lemag' N°8

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CULTURE

LA MUSIQUE ISRAÉLIENNE DANS TOUS SES ÉTATS

L'INVITÉ DU MAG' FRÉDÉRIC LEFEBVRE ISRAËL AU COEUR

LeMag.co.il

N°8 AOÛT - SEPTEMBRE 2016

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COMPRENDRE LES ROUAGES DE LA SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE

TRANSPARENCE FISCALE

VOUS N'Y ÉCHAPPEREZ PAS ! PRÈS DE 200 MILLIARDS D'EUROS DÉTOURNÉS DES CAISSES MONDIALES

ET ISRAËL DANS TOUT ÇA ?

SANTÉ

LA RITALINE DROGUE OU MÉDICAMENT ?

LeMag’ N°8 AOÛT - SEPTEMBRE 2016 20,00

FOCUS SUR HADERA UNE VILLE AUX MILLE PROMESSES

84 PAGES D’ENQUÊTES, D’INVESTIGATION ET DE DÉCRYPTAGE • leMag’ France Métropolitaine 4,85 € - Israël 20 ₪ - Belgique : 5 € - Suisse : 5,25 - Canada 6,86•CAD - Luxembourg : 5 € -N°8 Dom-Tom 7€ Août CHF - Septembre 2016 LEMAG.CO.IL •1


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• Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8


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• Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8


DIRECTEUR DE PUBLICATION Remy Allouche remy@lemag.co.il RÉDACTRICE EN CHEF Caroll Azoulay caroll@lemag.co.il DIRECTION ÉDITORIALE Deborah Marciano deborah@lemag.co.il DIRECTRICE ARTISTIQUE Solène Sitbon solene@lemag.co.il GRAPHISTE Ilana Cohen ilana@lemag.co.il JOURNALISTES Naomie Ariel Karine Sarfati David Jortner Tal Bauman Kathie Kriegel Boaz Birkmaier Dahlia Perez Claire Zilberstein Ambre Bendayan Agnes Lichten Déborah Hosatte Katja Epelbaum Yaël Ancri Michaël Blum PHOTO EDITOR fotolia - http://fr.fotolia.com/ IMPRESSION Old City Print DIRECTRICE ADMINISTRATIF ET FINANCIER Deborah Marciano deborah@lemag.co.il RESPONSABLE COMPTABLE Sandrine Samama sandrine.compta@gmail.com COMPTABLE Zaira Spencer compta@lemag.co.il MANAGER DE LA PUBLICITÉ Jean Wertenschlag sales@lemag.co.il RELATION PRESSE Caroll Azoulay caroll@lemag.co.il FONDATEUR Remy Allouche Éditions GOALI PRESSE LTD 514 388 016 : ‫ח’’פ‬ ‫ ירושלים‬- 13 ‫כנפי נשרים‬ Tél. : 02 654 01 78 / Fax : 1532 654 01 78

éditorial Entrer dans la danse pour mieux pouvoir la mener

L'

Union européenne dépense chaque année 200 milliards de dollars pour la Défense, elle dispose de plus de 2000 jets, de 500 navires, de 1,4 million de militaires et de plus d’un million de policiers. Mais l’Europe semble impuissante face à la menace islamiste, notait dernièrement Bret Stephens dans le Wall Street Journal. Limpide comme de l’eau de roche, la seule solution pour la France notamment, consiste désormais à « ‘’israéliser’’ notre sécurité  » ; dixit le président du conseil régional de Normandie, Hervé Morin. On croit rêver. Ou voir tout simplement se réaliser la prophétie, selon laquelle Israël sera une lumière pour les nations. Qui aurait un jour cru que les médias se pâmeraient devant notre légendaire résilience, nos systèmes de lutte contre les attentats, notre vigilance et même le fait que les civils armés, peuvent réagir en cas d’attaque ?!? Et que penser de notre situation diplomatique ? Un accord de libre-échange avec la Chine sur le feu, des exportations vers l’Inde en hausse de 30 %, une reprise des relations avec les pays africains et la Turquie, sans oublier les 120 rencontres menées au cours des six derniers mois entre notre Premier ministre et les chefs d’état et de gouvernement de la planète ! Alors isolé Israël ? Pas autant que nos ennemis voudraient bien le laisser à penser… Et c’est justement parce qu’Israël fait indubitablement partie du village global qu’il doit se plier aux exigences internationales, allant parfois même jusqu’à montrer la voie. Accepter les règles de transparence fiscale, lutter contre les évasions d’impôts et se montrer exemplaire au point de devenir membre observateur du prestigieux GAFI (Groupe d'action financière international), ce n’est qu’un exemple de la capacité d’Israël à relever les défis fixés par un monde dans lequel il entend bien ne pas être un suiveur. Caroll Azoulay

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SOMMAIRE © Kobi Gideon (GPO)

AOÛT - SEPTEMBRE 2016 LeMag’ N° 8

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Le film ‘Emek’, réalisé par Sophie Artus, a été présenté et récompensé dans différents festivals à travers le monde. Impuissante à lutter contre la violence dans sa propre classe, l’ancienne prof a préféré la dénoncer à travers le 7e art.

© Ran Mendelson

La tournée africaine effectuée début juillet par le Premier ministre israélien avait notamment comme objectif celui de redonner à Israël sa position d’État observateur de l’Union africaine dont il avait été évincé en 2002.

La Ritaline, qualifiée de "coke des enfants" outre Atlantique, est largement décriée par certains parents et spécialistes de la santé, mais elle peut être également une source de mieux-être dans certains cas. Comment savoir ?

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5 ÉDITO 8 ZAPPING 12

À LA UNE

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RENCONTRE AVEC…

Après la Chine et l’Inde, Israël poursuit sa conquête des grands espaces en Afrique

Sophie Artus. Cette ancienne ensei- gnante a préféré passer derrière la caméra. Elle nous explique pourquoi

18 ENTREPRENDRE

Le monde des startups utilise un jargon bien précis. LeMag’ vous initie à ce drôle de langage

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SANTÉ

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VIVRE AUTREMENT

Ça bouge du coté des séniors ! Israël fait face à la crise du vieillissement

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PORTRAIT

Ritaline. Pour ou contre ? Drogue ou médicament ? LeMag’ a décidé de com- prendre, une fois pour toutes

Il aurait dû être terroriste mais il a préféré devenir espion du Shin Beth. Découvrez l’incroyable parcours du Prince vert

36 DOSSIER La transparence fiscale est une

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donnée qui marquera les annales éco- nomiques et financières du 21e siècle. Pourquoi ? Comment ? LeMag’ fait le point


Retrouvez LeMag’ sur www.lemag.co.il et sur facebook/lemag.co.il

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C'EST DANS L'AIR

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L'INVITÉ DU MAG

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TRIBUNE LIBRE

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Frédéric Lefebvre n’est pas un homme politique comme les autres. Découvrez pourquoi

Myriam Shermer, porte-parole du groupe francophone du Likoud appelle les Franco-Israéliens à prendre leur destin en main

LeMag’ a zoomé sur Hadera pour vous

LeMag’ s’est glissé dans un groupe de parole pas comme les autres. Celui d’enfants cachés pendant la Shoah

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C'EST L'HISTOIRE DE...

La presse israélienne. Une plongée passionnante dans l’histoire des médias qui ont façonné notre pays

74 IMMOBILIER C’est un fait, Jérusalem est la capitale

d’Israël, ET du sionisme immobilier…

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CULTURE

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À la plage ou au café, tout le monde parle des fameuses réformes imposées par la Transparence fiscale. Et si on si on prenait le temps de comprendre de quoi il est vraiment question ?

L’AN PROCHAIN À JÉRUSALEM

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Elle est débordante de vie, créative et bourrée de talent. Branchez-vous musique israélienne

BON GOÛT

LeMag’ vous a concocté le menu idéal

© Nir Kafri for The Jewish Agency for Israel

La prochaine rentrée scolaire verra affluer des milliers de jeunes olim de France. LeMag’ s’est intéressé aux struc- tures d’études qui leur sont dédiées

© Oren Kessler / The Israel Project

Le 20 juillet dernier, 200 olim français arrivaient en Israël à bord d’un avion spécialement affrété par l’Agence Juive. Parmi eux, on comptait une moitié de jeunes et d’enfants prêt à entamer leur vie d’écoliers et d’étudiants en Terre Sainte.

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Maariv, Yediot A’haronot, Haaretz, Israël Hayom, Jerusalem Post… La presse israélienne fascine, car c’est quotidiennement, avec ces journaux, que l’histoire du pays s’est écrite.

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ELIE WIESEL,

UN PHARE DANS LA NUIT 2 juillet 2016. Elie Wiesel s’est éteint à l’âge de 87 ans. Si l’homme nous a quittés, son enseignement continuera à éclairer le Peuple juif et les Nations du Monde. Témoin de l’horreur, son combat laissera une trace indélébile dans les mémoires. « C'est avec un profond sentiment d'humilité que j'accepte l'honneur que vous avez choisi de m'accorder. Je le sais : votre choix me transcende. Il me fait peur autant qu'il me plait. Il me fait peur, parce que je me demande : Ais-je le droit de représenter les multitudes qui ont péri ?… Il me plaît, parce que je peux dire : cet honneur appartient à tous les survivants et à leurs enfants, et à travers nous, au Peuple juif, avec lequel le destin m'a toujours identifié ». (Discours de réception du Prix Nobel de la Paix en 1986).

© M.S.A

© Photo Libre De Droits

ZAPPING LEMAG’

UN PEUPLE FORT Israël a vécu des moments dramatiques avec les attentats de Hallel Yaffa Ariel (13 ans), poignardée sauvagement dans son lit et Michael Mark, père de dix enfants, assassiné sur la route 60 près de Hébron. Au-delà de la douleur, la force morale et la dignité de ceux qui restent nous montrent à quel point le Peuple d’Israël plie mais ne rompt jamais. Propos choisis : « Regarde-nous ici-bas, nous sommes tellement brisés, mais pourtant encore si forts grâce à ce que tu nous as appris. Papa, tu peux être fier… Nous allons continuer ton travail grâce à la foi incroyable et la force que tu nous as données ». Les enfants de Michael Mark.

© Gage Skidmore

BREXIT ET LE JOLI MOIS DE MAY ! WONDER WOMAN FÉMINISTE ET PRO-ISRAÉLIENNE !

Gal Gadot (Wonder Woman, dans le film « Batman vs Superman: Dawn of Justice») a participé à un clip réalisé pour valoriser les femmes israéliennes qui occupent des fonctions inhabituelles : actrice, pilote de chasse, femme d’affaires, médecin, surfeuse etc… Un bel hommage aux femmes de ce pays qui ne leur refuse l’accès à aucun poste ! 8

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Les Britanniques ont décidé de sortir de l’Europe, ce qui a provoqué un cataclysme politique dans la fière Albion. David Cameron a jeté l’éponge et c’est Theresa May qui occupera dorénavant le ‘10 Downing Street’. Certains la comparent déjà à Margaret Thatcher. Pour Israël, la nomination de May est accueillie avec le sourire, cette dernière n’ayant jamais caché ses convictions pro-israéliennes. Autre soutien de l’État Hébreu, Boris Johnson, l’homme par qui le Brexit est arrivé, est nommé aux Affaires étrangères. Charismatique à souhait, le nouveau ministre devrait réserver de belles surprises dans les relations internationales de la Grande Bretagne.


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© NMaze

ZAPPING LEMAG’ © Photo Libre De Droits

TURQUIE/ DAESH : ÇA SENT LE GAZ !

LE DRAME

© Photo Libre De Droits

La talentueuse actrice, Johanne Toledano, qui devait monter sur scène le 31 juillet dernier, dans son one-woman show intitulé ‘l’Ego mon jeu préféré’ a dû annuler son spectacle suite à la mort tragique de ses parents (zal), assassinés par leur jardinier à Casablanca au Maroc.

Après de longs mois d’âpres négociations, Israël et la Turquie se sont enfin réconciliés. Oubliées les discordes suite à l’affaire du Mavi Marmara ou au blocus de la Bande de Gaza. Erdogan a fait primer les ‘intérêts supérieurs’ (comprendre l’approvisionnement du pays en gaz). Pris à la gorge par Poutine, ce dernier s’est tourné vers l’État hébreu pour assurer sa consommation en gaz. Une aubaine pour Netanyahou qui voit là une porte ouverte vers l’Europe. Une réconciliation par intérêts qui n’est pas du goût de tout le monde, Daesh en tête. Le lendemain de la signature de l’accord, l’État Islamique attaquait l'aéroport international Atatürk d'Istanbul (44 morts, dont 19 étrangers, et 260 blessés) et mi-juillet, Erdogan étouffait dans l’œuf un putsch organisé par son état-major. Ça sent le gaz…

RÉCHAUFFEMENT DIPLOMATIQUE

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© Haim Zach (GPO)

NICE / BHL Suite à l’attentat terroriste qui a fait 84 morts à Nice le 14 juillet, Bernard-Henri Lévy, qui était en Israël pour la projection de son film ‘Peshmergas’, le 21 juillet, a fustigé la frilosité des institutions françaises à nommer les choses. « Psychopathe ou terroriste ? Comme s’il fallait choisir. Comme si les terroristes n’étaient pas tous, toujours, des psychopathes. Comme si les services nazis des années 20 et 30, les piquets des Sections d’assaut hitlériennes donnant la chasse à leurs ennemis, comme si les brutes SS préposées à l’éducation idéologique des masses allemandes avaient jamais été autre chose que des brutes psychopathes plus ou moins galonnées ». Le 26 juillet, la France vivait un nouvel attentat, cette fois deux terroristes ont égorgé un prêtre et grièvement blessé une personne, lors d’une prise d’otages dans une église à Saint-Etiennedu-Rouvray dans le nord-ouest de la France. Ces crimes ont été revendiqués par Daesh.

Dix ans que cela n’était pas arrivé : le ministre égyptien des Affaires étrangères a rencontré, début juillet, à Jérusalem, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. Les deux hommes ont parlé du processus de paix et de la détérioration de la situation sécuritaire dans la région. Netanyahou a appelé les Palestiniens à suivre l’exemple des Égyptiens et des Jordaniens et à revenir dès maintenant à la table des négociations. En coulisse, certains s’accordent à dire que l’Égypte est venue demander l’aide d’Israël pour éradiquer les cellules de l’État Islamique basées dans le nord du Sinaï égyptien, près de la bande de Gaza… Quelques jours après la rencontre, les drones israéliens bombardaient la zone occupée par Daesh. Pur hasard, non ?


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À LA UNE LEMAG’

ISRAËL

À LA CONQUÊTE DU CONTINENT AFRICAIN B. Netanyahou et son homologue éthiopien H. Desalegn

Alors que l’Afrique est courtisée par le monde arabe, et plus particulièrement par la Turquie et l’Iran, l’État hébreu tente d’affirmer sa présence dans une région aux potentiels économiques et diplomatiques importants. Début juillet, le Premier ministre Benyamin Netanyahou a effectué une tournée de quatre jours en Afrique subsaharienne, n’hésitant pas à proclamer haut et fort : « Israël est de retour ! ». UNE VISITE HISTORIQUE D’UN PREMIER MINISTRE ISRAÉLIEN EN AFRIQUE

Quelques jours à peine après un regain de violence du terrorisme palestinien en Israël, qui a fait deux morts et plusieurs blessés, le Premier ministre israélien s’est envolé pour l’Afrique noire. Cette visite en Ouganda, au Kenya, au Rwanda et en Éthiopie était justement placée sous le signe de la lutte antiterroriste dont le chef du gouvernement israélien s’est fait le fer de lance. Elle a du reste débuté symboliquement par une cérémonie de commémoration de l’opération Jonathan, menée par un commando israélien, le 4 juillet 1976, à l’aéroport d’Entebbe, 12

à quelques kilomètres au sud de la capitale ougandaise Kampala. Qualifiée par M. Netanyahou de « mission de sauvetage la plus audacieuse de tous les temps », l’opération Entebbe avait permis de libérer la centaine de passagers et de membres de l’équipage du vol Air France détourné par des pirates de l’air pro-palestiniens. Le frère du Premier ministre, Yoni Netanyahou, chef du commando, y avait trouvé la mort. LE SAVOIR-FAIRE ISRAÉLIEN AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE

Fort de son expérience dans la lutte contre le terrorisme qui le touche depuis sa création, l’État hébreu se pro-

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pose notamment de mettre son savoir-faire au profit des pays africains, eux-mêmes largement concernés par ce phénomène aujourd’hui mondial. M. Netanyahou a ainsi souligné à Nairobi, lors d’une conférence de presse commune avec le Président kényan Uhuru Kenyatta, l’importance de s’unir contre la « nouvelle forme de terrorisme qui menace tous [les] pays » de la région. Et d’assurer : « Je sais que coopérer nous aidera à défaire encore plus vite le fléau du terrorisme ». Au-delà de l’enjeu stratégique que représente l’Afrique pour Israël, en sa qualité de seconde ceinture derrière celle des pays arabes voisins de l’État hébreu, cette région du continent noir


les relations économiques et la coopération avec l’Afrique ». TROUVER UN NOUVEAU SOUTIEN SUR LE CONTINENT NOIR

Sur le plan diplomatique, Israël cherche à pallier sa solitude géopolitique au Proche-Orient, en s’attirant le soutien de l’Afrique, qui représente 54 états, soit un nombre de voix non négligeable dans des institutions internationales comme l’ONU. Dès le premier jour de la visite, l’Ouganda a accueilli un sommet régional réunissant le Premier ministre israélien et sept dirigeants africains. Au cours de ce sommet, les chefs d’État et de gouvernement d’Ouganda, du Rwanda, du Kenya, d’Éthiopie, du Soudan du Sud et de Zambie, ainsi que le chef de la diplomatie tanzanienne ont affirmé « l’importance des relations amicales entre leurs pays respectifs et Israël ». Ils ont par ailleurs souligné leur désir « d’ouvrir de nouvelles voies de coopération, s’appuyant sur le renforcement des capacités humaines et l’utilisation de technologies innovantes, notamment l’énergie renouvelable et le déveB. Netanyahou et le président Kenyan Uhuru Kenyatta

loppement durable ». Les dirigeants africains ont par ailleurs affirmé qu’ils œuvreraient à redonner à Israël un statut d’État observateur auprès de l’Union africaine, engagement chaleureusement salué par M. Netanyahou. Cette réconciliation avec l’Afrique subsaharienne s’est conclue par un discours du Premier ministre israélien devant le Parlement éthiopien, où il a martelé : « Israël revient en Afrique avec beaucoup d’ambition ! ». Yaël Ancri

1 MILLIARD DE DOLLARS

Total des exportations pour l’Afrique vers Israël

269 MILLIONS

DE DOLLARS Total des importations pour l’Afrique vers Israël

$

163 MILLIONS

DE DOLLARS

Total des contrats d’exportation de matériel militaire en Afrique (ANNÉE 2015)

© Kobi Gideon (GPO)

© Kobi Gideon (GPO)

présente un intérêt dans un double registre : économique et diplomatique. Israël le comprend dès l’accession à l’indépendance des états non arabes d’Afrique. Dans les années 1958-1960, l’État hébreu noue rapidement des relations avec les pays d’Afrique subsaharienne. Mais, elles se détériorent après la guerre des Six Jours en 1967 et celle de Kippour en octobre 1973, alors que le continent africain est largement dépendant du monde arabe en matière d’approvisionnement pétrolier. La plupart des pays d’Afrique noire rompent alors leurs relations diplomatiques avec Israël. Si la glace commence à fondre au milieu des années 1980, et surtout des années 1990, lorsque des liens diplomatiques ont repris officiellement avec certains pays, le volume des échanges économiques entre Israël et l’Afrique ne représente aujourd’hui que 2 % du commerce extérieur de l’État juif. Après plusieurs décennies de présence discrète en Afrique, Jérusalem cherche à prendre une place plus concrète dans une région en pleine expansion. « L’Afrique est un continent qui monte. Israël souhaite renforcer ses relations avec tous les pays qui la composent. Plusieurs dirigeants africains se sont rendus en Israël et je suis fier d’être le premier chef du gouvernement israélien depuis plus de 20 ans à effectuer une visite en Afrique subsaharienne. Après plusieurs décennies, je peux affirmer sans équivoque : Israël revient en Afrique et l’Afrique revient en Israël », a déclaré M. Netanyahou lors de la première étape de sa tournée africaine en Ouganda. Le chef du gouvernement israélien a répété ce leitmotiv dans les quatre pays qu’il a visités avec une délégation de 80 chefs d’entreprise israéliens. Plusieurs contrats et accords économiques ont ainsi été conclus au cours de cette tournée et le Premier ministre a appelé les entreprises israéliennes à investir en Afrique avec l’aide du gouvernement. Une enveloppe de 50 millions de shekels (environ 11,7 millions d’euros) a par ailleurs été approuvée par le gouvernement avant cette tournée dans le but de « renforcer

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© Ran Mendelson

RENCONTRE AVEC... LEMAG’

SOPHIE ARTUS DE L'ENSEIGNEMENT AU MONDE DU CINÉMA : LE PARCOURS ATYPIQUE D'UNE RÉALISATRICE ENGAGÉE

D

es années de professorat et d'observation de la jeunesse israélienne ont amené Sophie Artus à envisager une reconversion audacieuse. Dans le 7ème Art ! Son premier film est inspiré en grande partie de son expérience douloureuse dans l'enseignement. Emek narre ainsi le parcours chaotique de trois jeunes adolescents pris dans l'engrenage d'une violence qui gangrène leur quotidien. Dans la rue, à l'école, avec leur propre famille : ce sont les rapports de force qui prédominent, tout le temps. Un premier long-métrage qui n’est pas passé inaperçu avec une jolie moisson de prix récoltés dans les festivals internationaux. Retour sur le parcours singulier de cette réalisatrice, passée de l'ambiance délétère d'un collège difficile où elle enseignait la biologie aux plateaux de cinéma. Vous êtes arrivée en Israël il y a une vingtaine d'années. Quels

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étaient vos projets et ambitions à l'époque ? Dans quel état d'esprit étiez-vous ? Sophie Artus : Je suis arrivée en Israël en 1999. J'étais une petite jeune, étudiante et célibataire, avec un état d'esprit très enthousiaste ! J'ai fait une alyah assez spontanée et je me suis inscrite à l'Université Hébraïque de Jérusalem où j'ai entrepris des études pour obtenir une téoudat oraa (diplôme d'enseignement). Puis j'ai commencé un doctorat en neurobiologie. Vous enseignez ensuite la biologie au collège. Vous vous retrouvez alors face à une jeunesse israélienne difficile à affronter au quotidien, avec de nombreux problèmes de violence. Avec le recul, d'où venait la faille selon vous ? Du système éducatif ou d’une certaine démission des parents ? S.A : Je veux d’abord préciser que les difficultés que j’ai éprouvées étaient notamment liées à mon parcours. Arrivée

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en Israël, je sortais de l'Université qui était un monde assez protégé. Quand j'ai obtenu mon diplôme et que j'ai voulu travailler, le premier poste que l'on m'a donné était dans une école difficile et je ne le savais pas. J’ai été choquée par l'attitude et l'agressivité des élèves. J'avais mes propres difficultés, qui étaient celles d'une ola ‘hadacha. Mon hébreu était ce qu'il était et je me suis retrouvée dans des classes très difficiles. Je ne savais pas comment m'en sortir. Je ne comprenais pas. Je ne savais pas comment gérer ça et je n'y arrivais pas. Il y avait beaucoup de violence verbale, et aussi physique, des bagarres, bref, c'était une épreuve. Petit à petit, j'ai compris d'où venait cette violence. Pour certains élèves, il s'agissait d'une violence présente à la maison et qui ressortait à l'école. Pour d’autres, elle était indirectement générée par le système scolaire israélien qui ‘met les enfants dehors’ à partir de 13h30. Pour les enfants dont les parents ont la possibilité de payer des activités extra-sco-


Quel est le tournant décisif qui vous fait aller vers le cinéma ? S.A : Je ne l’ai pas cherché consciemment mais je sentais que je ne pouvais pas continuer dans l'enseignement. Pas dans ces conditions-là. C'est sans parler du salaire, très bas pour un professeur débutant…. En France, je faisais du théâtre. Mais arrivée en Israël, la barrière de la langue a freiné ma passion. Un peu par hasard j'ai trouvé un cours à Na’hlaot qui apprenait aux gens à filmer, à faire de petits reportages, et j'ai

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Quels étaient les défis auxquels vous étiez confrontée au quotidien ? Est-ce qu'il s'agissait de suivre coûte que coûte votre programme ou d'essayer d'abord de comprendre les difficultés de vos élèves en adaptant votre enseignement à la réalité ? S.A : Ça n'était pas possible de suivre le programme. Et puis, aussi, les directives étaient claires : sur quarante-cinq minutes de cours, si j'arrivais à enseigner dix minutes, c'était déjà pas mal ! On n'attendait pas de moi que je fasse le programme, mais que je tienne les élèves. Il fallait tenir chaque heure ! Donc forcément, c'était adapté à la réalité. Et puis, il s'agissait de classes nombreuses, trente à trente-cinq élèves. S'occuper de chaque cas prenait du temps. Il y avait, à ce moment-là, un manque de moyens et de possibilités pour gérer des situations pareilles, surtout pour une prof qui débutait. Je n'étais pas la seule d'ailleurs dans ce cas. Et je ne me suis pas sentie soutenue par le directeur de l'école. J'avais certes mes propres difficultés, mais le problème était global.

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SUR QUARANTE-CINQ MINUTES DE COURS, SI J'ARRIVAIS À ENSEIGNER DIX MINUTES, C'ÉTAIT DÉJÀ PAS MAL ! "

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laires, tout va bien. Mais les autres se retrouvent livrés à eux-mêmes et vivent beaucoup dans la rue.

intégré ce groupe. J'ai fait un premier court-métrage sur les colocataires avec qui je vivais à l'époque, qui a connu un certain succès et qui a été apprécié. Il est passé sur une chaîne de télévision. Je me suis sentie bien. J'aimais ça et j'ai décidé de changer de métier et de passer au cinéma. Je suis partie à TelAviv pour étudier dans ce domaine et j'ai continué à enseigner pour gagner ma vie. Mon objectif était vraiment de passer au cinéma, et c'est ce que j'ai fait.

MON CAS ÉTAIT ATYPIQUE : J’ÉTAIS UNE PROF DE BIOLOGIE QUI VOULAIT FAIRE DU CINÉMA ! " De votre passage à l'Université de Tel-Aviv pour étudier le cinéma, quels souvenirs gardez-vous ? Dans quelle mesure cela a-t-il été formateur pour la suite ? S.A : Tout d’abord, cela m'a apporté une crédibilité. Parce que mon cas était atypique : j'étais une prof de biologie qui voulait faire du cinéma ! Après ces études, je n'avais plus besoin de justifier tout ce que j'avais fait auparavant, qui j'étais, d'où je venais, etc… Comment monte-t-on un premier film en Israël ? Et sur ce type de projet, de sujet, avez-vous rencontré en pré-production des réticences, des frilosités ? S.A : Bien sûr que j'en ai rencontrées mais je pense que c'est propre à tous les cinéastes. C'est difficile justement parce que les moyens sont limités. En tant qu'étudiante, j'ai pu réaliser des court-métrages. Puis, quand j'ai écrit le scénario d'Emek, j'ai d'abord reçu une aide du Keren HaKolnoa (fonds de soutien au cinéma), et ensuite j'ai

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RENCONTRE AVEC... LEMAG’

Y-a-t-il des films références qui vous ont inspirée pour ‘Emek’ ? Qui ont provoqué votre désir de cinéma ? S.A : Il y en a beaucoup. Pendant l'écriture, je pensais au film ‘Elephant’, une œuvre assez connue qui a obtenu la Palme d'Or au Festival de Cannes en 2003 (sur un massacre commis dans un collège américain par un adolescent, ndlr). Ça n'a rien à voir avec mon film mais il y a cette même tension, on sait que quelque chose de dramatique va arriver. C'est aussi une histoire qui se passe dans une école, où des jeunes arrivent à s'introduire avec des armes. Par exemple, ‘La Haine’, de Mathieu Kassovitz, est aussi un film qui m'a inspirée. Le sujet est proche. Et là aussi, comme dans Emek, l'action se déroule en périphérie. Dans votre film, il y a ce thème récurrent que vous creusez d'une adolescence en souffrance, avec des personnages sur le fil du rasoir, écorchés vifs. Comment avezvous travaillé sur le plateau pour mettre les jeunes acteurs interprétant Josh, Linoy et David en condition ? S.A : Bien avant le tournage, je me suis portée volontaire pour aller enseigner 16

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trouvé un producteur qui a aimé le projet et qui m'a prise un peu sous son aile. Pour monter un film en Israël, on est obligé d'obtenir le soutien d'une fondation du cinéma. Il y en a plusieurs. Le processus est assez long, mais si le projet est retenu, on peut être financé à hauteur de 50 % du budget du film. Il faut alors chercher d'autres sources de financement, auprès des télés, par exemple. Il faut trouver la patience et le courage, mais pour moi cela s'est passé relativement bien. Concernant le sujet du film, je n'ai pas rencontré de réticences. Au contraire, les décideurs qui accordaient le financement ont compris qu'il y avait là un angle important.

dans l'école où j'ai filmé Emek. J'y ai donné un cours sur le jeu d'acteur et cela m'a permis de m'imprégner d'une ambiance, même si mes élèves ne ressemblaient en rien à mes personnages. J'ai pu tester mon scénario, voir si ça parlait aux jeunes. Le vrai travail se fait au moment du choix de l'acteur, pendant les auditions. C'est important, car il faut savoir choisir les bons interprètes. Il y avait beaucoup d'acteurs excellents mais je cherchais des profils particuliers. J'ai emmené ensuite mes comédiens avec moi à Migdal HaEmek. On a vu l'école. Je voulais qu'ils ressentent

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le rythme et l'ambiance de l'endroit, de cette ville. On a fait ensuite beaucoup de répétitions et d'improvisations. Même si elles n'ont pas été gardées dans les prises, cela les a beaucoup aidés. Ce sont des acteurs doués, très impliqués, qui croyaient à l'histoire, aux personnages. C'était, pour tous, leur premier film au cinéma et ils voulaient donc donner le maximum d'eux-mêmes. Comment avez-vous appréhendé l'accueil du public et de la critique en Israël ? S.A : Avant même que le film ne sorte,


il a été d'abord dans beaucoup de festivals à l'étranger. En Israël, il a aussi été sélectionné au Festival de Haïfa où j'ai gagné le Prix du Meilleur Premier Film et le Prix du Meilleur Acteur et d'autres prix ont suivi à l'étranger. Je savais que le film parlait aux gens, les sensibilisait, les faisait réfléchir.

C'EST SÛR QU'ÊTRE OLA ‘HADACHA EST UNE DIFFICULTÉ EN SOI. PARCE QUE FINALEMENT, ON ARRIVE UN PEU DE NULLE PART "

Que conseilleriez-vous à une personne qui souhaiterait réaliser son premier film ? Qu'est-ce qui vous semble essentiel pour mener un projet à bien en Israël ? S.A : En ce qui me concerne, je veux continuer à faire des films en Israël et à tourner en hébreu. C'est sûr qu'être ola ‘hadacha est une difficulté en soi. Parce que finalement, on arrive un peu de nulle part. Mais je n'ai jamais senti que je n'irais pas au bout du projet à cause de ça. Pas du tout. C'est néanmoins difficile de s'intégrer, et le fait est qu'il y a très peu de cinéastes olim ‘hadachim qui font partie de ce milieu-là. Mon conseil, c’est qu’il faut faire preuve de beaucoup de patience. Le choix du sujet et du film doit être au plus proche du réalisateur. Choisir un sujet, une histoire à laquelle on croit, et qui semble même vitale à faire, et tenir bon. Parce que ça peut prendre quatre, cinq ou six ans pour faire un film ! Il faut pouvoir garder son énergie jusqu'à la fin, quelle que soit l'étape, avec les financiers, les producteurs, les acteurs, au montage… Cette force, il faut la conserver, sinon on ne peut pas arriver jusqu'au bout. Dahlia Perez

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Quels sont vos prochains projets ? Y a-t-il des rôles, des thèmes que vous souhaiteriez aborder aujourd'hui en tant que réalisatrice ? S.A : Je suis assez intéressée par le thème du social en Israël. Mon film ‘Emek’ est dans cette veine et le prochain projet sur lequel je travaille en parle aussi, mais pas chez les jeunes. Du point de vue de la narration, ce sera assez différent et le ton sera aussi plus léger.

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ENTREPRENDRE LEMAG’

PARLEZ-VOUS « STARTUP » ? Chaque nouveau métier développe son propre vocabulaire. Le monde des startups ne fait pas exception à cette règle. Si certaines expressions sont facilement compréhensibles (application, business-angel), d’autres sont peu accessibles aux non-initiés. Pour s’y retrouver, leMag’ vous livre quelques-uns des mots-clés de cet univers à cheval sur plusieurs domaines (la finance, les marchés, la recherche, la science, les consommateurs, etc). Par David Jortner

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Groupe d’experts et de personnalités rassemblés par les fondateurs d’une startup pour se faire conseiller sur la stratégie et la conduite des affaires.

BFR

Besoins de fonds de roulement Provisions pour financer le décalage entre les dépenses d’une startup et ses recettes.

GESTION FOURNISSEURS

STOCKS

FONDS DE ROULEMENT

GESTION CLIENTS

CAISSE

DIVERSIFICATION Un investisseur prudent ne placera pas tous ses œufs dans le même panier. Il répartira ses fonds entre des startups technologiques, énergétiques, pharmaceutiques, ou autres (développement durable, ou applications facilitant la vie quotidienne).

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BURN RATE Vitesse (calculée en mois) à laquelle une startup consomme du cash, avant de générer des revenus.

COMMUNITY MANAGEMENT Activité consistant à créer des liens entre la startup et les « communautés » d’utilisateurs et/ou les partenaires, à être présent sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, etc.), à publier des contenus (blogs, vidéos YouTube, etc.) et à organiser des événements où l’on rencontre les « vrais gens ». Elle permet d’identifier des dysfonctionnements et d’anticiper des crises.

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ADVISORY BOARD


PAROLES DE STARTUPS

Au moment du lancement : « Convaincu par notre pitch, notre advisory board est prêt à nous trouver un incubateur. En attendant, on va approcher quelques hedge funds. Toute love money sera bienvenue ! ».

Après un an d’activité : « Bien qu’on contrôle très strictement notre burn rate, nos besoins en BFR creusent notre equity gap. Notre community manager a de bons retours sur notre MVP. On espère lancer une IPO avant deux ans, histoire de sortir un EBIDTA intéressant ».

EBITDA

EQUITY GAP

Indicateur développé aux ÉtatsUnis, maladroitement traduit par « excédent brut d’exploitation ». Ce chiffre donne une idée du bénéfice d’une startup avant paiement des parts sociales, des intérêts, des taxes et de l’amortissement.

Se dit du trou d’air habituel dans le financement des startups entre le démarrage et le développement.

(EARNINGS BEFORE INTEREST TAXES DEPRECIATION AND AMORTIZATION)

EXIT

C’est le moment où les investisseurs « sortent » de la startup, soit en retirant le cash qu’ils y ont placé, soit en rachetant l’entreprise, soit en l’introduisant en Bourse.

FUSION INVERSÉE

Plutôt que d’entrer en Bourse sous son appellation d’origine, une startup peut racheter une entreprise publique en grande difficulté et mouler ses opérations dans cette « coquille vide ». Elle prend alors le risque de souffrir de la mauvaise image de marque de l’entreprise-hôte mais hérite de son portefeuille clients.

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ENTREPRENDRE LEMAG’ PARLEZ-VOUS « STARTUP » ?

GAZELLE Se dit d’une startup qui passe le seuil critique de 50 employés et qui est en forte croissance.

Fonds d’investissement indépendants de toute cotation boursière qui espèrent, par effet de levier, engranger de fortes plus-values. Placés sur des concepts à risque, ils jouent un rôle important dans le succès de startups au business-plan jugé aléatoire.

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HEDGE FUNDS IPO INCUBATEUR (INITIAL PUBLIC OFFERING) Lieu d’hébergement d’une startup (qui peut être : un laboratoire de recherche, une grande école, un centre d’affaires, une zone industrielle, etc.).

KICKING

( de l’expression “kicking the tyres“. Littéralement « taper dans les pneus », en argot américain ) : Faire une recherche approfondie sur les points faibles d’une startup pour décider – ou non – d’y investir.

LICORNES (UNICORNS) Startups, souvent américaines, qui ont réussi à lever plus d’un milliard de dollars auprès d’investisseurs. Elles sont de plus en plus rares depuis 2013.

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Introduction en bourse. Permet à la startup de lever des capitaux sur le marché financier pour se développer.

LeMag’+ info

La startup (ou jeune pousse) est une jeune entreprise innovante à fort potentiel de croissance qui fait souvent l'objet de levées de fonds. Le mot startup est un mot anglais d’origine américaine, ellipse de startup company. Il est composé de start (commencer, en anglais) et d’up, notion de hauteur, d'élévation. Il s'agit donc littéralement d'une « société qui démarre ». Ce terme est devenu populaire à la fin des années 1990 pendant la prolifération des dot-com (« point com » en français) où beaucoup de spéculations du marché boursier entouraient les petites startups liées aux technologies de l’information cherchant une entrée rapide en Bourse et promettant de fabuleux profits potentiels. Beaucoup de ces startups ont démarré comme spin-offs (filiales) de groupes de recherche universitaires. Le pic de l'engouement pour les startups, qui bénéficie aussi aux petites sociétés de biotechnologies et aux sociétés minières junior, a lieu entre 1997 et 2001. En 2009, Saul Singer et Dan Senor choisissent d’intituler un ouvrage consacré au dynamisme de l'écosystème entrepreneurial israélien, « Israël, la start-up Nation ». Le terme est entré dans le vocabulaire courant. David Jortner


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SANTÉ LEMAG’

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LA RITALINE DROGUE OU MÉDICAMENT ? De plus en plus d’enfants israéliens sont sous traitement de Ritaline. Or la forte parenté chimique du méthylphénidate, actif dans la Ritaline avec les amphétamines, est à l’origine d’une inquiétude sur cette molécule. S’agit-il d’une drogue ou d’un médicament ? La réponse à cette question n’est pas simple.

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SANTÉ LEMAG’

GÉNÉRATION RITALINE En Israël, selon une récente étude menée par le Dr. Michael Davidovich, membre de la Faculté de médecine de Bar Ilan et à la tête du Département pour le développement de l’enfant à la Maccabi, la caisse de sécurité sociale la plus importante, un enfant sur sept est aujourd’hui diagnostiqué comme ayant un TDA-H (Trouble du Déficit de l’Attention Hyperactif ou Hypo actif). L’étude qui a porté sur 500 000 enfants de 5 à 18 ans sur une période de dix ans a révélé que le nombre d’enfants affectés est deux fois plus élevé en Israël que la moyenne mondiale et a plus que doublé ces dix dernières années. Même si l'on connaît les effets secondaires à court terme du méthylphénidate, (perte de l’appétit, troubles du sommeil, céphalées, dépression), ses effets à long terme soulèvent beaucoup d'inquiétudes chez les parents des enfants ayant un TDA-H. À cela, s’ajoute un potentiel d'abus des stimulants bien connu et l’existence d’un vrai marché noir de la Ritaline chez les étudiants israéliens. Il est donc naturel de s'interroger sur le risque de dépendance physique ou psychologique que la prise de cette substance peut entraîner chez l'enfant ou le jeune exposé à sa consommation.

ADDICTION OU ACCOUTUMANCE ? Les neurologues et psychiatres favorables à la Ritaline prescrite à bon escient, interrogés par leMag’, estiment que dans l’ensemble, avec le recul, il est possible d’affirmer que l’utilisation du méthylphénidate bien dosé et prescrit à bon escient expose à peu de risques sérieux. Dans la grande majorité de ses usages, ce produit ne peut pas être assimilé à

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une drogue dans la mesure où la dépendance est quasi inexistante, de même que l’accoutumance. Ils en veulent pour preuve qu’il n’est pas difficile de sevrer les enfants de ce médicament, s’il y a lieu, mais que bien au contraire, il faut toujours que parents et enseignants soient derrière eux pour vérifier qu’ils n’ont pas oublié de le prendre. En Israël, beaucoup suggèrent d’ailleurs d’arrêter le traitement le shabbat et pendant les vacances. D’autre part, il faut souligner que les enfants avec un TDA-H ont tendance à être facilement la proie de diverses formes d’addictions en général, mais rien ne

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prouve que la prise de Ritaline va augmenter ce risque, il s’agirait plutôt du contraire. Pour autant, même si la pharmacothérapie est le traitement du TDA-H dont les effets sont les plus rapides, il ne s’agit pas d’un traitement médicamenteux anodin. « Nous sommes conscient que la Ritaline est une substance chimique comme beaucoup de médicaments, mais nous n’avons pas les moyens financiers, ni le temps, d’envisager une thérapie cognitive pour l’instant. L’avantage de la Ritaline, c’est son efficacité quasi immédiate », précise Mickaël, dont le fils est sous Ritaline depuis quelques mois. « Notre fils a été diagnostiqué TDA-H hyperactif et la Ritaline a permis de mieux canaliser son énergie débordante. Il progresse mieux à l’école et il est aussi plus épanoui. Quant à nous les parents,


Le trouble TDA-H est souvent confondu avec l’hyperactivité. En effet, nombreux sont ceux qui croient que sans manifestation d’hyperactivité motrice, il n’y a pas de TDA-H. Ceci est faux et serait, selon certains experts, la raison pour laquelle moins de femmes atteintes du TDA-H sont diagnostiquées. Chez la femme, le TDAH a plutôt tendance à se manifester par de l’inattention ou une tendance à « être dans la lune » et moins par de l’hyperactivité motrice. De plus, l’hyperactivité motrice diminue souvent avec l’âge pour être remplacée par une agitation interne, moins visible, ou une hyperactivité cognitive. K.K

ce n’était tout simplement plus gérable au quotidien, nous étions épuisés, usés ». LE TDA-H EST-IL UNE MALADIE QU’IL FAUT SOIGNER AVEC UN MÉDICAMENT ? D’autres psychiatres soutiennent que le TDA-H n'est pas une maladie, mais un caractère particulier qui fait mauvais ménage avec la scolarité, les règles, l'immobilité et les contraintes. Ils sont de l’avis que ce désordre exige un traitement psychologique, et que le suivi médicamenteux est inutile. La commission ministérielle contre la violence en Israël qui coordonne la question du TDA-H au ministère de la Santé, interrogée par leMag’, affirme cependant qu’il s’agit avant

tout d’une maladie neurologique. « Les enfants qui ne sont pas traités sont les premiers à en souffrir, en particulier dans le domaine social », nous explique-t-on, avec des études scientifiques à l’appui. « Les recherches démontrent ainsi que les enfants ayant un TDA-H présentent un risque augmenté de toxicomanie, d’alcoolisme, de personnalité antisociale, de troubles de somatisation et de délinquance, susceptibles d’entraîner un comportement antisocial et violent, ou des symptômes d’anxiété et de dépression pouvant se manifester chez 25% des enfants atteints au cours de leurs années d’études et de rendre difficile leur intégration au sein de l’armée et dans la société en général. Par conséquent, il ne faut pas prendre ce trouble à la légère et un traitement précoce est conseillé, traitement qui diminue le

risque de problèmes à l'adolescence ou à l' âge adulte ». Encore faut-il pouvoir diagnostiquer un TDA-H avec justesse et avoir recourt à la solution médicamenteuse à bon escient. LE SPECTRE DU DIAGNOSTIC ERRONÉ Le diagnostic est un sujet épineux. Il n’existe pas de moyen infaillible de détecter ce syndrome, ni de marqueurs physiologiques fiables. Des chercheurs de l’Université de TelAviv et de Haïfa ont annoncé récemment avoir mis au point des tests impliquant des mouvements oculaires involontaires, mais ils en sont encore au stade expérimental. Dans les écoles, il n’y a pas de protocole mis en place. Les tests informatiques sont seulement un outil qui peut

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SANTÉ LEMAG’ donner une indication supplémentaire, mais ils ne sont pas considérés comme absolument nécessaires au diagnostic. Les parents interrogés confient avoir souvent le sentiment que le corps enseignant en sous-effectif qui doit gérer des classes en surnombre, semble encourager le recours à la Ritaline pour cadrer ces enfants turbulents, fréquemment surnommés les « shovavim » (perturbateurs).

Mon fils m’a dit que la maitresse commence son cours en demandant « qui n’a pas pris sa Ritaline ? » et dans sa classe, sur 30 élèves, ils sont plus d’une vingtaine à en prendre », confie Myriam au Mag’. Un diagnostic systématique et rigoureux s’impose donc, ce médicament ne devant être prescrit que par un expert. Yael Leitner, neurologue en pédiatrie à la tête du Centre de développement des enfants atteints du syndrome du TDA-H au Centre médical Sourasky de Tel-Aviv, comme de nombreux spécialistes en Israël, explique que le diagnostic demande une évaluation complexe qui nécessite un ou plusieurs avis médicaux fiables et une pléthore de détails sur le comportement et les performances de l'enfant dans les différents domaines de sa vie. Or de nombreux experts dénoncent un manque de coordination entre le corps enseignant et les médecins, comme étant la cause de nombreuses erreurs de diagnostic. Au ministère de la Santé, les professionnels estiment que pour l’heure, la meilleure façon d’éviter les ‘sur-diagnostiques’ et l’utilisation excessive du médicament, est de mieux former

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les médecins, pédiatres et généralistes, neurologues et psychiatres ainsi que le corps enseignant. Très peu d’enseignants israéliens sont formés pour reconnaître le TDA-H et souvent le processus de diagnostique est défectueux. Les hyperactifs sont « repérés », parfois même à tort, alors que les hypo actifs qui devraient l’être, le sont plus difficilement. L’EFFET « PLACEBO » DE LA RITALINE Bien que l'on connaisse les effets à court terme de ce médicament sur le comportement, ses effets à long terme sur l'apprentissage et la réussite sont moins bien définis. De nombreux chercheurs pointent qu’il n'y a pas de preuve indiscutable que le méthylphénidate, l'ingrédient actif dans la Ritaline, améliore réellement la mémoire ou augmente les compétences cognitives dans tous les cas. Elle n’aurait même aucun effet sur environ 15% de ceux qui sont diagnostiqués avec le TDA-H. La Ritaline provoque une euphorie intense et son influence résiderait beaucoup dans le sens de l'éveil qui est induit, renforçant les sentiments de vigilance et de concentration. Le Prof. Avinoam Reches, neurologue et président du comité d’éthique de l’Association médicale d’Israël, estime que « l’efficacité de la Ritaline lorsqu’elle n’est pas médicalement justifiée, est aussi renforcée par un effet placebo. Son influence intervient alors notablement au niveau psychologique, mais pas nécessairement au niveau neurologique, dans la mesure où la seule pensée de la prise de ce médicament améliore la concentration du consommateur, convaincu de gagner en concentration s’il est sous Ritaline ». Il y aurait dont bien un risque de dépendance selon lui, mais davantage psychologique. Dans ce cas, la Ritaline est alors utilisée comme un dopant, par ceux qui ne sont pas affectés par le TDA-H.

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LE DOPAGE À LA RITALINE Les organismes de santé publique ne communiquent pas d’informations précises sur la géolocalisation des consommateurs de Ritaline, ni sur leur niveau social, mais on reconnaît sous couvert d’anonymat que la prise de ce médicament est plus importante chez les personnes d’un milieu social élevé et les habitants du centre du pays. Dans la mesure où la scolarité constitue un filtre social permettant d’accéder aux métiers les mieux rémunérés, certains parents préoccupés par l’avenir de leurs enfants soumis au devoir d’excellence, poussent au traitement médicamenteux. La pression sociale et l’obligation d’excellence pousseraient donc à se ‘doper’ à la Ritaline, faisant miroiter de meilleurs résultats scolaires, de meilleures performances sportives, et des compétences accrues à l’armée. Comble d’ironie, ceux qui n’en prendraient pas se sentiraient parfois désavantagés, voire pénalisés, par rapport à ceux qui en utiliseraient ! Une enquête anonyme menée auprès de 1156 étudiants universitaires à travers le pays a révélé que 75% ont admis avoir recours à la Ritaline pour améliorer leurs résultats scolaires.


LE TDA-H, LE MAL DU SIÈCLE Les chercheurs s’accordent à dire que le TDA-H est congénital, (génétique ou acquis). À partir des études sur des jumeaux, on a pu déterminer que « l'héritabilité » (part des facteurs génétiques dans l'étiologie d'un trouble) était de plus ou moins 80%. Le TDA-H est un trouble polygénique, c'est-à-dire qu'il est associé à une constellation de défectuosités dans de nombreux gènes. Chacun d'entre eux explique une partie infime de l'apparition de la pathologie. Par ailleurs l’environnement est aussi responsable de l’augmentation de ce syndrome et tout particulièrement les avancées des nouvelles technologies ce qui expliquerait en partie son caractère exponentiel. Téléphones cellulaires, Facebook tout ce monde digital, requiert d’être multitâche. La multiplicité des écrans, smartphones, télévision, engendre une incapacité à gérer l’augmentation du flux des informations, de plus en plus rapides qu’il faut absorber et qui monopolisent l’attention, et entraîne une capacité de concentration réduite. À noter que les enfants élevés devant des écrans ont plus de difficultés à communiquer une fois qu’ils ne sont plus devant, comme à l’école, par exemple, où il est plus difficile de capter leur attention. Des études ont montré que les tout-petits exposés à la télévision et aux ordinateurs avant l’âge de 2 ans sont plus susceptibles de développer le TDA-H. K.K 14% ont obtenu une prescription de leur médecin, 51% ont obtenu le médicament d'un ami qui avait sa propre ordonnance et 24% ont acheté des comprimés au marché noir sur le campus, à un prix qui oscille autour des 20 shekels par pilule, mais qui peut atteindre 50 shekels. « Il y a des enfants et des adultes qui ont été sauvés par ce médicament. Mais il y en a d'autres qui l'utilisent parce que la pression sociale est trop forte ou parce qu'ils pensent que cela va améliorer leurs performances entre autres aux examens », reconnaît Yael Leitner.

tumance concerneraient une petite partie des consommateurs, essentiellement adultes, qui peuvent chercher dans ce produit une excitation artificielle. Le Docteur Hadar Yardeni, pédiatre à la tête du Département pour le développement et la réadaptation de l’enfant au ministère de la Santé, explique que l'ingrédient actif dans la Ritaline peut être « sniffé » par voie nasale par des sujets qui ne souffrent pas de TDA-H pour créer un "effet de speed", voire même injecté par intraveineuse. Ces

substances de type amphétamines, administrées à mauvais escient et à haute dose, peuvent alors provoquer le même genre d’effets physiques que d’autres formes de drogue : perte d’appétit, insomnie, accélération du rythme cardiaque. Selon ‘la Fondation pour un monde sans drogue’, l’action sur le cœur du méthylphénidate, consommé comme une drogue, peut être mortelle. Une fois injectées dans le sang, des particules solides bloquent les petits vaisseaux sanguins, provoquant

RITALINE ET PARADIS ARTIFICIELS Ce produit est classé dans la classe des « stupéfiants » en France, d’où le lourd carcan administratif qui encadre sa prescription. En Israël, la Ritaline figure dans la liste des « médicaments dangereux ». Le Dr. Eyal Schwartzberg, pharmacien en chef du ministère de la Santé, explique que le méthylphénidate n’est pas un médicament dangereux mais qu’il est classifié comme tel, afin que les organismes de santé puissent contrôler son utilisation de façon rigoureuse et éviter les abus. Sa prescription ne se fait en effet que pour un mois, renouvelable, et les généralistes ne sont autorisés à le prescrire que pour les adultes. La dépendance et l’accouAoût - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 27


SANTÉ LEMAG’ des lésions sérieuses aux poumons et aux yeux. Hormis l’impact physique, des troubles émotionnels graves sont également provoqués à court terme. Hallucinations et comportements psychotiques ne sont pas rares.

CONCLUSION

Les traitements non médicamenteux doivent faire partie du traitement du TDA-H ; thérapie cognitive-comportementale, apprentissage d’un comportement social adapté et pour

les parents, une formation traitant des techniques de prise en charge de l'enfant ayant un TDA-H. En conséquence, même si la Ritaline peut avoir un effet bénéfique sur l'inattention, sur l'hyperactivité/impulsivité et l’hypoactivité et permettre une amélioration du comportement et des résultats scolaires chez 60 à 80% des enfants diagnostiqués avec un TDA-H, on devrait éviter de faire de la médication, la seule thérapie entreprise pour aider l'enfant. Des stratégies d’adaptation bien assimilées

suffisent parfois à gérer les problèmes scolaires ou comportementaux, sans avoir besoin de recourir à la médication qui représente parfois une solution de facilité évitant de faire face aux problèmes de fond. Tout l’art du médecin sera de trouver un juste milieu dans son approche thérapeutique : toujours privilégier la pédagogie familiale et les mesures d’adaptation, mais savoir aussi en prescrire lorsque c’est médicalement mais aussi socialement nécessaire. Kathie Kriegel

LES OLIM ET LA RITALINE Les protocoles étant différents en France et en Israël, l’incompréhension est totale. En France, ce médicament est classé dans la liste des stupéfiants et sa prescription est très réglementée par l'Agence du médicament, comme le confirme Nathalie Richard, médecin et directrice adjointe des médicaments en neurologie, psychiatrie, antalgie, rhumatologie, pneumologie, ORL, ophtalmologie et stupéfiants à l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) : « la prescription de méthylphénidate chez l'enfant doit se faire uniquement quand toutes les mesures à visée corrective, notamment les mesures d'accompagnement psychologique, ont été faites et n'ont pas donné lieu à une correction et à une "guérison" de l'enfant ». La Ritaline a donc très mauvaise presse dans l’hexagone et est loin d’être perçue comme une pilule miracle comme c’est parfois le cas dans le système israélien. Sa prescription n’est envisagée qu’en dernier recours. Or « les enfants olim de France en auraient presque tous besoin selon l’avis de leurs enseignants », confie David Gradovicz, médiateur entre les enseignants et les parents d’élèves pour le compte du ministère israélien de l’Éducation nationale. « Avec la alyah, les problèmes affectifs surgissent ou s’exacerbent. L’environnement est nouveau et la perte de repères qui touche aussi les parents, déstabilisante. En France, les en28

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fants sont très couvés, les structures scolaires sont très structurantes et il règne une certaine discipline qui cadre les enfants. En Israël, le système éducatif vise à responsabiliser les enfants et à les rendre autonomes. Par conséquent, les petits Français qui arrivent en Israël sont déstabilisés par ce système éducatif et deviennent vite turbulents. Dans un conseil de classe un jour, un instituteur a dit : « quand les Français arrivent, ce sont des petits poissons et trois mois plus tard, ce sont des requins ». Tous les Israéliens ont apprécié sa comparaison. Or les parents ne comprennent pas pourquoi en France leurs enfants qui étaient considérés comme de bons éléments, ne posant pas de ‘problèmes’, deviennent des ‘cancres turbulents, impossibles à gérer’ une fois arrivés en Israël. Pour eux, le problème vient des enseignants qui ne savent pas les tenir », nous explique David Gradovicz. Une totale incompréhension liée à la différence de culture règne donc entre parents nouveaux immigrants et corps enseignant, ce qui ne favorise pas la communication. Et alors qu’en Israël, il n’existe aucun tabou à diagnostiquer un TDA-H et encore moins à envisager la « solution » médicamenteuse, les Israéliens considèrent que les Français diabolisent excessivement ce médicament... À bon entendeur... K.K


TDA-H ET MÉDECINES DOUCES

Il existe un débat très actif entre ceux qui considèrent le méthylphénidate comme un médicament utile pour corriger un handicap scolaire ou social lié à une immaturité cérébrale, et ceux qui pensent qu'il est anormal de devoir modifier chimiquement le caractère des enfants pour qu'ils se plient à l'école et aux contraintes sociales. Explications. « Lorsque mon fils avait 5 ans, on m’a conseillé de consulter un neurologue pour qu’il le mette sous Ritaline, car il ne tenait pas en place deux minutes et « perturbait » la classe » confie Avigaël qui vit à Jérusalem. « De mon point de vue, il avait tout simplement trop d’énergie et n’avait pas la patience d’écouter la ganenette car elle n’était pas intéressante, donc il s’ennuyait vite. De plus, elles n’étaient que deux pour une classe de 30 enfants. J’ai alors énormément lu sur le sujet et j’ai été convaincue que la Ritaline est une drogue et il n’était pas question pour moi que mon fils en prenne ». Avigaël ne s’est pas opposée frontalement à la demande de la ganenette, mais a fait traîner le rendez-vous avec le neurologue prétextant des délais très longs. Son enfant n’a donc pas été diagnostiqué. Elle s’est alors tournée vers des solutions alternatives non remboursées, précisons-le, contrairement à la Ritaline…

Divers remèdes naturels existent. Le Dr. Adi Aran, expert du TDA-H et neurologue pédiatrique au Centre médical de Shaare Zedek de Jérusalem, pense que « certains produits chimiques environnementaux, tels que les organophosphates, peuvent contribuer au développement du TDA-H, ainsi que des colorants alimentaires et des additifs. Par ailleurs, un déficit en fer pourrait, selon certaines études, expliquer les anomalies des récepteurs défaillants. « Je me suis documentée sur le sujet et je suis convaincue de l’influence d’une mauvaise alimentation dans ce genre de problèmes », insiste Avigaël. « J’ai donc supprimé le sucre et toutes les substances chimiques de nos assiettes et nous sommes passés au 100% Bio ». Il est regrettable, que le diagnostic du TDA-H et des traitements cognitifs et psychologiques comme l’ergothérapie, doivent être payés par les parents ou, dans le meilleur des cas, couverts

par les municipalités aisées. Naturellement, les groupes socio-économiques plus élevés bénéficient donc plus facilement de ces solutions alternatives ou complémentaires, tandis que les populations moins argentées sont moins susceptibles d’en profiter. « Avec mon mari, nous avons pris un crédit bancaire pour pouvoir faire face aux frais tels que ceux d’un ostéopathe et d’un phytothérapeute », confie Abigaël au Mag’. « On lui a fait faire beaucoup de sport et on a pris à nos frais des activités parallèles d’éveil prodiguées par une éducatrice spécialisée ». Aujourd’hui le fils d’Abigaël a 12 ans. Il est toujours atypique, animé d’une grande curiosité intellectuelle. Il est l’un des meilleurs élèves en classe et on ne lui fait que des compliments sur lui. Créatif en sciences, il va intégrer une école très réputée… Et il n’aime plus le sucre. Kathie Kriegel

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VIVRE AUTREMENT LEMAG’

ISRAËL FACE À UN « TSUNAMI » DE RETRAITÉS Alors que l’espérance de vie ne cesse d’augmenter au rythme d’une année supplémentaire tous les quatre ans, soit de 6 heures/jour, Israël ne peut continuer à ignorer les implications de la crise du vieillissement…

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i au moment de la création de l’État, l’espérance de vie moyenne en Israël était de 66 ans, les baby-boomers de plus de 70 ans sont aujourd’hui 60 000 de plus chaque année. Les dépenses engagées par les employeurs en fonds de retraite, en soins de santé, de vieillesse, etc…constituent une part croissante des dépenses publiques. En 2015, ces prestations se sont élevées à 79 milliards de shekels, et ce déficit risque fort de se creuser dans les années à venir. Le Gouvernement, trop occupé entre sa politique de survie et ses réserves de gaz naturel, ne semble pas prêt à affronter une crise qui s’annonce aussi bien sociale, médicale, financière, que générationnelle. Car vivre plus vieux dans un monde où le coût de la vie augmente sans cesse et où les aides sociales sont symboliques, n’est pas aussi idyllique que l’on pourrait le croire. Selon une dernière étude menée par le ministère des Égalités Sociales, un nombre croissant de citoyens israéliens (sur 2700 cinquantenaires interrogés) ne veulent pas prendre leur retraite à l'âge officiel (67 ans pour les hommes, 62 pour les femmes). L'étude a également révélé que 7 femmes sur 10, âgées entre 55 et 58 ans, et 8 hommes sur 10, âgés entre 63 et 67 ans, ont l'intention de continuer à travailler après avoir atteint l'âge officiel de la retraite.

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On peut donc légitimement se demander pourquoi des gens qui ont travaillé toute leur vie veulent-ils continuer à le faire ? Pour Rivi Beller, PDG de Vehadarta, une ONG qui s’occupe des personnes âgées, « si par le passé, les gens vivaient 10 ans au plus après leur retraite, ce n’est plus le cas, car désormais ils vivent 25 à 30 ans de plus et quand leurs pensions ne suffisent pas, ces personnes sont obligées de chercher d'autres formes de revenus ». Ainsi, respectivement 11% et 8% des hommes et des femmes qui ont déjà pris leur retraite voudraient retourner travailler. Et de plus en plus nombreux sont les pseudo-retraités qui se rendent compte qu'ils n‘auront pas la chance de ralentir, même s’ils avaient initialement prévu de le faire. De plus, le Dr Aviad Tor-Sinaï, à l’origine de cette étude, a constaté que « les Israéliens, hommes et femmes confondus, considèrent la somme versée mensuellement par le Bitoua’h Léoumi comme leur principale forme de revenu de retraite ; d'autres y incluant ce qu’ils ont pu épargner par le passé ». Mais tous ne disposent pas d’un fonds de retraite. Seuls 6 hommes et 4 femmes sur 10 ont un fonds de retraite, et parmi ceux ne disposant d’aucun fonds, environ 70% des hommes âgés entre 63 et 67 ans, et 47% des femmes âgées entre 59 et 62 ans ont déclaré avoir l'intention de continuer à travailler après l'âge de la retraite. Le problème est particuliè-

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rement prononcé pour les travailleurs indépendants, où seulement moins de la moitié des femmes âgées de 59 à 62 ans disposent d’un fonds de retraite. Face à ces chiffres alarmants, la ministre des Égalités Sociales, Gila Gamliel, a reconnu que « la question de l'emploi après l' âge de la retraite est devenue préoccupante ». Dernier recours : prendre en considération les propos avancés par l’Ambassadeur du Burkina Faso, il y a un peu plus d’un an à Reuven Rivlin ? Henri Basia avait alors déclaré au Président de l’État : « Je sais qu’en Israël, les gens prennent leur retraite à l’âge de 67 ans. S’il vous plaît, nous avons besoin des connaissances de votre peuple. Vous pouvez les envoyer au Burkina Faso où ils pourront aider au développement agricole du pays. Nous nous souvenons combien l’aide que vous nous avez apportée dans les années 60 a été précieuse, nous vous remercions aujourd’hui de cette aide et vous prions de nous faire profiter du savoir de vos aînés ». Pas sûr cependant que les séniors israéliens aient envie d’entamer une nouvelle carrière au Burkina Faso… Ce d’autant plus que si 4 salariés sur 10 âgés de 50 ans affirment ne pas vouloir partir à la retraite avant l’âge de 67 ans, seul 1 salarié sur 10 confirme ces dires à l’âge de 65 ans... Naomie Ariel


Bonne nouvelle pour nos honorables citoyens aux cheveux blancs ! Fin juin, le comité interministériel a approuvé un projet de loi soutenu par la ministre des Égalités Sociales, Gila Gamliel, dispensant les personnes âgées de faire la queue dans les files d’attente. Cette loi s’applique aux bureaux de poste, banques, cinémas, centres culturels, stades, parcs nationaux et supermarchés. Selon Gila Gamliel, « Donner la priorité aux citoyens de plus de 80 ans est quelque chose que nous nous devons de faire en tant que société qui se respecte, car même sans cette loi, je ne doute pas que cette attitude, une fois prise se transformerait en norme sociale ». Pour la ministre, traiter les anciens avec égard reflète une « société saine et tolérante qui sait comment respecter et chérir ses citoyens les plus âgés ». N.A

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UN PEU DE RESPECT, VOYONS !


PORTRAIT LEMAG’ © Photo tirée du film documentaire " The Green Prince " . D.R

L’ESPION VENU DU HAMAS

L’INCROYABLE MISSION DU " PRINCE VERT " C’est l’une des plus formidables histoires d’espionnage de notre époque. Mosab Hassan Youssef – le propre fils du Cheikh Hassan Youssef, l’un des dirigeants du Hamas en Judée Samarie – a travaillé pour le Shin Beth pendant dix ans, de 1997 à 2007. Grâce à ses renseignements, des dizaines d’attentats ont été déjoués, des centaines de vies ont été épargnées. À quelles motivations a obéi ce jeune homme ? Qu’est-ce qui l’a conduit à passer du camp de la haine à celui de la paix ? Réfugié aux États-Unis, où il s’est converti au christianisme, son parcours témoigne que certains Palestiniens sont capables de se remettre en question. 32

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LE SHIN BET Le service de la Sécurité intérieure israélien, Shabak (‫ )שב"כ‬en hébreu, plus connu sous le nom de Shin Beth, est l’agence de contre espionnage israélienne. Le service de la Sécurité intérieure du pays prévient contre toutes attaques terroristes des territoires israéliens. Il s’occupe également de la protection des membres du gouvernement israélien.

LE HAMAS Le Hamas est un mouvement terroriste islamiste, dit de ‘’résistance’’, constitué d'une branche politique et d'une branche armée, principalement actif à Gaza. Créé en 1987, par trois Frères musulmans, sa charte affirme que « la terre de Palestine est une terre islamique ». Il prône donc la destruction de l'État d'Israël et l'instauration d'un État islamique palestinien sur tout le territoire incluant l'État d'Israël, la Cisjordanie, la bande de Gaza et la Jordanie.

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ien de disposait Mosab Hassan Youssef à devenir un espion au service du Shin Beth. Né à Ramallah, le 5 mai 1978, fils aîné du Cheikh Hassan Youssef – l’un des dirigeants du Hamas – il grandit comme tous les jeunes Palestiniens de cette génération. Son idéal est alors d'être un guerrier et de secouer le « joug sioniste ». Il a tout juste 10 ans quand il est arrêté par des gardes-frontières pour avoir jeté des pierres sur des Israéliens résidant en Judée Samarie.

AGENT DOUBLE POUR SE VENGER

Huit ans plus tard, en 1996, il est arrêté par les forces de sécurité israéliennes pour avoir acheté des armes. Dans sa biographie – coécrite avec le journaliste américain Ron Brackin – Mosab Hassan Youssef raconte les conditions de sa détention, et comment il a été approché par des agents du Shin Beth : « C’est à ce moment-là que j’ai eu envie de devenir un agent double. Je voulais me venger ». Ce qui lui permettra d’être libéré après quelques mois de la prison de Megiddo. De retour à Ramallah, il découvre avec horreur comment les services de contre-espionnage du Hamas traitent ceux qu’ils soupçonnent de collaborer avec l’ennemi : « Toutes les nuits, ce n’étaient que des cris ! Le Hamas torturait son propre peuple ! J’ai commencé alors à m’intéresser aux Israéliens et à abandonner l’idée d’être un agent double ». Au début, le Shin Beth ne lui demande pas grandchose : « Contente-toi d’étudier, de devenir un bon garçon. Après, on verra ce qu’on peut faire ensemble ». En attendant, on lui donne un nom de code : le Prince Vert, du nom de la couleur du drapeau islamique…

IL DÉCOUVRE LA BIBLE

Au cours de ces années, Mosab Hassan Youssef fait la connaissance d’un Anglais, chauffeur de taxi, qui lui donne une tra-

duction en arabe de l’Ancien Testament. Le jeune découvre alors un autre univers mental. On l’invite à des sessions d’étude de la Bible dans un hôtel. Il s’y rend. Ce qu’il entend est à des milliers d’années lumières des prêches islamistes : « J’ai eu l’impression que la grâce, l’humilité, l’amour, me tombaient dessus ». Le christianisme qu’il découvre n’a rien à voir avec celui des Arabes chrétiens qu’il pouvait connaître. Par contraste, il commence à comprendre comment les politiciens palestiniens utilisent le sentiment religieux des masses arabes pour les encourager au sacrifice. Dans sa biographie, il écrit : « C’était comme des vaches qu’on mène à l’abattoir, et eux ils pensaient aller au paradis ! ».

DES INFOS DE PREMIÈRE MAIN

C’est au début de la seconde Intifada, en septembre 2000, que le Shin Beth va commencer à utiliser les services de Mosab Hassan Youssef et le faire passer de l’état de taupe à celui d’informateur. Il faut dire qu’il est excellemment placé pour fournir des infos de première main. Souvent, il accompagne son père, l’un des dirigeants du Hamas en Cisjordanie, lors de ses rencontres avec Yasser Arafat. Grâce à lui, le Shin Beth saura que les fameuses « brigades des martyrs d’Al-Aqsa » étaient en fait constituées par des hommes de la garde rapprochée d’Arafat. Grâce à lui, des attentats en préparation contre Shimon Pérès en 2001 et l’un des Grands rabbins d’Israël ont pu être déjoués. Grâce à lui encore, plusieurs cellules de commandos suicides ont pu être identifiées et neutralisées. Au total, il aura sauvé des centaines de vies. Son seul regret, c’est de n’avoir pas réussi à convaincre son père à engager des pourparlers avec Israël. " BEAUCOUP D’ISRAÉLIENS ME DOIVENT LA VIE " Selon son officier traitant au Shin Beth, un certain « capitaine Lokhaï » maintenant à la retraite, c’est au cours de sa conversion que Mosab Hassan Youssef devient de plus en plus conscient de la valeur de la vie. C’est ainsi qu’empêcher des meurtres Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 33


PORTRAIT LEMAG’

MA TÊTE EST MISE À PRIX PAR LES ISLAMISTES…

devient sa principale motivation : « J’ai vu trop d’attentats, trop de morts. Sauver une vie humaine, la vie de qui que ce soit, c’est vraiment quelque chose de grand, de vraiment beau. Beaucoup d’Israéliens me doivent la vie. Mais beaucoup de Palestiniens, beaucoup de terroristes, de dirigeants me doivent aussi la vie ». Il déclare avoir, à de nombreuses reprises, réussi à convaincre le Shin Beth d’arrêter tel ou tel activiste dangereux plutôt que de l’éliminer. Et parmi eux, son propre père : « Je lui ai évité de connaître le sort de Cheikh Yassin ! ». Fin 2006, se sentant grillé, Mosab Hassan Youssef annonce à ses contacts du Shin Beth qu’il veut arrêter de travailler pour eux. Les Israéliens ne le laisseront partir qu’à contrecœur. Le réseau d’études bibliques avec lequel il était en relation lui propose de s’installer à San Diego, en Californie. Il s’y établit en 2007 et demande l’asile politique, mais celle-ci lui est refusée : les propos qu’il tient dans son livre sont mal interprétés par les autorités américaines qui menacent de le déporter. Il faudra que son ancien officier traitant, Gonen BenItshak, vienne témoigner en personne devant les services de l’immigration américaine, pour que lui soit reconnu – le 30 juin 2010 – le statut de « réfugié politique ». Depuis, Mosab Hassan Youssef, qui n’a pas le droit de quitter le territoire américain, intervient régulièrement sur les médias à propos de la situation au Moyen-Orient. Un documentaire sur le « Pince Vert » a été primé au Festival du film Sundance en 2014. Et un film d’action sur sa vie est en préparation.

David Jortner

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© DR

RÉFUGIÉ POLITIQUE

De sa conversion, Mosab Hassan Youssef déclare : « Je n’ai pas changé de religion pour m’enfermer dans une nouvelle boîte, avec une autre étiquette dessus. Je n’essaie pas de convertir quiconque. Mais ce dont je suis sûr, c’est qu’il faudrait éduquer davantage les gens à l’amour, au pardon, à la grâce. Le problème, avec les Musulmans, c’est qu’ils adorent un ‘dieu terroriste’ qui n’existe pas. Ils ont besoin d’être libérés de ce ‘dieu’. Ça fait plus de 1400 ans qu’ils en sont prisonniers ! […] Mon peuple se bat pour sa libération. Ils veulent détruire Israël pour être libres. Mais chaque jour, ils adorent un ‘dieu’ qui est leur ennemi le plus mortel. Qu’arriverait-il si Israël disparaissait de la carte du monde ? Y aurait-il la paix dans la région ? Pas du tout : les Palestiniens se tueraient entre eux. Je vous le garantis […] Je sais que ce sont des mots très dangereux. Au MoyenOrient, ma tête est mise à prix. Les islamistes ont raison de vouloir me tuer. Mon but est de vouloir les convaincre. Et avec d’autres héros qui agissent dans l’ombre, nous allons semer l’incertitude dans leurs esprits. Nous allons les aider à comprendre que leur ‘dieu’ n’a pas de moralité, qu’il est vraiment dangereux ». David Jortner


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ÉTAT DES LIEUX

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PARADIS FISCAUX : COMMENT TOUT A COMMENCÉ ?

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L’IMMOBILIER AUSSI DEVIENT TRANSPARENT


DOSSIER

TRANSPARENCE FISCALE LE NOUVEL ORDRE MONDIAL Quand il est fondé en 2000, personne ne sait encore que le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales va être à l’origine d’un nouvel ordre fiscal international, un nouvel ordre mondial en quelque sorte. Faisant mentir l’adage millénaire selon lequel l’argent n’a pas d’odeur, les dirigeants de cette institution ont réussi en moins de vingt ans à établir une traçabilité parfaite de la monnaie. Pourquoi ? Comment ? Quelle place occupe Israël dans cette nouvelle vision du monde et de quelle manière les Franco-Israéliens s’y conforment-ils ? LeMag’ a enquêté.

Dossier coordonné par Caroll Azoulay

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L'AVIS DES EXPERTS

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QUELS SONT LES RISQUES ?

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DOSSIER

ÉTAT DES LIEUX

Derrière les soucis du contribuable lambda inquiet de voir les banques et le Fisc prendre le contrôle de son porte-monnaie, la lutte contre l’évasion fiscale impose désormais une transparence inéluctable aux établissements financiers, entièrement validée et approuvée par les États. De nombreuses raisons expliquent cette situation qu’il est nécessaire de connaitre un peu plus en profondeur pour mieux la comprendre.

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n mai dernier, l’OCDE remportait une nouvelle victoire. Cinq pays récalcitrants à coopérer en matière fiscale (Bahreïn, le Liban, Nauru, Panama et Vanuatu), prenaient « l'engagement d' échanger automatiquement avec les autres pays adhérant à la norme des renseignements relatifs aux comptes financiers ». « Une dynamique que rien ne peut arrêter est désormais enclenchée et, s'incarnant dans une norme commune unique élaborée par l'OCDE et approuvée par la communauté internationale, nous propulse sur la voie de l' échange de renseignements », déclarait alors le secrétaire général de l'OCDE, Angel Gurria. Désormais, ce sont 101 pays et territoires qui se sont engagés à mettre en œuvre l'échange de renseignements conformément à la norme approuvée en 2014 par le Forum de l'OCDE sur

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la transparence et l'échange de renseignements. Un tsunami mondial qui sonne le glas du sacro-saint secret bancaire, au plus tard d’ici 2018. À l’échelle européenne, c’en est déjà fini des petits échanges discrets avec son banquier. Le 12 juillet, l'Union européenne et Monaco ont signé un accord qui permettra, dès le 1er janvier 2018, l'échange automatique d'informations sur les comptes bancaires de leurs ressortissants respectifs. Il s’agit du cinquième et dernier accord en matière de transparence fiscale signé avec un pays tiers. Avant Monaco, la Suisse, le Liechtenstein, Saint-Marin et Andorre étaient également passés ‘aux aveux’ afin de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales en Europe et dans sa périphérie. « Le secret bancaire en Europe, c'est fini », a indiqué, en guise d’éloge

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funèbre, le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, qui assistait à la signature. On le comprend, cette réforme est désormais inéluctable. Et pour Israël, pas question de s’y soustraire. Désormais en effet, ni le ministère des Finances, ni la Banque d’Israël ne sont plus les véritables maitres des lieux. Pour Israël comme une centaine d’autres pays, c’est à Pascal Saint-Amans que l’on doit rendre des comptes (sic). Nommé directeur du Centre de politique et d'administration fiscales (CTP) à l’OCDE en 2012, M. Saint-Amans est entré à l’OCDE en septembre 2007 en qualité de Chef de la division chargée de la coopération internationale et de la compétition fiscale au sein du Centre de politique et d'administration fiscales. Il y joue un rôle clé dans l’avancement de l’agenda de la transpa-


TRANSPARENCE FISCALE

Selon les résultats d’une étude menée par la Commission d'enquête du Sénat français sur l'évasion fiscale en 2012, entre 30 et 60 milliards d'euros échapperaient au moins aux finances publiques chaque année. Pour le syndicat Solidaires-Finances publiques, ce montant grimperait entre 60 à 80 milliards d'euros par an. À titre de comparaison : le déficit de l'État français s'est élevé à 85,6 milliards d'euros en 2014.

rence fiscale mondiale. C’est en 2014 que celle-ci devient une réalité. Car même si l’on s’intéresse aux moyens de combattre l’évasion fiscale depuis 1996 (Sommet du G7 en 1996 à Lyon : « aborder les pratiques fiscales dommageables et les paradis fiscaux »), le 6 mai 2014 restera dans l’histoire la date de l’une des plus grandes révolutions financières du 21e siècle. Dans une déclaration, les ministres et représentants des pays membres de l’OCDE (dont Israël) et quelques pays non membres déclarent en effet leur détermination « à combattre l’évasion et la fraude fiscales internationales et à promouvoir la discipline fiscale internationale en mettant en place une assistance administrative mutuelle en matière fiscale et en instaurant des règles du jeu équitables ». Ils confirment que « l’échange automatique de renseignements relatifs

aux comptes financiers contribuera à la réalisation de ces objectifs » et considèrent que « l’évasion et la fraude fiscales compromettent la confiance des citoyens dans l’équité et l’intégrité du système fiscal dans son ensemble, ce qui nuit à la discipline fiscale volontaire de l’ensemble des contribuables, condition essentielle à l’efficacité de l’administration de l’impôt ». Ils reconnaissent en outre que « la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales permettra d’accroître les recettes qui contribueront à financer l’investissement public propice à la croissance, à assainir nos finances publiques et à offrir les services publics essentiels qui sont demandés par nos citoyens » et son conscients du fait « qu’avec la mondialisation croissante de l’économie mondiale, il devient plus facile, pour tous les contribuables, d’effectuer, de conserver et de gérer des placements par le biais d’institutions financières situées hors

de leur pays de résidence, et que les investissements à l’étranger peuvent échapper à l’impôt si les contribuables qui les détiennent ne respectent pas leurs obligations fiscales, au détriment de ceux qui paient leurs impôts ». Et d’en déduire : « que la coopération entre les administrations fiscales est essentielle pour lutter contre l’évasion et la fraude fiscales et promouvoir la discipline fiscale internationale, et que l’échange effectif de renseignements de façon automatique, encadré par des garanties appropriées, est un aspect déterminant de cette coopération ». Tout est dit. Il ne reste plus désormais qu’à procéder aux modifications des législations internes. Les pays signataires demandent à cet effet « au Comité des affaires fiscales de l’OCDE d’élaborer rapidement des commentaires détaillés propres à assurer une mise en œuvre cohérente de la nouvelle norme mondiale unique, ainsi que

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DOSSIER

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hébreu en Suisse s’élevaient à 8,6 milliards d’euros à la fin 2013. Une situation à laquelle Moshe Asher, directeur de l’administration des impôts, a décidé de mettre fin grâce à des enquêtes particulièrement approfondies. « Des centaines de millions d’euros vont rentrer dans les caisses, ce n’est plus qu’une question de temps ». Une hausse de 3,5 milliard de shekels d’impôts supplémentaires par rapport aux prévisions habituelles aurait ainsi été enregistrée par le Fisc israélien en 2015 grâce à une campagne menée pour menacer les mauvais payeurs, désormais plus facilement identifiables. 120 000 demandes de renseignements ont été envoyées à ces derniers incluant 48 000 possesseurs de biens immobiliers multiples ne déclarant aucun revenu locatif. Gain de cette opération : 725 millions de shekels collectés ! L’an dernier, en France, la lutte contre la fraude a permis de recouvrer plus de 12 milliards d'euros contre 10,4 milliards

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d'euros en 2014. Entre juin 2013 et mars 2016, 44 894 contribuables ayant dissimulé des avoirs à l'étranger ont tapé à la porte du fisc pour se dénoncer au service de traitement des déclarations rectificatives et soumettre une demande de régularisation fiscale. En 2015, cela a permis de récolter 2,65 milliards d'euros de recettes fiscales, dont 900 millions d'euros d'amendes et de pénalités. Pour l'année 2016, un objectif de rendement de 2,4 milliards d'euros est envisagé. Une source de revenus non négligeable pour les États qui se frottent les mains face à cette manne inespérée et à laquelle ils ne sont pas prêts de renoncer… Caroll Azoulay

TRANSPARENCE À L’AMÉRICAINE

© Photo Libre De Droits

les modalités techniques restant à finaliser y compris les informations et les orientations sur les solutions techniques requises, un format standard de déclaration et d’échange ». Tenant à battre le fer tant qu’il est chaud, l’OCDE fait depuis lors pleuvoir directives et autres recommandations destinées à inciter les pays à remplir leur engagement. Observés, auscultés, notés, ces derniers déploient un maximum d’efforts pour rester dans la course des bons élèves et décrocher une place honorable sur le peloton d’arrivée fixé à 2018. Conséquence d’une globalisation poussée à l’extrême, on se demande parfois si la transparence fiscale ne piétine pas la notion de souveraineté des États… mais l’heure n’est plus aux débats philosophiques. Justice et éthique sont désormais les deux principes sur lesquels la réforme se fonde pour traquer les tricheurs à l’échelle mondiale. Car c’est un fait, en échappant aux impôts, les plus gros d’entre eux représentent un manque à gagner substantiel pour les États. En 2012, l’organisation ‘Tax Justice Network’ - qui a compilé les données de la Banque mondiale, du FMI, des Nations unies et des banques centrales - évaluait les transactions mondiales transitant par les paradis fiscaux entre 16 000 et 26 000 milliards d'euros, soit entre 150 et 225 milliards d'euros de recettes fiscales qui ne rentrent pas dans les caisses des États du monde. La même année, le journaliste Antoine Peillon chiffrait à 600 milliards le montant des avoirs français dissimulés à l'étranger, dont environ 250 milliards détenus par des particuliers et le reste par des entreprises. Même problème en Israël. Selon des données de la Banque mondiale publiées en 2014, un cinquième de l’économie israélienne, soit 53 milliards de dollars, n’était pas déclaré. Soit deux fois plus qu’aux Etats-Unis. La Suisse semble d’ailleurs avoir été l’une des destinations préférées des fraudeurs israéliens. D’après les statistiques de la Banque nationale suisse, les fonds déposés par des ressortissants de l’État

Le 11 septembre 2001 marque non seulement le début de la guerre contre le terrorisme, mais également contre les réseaux financiers parallèles. Après l’attentat contre les Twin Towers, les services de sécurité américains se mettent à traquer l’argent sale du terrorisme au moyen d’enquêtes, d’investigations informatiques et électroniques. Ils découvrent alors que les fonds qui circulent dans ces circuits parallèles ne se résument pas seulement à ceux des groupes islamistes qui veulent détruire l’Occident. Une nouvelle croisade est en marche. Elle mènera au FADCA (Foreign Account Tax Compliance Act), la « loi sur l'acquittement des obligations fiscales relatives aux comptes à l'étranger », promulguée en 2010. Celle-ci impose notamment aux institutions financières internationales de transmettre aux autorités des informations sur les comptes bancaires détenus par les contribuables américains sous peine d'un prélèvement obligatoire de 30% à la source. En Israël, où l’on compte environ 300 000 à 400 000 citoyens américains, cette loi - bien que ratifiée officiellement par la commission des finances de la Knesset le 13 juillet dernier et ayant été mise en application (dans la pratique) par les banques - provoque un véritable tremblement de terre. Tandis qu’elle attire l’attention de l’Europe et de la France notamment, fin 2013, Pierre Moscovici, alors ministre de l’Économie, paraphe ainsi un accord franco-américain sur l'application de la FADCA. « Cet accord représente le socle du développement de l'échange automatique d'informations » affirme Pierre Moscovici, laissant entendre sa volonté de faire du FADCA un nouveau standard international de coopération fiscale. C.A


TRANSPARENCE FISCALE Quel intérêt pour Israël à devenir un bon élève ? « Israël travaille sans relâche pour améliorer sa position en tant que leader régional dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (…). Jusqu'à présent, ces mesures ont été couronnées de résultats et les réformes engagées ont été au fil des ans saluées par les organisations d’experts chargées d'évaluer ce qui est fait dans ce domaine. (…) Dans ce contexte, il devient de plus en plus réaliste qu’Israël puisse occuper une place en première ligne et au côté de quelques pays de premier plan, et participer à la conception de la politique et des règles à appliquer à tous les pays du monde ». Une sacrée ambition dévoilée par Madame anti-blanchiment en Israël : le docteur Dr. Shlomit Wagman- Ratner, à la tête de l’autorité israélienne de lutte contre le blanchiment et la lutte financière anti-terrorisme. « Un vœu pieux », diront certains. Et ils se tromperont. Car Israël a un objectif bien plus élevé que de devenir un gentil élève appliqué au sein de l’OCDE. Celui de faire partie du Groupe d’action financière (GAFI) ! Cet organisme intergouvernemental créé en 1989 par les ministres de ses États membres élabore des normes pour promouvoir l’application efficace de mesures législatives, réglementaires et opérationnelles en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et les autres menaces liées pour l’intégrité du système financier international. Initialement fermé à 16 États membres, il s’est progressivement ouvert et compte aujourd’hui 37 membres. Dont deux membres observateurs que sont l’Arabie Saoudite et … Israël depuis juin 2016 ! Une véritable victoire pour l’État hébreu dont les institutions ont été passées au crible (avec succès) depuis 2014, date à laquelle Israël a demandé son entrée dans ce club ultra fermé et surtout ultra puissant… Prochaine étape : devenir État membre ?

L'ÉVASION FISCALE, C’EST QUOI ? L'évasion fiscale est une pratique qui a pour but de diminuer la charge fiscale. Ainsi, un particulier ou une entreprise décide de placer de l'argent sur un compte à l'étranger, sans prévenir les autorités françaises, afin de ne pas payer d'impôts sur cette somme. Elle est considérée comme de la fraude fiscale et donc pénalement répréhensible.

LA LENTE ÉROSION DU SECRET BANCAIRE SUISSE

Pendant longtemps, la Suisse a refusé de livrer des informations bancaires sur ses clients à des tiers non autorisés. Une loi de 1934 justifiait le secret bancaire pour éviter que les nazis puissent exercer un chantage sur les Juifs restés en Allemagne. Après la Guerre, suspectée d’avoir collaboré avec Hitler, la France et les Etats-Unis exigent de la Suisse qu’elle révèle les avoirs qu’elle détient. Les banques suisses vont alors se livrer à une falsification des comptes détenus par des étrangers pour échapper à ces revendications. Au début des années 2000, les révélations d’anciens employés de banque – Heinrich Kieber, Rudolf Elmer, Bradley Birkenfeld, Hervé Falciani – lèvent le voile sur ces pratiques. Et en 2009, les 20 pays les plus puissants de la planète (le G20) vont s’engouffrer dans cette brèche et multiplier les pressions. La Suisse répond en proposant de prélever un impôt sur les comptes étrangers qu’elle détient et de le reverser aux États nationaux. Le G20, appuyé par l’OCDE, refuse cette proposition et s’entête à briser le secret bancaire suisse. Finalement, en juillet 2014, la Confédération helvétique définit des conditions pour échanger directement des renseignements fiscaux. Une loi est votée qui annonce la fin du secret bancaire pour 2018. Les détenteurs de comptes apprécieront ce délai qui leur laisse le temps de transférer leurs avoirs ailleurs… Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 41


KIRA RADINSKY CULTURE

UNE PROPHÉTESSE LA MUSIQUE ISRAÉLIENNE NOUS DANSPARMI TOUT SES ÉTATS

C'EST DANS L'AIR L'INVITÉ DU MAG' SPORTS D'ÉTÉ FRÉDÉRIC LEFEBVRE ET SI ESSAYAIT ? ISRAEL AUON COEUR

LeMag.co.il

JUIN - JUILLET 2016 N°8N°7 AOUT - SEPTEMBRE 201620 20

SANTÉ

FOCUS SUR LES BOBOS DE L'ÉTÉ COMPRENDRE LES ROUAGES DE LA SOCIÉTÉ ISRAÉLIENNE

TRANSPARENCE FISCALE TERRORISME ENNEMIS DE L'INTÉRIEUR POUVOIR JUDICIAIRE

VOUS N'Y QUAND LE SYSTÈME S'ENPAS RAYE ! ÉCHAPPEREZ PRÈS DE 200 MILLIARDS D'EUROS DÉTOURNÉS DES CAISSES MONDIALES

ET ISRAËL DANS TOUT ÇA ?

DOSSIER DÉMOCRATIE

Notre démocratie est-elle en bonne santé ?

L'INVITÉ DU MAG' GILBERT LA RITALINE MONTAGNÉ DROGUE OU MÉDICAMENT ?

SANTÉ

LeMag’N°8 N°7 JUIN-JUILLET 2016 LeMag’ AOUT - SEPTEMBRE 201620,00 20,00

FRANCE-ISRAËL

LE JEU DUSUR HADERA FOCUS ‘POKER-FACE’

UNE VILLE AUX MILLE PROMESSES

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DOSSIER

PARADIS FISCAUX COMMENT TOUT A COMMENCÉ ?

C’est dans les Caraïbes, au cours des années 1960, que tout a débuté. Et plus précisément dans les îles Vierges Britanniques, les BVI (British Virgin Islands), situées à l’est de Porto Rico...

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n avocat d’affaires new-yorkais venu se reposer dans l’une de ces îles aux paysages enchanteurs et aux plages de sable fin a tout à coup une idée : prétextant développer l’économie locale – réduite à une petite agriculture, une pêche de subsistance et du tourisme  – il propose d’y créer une législation financière sur mesure qui exempterait d’impôts les sociétés étrangères qui viendraient s’y domicilier (sociétés dites « off-shore », littéralement : loin des côtes). En contrepartie du secret des affaires, ces sociétés off-shore

n’auraient que deux obligations : 1) s’acquitter chaque année d’un droit de licence de quelques centaines de dollars ; 2) utiliser un résident local faisant fonction de secrétaire et d’intermédiaire. Ces mesures, peu coûteuses, ajouteraient de nouveaux revenus aux modestes finances locales et créeraient un peu d’emploi. Aussitôt contacté, le chef du gouvernement des îles Vierges Britanniques, Hamilton Lavity Stoutt, donne son accord au projet. Une législation est votée, des banques locales sont créées. Le succès est immédiat !

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POURQUOI LES ÉTATS FONT-ILS LA CHASSE AUX PARADIS FISCAUX ? Principalement parce que des milliards de dollars en recettes fiscales leur échappent chaque année. Depuis le sommet du G20 en 2009, les responsables des principaux pays du monde ont décidé de se coordonner dans la lutte contre les paradis fiscaux. Leurs objectifs : obtenir des engagements en matière de transparence et d’échange de renseignements.


TRANSPARENCE FISCALE L’EXEMPLE DES ÎLES VIERGES BRITANNIQUES INSPIRE DE NOMBREUX PAYS Leur profil est souvent le même : des juridictions de petite taille, relativement peu peuplées, avec des économies peu performantes. C’est ainsi que beaucoup d’îles – des Caraïbes à l’Océanie, en passant par l’Océan indien – qui étaient jusque-là de petits paradis naturels, vont se reconvertir en paradis fiscaux, c’est-à-dire bancaires. D’ailleurs dans ces îles, il y a deux sortes de banques : celles réservées aux résidents locaux, et une seconde catégorie de banques titulaires de licences dites « de classe B », qui ne travaillent qu’avec la clientèle off-shore.

© Photo Libre De Droits

MAIS IL N’Y A PAS QUE LES ÎLES… De tout temps, les hommes ont cherché à soustraire leurs revenus à la curiosité du fisc. Dans la Grèce antique, les hommes d’affaires d’Athènes déposaient leurs avoirs dans les îles pour ne pas payer d’impôts. Au 18ème siècle, les colons américains se domiciliaient en Amérique latine pour contourner les taxes anglaises. À notre époque, bien longtemps avant que les paradis fiscaux s’installent dans des îles, d’autres paradis bancaires existaient déjà sur divers continents. En Europe, la Suisse, le Luxembourg, le Liechtenstein, la principauté d’Andorre et Monaco offrent

– ou plutôt offraient, car la pression des États les a contraints à devenir plus transparents – toutes sortes d’avantages fiscaux aux déposants. Aux États-Unis, avec l’État du Delaware, les sociétés américaines ont leur paradis bancaire à domicile : plus de 60 % des entreprises cotées à Wall Street y ont élu domicile. C’est le seul État où l’on dénombre plus de sociétés domiciliées – plus d’un million ! – que d’habitants… LES DERNIERS PARADIS BANCAIRES EN DATE N’ONT RIEN DE COMMUN AVEC LES ÎLES PARADISIAQUES DES CARAÏBES Il s’agit de pays ayant une économie florissante et aucune législation spécifique pour les sociétés non résidentes. C’est le cas des Émirats arabes unis, qui ne prélèvent aucun impôt sur les sociétés qui s’y sont domiciliées, estimant suffisants les revenus du pétrole et du gaz. Même chose à Hong Kong, Macao et Singapour : seuls les revenus des sociétés réalisés sur ces territoires sont taxés. Enfin – derniers arrivés – il s’agit de pays en voie de développement, principalement en Afrique (Botswana, Liberia) et en Europe Orientale (Bulgarie), qui ont décidé de copier une recette qui marche dans l’espoir de booster leurs économies. David Jortner

FERMER LES PARADIS FISCAUX ? VOUS RÊVEZ !

Jean-Marc Sylvestre, auteur d'une enquête à paraître sur les paradis fiscaux ne se fait aucune illusion : « Il faudrait évidemment une concertation internationale pour fermer les paradis fiscaux. Tout le monde est d’accord sur le papier. En pratique, les États, et même les plus sévères, sont assez réfractaires à une fermeture totale. Pourquoi ? Parce qu’une fois de plus, ça leur rend service. L’Amérique, qui est d’une extrême sévérité à l’encontre des citoyens américains, est d’un laxisme coupable à l’égard des pays voisins qui accueillent l’argent du monde entier sans demander de certificats d’authenticité. Le Panama est aujourd’hui le roi mondial des paradis fiscaux et des structures off-shore. L’Amérique tolère cette situation parce qu'elle lui permet d’asseoir son contrôle sur cette petite bande de terre étroite qui permet de passer d’un océan à l’autre. Et de contrôler les trafics qui s'y déroulent. Exactement comme la France peut consolider et contrôler l'argent sale qui vient se laver à Monaco. Nous sommes, ici même, en pleine hypocrisie. Chaque grande démocratie a fait une liste de paradis fiscaux où ses ressortissants ne peuvent pas atterrir. Par exemple, un Français n’a aucun intérêt à partir à Monaco. Mais un Allemand aura, lui, intérêt à venir à Monaco. Au passage, notons que la France, en interdisant Monaco aux Français, encourage l'argent des autres à venir sur le Rocher. Que cet argent soit sale ou pas. On est donc dans un système complètement pervers ». D.J Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 45


DOSSIER

L’ AVIS DES EXPERTS

Comptable, conseiller en patrimoine, avocat, directrice de société de crédit : ce sont eux qui peuvent nous offrir les éclairages nécessaires sur la nouvelle législation fiscale. LeMag’ s’est donc adressé aux pros.

Laurent Perez Analyste financier puis Broker auprès d’institutions financières de renom depuis 17 ans, Laurent Perez rejoint Herez en 2015. Il s'occupe de la relation client, des rapports d'audit et d'ingénierie patrimoniale. Avec son associé Jérôme Jarmoune, ils dirigent Herez Israël, la filiale israélienne d'Herez, société de Conseil en Gestion de Patrimoine Indépendante spécialisée dans la gestion privée, la gestion de fortune et le Family Office.

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Laurent Perez et Jérôme Jarmoune sont directeurs associés de la société de conseil et gestion de patrimoine Herez Israel. Spécialistes du sujet de notre dossier, ils ont répondu à nos questions.

faudra nécessairement tenir compte de cette situation particulière dans l’organisation du patrimoine, notamment en ce qui concerne sa transmission, laquelle, si elle n’est pas préparée avec soin, peut révéler des surprises.

Il semblait, jusqu’à présent, qu’émigrer n’impliquait pas de changement drastique au plan fiscal. Les choses ont-elles changé ? Parfois les contribuables français qui décident de s’installer en Israël confondent les notions de nationalité et de résidence fiscale. Aujourd’hui, la confusion n’est plus possible. Si la double nationalité française et israélienne est possible, on ne peut, par contre, être résident fiscal que d’un seul pays. C’est l’article 4 de la convention fiscale franco-israélienne du 31 juillet 1995 qui détermine les critères permettant d’établir le lieu de la résidence fiscale, et ainsi répartir l’imposition entre le pays source d’un revenu et le pays de résidence. Sont domiciliés fiscalement en Israël les contribuables dont le centre des intérêts vitaux se trouve en Israël selon les critères du lieu de domicile de l’intéressé et de sa famille, du lieu de son occupation principale, du lieu de ses intérêts économiques, de la durée de séjour en Israël. Il suffira qu’un seul de ces critères successifs soit rempli pour que le domicile fiscal soit fixé en Israel. Ainsi, il conviendra de regarder le second critère seulement si le premier n’est pas rempli et ainsi de suite. Les choses se compliquent souvent lorsque dans les familles et les parents s’installent en Israël alors que certains enfants décident de rester en France. Il

C’est-à-dire ? Prenons le cas d’un résident fiscal français qui a des actifs financiers en France, dont l’un des enfants réside en France et l’autre en Israël. Il y aura des droits de succession à régler. Alors que si l’on est résident fiscal israélien et que les enfants résident en Israël, il n’y aura pas de droits de succession à payer. Mais attention, cela n’est valable que pour les actifs financiers, car pour les biens immobiliers, c’est différent. Chaque cas est spécifique et nécessite une interprétation approfondie de la législation.

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Est-ce que l’on peut considérer que jusqu’à présent, les personnes entretenaient un certain flou sur leur résidence fiscale parce que cela pouvait procurer certains avantages ? J’aurai effectivement tendance à parler de ‘politique de l’autruche’, c’est à dire « pas vu, pas pris ». Essayer de jouer sur les deux tableaux, c’est jouer avec le feu. Quand on fait les choses correctement et que l’on prend conseil en amont sur un montage auprès d’un fiscaliste, on est en mesure de prendre des décisions qui ne nous mettront pas fiscalement en danger. La signature de l’accord de transparence fiscale avec l’OCDE a finalement précipité un peu


TRANSPARENCE FISCALE ces prises de décisions… C’est évident. La ratification par Israël a entraîné l’acceptation des règles sur la transparence qui sont destinées à lutter contre l’évasion fiscale dans le monde. Ce qui a obligé certaines personnes à faire des choix, et pas uniquement un choix de passeport… Une personne habitant en Israël, mais travaillant en France, est résident fiscal français [donc paye ses impôts en France] et doit déclarer en France tous ses actifs détenus à l’étranger [appartement, comptes bancaires, etc… ] qui seront soumis à l’impôt et peut être, à l’ISF. Il faut quand même préciser qu’il existe des conventions entre les deux pays qui permettent d’harmoniser les législations. Voulez-vous dire que ces conventions permettent la transparence mais ne sont pas là pour ponctionner les gens des deux côtés ? Bien entendu. Ces conventions ne sont pas là pour imposer doublement les contribuables mais ne signifient pas non plus l’absence totale d’imposition. En fait, dans des cas de figure spécifiques, vous payez un impôt en Israël et un complément en France. Exemple Vous êtes résident fiscal français et vous avez un bien en Israël que vous louez, les revenus locatifs perçus ne sont imposables qu’en Israël. Par contre, si vous êtes soumis à l’ISF, vous devez déclarer ce bien qui pourra être inclus dans le calcul de votre ISF. Ce qui est important de comprendre, c’est que même si l’on doit faire un choix de résidence fiscale, on peut faire en sorte d’optimiser le montage pour payer le minimum, entendu qu’il y aura toujours un impôt à payer. Qui sont les grands gagnants ou perdants de cette transparence fiscale qui s’est mise en place depuis deux ans maintenant en Israël ? Les grands perdants sont à mon avis ceux qui utilisaient Israël pour ‘cacher’ leur épargne, ce qu’ils ne peuvent plus

faire aujourd’hui, et c’est une bonne chose. Israël de son côté est gagnant, car son statut de startup nation avait besoin de s’adosser à une image de transparence fiscale et d’intégrité pour pouvoir attirer les investissements internationaux. Alors effectivement, il y a de nombreuses personnes qui se sont vues obligées de clarifier leur situation, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Maitre Ouriel Boubli est avocat et notaire au barreau de Tel-Aviv. Il dirige un cabinet israélien spécialisé en fiscalité, en droit commercial et droit de l’immobilier, dont la plupart des clients sont étrangers et francophones. Il nous livre son éclairage. « Suite à la loi américaine FADCA et au scandale déclenché par la Banque Leumi (en décembre 2014, la Banque Leumi, a admis avoir aidé des milliers de ses clients américains à dissimuler de l'argent à l' étranger. Elle a été notamment contrainte de payer plus de 400 millions de dollars en pénalités aux États-Unis et à l’État de New York et de remettre les détails de milliers de comptes aux enquêteurs), les établissements financiers sont devenus implacables. On est passé d’une extrême à l’autre, ce qui nous place devant des situations absurdes : difficultés à faire des virements d’un pays à l’autre, impossibilité de déposer de très petites sommes en liquide sur un compte ou encore extrême frilosité à offrir des services légitimes aux clients ». Selon maître Boubli, « il est important de comprendre que nous vivons désormais dans un village global extrêmement solidaire sur le plan fiscal. Jusqu’à présent, les demandes de renseignements se faisaient de manière ponctuelle, d’ici à septembre 2018 pour ce qui concerne Israël par exemple, les échanges automatiques d’informations seront systématiques. On ne sait pas encore quelle sera la portée rétroactive de ces échanges, un an, deux ou trois ans ? Il est encore trop tôt pour le savoir et de nombreuses questions restent

Maître Ouriel Boubli Avocat et notaire, est né en France, et vit en Israël depuis 33 ans. Il est diplômé de l'Université Hébraïque de Jérusalem.​

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DOSSIER encore sans réponses ». L’avocat pense qu’une certaine sérénité devrait succéder à la tension actuelle. « Pour l’instant, nous sommes dans une période de réformes, d’adaptation des lois nationales aux normes internationales et de mise à l’épreuve des méthodes de travail. D’ici un an ou deux, les choses devraient s’aplanir et devenir plus faciles à gérer, car les gens et les institutions se seront accoutumés à ce nouvel état de fait. En outre, puisque chacun saura que l’information est désormais accessible à tous, une confiance de fait s’installera car tout sera plus… transparent ». Selon Maître Boubli, beaucoup de personnes se sentent lésées. En effet, à sa création, Israël était ouvert à toutes sortes d’investissements. Encore récemment, Israël proposait le rachat de bounds* de l’État dans l’objectif de ramener des fonds dans ses caisses. Avec ces nouvelles mesures, Israël pourra demander des explications concernant les fonds alors investis dans ces bounds. Après la Shoah, il existait une pratique courante d’ouvrir un compte à l’étranger pour assurer son avenir. Comme nous l’avons précisé, le Monde d’aujourd’hui devient un village global avec des intérêts communs. Pour Maitre Boubli, il est important de trouver des solutions allant dans le sens des changements mondiaux. *Bounds : obligations.

Elodie Amsellem Bar – directrice de la société de crédit Eretz Investments Ancienne directrice d’agence BNP. 48

Elodie Amsellem Bar propose avec sa société Eretz Investments, basée en Israël, des solutions de crédit inédites pour les particuliers déjà propriétaires d’un bien en France et qui souhaiteraient se lancer dans un achat immobilier en Israël en contractant un prêt depuis la France. Ce domaine d’activités semble considérer d’un très bon œil la réforme liée à la transparence fiscale. « Cela a un aspect positif puisque les clients doivent impérativement, dans le cadre de cette loi sur la transparence fiscale, passer par le crédit pour leurs investissements », nous explique Élodie. En résumé, toute somme investie en Israël doit être justifiable et traçable, avantages pleinement remplis par le crédit ». Alors est-ce que les comportements des particuliers et des banques ont-ils changé à l’approche de la date fatidique de l’application de la loi ? « Chaque personne ayant un compte bancaire en Israël a été contactée par son conseiller financier qui lui a demandé de donner tous les justificatifs nécessaires et requis par la loi. Désormais, les sommes transférées doivent être justifiées, et d’ailleurs, les banques israéliennes sont en contact avec les banques françaises pour s’assurer de la légalité des transactions et que leurs clients ont payé leurs impôts en France ». Elodie Amsellem Bar se dit « consciente du fait que certains clients qui aiment jouer avec le feu se sentent un peu désemparés par ces nouvelles mesures » mais selon elle, « à moyenne/longue échéance, Israël n’en tirera que du bénéfice en termes de confiance et de notoriété. Tout le monde se rappelle de certaines histoires impliquant des banques israéliennes accusées de blanchiment d’argent. Tout cela est fini et n’est plus possible dans le cadre de la nouvelle législation ». Une nouvelle ère commence selon la spécialiste : « je suis convaincue que nous allons voir prochainement de grandes banques mondiales s’installer en Israël. C’est positif aussi pour les grandes sociétés israéliennes qui travaillent à l’interna-

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tional comme pour les sociétés internationales qui ont des filiales en Israël. Tout sera facilité pour eux ». À la question taboue de savoir si certaines banques contourneraient encore la législation en accordant des passe-droits à certains clients, Elodie Amsellem Bar reste prudente, comme tout le monde. « Je ne peux pas répondre à cela. À mon avis, ce ne sont que des bruits de couloirs et je doute que des banques prennent le risque de se voir infliger une lourde amende pour faire plaisir à certains clients, quels qu’ils soient. Mais à dire vrai, je n’ai pas d’informations concrètes », conclue-t-elle. Sandrine Uzan, conseillère fiscale en Israël depuis 2004 à Jerusalem « La fête est finie ! » déclare Sandrine Uzan en préambule. « Depuis le 24 novembre 2015, Israël a signé la Convention multilatérale concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale. En conséquence, les banques israéliennes se doivent dorénavant de renseigner les pays d’origine sur l’existence des comptes appartenant à leurs clients non israéliens. Elles doivent aussi vérifier l’origine des capitaux déposés dans ces comptes, et oui l’argent a désormais une odeur… » explique Sandrine qui précise que pour utiliser ou ouvrir un compte, le client non-israélien se devra de remplir un formulaire précisant sa résidence fiscale. « Afin de se soustraire à ces nouvelles réformes, nombreux sont ceux qui ont choisi de devenir israélien, d’autres ont préféré placer leurs capitaux dans un bien immobilier (par exemple) ». Mais prévient la spécialiste, « il est important de prendre conseil concernant le choix de sa résidence fiscale. Car dans ce domaine, l’automédication, la politique de l’autruche et les brèves de comptoirs sont formellement déconseillées. En d’autres termes, seul un spécialiste qui connait la loi est en mesure de répondre aux questions légitimes que toute réforme de cette nature peut susciter». Propos recueillis par Caroll Azoulay


TRANSPARENCE FISCALE

QUELS SONT LES RISQUES ? Les contribuables français qui détiennent un compte à l’étranger, non déclaré en France, sont susceptibles d’encourir une pléiade de sanctions. Le délai de prescription pour les infractions pénales en matière fiscale va passer de trois à six ans. Les peines sont portées jusqu'à sept ans de prison notamment et deux millions d'euros d'amende, contre cinq ans et 750 000 euros actuellement, lorsque les faits ont été commis en bande organisée. Le champ de compétence de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale est étendu au blanchiment de fraude fiscale. Cette "police fiscale" agira au sein du futur Office central de lutte contre la corruption et la fraude fiscale. Une meilleure articulation entre le ministère des Finances et des Comptes publics et le ministère de la Justice pour le déclenchement des poursuites judiciaires. L'administration des finances devra ainsi informer le juge d'instruction ou le procureur de la République, dans un délai de six mois après leur transmission ou à sa demande, de l'état d'avancement des recherches de nature fiscale effectuées à la suite des indications transmises. L'autorisation pour les enquêteurs de recourir à des techniques dites "spéciales" d'enquête (surveillance, infiltration, garde à vue de quatre jours, etc.). Les lanceurs d'alerte en matière de lutte contre la fraude fiscale seront protégés de toute sanction, licenciement ou discrimination dans leur emploi, avec une inversion de la charge de la preuve en leur faveur. Création d'un système de "repentis" prévoyant une exemption ou une réduction de peine pour les personnes coopérant avec la justice. Les associations agréées de lutte contre la corruption pourront se constituer parties civiles. (Source : ministère français des Finances)

À noter Les sanctions peuvent être minorées pour les fraudeurs dits « passifs », c’est-à-dire les contribuables qui découvrent l’existence de comptes ouverts à l’étranger lors d’une donation ou d’un héritage. Considérés de « bonne foi », l’administration fiscale les oppose aux fraudeurs dits « actifs » qui cherchent sciemment à échapper à l’impôt en dissimulant l’existence de tels comptes. Pour les fraudeurs passifs, les pénalités fiscales sont ramenées de 40 % à 15 % des impôts éludés et l’amende abaissée de 5 % à 1,5 % des avoirs non déclarés pour chacune des années non déclarées depuis 2010. Comment obtenir le statut de fraudeur passif ? Pour bénéficier de ce statut, il ne faut pas avoir alimenté le compte après l’avoir reçu ou après être rentré en France. Un quelconque versement, aussi faible soit-il, fera passer le fraudeur passif dans la catégorie des actifs. C.A

QUAND LA TRANSPARENCE SERT À LUTTER CONTRE LA DÉLÉGITIMATION D’ISRAËL Le 12 juillet dernier, la Knesset a approuvé (par une majorité de 57 voix pour et 48 contre) la loi visant à renforcer la transparence des ONG en les obligeant à divulguer leurs sources de financement en provenance de gouvernements étrangers. Désormais, les ONG ou sociétés d'utilité publique, principalement financées par une entité politique étrangère, seront tenues de le signaler dans leurs comptes annuels. Elles seront également obligées de le mentionner en bonne place dans leurs publicités sur les panneaux d'affichage, dans les annonces à la télévision, dans les journaux, sur la page d'accueil de leur site Web ou lors d'une campagne en ligne. Selon la ministre de la Justice, Ayelet Shaked, « la Knesset israélienne a dit « non » à des interventions flagrantes d’États étrangers dans les affaires intérieures de l'État d'Israël ». Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 49


DOSSIER

TRANSPARENCE FISCALE

L

e manque de logements en Israël fait monter régulièrement les prix de l’immobilier, les banques israéliennes (merci Stanley Fisher !) sont ultra protégées puisqu’elles limitent leur participation à la moitié de la valeur des biens, tout en réduisant au maximum les taux d’intérêts à long terme. Il faut désormais plus de 11 ans de salaire, à un Israélien moyen, pour acheter un appartement type, mais il y a de plus en plus de transactions immobilières en Terre sainte. Le fisc français l’a bien compris : les étrangers investissent en masse en Israël ! D’où l’intérêt de jeter un œil (voire plusieurs) sur les comptes bancaires et les inscriptions d’appartements au cadastre afin de repérer ces acheteurs et vérifier leurs déclarations dans leurs pays de résidence ou d’origine. Alyah administratives, changements de noms, on voit apparaitre régulièrement de nouvelles idées pour essayer de maintenir l’anonymat des acheteurs, mais rien ne semble vraiment fonctionner. Car la transparence semble inexorable ! Pourtant à côté des Américains, les Français sont des enfants de chœur ! D’ailleurs, nombreux sont maintenant les Américains qui hésitent à vendre leurs biens en Israël pour ne pas avoir à rapatrier le fruit de leur vente aux USA et se retrouver à justifier de l’origine des fonds initiaux ! Est-ce l’une des raisons pour laquelle notre ministre de la Justice, jeune, charmante et intelligente s’il en est, Ayelet Shaked, a annoncé en juillet dernier, de la manière la plus populaire qui soit sur Facebook, le lancement d’un pilote à Beer Sheva pour pouvoir inscrire et lever des mentions et hypothèques à distance,

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L’IMMOBILIER AUSSI DEVIENT TRANSPARENT…

par internet, au cadastre, et pour tous types de biens ? Jusque-là, la simple consultation des biens et des noms des propriétaires était possible, mais pour en savoir plus sur l’identité d’un propriétaire d’appartement, il fallait se déplacer en personne, patienter pendant des heures et commander un dossier qui prenait des semaines à être transmis sur papier. Aujourd’hui donc, et pour l’instant à Beer Sheva, toute personne agréée (avocats, contrôleur du fisc...) pourra connaitre depuis son bureau l’identité de tout propriétaire de bien et commencer à enquêter le plus simplement du monde. Et pourquoi pas, dans un avenir plus ou moins proche, à inscrire une saisie si notre propriétaire a « oublié » de déclarer son bien à l’étranger, ses revenus locatifs, ou encore une dette fiscale ! Bien sûr, sur le devant de la scène on justifie cette nouvelle procédure par la volonté de simplifier la tâche au public car lors d’une transaction immobilière, les avocats n’auront plus à se présenter en personne au cadastre mais pourront procéder directement à toutes les démarches nécessaires directement depuis leur bureau, par internet et en temps réel. Chouette, tout sera plus simple au quotidien. Et notamment pour les bureaux israéliens, français et américains du fisc… Alors, investisseurs, attention donc à bien déclarer tous vos biens, loyers et comptes bancaires, car que vous le vouliez ou non, le fisc est appelé à tout savoir sur votre patrimoine ! Sources : OCDE, Ministère de la Justice Israélien, FB Ayelet Shaked, Ministère des finances Israélien Déborah Hosatte


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LEMAG’

E

n 2014, plus de 50% des immigrants de France étaient âgés de 34 ans ou moins. Et selon un récent sondage Ifop, 64 % des jeunes Juifs de France – âgés de 24 à 34 ans  - considèrent sérieusement l’option d’une prochaine alyah. Enfin, une augmentation de 20 % d’immigrants âgés de moins de 19 ans (toutes origines confondues) a été enregistrée en 2015. Autant d’indices qui mènent à une conclusion sans appel. Les jeunes constituent désormais une proportion très importante de l’alyah de France. Envoyés en éclaireurs par leurs parents, ou arrivés avec leur famille, les 15-20 ans doivent trouver des structures d’étude appropriées à leur parcours afin de s’insérer en douceur dans leur nouvel environnement. À la veille de cette rentrée 2016, leMag’ s’est intéressé à trois options possibles, représentatives de l’éventail d’offres qui s’ouvre à ces jeunes Français ayant décidé de franchir le cap. ÉTUDIER EN ISRAËL OUI MAIS À LA FRANÇAISE ! C’est une nouvelle option qui s’ouvre

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Enfant étudiant sur le campus Mikvé Israël

désormais aux jeunes olim de France désireux de retrouver les repères d’études qui caractérisent les établissements juifs français. À partir de la rentrée prochaine, ils pourront en effet retrouver à Holon, le Collège Lycée Maïmonide RAMBAM à Mikvé Israël ! Les deux établissements ont conclu un partenariat qui permettra de proposer aux jeunes Français faisant leur alyah un programme d’excellence sur le modèle de l’école juive à la française. Un modèle inédit et unique en son genre qui répond à une demande de plus en plus importante des familles de trouver une école religieuse offrant la garantie d’un enseignement de qualité des matières laïques et des matières juives. Dès la prochaine rentrée (septembre 2016), l’établissement ouvrira des classes de Seconde, 1ère S et ES, Terminales S et ES, avec une préparation au baccalauréat français, sous la direction de Sylvia Elbaze actuelle directrice de Maimonide Boulogne. Au programme : une immersion dans un établissement israélien avec des cours communs aux deux filières, fran-

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ÉTUDIER EN ISRAËL çaise et israélienne, un programme académique français, allié à la créativité israélienne, une transmission et la pratique d’un judaïsme traditionnel et ouvert, l’apprentissage intensif de l’hébreu, une intégration à la société israélienne à travers des activités et excursions, le tout sous une direction franco-israélienne et avec les aides et soutiens apportés par le ministère de l’Éducation aux nouveaux immigrants… Pour la représentante de l'Alliance Israélite Universelle en Israël, Eva Lahbi, « ce magnifique projet résonne comme le commencement d’un prolongement de la vie juive française en Israël ». UNE ‘PRÉPA’ POUR AMORCER EN DOUCEUR L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR Leur bac en poche, ils ont choisi le Collège académique de Netanya – NAC - pour passer un an sur ce campus d’études supérieures israélien dans le cadre d’une Prépa Massa Business et Finance*. Objectif de l’opération : se fondre dans l’ambiance estudiantine locale pour ce test grandeur qui permettra à ces jeunes venus de toute la


LES CAMPUS DE JEUNES, ET POURQUOI PAS ? Attention, c’est du sérieux ! Avec 80 ans d’expérience dans l’insertion de jeunes immigrants dans le système scolaire israélien, plus de 40 000 jeunes garçons et filles effectuant leurs études secondaires en internats / campus de jeunes, 200 établissements secondaires, répartis dans tout Israël, accueillant des jeunes Israéliens et des nouveaux immigrants de la Cinquième à la Terminale, la direction de l’Éducation en Internat et de l’alyah des jeunes, s’impose comme une machine parfaitement bien huilée dans le domaine de l’éducation et de l’intégration. « Encore peu connue il y a quelques années, les familles françaises considèrent de plus en plus sérieusement l’inscription de leur enfant dans un campus de jeunes » explique Yoel Grumbache. Plusieurs raisons à ce choix : le professionnalisme des équipes enseignantes, l’aide sur mesure apportée aux jeunes olim de France, l’inspection des établissements scolaires aux niveaux pédagogique et éducatif, la prise en charge

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France de vérifier s’il existe suffisamment d’atomes crochus entre eux et ce campus, et plus globalement entre eux et Israël pour passer à l’étape supérieure : la citoyenneté israélienne, le shirout léoumi ou l’armée. « La majeure partie des participants Massa optent pour ce choix » explique Nicole Farhi, la directrice pédagogique de ce programme au Collège académique de Netanya, devenue célèbre au sein des étudiants pour son accueil et son sens de l’écoute légendaire. Dans le cadre de cette année, les étudiants bénéficient non seulement de l’encadrement propre à Massa (oulpan, découverte du pays, activités organisées), mais également de cours universitaires qu’ils pourront valider comme des Unités de Valeur comptant pour leur futur cursus au NAC (en Licence) s’ils y poursuivent leurs études. « Sur le plan économique et sur le plan identitaire, il semble que la jeunesse juive ne parvienne plus à se projeter en France » explique Nicole qui voit dans ce constat un « réel challenge à

relever. Au NAC, nous sommes prêts à relever le défi car nous avons élaboré et mis en place ici le programme le plus adapté qui soit pour offrir aux jeunes les meilleurs outils d’une intégration réussie en Israël ». *Le NAC est le seul établissement universitaire actuellement, à offrir la possibilité d’un cursus de type ‘Prépa’ spécialisé dans le Business et la Finance. Yoel Grumbache

totale des frais de scolarité en internat par l’Alyat Hanoar durant les deux premières années après la alyah et enfin, l’incroyable intégration des jeunes, lesquels bien que confrontés aux problèmes inhérents à leur âge et à la alyah, parviennent très rapidement à s’immerger dans le système. « Beaucoup plus vite que la moyenne » précise Yoel Grumbache. Parmi les 200 établissements appartenant au réseau des villages de jeunes, environ une vingtaine proposent un cursus d'intégration pour les élèves olim francophones. Traditionnalistes ou religieux (lycées yéchiva et lycées oulpena), ils répondent à la diversité propre à la communauté francophone et accueillent les enfants de la Troisième à la Terminale. Au total, les campus d’enfants, comptent 1000 olim français, dont 400 qui ont commencé leur cursus à la rentrée 2015. Un nombre équivalent est attendu pour la rentrée 2016. Ambre Bendayan

Cet été, 150 jeunes Français, présents en Israël depuis au moins un an, ont opté pour la nationalité israélienne, lors de cérémonies organisées par l’A.J, le ministère de l’Intérieur et le CNEF. Ils n’étaient que 80 l’an dernier.

ALYAH DE FRANCE 7.800 7.200

3.300

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1.900 2012

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L'INVITÉ DU MAG LEMAG’

FRÉDÉRIC LEFEBVRE

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LA FRANCE GÈRE SA RELATION AVEC ISRAËL, NON PAS AVEC LA PASSION ET LA VOLONTÉ DE COOPÉRATION, MAIS COMME SI ISRAËL ÉTAIT UN ALLIÉ ENCOMBRANT "

Vous avez clairement exprimé votre désapprobation concernant l’initiative de paix française en juin dernier… Fréderic Lefebvre : Effectivement, j’ai pris des distances très fortes avec l’initiative française car je considère qu’elle véhicule une instrumentalisation, pas seulement de la France d’ailleurs, mais aussi de tous les pays du monde sur la situation en Israël. Je pense qu’il faut s’inspirer d’Israël et de l’interconnexion très forte que ce pays entretient avec sa Diaspora. Si les pays arabes et la 54

Ancien ministre, candidat aux primaires en vue de l'élection présidentielle, Député des Français d'Amérique du Nord… En dépit de son impressionnant pédigrée, c’est en tout humilité que Frédéric Lefebvre, s’est récemment rendu en Israël « pour apprendre, étudier, et proposer des projets » à ce pays qui a toujours occupé une place très particulière dans son cœur. LeMag’ a donc décidé de l’inviter dans ses colonnes pour comprendre pourquoi.

diaspora arabe dans le monde avaient depuis des années investi sur les Territoires Palestiniens, alors peut-être que les Territoires Palestiniens seraient un lieu de réussite… C’est une position très forte que vous prenez. Qu’est-ce qui vous motive, quel est votre objectif ? F.L : Je pense qu’Israël que je connais bien et le peuple israélien pour lequel j’ai beaucoup de respect, vivent dans la peur et dans la guerre depuis de nombreuses années et j’en ai assez que beau-

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coup de pays du monde, ceux d’Europe et en particulier la France, donnent sans cesse des leçons à Israël. Avec la montée du terrorisme et de la peur, nous sommes en train de vivre ce que vit Israël depuis tant d’années. Il est temps d’essayer de bâtir la paix à travers l’économie. Cela a toujours été mon argument. Il y a déjà huit ans, j’avais rencontré Shimon Peres et nous avions longuement échangé sur ce sujet, car je défendais à l’époque un projet s’appuyant sur les startups pour créer des initiatives communes entre Israël


et les Territoires Palestiniens. En 2012, lors de mon passage en Israël en tant que ministre, et alors qu’Israël avait été mis au ban des Nations parce qu’il ripostait aux lancements de roquettes, j’inaugurais l’institut Vatel ainsi qu’un partenariat entre une grande école de gastronomie française – Ferrandi – et l’école Dan Gourmet, qui compte en son sein des professeurs et des élèves arabes et israéliens. Cette fois encore, ce sont de nouveaux projets de partenariat avec Israël que je viens promouvoir, car je considère ce pays comme un partenaire essentiel.

J’EN AI ASSEZ QUE BEAUCOUP DE PAYS DU MONDE, CEUX D’EUROPE ET EN PARTICULIER LA FRANCE, DONNENT SANS CESSE DES LEÇONS À ISRAËL " Votre position n’est pas politiquement correcte… Vous ne craignez pas que cela provoque des irritations, surtout en période électorale ? F.L : Je pense que les citoyens français - mais cela s’applique au monde entier ont besoin d’authenticité et de vérité. Je suis très inquiet de voir la montée des populismes partout. À Londres, aux États-Unis et en France, avec le Front National bien sûr, mais aussi au sein de ma propre famille politique, où l’on voit certaines personnes, qui par pur calcul, essaient de faire diversion, au lieu de parler des véritables problèmes sur lesquels il y a eu tant d’échecs par le passé… Aucune solution n’est proposée, juste des critiques incessantes de la part de l’opposition qui ne propose pas en parallèle une nouvelle route et un nouvel espoir… Toutes ces raisons m’amènent à penser que si l’on veut recréer un lien de confiance avec les citoyens, il est temps de dire la vérité. De surcroit, la situation est trop importante, dans cette région du monde, et on le voit avec ce qui est en train de se

passer aujourd’hui en Europe, pour que l’on ne cherche pas l’efficacité plutôt que l’instrumentalisation. Quelle est votre opinion vis-à-vis de l’attitude du Premier ministre Manuel Valls qui se positionne en véritable ami d’Israël alors qu’ensuite la France vote des résolutions contre l’État hébreu, résolutions fortement contestées par Israël et dont l’approbation n’est pas la marque d’une amitié profonde ? F.L : D’une part, il y a, en France, le Quai d’Orsay, je parle ici de la haute administration, dont chacun sait qu’elle a toujours éprouvé une forme de défiance à l’égard d’Israël. En fonction des femmes et des hommes politiques qui sont aux manettes, cette défiance est plus ou moins exacerbée. Cela a toujours existé, ce qui explique certaines initiatives qui montrent que la France gère sa relation avec Israël, non pas avec la passion et la volonté de coopération que j’appelle de tous mes vœux, mais comme si Israël était un allié encombrant. Il y a des femmes et des hommes qui sont plus ou moins sincères. Ainsi, je ne remets pas en cause la sincérité de Manuel Valls par rapport à la communauté juive, mais je crois qu’il existe un système que personne n’ose bousculer. À un moment, les hommes politiques doivent avoir le courage de dire les choses et en même temps de tracer des perspectives et de tirer des leçons des échecs. Personnellement, j’affirme que le moment est venu de demander des comptes à l’Europe sur sa politique de soutien aux Territoires Palestiniens. Il ne s’agit pas de demander l’annulation des soutiens, mais le système de subventions accaparé par les mouvements politiques et la prise en otage des citoyens sont des échecs patents. Je souhaite que la politique de financement de l’Europe aux Territoires Palestiniens se fasse par projet de développement économique. Il faut que l’on donne la chance aux jeunes Palestiniens de pouvoir se créer un avenir. Il faut qu’ils sortent des griffes de tous ceux qui les instrumentalisent et les utilisent, de la même façon d’ailleurs

qu’en France, on a les salafistes et autres radicaux djihadistes qui instrumentalisent les jeunes Musulmans.

Sur le plateau d’I24 News avec Y.Abravanel, représentant d’Elnet en Israël

Vous êtes venu promouvoir une initiative que vous nommez « Triangle d’Or ». À quoi correspond ce joli nom ? F.L : Nous avons la chance d’avoir aux États-Unis une communauté d’investisseurs qui veulent financer des projets de startups dans l’innovation. New York est sur ce point, une place privilégiée. On a la chance d’avoir à Paris une politique qui pour une fois a été assumée par la Droite et la Gauche, avec le crédit impôt recherche, avec des ingénieurs qui sont considérés parmi les meilleurs du monde et qui sont très créatifs… Par ailleurs, Israël a su tirer sa croissance vers le haut d’une manière incroyable en investissant sur un éco système qui aujourd’hui est regardé avec admiration, même par la Silicon Valley qui fait partie de ma circonscription. Je suis persuadé que l’énergie présente dans chacun de ces pays - le Triangle d’Or - doit circuler. Si l’on y parvient, quelque chose de formidable peut être construit au cours des vingt prochaines années, pour les trois pays. Cela veut-il dire que cette énergie ne circule pas assez aujourd’hui ? F.L : Malheureusement, non. Les choses se font naturellement avec un certain nombre d’acteurs, mais il n’y a pas d’accompagnement des politiques publiques, ni d’outils qui permettent de souder suffisamment les diasporas, notamment sur le plan économique.

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L'INVITÉ DU MAG LEMAG’

Au ministère israélien des Affaires Étrangères à Jérusalem

J’AFFIRME QUE LE MOMENT EST VENU DE DEMANDER DES COMPTES À L’EUROPE SUR SA POLITIQUE DE SOUTIEN AUX TERRITOIRES PALESTINIENS »

Concrètement, que faudrait-il faire ? F.L : Lors de ce séjour en Israël, j’ai rencontré de nombreux acteurs économiques que j’ai connectés entre eux. Comme vous le savez, je suis en campagne, et comme souvent dans ces caslà, les paroles s’envolent alors que seules les actions restent. Donc partout où je suis passé, j’ai essayé d’agir. En mettant en relation des entreprises des trois pays, en essayant d’imaginer des environnements favorables ou en faisant du benchmarking * afin de booster les coopérations… Ce triangle d’Or est une véritable chance au plan économique, bien sûr, mais c’est aussi une action clé en terme de géopolitique. C’est la raison pour laquelle, c’est un projet que je veux faire avancer le plus rapidement possible. Avec certains acteurs français que j’ai rencontrés en Israël, nous nous sommes fixés comme objectif d’organiser un évènement commun au Triangle d’Or au prochain CES (le Consumer electronic show est le plus grand événement mondial high-tech NDLR) de Las Vegas. Vous êtes député de la Première circonscription des Français de l’étranger (Amérique du Nord) de56

puis quatre ans. Comment avezvous organisé votre vie entre deux continents aussi éloignés ? F.L : Je passe la moitié de mon temps dans ma circonscription qui fait 40 fois la taille de la France et l’autre moitié en France car je siège au Parlement, pour défendre nos compatriotes sur beaucoup de textes. Par exemple, j’ai obtenu gain de cause sur le droit pour les résidents étrangers à la retraite d’avoir une carte vitale. Ces acquis bénéficient à tous les Français de l’étranger donc aussi à ceux d’Israël par exemple. On entend parler de ces Français qui émigrent vers les USA parce qu’ils en ont marre de la crise ou qu’ils ne voient pas d’avenir. Est-ce une légende ou une réalité ? F.L : C’est absolument réel. À Miami, on a assisté à l’arrivée de nombreux Juifs de France, par exemple, qui souhaitent tout simplement pouvoir vivre leur judaïsme en toute sérénité. Cela n’est parfois plus possible pour certains d’entre eux, là encore, à cause du manque de courage des autorités françaises, de Gauche ou de Droite, qui ne font pas respecter les règles de la République. À New York, j’ai vécu un moment qui m’a beaucoup marqué. J’ai en effet rencontré

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un jeune Juif qui vivait en France et qui était dans le domaine artistique. Après avoir subi des violences en France, il a tout simplement demandé par l’intermédiaire d’un avocat, asile aux EtatsUnis ! Cela a été un choc pour moi de voir comment la peur s’est installée dans le cœur de certains Français. Cette vie américano-française a-telle changé votre vision de la politique, votre façon de vivre ? F.L : Tous les Français qui vivent à l’étranger le savent bien : leur regard sur la France change. On se moque souvent de moi quand je dis que l’éloignement est un exhausteur d’amour ! Pourtant l’éloignement acère le regard. On voit ce que les Français ne voient plus, c’est à dire tous les avantages que l’on peut avoir en France et l’on voit aussi, et c’est très important, ce que les Français ne veulent pas voir, à savoir tout ce qu’il faut changer en France pour que le pays réussisse. Par exemple, il est prioritaire, si la France veut changer de cap, que la Gauche et la Droite s’allient sur un certain nombre de priorités, comme il est prioritaire de développer l’énergie de la diaspora française dans le monde, trop négligée, et qui pourtant pourrait nous apporter tant de dynamisme et d’idées.


JE SUIS TERRIFIÉ DE VOIR À QUEL POINT LE MONDE POLITIQUE PASSE À CÔTÉ DE LA VÉRITÉ : UNE FRANCE QUI SE PRÉCARISE. LE MOT QUE J’ENTENDS LE PLUS DEPUIS LE DÉBUT DE CETTE CAMPAGNE, C’EST LE MOT ‘SUICIDE’. AUJOURD’HUI JE VEUX ÊTRE LE PORTE-PAROLE DE CETTE FRANCE QUI GRONDE "

© Photo Libre De Droits

Pourquoi avez-vous décidé de vous présenter aux primaires des Républicains ? Comptez-vous aller jusqu’au bout ? F.L : Je le fais parce qu’il y a ‘deux’ France abandonnées en réalité. La France mondiale et la France provinciale. Le pouvoir parisien est autocentré, technocratique et politisé. Je veux bousculer ce système et connecter la France mondiale et la France provinciale. Je veux que la France soit fidèle à son histoire, celle d’être un pays ouvert et à la conquête du monde. Cela me paraît aujourd’hui important de défendre ces valeurs dans le débat public alors que ce dernier est recroque-

villé sur l’hexagone. Tout le monde se regarde le nombril et le système travaille pour lui- même. C’est ce qui m’a amené à prendre cette décision que j’ai mûrement réfléchie. À 5 ans, quand je jouais dans la cour de l’école, je ne me disais pas : « je veux être Président de la République ». Si aujourd’hui j’ai pris cette décision de me présenter, c’est d’abord parce que je pense qu’il faut redonner espoir au pays. Avec beaucoup d’énergie, je vais à la rencontre des Français, y compris de ces doubles nationaux d’origine africaine qui vivent dans des ghettos. L’idée est de redonner espoir à cette jeunesse, de lui expliquer que d’avoir des doubles racines est une chance. J’essaye de convaincre les entreprises d’investir sur cette jeunesse. J’ai passé un accord avec le Président de la République, François Hollande, et avec l’Agence du service civique pour une expérimentation en Amérique du Nord qui permettrait à ces jeunes Français qui n’ont pas la chance d’avoir dans leur cursus un parcours mondial, qui n’ont pas les diplômes nécessaires, qui n’ont pas fait les grandes écoles, et dont l’horizon aujourd’hui se limite à leur quartier - de découvrir de nouveaux espaces. Je pense que la France a beaucoup investi sur l’urbain et pas assez sur l’humain. Je crois qu’il est temps, plutôt que de dorer la cage, d’ouvrir la porte. Alors, oui, je me présente pour aller jusqu’au bout. J’y mets toute mon énergie… Cela fait quatre mois que je sillonne le pays – d’ailleurs mes équipes appellent cela ‘le Tour Eiffel’ – et ma visite en Israël est la 95e étape de ce tour de France, parce que je considère que la France mondiale, c’est aussi ici en Israël où réside une si belle et grande communauté française. Justement, avez-vous perçu chez les Français qui vivent en Israël le fait d’être blasés, décrochés de la politique française en laquelle ils ne croient plus ? F.L : C’est général. Les gens ont perdu tout confiance dans le monde politique. Si l’on retrouve le bon sens, que l’on abandonne tout ce qui fait le désamour des citoyens avec la politique,

c’est à dire l’instrumentalisation permanente, le cynisme, les choix dictés par les sondages, le fait que les femmes et les hommes politiques sont devenus des suiveurs, au lieu de représenter des leaders, alors on peut espérer redresser la barre. À quel moment avez-vous ressenti ce lien fort avec Israël et le Peuple Juif ? F.L : Depuis tout jeune, sans que je sache pourquoi, j’ai toujours été l’avocat des Juifs. La marraine de ma fille est juive alors que moi je ne le suis pas. J’ai cet élan d’aller au combat quand je vois des injustices flagrantes. J’ai d’ailleurs reçu il y a une dizaine d’année le prix pour la lutte contre l’antisionisme et l’antisémitisme en France. Je suis attaché à ce peuple dont j’admire la capacité à surmonter les contraintes pour en faire des chances et des forces. J’entends tellement de choses qui sont injustes partout dans le monde, parfois d’ailleurs pas seulement dans les médias mais aussi autour d’une table quand on est réuni avec des amis… Dans ces moments-là, je suis obligé de prendre la parole parce que je sens que je dois le faire. Quand j’étais ministre, on a voulu m’empêcher de venir parce que l’on considérait que ce n’était pas le moment de venir soutenir Israël et de développer une coopération… Mais j’ai tenu bon parce que… Je ne sais pas pourquoi en réalité, il y a quelque chose qui m’anime que je ne m’explique pas… On perçoit chez vous de la sérénité, et cette force tranquille de ceux qui n’ont pas peur… F.L : Je n’ai absolument pas peur parce que je sais que ce que je fais est juste. Quand on mène un combat juste, on n’a jamais peur. *Le benchmarking : la référenciation, l' étalonnage ou le parangonnage, est une technique de marketing ou de gestion de la qualité qui consiste à étudier et analyser les techniques de gestion, les modes d'organisation des autres entreprises afin de s'en inspirer et d'en tirer le meilleur. Propos recueillis par Caroll Azoulay

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© Elisa Ruth Szklanny

TRIBUNE LIBRE DE ... LEMAG’

MYRIAM SHERMER LES PIEDS EN ISRAËL, LA TÊTE EN FRANCE :

ÇA SUFFIT !

« Deux Juifs, trois opinions ». On connait l’expression. « Deux Français, trois critiques ». L’expression n’existe pas, mais il faudrait peut-être l’inventer. On connaît la propension hexagonale à pointer les défauts, trouver pourquoi cela ne marchera pas. C’est le doute cartésien, la fameuse mauvaise humeur parisienne. C’est aussi le moteur de bien des révoltes et des révolutions. Quand les Français ont décidé qu’ils en ont assez, gare à celui qui reste en travers du chemin. D’ailleurs, les Israéliens, quand ils poussent un coup de gueule, disent : « Je suis monté sur les barricades ».

Et la communauté française en Israël, compte-elle un jour monter sur les barricades ? Ceux qui suivent l’actualité de la communauté sur les réseaux sociaux ont sans doute entendu parler cet hiver du TTF (Think Tank Francophone). Une initiative spontanée, née sur Facebook, qui a vu se réunir quelques dizaines de francophones de tous bords, engagés politiquement, socialement, intellectuellement. On ne savait pas trop pourquoi on était venu, mais on savait qu’on voulait « faire que ça aille mieux » pour les Français d’Israël et ainsi mieux accueillir les frères et les sœurs de France. Chacun est venu avec son histoire, son point de vue et son domaine d’activité. Certains avaient déjà des idées à foison, d’autres étaient là pour écouter. Mais partagée par tous, cette certitude que la alyah française vit un tournant historique qu’il ne faut pas rater. Que, gonflée par des arrivées de plus en plus importantes, la communauté francophone devient un secteur à part entière en Israël. Témoins, les nouveaux médias de langue française qui ont émergé ces dernières années en Israël. Témoin aussi, l’attention particulière dont les électeurs francophones ont fait l’objet lors de la campagne électorale, l'année dernière, de la part des différents partis politiques. Un an après l’élection, que reste-t-il de cette attention ? Les promesses se sont-

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elles transformées en résultats ? Le bilan est en demi-teinte. Là aussi, si le constat est partagé, les façons d’y remédier le sont moins. Et le TTF, débordé d’idées et tiraillé en mille directions, a fini par s’écrouler sous son propre poids. Certains, faisant honneur au « Pourquoi cela ne marchera pas », l’avaient déjà prédit. D’autres sont restés plus optimistes. J’en fais partie. Le fait que le TTF ait existé, même très brièvement, est en soi une très bonne nouvelle. C’est le signe de l’émergence d’une conscience collective communautaire. Peinant à se rassembler, élevés aux principes universalistes chères à la République française, nous n’avons pas su jusqu’à présent mettre nos différences de côté au profit de nos intérêts communautaires en Israël. L’idée même de tels intérêts en fait souvent grimacer plus d’un. C’est sans doute pourquoi, la génération des anciens olim ne s’est jamais vraiment constituée en communauté et a préféré s’intégrer et se fondre dans la masse israélienne. Ils ont, pour la plupart, brillamment réussi. Mais aujourd’hui, la situation a changé. Aujourd’hui, la alyah francophone a changé. Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’individus, ou de familles isolées, mais d’une vague qui a besoin d’aide. De familles plus précaires, de jeunes parents qui hésitent à lâcher la proie pour l’ombre, de professionnels expérimentés

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qui ne peuvent se permettre de tout recommencer. On ne peut que les comprendre ! Et on ne peut rester indifférents. C’est pourquoi il faut se rassembler. C’est pourquoi se fondre dans la société israélienne et vivre replié sur soi, la tête en France, ne peuvent plus être les seules options. C’est pourquoi il faut prendre la société israélienne à bras le corps. Suivre l’actualité en hébreu. Comprendre les enjeux. Comprendre comment les choses se font ici, oh combien différemment de la France ! Et jouer le jeu. Investir massivement les partis politiques. Taper du poing sur la table. Se faire entendre. Mettre de côté les détails et donner de la voix. Accepter que pour recevoir en Israël ; il faut d’abord réclamer. Et réclamer fort. À plusieurs. Israël est à la fois le pays le plus généreux et le plus exigeant qui soit. Nous le savons, puisque nous sommes là. Israël a besoin de nous autant que nous avons besoin d’Israël. Donnons-nous-en les moyens. Mobilisons-nous. Engageons-nous !

Myriam Shermer

Myriam Shermer est une ancienne journaliste, aujourd’hui militante au Likoud. Elle est porte-parole du groupe francophone du Likoud.



L’AN PROCHAIN À JÉRUSALEM LEMAG’

HADERA, LA VILLE QUI MONTE, QUI MONTE...

Située à mi-chemin entre Haïfa et Tel-Aviv, Hadera entend rapidement rivaliser avec les agglomérations du centre d’Israël, compte-tenu de l’ambition de ses projets de développement. Alors que la ville compte désormais parmi les nouveaux pôles d’accueil des olim de France, leMag' a voulu en savoir plus sur cette ville d’Israël qui fait de plus en plus parler d'elle. Coup de projecteur. 60

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... SPÉCIAL HADERA

ZVIKA GENDELMAN

UN MAIRE D’UNE VILLE PLEINE D’ÉNERGIE

© Mairie de Hadera

Zvika Gendelman

C’est en 2014 que Zvika Gendelman prend les commandes de Hadera en tant que maire étiqueté Yesh Atid. À bientôt 60 ans, cet officier de réserve, gradé ‘général’, s’apprête à mettre en œuvre un projet des plus ambitieux sur le rivage ouest de sa ville. Un gigantesque chantier qui s’inscrit dans une stratégie globale de développement et de croissance de l’agglomération, du renforcement des infrastructures de transport au dynamisme de la construction immobilière, en passant par la création d’emplois et d’attractions touristiques. LeMag’ a interviewé ce maire qui voit loin …

Depuis le rachat de terres par Yehoshua Hankin à un Effendi arabe en 1891, quelles ont été les étapes clés du développement de la ville de Hadera ? Ce rachat représente l’acquisition la plus importante au moment de la première alyah. En 1896, alors que le yishouv compte seulement 35 maisons et trois rues principales, ses habitants perçoivent des fonds du Baron de Rothschild en vue d’assécher les marais, grâce à la plantation d’eucalyptus, et réduire ainsi le nombre de victimes du paludisme. Le développement de Hadera, qui devient officiellement une ville en 1952, se poursuit jusque dans les années 70 au gré des opportunités et de l’histoire comme pour le quartier de Guivat Olga, par exemple, fondé en 1949 par des immigrants européens passés par la Chine après l’Holocauste. La ville compte aujourd’hui près de 100 000 habitants. À ce jour, quels sont les atouts de Hadera alors qu’une majorité d’Israéliens aspire à quitter le Centre ? Les domaines de l’éducation sont une priorité pour la ville qui offre un large éventail d’établissements pédagogiques et scolaires, du mamla’hti aux réseaux indépendants. Hadera dispose de deux écoles démocratiques uniques, de facultés régionales ainsi que d’un campus, le Technoda, qui comprend notamment un observatoire, des labo-

ratoires modernes, un auditorium ou encore un technoparc. La ville regorge également de centres communautaires, de bibliothèques et d’infrastructures sportives multipliant ainsi le nombre des activités culturelles et de loisirs. Nous avons choisi de définir Hadera à travers le label « ville de l’énergie », notamment parce que les plus grands complexes industriels israéliens y sont installés telles la centrale électrique aux mains de la Compagnie nationale d’électricité, la réserve de gaz naturel située au large de la côte ou encore la station de dessalement. Implantée sur une surface de près de 53 000 km2, Hadera est loin d’avoir encore réalisé tout son potentiel. Quels sont les chantiers à venir ? Hadera investit énormément en terme de développement durable, notamment sur le plan de l’énergie verte et environnementale, au bénéfice de la qualité de vie de ses habitants. À travers le label de « ville de l’énergie » et la nouvelle zone d’activités « Energy Park » établie sur près de 650 000 m2, où nous prévoyons l’implantation d’un incubateur de startups et d’un centre universitaire, nous aspirons à la création de nombreux emplois. Nous misons également sur le renforcement de la zone ouest de la ville, qui représentera un levier de croissance certain pour Hadera. Ce grand chantier, dont les travaux devraient commencer au

plus tard cette année, prévoit l’aménagement moderne et innovant des 7 km de plage avec la création de nouveaux quartiers, de promenades, de complexes commerciaux, de centres touristiques et de zones de loisirs. Un nouveau pôle d’attraction dédié aux habitants de la ville mais aussi aux Israéliens en général, aux visiteurs et touristes étrangers. Depuis le début des années 2000, Hadera attire un nombre croissant de Juifs montés de France, devenant ainsi une ville référence de la alyah française. Peut-on dire que la municipalité a mis en place une stratégie d’intégration spécifique ? Hadera bénéficie d’une longue tradition d’accueil des olim en provenance du monde entier. Dès 1912, elle accueillait déjà 40 familles montées du Yémen. Il est clair que face à l’augmentation de la alyah française, Hadera participe activement à l’intégration des immigrants. À ce jour, la municipalité offre des solutions certaines en termes d’éducation, d’emploi, de culture et de protection sociale alors que ce sont près de 200 familles francophones qui évoluent en lien étroit avec l’ensemble de la communauté de la ville. Et je lance un appel aux Juifs de France : Hadera est heureuse de pouvoir vous recevoir avec chaleur et amour ! Propos recueillis par Henri Zemour

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L’AN PROCHAIN À JÉRUSALEM LEMAG’

FAIRE SON ALYAH : DEVENIR PIONNIER OU RESTER ASSISTÉ ?

S’il est un poste qui monte au sein des municipalités israéliennes, c’est bien celui de ‘’ proyektorit ‘’ dédié aux olim de France. À Hadera, c’est Sarah Uzan qui s’illustre dans cette mission des plus sensibles qui consiste à accompagner, orienter et suivre dans leur processus d’intégration les familles françaises.

A

rrivée directement de Paris à Hadera avec la alyah de groupe, il y a 5 ans, Sarah Uzan s’est progressivement imposée au poste de " proyektorit ", notamment grâce à sa maîtrise de l’hébreu. « À Hadera, la alyah française est relativement récente, orchestrée par Shalom Wach qui y fait monter les cinq-six premières familles en 2009 » explique Sarah. « Nous avons fait partie du troisième groupe en 2011 avec 13 familles. Après six mois sur place, je propose rapidement mes services de bénévole au Misrad Haklita (bureau de l’intégration) de Hadera et je commence immédiatement à travailler sur place trois fois par semaine. C’est de cette façon que je collabore étroitement avec le ‘’ proyektor ‘’ déjà en poste à la mairie. En parallèle, je développe le magazine « FUTÉ » ainsi que la radio aux côtés de Charles Benguigui et je crée le groupe Facebook des francophones de Hadera, devenu aujourd’hui un outil de référence des Français pour s’informer sur la ville », poursuit-elle. En 2014, Hadera a bien failli jeté l’éponge de la alyah avec l’arrivée de Tvsika Gendelman, le nouveau maire affilié ‘Yesh Atid’. « Ancien général de l’armée, très carré, il remet tous les budgets à plat, supprimant le poste de " proyektor ". Sa priorité : faire des économies. Ce n’est que progressivement qu’il redistribue les budgets notamment en direction des olim réalisant que la communauté francophone compte pour la ville »,

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nous confie-t-elle. Sarah est alors recrutée au poste de " proyektorit " sur les recommandations de l’ancien titulaire qui vogue alors vers d’autres projets. Depuis, Hadera a pris ses galons de « ville d’intégration » des Juifs de France, grâce à sa position géographique privilégiée d’une part - en bord de mer, entre Tel-Aviv et Haïfa, - mais surtout grâce à un coût de la vie nettement moindre en comparaison à Jérusalem et aux villes du centre. « À la rentrée 2015, nous avons accueilli près de 30 familles, un chiffre record ! En mars dernier à Paris, les futurs candidats faisaient la queue à notre stand au salon de la alyah », explique Sarah. « Et phénomène nouveau, la ville accueille désormais des familles d'autres villes d’Israël comme Netanya ou Jérusalem où le coût de la vie se trouve être plus élevé. À Hadera, la différence des prix dans l’immobilier représente également un atout. Mais attention, comme partout en Israël, les prix ne cessent d’augmenter de façon vertigineuse », souligne-t-elle. Rassemblant près de 1000 âmes, les francophones de Hadera se sont appliqués à recréer les repères communautaires qu’ils affectionnent particulièrement. « Deux centres spirituels francophones ont été montés depuis peu, un Beth ‘Habad et un Beth hamidrash, nommé Chevet A’him, avec à leurs têtes respectives : le rav Meir ‘Hayoun, un shalia’h extraordinaire, et le rav ‘Haïm Do-

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rai, ancien responsable du kollel de Créteil » nous explique-t-elle. « Je ne compte pas mon temps, des démarches administratives aux inscriptions dans les écoles. Les candidats à la alyah me contactent le plus souvent via Facebook, nous parlons ensuite au téléphone, je les renseigne ou les reçois à l’occasion d’un voyage d’étude pour leur faire découvrir la ville. Selon moi, les olim d’aujourd’hui exigent plus d’accompagnement. Mon travail consiste à les préparer depuis la France, en leur faisant prendre conscience qu’Israël est un autre monde où il faut en découdre », précise Sarah. « Il nous reste encore beaucoup à faire à Hadera. Nous apprenons énormément des autres villes, tel l’encadrement des adolescents, notre urgence, mais également l’accueil des personnes âgées alors que la ville, qui ne dispose pas de structures francophones comme Netanya par exemple, les attire énormément. J’espère que nous pourrons recruter un « moré mégasher » (enseignant médiateur) dès la rentrée prochaine.. De nouvelles villes doivent s’ouvrir à l’arrivée des francophones, il faut créer d’autres pôles d’attraction. Chaque candidat à la alyah doit garder à l’esprit que nous disposons d’un pays où il est possible de s’installer et de vivre, du nord au sud, d’est en ouest. Ici, le choix ne se limite pas seulement à Paris 19e, à Villeurbanne ou à Marseille », conclut-elle. Henri Zemour


... SPÉCIAL HADERA

Témoignages José Boublil

David et Vanessa B. David et Vanessa B. Nous avons fait notre alyah avec nos 4 enfants. Nous venons de Paris où nous gérions une entreprise dans le domaine de la climatisation depuis 15 ans. Nous avions le souhait de nous projeter en Israël depuis quelques années : nous voulions rentrer à la maison, décider un monde meilleur, élever et voir grandir nos enfants chez eux, nous permettre de vivre pleinement aux rythmes de Nos fêtes, pouvoir porter une kippa en marchant la tête haute sans regarder en arrière. Nous savions que nous prenions l'une des décisions les plus importantes de notre vie. Le facteur le plus important pour réussir notre alyah était le choix de la ville. Nous connaissions Israël uniquement en tant que touristes. Comparer la variété de villes que ce pays pouvait nous proposer était une tâche ardue. Nos priorités étaient telles : pouvoir nous intégrer facilement à la vie israélienne, apprendre la langue, être à même de respecter notre budget et enfin, la dernière mais pas des moindres : être dans une ville balnéaire ... Et Hadera a su répondre positivement à tous nos besoins. Trois années plus tard, nous ne regrettons pas notre choix. Nos enfants sont parfaitement intégrés au sein d'une école sioniste-religieuse et nous avons recréé une société israélienne de climatisation.Dernier point, des plus positifs, la communauté francophone s'agrandit. Vous y serez les bienvenus…

Je voudrais en quelques lignes apporter un témoignage peu conformiste sur la ville de Hadera dans laquelle je viens d'ouvrir un bureau. Je suis un "pépé" de 61 ans, anciennement expert-comptable et commissaire aux comptes en France. À l'époque, je joue ma partition en solitaire pendant 15 ans au cours desquels, mon cabinet devient le leader français des introductions en bourse, du secteur des nouvelles technologies, et conseiller de presque tous les institutionnels français pour leurs acquisitions et prises de participation dans le HighTech. En 2000, je me marie et par la même occasion, je m’associe au cabinet Deloitte (à l'époque 150 000 collaborateurs dans le monde, n°2 mondial). Quatre ans plus tard, je fais mon alyah et débute, en 2007, une activité de placement de personnes âgées en maison de retraite avec 5 salariés. Nous avons développé cette société - que j'ai reprise intégralement - et celle-ci compte désormais plus de 120 salariés, dont 10 que nous venons d'embaucher à Hadera. Pourquoi Hadera? Depuis le début des années 90, nous avions pris l'habitude de venir chaque année en vacances dans le nord d'Israël, dans un village d'artiste nommé Ein Hod, situé à 20 km au sud de Haifa. Pendant tous ces étés, nous venions parfois le soir à Hadera pour un restaurant de brochettes, seule attraction locale de l'époque. Et la réputation de cette ville était d'être une cité ouvrière, de gens simples, des séfarades issus d'Irak, Perse (Iran), Yemen ou du Maroc. Autant dire que très peu

de Français connaissaient le lieu. Quelques années après notre arrivée, j'apprends qu'Axelle et Julien Benguigui, que j'avais connus dans ma synagogue chic du 16eme arrondissement, ont également fait leur alyah dans cette ville côtière. Sur le moment je crois rêver : imaginez un jeune médecin français et une jeune Science Po de Paris s'installant à Hadera ! Au début, j'ai pensé "ils sont dingues". Mais comme ils sont tout sauf dingues, j'ai alors commencé à suivre l'évolution incroyable de cette ville, dans laquelle de plus en plus de Français sont montés au cours des cinq dernières années. Et ce choix très courageux s'avère payant ! Une belle ville qui s'étend à travers des constructions de qualité, des plages magnifiques et encore un peu sauvages. Un rythme de vie bien moins stressant que Tel-Aviv ou autres. Et désormais un environnement humain, notamment chez les Français, qui semble de plus en plus intéressant ; en particulier pour les créateurs d'entreprises. Début 2016, mon activité nécessite un gros volume de recrutements d'un seul coup. Les candidats que je reçois à Hadera sont d'un niveau excellent, même ceux que je ne retiens pas comme commerciaux. Je constate une évolution en parallèle dans l'ensemble de l'économie de la ville, qui permettra sûrement à des chefs d'entreprise fraîchement arrivés de trouver un environnement francophone intéressant en parallèle des opportunités immobilières encore accessibles, à deux pas d'une mer splendide (là, c'est le "tune" qui parle !). Beatsla’ha à tous. José Boublil Expert-comptable-commissaire aux comptes, Ex-associé du cabinet Deloitte, Co-fondateur de plusieurs startups high-tech.

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L’AN PROCHAIN À JÉRUSALEM LEMAG’ Elles dirigent leurs agences immobilières, adorent leur ville, sont spécialistes dans leur domaine et veulent en faire profiter le plus grand nombre. Axelle Benguigui et Danielle Salama nous parlent de l’immobilier à Hadera. L’agence immobilière Bayit Neeman beIsraël a été créée par Axelle Benguigui en 2014, trois ans après son alyah à Hadera. Ses points forts : « J’ai une approche tout à fait différente d'une agence immobilière classique : je travaille avec ma tête (afin d'optimiser le temps, l'argent et l' énergie de mes clients), mon cœur (acheter un bien est toujours un coup de cœur) et mon âme. Car au-delà d'une acquisition immobilière classique, mes clients achètent une parcelle de la Terre d'Israël, à Hadera, et il est important de vivre cette aventure avec conscience de la grandeur de l' événement. C'est donc une expérience humaine, matérielle et spirituelle, et je suis honorée d'en être le guide ». Sa spécialité : « Une visite unique de Hadera, présentant la ville sous tous ses aspects : projets immobiliers et municipaux, quartiers, écoles, communautés, commodités, prix... Je suis tout simplement amoureuse de cette ville, d'une grande sainteté, du fait de son espace, de sa nature luxuriante, de ses habitants au cœur chaleureux et de sa simplicité. Enfin, je m'entoure de partenaires de qualité : agences israéliennes et projets qualitatifs. Je veux donner à mes clients un maximum de choix et leur donner accès à des professionnels expérimentés dans tous les domaines (avocats, conseillers en crédit, experts) qui travaillent dans le même état d'esprit. Confiance, professionnalisme et cœur, ce sont les trois maîtres mots de mon agence ». La vision d’Axelle sur l'immobilier à Hadera ? « Hadera est en expansion permanente, à tous les niveaux : tourisme, économie, industrie, infrastructures, commerces, logements, écoles... et ce, parce qu'il y a de la place et une volonté de faire les choses en grand. L'immobilier connaît un développement à toute vitesse mais réfléchi et très haut de gamme ; de belles constructions de qualité, respectant la nature et préservant l' harmonie de la ville et son caractère. Comme le disait l'ancien maire qui nous a fait monter à Hadera, Haim Avitan: « Hadera, c'est la future Tel-Aviv » mais avec son style bien à elle. En résumé : un très bon investissement ! ». Axelle Mayer-Benguigui 64

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Danielle Salama dirige son agence immobilière à Hadera depuis 2012. Une ville à laquelle elle a toujours cru, aujourd’hui plus que jamais ! Ses points forts : « En ouvrant mon agence sur Hadera en 2012, j'ai relevé un véritable défi ! Danielle’s real estate est la première agence immobilière francophone créée sur Hadera. Alors que cette ville était très peu connue des francophones, j'ai tout de suite compris son potentiel ! J'ai longuement travaillé pour connaitre parfaitement son marché et comprendre cette ville 100% israélienne. Je me suis constituée un solide réseau professionnel pour donner le meilleur service à mes clients ! ». Sa spécialité: « Ma volonté de toujours défendre les intérêts de mes clients afin de leur permettre de faire un achat rentable et ce, en toute sérénité ». La vision de Danielle sur l’immobilier à Hadera : « J'ai de suite compris le potentiel de Hadera et mes prévisions étaient justes ! Cette ville en plein développement est désormais LA VILLE des investisseurs. Les prix ne cessent d'augmenter, les projets poussent, bref, le marché de l'immobilier y est très réactif et dynamique. Pourquoi ? Hadera bénéficie d'une situation géographique idéale. Au cœur de la région du Sharon, à 20 min de Netanya, entre Haïfa et Tel-Aviv, Hadera s’impose comme la grande ville de la région. Elle est recherchée par une population familiale et active, l’immobilier tout comme le commerce ne cessent de s’y développer. Une communauté francophone s'y est fortement intégrée depuis les sept dernières années, ce qui constitue également un atout important pour cette ville. Trois raisons pour acheter sur Hadera ? Un placement sûr, une belle rentabilité, et mon expérience dans ce domaine bien sûr ! ». Danielle Salama


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Numéro Israélien : 054.22.64.689 Numéro Français : 01.77.47.31.83

Bayit Neeman beIsraël

axellehadera@gmail.com Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 65 Hillel Yafe 11, HADERA


REPORTAGE LEMAG’ SE PARLER POUR NE PLUS SE CACHER

E

n janvier 2016, le psychiatre français Boris Cyrulnik, enfant caché en France pendant la guerre et spécialiste de la résilience, participe à la réunion du groupe de parole de l’association à Jérusalem. Shlomo Balsam, président d’Aloumim présent à cette rencontre, évoque « une rencontre entre frères ». « Boris Cyrulnik en quelques mots d'introduction a réussi à ouvrir les cœurs et les portes de la parole, encore fermées pour beaucoup d'enfants cachés. C' était une rencontre familiale. Un jeu de miroirs : tous les participants se reconnaissent dans chaque mot et chaque récit de Boris et Boris se voyait lui-même dans les yeux des ‘Aloumim’. Tout y passe : la séparation des parents, la rafle, les braves gens qui les ont cachés, le triste et difficile retour à la normale après la guerre et le début d'une nouvelle guerre pour la résilience… », raconte Shlomo avec émotion. Chacune de ces réunions offre à ses membres l’occasion de pouvoir exprimer des sentiments jamais dits en public. Ceux-ci sont partagés. Exprimer son passé et plonger dans la douleur, la disparition de la famille et leur enfance volée ou évoquer la vie, l’avenir et la

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construction ? Israël a 13 ans quand il s’échappe de l’orphelinat dans lequel il a été placé après que ses parents aient été déportés. Il se retrouve seul et apprend à se cacher sans aide d’associations. « Ce jourlà, j’ai compris que j’étais seul au monde et ça n’a jamais changé », confie-t-il au groupe. « Tu n’es pas seul, nous sommes ta famille », répliquent aussitôt plusieurs personnes, qui souvent se sentent plus en famille avec leurs camarades d’Aloumim qu’auprès de leurs familles à qui ils n’ont parfois rien raconté. Pour certains, leurs souvenirs d’enfance sont encore vifs. Une enfance sans véritable identité, avec un faux nom et sans parents, la peur d’être découvert, les mauvais traitements parfois de la part de ceux qui les cachaient... Certains ont été cachés avec leurs parents, d’autres trop jeunes pour se souvenir racontent ce qu’on leur a raconté, s’appropriant ainsi d’une mémoire collective. Tous ont cependant en commun d’avoir eu une enfance gâchée, et le sentiment d’avoir été des « criminels » car juifs, selon les convictions de l’état de Vichy.

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© OSE/CDJC Memorial de la Shoah

Depuis 18 ans, des membres d’Aloumim, l’association des enfants cachés en France pendant la Shoah et vivant en Israël, se rencontrent une fois par mois pour parler. Il ne s’agit pas de témoigner ni de raconter pour leurs descendants mais de se retrouver entre « enfants cachés » pour parler de leurs expériences et traumatismes. LeMag’ a participé à l’une de ces rencontres, très discrètes, afin d’essayer d’entendre ces voix qui sont restées si longtemps muettes.

Berthe, enfant cachée, explique que ses parents qu’elle a retrouvés à la Libération ne lui ont rien raconté de leurs épreuves et que de son côté, elle avait des difficultés à raconter sa propre expérience. « Je me suis enfui dans la nature quand mes parents ont été déportés, j’y suis encore », poursuit Israël. « On a besoin d’être ensemble », explique Suzy, l’une des plus fidèles du groupe de parole, qui a perdu 46 membres de sa famille pendant la Shoah et a survécu cachée en Suisse, alors qu’elle avait moins de 5 ans. Une grande partie des enfants cachés sont restés muets des années avant de pouvoir exprimer leurs traumatismes,


L’association Aloumim - qui signifie en hébreu « cachés », mais également «jeunes» en signe de renaissance et d’avenir- regroupe, en Israël, 1000 enfants cachés en France pendant la Shoah avec lesquels elle est en contact régulier. Elle est présidée depuis 2009, par Shlomo Balsham, historien de renom et guide francophone particulièrement recherché chez Yad Vashem.

L’ENFANT CACHÉ DEVENU COMBATTANT

Enfants hébergés dans le château de Montintin (Creuse), France, années 1940

peut-être par pudeur par rapport au million d’enfants juifs qui ont été tués pendant la Shoah. Cette théorie est développée par l’ethnopsychiatre Nathalie Nathan-Zajde, spécialiste des traumatismes des enfants cachés, qui a suivi les groupes de parole d’Aloumim. « Nous parlons de notre anxiété, de nos souffrances, des difficultés à être parents…c’est bien plus que transmettre une histoire », explique Suzy. Écouter les enfants cachés, c’est écouter des octogénaires, qui le temps d’une rencontre, redeviennent des enfants, des enfants à qui l’on a volé leur enfance. Michaël Blum

Israël Uryn a 7 ans quand il arrive avec ses parents à Paris de son village polonais, sa famille fuyant les pogromes. En 1940, quatre ans après son arrivée en France, le petit Israël parle, lit et écrit le français. Quand les Allemands occupent Paris, son père est rapidement arrêté par la police française et envoyé au camp de Beaune la Rolande dans le Loiret avec d’autres Juifs étrangers. Quelques mois plus tard, sa mère hospitalisée pour des problèmes respiratoires, est déportée et Israël, à 13 ans, se retrouve sans parents dans un Paris hostile aux Juifs. Placé dans une institution juive, il s’enfuit, un matin froid et pluvieux de février 1943, pour échapper à une rafle. Seul, affamé et transi de froid, il va errer dans les rues avant de retrouver sa tante, qui ne pouvant pas le garder, l’envoie dans une ferme en Normandie. Ouvrier agricole à 13 ans, Israël Uryn, cache son identité et passe de ferme en ferme avec juste un baluchon sur le dos, afin de pouvoir manger et éviter la déportation. Quand la Libération arrive, il retourne à Paris mais ne retrouvera jamais ses parents morts tous deux dans les camps de la mort. Il ne saura jamais le lieu et la date de leur mort. Après un bref passage aux États-Unis dont il est expulsé, Israël, de retour à Paris, décide de s’engager pour la cause sioniste et se retrouve, armes à la main, en Palestine mandataire, luttant pour une terre inconnue mais sur laquelle il espère pouvoir se trouver des perspectives. Il participe aux combats pour la défense de Jérusalem et voit tomber près de lui la plupart de ses camarades quand la Légion jordanienne repousse les unités juives. Affecté dans la marine et portant toujours un baluchon, Israël se retrouve au lendemain de l’armistice avec les pays arabes, libre mais sans aucun avenir. Après quelques mois, il repart à Paris et reviendra s’installer en Israël à la retraite en 1984. En 2006, il publie ses mémoires sous le titre « Le baluchon » et termine son livre par ces mots « Il est difficile d’être juif dans ce siècle »… M.B Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 67


C'EST L'HISTOIRE DE ... LEMAG’

LA PRESSE ISRAÉLIENNE OU COMMENT LES FEUILLES DE CHOU DU ‘YISCHOUV’ SONT DEVENUES DES EMPIRES MULTIMÉDIAS MODERNES

L’

histoire de la presse hébraïque en Israël se confond avec le récit du sionisme et de la formation de la société civile juive moderne. Durant la période de la Palestine mandataire, les journaux qui paraissent se donnent d'abord pour mission d'être au service de la population juive. Des quotidiens populaires comme Haaretz ou Maariv, en passant par le Jerusalem Post, ont tous forgé leur notoriété grâce aux plumes acérées de leurs journalistes. L'analyse politique et sociétale du pays fait partie des thèmes plébiscités par le plus grand nombre. Sans langue de bois ni tabou. S'affrontant par articles interposés, des rédacteurs de tous bords témoignent de la liberté de ton et de la diversité des courants idéologiques qui ont forgé le pays. Des premières feuilles de chou aux groupes médias florissants de l'époque moderne, retour sur une presse israélienne qui a su évoluer avec son temps. Nous sommes au début du 20ème siècle. La population cosmopolite de Tel-Aviv augmente et voit émerger, puis s'épanouir lentement une nouvelle culture hébraïque. Elle est, pour beaucoup, annonciatrice d'un renouveau national. Alors qu'en diaspora, les publications

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juives se rédigent dans la langue des pays de résidence, ou en yiddish, la presse de ce qui n'est pas encore l’État d'Israël se conçoit d'abord, elle, en hébreu. L'un des premiers initiateurs de cette presse naissante est Eliezer Ben-Yehuda, le fondateur du journal Hazevi qui aura pour particularité d’imiter la presse populaire parisienne. Très vite, il introduit l’usage de gros titres, avec un ton accrocheur qui n'hésite pas à exagérer les faits pour gagner des lecteurs. L'objectif, alors, est de toucher l'opinion publique et de la rallier à ses propres causes : soutien à la laïcité, au nationalisme et à une société de consommation qui s'assume. Son fils, Itamar Ben-Avi, suivra plus tard les traces de son père en reprenant la publication. À partir de 1908, le titre devient encore plus sensationnel et suit les modèles du Petit journal et du Petit Parisien. La presse hébraïque de l’ancienne Palestine mandataire en est alors à ses balbutiements. Plusieurs publications politiques font leur apparition, dont notamment l’hebdomadaire du mouvement sioniste socialiste Ha-po‘el ha-tsa‘ir. C'est durant cette même période que paraît aussi une première revue séfarade, Ha-‘Herout, qui aura une durée de vie éphémère (huit ans), et Moria, une feuille de chou orthodoxe qui se cherche aussi un lectorat. Il s'agit surtout de défendre,

Milieu des années 1950, Yediot A’haronot fait son apparition. En 1975, il devient le journal le plus lu d'Israël !


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tout le miroir de la presse populaire britannique. Et le journal devient, dans les années 1920, le titre le plus lu de la société israélienne. Un succès qui suscitera un violent affrontement entre les fans de cette presse populaire et ses détracteurs (pour la plupart marxistes), qui adopteront, eux, une attitude dédaigneuse vis à vis du journal, vu alors comme « l'instrument d'un pouvoir bourgeois à éradiquer ».

à l'époque auprès de la population locale, ses propres idées ou opinions politiques. Dans ce contexte, un premier (vrai) journal émergera en 1919, que les lecteurs plébisciteront même s'il sera loin de rallier tous les suffrages : le quotidien ‘Hadashot Haaretz, qui deviendra, six mois plus tard, Haaretz. La particularité de ce nouveau canard ? Il n'est affilié à aucune organisation politique. Et il jette un pavé dans la mare des différentes publications très politisées qui fleurissent partout ailleurs. Salué pour sa longévité et sa popularité, il traversera les crises et les mutations du pays en se positionnant très à gauche. Mais nous sommes au lendemain de la Première guerre mondiale. Ben-Avi fonde un nouveau quotidien populaire, appelé Doar Hayom, qui se veut avant

PRESSE POPULAIRE OU PRESSE D'ÉLITE, UN PRINCIPAL OBJECTIF : CONQUÉRIR DES LECTEURS Il n’empêche. Même si durant cette période la presse populaire marque un léger recul sur la presse politique des années 30, un mouvement s'est amorcé. La montée en puissance des journaux accessibles à tous est un fait, et vers le milieu des années 1950, un des grands titres de la presse quotidienne contemporaine, Yediot A’haronot, fait, dans ce contexte, son apparition. En 1948, le public ciblé est celui des nouveaux immigrants, que le journal essaie d'attirer avec un langage populaire, voire simplificateur. De gros titres sensationnels et des photos au diapason habillent les faits divers et les nouvelles du jour. On ne fait pas dans la dentelle, certes, mais c'est une stratégie qui va s'avérer gagnante. Et Yediot A’haronot devient, en 1975, le journal le plus lu d'Israël ! Le succès de la presse populaire en Israël se prolonge dans les années 80 et ne se démentira plus. De son coté, Haaretz va s'affirmer en mettant en avant une ligne éditoriale exigeante, voire élitiste. Depuis 1918, le quotidien a évolué lentement en prenant pour modèle le Times et le New York Times. Un choix qui est aussi un risque car la concurrence est féroce, et elle ne ménage pas ses efforts pour conquérir un lectorat versatile, et très courtisé. Face de nouveau à une presse populaire et politique pour le moins offensive, Haaretz connaît ses premiers revers, et de graves problèmes financiers. Le quotidien sera finalement racheté par la famille Schocken qui le remettra à flot et qui renforcera sa position de leader sur le créneau de la culture d’élite « à l'israélienne ».    UNE PRESSE POUR LES NOUVEAUX IMMIGRANTS En dépit d'une presse en hébreu en plein essor et qui domine largement le marché, on voit apparaître aussi, dès le début de l'histoire du pays, une presse à part et un peu marginale. Liée à chaque vague d’immigration que

Haaretz Fondation :

1919 Langues :

Hébreu Anglais

Quotidien Généraliste Tirage :

70 000 exemplaires Ville d'édition :

au début Jérusalem, aujourd’hui Tel-Aviv

Israel Hayom Fondation :

2007 Langues :

Hébreu (papier) Anglais (en ligne)

Quotidien Gratuit Tirage :

325 000 exemplaires en semaine 550 000 exemplaires le vendredi Ville d'édition :

Tel Aviv

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C'EST L'HISTOIRE DE ... LEMAG’

connaîtra Israël, elle s'imprimera dans la langue d'origine des nouveaux arrivants, en quête de repères, et encore peu familiers de la langue hébraïque. Ces publications feront la transition et assureront, pour chaque nouvelle couche de la population israélienne tenue de s'intégrer, un relais d'informations dans la langue d'origine. Ainsi, durant les années 1930, les immigrants réfugiés de l’Allemagne nazie créeront leurs propres journaux. Mais c'est véritablement après 1948 que l'on trouvera le plus vaste panel de journaux publiés en langue étrangère. En yiddish, en allemand, en hongrois, en roumain, en russe ou en français, l'actualité israélienne se décrypte dans la langue maternelle des olim. Des lecteurs qui passeront cependant, au bout de quelques années, à la lecture de la presse populaire en hébreu. Au début et jusqu’à la fin années 1980, 70

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de nouvelles publications connaissent cependant un essor rapide : les journaux rédigés en russe et destinés aux immigrants d’Union soviétique se multiplient. Ces titres en langues étrangères, qui sont en général des petites entreprises commerciales, jouent un rôle social important et fournissent aux immigrants un véritable décryptage de la société israélienne. Ils assument, en quelque sorte, un rôle de médiateur entre le lecteur et son nouvel environnement. Quant à la presse en anglais, elle remplit, elle, d’autres fonctions. Elle apparaît dans les années 1920, tout d'abord sous forme hebdomadaire. Citons The Palestine Weekly de Itamar Ben-Avi, avant que le premier quotidien, The Palestine Post, ne soit fondé en 1932. Il se rebaptisera en 1948 The Jerusalem Post. La particularité de ce journal est qu'il ne fonctionnera pas seulement comme moyen de


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socialisation des nouveaux immigrants, mais qu'il se voudra international, et destiné aussi aux lecteurs non-juifs dans le monde. LA PRESSE ARABE, UN CAS À PART Et qu'en est-il de la presse en langue arabe dans le pays ? Elle a toujours été présente, et occupe une place singulière. La première publication périodique digne de ce nom, en langue arabe, est fondée à Haïfa en 1908, puis à Jaffa en 1911. Al Carmel, c'est son titre, se revendique alors comme violemment anti-juive. Sous la période turque, une bonne dizaine de publications hebdomadaires et mensuelles en arabe seront publiées. Tirages faibles, parfois nettement confidentiels, mais, point fort, c'est une presse qui aura pour mérite d'être souvent lue à voix haute dans les cafés et dans la rue. Avec l’occupation britannique, les titres se multiplient. À partir de 1929, les premiers quotidiens en langue arabe sont édités, dont Palestine et, plus tard, Al-Difa. Notons, plutôt, l'initiative audacieuse de Nissim Malul qui proposera de publier, vers 1914, un journal pro-sioniste en langue arabe. Une tentative de s’adresser directement à l’opinion palestinienne qui se soldera, hélas, par un échec. Et pourtant… Il existait bien, avant 1948, une collaboration professionnelle entre presses juive et arabe. Ainsi, le journal politique libéral Haboker et le grand quotidien de Jaffa Al-Difa noueront bel et bien des contacts. Mais le grand titre qui émergera finalement sera L'Al-Ittihad (en arabe littéral L'union), un journal basé à Haïfa et qui sera vite considéré comme le média en arabe le plus important d'Israël. Le titre, fondé en 1944 par Emile Toma, Fu'ad Nassar et Emile ‘Habibi qui dirigea le journal jusqu'en 1989, trouvera rapidement ses lecteurs. À ses débuts, le journal fonctionne comme organe de communication de la Ligue de libération nationale en Palestine (LLNP). Puis, à partir de septembre 1945, il amorce un virage et est publié au nom du Congrès des Travailleurs arabes. Au départ hebdomadaire, le journal prospérera et deviendra par la suite bihebdomadaire, avant de se transformer en quotidien en 1983.

HAARETZ, YEDIOT ET MAARIV : DES EMPIRES MULTIMÉDIAS PROSPÈRES Aujourd'hui, les principaux grands titres de la presse israélienne, comme notamment Yediot ou Maariv, sont devenus des empires multimédias. À partir des années 90, ces journaux amorcent leur mutation avec succès. Ils s’adaptent aux nouveaux modes de communication et investissent, pour le meilleur ou pour le pire, le domaine des médias audiovisuels. La télévision, la radio et Internet ; même le secteur de la téléphonie mobile est courtisé. Une forte concentration économique qui laissera l’État impuissant, face à une presse commerciale aujourd'hui perçue par certains ténors politiques comme un véritable contre-pouvoir. Entre-temps, Haaretz est devenu l'un des quatre plus grands quotidiens nationaux d'Israël. Il appartient à la famille Schocken et se classe, aujourd'hui, comme le troisième quotidien du pays, loin derrière Maariv et Yediot Aharonot. Sa ligne éditoriale, comme on le sait, se situe très à gauche. Face à la baisse constante de son lectorat, le titre connaîtra des jours sombres avant d'opérer des coupes drastiques dans son budget. Aujourd'hui, le titre reste le flambeau de la gauche israélienne. Souvent comparé à des journaux comme le quotidien français Le Monde, ou le International Herald Tribune, il offre, comme tous les grands quotidiens israéliens, une série de suppléments chaque jour sur la littérature, l'économie, l'art de vivre ou le sport. Sans compter le fameux supplément du vendredi, et bien sûr, une édition en ligne, en anglais et en hébreu. Il faut savoir que l'ensemble du groupe comprend aujourd'hui quinze titres locaux. Et, selon le journal, il pèserait 100 millions de dollars. Le 3 Août 2006, Haaretz annonce une prise de participation par le groupe allemand M. DuMont Schauberg. Une arrivée providentielle qui permettra au titre de prendre une participation à hauteur de 44,5 %, soit 33 millions de dollars, dans Bezeq, l'opérateur Internet le plus populaire en Israël. Le Jerusalem Post, également disponible sur internet revendique, lui, une ligne indépendante et ouvre ses colonnes à des intervenants de tous bords. Dans les années 2010, la ligne politique du quotidien est perçue comme centriste, et ses positions sur l'économie proches du néo-libéralisme. Le titre, qui date de l'époque du Mandat Britannique, se veut un concurrent d'Haaretz qui publie lui aussi

Fondation :

1932 Langues :

Anglais Français

Quotidien Généraliste Tirage :

50 000 exemplaires en semaine 80 000 exemplaires le vendredi 40 000 exemplaires à l'international Ville d'édition :

Jérusalem

Yediot A'haronot Fondation :

1939 Langue :

Hébreu

Quotidien Tirage :

400 000 exemplaires en semaine 600 000 exemplaires le vendredi Ville d'édition :

Tel-Aviv

Août - Septembre 2016 • LEMAG.CO.IL • leMag’ N°8 • 71


C'EST L'HISTOIRE DE ... LEMAG’ une édition en langue anglaise depuis les années 90. Pendant très longtemps, il a appartenu au parti travailliste avant d'être revendu, en 1989, à la société multinationale Hollinger. Le 16 novembre 2004, Hollinger revend le titre à un éditeur de journaux israéliens de Tel-Aviv, Mirkaei Tikshoret Limited. En tête du classement, Yediot A'haronot (« Les dernières nouvelles ») est publié lui aussi à TelAviv depuis l'époque du mandat britannique. Depuis les années 70, il sera largement en tête des ventes. Loin devant Maariv et Haaretz, sa bonne santé insolente fait le bonheur des familles Moses et Fishman, propriétaires du titre. Le journal, fondé en 1939 par Nahum Komarov, est aujourd'hui détenu par le Groupe Yediot Aharonot, un conglomérat qui œuvre dans le secteur de la presse et de la télévision. Un véritable empire multimédia, qui aurait des intérêts dans plusieurs sociétés israéliennes, telles que, pour ne citer qu'elles, Channel 2 et Yediot Tikshoret, une société de télévision par câble. Sans compter des parts dans un groupe de journaux hebdomadaires, un journal en langue russe et des magazines féminins... Maariv (en hébreu « Le Soir ») se porte plutôt bien lui aussi et confirme la mu-

tation d'une presse qui a su se mettre au diapason des moyens de communication de l'ère moderne. Le titre est actuellement le deuxième plus gros tirage des journaux payants en Israël et l'un des trois principaux quotidiens israéliens, avec Haaretz et Yediot A’haronot. Il a été fondé en 1948 par le plus célèbre journaliste israélien de l'époque le Dr. Azriel Carlebach, et se veut un journal populaire, plutôt marqué à droite, reconnu aussi pour la notoriété de ses collaborateurs. Le titre est célèbre entre autres pour sa lutte en faveur de la liberté de la presse et contre la corruption. Racheté en 2012 par Shlomo Ben Zvi, déjà propriétaire du journal Makor Richon, le journal passe en 2014 aux mains du groupe The Jerusalem Post. Des regroupements d’intérêts qui apportent une assise financière certaine aux publications concernées, certes. Mais qui pourrait aussi, à terme, affadir le contenu rédactionnel de ces journaux historiques qui ont su prendre parti sur les sujets de société les plus délicats. Une chose est sûre, la vitalité du secteur laisse à penser qu'il se réinvente et qu'il a encore de beaux jours devant lui. L'histoire de la presse israélienne continue de s'écrire... Dahlia Perez

Maariv Fondation :

1948 Langues :

Hébreu

Quotidien Tirage :

90 000 exemplaires Ville d'édition :

Tel-Aviv

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n Israël, les transactions immobilières représentent une énorme partie de l’économie du pays (les taxes directes sur les transactions immobilières représentent plus de 7% de l’ensemble des impôts collectés en Israël !). L’essentiel de ces transactions se fait pourtant sur un tout petit nombre de villes. C’est ainsi qu’une étude récente indique que par exemple en 2014, 4199 transactions concernant les appartements les plus demandés (de 3 à 4 pièces) ont été réalisées à Tel-Aviv et 3931 à Jérusalem, plaçant ainsi ces deux grands pôles religieux, politiques et économiques en tête

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CAPITALE DU SIONISME IMMOBILIER

du pays. Dans 33.9% des cas, il s’agit de premières acquisitions immobilières, dans 46.2%, ces transactions font suite à un changement de ville, dans 34.7%, il s’agit de purs investissements et dans 11.2% des cas, il s’agit d’acquisitions par des étrangers. C’est à Tel-Aviv que l’on constate le plus de primo accédants à la propriété (7.1% des achats locaux), tandis que c’est souvent suite à un déménagement que l’on achète un appartement à Jérusalem. Tel-Aviv se positionne aussi comme la ville où l’on achète le plus pour de l’investissement pur par des Israéliens, tandis que Jérusalem reste la cible privilégiée des acheteurs étrangers (28%

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des transactions réalisées à Jérusalem sont faites par des étrangers ; par comparaison, à Ashkelon seulement 2.3% des transactions sont effectuées par des étrangers). Et l’on ne peut que constater que les prix ne cessent de monter de manière impressionnante, tant à Jérusalem qu’à Tel-Aviv. Il faut maintenant en moyenne 2 177 000 shekels pour acheter un appartement de 4 pièces à Jérusalem et 3 000 000 shekels à Tel-Aviv. Pour information, 1 000 000 suffisent pour ces mêmes 4 pièces à Ashkelon. Mais pourquoi diable est ce donc si cher à Jérusalem ??? Pas de plage, des immeubles pas tou-


jours jolis à voir, une ambiance parfois austère… Certes, mais depuis plus de 2000 ans tous les Juifs du monde répètent inlassablement « L’an prochain à Jérusalem », et non pas « L’an prochain à la plage ou au ski » ! Même les Juifs les plus éloignés du judaïsme ont entendu cette rengaine qui traduite à l’Américaine donnerait : « Location, location, location » (emplacement, emplacement, emplacement en bon français). C’est là que le bât blesse. Jérusalem, 850 000 habitants et seulement 215 237 habitations résidentielles. En moyenne, 81m2 par appartement. Et si les Israéliens de souche sont capables de se considérer comme bien logés dans 35m2 car ils y ont élevé dix enfants, ce n’est certes pas le rêve des étrangers ou des nouveaux immigrants ! Alors, si l’on enlève à nos 215 237 logements, les 21 000 appartements de moins de 40m2, il ne nous reste plus « en stock » que 194 000 appartements environ ! Sur ces 194 000 appartements que tous les propriétaires ne souhaitent pas forcement vendre, seuls ceux situés dans les quartiers centraux intéressent les nouveaux venus ou les étrangers, ce qui nous conduit à ne considérer finalement que 43 800 appartements potentiellement intéressants car situés dans les fameux quartiers sui-

vants : Centre-Ville, Na’hlaot, Shaarei ‘Hessed, Re’havia, Katamon, Mamilla, Talbyeh, Kiryat Moshé, Baît Vegan, Rasco, Moshava Germanit et Yevanit, Baka et Makor ‘Haim. Problème, ces appartements sont habités !!! Et par des gens qui comptent bien rester chez eux ! Or les acheteurs potentiels sont fort nombreux. En effet, déjà parmi la population locale, il y a des personnes qui souhaitent acheter ou déménager. Également intéressés, les nouveaux arrivants d’autres villes israéliennes. Car bien que ces derniers ne compensent pas ceux qui quittent la ville (chaque année environ 10 000 personnes arrivent tandis que 16 000 partent vers d’autres villes, essentiellement vers Tel-Aviv et Bet Shemesh), ce mouvement crée quand même une demande supplémentaire. Se positionnent également les nouveaux immigrants, et si autrefois Haïfa et Tel-Aviv étaient les destinations favorites pour s’installer en arrivant en Israël, aujourd’hui, Jérusalem s’est largement imposée en ville de première intention (en 2014, plus de 11% des nouveaux immigrants se sont installés d’abord dans la capitale). Et sur ces 2800 nouveaux immigrants, une large majorité (927)

arrivaient de France, dépassant même ceux en provenance d’Amérique (678). En résumé donc, une forte demande locale, une forte demande nationale, et un sionisme religieux qui conduit à une nouvelle forme de sionisme : le sionisme immobilier, alliant le sentimental à la sécurité financière. Et malgré des prix forcement très élevés, malgré une architecture loin d’être Haussmannienne et un parcours du combattant pour acheter un bien, c’est bien à Jérusalem que l’investissement immobilier semble le plus sécurisé, conduisant de plus en plus les nouveaux acquéreurs à explorer de nouvelles pistes (« alyah administrative ») pour essayer de maintenir une discrétion absolue, tant ici que dans leur pays d’origine ou de résidence. Car si on est fier (pour soi-même) d’être propriétaire à Jérusalem, on n’a pas forcement envie de s’afficher propriétaire israélien hors de nos frontières... Alors l’an prochain à Jérusalem ? Après tout comme le disait Théodore Hertzl « si vous le voulez, ce n’est pas une légende » ! Sources: Central Bureau of Statistics, Jerusalem Institute for Israeli Research, yad 2, The Marker, Ministere des finances

Déborah Hosatte

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CULTURE LEMAG’

SÉANCE DE RATTRAPAGE TOUT CE QUE VOUS AVEZ TOUJOURS VOULU SAVOIR SUR LA MUSIQUE ISRAÉLIENNE… Rap, rock, soul, pop, variété, classique, jazz, électro, world music… Savez-vous à quel point la création musicale israélienne est prolifique et comme il serait bien dommage de s’en passer ! LeMag’ vous explique pourquoi…

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Rita

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Ofra Haza

Shlomo Artzi

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Naomi Shemer

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sons, des chants folkloriques aux tonalités « mizra’hi », du klezmer au jazz fusion, du rock à la musique expérimentale, de la variété à la pop. « C’est une musique qui fait sans cesse des allers retours » explique Yona Azoulay, citant l’exemple de l’orchestre andalou israélien, « l’une des rares institutions nationales, créée à la fin des années 70, avec une volonté délibérée de valoriser l’identité des Juifs du Maroc. Aujourd’hui, faute de musiciens d’origine marocaine, les russes ont investi les places vacantes ! ». S’enrichissant d’année en année, la sphère musicale israélienne regroupe une pléiade éclectique d’artistes, compositeurs, musiciens et chanteurs. Des figures emblématiques s’en démarquent, illustrant peut-être à elles seules ce qu’est la musique israélienne. Beri Sakharov, du groupe rock new wave ‘Minimal Compact’ par exemple, ou encore

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elon Yona Azoulay, ex-directrice artistique chez BMG-Sony en France, aujourd’hui productrice indépendante installée en Israël depuis plus de dix ans, « c’est un vaste sujet ! ». « C’est un vrai défi que de définir la musique israélienne. Ce que je peux dire, c’est qu’en bientôt 70 ans, le pays a vu se créer un tas de scènes différentes ». Allant parfois puiser ses sources sur des rythmes sémitiques, la musique israélienne contemporaine est bien évidemment le parfait réceptacle de nombreuses influences issues de l’ensemble des diasporas juives, du Maghreb à l’Europe de l’est en passant par l’Asie pour finir ou commencer, qui sait, par le MoyenOrient. Généreuse, pimentée, multiple, colorée, mélancolique et spirituelle, elle s’approprie et mixe tous les


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Yaël Naim

Yael Naim

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Sarit Hadad

Zohar Argov Idan Raichel

Moshé Peretz

Riff Cohen © DR

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Eyal Golan

Ehud Banaï qui mêle avec talent le son rock des sixties au blues, à la musique folklorique et à la liturgie juive. « Une sorte de musique désormais invitée à se produire sur la scène des grands rendez-vous nationaux » confie Yona Azoulay, « tel Shaï Tsabari, artiste issu de la pure tradition israélo-yéménite, accompagné d’Ahouva Ozeri au qanûn, lors de la cérémonie d’hommage à Yitzhak Rabin, en octobre dernier. Via la musique, un nouveau mix est en train d’émerger, même si on retrouve toujours les grands classiques, Arik Einstein en tête, dans les classements des best off ! ». Ce dynamisme de la créativité musicale est certainement la résultante d’une volonté manifeste en Israël de miser sur l’épanouissement artistique de la jeunesse. Plus que partout ailleurs dans le monde, l’accès aux études y est simplifié, comme la diversité de l’offre largement plus dense. Néanmoins, la situation se corse à l’âge adulte face à un marché étroit et à des budgets minimes, ainsi qu’à l’absence de réels statuts, de droits d’auteur, de régime spécifique de protection sociale, de syndicats… sans compter la tension sécuritaire qui interfère sur les projets au gré du temps. « Sur un marché normal, un chanteur à succès a généralement la possibilité de subvenir à ses besoins sur le long terme. Ici, la vie est rude pour les artistes qui vieillissent, rien n’est prévu pour les lendemains qui déchantent. C’est dans ces conditions que Gabi Shoushan, l’une des grandes voix d’Israël, s’est suicidé en février dernier », déplore Yona Azoulay. Mais si les artistes israéliens ont une forte tendance à se projeter à l’international, ce n’est pas seulement pour des raisons structurelles. Même si le réseau de diffusion est plus que limité en Israël, qu’il n’y a pas de médias culturels à proprement parler, qu’un chanteur a vite fait de rencontrer ses fans de Metula à Eilat… Le but ul-

time est de rayonner à l’étranger ! Un phénomène intrinsèque à la nature juive selon Yona Azoulay : « les Israéliens tendent à l’universalité absolue et souhaitent partager leur art avec les autres. Leur ‘’ ici ‘’ est connecté au monde entier. Une conscience extrêmement présente que je ne reconnais qu’aux artistes israéliens ». Aujourd’hui, l’israeli touch s’exporte bel et bien, et notamment dans les pays arabes. C’est le cas, par exemple, d’A-wa, trois sœurs d’origine yéménite, groupe « béni par les Iraniens », usant de sons hip-hop, de folk arabe et d’électro. Également, celui de Shefita qui campe un personnage de chanteuse arabe déjantée avec sa reprise du Karma Police de Radio Head, vue près d’1,3 millions de fois sur Youtube ou encore de Riff Cohen qui collectionne ses plus beaux succès en Turquie ; sans parler de Liraz, la nièce de la chanteuse Rita, qui peaufine actuellement un projet de disque en langue perse « qui va cartonner dans le monde arabe ! », dixit Yona Azoulay. Avec son album original « Thru you too », entièrement composé de vidéos d’inconnus trouvées sur YouTube, ‘Kutiman’- Ophir Kutiel à la ville est le phénomène israélien en vogue qui a conquis l’Occident en à peine deux ans. « Thru you too » a d’abord séduit les internautes avec plus de 8 millions de vues en quelques semaines. Le groupe Balkan Beat Box, de Tamir Muskat et Ori Kaplan, fait lui régulièrement salle comble avec son chanteur énergique Tomer Yossef et sa musique d’esprit tzigane aux puissants sons électro. Et sur les planches des plus grands festivals internationaux, des artistes tels que Yaël Naïm, Keren Ann, Avishaï Cohen, Idan Raichel, Lola Marsh ou encore Asaf Avidan sont régulièrement plébiscités. Katja Epelbaum

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CULTURE LEMAG’

QUAND MUSIQUE ET POLITIQUE FONT PARTITION COMMUNE…

Dans un pays où le débat politique est omniprésent, nombreux sont les artistes qui expriment leur engagement en public. Alors qu’il est courant d’entendre des voix consensuelles en faveur de la paix, certains n’hésitent pas à appuyer là où ça fait mal et tant pis si une image péjorative de chanteur « nationaliste » leur colle définitivement à la peau ! Chanteur à la voix sublime, très populaire en Israël, il se politise progressivement à droite. À l’automne 2014, il voit sa prestation annulée à une soirée organisée à la Présidence de l’État, pointé du doigt par Reuven Rivlin, suite à la sortie de son titre jugé raciste « Ahmed aime Israël ». Une chanson qui recueille en quelques heures plus de 30 000 vues sur Youtube. © DR

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Amir Benayoun

Ariel Silber

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Fondateur avec Mati Caspi du groupe rock Tamouz, il collectionne les tubes dès les années 70. Une carrière qui tourne court à partir de 2006 avec les événements du Goush Katif, le chanteur prenant fait et cause contre l’expulsion, portant kippa et bracelet orange. Ariel Silber est rapidement mis au ban de l’industrie musicale israélienne. Pour preuve, en 2014, il est au centre de la polémique alors qu’il est censé recevoir le prix de l’ACUM (syndicat national des compositeurs et musiciens).

Katja Epelbaum

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Ayant grandi derrière la ligne verte, c’est aujourd’hui dans cette société - celle qui a pris conscience de la réalité sécuritaire depuis le retrait de Gaza - que vient se poser en douceur cet ‘ovni chantant’. À l’automne dernier, il sort son troisième single « Ima », une ballade des plus émouvantes témoignant de la douleur causée par le départ contraint et forcé du Goush Katif. C’est ainsi qu’il fait son entrée dans le « mainstream » musical israélien, ses titres tournant désormais en boucle sur Galgalatz. « Je prie pour que ma musique soit un pont. Que cette chanson ait le mérite d’amener la paix parmi nous. J’espère que l’histoire de mon enfance, qui fut marquée par la couleur orange, fasse partie intégrante de la culture israélienne (…) J’espère que cette chanson réussira à remuer quelque chose dans les cœurs » a déclaré le chanteur.

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BON GOÛT LEMAG’ À chacun son pique-nique !

Salade César au poulet (Bassari) Même si elles ont souvent cette image de menu régime, les stars de l’été, ce sont les salades. Riches et équilibrées, les salades sont aussi pratiques car rapidement prêtes ! De plus, tout le monde les aime et elles permettent de combler tous les appétits… Avec vos salades fraîches, croquantes, colorées à souhait, votre pique-nique sera un succès. Ingrédients pour 4 personnes : 2 poitrines de poulet désossées et sans peau, coupées dans la longueur 1 laitue romaine Quelques feuilles de roquette 1 citron 1/2 baguette 2 gousses d’ail écrasées 6 cuillères à soupe d'huile d'olive 4 cuillères à soupe de vinaigre de vin blanc 1 grosse cuillère à café de moutarde 100 g de dinde fumée 2 œufs Quelques tomates cerises (facultatif) Sel Poivre

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Vacances obligent, finis les repas lourds et les tables dressées. Il est temps de profiter du soleil dans une ambiance conviviale et de se restaurer sans se compliquer la vie. Sur une pelouse, dans un parc ou encore sur la plage devant un joli coucher de soleil, amis et famille seront ravis de partager ce moment de détente avec vous. Mais attention, l’organisation d’un pique-nique ne se prend pas à la légère, car tout compte : l’ambiance bien sûr, la présentation mais surtout la qualité du repas… Alors sortez une jolie nappe (une couverture fera l’affaire), votre cabas en osier, vos couverts en plastique, votre thermos et trouvez l’aire de pique-nique, leMag’ vous a concocté LE pique-nique idéal !

Préparation de la recette : Préparez la marinade de poulet : prélevez le zeste de citron et son jus. Mélangez-les à une cuillère à café d'huile. Ajoutez un peu de sel et de poivre. Placez-y le poulet et laissez mariner pendant 10 minutes. Coupez la baguette en fines tranches et arrosez-les de deux cuillères à soupe d'huile d’olive mélangées à l’ail écrasé. Faîtes griller le poulet pendant 20 minutes sur une plancha, au barbecue ou dans une poêle anti adhésive, en le retournant fréquemment. Pendant ce temps, détachez les feuilles de laitue, lavez-les méticuleusement, découpez-les en lamelles et essorez-les. Procédez de la même manière pour les feuilles de roquette. Faîtes cuire les œufs mollets : lorsque l’eau commence à bouillir, diminuez la source de chaleur et laissez cuire 2 min. Rincez-les tout suite à l’eau froide puis écalez-les. Coupez la dinde fumée en dés. Préparez la sauce en mélangeant le reste de l'huile d’olive avec le vinaigre, la moutarde, le sel et le poivre. Faîtes dorer le pain au four à 200°, ou au barbecue. Une fois le poulet cuit, découpez-le en tranches épaisses et détaillez le pain en cubes pour en faire des croûtons.

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Disposez les feuilles de laitue et de roquette dans un bol avec le poulet, les dés de dinde fumée et si l’envie vous tente de rajouter de la couleur, les tomates cerises. Versez la sauce sur le tout. Coupez les œufs en quatre, dans le sens de la longueur. Déposez-les aussitôt sur la salade afin que le jaune se mélange à la sauce. Rajoutez les croutons juste avant de servir afin de conserver leur croquant.


Ministère de l’Education

Direction de l’Education en Internats et de l’Alya des Jeunes Division de l’Intégration des Olims

LES VILLAGES DE JEUNES EN ISRAEL POUR REUSSIR VOS ETUDES ET VOTRE INTÉGRATION

Inscriptions dans les établissements secondaires (5ème à Tale) Année scolaire 2016-2017

Le ministère de l’Education, Direction de l’Education en Internats et de l’Alya des Jeunes, a mis en place un cursus d’intégration pour olims francophones, récemment arrivés ou étant montés ces dernières années, dans certains établissements secondaires avec internat (plein ou souple). Les avantages: ● oulpan intensif (15-20h/semaine) ● bagrout israélienne générale ou technologique ● établissements sous tutelle et inspection du Ministère de l'Education ● mise à niveau/enrichissement ● programme individualisé ● activités extra-scolaires variées ● équipe francophone ● établissements laiques, religieux ou toranis ● proximité des grandes villes ● scolarité gratuite ● pour les olims en classes de 2nde –Tale: les lycees francais offrent la possibilite de preparer le bac francais. Renseignements et Inscription: Pour plus de renseignements, pour consulter la liste des lycées offrant ces prestations et pour les demandes d'inscriptions - entrer sur le site: kfarihnoar.org.il/french/, ou contacter M. Yoel Grumbach, Responsable de l’intégration des olims francophones au 054-2610003 ou par E-mail: yoelgrum@gmail.com


BON GOÛT LEMAG’ Brochettes de poulet (Bassari) Avec l’arrivée des beaux jours, l’heure du barbecue a sonné. Charbon de bois et pince à la main, vous êtes fin prêts à affronter les flammes pour préparer les délicieuses recettes du traditionnel « al ha ech » national ! Rien de plus agréable que de profiter des rayons du soleil en humant les senteurs grillées des merguez, côtelettes d’agneau et autres brochettes ! Et les brochettes sont souvent à l’honneur. Jolies par leur présentation, faciles à faire et à cuire sur le barbecue, de viande, de poisson ou encore à base de fruits, toutes vos envies peuvent s’empiler sur une pique à brochette.

Ingrédients pour 4 personnes : 500 g de blancs de poulet 2 oignons 1 poivron rouge 2 gousses d’ail Thym 1 cuillère à soupe d’huile d’olive 1 grosse cuillère à soupe de miel 2 cuillères à soupe de sauce soja Poivre Préparation de la recette : Hachez l’ail et coupez les oignons en six. Détaillez le poulet en morceaux et le poivron en gros dés. Préparez la marinade en mélangeant l’huile avec le miel, la sauce soja, l’ail écrasé, le thym et une pincée de poivre. Placez-y le poulet, l’oignon et le poivron et réservez cette marinade au moins

2 heures au réfrigérateur. Préparez les brochettes en alternant les morceaux de poulet, d’oignon et de poivron. Placez-les sur le barbecue pour 15 min de cuisson, en les retournant fréquemment .

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