ans. pour l’égalité des femmes et des hommes. « On est bien conscient qu’il y a des femmes qui ressentent un sentiment our le collectif Stop au harcèlement de rue Rennes, les d’insécurité. Et on sait qu’il y a moins de femmes sur l’espace actions devraient débuter à la rentrée 2014 avec une public. Mais l’espace public est à tout le monde ! », s’indigne expo photo dans les bars rennais. « Je souhaite prendre en Elisabeth Malaurie, chargée de mission aux droits des photo des femmes, de toutes les nationalités, de toutes les femmes et à l’égalité. Jamais expérimentées à Rennes, elles tailles, de tous les âges, en jupe. Les femmes ont honte de consistent à identifier les zones d’insécurité en présence des porter des jupes à cause du harcèlement de rue », explique femmes du quartier qui souhaitent participer. « La méthode Alexia. Pour les deux initiatrices du mouvement, il est capital préconise un groupe de 10 à 15 femmes environ et de faire d’en parler pour que les victimes n’aient plus honte et que les marches à un horaire dans lequel elles ont déjà vécu des les témoins ne soient plus passifs. Sans oublier l’importance situations insécurisantes. C’est de l’ordre de l’observation du dépôt de plainte « contre X. Pour la prise de conscience. et du diagnostic sur l’aménagement du quartier ou encore Pour déculpabiliser ». Les actions devraient également être sur l’éclairage des rues par exemple », précise Elisabeth semblables à celles du collectif parisien, à savoir la création Malaurie. temporaire de zones sans relous et la distribution de prospectus visant à informer les habitant-e-s. « Notre but n’est En attendant, les femmes s’emparent de l’espace urbain, à pas de pousser les filles à chercher les emmerdes. Il faut satravers des marches non-mixtes nocturnes – la dernière en voir s’adapter aux situations selon le moment, le contexte, date remonte au 18 mars - afin de se réapproprier la rue. le gabarit de la personne… », conclut-elle. C’est ce qu’enEncore plus percutant et marquant, les Slutwalk (Marches seigne l’association nantaise La trousse à outils, en partenades salopes) pour lutter contre le sexisme et la culpabilisation riat avec l’association féministe rennaise Questions d’égade toutes les victimes. À l’heure où nous écrivons ces lité, à travers des stages d’auto-défense féministe donnés lignes, le collectif est en concertation avec les différents à Rennes depuis 2013, adaptés aux femmes de différentes responsables régionaux pour définir de la prochaine date de tranches d’âge (2 stages seront proposés les 14 et 21 sepla marche. Et Rennes ne sera pas exemptée d’un défilé de tembre pour les adultes et le 28 septembre pour les 12-14 salopes, disant STOP au harcèlement de rue. ans). « Il s’agit de trouver des attitudes et des stratégies qui

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L’ART & LA MARINIÈRE . . .

Les emplumées questionnent nos corps La compagnie Les emplumées, a invité, lors de la Badouillerie des 13 et 14 juin dernier, trois artistes plasticiennes, Carine Peynaud, Léonie Lavaux et Charlotte Iung, pour exposer leurs œuvres sanguinolentes, sur les corps et la condition humaine. Vulves brodées, corps cartographiés et cerveaux à déguster étaient au menu de l’exposition.

© CELIAN RAMIS

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vant d’exposer ensemble, les trois jeunes femmes ne se connaissaient pas, ou peu. C’est la compagnie théâtrale Les emplumées qui leur a proposé de rassembler leurs œuvres dans un même lieu. Leur point commun ? Elles travaillent toutes sur le corps. Chacune à leur manière, elles s’interrogent sur la perception du corps dans nos sociétés. Toutes trois vivent désormais à Rennes, même si elles sont originaires de diverses parties de la France. Un détail pas si banal pour Carine Peynaud : « Je suis originaire de Bayonne. C’est important ? En tout cas, pour moi ça l’est. » Elle et Charlotte Iung évoquent toutes deux la volonté de changer notre rapport au corps. Elles dénoncent les corps auxquels nous sommes exposés au quotidien : « La publicité montre des corps qui n’existent pas. » Elles veulent montrer les corps dans leur réalité, en se focalisant sur l’intérieur. « On a une fascination pour le corps, que l’on a parfois du mal à s’approprier. Pourtant, la Bible veut que Dieu ait fait l’homme à son image. Par syllogisme, on est donc à l’image des dieux. » Elles souhaitent abolir la frontière qui nous sépare de notre propre corps et en rappeler le côté sauvage. De façon très différentes, les trois femmes cherchent à travers leur travail à changer l’image de nos corps, les réunir dans une exposition a été une réussite pour la compagnie Les emplumées. Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 22

Les mises en bouche La première pièce forme un lieu accueillant que le public est chargé de s’approprier. Un canapé, une cheminée, deux photos de body-painting accrochées au mur… à première vue ceci pourrait être un salon lambda. Mais si on y regarde de plus près, les broderies accrochées au dessus de la cheminée et qui pourraient être celles de votre mamie, représentent une scène d’accouchement, vue par le bas. Idem pour les oreillers du canapé, si on se penche sur la question, les broderies représentent des actrices pornographiques nous dévoilant toute leur intimité. C’est l’œuvre de Léonie Lavaux, doctorante en arts plastiques à l’université Rennes 2, qui interroge par son travail, le tabou de la sexualité féminine : « J’utilise des images que je vais glaner sur les sites pornographiques, et je me les réapproprie par la broderie. Le textile est une activité stéréotypée féminine. Je la rends subversive en l’utilisant avec des images de sexes féminins. Dans notre société le corps féminin est représentatif du désir de l’homme, dès que l’on touche au désir féminin, à sa sexualité, on fait face à un tabou. J’essaye de déposséder le corps de la femme du regard masculin, de l’y soustraire. » Dans un autre recoin, une carafe en forme de bouche est disposée. Carine Peynaud explique, amusée : « Je voulais illustrer l’expression ‘avoir l’eau à la bouche’... » Une jolie


culture

L’ART & LA MARINIÈRE . . . métaphore pour donner envie au spectateur gourmand de poursuivre sa route. Dans le couloir qui mène à la seconde pièce, le travail de Léonie Lavaux sur les corps de femmes est de nouveau à l’honneur. Il s’agit cette fois-ci d’une vulve brodée qui est déclinée en plusieurs pièces de tissus et qui va en grossissant. « Une évolution dans mon travail, précise-t-elle. Au début je faisais des vulves plutôt discrètes, maintenant elles prennent de l’ampleur, elles en deviennent presque monstrueuses. » En plat principal : cannibalisme et cartographie des corps. La seconde et principale pièce de l’exposition est plongée dans une ambiance sanguine, le rouge domine de par son omniprésence, rappelant immédiatement au spectateur le sang qui coule dans ses veines. Sur les côtés surgissent d’autres œuvres de Léonie, dont un patchwork brodé d’actrices pornographiques disposé sur une fenêtre et qui filtre la lumière du jour, la rougissant, et donnant ainsi une luminosité sanglante. Des dessins de Carine Peynaud représentant des corps humains ouverts sont accrochés sur les murs du fond. Elle travaille sur la « cartographie des corps ». En s’approchant de plus près on peut voir que, effectivement, certaines œuvres superposent des cartes avec des corps humains ouverts. Le réseau cérébral se transforme ainsi en lieu de découverte, d’exploration. Elle explique le départ de sa réflexion sur le corps humain : « Ma volonté de travailler sur l’intérieur du corps, sur ce qu’il y a sous la peau vient d’une exposition sur les écorchés. Je l’ai vu à l’étranger, en Estonie, car elle avait été censurée

en France. Cela m’a fascinée, obsédée. Dans notre société actuelle on a un rapport au corps très aseptisé, j’essaye d’inverser ce rapport. Mon travail rappelle un peu les débuts de la médecine, tout en essayant d’avoir une vision esthétique. Aujourd’hui l’art et la science sont deux champs complètement séparés, mais cela n’a pas toujours été le cas. » Au milieu de la pièce de l’exposition, Charlotte Iung a dressé le couvert sur une table. Artiste passionnée par le textile, elle a reproduit des organes en tricot. Au menu, disposés dans des assiettes, on retrouve des yeux, des reins, un cerveau. « Le tricot cela rappelle un peu l’enfance, avec les doudous, le côté doux de la matière. Cela me plaît de choquer sans choquer. C’est-à-dire reprendre quelque chose de doux, d’enfantin, mais d’en faire quelque chose de sanglant », précise-t-elle. Le cannibalisme de la scène est en effet loin des rêveries enfantines. Lorsqu’on leur demande si elles continueront de travailler ensemble, elles lancent, souriantes: « Pourquoi pas...? ». Léonie Lavaux et Charlotte Iung ont déjà monté une compagnie ensemble afin de poursuivre leur travail sur le textile, un domaine artistique encore peu exploré mais qui commence à monter en puissance. I CHLOÉ RÉBILLARD

« On a une fascination pour le corps, que l’on a parfois du mal à s’approprier. »

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L’ÉQUIPE DE YEGG VOUS SOUHAITE UN CHALEUREUX ÉTÉ !

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culture

PLANS CU’ . . . chiffre

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Les rois de l’underground argentin reviennent à Rennes, après avoir marqué les esprits aux TransMusicales en décembre dernier, pour le festival Quartiers d’été, organisé par le CRIJ Rennes les 16 et 17 juillet. C’est le premier soir que les Sud-américains monteront sur la scène du parc des Gayeulles avec à leur tête, l’explosive Mariana Yegros. La formation argentine mêle cumbia traditionnelle, rythmes jamaïcains, groove et électro pour un résultat détonnant et entrainant.

20 août . . .

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du

bref À LA SANTÉ DES ÉTERNELLES ABSENTES !

Rendez-vous à 20h30 place de la Mairie pour un moment de partage festif avec Fuckin’Hell Orkestar. Une bande de joyeux trublions invitée dans le cadre de Transat en ville et qui promet une belle soirée.

bref

à

mois

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LA YEGROS PREND SES QUARTIERS À RENNES

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mois

Le Mouvement HF Bretagne, pour l’égalité des sexes dans les arts, la culture et le spectacle vivant, organisait mardi 1er juillet un « apéro plaquettes », à la bibliothèque de l’ADEC de Rennes, afin de marquer leur volonté de passer à l’action et de se remonter les manches. En épluchant les plaquettes de programmation, l’idée était d’attirer l’attention des participant-e-s sur la – trop – faible représentation des femmes programmées dans les différentes institutions culturelles rennaises. bref

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LA ROUTE DU ROCK COLLECTION ÉTÉ

à

Saint-Malo – Du 13 au 16 août

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DES ENVIES DE JOURNALISME ? REJOIGNEZ NOTRE RÉDACTION !

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culture

L’ART & LA MARINIÈRE . . .

Pom Pom girl : l’american dream en Bonus Programmée les 23 et 24 août, lors de la quatrième édition du festival « Bonus » - l’occasion aussi de fêter les 40 ans du Théâtre de Poche à Hédé - « Pom Pom girl » est une création de théâtre d’objets créée et mise en scène par Marie Bout. Une artiste rennaise inspirée par l’ « American dream ».

© CÉLIAN RAMIS

F

ormée à l’école Le Samovar à Paris, spécialisée dans le clown contemporain, Marie Bout est une artiste burlesque directrice de la compagnie Zusvex regroupant dix artistes associés tous sensibles au visuel et au spectacle vivant. Un domaine qui inclut le théâtre d’objets permettant de raconter des histoires avec peu de moyens. « On détourne par exemple des objets usés, du quotidien pour créer des petites scénographies proches du public, explique-t-elle. C’est toujours intéressant de voir comment ils s’inscrivent dans la scène ». Et c’est en cherchant des objets dans le grenier de la compagnie qu’elle a imaginé sa création « Pom Pom Girl ». Un spectacle de quinze minutes en anglais avec un chien, un cheval, une poupée en plastique, une maison, un gazon, une bouteille de Cola et une voiture qu’elle utilise pour donner vie à son histoire : celle de Florence, une passionnée des États-Unis, racontant la vie idéale de Catherine au Connecticut. Excitée par les aventures de son idole, elle y présente son rêve américain et s’imagine un monde magique made in USA… jusqu’au drame ! Florence tente de sauver les apparences « all is right, all is good », mais tout s’effrite. Le bonheur n’est plus. La créatrice et metteure en scène interroge la notion de bonheur, aussi éphémère soit-il, et de sa représentation dans l’imagerie populaire. « Dès le départ, on peut pressentir quelque chose de fragile car les objets ne sont pas si brillants et solides qu’elle le croit. Florence pense

que tout est beau pour cacher ses propres fêlures. Cela la rassure », confie Marie Bout. Cette artiste minimaliste nous offre une critique de notre société où consommation et image prédominent. Méfions-nous des apparences, dit l’adage. Une vie parfaite n’est peut-être pas celle que l’on imagine. Du type monospace, labrador et maison pavillonnaire... Un style de vie qui ne fait pas rêver tout le monde. On est alors en droit de se questionner sur les motivations de l’artiste concernant l’usage de la langue anglaise. Un but pédagogique ? « J’ai improvisé et cette langue est apparue, explique Marie Bout. Le personnage de Florence est tellement dans son trip et fan de Catherine qu’elle décide de faire son show en anglais. Elle est barrée ! ». Pour elle, l’idée était de créer une forme courte, drôle, absurde et la lecture des livres pour enfants de l’auteure Gay Wegerif a participé à l’élaboration des premiers éléments de l’histoire : avec une princesse et son drôle de cheval. C’est à l’école privée de Hédé que Marie Bout interprétera « Pom Pom girl ». Elle participera ainsi à l’un des rendez-vous incontournables de la ville : Bonus, le festival du Théâtre de Poche, organisé depuis 4 ans par l’équipe du Joli Collectif. Au programme de cet évènement, considéré comme une institution à Hédé : 11 spectacles vivants et 8 concerts. Des représentations drôles, saisissantes et poétiques, auxquelles Marie Bout contribuera avec « pleasure ».

I MARIE LE LEVIER Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 25


culture

VERDICT . . .

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La sélection culturelle et subjective de la rédaction musique

JIMMY’S HALL

JUILLET 2014

CHALEUR HUMAINE JUIN 2014

DVD

I MARINE COMBE

1932, Jimmy Gralton, irlandais de la province de Leitrim, revient vivre sur ses terres qu’il a dû fuir 10 ans plus tôt. Un exil forcé et politique à la suite de la guerre civile qui n’aura pas entamé les valeurs et le militantisme de l’homme. Il s’installe auprès de sa vieille mère dans la ferme familiale. Poussé par la jeunesse du comté et par l’ardeur de ses vieux amis, Jimmy va rouvrir le dancing. La structure remise en état et en activité, ses ennemis d’hier rejaillissent et c’est avec une sévère violence et une certaine impunité qu’ils mettront tout en œuvre pour détruire ce lieu unique. À travers quelques personnages affiliés au dancing, Ken Loach acte et incarne autant l’envie d’étudier et de discuter en toute liberté que de se divertir et danser dans cette époque ravagée par la crise. Ce cadre progressiste sera vécu comme un affront aux yeux des propriétaires terriens et de l’église qui ne voient pas d’un bon œil une alternative à la conduite à suivre pour cette jeunesse irlandaise. Un biopic finement mis en scène qui ne submerge pas le spectateur de détails historiques et qui recèle d’histoires de vie de ces hommes et femmes. Un récit inscrit dans un contexte de tensions sociales qui pour autant n’est pas dénué de romance et sentiments. Ken Loach reste maître de la poésie humaniste autour d’une justice sociale revendiquée et appuyée par les combats de l’histoire. Petits comme grands. Ici c’est l’histoire avec ce petit h qui nous affecte et nous émeut.

Livre DIPLOMATIE

VOLKER SCHLÖNDORFF JUILLET 2014

Adapté de la pièce de Cyril Gely, Diplomatie ne réprime pas ses origines théâtrales. Un quasi huit clos au sein de l’Hôtel Meurisse, quartier général allemand d’où se dirigent les opérations du général Von Choltitz. Ce dernier ayant reçu l’ordre de raser Paris dans son ensemble. De l’apparition du consul suédois Nordling interprété par André Dussolier, va naître un dialogue de qualité et un duel rhétorique entre ce dernier et le général incarné par Niels Arestrup. Une partie d’échec qui démarre au petit matin du 24 août 1944. La force et l’expression du film résident en ce face à face de la dernière heure où ces hommes déterminés vont être juges du sort de millions de parisiens et du destin de la cité. Cité des arts qu’Adolf Hitler lui-même admirait plus que toute autre ville. Raison pour laquelle il n’aurait pas supporté qu’elle survive à la guerre alors que Berlin était en ruine. Une plaidoirie salvatrice pour le consul qui se heurte souvent à la droiture militaire du général. Arguments contre arguments, feintes et ripostes seront à la mesure de l’enjeu, tel un combat d’épée. Volker Schlöndorff brille par sa mise en scène de dialogues d’une très belle qualité, tout autant que le jeu de ces deux monstres du cinéma excellera dans l’art oratoire. Le fin doigté du diplomate contre le devoir et la majesté prussienne. Un affrontement feutré qui ne lésinera pas sur la menace et la dimension du lendemain, l’après-guerre. Un cheminement mental séduisant et épique. I CÉLIAN RAMIS

Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 26

cinéma

KEN LOACH

CHRISTINE AND THE QUEENS Après un EP remarqué, Héloïse Letissier offre à son public ce qu’il attendait depuis plusieurs mois : un premier album à la hauteur de toutes les espérances et surtout à la hauteur de son talent d’artiste complète, un statut qui lui a été attribué sans chichis à l’unanimité. À travers la construction de Christine, son double androgyne et digne héritier-e de Mickael Jackson, la reine de la « freakpop » a imposé son style et signe ici un véritable ovni musical. Avec ses Queens, inspirée de sa rencontre avec des dragqueens lors d’une nuit londonienne, elle nous emmène dans un univers pop, raffiné, poétique et extravagant, jouant avec les codes du genre et de genre, avec des chansons comme « It » ou « Half ladies ». Des textes et des mélodies mélancoliques, rythmées et savoureusement langoureuses… la fraicheur musicale d’Héloïse Letissier rencontre la froideur de Christine and the Queens qui déferle dans une Chaleur humaine de 11 titres.

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I CÉLIAN RAMIS

Livre

COLETTE JOURNALISTE

GÉRARD BONAL ET FRÉDÉRIC MAGET 1ÈRE ÉDITION LIBRETTO – JUIN 2014

C’est en 2010 que sort le recueil présenté et annoté par l’écrivain, Gérard Bonal, et le professeur de lettres, Frédéric Maget, aux éditions Seuil. Mais l’on ne peut résister à l’envie d’en parler tant cette 1ère édition chez Libretto est l’occasion rêvée de découvrir ou de redécouvrir la célèbre romancière française. Celle qui a commencé sa carrière de journaliste avec la seule et simple consigne, « Débrouillez-vous », a prouvé des années durant qu’elle pouvait sublimer toutes les situations et les retranscrire de manière personnelle et insolite. Sa règle « Il faut voir et non inventer » fit de ses chroniques et de ses reportages une signature recherchée et aguerrie. À travers 130 articles ressortis des archives de la presse française, on dévore sans vergogne les portraits des époques que Sidi traverse, on vit avec passion et effervescence les années folles et l’ambiance des musik-hall qu’elle chérissait tant en tant qu’ancienne artiste et on découvre avec douceur et finesse la force et singularité de cette femme plume ainsi que de toutes les femmes qui animent ses lignes. I MARINE COMBE


DANS LE FRIGO DE...

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VALÉRIE BOUDET-ROCHU

I’m sey & I know it

Burger Le Lyonnais

ts pour Ingrédien burgers :

s à chair - 10 tomate n - 1/2 oigno te lo a h - 1 éc prika - 1 cs de Pa ucre - 1 cs de s live - Huile d’o

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de Basilic- 8 feuilles frais de chêvre - Fromage - 4 Buns aché frais - 4 steak h e de rosette - 4 tranch

promenon les plats s-nous dans , l’économ pendant que e n’y es t pas

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Emondez les tomates et retirez les pépins. Coupez-les en petits morceaux. Faîtes ensuite revenir l’oignon et l’échalote dans une poêle avec un trait d’huile d’olive. Rajoutez les tomates et couvrez. Laisser cuire à feu doux pendant 10 min. Pensez à remuer souvent. Ajoutez un trait de vinaigre balsamique et une cuillère de sucre, et augmentez la puissance de cuisson. Retirez du feu après 2 minutes. Ajoutez le paprika, sel et poivre. Mixez et réservez. Essuyez la poêle et réutilisezlà pour faire cuire vos steaks et fondre votre fromage de chêvre. Tranchez vos buns et passez-les au toasteur. Ils doivent être juste chauds et craquants ! Tartinez l’intérieur des buns de sauce tomate. Posez sur la partie inférieure les feuilles de basilic, surmontez avec vos steaks (Bleu, Saignant, A Point ou Bien Cuit, selon vos goûts), salez-les ! Posez le fromage de chêvre chaud sur les steaks et posez enfin une rondelle de rosette. Vous pouvez couvrir le tout avec la partie supérieure du Bun ! Dégustez sans attendre accompagné de frites maison ou de salade de saison ! I RECETTE RECUEILLIE PAR CÉLIAN RAMIS

Attitude Rennes La Burger Malo, 13 rue Sain8t86 02 99 36 6

Arg !

Été 20 nombre 14 d (trois q e clopes : 21 uarts) 6 nombre d S um m e verres : 77 e poids : r is c om in g ! 67 kilo s Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 27

© CÉLIAN RAMIS


&

YEGG & THE CITY

© CÉLIAN RAMIS

Episode 11 : Quand j’ai donné mon sang pour la première fois.

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377 candidats, 1 103 dons et 446 nouveaux donneurs. Un bilan légèrement mitigé pour la 6e édition de Tout Rennes Donne - manifestation organisée par l’Établissement Français du Sang (EFS) – qui se déroulait du 10 au 14 juin. C’est dans ce cadre-là que je me suis rendue sous le chapiteau dressé place du Parlement, à Rennes. Après une tentative échouée il y a quelques années pour cause de veine trop petite – ça ne s’invente pas - je réitère l’expérience. Avec succès, cette fois ! Comme quoi… Le don se déroule en plusieurs étapes. La première consistant tout simplement à remplir un questionnaire sur notre état de santé afin de vérifier que le donneur se porte bien et d’identifier les comportements à risque qui pourraient entraver la bonne action – l’EFS examinant ensuite le sang prélevé afin de valider le don. Après quelques secondes d’attente, je rencontre un médecin de la structure qui examine attentivement le questionnaire. On parle alors relations sexuelles potentiellement à risque, prise de médicaments, antécédents médicaux, etc. Il prélève également une goutte de sang de mon index pour

Juillet-août 2014 / yeggmag.fr / 28

vérifier que mon taux d’hémoglobine est suffisamment élevé pour pouvoir donner mon sang. Check. Une fois mon poids et ma taille enregistrés, il peut calculer la quantité de sang qui me sera prélevée. Le moment angoissant approche, je me hisse sur le lit, je m’allonge, on me surélève légèrement les jambes – obligatoire lors du premier don – on me donne un mini ballon anti-stress (coupe du monde oblige !) et c’est l’heure de la piqure. Pas plus douloureuse qu’une prise de sang, pas de panique. Environ 7 minutes plus tard, et 480 ml de sang en moins, on libère mon bras droit de l’aiguille, on m’entoure le coude d’une bande médicale et on m’autorise à m’asseoir. Je peux procéder à l’ultime étape, celle du gueuleton et du repos (une vingtaine de minutes). Je repars le bras et le doigt bandés, avec la sensation d’avoir été utile puisque le sang donné servira ensuite aux différentes opérations dans les hôpitaux de la région Bretagne, et parfois même au-delà selon les besoins. Dans l’année, une femme peut donner son sang à 4 reprises, avec 8 semaines d’intervalle entre chaque don. Une expérience que je renouvellerais sans hésiter. I MARINE COMBE


CAROLE BOHANNE CÉLINE JAUFFRET ANA SOHIER ANNE-KARINE LESCOP

ANNE LE RÉUN BÉATRICE MACÉ ANNE CANAT SYLVIE BLOTTIERE ÉVELYNE FORCIOLI YUNA LÉON BRIGITTE ROCHER FANNY BOUVET MARIE-LAURE COLAS GAËLLE AUBRÉE DORIS MADINGOU KARINE SABATIER ARMELLE GOURVENNEC MARIA VADILLO GAËLLE ANDRO VÉRONIQUE NAUDIN NADINE CORMIER ESTELLE CHAIGNE ALIZÉE CASANOVA DOMINIQUE IRVOAS-DANTEC FRÉDÉRIQUE MINGANT MATHILDE & JULIETTE

LAURENCE IMBERNON

NATHALIE APPÉRÉ ANOUCK MONTREUIL NATHALIE APPÉRÉ ÉMILIE AUDRENMARIE HELLIO CÉLINE DRÉAN VALÉRIE LYS

ISABELLE PINEAUMARINE BACHELOT CHLOÉ DUPRÉ ANNE LE HÉNAFF GÉRALIDINE WERNER DOROTHÉE PETROFF

GWENAËLE HAMON MARION ROPARS

CATHERINE LEGRAND

JEN RIVAL

LES FEMMES QUI COMPTENT,

CHAQUE MOIS DANS YEGG YEGG

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LE FÉMININ RENNAIS NOUVELLE GÉNÉRATION

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