unef.fr
APFEE
Association pour la Formation des Elus Etudiants
Le mensuel d’information des élus étudiants N° 170 - Novembre 2010 - 0,15 Euros
p. 7
Fiche pratique
Dossier
Interview
Améliorer le calendrier universitaire pour les étudiants
Fusions d’universités : où en est-on ?
Stéphane Jugnot, chef de département au CEREQ
p. 4 - 5
SOMMAIRE
Edito
Actualités locales • L’université de Nîme vient de voter le passage en grand établissement, un risque pour p. 2 les droits étudiants
Actualités nationales • Le décret sur les PRES sonne la fin du monopole des universités sur la délivrance des diplômes nationaux • Enquête du CEREQ sur l’insertion professionnelle : une enquête détourné
p. 3
Aides sociales • Protéger et gagner de nouveaux droits pour les étudiants étrangers
p. 8
p. 6
Dans les années 90 de nouvelles universités voyaient le jour pour accueillir un nombre d’étudiants toujours plus important et ainsi répondre aux besoins de la massification de l’enseignement supérieur. Cette transformation profonde de l’enseignement supérieur était le fruit d’un choix de société : il s’agissait à la fois d’élever le niveau de qualification de chacun mais aussi de rompre la reproduction sociale. Vingt ans plus tard, la carte universitaire se trouve à nouveau en ébullition mais les modalités ont bien changé. Rapprochements d’universités, constitutions de PRES, diversification des statuts, c’est désormais la concurrence effrénée entre établissements qui guide les transformations de la carte universitaire. Et cette concurrence est d’autant plus destructrice pour le service public d’enseignement supérieur qu’elle met aux prises des universités rendues autonomes par la loi LRU de 2007 sans aucun pilotage national. Pire, faute de cadre contraignant, le ministère de l’enseignement supérieur accélère ce mouvement en promettant aux plus ambitieux des financements supplémentaires. « Laisser faire » pour atteindre l’excellence, voilà le credo que semble avoir adopté la ministre. Parce que l’excellence restera une chimère si elle se fait sans les étudiants, les élus « UNEF et associations étudiantes » ont choisi de faire le point sur ces bouleversements de la carte universitaire dans le dossier de ce mois-ci. Enfin, le Lettre des Elus de ce mois reviendra sur la question de l’insertion professionnelle et de l’emploi des jeunes en donnant la parole à Stéphane Jugnot, chef du département des entrées et des évolutions dans la vie active au CEREQ (Centre d’études et de recherches sur les qualifications). Bonne lecture !
Azwaw Djebara, Élu au CNESER
Une publication mensuelle de l’UNEF et de l’APFEE. N° de Commission Paritaire : 0108G82659 - ISSN : 1761-1547 — Directeur de publication : Sébastien Maurice Rédacteurs en chef : Emmanuel Zemmour, Benoit Soulier — courriel : universitaire@unef.fr — Tél : 01 42 02 25 55 — Impression : imprimerie Grenier RCS Créteil B 622.053.189
Actualités locales Nîmes. Le 17 novembre 2010, le conseil d’université de l’université de Nîmes a voté le passage au Grand Établissement.
L’université de Nîmes vient de voter le passage en grand établissement : un risque pour les droits étudiants Depuis deux ans, la carte universitaire subit
4000 euros par an et d’une sélection en pre-
Les élus « UNEF et associations étudiantes»
de profondes transformations. Constitutions
mière année. Or l’introduction de sélection
dénoncent fermement le passage de l’univer-
de Pôles de recherche et d’enseignement
ou l’augmentation des droits universitaires
sité de Nîmes au statut de grand établisse-
supérieur
d’universités,
pour l’université de Nîmes aurait des consé-
ment. Par ailleurs, conscients que les rappro-
changements de statuts sont autant de bou-
quences catastrophiques pour l’ensemble
chements non régulés entre universités pour
leversements importants qui s’enchaînent
des étudiants de la région. L’implantation de
constituer des pôles d’excellence (comme à
sans aucun pilotage national ni concerta-
filières non sélectives et aux frais d’inscrip-
Montpellier) mettent en péril l’avenir des pe-
tion avec les étudiants. Ces réorganisations,
tion régulés nationalement à Nîmes permet
tites universités et les poussent à se doter de
dont le seul et unique moteur est la mise en
d’accueillir un public avec une mixité sociale
statuts dérogatoires pour ne pas disparaitre,
concurrence, mettent en danger la continuité
forte. Toute augmentation des frais d’ins-
les élus « UNEF et associations étudiantes »
du service public d’enseignement supérieur.
cription ou toute sélection des étudiants à
exigent un moratoire sur les processus de res-
En particulier la question de l’uniformité des
l’entrée de l’université serait non seulement
tructuration actuels, ainsi que l’ouverture d’un
statuts des universités est remise en cause
injuste mais surtout fermerait les portes de
débat national sur la carte universitaire.
dans ce mouvement de restructuration. En
l’enseignement supérieur au public actuel
effet, la course à l’excellence organisée par
des étudiants nîmois.
(PRES),
fusions
Maria Cotora Élue au CNESER
le ministère de l’enseignement supérieur pousse les universités à se démarquer les unes des autres pour rester du côté des établissements dits compétitifs. Ainsi, de plus en plus d’établissements cherchent à s’exonérer
En hausse
des règles nationales qui régissent l’ensei-
Mobilisation pour les vacataires de
gnement supérieur et cela aux dépens des
l’université de Strasbourg
En baisse Le budget de la licence dans le PLF 2011 Les résultats de la 4ème étude PISA (Pro-
étudiants. Un collectif de contractuels et vacataires de l’Uni-
gramme pour l’évaluation internationale des
C’est le cas de l’université de Nîmes qui a
versité de Strasbourg (CONVACS) appuyé par
élèves) ont été rendus publics par l’OCDE. Ce
voté, le 17 novembre 2010 le passage au
de nombreux syndicat a lancé une pétition pour
programme évalue les connaissances en ma-
statut de « grand établissement ». Ce vote
la titularisation des vacataires de l’université. En
thématique lecture, et expression des jeunes
constitue une régression sans précédent
effet dans un contexte de suppressions massives
de 15 ans, quelle que soit leur situation sco-
pour les étudiants nîmois. Le statut de grand
de postes et de désengagement de l’Etat dans le
laire et sociale dans l’ensemble des pays de
établissement permet aux universités de sor-
financement des universités, de nombreux ensei-
l’OCDE. Les résultats de la France (en 18ème
tir des cadres légaux qui régissent le service
gnants sont recrutés au titre de vacataires alors
position) révèlent non seulement un part crois-
public d’enseignement supérieur, notamment
qu’ils exercent au même titre que les titulaires. Le
sante d’élèves en grande difficulté (20% contre
en termes de sélection et frais d’inscription.
collectif exige la titularisation de ces enseignants
15% en 2000) mais surtout un creusement des
L’exemple de l’université de Paris 9 est fla-
au 1er janvier 2011.
inégalités scolaires très largement expliqué par
grant. Cette université est devenue un grand
le milieu social des élèves selon l’OCDE. Il est
établissement en 2004, ce qui a permis une
impératif de prendre ces résultats au sérieux
augmentation des frais d’inscription jusqu’à
pour remettre en marche l’ascenseur social à l’école.
2
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
Actualités nationales PRES. Brèves du CNESER Le décret sur les PRES sonne la fin du Le 17 novembre une proposition de loi concernant l’immobilier universitaire a été examinée par le Sénat. L’article 2 de cette loi donne la possibilité aux PRES (Pôles de recherche et d’enseignement supérieur) de délivrer directement des diplômes nationaux.
monopole de la délivrance des diplômes nationaux par les universités
La reconnaissance de diplômes nationaux est un monopole d’Etat. Seules les universités publiques sont habilitées à délivrer ces diplômes. Cette disposition est une garantie de la qualité des diplômes et de l’égalité de tous devant la formation. En effet le diplôme est une protection pour tous contre le chômage dès lors que deux conditions sont remplies : son contenu (c’est-à-dire les qualifications qu’il sanctionne) doit être reconnu nationalement et son accès doit être garanti pour tous les étudiants, quel que soit leur milieu social d’origine. A l’origine destinés à promouvoir la collaboration des équipes de recherche, les PRES regroupent à l’heure actuelle des établissements publics et privés (par exemple l’institut catholique de Lyon fait partie du PRES de Lyon). Par le décrèt adopté le 17 novembre, l’État permet désormais aux PRES de délivrer des diplômes nationaux, on permet par
conséquent aux établissements privés rattachés à ces PRES d’obtenir la reconnaissance de leur offre de formation par des diplômes nationaux. Or contrairement aux universités publiques, les universités privées n’offrent aucune garantie en matière de neutralité, de contenu pédagogique de formation ou de modalités d’examens mais aussi d’absence de sélection et de frais d’inscription. Priver les universités publiques de leur principal atout qui est la reconnaissance nationale revient à organiser une véritable concurrence déloyale alors que les universités assurent une mission de service public. C’est pour celà que les élus « UNEF et associations étudiantes » demandent la suppression de l’article 2 du projet de loi. Emmanuel Zemmour, Élu au CNESER
Insertion. Pour la première fois le ministère de l’enseignement supérieur a publié des chiffres sur l’insertion professionnelle des jeunes diplômés de master. Les élus « UNEF et associations étudiantes » dénoncent une opération de communication dont l’objectif est moins de fournir des réponses aux inquiétudes des étudiants que d’accentuer la mise en concurrence.
Enquête du CEREQ sur l’insertion professionnelle : une enquête détournée
Le service public de l’enseignement supérieur doit permettre à chacun de réussir une insertion professionnelle durable. A l’heure où le chômage touche 25% des jeunes des jeunes et où le premier emploi stable est décroché en moyenne à 27 ans, il y a une réelle urgence à donner les moyens à chaque université de remplir cette mission. L’enquête annoncée par le ministère de l’enseignement supérieur en lien avec le Centre d’étude et de recherche sur les qualifications (CEREQ) devait fournir des informations précieuses pour identifier précisément les difficultés rencontrées par l’ensemble des 18-25 ans sur le marché de l’emploi. Malheureusement il n’en est rien. A l’inverse des enquêtes annuelles « Générations » du CEREQ, l’enquête du ministère présente des résultats université par université, filière par filière du taux d’insertion professionnelle. Ces chiffres compa-
CNESER du 25 octobre 2010 Une motion adoptée sur les fusions pour un « débat démocratique national sur la carte universitaire » Lors du CNESER du mois d’octobre, le ministère a fait savoir sa décision de contractualiser avec les universités sur une durée de 5 ans (contre 4 actuellement). Il a aussi fait part de sa volonté d’élargir les compétences des PRES par le biais de contrat entre les pôles et le ministère. Cette mesure a été prise sans concertation et s’applique dans l’opacité la plus totale. Ainsi le principe a consisté à solliciter un à un les présidents de certaines universités pour déterminer les établissements participant à une cinquième vague de contractualisation laissant dans l’ignorance les représentants élus des personnels et des étudiants. Ce procédé est la marque d’un profond mépris pour la démocratie universitaire et ses acteurs. De plus, permettre aux PRES de contractualiser avec l’Etat est une profonde remise en cause de l’égalité entre les universités sur le territoire. Le CNESER a ainsi adopté une motion dénonçant la méthode employée par le ministère pour passer à la contractualisation quinquennale et
ratifs doivent, selon la ministre, permettre de révéler les performances de chaque établissement et servir « d’instrument de pilotage » pour l’Etat « qui en tiendra compte dans ses dotations financières aux campus. ». Le ministère pense que c’est en mettant en concurrence les universités que l’on pourra résoudre les problèmes d’insertion des jeunes. Cette idée est non seulement fausse mais surtout dangereuse. Le CEREQ a lui-même publié une note consécutive à l’enquête insistant sur le fait que les différences de résultats sont dues non aux différences entre établissements mais aux situations locales de l’emploi. La ministre préfère ainsi laisser la situation des jeunes s’aggraver tout en creusant les inégalités entre universités plutôt que de prendre ses responsabilités. Les élus « UNEF et associations étudiantes »
demandant l’ouverture sans délai d’un débat national sur la carte universitaire.
dénoncent le déchargement de responsabilité du ministère de l’enseignement supérieur et exigent : • Un financement fléché nationalement pour les bureaux d’aide à l’insertion professionnelle (BAIP) • Des règles contraignantes d’encadrement pédagogique des stages, et en particulier l’interdiction des stages hors cursus • La systématisation des stages obligatoires en troisième année de licence Yannick Sabau, Élu au CNESER
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
3
Dossier
Carte universitaire. Alors qu’aucun débat national n’a été ouvert sur l’aménagement du territoire universitai et associations étudiantes » reviennent sur une situation créatrice d’inégalités, mais également sur ses propositio
Fusions d’universités : Où en e Deux ans après la fusion des universités de Stras-
a mis en place une série d’outils y incitant. Ainsi
Le maillage territorial des formations. Les
bourg et alors même qu’aucun bilan n’a été tiré de
le Plan Campus prévoit d’augmenter les finances
fusions entre universités de villes différentes
cette expérience, on assiste a un développement
des universités qui font le choix de se rapprocher.
(comme Nancy-Metz, Dijon-Besançon, Reims-
des processus de fusions. Ainsi les universités
De même le grand emprunt national sera réservé
Amiens…) regroupent des établissements qui
d’Aix Marseille, de Lorraine, du Nord, de Montpel-
aux établissements sous conditions de mettre en
proposent parfois les mêmes formations, au sein
lier…se sont engagées dans la voie de la fusion.
place des initiatives d’excellence.
d’un seul grand pôle. Dans un contexte de pénurie
Cependant, l’accélération des fusions d’universités n’est pas un enjeu anodin : au-delà de bousculer totalement la carte universitaire et donc de
Les fusions précarisent les droits des étudiants
menacer le maillage territorial, ces fusions recou-
budgétaire ces nouveaux établissements seront tentés de faire des économies en rationnalisant leur offre de formation, c’est-à-dire en ne gardant qu’un seul site pour chaque filière et en fermant
vrent également d’autres conséquences qui ne
Les fusions d’universités posent aujourd’hui de
les formations qui existent dans deux villes diffé-
peuvent être simplement éludées sous peine de
sérieux problèmes car la constitution de masto-
rentes. Les fusions risquent donc de provoquer
mettre en danger le service public d’enseignement
dontes universitaires de 80000 étudiants (contre
la suppression d’un grand nombre de filières,
supérieur. Le système actuel d’enseignement su-
en moyenne 15000 aujourd’hui) n’est pas possible
privant de formation les centaines d’étudiants qui
périeur n’a en effet pas été conçu pour supporter
dans le cadre de la législation actuelle. En effet les
n’auront pas les moyens de déménager. A l’heure
des changements de cette ampleur. Aucune règle
mécanismes qui garantissent la qualité du service
actuelle, l’Etat dispose d’outils pour contrôler l’offre
nationale n’existe aujourd’hui pour encadrer ces
public dans les universités ne sont pas conçus
de formation dans chaque université. En effet une
transformations, laissant ainsi une liberté quasi-
pour une telle masse d’étudiants. En particulier la
université ne peut dispenser une formation qu’en
totale aux établissements pour fixer les contours
démocratie au sein des universités, la répartition
recevant une habilitation du ministère et en s’enga-
de leur fusion (gouvernance, statuts, répartition
égalitaire des formations sur le territoire, le finan-
geant vis-à-vis de l’Etat par le biais des contrats
du budget, maintien ou pas des sites de chaque
cement selon les besoins des établissements sont
pluriannuels. Ce cadre de régulation ne permettra
université…).
autant d’éléments incontournables pour la réus-
pas à l’Etat d’obliger ces nouveaux établissements
site de tous à l’université mais qui risquent pourtant
de concentrer leur formation sur une seule ville et
d’être profondément remis en cause.
de prendre en compte les besoins des étudiants.
Le gouvernement pousse les universités au regroupement
La démocratie. La fusion d’université induit de
Le financement. Depuis que la loi LRU a suppri-
L’enseignement supérieur subit à l’heure actuelle
manière automatique une baisse de la représen-
mé les fléchages budgétaires contraignant filière
une mutation profonde. L’objectif affiché par Valé-
tativité
étudiante, en maintenant un maximum
par filière, et dans un contexte de course à l’excel-
rie Pécresse est clair : favoriser, par le regroupe-
de 5 élus étudiants au CA et 16 au CEVU pour
lence, les sciences humaines voient leur finan-
ment de différents établissements, l’émergence
une masse d’étudiants qui augmente automati-
cement fondre au profit des filières scientifiques.
d’une dizaine de grands pôles d’excellence qui
quement du fait de la fusion. Un élu étudiant sera
Seules les universités dispensant essentielle-
auraient ainsi une visibilité internationale et se-
amené à représenter jusqu’à 20 000 étudiants !
ment des enseignements de sciences humaines
raient à même de rivaliser avec les grands pôles
Cela constitue une atteinte grave à la démocratie
(comme Montpellier 3 par exemple) parviennent à
universitaires étrangers. Afin de pousser aux
à l’université.
préserver les budgets de ces filières. En intégrant
regroupements universitaires, Valérie Pécresse
ces établissements à des grands pôles universitaires sans imposer de règle de financement pour préserver les sciences humaines, on risque d’assister à une véritable absorption de ces formations au profit des filières scientifiques, comme l’a déjà démontré l’exemple de l’université de Strasbourg. La fongibilité asymétrique. Depuis la mise en place du budget global, les universités ont la possibilité de transformer un poste statutaire (personnel BIATOS, enseignant) en crédits budgétaires. C’est ce qu’on appelle la fongibilité asymétrique. A l’heure actuelle chaque université comporte des services administratifs d’entretien et d’accompagnement (SCUIO, BAIP…) qui permettent aux
4
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
Dossier
ire, les processus de fusions d’universités s’amplifient renforçant ainsi les craintes des étudiants. Les élus « UNEF ons.
est-on ? étudiants d’être encadrés tout au long de leur par-
Pour cela, un moratoire doit être instauré sur les
• Pour éviter le développement d’une concur-
cours. La fongibilité asymétrique risque de pous-
fusions en cours pour ouvrir un débat national sur
rence effrénée entre les universités, les fusions
ser les universités à concentrer ces services (par
la carte universitaire avec l’ensemble de la com-
doivent intégrer tous les établissements publics
exemple en ne gardant qu’un seul SCUIO pour
munauté universitaire et fixer les outils permettant
de l’académie.
l’ensemble des universités qui auront fusionné)
de garantir dans le cadre des fusions l’accès de
pour obtenir des crédits supplémentaires, dégra-
tous à une formation de qualité.
dant ainsi le taux d’encadrement des étudiants.
La tentation du grand établissement La volonté à peine masquée du gouvernement de déréguler l’enseignement supérieur laisse la
Définir des critères nationaux concernant les fusions
Cette régulation doit ainsi permettre de garantir un cadre national pour l’enseignement supérieur et
L’Etat doit encadrer les processus de fusions afin
l’égalité entre étudiants.
que celles-ci ne se traduisent pas par une régres-
Toutes les universités doivent avoir le même statut
porte ouverte aux dérives les plus dangereuses
sion des droits pour les étudiants ou par des inégalités budgétaires accrues entre les filières. Pour cela les élus « UNEF et associations étudiantes » revendiquent :
pour les étudiants. Ainsi des présidents d’uni-
Le maintien d’un seul et même statut pour toutes
versités ont fait part de leurs souhaits de passer
les universités est ce qui permet d’assurer l’égalité
• L’harmonisation des droits étudiants par le haut
sous statut de grand établissement. Le passage
d’accès et de traitement entre les étudiants d’une
pour les étudiants d’une même université.
au statut de grand établissement est certaine-
université à l’autre, mais aussi d’imposer un cer-
ment le statut dérogatoire le plus dangereux pour
tain nombre de règles aux universités liées aux
• Un fléchage national des crédits budgétaires vers
les étudiants envisagé à l’heure actuelle dans le
missions de service public de celles-ci : non sélec-
les grands secteurs de formation doit être restauré
cadre de fusions. Il permet en effet de revenir sur
tion des étudiants, fonctionnement démocratique,
pour assurer de bonnes conditions d’étude dans
deux acquis fondamentaux pour les étudiants : la
existence de droits étudiants…
toutes les filières.
Assurer un aménagement équilibré du territoire
Créer de nouveaux outils démocratiques
gouvernance et de représentation des étudiants
Si les élus « UNEF et associations étudiantes »
Afin de permettre à la communauté universitaire
dans les instances de décision.
sont favorables à une réflexion et à une redéfini-
et notamment aux étudiants d’être pleinement
tion de la carte universitaire, celles-ci doivent se
acteurs des choix effectués par l’université, de
Le blanc-seing accordé par la ministre jusqu’à
faire tout en garantissant à tous les jeunes l’ac-
nouvelles règles démocratiques doivent permettre
ce jour aux établissements ayant annoncé leur
cès à l’enseignement supérieur. Pour poursuivre
d’intégrer les étudiants à tous les échelons de déci-
volonté de sortir du système universitaire pour
la dynamique de démocratisation l’Etat doit se
sion et de leur assurer une représentation juste et
passer au statut de grand établissement est un
donner les moyens d’assurer des implantations
proportionnelle :
signal grave envoyé aux étudiants. La ministre,
universitaires en nombre important réparties de
en ne mettant pas un coup d’arrêt immédiat à ces
manière équilibrée sur le territoire.
libre inscription à l’université, sans sélection, et la régulation nationale des frais d’inscriptions. Il permet également de déroger aux règles du service public d’enseignement supérieur en matière de
système d’enseignement supérieur dérégulé.
Les élus « UNEF et associations étudiantes » se battent pour une nouvelle régulation de la carte universitaire
• Le nombre d’étudiants siégeant en conseil d’administration des universités doit être augmenté
velléités, assumera la responsabilité de voir notre • Pour éviter l’apparition de déserts universitaires
pour compenser l’augmentation du nombre d’étu-
par l’effet de suppressions de certaines filières, les
diants représentés.
élus « UNEF et associations étudiantes » revendiquent l’ouverture d’un débat national sur l’aména-
• Le CNESER doit être consulté sur la redéfinition
gement du territoire pour assurer à chaque jeune
de la carte universitaire et les avis qu’il prononce
l’accès à une formation supérieure dans la filière de
doivent être rendus contraignants.
son choix à moins de 100 km de son lieu de vie. Dossier réalisé par Florent Voisin,
Les élus « UNEF et association étudiantes » alertent la ministre sur l’urgence d’une régulation
• Une instance académique présidée par le recteur
nationale des fusions en cours, qui, si elle n’a pas
et composée sur le modèle du CNESER doit être
lieu, risque de conduire à un recul de la démocra-
créée afin de définir la carte des formations au
tisation.
niveau académique ainsi que la politique de site
Élu au CNESER
dans un cadre démocratique.
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
5
Aide sociale Étudiants étrangers. Plusieurs milliers d’étudiants étrangers s’inscrivent chaque année à l’université mais pour beaucoup l’université française s’apparente au parcours du combattant... Face à cette situation les élus ont un rôle majeur pour les aider et les accompagner dans leurs démarches.
Protéger et gagner de nouveaux droits pour les étudiants étrangers !
Accueil et séjour des étudiants étrangers : un système injuste et incohérent
gers sont fixés pour les préfectures par le ministère. Comment un préfet peut-il juger de la réussite
En France, l’accueil et le séjour des étudiants
d’un parcours pédagogique ? Sous couvert de
étrangers sont encadrés par un système in-
vouloir respecter les chiffres de reconduite à
juste et incohérent. Injuste car les étudiants
la frontière dictés par le ministère les préfets
subissent de plein fouet une triple précarité :
accentuent considérablement la précarité administrative des étudiants étrangers.
• une précarité sociale : les étudiants étrangers n’ont pas accès au système d’aide social en France(en dehors de l’aide d’urgence ponc-
Quelle feuille de route pour les élus étudiants ?
tuelle du CROUS). Le rôle des élus étudiants est d’agir pour per• une précarité administrative : les étudiants
mettre aux étudiants étrangers de gagner de
étrangers subissent une lourdeur des dé-
nouveaux droits collectifs mais aussi d’interve-
des difficultés liées à la procédure de demande
marches pour l’obtention et le renouvellement
nir pour les accompagner et les défendre dans
d’admission préalable (DAP).
du titre de séjour.
leurs démarches individuelles.
• une précarité pédagogique : des difficultés
Obtenir des droits pour les étudiants étrangers
été admis dans une université qui ne corres-
sociales et administratives qui entrainent les
c’est tout d’abord leur permettre d’avoir accès à
pond pas au lieu d’hébergement qu’ils ont en
étudiants dans la spirale de l’échec et qui sont
l’éducation et à l’université.
France ou tout simplement les étudiants qui
En effet, nombreux sont les étudiants qui ont
aggravées par l’absence de dispositifs d’aide pédagogique.
Alors que les étudiants français et étrangers sont égaux dans les amphis, ils restent inégaux face à la loi.
n’ont pas, pour diverses raisons, pu faire la Ainsi, les élus « UNEF et associations étu-
DAP à temps. Contrairement à ce que peuvent
diantes » à Nanterre ou encore à Versailles St
dire certaines universités, les dérogations sont
Quentin, ont fait voter une motion dans laquelle
possibles. Lorsqu’il n’existe pas de commis-
était inscrit que l’université ne devait plus
sions de dérogation dans l’université, les élus
rendre le contrôle du titre de séjour obligatoire
étudiants peuvent aider, au cas par cas, auprès
lors de l’inscription.
du président de l’université, les étudiants étrangers à déroger à la DAP.
Cette situation alarmante dans laquelle se
Pour faciliter les démarches administratives et
trouvent les étudiants étrangers s’inscrit
améliorer l’accueil des étudiants étrangers, il
Tout au long de l’année, les étudiants étrangers
dans un contexte chargé de préjugés xé-
faut mettre en place et développer les guichets
doivent être défendus, notamment en ce qui
nophobes véhiculés par le gouvernement.
uniques. Ces guichets ont vocation à regrouper
concerne les difficultés liées au renouvellement
L’immigration serait synonyme de menace
sur l’université ou dans les CROUS l’ensemble
du titre de séjour. Les élus « UNEF et associa-
pour l’identité nationale. Et ce débat nau-
des services dont l’étudiant étranger a besoin
tions étudiantes » développent des cycles de
séabond amorcé par Brice Hortefeux n’est
(CROUS, université, CAF, Préfecture…).
formation pour les élus étudiants.
que l’illustration d’un véritable harcèlement du gouvernement envers les étrangers, qui
Par ailleurs, à
ces droits collectifs doivent
Laure Delair
se traduit par « une politique du chiffre ».
s’ajouter une défense individuelle. Dès l’ins-
Élue au CA de Paris 12-Créteil
Des quotas d’expulsions et de contrôle des
cription, les étudiants étrangers rencontrent
cursus pédagogiques des étudiants étran-
6
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
Fiche pratique Fiche pratique. C’est durant les mois de novembre et de décembre que commencent à s’élaborer les calendriers universitaires de l’année suivante. Il est donc particulièrement important d’avoir rapidement des discussions dans les CEVU et les CA pour préparer un calendrier qui participe à la réussite de tous.
Améliorer le calendrier universitaire pour les étudiants mois après la reprise des enseignements. De
soit maintenue la possibilité pour les étudiants en
manière générale il vaut mieux éviter de modifier
Master de soutenir leur mémoires en septembre
le calendrier d’une année entamée. En effet, des
sans être pénalisés ou obligés de se réinscrire !
informations périmées ou contradictoires sont souvent génératrices de stress pour les étudiants
Semaine blanche de révisions. Il est important
qui ont les yeux rivés sur leurs dates d’examen.
de se battre pour que les calendriers comprennent
Comment faire du calendrier universitaire un outil pour la réussite de tous ?
un maximum de temps pédagogiques de révision. Ce que nous entendons par semaine blanche de révision n’est pas une semaine de vacances mais un temps pédagogique durant lequel des plages de tutorat sont ouvertes et toutes les bibliothèques
Le calendrier universitaire est un élément clé de
Semaine pédagogique. Ce temps pédagogique
sont accessibles. Durant ces semaines il ne doit
la vie et de la réussite des étudiants. Semaines
a été introduit dans les cursus licences par le plan
plus y avoir de cours en amphi et l’ensemble des
de cours, semaines de révisions, semaines de
réussite en licence (PRL). Cette semaine s’inter-
plages horaires de travaux dirigés doivent être
partiels ou de vacances sont autant de temps
cale normalement lors de la semaine de la Tous-
maintenues, sans obligation d’assiduité, pour per-
qui déterminent le rythme de vie des étudiants, et
saint. Elle a pour objectif de réunir les enseignants
mettre aux enseignants de rendre et/ou de corri-
donc la possibilité ou non pour eux de faire face
référents de chaque filière et de leur donner le
ger un certain nombre de travaux, de faire de la
aux nombreux obstacles qui jonchent le chemin
temps d’échanger entre eux pour repérer les pro-
méthodologie ou de répondre aux questions. Pour
de la réussite. C’est donc une attention toute par-
blèmes pédagogiques et les étudiants en difficul-
éviter que certains enseignants ne se servent de
ticulière que les élus doivent porter au calendrier
té pour les orienter vers le tutorat. Il faut s’appuyer
ce temps pour faire du contrôle continu il suffit de
universitaire.
sur le PRL pour éviter que cette semaine ne soit
demander la fermeture du logiciel de rentrée des
qu’une simple semaine de vacances, car la possi-
notes (APOGE) le lundi de la première semaine
L’élaboration des calendriers commence en
bilité de réserver une semaine du calendrier pour
de révision. Ces semaines de révisions doivent
général au mois de novembre de l’année pré-
faire le point sur le semestre est indispensable
être intercalées dans le calendrier à minima avant
cédente. Il est particulièrement important de les
pour la réussite de chacun.
chaque session d’examen, et également avant les
mettre rapidement à l’ordre du jour des CEVU et
rattrapages (soit 4 semaines blanches de révisions
des CA pour préparer un calendrier qui participe à
La question des rattrapages. Un des éléments
la réussite de tous. Dans un contexte général où
central dans les discussions sur le calendrier
la tendance est à l’allongement des calendriers
universitaire est la question de la place des rat-
universitaires, il faut veiller à ce que ceux-ci ne
trapages dans l’organisation de l’année. Il n’y a
se fassent pas contre la réussite du plus grand
pas de solution idéale. En les mettant en sep-
nombre.
tembre ou en juin les résultats sont généralement
Dans l’élaboration et la discussion d’un calendrier
identiques (avec un taux de présence plus faible
qui permettent la réussite d’un maximum d’étu-
Concernant l’année universitaire les règles légis-
en septembre). Par contre les taux de réussite
diants, il est important de prendre un compte la
latives sont assez simples : l’année se décom-
augmentent quand les universités mettent des
question des personnels enseignants dont le
pose en deux semestres, chacun de ces deux se-
moyens pédagogiques suffisants pour encadrer
travail est également déterminé par le calendrier
mestres doit comporter au minimum 10 semaines
les révisions des étudiants. C’est pourquoi il
universitaire. Il faut s’assurer que les semaines
d’enseignement. Sur ce dernier point la norme
faut lier la question des rattrapages à celle des
pédagogiques soient bien comptées comme des
est plus proche de 13 semaines. Cet allonge-
semaines blanches de révision. Dans les univer-
semaines d’enseignements (et donc rémuné-
ment des cours est plutôt favorable aux étudiants
sités avec un contrôle continu intégral il faut se
rées) et non de vacances pour les enseignants et
puisque cela permet d’étaler l’apprentissage des
battre pour maintenir un temps de rattrapages (en
les personnels non-enseignants concernés.
connaissances sur un temps plus long et donc de
plus d’un temps d’examens pour les étudiants en
mieux les assimiler.
contrôle terminal) pour respecter la règles des
Sébastien Chaillou
deux sessions y compris pour les étudiants en
Élu au CNESER
Un calendrier universitaire peut être modifié après
contrôle terminal. Enfin quelque soit la date de
la rentrée universitaire, mais pas au-delà d’un
la session de rattrapage il faut veiller à ce que
en tout sur l’année).
Quelques éléments pour aller plus loin :
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
7
Interview Le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (CEREQ) est un établissement public fran-
3 questions à ... Stéphane Jugnot, chef de département au CEREQ La Lettre des Élus : Pouvez-vous nous présenter en quelques mots le CEREQ et l’enquête «insertion professionnelle» des diplômés de master publiée récemment par le ministère de l’enseignement supérieur? Stéphane Jugnot : Le centre d’études et de recherches sur les qualifications (CEREQ) est un établissement public sous la tutelle des ministères en charge de l’Education nationale et de l’Emploi. Il étudie notamment le lien entre formation, accès à l’emploi et trajectoires professionnelles. Pour étudier les conditions d’accès à l’emploi des jeunes, le CEREQ a mis en place un dispositif d’enquêtes régulières auprès de jeunes sortis de formation initiale : les enquêtes « Génération ». Des jeunes sortis la même année du système éducatif, diplômés ou non, de tous niveaux de formation, sont interrogés trois ans après leur sortie sur leur parcours professionnels. L’enquête « insertion professionnelle » des diplômés de master publié récemment par le ministère en charge de l’enseignement supérieur s’inscrit dans les suites de la loi « LRU », qui a fait de l’insertion professionnelle, un objectif important de l’Université. Pilotée par le ministère, elle est collectée sur le terrain par les universités, via leurs observatoires. Son objectif est de produire des indicateurs par filière, par université, avec plus de détail que les enquêtes du Céreq ne le permettent. En revanche, son questionnaire beaucoup plus court, ne permet pas d’aborder l’insertion dans toutes ses dimensions. Par ailleurs, ses résultats ne sont pas comparables avec ceux d’autres enquêtes de même type réalisées sur d’autres champs, comme par exemple les enquêtes d’insertion des écoles de commerce et des écoles d’ingénieur. LDE : Quelles sont les principales conclusions de cette enquête sur l’insertion professionnelle des jeunes diplômés de master ? Stéphane Jugnot : Les principaux résultats de l’enquête « master » rejoignent les enseignements tirés de nos enquêtes. Globalement, la plupart des diplômés de master accède à l’emploi, avec quelques nuances selon les domaines et les spécialités. En revanche, les conditions d’emploi, le ni-
8
veau de responsabilité et la nature de l’employeur varient davantage entre spécialités. Par exemple, en Lettres comme en Gestion, neuf diplômés sur dix sont en emploi trente mois après leur sortie mais les diplômés de Lettres sont beaucoup moins souvent sur des postes de cadres ou de professions intermédiaires et beaucoup moins en CDI. Ils sont par contre plus souvent dans la Fonction publique. Peut-on en tirer des conclusions sur l’efficacité ou l’utilité des formations elles mêmes ? Pas forcément. Par exemple, parce qu’un raisonnement utilitariste devrait aussi tenir compte des trajectoires de long terme, de la capacité à s’adapter à des nouveaux métiers dans un environnement économique et technologique en évolution constante. Parce qu’aussi, ce constat doit conduire à se poser la question d’existence possible de préjugés du côté des recruteurs. LDE : Il apparaît, au regard des enquêtes précédentes du CEREQ, que dans un contexte de fort chômage, le diplôme reste la meilleure arme contre le chômage. Existe t il pour autant des phénomènes de déqualification? Stéphane Jugnot : Le diplôme reste en effet la meilleure arme contre le chômage. Près d’un jeune sur six sort chaque année de formation initiale sans aucun diplôme. Ce sont eux qui subissent le plus la précarité, les alternances d’emplois courts et de périodes de chômage. En période de chômage important, l’employeur peut plus facilement privilégier, même pour un emploi ne nécessitant pas de connaissances spécifiques, un demandeur d’emploi un peu plus diplômé. D’où, second versant de cette réalité, une certaine « déqualification » et le débat induit sur une éventuelle « dévalorisation » des diplômes. Repérer statistiquement l’ampleur du phénomène et son évolution est toutefois délicat parce qu’il suppose de fixer une norme pour dire qu’à telles formations devraient correspondre tels emplois. Or le marché du travail ne fonctionne pas de façon aussi mécanique. Il est plus souple. Même si le diplôme a sans doute plus d’importance en France que dans d’autres pays, surtout pour les diplômés de certaines écoles, le diplôme ne détermine pas une fois pour toute votre trajectoire professionnelle future.
La Lettre Des Élus n°170 - Novembre 2010
çais à caractère administratif qui réalise des études dans les domaines du marché du travail, des qualifications et de la formation professionnelle.
Le Centre d’études et de recherches sur les qualifications est chargé d’examiner la situation de l’emploi et de la formation en France de manière à veiller à une meilleure cohérence entre les deux. Il évalue notamment l’impact des évolutions techniques sur celle de la main d’œuvre et s’intéresse aux évolutions de la gestion des ressources humaines. Il apporte son expertise à la Commission nationale de la certification professionnelle et aux commissions professionnelles consultatives.
LDE : Les résultats de l’enquête établissent une comparaison entre les taux d’insertion professionnelle université par université. Peut on pour autant opérer à l’appui de ces résultats un classement d’université? Stéphane Jugnot : Je nuancerai votre lecture : l’enquête d’insertion des diplômés de master n’établit pas comparaison, elle permet la comparaison. Ce n’est pas pour autant que classer a du sens. D’abord, parce que classer suppose de choisir un seul indicateur et d’assigner ainsi un objectif implicite aux établissements. Conduire à un emploi quel qu’il soit? Conduire à un emploi à responsabilité ? Conduire à un emploi bien rémunéré ? Etc. Seule une approche multi critère permet d’étudier les conditions d’accès à l’emploi. Ensuite, il faut savoir si les différences observées, par exemple sur les taux d’emploi, sont statistiquement significatives ou non. Pour cela, il faut tenir compte du fait que certains étudiants ne répondent pas à l’enquête. Il faut aussi tenir compte des différences de filières entre universités, pour comparer leurs écarts dans les taux d’emploi moyen. Si le diagnostic que l’on souhaite porter est en termes de valeur ajoutée de l’université, il faut aussi tenir compte d’autres aspects, comme la situation du marché du travail local ou la trajectoire scolaire antérieure. Comment comparer par exemple, un master sélectif alimenté par des jeunes en double cursus avec une « grande école » à un master moins sélectif d’une université cherchant d’abord à conduire le plus loin possible les jeunes bacheliers de son territoire ? Les objectifs ne sont pas forcément les mêmes, les indicateurs d’évaluation non plus. De ce point de vue, les classements que publient la presse ne contribuent pas forcément, ni à une bonne information du public, ni à une bonne gouvernance du système. Propos recueillis par Emmanuel Zemmour Élu au CNESER