WE DEMAIN INITIATIVE N°4

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© DR, Albert Harlingue/Roger-Viollet, Shutterstock

Trois mille personnes ont déjà bénéficié pendant neuf mois (renouvelables une fois) d’un accès à des forfaits prépayés à très bas prix et d’un accompagnement qui doit permettre à chacun d’identifier ensuite l’offre commerciale la mieux adaptée à sa situation. Le même principe est actuellement en test avec Internet auprès d’une vingtaine de personnes hébergées en foyer. SFR fournit les cartes prépayées et les boîtiers de connexion Wi-Fi, finance une partie des frais de fonctionnement et met à disposition du projet une centaine de collaborateurs via du mécénat de compétences. Testé à Paris, le système Connexions solidaires est voué à essaimer dans toute la France. « Nous testons différentes formules, via des antennes Emmaüs ou d’autres structures », explique Charles-Édouard Vincent. Une sorte de franchise dont Emmaüs Défi serait la tête de réseau.

les références vendues grâce à un outil de gestion développé par le cabinet Accenture. Une façon de mieux adapter l’offre de produits à la demande des familles, et de pouvoir fournir des statistiques aux bailleurs de fonds, notamment les pouvoirs publics. Grâce aux ventes du bric-à-brac, l’association ne perçoit que 50 % de subventions, et les opérations montées en partenariat sont largement financées par les entreprises. Créer une dynamique d’insertion des « grands exclus » en donnant au travail un rôle central et en se tournant

De multiples partenariats « Les collaborateurs via le mécénat de compétences, les clients via l’option solidaire proposée avec leur abonnement, et même les concurrents via la cellule de médiation mise en place pour régler les contentieux des bénéficiaires avec leur opérateur antérieur… ce projet rassemble toutes nos parties prenantes », s’enthousiasme Emmanuelle Potin, responsable de la Fondation SFR. Elle vient de signer un nouvel engagement, assorti d’objectifs ambitieux : cinq antennes ouvertes en 2013 et 100 000 bénéficiaires en trois ans. Emmaüs Défi multiplie les partenariats. Outre SFR, l’association s’est rapprochée de Carrefour et de Seb pour lancer il y a un an la Banque solidaire de l’équipement afin de permettre à des familles accédant à un logement pérenne de s’équiper. Carrefour s’est ainsi engagé à fournir 70 références de produits invendus pour équiper 250 familles relogées par la Ville de Paris. Elles sont déjà plus de trois cents à avoir bénéficié de ce dispositif. Machines à laver à 110 euros, bouilloires à 9 euros… on peut équiper un logement pour moins de 300 euros. Emmanuelle, la permanente chargée d’accueillir les familles, enregistre scrupuleusement

vers les personnes les plus éloignées de l’emploi est l’objet même d’Emmaüs Défi. Pour les 20 % des salariés de chantiers d’insertion qui restent sans perspective à l’issue de leur parcours, l’association a obtenu commande de l’État pour tester de nouvelles pratiques.

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de Paris, des organismes intermédiaires, des hôpitaux, des centres d’hébergement… pour tenter d’esquisser un réseau connecté, apte à construire et fluidifier des parcours et à anticiper le moment où, la personne n’étant plus accompagnée, elle risque de replonger. Accueillir dans l’entreprise les populations en grande difficulté Il a surtout convaincu la Fondation Vinci pour la cité, déjà partenaire, de le suivre dans l’aventure. Objectif : faire embaucher une dizaine de personnes par an dans l’une des dix entreprises

Créer une dynamique d’insertion aux grands exclus et aux personnes les plus éloignées de l’emploi est l’objet même d’Emmaüs Défi.

Réinsérer, mais durablement L’ambitieux programme Convergence s’inscrit dans la logique du travail à l’heure. Depuis 2008, les personnes les plus éloignées de l’emploi, notamment des SDF, peuvent déjà commencer par travailler chez Emmaüs Défi quelques heures par semaine selon un rythme progressif avant d’être embauchées pour des contrats d’insertion de vingt-quatre heures. Le principe a été repris par d’autres associations parisiennes. Avec Convergence, il s’agit d’aller plus loin et de réinsérer à terme certaines de ces personnes dans des entreprises classiques, avec de vrais CDI. « Sortir des gens de la rue, ça n’est pas si difficile, mais les maintenir hors de la rue, ça l’est nettement plus », constate CharlesÉdouard Vincent. En cause, notamment, le manque de fluidité entre les différents services publics concernés. Charles-Édouard Vincent a donc passé un an à faire la tournée des ministères, des services de la Ville

du groupe Vinci. Le dispositif prévoit des périodes d’immersion sur des chantiers avant le passage en CDI. Surtout, grâce à une dérogation, les personnes continuent d’être accompagnées par Emmaüs Défi après leur embauche, jusqu’à cinq ans. Pour Vinci, il s’agit d’aller au-delà des clauses d’insertion classiques en vigueur dans le BTP. « Nous devons apprendre à accueillir sur nos chantiers ce type de populations en très grande difficulté, de plus en plus nombreuses », observe Chantal Monvois, déléguée générale de la fondation. Plutôt que de « faire du nombre », il s’agit de montrer que la réinsertion peut fonctionner durablement. Pour cette première année, six embauches devraient être effectuées. « Nous avons très envie d’entraîner d’autres partenaires économiques dans l’aventure », affirme Chantal Monvois. « Je suis content si je contribue à sortir durablement quelques personnes de la rue, reconnaît Charles-Édouard Vincent. On n’a pas le droit de ne rien faire, et on ne peut pas ne pas faire ensemble. » Il insiste sur le rôle des entreprises, qu’on ne peut pas classer en « bonnes » et « mauvaises », et des pouvoirs publics, dont les dispositifs permettent à Emmaüs Défi de « construire une société qui se réconcilie un peu avec elle-même ». u 21


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