Sport-Bikes n°110

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MOTOGP / DOVIZIOSO COMMENT A-T-IL ÉVOLUÉ ?

GRAND PRIX / TECHNIQUE LA CONCEPTION D'UN CHÂSSIS

RÉTRO / JACQUES HUTTEAU UN PERSONNAGE ÉTONNANT LE MAG RACING #1

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FÉV. - MARS. 2018 - N°110

À DÉCOUVRIR ÉGALEMENT DANS CE NUMÉRO : /// PORTFOLIO : LES PLUS BELLES IMAGES D'ANDREW WHEELER /// ENQUÊTE : MÉCANICIEN DE COURSE, JOB DE RÊVE... OU PRÉCAIRE ? /// INTERVIEW : ERIC DE SEYNES & CLAUDE MICHY SANS LANGUE DE BOIS

LE PORTRAIT INTIME DU MYSTÈRE DE LA ROAD RACE



PROCHAIN NUMÉRO

LE GUIDE

DE LA SAISON

EN VENTE le 14 mars

SPORT-BIKES N°110 Février - Mars 2018 - Bimestriel ADRESSE DDS Presse - 253, avenue d'Aix 13610 Le Puy Ste Réparade - FRANCE E-MAIL redac@sport-bikes-mag.fr TEL 06 64 91 13 94 DIRECTRICE DE PUBLICATION Diane de Salve RÉDACTEUR EN CHEF Tommy Marin JOURNALISTES Maxime Pontreau - Mat Oxley Jacques Hutteau - Lilian Guignard Maria Guidotti - Stephen Davison PHOTOS PSP Lukasz Swiderek et Mateusz Jagielski CRÉATION GRAPHIQUE Laurent Alberola MAQUETTE commeunjeudi.fr Mélanie Ambert - Laurent Haoua PUBLICITÉ Thierry Capela - 06 20 61 96 19 kapmedia@orange.fr ABONNEMENTS Abomarque Tel : 05 34 56 35 60 (10h-12h/14h-17h) 6 numéros (1 an) = 28 € Prix au numéro = 5,50 € DISTRIBUTION Presstalis Service diffuseurs : Tél. 06 43 73 16 37 ou contact@cadpresse.fr IMPRIMERIE Corelio Printing 30, allée de la Recherche 1070 Bruxelles - BELGIQUE

Sport-Bikes est une publication bimestrielle éditée par la société DDS Presse, EURL au capital de 10 000 euros. Gérante : Diane de Salve - RCS : Aix 503 730 566 N° de commission paritaire : 1120 K 80228 N°ISSN : 1620-3151 - Dépôt légal : à parution Droits de reproduction réservés pour tous pays. La rédaction n’est pas responsable de la perte ou de la détérioration des textes ou photos qui lui sont adressés.

Si vous ne trouvez pas Sport-Bikes en kiosque, rendez-vous sur le site

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Tommy Marin RÉDACTEUR EN CHEF

ÉDITO

SECOUER LA BOÎTE ? ut of the box" : nous n'avons hélas pas d'expression équivalente, en France, pour évoquer une pensée capable d’explorer d’autres voies que celles communément admises. Tout juste pouvons-nous la qualifier "d'originale". Lors de la conférence de presse annuelle de la FFM, tenue le 30 novembre dernier dans les locaux de l’Automobile Club de France à Paris, j’ai été interloqué par l’insistance des animateurs à affirmer, en présence des nombreux journalistes directement concernés, que la presse papier était morte, remplacée par les sites web d'information et, surtout, les réseaux sociaux. Une affirmation devenue "mainstream" (ou "consensuelle" si vraiment vous tenez à ce que Molière résiste à Shakespeare), même si elle ressemble davantage à un point de vue qu'à une réalité. Si, après plus de 17 ans d’existence, Sport-Bikes (comme nombre d'autres magazines dédiés à partager une passion avec leurs lecteurs) est toujours présent en kiosque, c’est grâce à votre fidélité, chers lecteurs, mais aussi parce que nous nous efforçons de vous proposer un contenu original, "out of the box", différent de l'information continue (parfois de première main et donc qualitative, souvent reprise et déformée sans scrupules) que vous pouvez trouver en surveillant vos hashtags et autres logiciels de veille favoris. Surtout, plutôt que de nous cantonner aux élucubrations de nos petits cerveaux abîmés par les borborygmes vibrants des échappements (libres eux aussi), nous aimons ouvrir notre horizon en donnant la parole à d’autres acteurs du milieu, qu’ils soient pilotes, mécanos ou journalistes, français, anglais, italiens... Ce numéro hivernal se veut un témoin de cette pluralité. Outre l'immanquable Mat Oxley, grande plume de la presse moto britannique que vous avez l'habitude de lire dans nos pages, la journaliste italienne Maria Guidotti, le photographe américain Andrew Wheeler ou encore l'écrivain/photographe irlandais Stephen Davison y complètent notre équipe habituelle. Les responsables du projet MotoGP KTM, le philosophe à l'origine du changement de mentalité d'Andrea Dovizioso, le concepteur des châssis Kalex, les patrons du GP de France et de Yamaha Europe vous livrent des points de vue, eux aussi, "out of the box". Car pour avancer, ces hommes pensent par euxmêmes, sans suivre aveuglément le courant dominant. À l'heure où la principale messagerie de presse française met le couteau sous la gorge des éditeurs en leur imposant subitement de payer ses dettes s'ils veulent continuer à être distribués, c'est une réalité : la presse écrite subit une forte pression. Mais le fait que le gouvernement juge indispensable de créer une loi pour fermer les vannes des "fake news" qui inondent les réseaux sociaux prouve qu'elle a encore une carte à jouer face à cette grosse boîte désordonnée aux contours difficiles à cerner. Elle doit juste se montrer plus qualitative que jamais… et bien secouer sa boîte à idées ! ■

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FÉVRIER - MARS 2018

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SOMMAIRE

SPORT-BIKES #110

SUJETS MAG MOTOGP

RUBRIQUES 6 10 12 14 15 16 71 96 97 98

ARRÊT SUR IMAGE LES NEWS DE LA PLANÈTE RACING LA REVUE DE PRESSE LU ET ENTENDU JEU-CONCOURS : PIRELLI VOUS GÂTE ! LE SHOPPING 100 % RACING CHRONIQUE : C’EST JAKUTO QUI LE DIT LA BOUTIQUE SPORT-BIKES ABONNEZ-VOUS AU MAG RACING N°1 ET GAGNEZ VOS PLACES POUR LES 24H MOTOS !

FÉVRIER - MARS 2018

VISITE : AU COEUR DES ATELIERS KTM MOTOGP RENCONTRE : LA TRANSFIGURATION DE DOVIZIOSO ANALYSE : L'HORREUR DE ROULER BLESSÉ TECHNIQUE : DESSINE-MOI UN CHÂSSIS DE GP PORTFOLIO : L'OEIL AMÉRICAIN D'ANDREW WHEELER

WSBK/ROAD RACE/FSBK/RÉTRO

LA CHRONIQUE MÉDICALE DE LILIAN

EN CADEAU : NOTRE POSTER CALENDRIER 2018

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DÉCOUVERTE : MÉCANICIEN, JOB DE RÊVE OU PRÉCAIRE ? PORTRAIT : GUY MARTIN, UN GARS VRAIMENT À PART ESSAI EXCLUSIF : ON A COMPARÉ LES 4 STARS DU FSBK ! INTERVIEW : ERIC DE SEYNES / CLAUDE MICHY RÉTRO : JACQUES HUTTEAU, 40 ANS DE GP

Photos de couverture et de sommaire © Jesús Robledo pour KTM



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1 Non, Sheridan Morais n'est pas en train de chuter : il freine. 2 Vu ! 3 Au GP du Japon, les fans offrent toujours des cadeaux insolites. 4 Au GP d'italie, on ne voit pas grand chose de la course...


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5 Bagnaia 1 - 0 Cortese. 6 "La prochaine fois, mecton !" 7 See you Sam ! 8 Dernières glisses avant la trêve pour Bradley Smith. 9 Michael Dunlop à plus de 200 km/h entre les murs du TT. 10 Marc Marquez et Dani Pedrosa en mode Samouraïs ! 11 Bo Bendsneyder et Livio Loi sur tapis vert.

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1 L'heure de remballer. 2 Au GP de France, on a du goût ! 3 Une course Moto2 complètement déjantée en Malaisie... 4 2017 fut une saison contrastée pour Valentino Rossi. Quid de 2018 ?

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FéVRieR - MARS 2018


5 Un peu trop d'angle pour être honnête, M. Alex Lowes... 6 Marco Melandri se concentre sous les étoiles. 7 Petit coup de chaud pour la GSX-RR d'Andrea Iannone. 8 Ian Hutchinson plonge dans l'un des spots magiques de la North West 200 ! 9 Stupéfaction dans les tribunes du GP de France Moto3 !

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FSBK

MOTOGP

NEWS

PAR MAXIME PONTREAU /// PHOTOS : DR

ENDURANCE

MOTO2

SBK

MONZA RALLY SHOW

RECORD DE VICTOIRES POUR ROSSI

A chaque fin de saison, le nonuple champion du monde a pris l'habitude de se refaire une santé au Monza Rally Show avec une Ford Fiesta RS WRC, et cela lui réussit plutôt bien. Début décembre, après trois jours de batailles, Valentino Rossi

s'est imposé lors de la 38e édition de cette épreuve italienne regroupant des pilotes de divers sports mécaniques. Un succès synonyme de record. Totalisant désormais six victoires, dont les trois dernières consécutives, l'idole est le pilote le plus

titré de l'histoire du rallye. Son demi-frère Luca Marini a quant à lui terminé 26e au scratch pour sa première participation. À noter que l'autre nonuple world champ italien (de MX cette fois), Antonio Cairoli, se hisse à une très belle 4e position finale.

SUPERPRESTIGIO JD BEACH S'IMPOSE, ZARCO SIXIÈME

GP DE MACAO

TRISTE SUCCÈS

Le Nord-Irlandais Glenn Irwin n'a pas eu le cœur à se réjouir de sa victoire lors du dernier GP de Macao. Confortablement installé en tête depuis la mi-course, le pilote Ducati s'acheminait vers un triomphe implacable. Une belle performance pour sa deuxième participation à cette course urbaine, avant que l'épreuve ne soit stoppée dans son sixième tour. Le Britannique Daniel Hegarty venait de violemment perdre le contrôle de sa Honda. Il en décédait malheureusement lors de son transfert vers l’hôpital. Ce pilote âgé de 31 ans participait pour la seconde fois au GP de Macao. La course n'a évidemment pas repris et Irwin a été déclaré vainqueur devant Peter Hickman et Michael Rutter, victorieux des deux précédentes éditions. 10

FÉVRIER - MARS 2018

Le Superprestigio Dirt Track de Barcelone est devenu depuis quelques années LE rendez-vous de fin de saison pour de nombreux pilotes moto, toutes disciplines confondues. Si celui qui a popularisé l'épreuve, Marc Marquez, était absent, le beau monde ne manquait pas. Pas moins de sept Français étaient d'ailleurs engagés : Johann Zarco, Lucas Mahias, Vincent Philippe, Fabio Quartararo, Thomas Chareyre, Sylvain Bidart et Wilfried Delestre. L'armada tricolore n'a cependant rien pu faire face à l'Américain JD Beach. Aucun pilote n'a même pu rivaliser tant le vice-champion Supersport en MotoAmerica a dominé son sujet en Superfinale. Il s'est imposé devant son compatriote Briar Bauman et l'Espagnol Ferran Cardus. S'il n'a pas atteint cette ultime épreuve, Johann Zarco termine tout de même 6e du Superprestigio au cumul des courses. La prochaine édition de cette course de dirt devrait se dérouler à Paris fin 2018. Nous ne manquerons pas de vous en toucher un mot.

JEU CONCOURS

#109

BRAVO À FABIEN BONNABEL QUI REMPORTE UN CASQUE SHOEI NXR DÉDICACÉ PAR MARC MARQUEZ. LES RÉPONSES ÉTAIENT :

QUESTION N°1 : Comment s’appelle le fondateur de la marque Shoei ? > Eitaro Kamata QUESTION N°2 : Dans combien de designs le Shoei NXR est-il proposé ? > 31 QUESTION N°3 : Combien de pages comporte le catalogue Shoei 2017 ? > 60


SupER DukE / RC 390

LES kTM CupS RECoNDuiTES Comme vous pourrez le découvrir dans les pages de ce numéro, KTM ne chôme pas lorsqu'il s'agit de compétition. C'est vrai en Mondial comme à un plus humble niveau national, et c'est notamment pourquoi la firme autrichienne reconduit en 2018 ses deux Cups en France : La Super Duke Cup et la RC 390 Cup. Peu de changements à prévoir dans les deux formules. La première se déroulera toujours au sein du Challenge Protwin. Le calendrier s'enrichit toutefois d'une date, proposant cinq courses contre quatre l'an passé. La seconde, intégrée à la Coupe de France Promosport 400, est accessible à partir de 13 ans et comptera six rendez-vous. Soit deux opportunités de (re)découvrir la compétition dans un cadre sérieux et avec un budget raisonnable. Inscriptions sur www.challengeprotwin.fr et www.cdfpromosport.fr

EN BREF La FIM Moto-e World Cup (courses de motos électriques sur circuit) se prépare doucement pour 2019. Nous savons désormais que le constructeur italien Energica fournira les machines qui seront elles-mêmes chaussées de Michelin. Sylvain Guintoli, qui a pu essayer cette moto, annonce une vitesse max de 270 km/h.

ENDURANCE MoNDiALE Le ReTouR des VeRTs

Kawasaki attaque 2018 avec un programme EWC légèrement plus conséquent. Le team SRC, l'équipe officielle du constructeur en Endurance, participera à l'ensemble des courses de la saison 2017-18. Seule la finale à Suzuka en juillet n'est pour l'instant pas au programme. Gilles Stafler confiera le guidon de la ZX-10RR n°11 à Randy de Puniet, Mathieu Gines et Jérémy Guarnoni. Un nouveau challenge pour ce dernier qui a néanmoins déjà remporté le Bol d'Or avec cette même structure Kawasaki en 2013. En contre-partie, on ne retrouvera pas l'équipe française en championnat de France Superbike cette année. Pour rappel, le SRC a effectué un début de course tonitruant lors de l'ouverture de cette saison au 81e Bol d'Or, avant qu'une casse mécanique ne les force à abandonner après 17 tours seulement.

ça BougE au HRC !

ENTRE ENDuRaNCE ET gp

Se faire damer le pion sur son propre circuit n'est visiblement pas du goût de Honda. Voilà en effet trois ans que Yamaha Factory règne sans partage sur les 8 Heures de Suzuka, la course la plus importante aux yeux des Japonais, et la pilule ne passe plus. Le blason ailé a donc annoncé le retour de son team officiel HRC pour la prochaine édition de l'épreuve. Un pilote a d'ores et déjà été confirmé : le triple vainqueur de cette compétition Takumi Takahashi (2010, 2013, 2014). La dernière apparition de l'équipe officielle Honda aux 8 H de Suzuka remonte à 2008. La machine n°11 s'était alors imposée avec Ryuichi Kiyonari et Carlos Checa. Dans le même temps, le HRC a annoncé la nomination d'Alberto Puig au poste de manager du team Repsol Honda MotoGP, où il remplace Livio Suppo.

En hommage au défunt Angel Nieto, décédé au cours de la saison dernière, Jorge "Aspar" Martinez a décidé de renommer l'intégralité de ses teams du nom du pilote espagnol. Le Angel Nieto Team couvrira un large spectre de la compétition, du CEV au MotoGP. Surprise : le pilote Moto3 Juanfran Guevara, auteur d'un podium en 2017, a annoncé se retirer de la compétition moto à l'âge de 22 ans. L'Espagnol a évoqué des raisons personnelles et une décision longuement réfléchie. Déjà amplement répandus, les airbags sont à présent obligatoires dans les trois catégories des Grands Prix. Seuls les pilotes wild cards et les remplaçants pour deux courses maximums en seront dispensés. Les systèmes devront au minimum couvrir les épaules et les clavicules. Marc Marquez a été élu meilleur sportif de Catalogne de l'année 2017. Jonathan Rea a quant à lui fini deuxième du prestigieux vote de la BBC désignant la personnalité sportive de l'année. Le sport moto deviendrait-il populaire ? L'année 2018 marque le retour de la célèbre Journée K sur le circuit Bugatti du Mans. Ce sera le 7 mai prochain. Ce stage de pilotage est ouvert à toutes les marques de motos. Il est déjà possible de réserver sa place en écrivant à macciojerome@gmail.com

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REVUE DE

REVUE DE PRESSE PRESSE

Enfin, sur Valentino Rossi : "J'aimerais avoir une meilleure relation avec lui, mais il est tellement célèbre qu'il doit se créer une barrière pour se protéger. Donc, si vous n'appartenez pas à son groupe, à son Académie, il est impossible de le fréquenter. Au final, je ne suis pas un ami de Rossi ou de Marquez, mais je m'entends quand même bien avec eux."

PAR MARIA GUIDOTTI

14 NOVEMBRE 2017 CYCLE NEWS LE STYLE MARQUEZ

Marc Marquez aurait pu décrocher son quatrième titre en MotoGP en toute sécurité. Même si Dovizioso remportait le Grand Prix de Valence, le pilote Repsol Honda avait seulement besoin de terminer onzième de la dernière course de l'année. Mais ce n'est pas le style de Marquez. Parti de la pole position après deux chutes aux essais et aux qualifications, il a essayé de la jouer "safe" – ou du moins un peu. Mais la tentation a eu raison de lui et la catastrophe a bien failli arriver. Marquez a commencé à chuter, mais il a réussi à réaliser l'un de ses incroyables rattrapages qui sont devenus la marque de commerce du champion espagnol. Une combinaison d'habileté incroyable et d'une bonne dose de chance lui ont assuré son sixième titre mondial. "L'avant était parti, mais l'arrière n'avait pas perdu l'adhérence, alors je savais que je pouvais me sauver avec mon coude." Marquez a non seulement obtenu un quatrième titre en cinq ans, mais il continue à battre des records : il est le plus jeune coureur dans l'histoire à gagner une quatrième couronne en catégorie reine, avec près d'un an d'avance sur son illustre prédécesseur Mike Hailwood.

16 DÉCEMBRE 2017 SPORTWEEK UNE ANNÉE SPÉCIALE

Andrea Dovizioso a remporté le Prix de la Gazzetta pour l'exploit qu'il a accompli en 2017. Le pilote Ducati raconte comment il est possible de devenir un favori à 31 ans, en remportant six victoires en 2017 et en étant finaliste du championnat MotoGP. "Tout a commencé avec la course d'Aragon en 2016. Jusqu'à ce moment-là, le monde du MotoGP 12

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pensait que j'étais un pilote rapide, mais qu'il me manquait quelque chose. J'ai surpris tout le monde, même au sein de mon équipe. Il y avait huit Ducati en piste, mais j'étais le seul à gagner. Cette année, la moto s'est améliorée, mais ma progression a fait la différence. Nous avons travaillé d'une manière fabuleuse avec l'équipe." Quand on lui demande ce qui a changé dans sa façon de piloter, Dovi répond : "La différence est de rouler de manière optimiste, de savoir comment on travaille. Lorsque vous êtes calme et serein, vous prenez de meilleures décisions et si les choses ne vont pas bien, vous leur donnez moins d'importance." A propos de Ducati, il pense : "Ils étaient convaincus que la moto était beaucoup mieux que ce que moi et Iannone avions montré. Leur idée était qu'il était possible de gagner avec un multiple champion comme Lorenzo. Au lieu de cela, j'ai montré à quel point nous avions été plus rapides les années précédentes." A propos de Lorenzo, il déclare : "Jorge a été un bon coéquipier, mais sur les deux derniers GP, il aurait pu mieux se comporter."

18 DÉCEMBRE 2017 REPUBBLICA LE RANCH DE LA JEUNESSE OÙ VALENTINO RENAÎT

Rampino, Renato, La Querchia, la Curva del Lago… Chaque virage du ranch a sa propre histoire et les noms sont familiers. C'est l'endroit où Rossi et ses pilotes de l'Académie s'entraînent, glissent, se battent comme des fous toute la journée… et même après : ils se fichent tous quand le soleil se couche et qu'il fait froid. C'était le cas à l'occasion des "100 km des champions", le 16 décembre dernier, où les prix étaient… des jambons savoureux ! "Mon secret est de rester jeune, explique Rossi. Je ne sais pas si le secret de ma jeunesse, c'est parce que je m'entraîne avec les gars de l'Académie, mais c'est sûr que cet endroit m'aide beaucoup. Il y a 10 ans, nous avons réalisé que nous avions besoin de quelque chose de différent, afin de maintenir le haut niveau d'approche mentale requis dans les courses. Graziano (son père, ndlr) avait cette parcelle de terre, nous avons donc créé le Ranch." La première piste a été inaugurée en 2009 par Rossi, Marco Simoncelli et Mattia Pasini. Puis, en 2011, le Ranch a pris la forme finale. Mais depuis lors, de nombreux travaux ont été réalisés. La maintenance coûte 200 000 euros par an et, comme dit "Albi" Tebaldi, un ami proche de Vale : "Rossi est maniaque et très minutieux dans l'organisation du lieu. Sur un événement comme les 100 km des Champions, il prend soin de chaque détail personnellement."


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www.yamaha-motor.fr


LU

ENTENDU

&

"J'ai peur d'arrêter. Lorsque j'arrêterai de rouler en MotoGP, il me restera encore dix années de compétition en automobile, en rallye par exemple, mais aussi sur piste. J'aimerais faire les 24 Heures du Mans.” Valentino Rossi

"Yamaha attend la décision de Rossi. C'est à moi de les convaincre en devançant les pilotes d'usine. Dans tous les cas, ma carrière ne dépend pas de la décision de Valentino." Johann Zarco/// L'Equipe.fr, 7 janvier

"Qui est vraiment le meilleur ? Si tu le demandes à Valentino, il dira que c'est lui. Si tu le demandes à Marquez, ce sera la même réponse. La même chose s'applique à moi : je pense que je suis le meilleur. Vous devez penser comme ça pour réussir." Jorge Lorenzo /// Speedweek.com, 2 janvier

"Je dis toujours que Valentino est un modèle qui devrait être étudié. J'espère que la jeune génération de pilotes regarde ce qu'il a fait pour en tirer de la motivation." Davide Brivio /// Crash.net, 10 janvier

/// Deejay Chiama Radio, 30 novembre

"Johann [Zarco] est un pilote à suivre. Je suis sûr qu'il peut se battre pour le titre en 2018."

"Tu commences à comprendre que, quand tu es sur une moto satellite, les choses sont à bien des niveaux beaucoup plus faciles que ce que tu crois. Tu n'auras jamais ce qu'il y a de mieux, mais tu as un package génial." Bradley Smith /// Motorsport.com, 6 janvier

Carlos Checa /// GpOne.com, 27 décembre

"J'ai eu quelques discussions avec [Yamaha] ; j'ai demandé s'ils pouvaient aligner six motos sur la grille. Ils ont répondu : 'Non, c'est trop.' J'ai donc dit : Ok, si vous avez une demande de VR46 et une de Tech 3, qui aura la priorité ? La réponse fut VR46. C'est donc clair." Hervé Poncharal /// Autosport.com, 5 janvier

/// Speedweek.com, 13 novembre

"[Marquez] doit trouver un moyen pour piloter vite tout en réduisant les risques, car un jour, il pourrait se blesser. Il a été chanceux cette année en sortant indemne de gros crashs..." Kevin Schwantz /// Motorsport.com, 3 janvier

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"Non, je ne l'engagerai certainement pas. Je suis très honnête. Marquez est hors normes, il évolue dans sa propre ligue. S'il gagne, ce sera Marquez. S'il perd, ce sera à cause de ma moto." Stefan Pierer, PDG de KTM


JEU CONCOURS

JOUE-LA COMME EN WORLDSBK AVEC UN TRAIN DE DIABLO ROSSO III 1er prix

Ce pneu bi-composé embarque toute la technologie Pirelli issue du championnat du monde Superbike ! Le top pour un usage mixte route/piste.

3e prix

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Très pratique, il est doté de deux compartiments : un pour la combinaison et le casque, un pour les bottes, les gants et la dorsale. Il vous suivra partout, longtemps !

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QUESTIONS, CADEAUX MIS EN JEU, CHANCES DE GAGNER !

QUESTION N° 1 Sur le Diablo Rosso III, quelle surface du pneu arrière est recouverte par la gomme la plus tendre ? http://bit.ly/2mmIojg QUESTION N° 2 Combien de modèles composent le catalogue Pirelli Route ? http://bit.ly/2D2NsnW

QUESTION N° 3 Sur quels circuits feront étape les Pirelli Days 2018 ? http://bit.ly/2mie88W

POUR JOUER, VOUS DEVREZ :

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SUIVRE LES LIENS INDIQUÉS EN FACE DE CHAQUE QUESTION

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LOOK

SHOPPING

RACING PERFORMANCE

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4 1/ GANTS SPIDI CARBO 4 Ce modèle résolument racing bénéficie de la nouvelle coque en carbone brevetée et homologuée CE, permettant de réduire l’intensité des ondes de choc et d’améliorer l’aérodynamisme. Plusieurs coloris disponibles. TARIF : 199,90 €. www.spidi.com - 2/ VALISE KIT MUC-OFF Muc-Off propose pour l’entretien des deux roues un ensemble de produits et accessoires (nettoyants, dégraissants, lubrifiants, polish, brosses, éponges, etc.) réunis dans une valise pratique. TARIF : 120 €. www.bihr.eu 3/ CASQUE SHOEI X-SPIRIT III BRINK TC-1 Le X-Spirit III est l'intégral racing haut de gamme utilisé par les pilotes Shoei en MotoGP. Il est décliné en de multiples coloris, dont cette version TC-1 qui ne passera pas inaperçue. TARIF : 839 €. www.shoei.com 4/ GANTS BERING RUN-R Ce gant racing en cuir de chèvre est composé d'une manchette longue, avec une doublure de confort en polyester et un renfort de carbone coqué au poignet et à l'articulation. COLORIS : noir/rouge – noir/fluo – noir/blanc. TARIF : 99,90 €. www.bering.fr - 5/ PNEUS PIRELLI DIABLO ROSSO CORSA II Pirelli a présenté début décembre son dernier pneu de la famille Diablo, qui applique les technologies développées en Mondial Superbike, avec ses trois types de gomme à l'arrière et deux à l'avant, qui permettent d'avoir un niveau optimum de performance et de sécurité, tant sur route sèche que mouillée. TARIF : n.c. www.pirelli.com 16

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sb

110 7 6 8

9 10 6/ VISSERIE LIGHTECH Ce kit se compose d'un nombre de vis anodisées adapté à votre moto selon son application : moteur, cadre, carénage, bulle. COLORIS : bleu, rouge, noir, gris, or. TARIF : à partir de 34,60 €. www.bihr.eu - 7/ COLLECTION ÖHLINS Même si Noël est passé, vous avez le droit de continuer à (vous) faire des cadeaux avec la magnifique collection du célèbre fabricant de suspensions suédois. Du t-shirt vintage au sac à dos, en passant par la montre, chacun y trouvera son bonheur. www.ohlins.fr - 8/ CASQUE SHARK SPARTAN LORENZO REPLICA Les fans de "Por Fuera" ont désormais accès à la déco replica "White Shark" de Lorenzo dans la gamme Spartan du fabricant français. 2 coloris au choix. TAILLE : du XS au XXL. TARIF : à partir de 299,90 €. www.shark-helmets.com 9/ CASQUE HJC R-PHA 11 MONSTER JONAS FOLGER La gamme R-PHA 11 va encore une fois s’étoffer dès le mois de mars prochain chez les revendeurs HJC avec l’arrivée d’une version Replica Jonas Folger, le jeune pilote allemand qui officie au sein du team Tech 3. TAILLES : XS à XXL. TARIF : 549,90 €. www.hjc-helmets.fr - 10/ GANTS FURYGAN FIT-R2 ZARCO Roulez avec une réplique à l'identique des nouveaux gants de Johann Zarco et soutenez le plus grand champion de la vitesse française, tout en offrant à vos mains ce qui se fait de mieux en termes de gants racing. TARIF : 149 €. www.furygan.com FÉVRIER - MARS 2018

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ktm Factory Racing

L'antRe

(pas si) secRète Lorsque je demande à PhiLiPP GrÜnberGer, resPonsabLe communication du team red buLL Ktm Factory racinG en motoGP, s'iL Pense envisaGeabLe que je me Promène au cœur du déPartement course Ktm, réFLex au PoinG, je m'attends en retour à L'un de ces sourires siLencieux dont Les Pr manaGers raFFoLent. en Fait, iL me réPond juste : "oui, Pas de soucis. quand ?" 18

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Par ToMMy MARIn /// Photos TM & KTM

SCI-FI

vISITE

motoGP

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Le siège KTM/Husqvarna Factory Racing est le plus récent des nombreux bâtiments érigés par le constructeur autrichien. Sorti de terre courant 2016 à Munderfing, à quelques kilomètres de la ville de Mattighofen où sont basés les chaînes de montage et le QG de KTM, il côtoie l'usine de fabrication des moteurs, le centre logistique, le centre marketing (situé dans l'ancien bâtiment Motorsport) et le groupe WP. Il couvre, sous son design très orienté sciencefiction, une superficie de 18 000 m2 répartis sur trois étages.

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apidement, nous tombons d'accord sur le jeudi 14 décembre 2017. Et Philipp me prévient : ce jour-là, l'activité sera intense. Tant mieux, c'est pile ce dont j'ai besoin pour mes photos ! Gamme radicale, marketing punchy, volonté affichée de devenir un leader en MotoGP en suivant la recette qui a fonctionné en tout-terrain… jusqu'aux déclarations sans filtre du grand patron, Stefan Pierer – qui m'avait expliqué au GP d'Autriche 2016 qu'il "aimait battre Honda car Honda triche" – KTM assume bien volontiers son image de constructeur décalé, investi à 100 % dans la course, puissant et prospère. Le fait de laisser un journaliste/photographe déambuler dans un département course en plein boom n'a rien d'habituel et corrobore cette vision. C'est bel et bien ici que sont pensées et construites, non pas seulement les KTM MotoGP, mais aussi les machines oranges engagées en Moto3 et Moto2, au Dakar, en MXGP, en Mondial d'Enduro… et j'en passe ! Quelques secrets jalousement gardés y sont donc à portée d'objectif et une seule consigne m'est donnée : ne rien photographier sans autorisation préalable. J'accepte la règle du jeu. Et je vous fais la visite, entrecoupée de trois interviews riches en enseignements sur ce qui constitue la "différence KTM".

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READY TO TRICOT ?

Dès la salle d'accueil, les 450 (au premier plan) et 350 (en haut) SX-F du nonuple champion du monde de motocross Antonio Cairoli, la 125 FRR qui a vu débuter Marc Marquez en GP125 en 2008 et 2009 et la 450 Rally Replica du vainqueur du Dakar 2017 Sam Sunderland (cachée) vous mettent dans l'ambiance : ici, on ne fait pas du tricot, fusse-t-il orange ! FévRIER - MARS 2018

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BRÛLantes mÉninGes

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on commence par un café-briefing avant de faire le tour des 50 bureaux situés au deuxième (et dernier) étage du bâtiment, capables d'accueillir 180 des près de 450 employés de KTM Motorsport à travers le monde (dont 80 pour le seul projet MotoGP). C'est ici que l'on dessine les châssis, que l'on discute moteur… bref, que la matière grise en fusion devient orange ! Le patron du département course, Pit Beirer, a vue sur le circuit d'essais de la freeride e-XC, la machine toutterrain électrique au catalogue KTM, tandis que les œuvres accrochées aux murs traduisent parfaitement les goûts du big boss, stefan Pierer.

mOteUR !

retour au rez-de-chaussée, dont la superficie de 110 x 60 mètres offre suffisamment d'espace pour accueillir les ateliers Motocross, enduro, rallye et MotoGP, y compris les aires de stationnement pour les camions. nous voici dans la salle où sont construits et reconditionnés les moteurs (ici, ceux des rC250 Moto3). "Pas trop près, les photos !", me lance sans cesse Philipp.

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visiTe

motoGP

pit BeiReR

Directeur ktm Factory Racing vice-chamPion du monde de motocross 250cc 1999, "PitbuLL" termine sa carrière de PiLote sur une mauvaise chute au GP de buLGarie 2003 qui Le Laisse ParaPLéGique. Ktm nomme raPidement L'aLLemand resPonsabLe de son déPartement course.

K

tm est le seul constructeur impliqué en motoGP, moto2 et moto3. Pourquoi ce choix ? C'est un choix très clair. nous avons appris en tout-terrain qu'il était très agréable de pouvoir travailler sur le long terme avec nos pilotes. nous avons commencé la red Bull MotoGP rookies Cup il y a dix ans et nous sommes heureux d'apporter aux jeunes cette plateforme pour accéder au plus haut niveau de la vitesse. Mais en ne travaillant qu'en Moto3, il était assez douloureux de voir nos pilotes partir, parce qu'ils n'avaient pas d'autres choix, pour d'autres horizons. Cela n'aurait pas été un argument suffisant pour entrer dans toutes les catégories, mais dans le même temps, KTM a incroyablement grandi sur la route : depuis deux ou trois ans, nous vendons plus de motos de route que de motos tout-terrain. nous avons donc décidé d'appliquer à la vitesse la stratégie qui a fait notre succès en tout-terrain, car la philosophie de notre société est axée autour de la course. c'est donc un choix purement stratégique… non. Le MotoGP n'était pas un plan stratégique, c'était un rêve. Quand tu cours dans tous les championnats off-road, quand tu entres en Moto3 et que tu y trouves le succès, il est naturel, si tu as un minimum d'ambition, d'avoir envie d'aller dans la catégorie la plus relevée. et quand nous avons démarré ce projet, nous nous sommes dits qu'il serait dommage de ne pas remplir le "trou" du Moto2. Ce choix est stratégique : comme en tout-terrain, nous ne voulons pas perdre nos pilotes. Ce n'est pas un business, c'est un élément de notre plateforme stratégique. quel bilan tires-tu de 2017 ? Je suis plutôt satisfait de la rookies Cup, où nous avons tout gagné ! (rires) Je ne suis en revanche pas du tout satisfait de nos performances en Moto3… nous avons dû grandir très vite, recruter beaucoup de personnels qualifiés, nous avons perdu du temps et de l'énergie dans ce processus visant à couvrir l'ensemble du paddock des GP et nous n'avons peut-être pas fait tout ce que nous aurions dû faire pour performer en Moto3. néanmoins, nos chronos étaient meilleurs en 2017 qu'en 2016, et nous n'avons donc pas régressé. nous avons fait du bon travail, notre moto était plus rapide, mais Honda a fourni un meilleur travail que nous. nous allons tout faire pour revenir dans la bataille. en Moto2, nous avons fait beaucoup mieux que ce que nous espérions, en nous battant pour le podium dès les premières courses et en gagnant trois GP en fin de saison. Pareil en MotoGP : je n'étais pas déçu au Qatar, quand nous étions à 3,5 secondes des leaders aux essais, mais j'ai ressenti cette déception chez beaucoup de gens autour de moi. il était clair que nous ne jouerions pas devant d'entrée de jeu : nous devons rattraper vingt ans de développement dans la catégorie reine ! C'est à partir de ce moment, quand nous avons commencé à nous confronter aux autres constructeurs en course, et non plus seulement à

faire du développement en tests privés, que nous avons vraiment commencé à apprendre et à progresser. nous avons appris vite, et en aragon, nous n'étions que 14 secondes derrière le vainqueur sur la ligne d'arrivée. C'était plus que ce que nous pouvions imaginer. Toutes les heures, les nuits blanches de notre équipe passées à faire progresser la rC16 ont payé et je lui en suis très reconnaissant. Ktm est une compagnie différente. Les cadres acier, les suspensions WP, le fait de s'impliquer en moto2 malgré l'usage imposé de moteurs honda, le ton direct du PdG stefan Pierer… est-ce une volonté de Ktm d'être décalé ? Ces directions sont logiques. Quand M. Pierer a racheté la compagnie KTM, qui était en banqueroute, les cadres étaient fabriqués en tubes d'acier. Quand WP s'est trouvé en banqueroute en Hollande, nous nous retrouvions sans suspensions pour nos motos, et M. Pierer a donc décidé de racheter WP. Plus tard, il a dû racheter la branche radiateurs [de refroidissement moteur] de KTM et l'intégrer à WP. Pour garder notre industrie vivante, il a dû rassembler toutes ces sociétés sous un même toit. Quand les constructeurs japonais sont passés au cadre alu en off-road, nous n'avions pas cette technologie ici : c'est pourquoi nous sommes restés à l'acier. Mais peu de temps après, nous avons réalisé que si nous utilisions toutes les qualités de l'acier, avec toutes les nouvelles méthodes de soudure possibles, les nouveaux alliages plus légers et plus solides, nous pouvions en tirer un avantage. Depuis deux ans, nos cadres en acier pèsent le même poids qu'un cadre équivalent en aluminium, avec des tubes plus fins, ce qui nous permet d'économiser de la place pour l'électronique, les réservoirs d'essence, les flux d'air… nos compétences dans ce matériau sont aujourd'hui très élevées, dans tous les domaines, et nous gagnons avec nos cadres tubulaires en acier. il y a dix ans, quand un nouvel ingénieur arrivait chez KTM, il voulait construire un châssis aluminium. aujourd'hui, ça n'est plus le cas : l'acier fait partie de notre aDn. il n'y a donc pas de volonté d'être différents : nous le sommes par la force de notre héritage. quels sont tes objectifs en 2018 ? Pour moi, il y a deux facteurs importants : l'écart qui nous sépare du poleman le samedi et l'écart qui nous sépare du vainqueur le dimanche. nous voulons gagner un jour et, pour y arriver, la seule solution est de continuer à réduire ces écarts… jusqu'à inverser la vapeur ! tu es fier ? De moi, non. Mais de ce que font toutes les personnes impliquées dans cette société, de ce qu'ont fait nos équipes en compétition cette année, très. Je pourrais en pleurer tellement tout cela m'émeut. février - Mars 2018

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motoGP

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sÉBastian Risse

Directeur technique du projet motoGp aPrès des débuts au r&d, sebastian devient cheF mécanicien et inGénieur déveLoPPement du team Ktm en idm suPerbiKe avant de travaiLLer sur Le Projet moto3, dont iL devient Le Leader en 2012. Le succès est au rendez-vous et en 2014, Pit beirer Lui demande de travaiLLer sur Le Projet motoGP.

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uel bilan tires-tu de 2017 ? Ça dépend du jour… (rires) nous avons eu de très grands moments. Personne ne s'attendait à une telle saison, surtout la deuxième moitié. Bien sûr, nous avons encore beaucoup de progrès à faire ; il y a de nombreuses situations dans lesquelles nous aurions pu faire mieux avec de l'expérience. vous avez progressé extrêmement vite. comment décrirais-tu la "méthode Ktm" ? Je crois que l'on peut qualifier notre approche de radicale. on a essayé plein de choses, vite, parfois "salement", pour essayer de comprendre les directions à suivre. Le but est de faire réagir la moto : même si c'est une mauvaise réaction, nous savons ensuite que tel paramètre implique telle réaction, et c'est crucial. notre équipe est assez restreinte comparée à d'autres teams MotoGP et nous ne pouvons donc pas, pour l'instant, nous concentrer sur les petits détails d'ingénierie qui font la différence : nous devons rester simples et directs dans notre méthode. C'est ce que nous avons fait par exemple en introduisant le nouveau moteur big bang sans avoir vraiment validé sa fiabilité en amont ou en adoptant des modifications de châssis sans les avoir testées. ces choix ont a priori été concluants… oui, mais ils auraient pu ne pas l'être. nous étions prêts à prendre ces risques car, en tant que débutant, tu dois tenter des choses pour essayer de ne pas rester le dernier ! et il reste quand même de gros points d'interrogation. en développement, il faut tout essayer pour te retirer ces points d'interrogation de la tête. si ça ne change rien, poubelle. si tu vois qu'il y a une réaction sur ton problème précis, tu creuses pour essayer de diriger cette réaction vers le résultat souhaité. à propos de la rc16 2018, parlons-nous de nouvelle moto ou d'évolution ? Cette fois, nous ne créons pas notre moto de toutes pièces ! (rires) Cet hiver, je dirais que l'idée globale est d'essayer de modifier les points clefs de la moto, ceux qui influent sur son caractère, tout en essayant de conserver ce qui fonctionne bien. sur quels points souhaitez-vous mettre l'accent ? Tu le sais, sur une moto, tout est lié et chaque modification peut bouleverser différentes caractéristiques. Pour nous, les phases de décélération et de virage sont très liées, et nous nous cherchons encore. nous devons également créer une bonne motricité à l'accélération sans que le train avant ne soit poussé par le train arrière dans le virage ; réduire le delta entre les deux extrémités de ce compromis. Ktm se démarque avec son châssis acier et ses suspensions "maison" WP. Le fait d'être les seuls à utiliser ces solutions est-il une aide ou une difficulté supplémentaire ? Bien sûr, nous croyons dans nos choix. nous travaillons main dans la main avec WP pour faire progresser nos savoir-faire ensemble. nous avons une grande connaissance des cadres acier, et le fait d'utiliser ce type de cadre en MotoGP nous permet de l'accroître 22

février - Mars 2018

encore. il est "facile" à fabriquer et nous permet de tester rapidement de nouvelles spécifications. L'aluminium n'est pas un matériau que nous utilisons pour nos châssis chez KTM. notre savoirfaire est donc limité et nous n'avons pas souhaité perdre du temps à apprendre ce que nos adversaires maîtrisent. ce n'est donc pas qu'une question de marketing… non. KTM apprécie notre choix du cadre acier. Mais si un cadre alu avait été plus performant, nous aurions opté pour un cadre alu. en moto3, dès la première saison, vous écrasez la catégorie. en moto2, dès la fin de votre première saison, vous gagnez des courses. j'imagine que ça met un peu la pression pour la catégorie reine… (rires) Chaque catégorie est différente. Mais oui, c'est vrai, nous avons rapidement rencontré le succès dans ces deux catégories. Je pense que cela va nous prendre un peu plus de temps en MotoGP, mais avec les personnes qui travaillent dans ce projet, je pense que nous arriverons au même niveau. Je suis confiant. regardes-tu ce que font les autres constructeurs ? Quand tu pars d'une feuille blanche, tu dois regarder ce qui existe. J'ai déjà dix ans d'expérience dans ce sport, j'ai conçu de nombreuses motos, et tous les détails que tu vois sur cette moto sont présents pour une bonne raison. Quand tu regardes une moto et que tu comprends les raisons qui ont poussé ses concepteurs à dessiner telle ou telle pièce ainsi, tu sais que tu dois prendre ces raisons en compte pour créer une base de travail. Une fois que cette base est posée, il n'y a plus de raison de regarder ce que font les autres : il faut se concentrer sur la résolution des problèmes que tu rencontres et, peu à peu, affiner cette base. nous n'avons pas l'énergie pour gérer vingt problèmes à la fois, nous devons nous concentrer sur les principaux. quelle moto t'intrigue dans la pit-lane ? C'est une excellente question. Toutes les motos, à ce niveau de compétitivité, sont intéressantes. elles ont chacune leur caractère, et chacune d'elle a quelque chose de particulier. Mais quand je regarde la Ducati, je pense que c'est la plus pure en termes d'ingénierie. Dans de nombreux détails, cette moto est sophistiquée et même parfois compliquée – mais avec une raison derrière, et donc avec un objectif précis. J'ai le sentiment que les firmes japonaises, le plus souvent, sont plus conservatrices, davantage conduites par leur immense expérience et par les retours des pilotes. Cela peut être un avantage ou un désavantage. Ça dépend toujours. Quand on regarde une Honda et une yamaha, on voit immédiatement que ces compagnies n'ont pas la même conception de ce qui rend une MotoGP rapide. Malgré ces pneus et cette électronique en commun, il existe différentes façons d'atteindre le succès : si tu mixes des choses qui ne vont pas ensemble, ça ne marchera pas. en revanche, tu peux faire performer des concepts très différents si tu fais ce qu'il faut pour y parvenir, et c'est précisément ce qui me plaît en MotoGP. Dans cette catégorie, il n'y a pas une moto mieux conçue qu'une autre, il n'y a que des motos aux concepts différents. Cela nous permet de garder l'esprit ouvert.


5 tÉtines

Les ateliers dédiés au tout-terrain sont beaucoup plus petits que ceux consacrés à la vitesse. "Tout simplement parce que la préparation de ces motos est assez simple, explique Philipp. fondamentalement, on prend une machine issue de nos chaînes de production, on y installe nos pièces performances selon le programme auquel elle est dédiée, et c'est parti. Les motos de vitesse sont, elles, de purs prototypes…" Logique, en effet. il n'en reste pas moins que cette 450 rally replica, prête pour un envoi imminent en argentine avant le départ du Dakar, dégage cette aura que seule une authentique machine d'usine peut exhaler.

GRanD tRi

vue plongeante depuis le premier étage (dont les 2000 m2 dédiés au stockage sont assez peu photogéniques) sur l'une des aires de stationnement des camions. L'intersaison est le moment de faire le point sur l'état du matériel itinérant. outils, établis, démarreurs, panneaux d'habillage du box, scooters, flightcases (ces malles dédiées au transport par avion) et compagnie sont contrôlés : c'est le grand déballage ! au milieu de tout cela "traînent" quelques vestiges d'une saison rock'n roll, comme cette roue avant Hs frappée du numéro de course de Pol espargaro.

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kantine et sUspensiOn

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La pause déjeuner se fera dans un autre bâtiment : les employés KTM ont en effet leur cantine située à l'étage des locaux WP suspension ! La société hollandaise White Power (quelle mouche avait donc piqué son fondateur pour choisir un tel nom…), déclarée insolvable en 1991, appartient depuis 1995 à KTM sous le nom WP suspension. en 2009, elle déménageait de Malden (Pays-Bas) à Munderfing et se diversifiait : si la suspension demeure sa spécialité, WP construit aujourd'hui les cadres en acier, les radiateurs et les échappements pour KTM. Le projet Moto2 du constructeur, entièrement centré sur la partie châssis, est logiquement abrité ici. février - Mars 2018

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GRaaL

après un plat typiquement autrichien (une sorte de pudding de bœuf en sauce, hum…) retour dans le bâtiment factory racing pour, enfin, accéder au saint des saints : l'atelier MotoGP/Moto3 ! Même si, exceptionnellement, deux des 450 d'antonio Cairoli y trouvent place, tout au fond, cet espace est dédié à l'assemblage et à l'entretien des rC16 MotoGP et rC250 Moto3 (qui, en saison, restent avec leurs teams respectifs). À la vue de mon boîtier réflex, certains employés me regardent de travers et Philipp doit vite les rassurer et me faire promettre de flouter les machines démunies de leur carénage. C'est ici que j'aurai le moins de temps pour jouer du déclencheur… frustrant ! Mais j'en prends réellement plein les yeux tandis que tout le monde s'affaire dans le calme et la rigueur au milieu de quelques-unes des plus belles machines de course au monde.

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sur le balcon, la Husqvarna avec laquelle Danny Kent a terminé 8e du championnat du monde Moto3 2014 nous rappelle que le constructeur suédois, après son passage dans le giron de BMW, appartient depuis 2013 à KTM. aujourd'hui en plein changement d'orientation, Husqvarna cantonne son image racing au toutterrain. Cette rC250 blanchie et badgée du H bleu côtoie la 125 frr vice-championne du monde des GP125 avec Mika Kallio en 2005 et un bel alignement de nez de carénages de rC16 : "ils seront offerts à nos partenaires lors de notre soirée de fin d'année", explique Philipp.

sur le mur bordant l'allée, cette frise – soulignée par la mention : "étape par étape, aucun écart" – représente l'intervalle entre le poleman des qualifications (en noir) / le vainqueur de la course (en orange) et la plus rapide des KTM rC16 en piste lors des 18 Grands Prix MotoGP 2017. L'objet parfait pour visualiser d'un coup d'œil les progrès accomplis, et une preuve de la volonté de KTM de motiver ses troupes par un management positif !

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BRaVO !

La visite est terminée, nous voilà de retour à l'accueil… La salle est nettement moins calme, puisque tous les employés présents ce jour sont conviés à une cérémonie de célébration des 14 titres mondiaux conquis par KTM et Husqvarna en 2017. si, cette année, ces champions appartiennent exclusivement au monde du tout-terrain, il ne nous étonnerait pas que le titre MotoGP fasse, un beau jour, l'objet d'une sacrée fête en interne !


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visiTe

motoGP

GLOiRe

sur la route du retour, je m'arrête dans la petite ville (6149 habitants recensés en 2016) de Mattighofen. Les nombreux passants arborant des vêtements à son effigie et la construction de ce musée à sa gloire en sont les preuves : la marque KTM est chère aux yeux des habitants et des autorités locales. Logique pour le constructeur européen n°1, dont les chiffres de vente 2017 – qui devraient bientôt être rendus publics au moment où nous bouclons ces lignes – ont selon nos interlocuteurs du jour dépassé ceux du record établi en 2016 (à savoir, 203 340 motos vendues dans le monde, contre 145 332 pour BMW et 55 541 pour Ducati). Briller en compétition le dimanche pour vendre des motos le lundi : une philosophie plus vraiment à la mode chez les constructeurs. elle est pourtant le mantra du grand patron stefan Pierer. et elle semble fonctionner.

FLORian FeRRacci

mécanicien motoGp pour Bradley smith ancien PiLote de très bon niveau en mondiaL, FLorian arrête de courir en 1997. L'année suivante, iL devient mécanicien Pour GreGorio LaviLLa dans un team Privé en WorLdsbK. dePuis, FLorian s'est ForGé une beLLe exPérience en GP.

r

aconte-nous le chemin qui t'a amené ici… après cinq années chez aprilia – en superbike, en GP250 puis en MotoGP avec la rs3 – quatre chez Kawasaki en MotoGP et six chez forward, en Moto2 puis en MotoGP, je me suis retrouvé sans boulot fin 2015 quand le patron du team a eu ses soucis avec le fisc. Je suis donc allé frapper à la porte de KTM. ils m'ont répondu qu'ils n'avaient pas de place mais qu'ils gardaient mon Cv. J'ai cru à une réponse diplomatique. Je suis allé travailler chez iodaracing en superbike avec De angelis. Puis en cours de saison, Mike Leitner [le manager de l'équipe KTM] m'a rappelé. Je suis venu ici en juillet pour une entrevue avec les responsables, qui m'ont harcelé de questions pendant 1 h 30 et, apparemment, je m'en suis pas trop mal sorti (rires). quel est ton poste précis ? Je gère la boîte de vitesses, l'embrayage, la surveillance du système pneumatique des soupapes et des corps d'admission sur la moto de Bradley. La boîte, il arrive que tu la fasses le mercredi et que tu ne touches pas aux ratios du week-end. Mais par contre, on la démonte tous les soirs et on vérifie que tout va bien à l'intérieur. Les boîtes seamless sont un peu comme des œufs sur le plat : il faut constamment avoir l'œil dessus. tu viens souvent dans les ateliers de munderfing ? non… en gros, je viens une semaine en décembre pour tout remettre en ordre, et une autre en janvier pour finaliser la préparation des pièces et l'expédition des motos en Malaisie. après, toute l'année, les courses et les tests s'enchaînent et les camions ne repassent plus par ici : on devient un atelier itinérant ! si on a

besoin de pièces de développement ou de rechange, on fait venir ça jusqu'aux circuits par transporteur. tu te sens bien dans cette équipe ? Très. Ce que je fais me plaît et les conditions de travail comme l'ambiance sont excellentes. J'avoue que j'avais un peu peur avant de venir, car j'étais habitué à travailler dans des structures latines. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre. Dans la journée, les italiens ont tendance à travailler en sifflotant quand les séances sont terminées. Là, c'est plus calme, mais le soir venu, on rigole tous ensemble ! et puis, nous sommes une équipe très internationale, puisque rien que dans le box, il y a onze nationalités différentes ! comment définirais-tu la "différence Ktm" ? Quand je suis arrivé ici, on me l'a clairement fait savoir : la priorité, c'est la course. Chez KTM, on estime que si on gagne, on va vendre des motos. Cet état d'esprit me plaît ! Chez les autres constructeurs, c'est l'inverse : si on vend suffisamment de motos, alors on investit dans la course. aussi, une personne qui m'impressionne énormément, c'est Pit Beirer. il a tout le temps le sourire, il est toujours là à nous motiver, à nous féliciter dès que KTM a un résultat, à nous envoyer des emails pour nous remercier… il est très positif dans son approche, c'est vraiment un moteur incroyable pour l'équipe. rien que d'en parler, ça me donne la chair de poule. Même le grand patron, stefan Pierer, est très simple. Quand on a fait notre repas de fin d'année l'an passé, il est venu avec nous, sur les bancs en bois, discuter. il s'intéresse vraiment à ce que nous faisons. Les dirigeants vivent ce qu'ils font et c'est vraiment très motivant pour nous tous. ■

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LA TRANS

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PAr MAriA GUiDOTTi /// PhOtOs PSP SWiDereK / JAGieLSKi, reD BULL CONTeNT PULL & Dr

ANALYSe

MOtOGP

ANDREA DOVIZIOSO

FIGURATION NOus L'AvONs Dit et réPété : ANDreA DOviziOsO, 31 ANs, AffichAit eN 2017 uN NOuveAu visAGe. uN visAGe PLus POsé, PLus DéterMiNé, MAis surtOut, PLus sûr De Lui que jAMAis. D'Où Lui vieNt cette NOuveLLe PuissANce MeNtALe ? LA jOurNAListe itALieNNe MAriA GuiDOtti cONNAît DOvi DePuis De NOMbreuses ANNées. eLLe étAit DONc LA Mieux PLAcée POur MeNer L'eNquête POur sPOrt-bikes…

J'

ai frappé à la porte d'Amedeo Maffei pour essayer de comprendre comment un pilote peut devenir un champion… et j'ai découvert le fonctionnement de l'esprit humain. Oui, cette considération pourrait sembler bien trop ésotérique pour un magazine sur le sport moto. Mais c'est bien en suivant le modèle de pensée que nous allons exposer ici qu'Andrea Dovizioso est devenu un réel cador du MotoGP. Le but n'est bien entendu d'en persuader personne, mais juste de le survoler pour comprendre comment Dovi en a tiré parti.

Les changements observés en 2017 chez Andrea Dovizioso sont le fruit d'un travail en profondeur sur son esprit. "C'est une question de détails. Je rassemble tous les détails et voilà le résultat", sourit-il quand on le questionne sur sa nouvelle force mentale. Un pilote est seul en piste, mais il a derrière lui un groupe de personnes qui travaillent pour et avec lui. Une victoire s'obtient en combinant plusieurs facteurs. Mais c'est une certitude : ces détails évoqués par Dovi ont contribué à son explosion. et derrière eux se cachent un homme : Amedeo Maffei. Qui est ce professeur Maffei ? Plus qu'un

coach mental. Un inventeur, un psychologue, un visionnaire éclectique, un philosophe pratique et, avant tout, un musicien qui a joué avec quelques légendes italiennes, dont Giorgio Gaber, Mina ou Franco Battiato. Amedeo Maffei nous a accueillis dans sa villa à Sirtori, dans la banlieue de Milan, et nous avons rapidement découvert que cet endroit est fréquenté par les meilleurs athlètes : l'ancien champion cycliste roman vainsteins, le pilote Ferrari Tommaso rocca, le légendaire alpiniste Kurt Diemberger, de nombreux footballeurs ou joueurs de Février - MArS 2018

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grâce à amedeo maffei, j'ai découvert en moi un pouvoir que je ne savais pas posséder. ANDrEA DovIzIoSo

Derrière chaque pilote, il y a un homme qui amène avec lui ses doutes, ses soucis, ses problèmes, ses peurs...

golf professionnels, ou encore les pilotes moto Andrea Dovizioso et Florian Marino. Habitués à voir des pilotes talentueux gagner, nous avons tendance à penser que le pilotage fait tout. Mais la vérité se veut plus subtile. Nous oublions souvent que derrière chaque pilote, il y a un homme, qui amène avec lui, dans le paddock et sur sa moto, ses soucis, ses problèmes non résolus. Ces pensées, indissociables du cerveau humain, peuvent bien entendu déterminer son succès ou sa perte. Après sa superbe victoire au Mugello en juin dernier, Dovizioso a avoué avoir rencontré une personne qui a changé sa vie. En huit saisons en MotoGP, le champion du 30

FévrIEr - MArS 2018

monde 125cc 2004 avait remporté une victoire (GP d'Angleterre 2009). Depuis qu'il a commencé à travailler avec le professeur Maffei en juillet 2016, l'Italien a amassé la bagatelle de sept succès : un en 2016 à Sepang, six en 2017. "Grâce à Amedeo Maffei, poursuit Dovi, j'ai découvert en moi un pouvoir que je ne savais pas posséder. J'ai compris que si vous faisiez face aux choses d'une certaine manière, ces choses se produisent, sans dépendre des autres ou du hasard." Le mot "hasard" est banni du vocable du professeur Maffei, car selon lui, l'homme est le maître de sa vie ; avec son comportement, chaque homme peut influencer les

choses autour de lui et accomplir ses rêves. "Nous sommes tous nés pour gagner, être heureux et atteindre les objectifs que nous souhaitons, mais nous ne le savons tout simplement pas, explique Maffei. La bonne nouvelle est que l'esprit humain est capable de réveiller ces compétences qui sont déjà présentes en nous et de les rendre permanentes, tout simplement parce qu'elles nous appartiennent déjà. Notre moteur est fantastique. Tout est question de comprendre comment fonctionne l'esprit humain et de faire pointer nos pensées, nos paroles, nos émotions dans la bonne direction. L'esprit est une machine dont le but est d'atteindre des objectifs et il ne peut concevoir qu'une seule chose à la fois. Nous venons au monde sans le mode d'emploi, mais une chose est sûre : chacun peut devenir le maître de sa vie et un champion dans sa famille, au bureau comme sur les circuits." Simplement, pour déverrouiller ce potentiel, il faut utiliser les bons outils. "Je cherche les compétences créatives que nous perdons avec le conditionnement. La clé est de réveiller ces compétences, réprimées par les peurs et les inhibitions, poursuit Maffei. Le chemin pour retrouver ces compétences passe par un processus de déconditionnement de toutes les superstructures qui ont créé des limites afin de s'ouvrir à de nouvelles possibilités. Cette méthode fonctionne parce que nous possédons tous le même moteur, verrouillé par des conditionnements différents." Le professeur travaille avec des personnes visant des cibles très élevées. "Il n'y a pas de


ANALYSe limites en dehors de celles que nous créons pour nous-mêmes, estime-t-il. Bien sûr, il y a des limites naturelles, mais si vous ne vous fixez pas de limite avant d'agir, vous pouvez toujours pousser la barre plus haut." Une fois libéré de son conditionnement lié à son passé, l'homme retrouve son naturel rêveur et peut écrire son présent et son avenir. Changer de comportement est la clé et c'est quelque chose que les enfants font spontanément, parce qu'ils ne sont pas (encore) conditionnés par les modèles du passé.

L'ÂMe…

"Le bonheur n'est pas une fin, c'est un comportement. Nous avons un pouvoir qui nous diffère des animaux : le pouvoir de rêver. vous réussirez dans quelque chose en quoi vous croyez profondément et qui vous émeut. Les émotions sont le carburant de votre moteur, elles vous poussent à agir pour réaliser quelque chose et le rendre réel. Si vous limitez vos rêves, vous limitez vos compétences pour les atteindre et vous finissez par cesser de rêver."

Amedeo Maffei est bien plus qu'un coach mental.

Nous sommes une machine faite pour réaliser des rêves et être heureux et il devient donc crucial de bien diriger nos énergies. "Sois conscient de ce dont tu rêves, car ton rêve devient réalité, prévient Maffei, avant de faire une distinction importante. L'homme, y compris le pilote, ne court pas pour battre ses rivaux, mais pour gagner. Tous nos efforts doivent être concentrés sur nous-mêmes, pas contre les autres. vous gagnez pour vous prouver ce que vous valez, pas pour humilier quelqu'un d'autre. Sur cette voie, nous avons besoin de partenaires et non d'ennemis. et nous devons être les premiers à croire en nous-mêmes." il n'y a pas de pilotes, de femmes au foyer ou d'hommes d'affaires. il y a des êtres humains et notre vie personnelle dépend de notre imagination et de notre motivation. "Deux motivations principales mettent notre moteur en route : le désir brûlant et la peur de perdre. La peur nous fait imaginer un échec qui arrive comme un résultat. Nous obtenons ce qui nous touche le plus, parce que l'esprit humain ne peut concevoir qu'une seule chose à la fois. en fait, le pessimiste comme l'optimiste disent 'je m'y attendais', parce qu'ils reconnaissent que ce qui se passe est le résultat de ce qu'ils ont projeté en eux. Un homme est son propre résultat et jusqu'à ce que nous soyons conditionnés par le passé, nous sommes principalement touchés par la peur de perdre. Cette peur nous émeut, car c'est ce que nous avons appris, d'abord à la maison, puis à l'école. il est plus facile pour nous de projeter un échec, parce que nous sommes éduqués avec la peur. La raison pour laquelle nous manquons la cible est que nous gardons une porte ouverte à une alternative, à un

MOtOGP

Depuis sa rencontre avec le professeur, Dovi a amassé les succès en MotoGP.

doute. Nous sommes plus familiers avec le sentiment qui nous dit 'je ne peux pas le faire', plutôt qu'avec celui qui nous dit 'j'ai les compétences pour réaliser ce que je veux et je mérite d'être heureux.' J'enseigne à demander ce que vous souhaitez à votre esprit, pas à vos peurs, explique Maffei. vous devez vous demander ce que vous voulez et vous fixer un délai. Si vous n'y croyez pas, cela n'arrivera jamais. La motivation est une pulsation, une passion constamment renforcée. Un champion est une personne qui fait ce qu'elle aime et

un pilote gagne quand il s'amuse, quand sa machine devient une extension de son corps. Février - MArS 2018

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un champion est une personne qui fait ce qu'elle aime et qui réalise son rêve.

une victoire sur circuit dépend de nombreux facteurs : mécanique, pneus, météo...

réalise son rêve. Notre esprit produit un résultat quand il est motivé par un désir brûlant qui vous accompagne toute la journée. vous vous réveillez avec votre objectif et vous allez vous coucher avec. La passion et la motivation personnelle deviennent le pain quotidien d'un champion, et les bonnes nouvelles sont que si vous aimez vraiment ce que vous faites, ce n'est pas un effort mais un jeu. Le champion atteint sa cible, s'amuse, et cela peut être facilement vu sur la piste, quand un pilote gagne en s'amusant sur sa moto, quand le pilotage devient naturel et spontané, comme la respiration,

... mais la clé est de croire fermement en soi.

quand la machine devient une extension du corps du pilote." Quelle est la différence entre obtenir un résultat et devenir un homme à succès ? La clé n'est pas de gagner une fois, mais de répéter la victoire. "Si vous obtenez une fortune que vous n'avez pas construite de vos mains, vous la perdrez. Au contraire, si vous la créez, vous savez comment le reproduire, et cela vous donne la force et l'estime de vous-même. Bien sûr, vous ne pouvez pas toujours gagner car une victoire sur circuit dépend de plusieurs facteurs (pas tous dépendants de vous, comme la keope est une machine inventée par Maffei, qui développe la proprioception des athlètes.

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Février - MArS 2018

machine, les pneus, les autres pilotes, la météo), mais la clé est de croire fermement en soi et de mettre en place la volonté d'atteindre un seul but, sans laisser de porte ouverte au doute. Le vainqueur est celui qui n'a qu'un objectif en tête : gagner. il ne conçoit aucune autre alternative. Ceci semble clair avec un exemple : il n'existe pas de voleur qui planifie et effectue un cambriolage en pensant que la police va l'attraper."

… et LA MAchiNe

Plus de 45 000 personnes ont assisté à "experience AM", les groupes intensifs qu'Amedeo Maffei héberge à la villa Futura de Sirtori. L'idée est d'y expérimenter ce processus de déconditionnement et d'apprendre à répondre à ses attentes en respectant ses passions et ses désirs. Maffei a travaillé avec toutes sortes de publics : des hommes d'affaires aux politiciens, des athlètes aux cardinaux, et même des prisonniers. Ce processus de croissance personnelle est soutenu par une machine : Keope. il s'agit d'une structure ergonomique avec des supports situés dans les zones corporelles à haute densité de mécanorécepteurs, inventée par Amedeo Maffei. Keope est utilisé par de nombreux athlètes, dont les joueurs des équipes de football du Bayern Munich, de l'Olympique de Marseille et du Chievo


Verona, ou encore par l'astronaute italien Luca Parmitano. "Keope offre des bénéfices importants pour tout le monde et surtout pour les sportifs car, en plus de renforcer les muscles responsables de l'équilibre, il optimise le système proprioceptif, réduit le taux d'acide lactique en quelques minutes et permet une récupération rapide après un effort. Keope est basé sur la conception de la proprioception, c'est-à-dire la perception de soi dans l'espace. C'est le résultat de trente années de recherche. Son activité électromécanique appliquée aux dix opposants gravitationnels permet l'activation du système neurosensible, donnant ainsi une réponse physiologique à large spectre thérapeutique. La proprioception prend une importance fondamentale dans le mécanisme complexe de contrôle des mouvements, ajoute Amedeo Maffei. C'est évident dans la capacité de percevoir et de reconnaître la position du corps dans l'espace, la contraction des muscles et dans la gestion des muscles liés à l'équilibre, même sans s'aider de la vue. Cette capacité est liée à la présence de récepteurs spécifiques, répartis dans différentes zones du corps, sensibles aux stimulations mécaniques. Les récepteurs stimulés par Keope transmettent le signal au système cérébral. Pensez aux muscles de la gravitation responsables de l'équilibre : ils sont importants pour les astronautes lorsqu'ils reviennent de l'espace, pour les personnes âgées et pour les athlètes, car ils ont tendance à perdre le contrôle à la suite d'efforts extrêmes. Renforcer le contrôle de ces muscles vous permet de retrouver l'équilibre, et cela peut également être appliqué aux pilotes pour créer un équilibre exceptionnel avec la moto. Pour expliquer ce concept, on pourrait dire que Dovizioso ressent l'asphalte avec ses pieds, pas avec les pneus. Il a amené sa perception directement sur le revêtement du circuit et sur le monde autour de lui." Ce nouveau monde, Amedeo Maffei va l'enseigner dans un programme de Master à l'Université San Raffaele de Milan. "Vous ne changez pas votre esprit, mais le subconscient qui le gère", estime-t-il. Ceci explique pourquoi, une fois ses compétences réveillées, l'homme devient indépendant et responsable de la gestion de ses propres capacités. Ainsi, depuis septembre 2017, Amedeo Maffei a terminé son travail avec Dovi. "Nous restons amis, la porte est ouverte, mais chacun fait sa propre vie", conclut-il. Et pour 2018, le professeur pourrait bien nous surprendre en intégrant quelques nouveaux noms des GP à la liste des athlètes convaincus par sa méthode… ■

L'EXPÉRIENCE DE FLORIAN MARINO AvrIL 2016, ASSen : FLorIAn MArIno eST vICTIMe D'une TerrIbLe ChuTe quI L'éCArTe DeS CIrCuITS PenDAnT PrèS D'un An… oCTobre 2017 : IL ConCLuT Le ChAMPIonnAT D'euroPe STK1000 à une SuPerbe 3e PLACe, en LICe Pour Le TITre JuSqu'Au bouT ! Le FrAnçAIS nouS rAConTe CoMMenT KeoPe A Joué un rôLe PréPonDérAnT DAnS Son reTour rAPIDe Au MeILLeur nIveAu. Ma jambe était littéralement brisée ; tous les os. J'ai passé deux mois à “D l'hôpital, mais dans le même temps, j'ai commencé à utiliser la machine ans cet accident, je me suis cassé le bassin, le fémur, le tibia et le péroné.

Keope qui aide à la circulation sanguine et accélère la récupération. Le feeling a immédiatement été génial : j'étais coincé au lit et après chaque séance, je sentais mieux ma jambe. Je suis remonté sur une moto pour un test trois mois et demis après l'accident et c'était vraiment sensationnel. Mais j'ai dû attendre une année pour revenir en course : les médecins n'ont pas souhaité me laisser piloter. Selon eux, j'avais besoin de deux ans pour récupérer. J'ai utilisé Keope pendant un an, tous les jours, deux fois par jour. Ses bénéfices impliquent le corps et l'esprit. Cette machine m'a aidé à me retrouver, à comprendre ce qui s'est passé dans l'accident, pourquoi c'est arrivé et aussi ce que je voulais faire à l'avenir. Lorsque tu as terminé ta séance, tu te sens parfaitement calme. Il n'y a rien d'autre dans ton esprit que du calme. Je n'avais jamais vécu quelque chose comme ça avant. Il faut vraiment essayer pour comprendre. Tu as l'impression... d'être prêt à penser d'une façon nouvelle. Dans ton esprit, il n'y a rien de plus que la chose à laquelle tu penses : pas de distraction, pas de bruit. J'ai aussi compris que mon attitude en course n'était pas la bonne. J'avais trop de colère en moi quand je montais en selle, j'attaquais trop à chaque fois. J'ai donc reculé d'un pas pour finalement avancer de deux ! 2017 s'est avérée l'une de mes meilleures saisons et c'est incroyable parce que la plupart des médecins ne voulaient pas me laisser rouler. Pourtant, j'ai plus que jamais la sensation de contrôler les choses. Je n'ai pas peur, mon esprit est positif. Chaque fois que je prends la piste, je veux être un meilleur pilote. Je ne veux pas être le meilleur, mais je me demande de toujours faire de mon mieux. Si je peux donner le meilleur de moi-même, je n'ai aucune raison de me trouver dans l'incapacité de gagner. Je suis heureux et satisfait de moi-même. Au final, la course concerne davantage l'homme que le pilote." FéVRIER - MARS 2018

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MotoGp

ANALySE

par MAT OXLEy /// photos PSP SwiDEREk / JAgiELSki

ENTRE CRASHS ET DOULEUR

DURS COMME

FER ? Les piLotes de MotoGp nous seMbLent parfois dotés d'une résistance à La douLeur surhuMaine. à peine se reLèvent-iLs de Leur Lit d'hôpitaL qu'iLs se jettent à nouveau, en GriMaçant, aux coMMandes de Leurs vicieuses Montures. Mais sont-iLs réeLLeMent si soLides que ceLa ? nous nous soMMes rencardés auprès de six d'entre eux…

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FévRiER - MARS 2018


N

ous sommes au gP d'Aragon, à la fin du mois de septembre 2017. valentino Rossi, à la surprise générale, est jugé apte à prendre la piste malgré une jambe fraîchement cassée. Un acte de bravoure qui vient s'ajouter à la légende du célèbre n°46. Ou pas. L'italien s'est fracturé le tibia et le péroné de la jambe droite en chutant en enduro, quelques jours après avoir relancé son championnat avec une troisième place à Silverstone. Son tibia a été immobilisé à l'aide de l'habituel clou chirurgical. Si l'opération est réussie, la jambe doit être immédiatement aussi solide qu'avant la fracture. La douleur, c'est une autre question… Les pilotes moto sont habitués à faire face à la douleur. Rossi a couru en Aragon seulement 23 jours après avoir contracté sa blessure. Et ça n'a rien d'inhabituel pour

un pilote de grand Prix. Le cas le plus fameux de l'ère moderne est sans conteste celui de Jorge Lorenzo, qui a participé au gP des Pays-Bas 2013 moins de 48 heures après s'être fracturé la clavicule, entretemps clouée et plaquée en Espagne. C'est le prix que les stars du MotogP sont prêtes à payer pour saisir le guidon des meilleures machines et s'enrichir. Quand Rossi est arrivé en Aragon, boitant sur sa béquille, de nombreux observateurs du paddock s'attendaient à ce qu'il soit à la ramasse. Allez, peut-être marquerait-il quelques points ! Mais Rossi avait des projets bien différents en tête. Après la FP1, son acolyte Uccio Salucci lui a tendu sa béquille. "Non", fut sa réponse. Uccio a recommencé après la FP2 : "NON !", lança cette fois la star sur un ton à la limite de la colère.

"Je roule ici sans trop de douleur", allait déclarer Rossi plus tard dans le week-end. Mais ce que Rossi qualifie comme "trop de douleur" est probablement bien différent de ce que cela représente pour vous et moi. Après la FP1, disputée sur une piste humide, Rossi a comparé sa M1 chaussée en pneus pluie à sa R1 Superbike dotée de slicks sur le sec : cela permet aux pistards que nous sommes de mesurer les contraintes générées par le pilotage d'une MotogP. Les ingénieurs yamaha estiment ainsi que Rossi applique 110 kilos de pression sur chaque repose-pied quand il fait virer sa M1 d'un côté à l'autre : avec une jambe cassée, ça fait beaucoup – même si elle a été immobilisée dans les règles de l'art. Et Rossi a terminé le week-end avec une cinquième place, à 5,2 secondes du vainqueur. À l'instar de la plupart des pilotes de haut

Marquez prend beaucoup de risques et chute donc souvent. "Mais c'est la voie à suivre," dit-il.

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Cal CrutChlow "Je n'aurais pas dû courir, c'est sûr"

"Quand j'ai couru à Silverstone en 2012 avec une cheville cassée, ça n'était pas le pire. Je n'aurais pas dû courir au Mugello en 2015, ça, c'est certain. Je m'étais mis complètement KO au warm-up du matin, et je pouvais à peine voir pendant les trois premiers tours de course. Honnêtement, ce n'était pas génial. Je m'étais aussi cassé un scaphoïde dans l'accident, mais je n'en ai jamais parlé à personne car j'avais besoin de rouler et je voulais courir. J'ai chuté à trois tours de la fin – rien à voir avec la commotion cérébrale – et je me suis disloqué une cheville. Le pire était le Sachsenring, en 2013. J'étais ruiné. Honnêtement, si tu m'avais vu ! Quand j'ai chuté en FP2 [dans le redoutable virage n°11 du circuit allemand], il y avait tellement de sang qu'ils m'ont chargé de morphine. J'étais complètement out. Quand je me suis levé le samedi matin, je me suis retrouvé à plat ventre dans le camping-car, à me pisser dessus, avec Lucy [aujourd'hui Madame Crutchlow] qui hurlait parce qu'elle pensait que j'étais en train de mourir. Puis je suis sorti, je me suis qualifié deuxième et le lendemain, j'ai presque gagné la course [il a terminé 1,5 seconde derrière le vainqueur Marc Marquez]. Mais je n'avais aucun feeling dans mon bras droit."

niveau, Rossi fait fi de la douleur et des blessures parce qu'il a consience que c'est un aspect inéluctable de son travail. Il sait qu'il serait inutile de faire ce qu'il fait s'il n'était pas capable de composer avec la souffrance. En d'autres termes : si vous ne pouvez pas gérer ça, allez faire quelque chose de plus sûr, comme de la course automobile ou de la comptabilité.

ENTRE RÉSISTANCE…

Rossi, sur sa longue carrière, s'est très peu blessé. Même s'il est toujours en activité, il est en bien "meilleur état" que certains de ses rivaux de la même génération. Et prenez un jeune comme Jack Miller : l'Australien a chuté à 57 reprises durant ses trois saisons en MotoGP. Dans la même période, Rossi est tombé dix fois. Une bataille Lors dubonne GP d'Australie, Miller a fait plus toujours plu Rossi, en terminant sepou est moins comme tième à 5,6 secondes du vainqueur, 24 jours 36

FévRIER - MARS 2018

après s'être cassé le tibia de la jambe droite dans une chute en trial. Une autre histoire de courage et de rééducation intensive. "Ma jambe allait bien, jusqu'à ce que je la retire du repose-pied à la fin de la course pour faire un burn, a déclaré Miller après avoir mené les premiers tours de son GP national. Je me suis dit, houlà, c'est un peu raide !" Cal Crutchlow, lui aussi, s'envole beaucoup plus souvent qu'il ne le devrait : 62 crashes en trois saisons ! "En tant que pilote de moto, tu n'es jamais en forme, tu as toujours une blessure qui traîne, lance le Britannique – qui parle peut-être plus pour luimême que pour les autres. Dans la vie de tous les jours, j'ai mal à l'épaule parce que, après l'avoir disloquée et brisée, je fais de l'arthrite. Mes genoux me tuent, mes bras aussi… C'est un problème pour beaucoup d'entre nous." Alors, comment fait-il face à cette douleur permanente ? "Tu dois juste continuer avec et faire ce que tu as à faire." Comment éluder également le champion en titre, Marc Marquez, "fort" de 57 chutes sur ces trois mêmes saisons, dont 27 en 2017 (soit quatre de moins seulement que le recordman, Sam Lowes). Mais l'Espagnol nous l'expliquait dans la synthèse MotoGP de notre n°109 : "Je prends beaucoup de risques, mais pour moi, c'est la voie à suivre." Tomber à moto a toujours fait mal et fera probablement toujours mal. Mais les temps changent. Les GP dans les années 1950/60 étaient très différents des courses modernes. Maintenant, les circuits et les motos sont plus sûrs, les protections et les instal-

Cal Crutchlow s'envole beaucoup plus (62 chutes en 3 ans) qu'il ne le devrait.

lations médicales sont bien meilleures. L'ironie veut que plus les conditions de sécurité des GP sont bonnes, plus les pilotes tombent souvent. L'année dernière, on a dénombré plus d'un millier de chutes durant la saison : une première dans l'histoire des Grands Prix. Cette quantité astronomique de chutes démontre à quel point les pilotes sont prêts à tout essayer quand ils savent que les risques encourus sont généralement minimes. Bien sûr, nous ne pouvons pas occulter les récents décès de Shoya Tomizawa, Marco Simoncelli ou Luis Salom... Mais d'une manière générale, notre sport est devenu beaucoup plus sûr.

… ET RÉSILIENCE

Au début des Grands Prix, votre premier accident pouvait être le dernier. La plupart des circuits étaient bordés de maisons, de murs, d'arbres… habillés, dans le meilleur des cas, de quelques bottes de paille.


AnALYSE

MOTOGP

lES PIrES CaS DaNS l'hIStoIrE DES GP Barry ShEENE, Cadwell Park 1975

Quand le pneu arrière de Sheene explose à 280 km/h sur le banking de Daytona, le pilote anglais se casse un fémur, un bras, une clavicule et plusieurs vertèbres. Sept semaines plus tard, il se bat pour la victoire à Cadwell avant d'abandonner, à l'agonie. Une semaine après, il essaie de revenir en GP mais les médecins refusent de le laisser courir.

KENNy roBErtS, Salzburgring 1979

En février 1979, Roberts chute sur la piste d'essai de Yamaha. Il se brise le dos, un pied, une clavicule et explose sa rate. Il va rester dans un hôpital japonais pendant un mois et revenir en course au Salzburgring huit semaines plus tard. Là-bas, il remporte la course pour assurer son deuxième titre en 500cc.

MICK DoohaN, Rio de Janeiro 1992

Lorsque Doohan chute à Assen en 1992, les médecins locaux veulent lui amputer la jambe droite. Au lieu de cela, le Dr Costa le fait échapper de l'hôpital et lui coud les deux jambes ensemble pour tenter de sauver le membre mutilé. Doohan revient en piste seulement huit semaines plus tard, avec des blessures gravement infectées et un pied droit qui glisse sans cesse du repose-pied, faute de sensibilité.

ValENtINo roSSI, Laguna Seca 2010

Au plus les conditions de sécurité s'améliorent, au plus les chutes sont nombreuses.

Le fait de voir plusieurs pilotes mourir chaque année faisait partie du jeu, et cela explique pourquoi Giacomo Agostini, 15 fois champion du monde, n'oubliera jamais ces jours. "Une fois, j'ai vu des drapeaux agités dans tous les sens et de la paille éparpillée partout, se souvient-il. En passant au travers de la scène, j'ai vu une tête d'un côté de la route et un corps de l'autre… Ce n'était pas facile d'aller courir dans ces conditions. A cette époque, nous rêvions seulement de couvrir tous les arbres de paille, ça ne nous venait même pas à l'esprit de demander

Rossi est plus chanceux que beaucoup, mais lui aussi a prouvé sa force par des retours rapides, comme lorsqu'il a couru avec un poignet cassé à Assen en 2006. Sa blessure la plus grave reste sa première double fracture tibia/péroné, en 2010. Quatre semaines plus tard, il court, et encore deux semaines plus tard, il monte sur le podium de Laguna avec des béquilles.

JorGE lorENzo, Assen 2013

Jorge Lorenzo chute et se fracture une clavicule en FP2. Cette nuit-là, Yamaha l'emmène à Barcelone dans un jet privé, où les chirurgiens vont réparer la fracture avec une plaque de titane et dix vis. Le jet revient à Assen le matin de la course, où il passe un examen médical avant de signer une cinquième place héroïque (ou totalement folle…).

DaNI PEDroSa, Sachsenring 2013

Peu de pilotes ont été aussi durement touchés que Pedrosa. Ses quêtes des titres MotoGP 2007, 2008, 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013 ont toutes été gâchées par des blessures. Au GP d'Allemagne 2013, il se fracture une clavicule alors qu'il est en tête du championnat. Il est prêt à courir jusqu'à ce qu'il subisse une perte drastique de tension artérielle.

Rouler en serrant les dents, Dani Pedrosa connaît bien ça.

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MOTOGP

AnALYSE Sur sa longue carrière, Rossi s'est très peu blessé. Il est en meilleur "état"que nombre de ses rivaux.

de les abattre. nous étions à mille lieues d'imaginer des pistes avec des zones de dégagement, des cuirs blindés de renforts et dotés d'airbags..." Ago et Barry Sheene ont initié le mouvement pour améliorer la sécurité, et cette campagne est encore en cours aujourd'hui. Mais les pilotes sont toujours blessés parce qu'ils sont toujours en train de repousser les limites, à pourchasser ce centième de seconde qui les obsède. Quand ils dépassent cette limite et se blessent, surmonter la douleur et continuer à piloter fait partie de leur travail. "Il n'existe pas de solution magique pour rouler dans ces situations… Juste ça !", estime Dani Pedrosa, souvent blessé, en grinçant des dents. En d'autres termes, serrer les dents est la seule solution.

Et puis, il y a la pression de garder son guidon. "Quelle que soit l'équipe pour laquelle tu roules, si tu dis 'je ne peux pas rouler', ils vont te répondre, 'OK, on va te trouver un remplaçant', explique Crutchlow. Alors nous pensons tous : je dois courir." Bradley Smith n'est pas d'accord, mais il travaille pour une équipe d'usine bien financée, et non pour une équipe indépendante qui cherche désespérément à être exposée à la télévision. "Je pense que les teams et les équipes médicales prennent des décisions plus judicieuses sur les blessures, explique Smith.

23 jours après s'être cassé la jambe (fracture tibia/ péroné), Rossi est revenu courir le GP d'Aragon.

Ils reprennent les pilotes quand ils sont prêts, pas trop tôt." De nos jours, les tests sur les pilotes de retour d'une blessure sont plus stricts, mais certains font tout pour passer au travers des contrôles médicaux, même pour des problèmes graves comme les commotions cérébrales. "Si tu ne t'es pas retrouvé KO après ta chute, ils ne peuvent pas vraiment déceler une commotion cérébrale si tu mens du début à la fin du test", sourit Crutchlow. Ainsi, le pilote revient sur sa moto de 250 ch, peu importe que son cerveau ou son corps ne soient pas prêts. "Les blessures sont nulles, elles font mal, ajoute Smith. Rouler sur ces motos n'est déjà pas facile quand on est en forme, mais quand on est blessé, on n'est pas soi-même. Tu penses pouvoir rouler mais tu compenses toujours une faiblesse, une douleur ; il te manque forcément quelque chose…" ■


A force de chercher la limite et les derniers centièmes, les pilotes partent de plus en plus à la faute.

lES ChIFFrES taBouS DES GP CETTE PART DE L'HISTOIRE DES GP N'EST PAS LA PLUS PLAISANTE, MAIS ELLE NOUS AIDE à COMPRENDRE COMbIEN LA SÉCURITÉ DES PILOTES A PROGRESSÉ. Années 1950 29 DÉCÈS

La guerre vient juste de se terminer, personne ne se soucie de la sécurité. Et ça se voit, avec des circuits routiers, des cuirs épais comme des feuilles à cigarette et des "casques" en liège...

Années 1960 25 DÉCÈS

Les circuits et les équipements sont tout aussi meurtriers. L'arrivée des moteurs 2-temps, aussi performants qu'enclins au serrage, n'arrange pas les choses.

Années 1970 24 DÉCÈS

Les casques intégraux arrivent. Les circuits deviennent plus sûrs, mais les pilotes de voiture ont exigé des barrières de type Armco pour améliorer leur sécurité. Les pilotes de moto les appellent les "rails de la mort".

Années 1980 14 DÉCÈS

Les circuits routiers ont presque disparu des GP et les meilleurs pilotes ont embauché Mike Trimby pour apporter d'autres améliorations. Les gilets et dorsales de protection font leur apparition.

Années 1990 2 DÉCÈS

Le dernier circuit – partiellement – routier de Spa-Francorchamps est retiré du calendrier des GP. Les airfences font leur apparition et la protection du pilote profite des bienfaits de la science.

Années 2000 1 DÉCÈS

Les quatre-temps de MotoGP ont remplacé les 500cc 2-temps, les airbags sont introduits et le contrôle de traction se généralise – même s'il n'est pas fiable dans ses premiers stades de développement.

Heureusement, les cas de chute mortelle restent rares, grâce à l'évolution des protections.

Années 2010 3 DÉCÈS

La course est plus sûre mais plus serrée que jamais, et deux pilotes sont tués suite à un contact avec un autre. Luis Salom est le premier pilote de GP depuis 32 ans à mourir en raison d'un manque de dégagement. FévRIER - MARS 2018

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MOTOGP

TECHNIQUE PAR MAT OXLEY /// PHOTOS PSP SWIDEREK / JAGIELSKI, KALEX & DR

DESSINE-MOI UN CHÂSSIS ! SANS UNE EXCELLENTE PARTIE-CYCLE, LE PLUS PUISSANT DES MOTEURS N'EST D'AUCUNE UTILITÉ. CONCEVOIR ET DÉVELOPPER UN CHÂSSIS CAPABLE DE GAGNER UN GP EST UN ART A PRIORI PEU ACCESSIBLE AU COMMUN DES MORTELS. POURTANT, QUAND ALEX BAUMGÄRTEL, CONCEPTEUR EN CHEF ET DIRECTEUR GÉNÉRAL DE KALEX, VOUS EXPLIQUE SES GRANDS PRINCIPES, VOUS AVEZ PRESQUE ENVIE DE PRENDRE VOS CRAYONS ET VOTRE SOURIS…

L

es motos sont des machines beaucoup plus étranges que les voitures. L'excellent ingénieur Suzuki, Yamaha et KR, Warren Willing, avait pour habitude de répéter que les motos de course ont davantage de points communs avec un avion de chasse, car elles travaillent dans de nombreux axes. Une moto n'est presque jamais dans une phase statique : le pilote fait constamment bouger son corps autour d'elle, les charges 40

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évoluent continuellement, d'avant en arrière et d'un côté à l'autre, la géométrie change tout au long d'un virage, à l'instar de la circonférence du pneu (réduite sur l'angle), de la surface de contact entre le pneu et le sol et ainsi de suite. Il revient au concepteur de châssis de créer le meilleur compromis possible en répondant à de nombreuses demandes contradictoires. Alex Baumgärtel, codirecteur de Kalex, est le concepteur de châssis le plus couronné

de succès du paddock des GP. La société allemande est entrée en Grand Prix en 2010 et a depuis remporté 85 GP et neuf titres pilote et constructeur en Moto2. Kalex ne construit pas de châssis en MotoGP, mais les principes dans les deux catégories sont proches : les motos offrent un gabarit et un poids similaires et sont chaussées de pneus de taille comparable. La puissance supérieure des MotoGP est la seule différence majeure.


LA RIGIDITÉ ET LA FLEXIBILITÉ DU CHÂSSIS La flexibilité est LE point prépondérant dans le développement d'un châssis en MotoGP, probablement parce qu'il est aussi le plus nébuleux. Si les constructeurs peuvent mesurer le niveau de flexibilité d'un châssis, il est très difficile de le calculer en amont, pendant sa conception. Pour comprendre si un châssis fonctionne, il faut le tester dans le monde réel, sur un circuit de course. Les ingénieurs autorisent un certain niveau de flexion dans leurs châssis pour de nombreuses raisons. On entend souvent que la flexion latérale permet de jouer le rôle de suspension sur l'angle maxi (quand la fourche et l'amortisseur sont presque totalement inutiles) pour aider les pneus à mieux suivre les aspérités du revêtement et ainsi optimiser leur adhérence. Mais selon Baumgärtel, la flexibilité d'un châssis joue un rôle encore plus important : "C'est un outil de pilotage, explique-t-il. La façon dont le châssis se courbe sous certaines charges procure un effet auto-directionnel et facilite ainsi le pilotage. Imaginons que l'ensemble cadre et bras oscillant se courbe comme une banane : avec un centre de gravité situé plus ou moins vers son centre, le châssis décrit une ligne courbe dans le virage. Cela aide la moto à tourner. Un châssis qui resterait entièrement rectiligne concentrerait toute la force de virage sur le pneu avant, au risque de le surcharger. Bien sûr, il faut adapter la rigidité du châssis aux pneus : si leur construction change, il est impératif de modifier le châssis en conséquence." La flexibilité est également une composante de la suspension. "Toutes les motos de course sont plus souples que les motos de route sur le plan latéral afin d'autoriser une certaine flexion à des angles d'inclinaison élevés, ajoute Baumgärtel. Mais elles doivent également être suffisamment rigides pour permettre des changements de direction rapides et éviter les oscillations qui pourraient affecter l'adhérence des pneus. La tâche consiste à séparer la rigidité latérale de la rigidité longitudinale, au travers du cadre, du bras oscillant et de la fourche. Nous jouons avec la manière dont nous façonnons le cadre et le bras oscillant, en adaptant l'épaisseur des parois entre 1 et 5 mm. Un cadre ne doit avoir aucun point faible dans les zones de stress."

Les pilotes ont besoin de flexibilité pour amortir certaines des forces qui traversent le châssis, mais il est important que cette même flexibilité ne transforme jamais un mouvement positif en un mouvement négatif. "Si la force de flexion s'accentue de façon linéaire, alors elle est prévisible et le pilote peut sentir ce qui se passe, explique Baumgärtel. Mais rien dans un châssis n'est infiniment rigide : tout devient flexible à un certain niveau de force. Par conséquent, chaque partie du châssis possède un taux de ressort qu'il faut essayer de neutraliser. Nous pouvons simuler les choses, jusqu'à un certain point, en appliquant des charges latérales et longitudinales sur les zones de contact avant et arrière, puis nous essayons de manipuler les données avec différentes géométries, différentes formes et différents matériaux. Mais dans le monde réel, les points de vue sur ce qui fonctionne le mieux divergent : tout dépend du feeling du pilote." Les niveaux de flexibilité ne sont pas énormes. Quand un châssis de course se "courbe comme une banane" en virage, on parle d'un décalage d'environ un millimètre entre l'avant et l'arrière. Ce n'est pas beaucoup mais c'est suffisant et cela explique pourquoi Ducati a finalement décidé d'abandonner son concept de moteur porteur dans le châssis de la Desmosedici. La flexion du cadre sur l'angle maxi, quand le châssis joue le rôle d'amortisseur, est de deux millimètres environ, et de l'ordre d'un millimètre dans le bras oscillant. Tous les constructeurs de châssis MotoGP et Moto2 (à l'exception de KTM, qui préfère un treillis tubulaire en acier) fabriquent leurs cadres et bras oscillants à partir d'alliages d'aluminium taillés dans la masse. Rien n'est plié ou enfoncé, car cela pourrait créer des faiblesses. Les sections taillées sont ensuite soudées à la main. Les robots ne sont pas suffisamment précis… Pas encore !

Le saviez-vous ? Sur l'angle, la déformation d'un châssis de course confère un effet auto-directionnel ! C'est assez nouveau pour Ducati...

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LES PNEUS ET SUSPENSIONS

Si les pneus conditionnent le châssis, la nouvelle fourche Öhlins en carbone permet de mieux gérer la rigidité du train avant.

Les pneumatiques constituent un élément prépondérant dans la conception d'un châssis, et ce dans les trois catégories des Grands Prix, chacune faisant appel à un manufacturier unique. Les constructeurs doivent adapter leur châssis afin de générer sur les pneus les charges qui leur permettront de fonctionner dans leur fenêtre de température optimale. La flexibilité du châssis, la géométrie et ainsi de suite sont réglées pour s'adapter aux pneus, et non l'inverse. Aussi, le rôle des pneus ne se limite pas à adhérer à la piste via le grip chimique généré par la friction avec le revêtement du circuit. Ils constituent une partie essentielle de la suspension d'une machine de course et offrent plus d'amortissement en milieu de virage que l'ensemble fourche/amortisseur/châssis grâce à un effet de ressort inférieur à celui du cadre et du bras oscillant. En virage, les pneus MotoGP Michelin s'enfoncent d'environ 10 mm : c'est ce que l'on appelle l'effet de squash. Si les pneus font partie intégrante de la suspension d'une machine de GP, leur niveau d'amortissement peut entrer dans l'équation qui va définir la flexibilité globale du châssis. Les dernières fourches Öhlins dotées de fourreaux en fibres de carbone offrent une immense rigidité longitudinale pour optimiser la stabilité au freinage et une certaine flexibilité latérale pour offrir plus d'adhérence en limitant le dribble (ou chattering). Les roues peuvent aussi causer du/réduire le dribble : selon leur type, les bâtons fléchissent et répartissent les charges différemment.

LE CENTRE DE GRAVITÉ Quiconque a suivi le passage de Valentino Rossi de Honda à Yamaha en 2004 connaît l'importance du centre de gravité. La M1 ne fonctionnait pas bien jusqu'à ce que le chef d'équipe de l'Italien, Jeremy Burgess, en transforme le comportement en rehaussant le châssis de quelques millimètres. "Le centre de gravité affecte la façon dont la moto change d'assiette et transfère la charge, de sorte que la moto crée ou perd de

l'adhérence, explique Baumgärtel. On déplace le poids vers l'avant ou vers l'arrière, selon que l'on surcharge le pneu avant ou arrière ou que l'on ne le charge pas suffisamment. Il faut néanmoins garder à l'esprit que le fait de modifier la géométrie implique toujours plusieurs facteurs. Ainsi, quand on modifie le déport de la fourche pour influer sur le caractère directionnel du train avant, on change insidieusement la répartition des masses avant/arrière."

Depuis 2004 et l'arrivée du tandem Rossi / Burgess chez Yamaha, la M1 est devenue une référence en termes de châssis.

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TECHNIQUE

MOTOGP

QUAND ON VIRE AVEC NEUF BARRES DE PRESSION DE FREINAGE ET LA ROUE ARRIÈRE DANS LES AIRS, ON A BESOIN D'UN PEU PLUS DE CHASSE !

DÉPORT OU OFFSET

CENTRE DE GRAVITÉ ASSIETTE

EMPATTEMENT CHASSE

LA GÉOMÉTRIE DU CHÂSSIS Les valeurs les plus importantes dans la géométrie d'une moto de course sont la chasse et l'empattement. "Lors de la conception du châssis, on a déjà une idée de la fenêtre dans laquelle on souhaite travailler. On la réduit ensuite dans la phase de développement, explique Baumgärtel. Ainsi, les pilotes ajustent leur valeur de chasse au début de chaque saison, tout en adaptant leur configuration aux pneus de dernière génération. Pour modifier la chasse, il faut ajuster la valeur de déport de la fourche [ou offset]. On peut aussi éventuellement ouvrir l'angle de chasse pour rendre la moto plus stable lorsque l'avant plonge au freinage, ou réduire l'empattement pour optimiser le grip en virage." Toutes les Moto2 – Kalex, KTM, Suter, Speed Up et Tech 3 – possèdent une géométrie très similaire car elles utilisent les mêmes pneus, le même moteur et ainsi de suite. Une Kalex Moto2 affiche une chasse d'un peu plus de 100 mm (+/- 3 mm selon les pilotes), et un empattement d'environ

1300 mm (+/-10 mm). Les machines du MotoGP utilisent des valeurs légèrement supérieures. Les machines de route n'en sont pas très éloignées, puisqu'une Yamaha R6 et une Kawasaki ZX-10R affichent respectivement 97 mm et 106 mm de chasse, et 1370 mm et 1440 mm d'empattement. "Les MotoGP ont besoin d'une chasse et d'un empattement plus importants en raison de leurs vitesses et de leurs performances de freinage plus élevées, poursuit Baumgärtel. Quand on vire avec neuf barres de pression de freinage et la roue arrière dans les airs, on a besoin d'un peu plus de chasse ! Aussi, leur vitesse de passage en virage est légèrement inférieure à celle d'une Moto2 car elles pèsent plus lourd et utilisent des pneus légèrement plus larges. L'empattement joue sur l'adhérence et le ressenti des pneus – une moto plus courte offre théoriquement plus d'adhérence, mais lorsqu'elle perdra cette adhérence, elle le fera de façon plus agressive. Une moto plus longue glissera plus mais sera plus facile à contrôler."

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MOTOGP

TECHNIQUE

CERTAINS PILOTES REMETTENT LES GAZ AVANT MÊME DE RELÂCHER LE FREIN AVANT : CE SONT LES ROIS !

LES DYNAMIQUES EN ENTRÉE DE VIRAGE Un concepteur de châssis a pour mission de fournir à son pilote une moto dotée d'une excellente stabilité au freinage, d'une capacité à virer rapidement et procurant le meilleur ressenti possible du pneu avant. "Une grande rigidité longitudinale dans le châssis améliore la sensation du pilote sur les phases de freinage intenses et pendant la transition vers le virage", explique Baumgärtel. Mais, bien sûr, une trop grande rigidité longitudinale impacte le niveau de flexibilité latérale : les ingénieurs ne peuvent pas rigidifier la jonction entre la colonne de direction et les longerons du cadre autant qu'il le faudrait pour obtenir une stabilité optimale au freinage. Il faut donc trouver le bon compromis. Et celui-ci est assez important : au freinage, la moto se courbe sur le plan longitudinal. Cette seule torsion du châssis peut, sur un gros freinage, réduire l'empattement de 10 mm – sans tenir compte de la plongée induite par l'enfoncement de la fourche, qui joue bien évidemment un rôle très important sur cette valeur ! Une fois que l'ingénieur a validé le degré de flexibilité, la géométrie et le centre de gravité de son châssis, il travaille sur les réglages des suspensions. Comme toujours, tout dépend des préférences du pilote. "Certains préfèrent ressentir un train avant hyper-rigide lorsqu'ils attrapent les freins, d'autres veulent plus de progressivité. Mais tous ont besoin d'une bonne quantité de plongée pour réduire la chasse et ainsi faciliter la phase de virage, ajoute Baumgärtel. Certains pilotes veulent sentir la fourche talonner, d'autres détestent ça.

Les équipes effectuent un gros travail sur la suspension au début de chaque saison pour l'adapter aux nouvelles spécifications pneumatiques : les ressorts de fourche, notamment, doivent être plus ou moins tarés selon la charge que le pneu avant peut encaisser." La conception du bras oscillant est également importante en entrée de virage. "Le pilote peut ressentir une grosse différence dans le comportement du train arrière pendant cette phase selon le niveau de rigidité latérale et en torsion du bras oscillant. Avec un bras oscillant super rigide, l'arrière devient très vif parce qu'il n'offre aucun amortissement des forces latérales." En plus du châssis et du bras oscillant, Kalex propose également des tés de fourche de différente rigidité. "Nous proposons généralement deux ou trois versions. Nous pouvons créer des tés extrêmement rigides sur le plan longitudinal et qui ne fléchissent que sur l'angle maxi, mais la plupart du temps, ce niveau de rigidité dépend de ce que le pneu avant peut encaisser en force pure."

Quand Marc Marquez choppe les freins, sa RCV se tord de douleur... Mais d'une douleur utile !

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A l'accélération, l'effet d'anti-squat tend l'amortisseur arrière et aide la moto à garder une assiette acceptable... même si le moteur bouscule le châssis !

LES DYNAMIQUES EN SORTIE DE VIRAGE Un concepteur de châssis doit créer un châssis efficace dans les quatre phases par lesquelles passe le train arrière : la phase d'entrée en virage (où il doit autant que possible rester en contact avec le sol), la phase neutre à mi-virage, la phase de remise des gaz et la phase d'accélération à plein gaz. "La phase de mi-virage, lorsque le pilote est sur le point de relâcher le frein avant et n'a pas encore touché l'accélérateur, est cruciale. Cela ne représente que quelques mètres de piste sur un tour complet, mais c'est le moment où la majeure partie du virage est terminée. La moto roule avec beaucoup d'élan et d'angle, et si cette phase est précise et bien contrôlée, le pilote peut préparer une bonne sortie de virage. L'objectif est toujours de réduire la phase neutre, ce temps entre le relâchement du frein avant et la remise des gaz. Bien sûr, certains pilotes remettent les gaz avant même de relâcher le frein avant : ce sont les rois ! Même Öhlins admet que sa suspension a peu d'effet dans la phase de mi-virage, car l'amortisseur arrière est à 60 degrés de la verticale et s'avère donc quasiment inutile. La flexion du bras oscillant et l'enfoncement du pneu effectuent l'essentiel du travail à ce stade. Ensuite, si tout va bien, le pilote remet un filet de gaz constant sur quelques mètres pour réactiver la motricité du pneu arrière, ce qui l'amène à la phase suivante : redresser la moto et accélérer à fond ! Nous devons faire des compromis dans la rigidité du châssis pour rendre cette phase aussi douce, contrôlable et facile à gérer que possible. Mais obtenir une motricité optimale au fur et à mesure que la moto se redresse et cherche à glisser vers l'extérieur du virage alors que la puissance change en fonction du rapport enclenché n'est pas facile, car les charges appliquées ne sont pas stables." La conception du bras oscillant s'avère extrêmement importante pour remonter au pilote les meilleures sensations possibles de la roue arrière. C'est la même chose qu'en entrée de virage : pas assez de flexibilité et la moto sera trop vive lorsque le pneu

patinera ; trop de flexibilité et la moto va osciller et perdre son adhérence. La motricité sous des charges élevées peut être optimisée en ajustant les positions relatives du pivot du bras oscillant, du pignon de boîte de vitesses et du centre de gravité : le but est ici d'obtenir ce que l'on appelle un effet d'anti-squat. Si le concepteur ne s'est pas trompé en définissant ses valeurs d'anti-squat, l'amortisseur arrière se tend lors des accélérations brusques, améliorant à la fois le grip arrière et avant (car l'arrière ne s'affaisse pas trop) et permettant ainsi à la moto de terminer son virage dans les meilleures conditions d'adhérence.

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MOTOGP

TECHNIQUE

L'ERGONOMIE DU CHÂSSIS La Suzuki est réputée pour être une moto compacte. Presque trop ?

Pour rouler vite, le pilote doit être à l'aise. L'ergonomie est donc une autre considération importante pour les ingénieurs. "On veut toujours une moto aussi petite et étroite que possible, explique Baumgärtel. Mais le pilote doit être à l'aise et détendu pour enchaîner des chronos réguliers. Comme pour tout le reste, il faut faire des compromis. On doit accepter qu'une position de pilotage donnée fasse perdre 2 ou 3 km/h en vitesse de pointe si elle permet au pilote de gagner 0,25 seconde par tour." Les pilotes ont chacun leurs préférences en matière d'ergonomie. Certains veulent des supports de repose-pieds hyper-rigides, d'autres les préfèrent plus flexibles, ceci afin d'amortir les forces parasites générées par leurs mouvements. La hauteur de selle est importante, de même que le matériau de l'assise. Certains aiment un revêtement adhérent, d'autres préfèrent pouvoir glisser. Ensuite entrent en jeu les angles des demi-guidons, la forme du réservoir d'essence, et ainsi de suite.

LES SENSATIONS DU PILOTE Baumgärtel a d'abord travaillé dans le monde de la course automobile, mais il préfère les motos en grande partie parce que le feeling du pilote varie énormément de l'un à l'autre. "La course automobile est complètement à l'opposé – le feeling est plus ou moins une donnée, estime-t-il. J'apprécie davantage les motos parce que ce feeling que le pilote dénomme le 'trou noir' est super intéressant. Tu lis dans les yeux du pilote si la moto fonctionne ou pas ; le regard qu'il t'adresse est plus important que les informations obtenues via l'enregistreur de données. Et nous devons nous souvenir que lorsqu'un pilote de voiture a des ennuis, il va dans le gravier et ses mécaniciens nettoient sa voiture. Mais quand un pilote de moto a des ennuis, il ressent de la douleur." ■

QUI EST KALEX ? Les fondateurs de Kalex, Alex Baumgärtel et Klaus Hirsekorn, étaient ingénieurs en course automobile quand ils ont réalisé qu'ils préféraient les motos. Le duo allemand a construit son premier châssis en 2004 (la AV1, mue par un V-twin Aprilia 1000cc, en photo) et a connu le succès en 2010 en créant un châssis pour le nouveau championnat du monde Moto2. Vainqueurs du titre l'année suivante, ils dominent la catégorie depuis, aujourd'hui sous la menace directe du grand constructeur KTM.

Pour en savoir plus sur Kalex, nous vous invitons à lire notre sujet paru dans le SB92.

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GRAND PRIX DE FRANCE

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LE MANS 18◆19◆20 MAI


PORTFOLIO

ANDREW WHEELER

TEXTES & PHOTOS ANDREW WHEELER

ERIC BOSTROM

CALIFORNIA SPEEDWAY

AMA SUPERBIKE 2006

"Ma toute première photo publiée, dont le style allait m'aider à me faire remarquer."

ANDREW WHEELER L'ŒIL AMÉRICAIN TOUT BON PHOTOGRAPHE, PAR DÉFINITION, SE SOIT D'ÊTRE ATTENTIF AU MONDE QUI L'ENTOURE, OBSERVATEUR. ANDREW WHEELER N'ÉCHAPPE PAS À LA RÈGLE. MIEUX : CE CALIFORNIEN, QUI A COMMENCÉ PAR PHOTOGRAPHIER LES CHEVAUX DE CHAIR AVANT DE SE FOCALISER SUR CEUX DE FER, N'A PAS SEULEMENT L'ŒIL AMÉRICAIN : IL L'INCARNE. ET IL PARTAGE AVEC NOUS QUELQUES-UNES DES PLUS BELLES IMAGES QUI L'ONT TRAVERSÉ.

MARCO SIMONCELLI CATALUNYA

MOTOGP 2011

"J'adore simplement la façon dont Marco file au milieu de l'habillage coloré du circuit."

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BEN SPIES

MILLER MOTORSPORTS PARK

WSBK 2009

"Ben Spies attaque pendant la Superpole. Un orage tourne autour de nous et, par chance, je capture l'éclair en arrière-plan."

MARC MARQUEZ COTA

MOTOGP 2013

"Le genre de photo que nous ne pouvons plus faire aujourd'hui. Certains accès (dont celui au parc fermé après course) ont été retirés aux photographes depuis que la télévision est devenue le moteur qui fait tourner les Grands Prix."

BRADLEY SMITH

RED BULL RING MOTOGP 2017

"Le dernier virage est peint aux couleurs du drapeau autrichien, et la piste disparaît pour donner l'illusion que les pilotes sont perdus."

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PORTFOLIO

ANDREW WHEELER

JACK MILLER CATALUNYA

MOTOGP 2015

"Une "image signature" que nous ne ferons plus. Suite à l'accident fatal de Luis Salom sur ce circuit en 2016, les pilotes n'empruntent plus ce long virage à gauche et utilisent à la place la portion dessinée pour la F1."

VALENTINO ROSSI MISANO

MOTOGP 2016

"La légende. Comme on le voit dans le reflet de ses lunettes de soleil, les fans s'étirent à perte de vue et le soutien du public pour ce pilote est démentiel – d'autant plus qu'il habite à Tavullia, à quelques kilomètres du circuit."

MARC MARQUEZ INDIANAPOLIS

MOTOGP 2014

"Le moment du champagne. Nous essayons toujours de donner une nouvelle dimension à cette finale sur le podium, et j'aime simplement l'obscurité du portrait et la façon dont le Cava est figé."

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POL ESPARGARO

CATALUNYA

MOTOGP 2017

"J'aime les couleurs mates de cette moto, j'adore l'orange et j'ajouterais que l'équipe Red Bull KTM est très amicale avec les photographes. Avec elle, nous sommes en mesure de développer une imagerie qui satisfait nos exigences artistiques."

KAZUTOSHI MIZUTANI LAC DE BONNEVILLE

2014

"Suite au décès de ma femme, victime d'un cancer, j'ai pris quelques semaines de congés loin du MotoGP et j'ai découvert d'autres pratiques du deux roues plus près de chez moi. Kazutoshi San tient une boutique Harley Davidson au Japon, et il réalise sur cette image le record de vitesse avec un twin de Milwaukee. Magique !"

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PORTFOLIO

ANDREW WHEELER

DANI PEDROSA MUGELLO

MOTOGP 2013

"Dani observe la foule des fans de Valentino Rossi dans les gradins (hors cadre) qui tendent à chahuter les pilotes qui ne s'appellent pas Valentino Rossi."

MARCO SIMONCELLI VALENCE

GP250 2008

"Les cheveux, le champagne et l'éclairage en contre-jour : tout est réuni pour une belle image de Marco Simoncelli célébrant son titre de champion du monde 250cc !"

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MAVERICK VINALES

COTA

MOTOGP 2017

"Je me sens parfois un peu intrusif et maladroit quand je capture une image sur laquelle la personne me regarde fixement. C'est ici le cas…"

JOSH HAYES DAYTONA

TESTS 2008

"Bien qu'elle soit totalement floue, on entend sur cette image la Yamaha YZF-R1 Superbike de Josh Hayes hurler dans le banking du Daytona International Speedway."

BRADLEY SMITH

INDIANAPOLIS

MOTOGP 2015

"L'endroit où j'ai pris cette image demande un peu de courage. Les motos passent très vite et très près du mur, le souffle d'air qu'elles créent est angoissant. La récompense est cette vue unique sur la fameuse ligne de départ/arrivée de l'Indianapolis Speedway, avec ses immenses tribunes en arrière-plan."

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PORTFOLIO

ANDREW WHEELER

BEN SPIES

COTA

MOTOGP 2013

"Un Texan au Texas ! Ben Spies et sa Ducati Pramac fendent la piste sous la fameuse tour d'observation qui surplombe le circuit et la campagne d'Austin."

MARCO SIMONCELLI SEPANG

MOTOGP 2011

"J'ai pris cette photo en quittant la grille de départ. À cet instant, je ne pouvais imaginer que, moins de 10 minutes plus tard, sa vie se terminerait dans un tragique accident."

NICKY HAYDEN ARAGON

MOTOGP 2014

"Le regretté Nicky devant le fameux mur qui signe le Motorland Aragon."

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MARC MARQUEZ

INDIANAPOLIS

MOTOGP 2014

"Kevin Clark, le flagman de l'AMA Dirt Track, affronte le toréador Marc Marquez. Deux grands réunis dans un scénario parfait."


STEFAN BRADL SEPANG

TESTS MOTOGP 2014

"Le virage n°3 du circuit international de Sepang est réputé pour nous offrir les plus belles glisses de la saison. Ici, Stefan Bradl attaque vraiment très fort et on ne voit même plus la roue arrière de sa Honda !"

VALENTINO ROSSI CATALUNYA

MOTOGP 2011

"Avant d'enfourcher sa machine, Valentino suit un inévitable rituel. C'est à chaque fois un défi pour les photographes de trouver un nouvel "angle" pour capturer cet instant. Ici, le renfort chromé reflète la Ducati n°46… et j'avoue que ça me plaît !"

NORIYUKI HAGA

MILLER MOTORSPORTS PARK WSBK 2008

"Le pilote d'usine Yamaha vire sous les montagnes enneigées qui entourent la piste de course située à 1300 mètres d'altitude, à Tooele, dans l'Utah. Un décor atypique."

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PORTFOLIO

ANDREW WHEELER

ROSSI VS STONER

LAGUNA SECA

MOTOGP 2008

"Pour moi, "The Pass" ne vieillira jamais. J'allais quitter le Corkscrew, mais j'ai décidé de rester "un tour de plus" et je ne le regrette pas ! J'ai capturé l'ensemble de la séquence du dépassement osé de Valentino sur Casey : un instant mythique !"

“LA PEUR EST L'ENNEMIE DE LA CRÉATIVITÉ”

B

onjour, je m'appelle Andrew Wheeler et je prends des photos. En fait, je prends beaucoup de photos, principalement de motos, et plus particulièrement de motos de course très rapides en MotoGP. Peu de gens savent que j'ai commencé par la photo équine. D'abord, en 2001, en photographiant le cheval que nous possédions, ma femme Emily et moi. Puis d'autres. Au fil du temps, je suis devenu connu pour mes images "arty" dans ce milieu. Tout est parti de là. À Noël 2005, Emily m'a insufflé l'idée de shooter des motos. À cette époque, les teams du championnat AMA Superbike testaient à Laguna Seca. Et comme j'habitais juste à côté, sur la route de Capitola, je suis descendu voir ce que je pouvais faire avec mon "œil" et mon fidèle boîtier. Bref, j'ai envoyé des échantillons à celui qui allait devenir mon ami, Matthew Miles (un journaliste spécialisé américain, ndlr), pour avoir son avis. Il a aimé ce qu'il a vu et m'a suggéré de me rendre au test suivant, à Sears Point. Bilan : j'ai depuis travaillé dans la plupart des grands championnats de motos. Pour Yamaha et le désormais défunt magazine RoadRacerX, j'ai suivi la saison 2009 du World Superbike – et principalement Ben Spies, qui allait finalement remporter le titre. Par coïncidence, fin 2009, Ben annonçait son passage en MotoGP chez Yamaha Tech 3, et avec la disparition du magazine RoadRacerX, j'ai "annoncé" mon intention de suivre le MotoGP (sic). Depuis 2010, j'y suis toujours. Ma philosophie, dans le travail, a toujours été de permettre aux spectateurs de mes images de se sentir "inclus" ; d'être leurs yeux, de leur offrir un instant où ils peuvent entrer dans mon image et voir, pas seulement le sujet principal, mais d'autres choses, comme le ciel, la météo, la

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couleur et l'apparat qui, je l'ai toujours ressenti ainsi, vont de pair avec ce sport, un peu comme une joute médiévale ou une course de chevaux autour de Sienne en Italie. Couleur, danger et excitation : telles sont les huiles virtuelles avec lesquelles je peins. Puis les réseaux sociaux sont apparus. Ils m'ont permis de partager ma vision, d'aider peut-être d'autres à comprendre certains détails et, espérons-le, à développer leur propre style – quelque chose que vous ne pouvez pas enseigner. J'ai organisé des séminaires dans différents pays pendant les semaines précédant les week-ends de GP et j'ai offert des conseils à d'autres photographes de sport mécanique en plein essor. Rien de tout cela n'est de la science infuse. Prenez toujours les images que vous voulez voir, pas ce que vous pensez que les autres veulent voir. J'aime cuisiner, j'aime voyager et j'aime rencontrer les gens que j'ai connus à travers les réseaux sociaux. J'aime les voir heureux s'ils appliquent l'un de mes conseils avec succès. Cet email de remerciement signifie tant pour moi. Je vis à Santa Cruz, en Californie, avec Misa, mon chat Widget et mon Indian Scout. ■

POUR EN SAVOIR PLUS SUR ANDREW http://archive.automotophoto.com facebook.com/andrew.automotophoto @automotophoto N'hésitez pas non plus à le contacter (en anglais) par email à : info@automotophoto.com !



WsbK

Découverte

par MaxiMe Pontreau /// phoTos PSP SwiDerek/JagielSki

LES PIEDS SUR TERRE TravaillanT avec les plus grands piloTes, sur les machines les plus abouTies, les Techniciens œuvranT dans le sporT moTo inTernaTional sonT auTanT enviés qu'ils forcenT l'admiraTion. mais qu'en esT-il réellemenT de leurs siTuaTions, eux que nous reTrouvons impliqués dans plusieurs championnaTs au cours de la même saison ? chef d'enTreprise, salarié ou auTo-enTrepreneur, les sTaTuTs sonT mulTiples pour ces hommes des sTands. découverTe avec quaTre français.

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lorsqu'il ne travaille pas sur la r6 grT de lucas mahias en Wssp, avec entre autres ludovic (ci-dessous), simon s'occupe de la r1 de david perret en fsbK (en bas à gauche).

l

a vie d'un mécanicien moto à un niveau de compétition mondial laisse rêveur. voyageant à travers le monde, intégrés à la vie du paddock, autorisés là où le commun des mortels n'a pas accès et côtoyant les plus grands pilotes de notre génération, ces hommes et femmes passent pour des privilégiés. Du moins aux yeux des passionnés suivant avidement la course. Sauf que loin d'être trompeuses, les apparences sont tout de même légèrement plus idylliques que la réalité. comme tous les statuts singuliers, devenir technicien de compétition demande de nombreux efforts et tout autant de sacrifices. et malgré leur importance dans l'équation, malgré le chaî60

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non indispensable qu'ils représentent dans ce milieu et l'excellence qu'ils sont censés incarner dans leurs domaines respectifs, on en vient à se demander si ce ne serait finalement pas un métier précaire. cette interrogation a fusé dans un coin de notre cerveau, alors que nous observions plusieurs techniciens du Mondial Superbike aux côtés de pilotes sur la grille de départ du championnat de France Superbike. ces pilotes et teams n'ayant aucun lien dans ces deux championnats, qu'en est-il donc réellement de la situation professionnelle de ces hommes tapis dans l'ombre ? aussi étonnante qu'elle puisse être, la réponse est finalement assez simple. Que

ce soit en grand Prix, en Superbike mondial, en endurance ou en championnat de France, rares sont ceux à posséder un statut de salarié auprès des teams. la plupart sont en fait à la tête de leur propre micro-entreprise, à l'image de Simon Devese et thomas gallou. ces deux Français officiaient en 2017 à la fois en Supersport mondial et en FSBk. Simon, 32 ans et déjà onze saisons à son actif, était le mécanicien de lucas Mahias en wSSP et celui de David Perret en France. Quant à thomas, 24 ans, il assistait le team Puccetti (et donc kenan Sofuoglu) en Mondial et le Junior team lMS Suzuki en FSBk en qualité de technicien suspensions. Soit deux emplois auprès de deux structures auxquelles ils facturent leurs services avec le statut d'auto-entrepreneur.

règle en vigueur

le milieu de la compétition est ainsi fait. les teams, généralement toujours en recherche de financement, ne peuvent se


DéCOUvERTE

WSbK

Thomas a préparé les suspensions de Kenan Sofuoglu en WSSP ces deux dernières saisons. Il officiera en Moto3 et Moto2 en 2018.

permettre une masse salariale trop importante. Ils ont donc recours à des indépendants. Une situation qui peut s'avérer délicate pour les principaux intéressés, qui ont tout de même besoin, dans un premier temps, de trouver un contrat. "Il est clair qu'il est difficile de négocier lorsque tu débutes, se souvient Thomas. Tu sors de ton école et tu es presque plus demandeur que le team. Lorsqu'à 23 ans, on m'a proposé de travailler pour Kenan Sofuoglu, c'est bête mais j'étais prêt à quasiment tout accepter. Tu essayes alors de négocier un minimum. Puis, à partir de la deuxième an-

née, tu revois un peu les choses." Et Simon de renchérir : "C'est vrai que tu n'oses pas quand tu es jeune. Ce n'est pas quelque chose enseigné à l'école. Surtout que tu dois généralement discuter, négocier, en langues étrangères, en anglais ou en italien. Cela devient plus simple avec le temps et l'expérience. Tu apprends à te vendre mais aussi à te défendre, notamment contre les impayés qui sont plus fréquents qu'on ne pourrait le croire. Cela m'est déjà arrivé et tu ne peux pratiquement rien faire. Les procédures sont compliquées et coûteuses, les structures sont généralement étrangères et lorsque le team a mis la clé sous la porte, propriétaires et sponsors se renvoient la balle." Là est la réelle précarité du rêve qu'est la compétition. Risques d'impayés, teams s'écroulant en cours de saison, nécessité de renouveler ou de retrouver un contrat chaque année, absence de chômage en cas de cessation d'activité, ces techniciens sont finalement dans des positions tout aussi, voire plus instables que les pilotes. Si les contrats durent invariablement une année, les autres risques ne se rencontrent cependant pas dans toutes les structures. Reste la solution implacable pour éviter ce genre de désagrément qui est d'intégrer la structure officielle d'un constructeur comme c'était le cas pour Simon au

GRT Yamaha Official WorldSSP Team et pour Thomas chez le Puccetti Racing Team (Kawasaki). "Finalement, une fois que tu as fait tes preuves, retrouver du boulot n'est pas si difficile, relativise Thomas. C'est un petit milieu. Les gens se connaissent et parlent entre eux. Tu peux aller frapper aux portes, mais aussi te faire démarcher. C'est notamment pour ça que j'ai refusé un CDI, afin d'être freelance. Le salaire serait sensiblement le même, mais tu n'as pas de préavis à respecter, ce qui serait gênant lors d'un changement de team. Ton contrat se termine à la dernière course et vu que le mercato se déroule entre septembre et fin novembre, tu peux enchaîner rapidement sur les tests hivernaux. Si je considère en

Passer un maximum de temps sur les circuits est le meilleur moyen d'engranger de l'expérience pour faire face à tous les aléas.

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WsbK

Découverte endurance ou supersport, travailler avec des pilotes et techniciens de différentes nationalités permet de constamment progresser.

plus le confort de travail et la liberté que cela me donne, il n'y avait aucun avantage pour moi à être salarié." un avis que ne partage pas totalement ludovic reignier.

vision d'ensemble

après plusieurs années passées en tant qu'indépendant, l'ingénieur télémétriste de lucas Mahias en Supersport mondial ne regrette pas d'être désormais en cDi. néanmoins, à la différence des autres, lui n'est pas engagé par un team mais directement

par Yamaha Motor europe. l'homme de 39 ans est en charge du support client pour r1 et r6. Son rôle est ainsi d'aider et de guider les teams du constructeur dans le paramétrage des réglages électroniques, tout en développant la technologie globale. une position qui, outre le Supersport mondial, l'amène à travailler en championnat du monde d'endurance ewc, et plus particulièrement au sein du Yart. ainsi, si Simon et thomas voient dans l'opportunité de travailler dans deux championnats distincts

une manne financière pour se tirer un salaire correct, ludovic y voit pour sa part une possibilité de développement. un point de vue partagé par étienne alcaina, impliqué en championnat européen Superstock 1000 et en FSBk avec Jérémy guarnoni. "nous avons décidé de monter un programme autour de Jérémy en FSBk, en participant à quelques courses, pour qu'il s'entraîne mais aussi afin de développer notre système pour la moto, explique le co-créateur de la société tech Solutions. c'est via différents clients que nous sommes engagés dans deux championnats. nous sommes notamment prestataires de services pour kawasaki europe. nous étions mandatés pour développer l'électronique de la Zx10rr. autrement, nous concevons également tous les éléments nécessaires pour construire une moto de course. le team Perdercini en Stk 1000 utilisait par exemple notre partie-cycle en 2017. Je m'occupais donc de l'acquisition de données et de la mise au point châssis pour Jérémy. ayant un règlement identique au Stk, le FSBk est un laboratoire parfait, bien que nous n'utilisons pas les mêmes pneumatiques et

ludovic suit lucas mahias depuis 2014. il était logiquement aux premières loges pour assister à son sacre au qatar.

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Découverte

WsbK

selon étienne, le fsbK est un laboratoire parfait pour développer la Kawasaki...

suspensions." cela ne fait cependant aucun doute pour le chef d'entreprise de 30 ans : accumuler les kilomètres est la meilleure solution et se transforme rapidement en un cercle vertueux entre le pilote, la machine et l'équipe. et là ne sont pas les seuls avantages à travailler dans deux championnats, selon ces techniciens.

performances

"c'est une très bonne chose d'être avec plusieurs pilotes et différentes nationalités dans le box, précise ludovic. cela t'ouvre l'esprit à certaines choses, à des techniques ou à des méthodologies différentes. tu peux ensuite les retranscrire d'une catégorie à une autre. il n'y a rien de mieux que de travailler avec des Japonais par exemple. avant que l'on obtienne la moindre pièce, il y a essai, contre-essai puis validation. c'est le best pour moi. De mon côté, je peux apporter mes petites astuces apprises dans tel ou tel championnat, comme pour les changements de roues en procédure Flag to Flag en Supersport. a l'inverse, mon expérience en Supersport peut me permettre d'aider à optimiser nos séances d'essais en endurance. Sinon, chaque machine a ses particularités, c'est donc sympa de bosser dessus." "Finalement, une moto reste une moto, ajoute Simon. la manutention est différente, surtout en fin de saison où tu changes de moteur tous les jours. il y a plus de choses à contrôler sur une moto du Mondial que sur une Superbike du FSBk, mais le travail et la concentration sont identiques. au final, c'est bénéfique car tu acquiers certains réflexes en Mondial, vu les nombreuses situations auxquelles tu te confrontes, que tu utilises en France."

et thomas de conclure : "Si j'aime le professionnalisme et le multiculturalisme du Mondial, en FSBk, tu es plus polyvalent et touche à tout, et cela te permet d'avoir un regard plus global. en Mondial, chacun a son rôle." S'investir dans deux championnats est également l'occasion d'étoffer son carnet d'adresses, d'accroître sa crédibilité et de faire connaître son entreprise en plein essor. clauses de contrats obligent, tous accordent leur priorité au Mondial de vitesse. le plus difficile reste toutefois la gestion des déplacements et les absences répétées. Mais les voyages, la passion du travail et l'adrénaline de la course en sont les meilleurs remèdes. ■

… avant de mettre à profit les évolutions en sTK 1000.

le paddock est un microcosme où tout le monde se connaît.

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texte et photos STePHeN DAviSON

POrTrAiT

road race

Mécanicien poids lourds la semaine, Guy Martin, comme beaucoup de gens, tond la pelouse le week-end. ici, lors de la scarborough Gold cup 2004.

GUY MARTIN

UN GUY À PART *

Les passionnés de course sur route connaissent Guy Martin. Les Grands passionnés de course sur route connaissent stephen davison. L'incontournabLe photoGraphe de La reaL road race est aussi un écrivain taLentueux et Le confident des pLus Grands. son Livre sur ce Guy* pas coMMe Les autres nous a donnés des frissons. iL nous en Livre, rien que pour vous, un Morceau choisi. *A guy, en anglais, signifie un gars, un mec.

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2003 : première course de Guy en Irlande, première victoire... malgré un dernier virage chaotique !

G

uy Martin fait irruption pour la première fois au travers de mon objectif lors d'une journée ensoleillée du printemps 2003. Il concourt dans la Cookstown 100, catégorie débutants. C'est la première course du pilote de 21 ans en Irlande. Guy mène avec un kilomètre d'avance. Un avantage inattaquable dont, peut-être, un pilote plus expérimenté profiterait pour relâcher la pression. Pas lui. Presque inévitablement, Guy déboule dans le virage où je suis posté beaucoup, beaucoup trop vite. Utilisant chaque centimètre de bitume à sa disposition, le jeune as use de tout son talent pour garder sa Suzuki du bon côté du trottoir. Je garde le doigt sur le déclencheur tandis qu'un enchevêtrement inélégant de bras et de jambes rebondit en tous sens, avant de se réunir pour passer sous le drapeau à damiers en wheeling. Guy est arrivé en Irlande et en course sur route peu après avoir été banni du championnat britannique (BSB) pour avoir claqué un ordinateur portable sur les doigts d'un officiel. Les mois suivants, ce spectacle va devenir familier : Guy donne tout. "Go Big or Go Home" ("Envoie du gros ou rentre à la maison", "Bats-toi !") devient la devise de l'Anglais alors qu'il attaque à la limite – et souvent audelà – dans sa quête de victoires. Fin 2003, Guy est sacré champion d'Irlande. Il a déjà accroché à son palmarès la première de ses huit Scarborough Golden Cups. Pourtant, s'il est déjà populaire auprès des amateurs de road race, ça n'est pas tellement pour son talent, mais plutôt pour sa vision singulière sur le monde qui l'entoure. Jamais Guy Martin n'hésite à donner son opinion. Il rend son verdict sur tout et n'importe quoi dans un bagout coloré et haletant. Avec ses dictons curieux made in Lincolnshire et sa vision décalée de la vie, Guy se démarque même de certains des plus grands personnages que les courses sur route irlandaises aient jamais connus. Même parmi des noms comme Ryan Farquhar, Martin Finnegan, Adrian Archibald, Darran Lindsay et Richard Britton, l'enfant impétueux place sa moto là où sa bouche se trouve. Un jeune homme très pressé, déjà à l'avant du peloton. En signant le meilleur chrono de tous les temps d'un newcomer 66

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"Go Big or Go Home" va devenir sa devise, même sur le terrifiant tracé de Macao, ici en 2006.

au TT de l'île de Man 2004, Guy devient un authentique hot road racer. Ce monde intransigeant et dangereux, où la moindre erreur peut conduire à la catastrophe, contraste avec l'attitude osée de Guy. Cela lui offre très rapidement l'opportunité de transformer sa capacité à piloter une moto en une carrière lucrative.

DE L'ATELIER AUX CIRCUITS

Après avoir terminé son apprentissage de mécanicien poids lourds en 2000, Guy travaille chez son père, au Ian's Garage, quand il ne participe pas à des courses de vélo. Enfant, il a passé des heures assis sur l'établi du paternel, à l'observer réparer des moteurs. À l'âge adolescent, Guy a déjà démonté et reconstruit lui-même des dizaines de blocs, nourrissant une fascination pour tout ce qui a trait à la mécanique. Cela va bien entendu énormément profiter au jeune pilote dans la préparation de ses machines de course.


POrTrAiT

road race

il le prouve encore en virant en tête de la nW200 2008 : Martin est un authentique "hot road racer" !

Le natif du Lincolnshire n'hésite pas à plonger dans une eau glacée pour soigner ses contusions après une chute. Même la légende rossi a succombé au charisme et au franc-parlé de l'anglais.

Martin en plein saut sur l'angle lors de la première édition de la armoy race, en 2009. Le public apprécie...

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Ulster GP 2012 : sur son emblématique GSX-R Tyco, Guy fonce vers la victoire dans la course la plus rapide du monde.

Après son apparition dans le film TT, Closer to the Edge, il devient outre-manche une authentique célébrité.

Ces talents sonnent comme une évidence pour quiconque rencontre Guy dans ces premières années sur les circuits routiers. Mais il est tout aussi évident que le jeune originaire du Lincolnshire qui parle si vite a une vision bien à lui du monde. Les intérêts de Guy sont innombrables et intenses. Il parle, dans un flow déconcertant et dans les moindres détails, à quiconque l'écoute, de tout, de la vision politique de la ferme des animaux de George Orwell aux mérites de boire du thé, l'une de ses grandes passions. Les équipes d'usine commencent à s'intéresser au jeune Anglais après ses débuts impressionnants au TT. À partir de 2006, l'Irlande n'est plus l'unique terrain de jeu de Guy. Je vais continuer à le suivre avec mon appareil photo, le photographiant au TT, à Scarborough, à la Southern 100 et à Macao. Après un énorme crash survenu lors de l'édition 2008 de la North West 200, je shoote Guy en train de donner un bain thérapeutique à ses contusions dans la baie de Peel, sur l'Ile de Man, juste avant le TT. "That's proper hardcore" ("C'est vraiment hardcore") rigole Guy pendant que je patauge dans la mer glacée, entièrement habillé, pour avoir ma photo. Ces images sont aujourd'hui des souvenirs chéris de ce qui était une époque plus simple et heureuse, une époque évanouie lorsque ses amis Finnegan, Lindsay et Britton ont perdu la vie dans des accidents en course. Les années suivantes, l'étoile Guy va continuer à grandir – même si ses résultats stagnent. Sa carrière prend finalement une nouvelle direction suite à son rôle principal dans le film documentaire tourné en 2010 : TT, Closer to the Edge. Un immense succès en Angleterre. Ce film lui offre l'attention d'un nouveau public. Dans les cinémas, des milliers de personnes sont captivées par les images de Guy, lorsqu'il trompe la mort dans une explosion spectaculaire à 250 km/h à Ballagarey. Sa nouvelle notoriété va l'aider à lancer sa carrière télévisuelle.

DES CIRCUITS À LA TÉLÉ

Grâce à ses traits de caractère indéfinissables qui font de lui – et 68

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je crains que si je ne bossais pas dans les camions, je deviendrais juste un autre pilote [...] et je commencerais à me prendre pour une rock star.

Le VTT, la boue et le thé sont quelques-unes des autres grandes passions de Guy.

malgré lui – un personnage, la popularité de Guy s'envole. Il est happé par des magnats de la télévision, bien conscients que ses perspectives excentriques et sa personnalité plus grande que nature traversent bien le petit écran. Pour les critiques, dithyrambiques, Guy plonge dans le patrimoine technique et industriel de la Grande-Bretagne. Les séries de la BBC aux heures de grande écoute, telles que The boat that Guy built (Le bateau qu'a construit Guy) et How Britain worked (Comment la Grande-Bretagne a fonctionné) sont de véritables succès. Sa curiosité naturelle pour le monde qui l'entoure et son enthousiasme évident pour les découvertes obscures s'avèrent contagieuses. Ses émissions sont captivantes et constituent au mécanicien poids lourds une nouvelle armée de fans. Guy transforme sa passion pour la vitesse et le danger en défis risqués dans sa série télévisée Speed. Son habileté et sa bravoure à pédaler furieusement à 112 km/h derrière un camion sur Pendine Sands (une célèbre plage du Pays de Galle, ndlr) et dévaler une piste de ski en Andorre à plus de 80 km/h dans une tentative de record du monde de vitesse en luge vont contribuer à rendre son nom célèbre. Sa capacité à projeter ses opinions d'homme moyen comme sa

préférence pour les favoris négligés aux coupes de cheveux étincelantes ou pour les shorts de vélo sales aux costumes bien taillés aident ce héros de la classe ouvrière : Guy envoie du gros tout en restant lui-même.

DE LA TÉLÉ À L'ATELIER

En dépit de sa renommée et de ses gains grandissants, Guy pédale encore plusieurs jours par semaine chez Moody's International, à Grimsby. La célébrité du petit écran explique que son travail en tant que mécanicien poids lourds lui permet de garder les pieds sur terre. "Je crains que si je ne bossais pas dans les camions, je deviendrais juste un autre pilote de moto, avec la casquette et les lunettes de soleil, et je commencerais à me prendre pour une rock star", lance-t-il. Dans son best-seller autobiographique, Guy mentionne "son taux de réussite de 100 % au contrôle technique" des camions passés entre ses mains comme l'une des réalisations dont il est le plus fier dans sa carrière. Outre ses huit succès à la Scarborough Golden Cup et ses onze victoires à l'Ulster GP, un exploit échappe encore et toujours à l'Anglais : une victoire au TT. FévrIEr - MArS 2018

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La victoire au tourist trophy échappe encore et toujours à l'anglais. sa dernière participation en 2017 s'est soldée par une chute.

Après 16 années de participation, Guy semble avoir maintenant accepté de ne pas gagner sur la célèbre Mountain Course, même s'il y compte plus de podiums – 17 – que n'importe quel autre pilote de l'histoire. Guy est bien retourné sur l'île avec Honda cette année pour une autre tentative, mais il a rencontré de grosses difficultés avec une Fireblade malheureuse. Sur cette même moto, John McGuinness s'était cassé la jambe aux essais de la North West 200 une quinzaine de jours avant le TT. et Guy de ruiner son come-back en chutant – sans mal heureusement – à 220 km/h dans le premier tour de la course Superbike. Une nouvelle deuxième place au TT Zero sur la machine électrique de Mugen lui offrait une bien piètre consolation face à cette amère déception. Certains ont imputé le manque de succès de Guy au TT à un manque de concentration de sa part, pointant les pressions de ses activités télévisuelles comme une distraction majeure. D'autres ont suggéré que son syndrome d'Asperger, une forme d'autisme dont souffre Guy, a affecté sa concentration. Mais personne ne peut mettre en doute la bravoure et l'engagement de Guy, qui a battu tous ses rivaux du TT dans des batailles féroces sur d'autres circuits routiers intimidants et dangereux comme Billown (Southern 100), Dundrod (Ulster GP) et Oliver's Mount (Scarborough). Pour Guy, les courses sur route ont toujours duré plus que deux semaines en juin et sa plus belle réussite dans cette spécialité est probablement d'avoir initié des milliers de personnes à la real road race, eux qui n'avaient jamais entendu parler du TT, de Tandragee ou Killalane. Guy est plus occupé que jamais depuis qu'il s'est retiré de la compétition. il vit toujours dans le Lincolnshire avec sa compagne Sharon et leur petite fille Dottie. en 2016, il a porté son attention sur des défis tels que le Tour Divide, une course d'endurance à vTT de 4 400 km à travers l'Amérique du Nord. il continue à apparaître régulièrement sur les petits écrans britanniques, soit en train de restaurer un chasseur Spitfire de la deuxième guerre mondiale, soit en train de construire un char de la première ! en 2018, il retournera sur le lac salé de Bonneville pour attaquer le record du monde de vitesse sur une machine à moteur Triumph. C'est une certitude : l'atypique risque-tout n'a pas fini de faire parler de lui. ■ 70

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LE LIVRE comme nous, Guy Martin vous intrigue et vous aimeriez en savoir plus sur ce personnage singulier ? nous ne pouvons que vous encourager à découvrir ce superbe livre rédigé – en anglais, attention ! – et imagé par stephen davison. tapez Guy Martin : road racer dans la barre de recherche du site amazon.fr pour vous procurer cet élément indispensable à toute bibliothèque de passionné(e)s. et si vous souhaitez en savoir un peu plus sur stephen, direction stephendavison.photoshelter.com !


SAVOIR

ANCIEN PILOTE AMATEUR, KINÉSITHÉRAPEUTE DU SPORT ET OSTÉOPATHE, LILIAN GUIGNARD VOUS APPORTE DANS CHAQUE NUMÉRO SES CONNAISSANCES SUR LE PHYSIQUE ET LES PATHOLOGIES DES PILOTES.

LA CHRONIQUE

MÉDICALE DE

LILIAN

LA RUPTURE DU LIGAMENT CROISÉ ANTÉRIEUR L

a rupture du ligament croisé antérieur (LCA) du genou n’est probablement pas le traumatisme le plus connu des pilotes, par rapport à sa fréquence dans d’autres sports comme le ski, le football ou le rugby. Mais il est en recrudescence en MotoGP ces dernières années, notamment depuis la pratique, à l’entraînement, du motocross ou du dirt-track. Une rupture du LCA arrive typiquement lors d’une rotation de la jambe vers l'extérieur, le corps et la moto poursuivant leur course vers l'intérieur. L’exemple est la tentative de rattrapage avec le pied ou la jambe tendue, lors d’une chute en glissade (Aleix Espargaro, sur la piste de flat-track du circuit de Barcelona-Catalunya en 2014 ; ou encore Andrea Dovizioso, lors de sa chute dans le virage 4 de Misano en 2016). L’élément déclencheur peut aussi être un mouvement exagéré d'extension ou de flexion (hyperextension ou hyperflexion) pendant la réception d'un saut, quand l'atterrissage se fait avec le genou tendu et en rotation interne (pied en dedans) en serrant le réservoir…

LES RISQUES

Ces mouvements provoquent une force de glissement vers l'avant du tibia, essentiellement encaissée par le LCA, dont l’élasticité arrive à son point de rupture. Souvent, cette déchirure est associée à un bruit sec audible et une brève douleur. L'instabilité du genou se manifeste à l'intéressé immédiatement après la chute, et le sport pratiqué doit être interrompu. La perte du LCA perturbe la fonction de stabilité du genou, et induit un glissement pathologique et permanent de la tête du tibia vers l'avant. Cela entraîne une sensation de dérobement du genou qui "lâche sans prévenir" et, à plus long terme, une usure précoce de ses structures internes (ménisques, autres ligaments). En effet, la capsule articulaire, les ligaments latéraux et les ménisques vont être sollicités en excès pour freiner le glissement vers l'avant du tibia durant le reste de l’existence. Contrairement aux ligaments externes ou internes du genou, le ligament croisé antérieur ne cicatrise pas sponta-

nément, même par immobilisation (le ligament est dit intra-articulaire, et baigne donc dans la synovie ; essayez donc de cicatriser d’une coupure dans une piscine !). Les possibilités de traitement se divisent en deux options : la thérapie orthopédique conservatoire ou l’intervention chirurgicale. Le choix du traitement est décidé avec le patient en fonction de ses objectifs. On admet en général que les pilotes n'ont pas tous besoin d'une opération de reconstruction du LCA, mais certaines études montrent que les patients jeunes et sportifs tirent un réel bénéfice dans leur pratique sportive de la reconstruction chirurgicale du ligament.

LES TRAITEMENTS

La base de la thérapie conservatoire est une rééducation spécifique, destinée à aider à la stabilisation du genou. Le but est de compenser l'instabilité et le glissement antérieur du tibia, par un renforcement musculaire intense (travail isocinétique du quadriceps et des ischios-jambiers, sur machine à dynamomètre pilotée par informatique), et ainsi rétablir la stabilité manquante en stimulant toutes les structures périarticulaires. Ce traitement kinésithérapique est avant tout indiqué comme alternative à l'opération pour les pilotes avec une rupture de LCA sans lésions méniscales associées. On obtient souvent une stabilité satisfaisante au bout de six semaines, avec l'amélioration des sensations proprioceptives, mais la reprise d’exercices de type "stop-and-go" avec changement d’appui et direction, ne se fait qu’au bout de six mois. Par ce traitement orthopédique adapté, une grande partie des pilotes avec rupture du LCA peut reprendre sans restriction leur activité professionnelle. Les durées sont généralement plus courtes qu'après une opération chirurgicale, ce qui n’est pas négligeable en plein calendrier saisonnier. Cependant, chez les pilotes traités de manière conservatoire, il a été établi malgré tout que le taux d'arthrose dans le futur est supérieur à celui des patients opérés. Pour les blessures du genou plus complexes (arrachements osseux, lésions asso-

ciées d’un ménisque) ou une compensation musculaire insuffisante après rééducation, on se tourne plutôt vers le traitement chirurgical. Son but thérapeutique n'est pas seulement de rétablir la sensation de stabilité, mais d’obtenir l'absence totale de douleurs ou de gêne future. La technique chirurgicale dépend souvent du praticien (DIDT, Macintosh ou encore Kenneth-Jones), mais la finalité reste la reconstruction anatomique du LCA déchiré (ligamentoplastie) par prélèvement d’un morceau de tendon musculaire. La phase de réathlétisation dure de six à neuf mois avant d'atteindre une capacité sportive maximale, mais les pilotes seront sur leur engin bien avant ! La guérison complète du LCA n'est cependant terminée qu'au bout d'un an. ■

LEXIQUE CAPSULE ARTICULAIRE : enveloppe fibreuse entourant les surfaces d’une articulation, contenant le liquide synovial. SYNOVIE : liquide biologique lubrifiant les surfaces articulaires. TRAVAIL ISOCINÉTIQUE : contraction musculaire dont le mouvement s’effectue à vitesse constante.

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ESSAIS PAR MAXIME PONTREAU /// PHOTOS TOMMY MARIN ET D.R.

X U O J I B X U A N O NATI SUPERBIKE FRANCE

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ACING. ELLE PARURE R B S U PL R U LE LÉ 00 ET ELLES ONT ENFI SUZUKI GSX-R 10 , R 0R -1 ZX I K F-R1, KAWASA FORAY, CES YAMAHA YZ E AVEC KENNY IK B R PE SU CE N E DE FRA UM DE LA CHAMPIONN EURS LE SUMM CT U R ST N CO BMW S1000RR, S DE CE R LEUR POUR CHACUN E EFFECTUÉ SU VR FÈ R REPRÉSENTENT 'O D IL LEURS FSBK. LE TRAVA UES, REPOUSSÉ Q LA COLLECTION TI IS ÉR CT A R URS CA ENDRE, -IL MAGNIFIÉ LE R DE LE COMPR YE SA ES R MÉCANIQUE A-T U PO ANTS INSÈQUES ? S QUATRE DIAM RS LIMITES INTR CE U – LE TÉ ET VI S SI U CE R CL FO R – EN EX TEUR ! ANDÉ À ESSAYE RIN À LEUR HAU ÉC N U S N A D NOUS AVONS DEM S ILLÉ SAVAMMENT TA

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ESSAIS

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AM : TECMAS BMW E T Y RA FO Y NN KE : PILOTE ES / 3 PODIUMS IR TO C VI 7 / K SB E C PION DE FRAN RÉSULTATS : CHAM

l n'est pas commun de s'installer au guidon d'une machine ayant complètement dominé un championnat, comme c'est le cas pour la BMW S1000RR siglée du n°78. S'il ne faut évidemment rien enlever à Kenny Foray dans cette razzia 2017, un sport mécanique veut que la machine soit une partie primordiale de l'équation menant à la victoire. De là à en découvrir les plus infimes secrets lors de notre essai, il y a un (grand) pas que nous n'oserons faire. Néanmoins, face aux Kawasaki, Suzuki et Yamaha, il a été possible de comprendre les raisons de cette réussite. La principale se résumant en un mot : l'électronique. Règlement technique oblige, la BMW du Team Tecmas est extrêmement proche de sa version de série. Pourtant, le premier contact donne non sans surprise l'impression d'être sur une toute autre machine. Un sentiment d'ailleurs beaucoup plus prononcé avec l'Allemande qu'avec ses concurrentes.

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C'est plus particulièrement au niveau du train avant que la différence est flagrante. Celui de la n°78 se perçoit comme beaucoup plus léger, plus vif et réactif, induisant ainsi explicitement une agilité accrue par rapport au modèle d'origine. Ce qui se confirme immédiatement. Qu'il s'agisse de la mise sur l'angle ou de la vivacité dans les changements de direction, cette S1000RR est clairement plus simple à emmener, ce qui est véritablement réjouissant. Mais soyons honnête, je compare alors ce qui ne l'est pas. Outre des pneus Pirelli bien particuliers, cette version racing s'équipe de jantes spécifiques en alu et d'une fourche inversée Öhlins dotée de cartouches internes FGK12 non pressurisées. De plus, géométrie et assiette de la n°78 sont passablement différentes tandis qu'elle gagne une vingtaine de kilos sur la version de base. Le jugement a donc de quoi être faussé. Un rapide galop d'essai de la Yamaha R1 va en revanche changer la donne. De retour

sur la BMW, les premières sensations sont plus modérées. La S1000RR s'avère notamment plus physique qu'on ne le croyait. Là où la Yamaha se montre naturelle, il ne faut pas hésiter à emmener la BMW en jouant avec son corps, que ce soit à l'inscription sur l'angle ou dans les chicanes. Si bien que Kenny Foray nous l'avouait après coup : "Lorsque j'ai réalisé mes premiers tests, je ne me voyais pas faire une course entière avec, tant elle me fatiguait". Si cet accompagnement peut rendre les entrées en virage délicates, le freinage ne facilite pas non plus cette phase de pilotage. L'efficacité du système n'est pas à remettre en cause. Il s'agit plutôt du ressenti au levier droit difficile à décrypter. Les sensations s'avèrent assez floues, si bien que l'on a du mal à juger la progressivité et l'intensité de son freinage. Et les étriers radiaux de série pensés avant tout pour la route, dont le changement est interdit, ne sont pas dénués de responsabilités selon Michel Augizeau, patron de la


Plus rétive que ses concurrentes en entrée de virage, la n°78 donne le change une fois le point de corde dépassé.

FICHE TECHNIQUE © Photopress

220 ch à 13 700 tr/min 170 kg avec fluides sauf carburant

MOTEUR ET ÉLECTRONIQUE FONT LA PAIRE SUR CETTE BMW : DES AVANTAGES CRUCIAUX ET INDÉNIABLES. structure Tecmas. Il n'a toutefois pas été impossible de compenser ce point faible. "Le frein moteur est un peu la solution magique, lâche Romain La Monica, ingénieur. Lorsqu'il est performant, tu réussis à garder la moto en ligne au freinage, puis à la faire tourner en phase neutre. Nous avons énormément travaillé sur le frein moteur cette année et c'est finalement ce qui différencie le plus notre moto d'une machine plus basique. Reste à trouver une bonne solution de transfert de puissance au sol avec le contrôle de traction, qui est aussi l'un de nos points forts." C'est à ce moment que la BMW démontre tout son potentiel, lorsque l'on s'extirpe d'un virage. Tâtonnant au départ, on s’aperçoit vite que l'on peut franchement accélérer. L'électronique régule parfaitement l'effort afin d'en tirer une performance optimale. Quelques glisses s'amorcent, se sentent à peine, tandis que le "ratatata" symbolique d'un contrôle de traction actionné s'estompe au fur et à mesure que l'on relève la moto. Alors, les 220 chevaux du quatre-cylindres en ligne vous propulsent.

L'accélération est réellement saisissante, sans toutefois être brutale. Le moteur de la BMW, quasiment stock, délivre sa puissance très linéairement jusqu'à vous gratifier d'un léger coup de pédale supplémentaire vers 11 800 tr/min. De leurs côtés, les éléments de suspensions travaillent parfaitement, conférant une stabilité bienvenue et rassurante. On ne se sent donc jamais en délicatesse à l'accélération. Finalement, loin de vous effrayer, le caractère de la BMW vous invite à lui en donner plus. Et vous, vous y allez en toute confiance. L'électronique veille. L'exemple parfait s'avère être la gestion de la bosse après l'épingle d'Adélaïde à Magny-Cours. S'il n'est pas rare d'y prendre des guidons dans les dents, la BMW décroche doucement sa roue avant du sol avant de la reposer tout aussi docilement quelques mètres plus loin. De votre côté, vous n'avez pas rendu 1 % à la poignée de gaz. C'est bluffant, tout en n'étant qu'à notre humble niveau. On imagine donc aisément ce qu'un pilote mille fois plus doué peut réaliser avec cette BMW S1000RR du Team Tecmas.

MOTEUR : 4-cylindres en ligne, refroidissement liquide, 2 ACT, 4 soupapes en titane par cylindre CYLINDRÉE (ALÉSAGE X COURSE) : 999 cc (80 mm x 49,7 mm) ALLUMAGE : n.c BOÎTE DE VITESSES : 6 vitesses, inversée, sélection par fourchettes et crabots EMBRAYAGE : Multidisques anti-dribble en bain d'huile, shifter up&down ÉCHAPPEMENT : Akrapovic racing, spécifique BMW CHÂSSIS : Périmétrique en aluminium avec moteur porteur BRAS OSCILLANT : Aluminium, type banane SUSPENSION AVANT : Fourche inversée Öhlins Ø 46 mm, cartouche interne FGK12 non pressurisée SUSPENSION ARRIÈRE : Monoamortisseur Öhlins TTX GP BM 360 FREINS AVANT : Double disque Brembo T-Drive Ø 320 mm, étriers radiaux 4 pistons, plaquettes CL Brakes FREIN ARRIÈRE : Simple disque France Equipement (sur mesure), étrier simple piston ROUES : BMW HP aluminium. Avant : 2,75x17. Arrière : 6x17 ACQUISITION DE DONNÉES : 2D KIT ÉLECTRONIQUE : BMW HP Race Calibration Kit Pro

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FSBK

ESSAIS

R R 0 1 X Z I K A S A KAW

M : KAWASAKI SRC A E T ES IN G U IE H AT PILOTE : M DIUMS e DU CHAMPIONNAT 2017 / 2 PO 5 : S RÉSULTAT

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uasiment un an jour pour jour après notre essai de la ZX-10RR 2016 du SRC, nous revoilà sur le circuit Paul Ricard avec la mouture 2017. Et si l'impression de retrouver une moto que l'on connaît est vive, elle s'avère pourtant trompeuse. Un changement de taille s'est opéré entre les deux versions. En lieu et place de la fourche d'origine Showa modifiée par BPRS et du monoamortisseur Öhlins, la Kawasaki est désormais équipée d'éléments WP. Un choix inévitable selon Gilles Stafler, vu les performances de l'année précédente, bien que difficile à gérer. L'équipe a ainsi dû repartir d'une feuille blanche en termes de réglages. "Ce qui fait que nous étions généralement prêts le dimanche soir, après les courses, déplore le patron du SRC. Je m'attendais tout de même à plus d'efficacité, plus rapidement." En selle, à un an d'intervalle, il nous est bien difficile de réaliser une comparaison brute. Toutefois, une sensation persiste, celle d'avoir affaire à une fourche davan76

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tage typée course que la précédente. Il faut ici clairement la mettre en contrainte afin de jouer avec la Kawasaki, cette dernière se montrant tout aussi timide à la mise sur l'angle que son pilote ne le sera avec le train avant. Mais une fois ses propres marques prises et la confiance trouvée, le bal peut commencer. Rentrer fort dans les virages et claquer la ZX-10RR sur l'angle devient un véritable délice. S'inclinant agilement, la Kawa nous régale d'autant plus qu'elle se montre particulièrement rassurante, ne donnant jamais l'impression de tomber. Le slider qui racle le sol joue alors parfaitement son rôle de point de repère. A ce moment, correctement calée, la machine du SRC paraît inébranlable, sa stabilité sur l'angle ne semblant pas pouvoir être mise en défaut. En revanche, un tel comportement de la fourche nécessite d'être toujours dans la bonne fenêtre d'utilisation afin d'exploiter au maximum cette moto. Et celle-ci n'est

pas forcément viable pour tous les types de virages. Un passage moins franc demande plus d'engagement physique pour se faire obéir, impliquant donc une constante adaptation suivant les profils des circuits. Confié à deux disques de 330 mm pincés par des étriers radiaux Brembo 4 pistons et des plaquettes Brembo Z04, le système de freinage aide alors sérieusement le pilote dans sa recherche d'efficacité. Outre la puissance et le mordant à la prise du levier, c'est davantage le retour d'informations et la progressivité dont il fait preuve qui impressionnent. On a ainsi le sentiment de maîtriser le moindre centimètre de sa décélération, et ceci jusqu'au point de corde où une lichette de pression sur le levier nous permet de conserver le train avant en contrainte. Au point qu'il s'agit là, parmi les quatre machines de cet essai, de notre préférence dans le domaine. Tout en sachant que la Yamaha n°94 est hors catégorie, David Checa oblige, mais nous y reviendrons. La Kawasaki ne procure par contre pas


© Fabrice Lhéritier

Une fois intégré le mode d'emploi du train avant, la Kawasaki est un régal à mettre sur l'angle.

FICHE TECHNIQUE 195 ch à 13 800 tr/min (à la roue) 170 kg

autant d'aisance et de facilité que la BMW à l'accélération. Son moteur s'avère plus violent, plus explosif dès la plus petite rotation de la poignée droite. Il s'agit de s'accrocher alors que, en appui sur les repose-pieds et le séant légèrement décollé de la selle, on laisse vivre la machine. La ZX-10RR vous expulse littéralement des courbes. Le pneu arrière s'échappe à tous les coups, progressivement, tandis que l'électronique corrige le tir. Si bien que la confiance - ou l’inconscience, c'est selon incite le modeste pilote à laisser l'action se dérouler, sans être plus délicat sur les gaz, et à en profiter. Pourtant, si nous y trouvons notre compte en termes de sensations fortes, quitte à rêver d'un niveau de pilotage que nous n'avons pas, un pilote de la trempe de Mathieu Gines va s'en trouver pénalisé. Dans ces conditions, l'accélération ne peut être optimale et quelques dixièmes de seconde s'échappent. "La violence du moteur nous a posés des problèmes cette année, concède Gilles Stafler. Nous ne pouvons pas réguler ce tempérament avec l'électronique dont nous

disposons. Il y a soit énormément de patinage, soit trop de contrôle de traction empêchant la moto de sortir suffisamment fort des virages. Il nous faut une évolution pour avancer. La solution serait de travailler sur trois cylindres dans cette phase, et non sur les quatre, afin de réduire la puissance. C'est une technologie que nous avions sur le modèle précédent. Nous savons ce qu'il faut faire, mais ce n'est pas de notre ressort. Il faudrait modifier le software." L'envolée au guidon de la Kawasaki est ensuite fabuleuse, surtout à partir de 8 000 tr/min, seuil où la bombe verte livre tout ce qu'elle a dans le ventre. Bien assistée par un shifter parfaitement calibré, la ZX-10RR avale les lignes droites avec voracité pour mieux vous projeter dans les courbes suivantes. Moto homogène, peu compliquée à comprendre et dotée d'un peu plus de caractère que la BMW et la Suzuki, elle s'est finalement révélée la machine la plus plaisante à rouler de cet essai. Il lui manque juste un petit truc pour pleinement exploiter son potentiel en FSBK, et ce n'est pas nous qui le disons...

MOTEUR : 4-cylindres en ligne, refroidissement liquide, 2 ACT, 4 soupapes par cylindre CYLINDRÉE (ALÉSAGE X COURSE) : 998 cc (76 mm x 55 mm) ALLUMAGE : ECU kit Kawasaki BOÎTE DE VITESSES : 6 vitesses, inversée, à cassette EMBRAYAGE : Multidisques à bain d'huile, shifter up & down, blipper ÉCHAPPEMENT : Ligne complète Arrow Racing CHÂSSIS : Périmétrique double coque, aluminium moulé BRAS OSCILLANT : Aluminium, type banane SUSPENSION AVANT : Fourche inversée WP, réglages internes spécifiques SUSPENSION ARRIÈRE : Monoamortisseur WP FREINS AVANT : Double disque Ø 330 mm, étriers radiaux Brembo 4 pistons, plaquettes Brembo Z04 FREIN ARRIÈRE : Simple disque Ø 220 mm, étrier 1 piston ROUES : Marchesini en alu forgé. Avant : 120/70x17. Arrière : 200/60x17 ACQUISITION DE DONNÉES : 2D / I2M KIT ÉLECTRONIQUE : Kawasaki Racing

HOMOGÈNE, FACILE MAIS PLEINE DE CARACTÈRE, LA ZX-10RR VOUS FAIT RÊVER D'UN NIVEAU DE PILOTAGE QUE VOUS N'AVEZ PAS.

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0 0 0 1 R X S G I K U Z U S

MANS SUD SUZUKI LE AM TE OR NI JU : M ASSON TEA PILOTE : ÉTIENNE M DIUM e DU CHAMPIONNAT 2017 / 1 PO 6 : S T A RÉSULT

ernière nouveauté en date sur le marché des sportives, la nouvelle Suzuki GSX-R 1000 était impatiemment attendue par les fidèles de la marque, les anonymes comme les équipes sportives telles que le Junior Team Le Mans Sud Suzuki. Bien que l'ancienne version possédait encore de très bons restes, il était temps de passer à une autre génération pour accrocher les Superbikes les plus récentes. Et force a été de constater que les ingénieurs d'Hamamatsu ont correctement potassé leur sujet. Le constructeur a ainsi livré en début d'année dernière une version totalement inédite de son hypersportive, dont l'unique point commun avec sa devancière n'était autre que son appellation. Et ce blockbuster fut largement salué par la critique. Damier Saulnier, team manager du Junior Team LMS, et Étienne Masson, son pilote, n'ont également pas été avares en louanges. Châssis et moteur illustraient

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un véritable bond en avant. Toutefois, un problème majeur s'est présenté à eux cette saison. La GSX-R étant arrivée tard sur le marché et les pièces racing spécifiques se faisant rares à cause de la jeunesse de la moto, ils ont dû composer avec une préparation minimaliste. Si bien que lors de notre essai en fin de saison, cette Suzuki du championnat de France Superbike était un modèle quasiment stock. Carénages, maître-cylindre Brembo, cartouches internes de fourche, ligne d'échappement Yoshimura, poignée de gaz à tirage rapide et platines repose-pieds... le team n'a pu apporter beaucoup plus de modifications. Et c'est du côté de l'électronique que cela a été réellement dommageable. "Nous étions équipés du boîtier d'origine cette saison et non d'un élément pour la course. Traction control, anti-wheeling, frein moteur... nous avions très peu de marges de manœuvre dans les réglages, détaille Damien Saulnier. Nous avons même galéré avec le ra-

lenti, bref des trucs de base. C'était notre véritable point faible. Cette électronique a été conçue pour la route. Elle est donc trop sécuritaire. Nous l'avons notamment vu lors de longues accélérations sur l'angle où la puissance est muselée." Il faut bien avouer que l'on se doit de faire confiance à ces propos. Premièrement, nos prétentions restent limitées. Il s'agit d'être honnête et ce n'est pas la vingtaine de tours effectuée sans chronos qui, même animé de la meilleure volonté du monde, nous aurait permis de mettre en défaut cet élément. Deuxièmement, le circuit Bugatti du Mans, théâtre de notre prise de contact, n'est pas le plus propice aux grosses accélérations sur l'angle. Si l'électronique est une limite pour les pilotes, on peut y trouver un avantage dans une première mesure. Elle facilite indéniablement l'apprentissage de la Suzuki, nous procurant une confiance instinctive et immédiate. Alors que l'on tente de la bousculer,


Intuitive et très agile, la Suzuki trouve son avantage dans les parties techniques grâce à son châssis.

© Quentin Maudet

FICHE TECHNIQUE 195 ch à 13 800 tr/min (à la roue) 182 kg à sec

CHÂSSIS ET MOTEUR DE LA SUZ' SONT JUSTE INCROYABLES MAIS IL RESTE DES CHOSES À PEAUFINER. la GSX-R ne glisse pas, se cabre à peine et ne tressaute pas plus. Elle obéit simplement au doigt et à l’œil tout en conservant un comportement parfaitement sain, épargnant son pilote de la moindre feinte. Le quatre-cylindres en ligne y met également du sien pour vous convenir. Malgré un léger creux à la remise des gaz, qui s'estompe alors que la machine se redresse, l'accélération fournie est puissante sans être violente. Et si nous, nous ne subissons pas de contrainte à ce moment-là, ayant surtout l'impression d'accompagner la machine, on peut facilement comprendre qu'un pilote considère l'ensemble trop flegmatique. La montée en puissance s'opère ensuite d'une manière parfaitement linéaire. Le shiftlight multiplie les appels visuels incitant à changer de rapport, action intuitive grâce au shifter idéalement calibré, mais la force du moteur reste, elle, uniforme. Ce comportement fait finalement de la Suzuki une machine peu physique et peu fatigante. Et ce trait de caractère est également dû à son incroyable châssis. Des quatre Superbikes de ce dossier, la GSX-R est clairement la plus agile et la plus simple à emmener. On

comprend alors comment Étienne Masson tirait son épingle du jeu cette année sur les petits circuits et dans les parties les plus techniques. Cette machine répond du tac au tac à la moindre sollicitation, et ceci sans opposer la moindre résistance à la mise sur l'angle. Un coup d’œil suffit à la placer tandis que l'on sent nettement que les appuis sur les repose-pieds ont davantage d'incidence que sur la concurrence. Trouver ses propres repères à ce guidon est une formalité. Quant à la vivacité sur les changements d'angle, elle est bluffante. On regrette alors seulement que le feeling au freinage ne soit pas aussi fin. C'est toutefois sans oublier qu'hormis le maître-cylindre, le système de la Suz' est identique à l'origine et que le constructeur n'est pas réputé pour ses performances dans ce domaine en particulier. L'essai terminé, on se remémore spontanément le constat qu'a livré Étienne Masson toute la saison. Cette nouvelle GSX-R a énormément de potentiel, mais reste encore jeune. Et il paraît impossible de mieux résumer la situation. Il faut que jeunesse se passe, puis la Suzuki va inéluctablement devenir très menaçante au fil du temps.

MOTEUR : 4-cylindres en ligne, refroidissement liquide, 2 ACT, 4 soupapes par cylindre, calage variable CYLINDRÉE (ALÉSAGE X COURSE) : 999,8 cc (76 mm x 55,1 mm) ALLUMAGE : Origine BOÎTE DE VITESSES : 6 vitesses, inversée EMBRAYAGE : Multidisques en bain d'huile, shifter up&down ÉCHAPPEMENT : Yoshimura silencieux R11 CHÂSSIS : Périmétrique en aluminium BRAS OSCILLANT : Aluminium, type banane SUSPENSION AVANT : Fourche inversée Öhlins, cartouche Öhlins SUSPENSION ARRIÈRE : Monoamortisseur Öhlins TTX 36 FREINS AVANT : Double disque Brembo Ø 320 mm, étriers radiaux Brembo 4 pistons, plaquettes Brembo Z04, maître-cylindre Brembo FREIN ARRIÈRE : Simple disque Ø 220 mm (origine), étrier Nissin simple piston ROUES : Jantes d'origine en alu. Avant : 120/70x17. Arrière : 190/55x17 ACQUISITION DE DONNÉES : 2D KIT ÉLECTRONIQUE : Suzuki origine

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AM : TCP RACING E T A EC H C ID AV D : E PILOT / 6 PODIUMS 17 20 T NA e ON PI AM H C U RÉSULTATS : 3 D

n peut avouer en préambule que cet essai de la Yamaha R1 n°94 n'a pas été de tout repos. Et Sébastien Cerdan, patron du TCP Racing - la structure qui faisait rouler David Checa cette année en FSBK suite au retrait du GMT 94 nous avait prévenu. "Cette machine et ses réglages n'ont rien d'ordinaire, expliquaitil en substance. Honnêtement, malgré mon expérience, je n'avais jamais suivi ce genre de direction auparavant avec une moto. David est vraiment un pilote hors du commun et d'un très grand calibre." La longue carrière de l'Espagnol en témoigne. Grand Prix, Superbike mondial, Endurance... il a goûté aux plus hauts niveaux de la compétition moto et pris le guidon des machines les plus avancées. On découvre donc, finalement sans grande surprise, que sa R1 est la moto la plus radicale du lot. Ceci notamment pour une raison : il n'utilise pas l'électronique. Lui préfère tout gérer comme il l'entend. Son

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traction control se résume à la sensibilité de son poignet droit quand son anti-wheeling n'est autre qu'une grosse pression sur la pédale de frein arrière à chaque accélération. On surenchérit là-dessus avec une poignée de gaz quasiment directement reliée aux papillons d'admission, évitant autant que possible le moindre filtre, pour terminer avec une bonne vieille tape dans le dos et un encourageant "vas-y doucement mon gars, prends tes marques." Il n'empêche, quelques instants avant de s'engager dans la pit lane du circuit Paul Ricard, le team veillait à activer à minima les assistances au pilotage, histoire d'éviter toute mauvaise surprise. Bienveillante, cette précaution ne m'empêchait toutefois pas de frôler le drame dès la sortie du box. Surpris par le verrouillage de la direction après seulement quelques degrés de rotation, un vif claquage de botte sur l'asphalte me sauvait de la chute la plus ridicule de l'histoire. Les

bases ainsi posées, voilà qui promettait une relation pilote/machine plutôt houleuse. Et c'est un doux euphémisme. Alors que le pilotage de la Suzuki s'oriente vers une coopération, celui nécessaire pour emmener la Yamaha se veut clairement autoritaire. Bestiale, la R1 de David Checa demande beaucoup d'engagement physique. Pas question avec elle d'ouvrir en grand dès le point de corde dépassé. On prend avant tout soin de correctement la caler avec un filet de gaz afin d'optimiser nos accélérations. Et, à la différence des autres machines, le moteur Crossplane force à consciemment et soigneusement décomposer l'action. Déjà peu réputé pour sa douceur, le quatre-cylindre de la R1 ne vous épargne tout simplement pas dans cette configuration course. Il vous force à jouer de votre corps en chargeant constamment l'avant. Ceci pour tenter de dominer la bête, ou plutôt de moins la subir, et d'augmenter votre capital confiance


Parfaitement calé sur l'angle, vous vous préparez alors à subir le rodéo imposé par l'accélération de la R1.

© Laurent Morlière

FICHE TECHNIQUE 200 ch à 12 500 tr/min 169 kg à sec

rAdiCAle, BestiAle, lA r1 de dAvid CheCA iMpressionne et A de l’Appétit. alors que les quelques glisses provoquées sont gérées par le peu d'électronique restant. Malgré tout, n'ayant ni le talent ni le physique de Checa, cette R1 balaye vos prétentions et vous condamne à rendre la main tout en vous cramponnant. Incroyable, ce moteur vous procure donc des sensations extrêmes mais réclame des capacités tout aussi disproportionnées. Heureusement, le châssis de la Yamaha est plus conciliant. Il faut tout de même prendre la mesure de l'excessive rigidité de la fourche K-Tech, un réglage de rigueur sur cette R1 tant David Checa, très gros freineur, contraint l'équipement. Ainsi, une fois capable de suffisamment comprimer la fourche, on profite pleinement des capacités dynamiques de cette Superbike. A l'instar de la Suzuki, la Yamaha se montre tout aussi instinctive à l'inclinaison. Qu'il soit nécessaire de la claquer sur l'angle ou, au contraire, d'y aller plus progressivement, elle se montre parfaitement docile. Le constructeur japonais est décidément un expert dans le domaine des châssis et le démontre une nouvelle fois. Stabilité, vivacité et agilité s'accordent idéalement. Si

nous avons bien sûr conscience de ne pas autant exploiter le train avant que le pilote référent, c'est pourtant déjà criant à notre niveau. Reste que, comme évoqué précédemment, il faut mettre la fourche en contrainte et donc s'employer sur les freins, bien aidé par le système le plus efficace de ces essais. A tel point qu'il n'a pas été difficile de repousser les points de freinage déterminés la veille avec la Kawasaki. Pourtant, l'unique différence avec l'origine est l'emploi du plus petit maître-cylindre radial du catalogue Brembo. Une exigence de David Checa pour un feeling optimal. Il n'empêche que le levier droit, terriblement dur, nécessite une poigne de fer. Involontairement, vous voici donc obligé d'être très agressif sur le freinage puis d'évoluer régressivement. Ce qui fonctionne à merveille. Le sentiment de pouvoir repousser les limites est alléchant mais, là encore, force est de constater que l'exercice vous manque, rincé après seulement quelques tours au guidon de la R1. L’exigence de cette machine n'en fait donc pas, à notre avis, l'arme absolue. Elle remet toutefois les choses à leur place, indéniablement. ■

Moteur : 4-cylindres en ligne, refroidissement liquide, 2 ACt, 4 soupapes par cylindre, incliné vers l'avant, calage Crossplane Cylindrée (AlésAge x Course) : 998 cc (79 mm x 50,9 mm) AlluMAge : tCi (numérique) Boîte de vitesses : 6 vitesses, prise constante, inversée eMBrAyAge : Multidisque à bain d'huile, shifter éChAppeMent : ligne Akrapovic racing Châssis : deltabox en aluminium BrAs osCillAnt : Aluminium brossé, type banane suspension AvAnt : Fourche inversée K-tech pressurisée, cartouche de développement suspension Arrière : Monoamortisseur K-tech x38 Freins AvAnt : double disque France équipement Ø 320 mm, étriers radiaux 4 pistons Frein Arrière : simple disque France équipement Ø 220 mm, étrier simple piston roues: yeC origine. Avant : 120/70x17. Arrière : 205/60x17 ACquisition de données : starlane Kit éleCtronique : yamaha racing/yeC

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ERIC DE SEYNES

L'INFLUENCE FRANÇAISE ? CLAUDE MICHY Eric dE SEynES Et claudE Michy ont dES parcourS Et dES MétiErS totalEMEnt différEntS. lE préSidEnt dE yaMaha Motor EuropE Et lE proMotEur Et organiSatEur du grand prix dE francE Moto ont pourtant, vu dE l'ExtériEur, un point coMMun : ilS incarnEnt dEux puiSSantS défEnSEurS dES intérêtS dES pilotES françaiS au pluS haut nivEau Mondial du Sport Moto. Sont-ilS d'accord avEc ça ? réponSES...

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Février - MArS 2018


PAr MAXIME PONTREAU ET TOMMY MARIN /// PhotoS D.R.

INTERVIEwS

CouLiSSES

ERIC DE SEYNES

Président de Yamaha Motor Europe En charge de la stratégie sportive du constructeur dans tous les championnats mondiaux, hors MotoGP Dès le départ, Eric de Seynes a suivi de près Lucas Mahias.

Y

amaha était le constructeur de prédilection de nombreux pilotes français en vitesse en 2017 (Johann Zarco, Lucas Mahias, Florian Marino, etc.). Y êtes-vous pour quelque

chose ? Ce sont avant tout eux qui y sont pour quelque chose, grâce à leur talent. Sincèrement, percer dans le sport moto en France est un parcours difficile. Nous manquons cruellement de financement et d’intérêts de la part des grands médias. Je pars donc du principe qu'il est plus difficile pour un pilote français d'émerger que pour un pilote espagnol ou italien. Après, oui, ces pilotes, je les ai aidés directement. Comment en êtes-vous venu à vous investir ainsi ? Lorsque je faisais de la compétition, plus jeune, j'ai toujours couru avec mes petits moyens et en me débrouillant. Résultat : j'étais plutôt en fond de grille. Mais l'émotion avant la course est la même pour tous les pilotes, quelle que soit sa position. J'ai donc toujours été très attentif à l'ensemble des pilotes. J'ai toujours pris soin de comprendre comment ils s’entraînaient, comment ils abordaient la course – et évidemment si c'était sur une Yamaha. C'est comme cela que vous avez découvert ces pilotes et décidé de les soutenir ? Oui, je les ai vus éclore. J'ai connu Florian par Adrien Morillas, que j'avais déjà soutenu à l'époque pour qu'il découvre les GP, lorsque Yamaha est revenu en Superstock. Il s'est durement blessé ces dernières années, mais j'ai toujours partagé la vision de Jean-Claude Olivier [patron de Yamaha France jusqu'en 2010] selon laquelle un pilote blessé ne doit pas être puni. J'ai donc imposé Florian en STK1000 en 2017 dans notre team officiel. Lucas, je l'ai rencontré via Serge Nuques lors de l'une de ses premières courses. Il roulait avec une R6 d'occasion et des pneus de récupération. Il m'a tapé dans l’œil et je lui ai fourni un budget pièces. C'était en 2010 je crois. J'ai suivi son parcours, en faisant en sorte qu'il reste chez Yamaha, et il a fait ses preuves. Même après sa malencontreuse aventure Kawasaki, je l'ai aidé à rebondir au GMT94, tout en lui faisant un peu la morale. Je connaissais son rêve et je lui ai fait comprendre que dès l'instant qu'il entrait chez Yamaha et qu'il bossait sérieusement, je ferai tout pour l'aider. Lorsque Florian s'est blessé, j'ai mis la pression pour que ce soit Lucas qui le remplace, et il s'est illustré. Puis dès que le projet Supersport est arrivé avec la nouvelle R6, il a rapidement été acté qu'il serait notre pilote officiel. En a-t-il été de même pour Johann Zarco ? Il roulait avec une Derbi en GP125 quand j'ai su qu'il s’entraînait avec l'une de nos petites 125cc d'occasion. J'ai passé une journée avec lui pour comprendre comment il fonctionnait. J'ai alors pris conscience de son talent et de son professionnalisme malgré son âge. Puis j'ai compris Laurent Fellon. Dès lors, je lui ai fourni ses motos d’entraînement, même s'il ne roulait pas chez Yamaha. Il y

avait là une approche de la compétition que je n'avais jamais vue chez un pilote français. C'est pour ça que je l'ai toujours soutenu. Bien avant son premier titre en Moto2, j'ai conseillé à Hervé Poncharal de suivre le garçon. Finalement, quand Hervé a signé Folger, je lui ai dit qu'il ne pouvait pas passer à côté de Johann. Et sincèrement, Hervé m'en a remercié plus tard. J'étais convaincu du talent et de l'approche de Johann. Puis je trouvais lamentable qu'il ne soit pas considéré à sa juste valeur malgré un deuxième titre Moto2. Mais Johann doit ce qu'il a à son talent avant tout. Avez-vous votre mot à dire concernant une possible moto officielle par la suite ? Le Japon me laisse décider de tout dans les championnats dont je suis responsable. Je suis donc respectueux envers eux de leur gestion du MotoGP et de l'équipe officielle. J'y vais avec prudence. Il n’empêche que je parle régulièrement avec Lin Jarvis et que nous évoquons Johann. J'ai aussi vu le comportement des Japonais évoluer vis à vis de Johann en cours d'année. Ses résultats sont vus. Il est étudié, analysé et considéré pour le futur, c'est évident. Estimez-vous être un défenseur des intérêts des pilotes français dans le sport moto mondial ? En tout cas, c'est ce que j'essaye de faire en totale intégrité avec les besoins de ma marque. Ce qui veut dire que je respecte totalement l'objectif de Yamaha qui est d'investir son argent pour gagner. Aujourd'hui, c'est vrai que lorsque je ramène ma fraise avec un pilote français, je sens bien qu'il y a de la résistance au départ. Malheureusement, leurs profils n'intéressent pas. Vu l'absence de médiatisation dans notre pays, les teams savent que le pilote ne va pas amener d'argent. Certains pilotes étrangers viennent en compétition en se tirant au moins un salaire de leurs sponsors personnels. Quand ils n'apportent pas en plus un peu d'argent. Un pilote français, il faut tout lui payer. A un moment, le nerf de la guerre, qui reste l'argent et qui n'est pas toujours simple à alimenter, prend le dessus et c'est finalement compliqué. J'essaye donc d'accompagner les pilotes français le mieux possible. FéVRIER - MARS 2018

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le président de yamaha Motor Europe comprend et soutient les pilotes... et pas seulement les français !

En tant que président de yamaha Motor Europe, une telle implication auprès des pilotes de votre nationalité ne pose-t-elle pas de problème ? Non, car j'essaye de ne pas les privilégier. Ce qui compte pour moi, c'est l'intégrité de la composition de nos teams avec les meilleures chances de succès. et justement, comme je suis davantage dans le potentiel sportif que dans le potentiel financier, j'essaye de rééquilibrer la balance. Ce n'est pas parce qu'un pilote débarque avec des millions de dollars que je dois le considérer. Je m'en fous ! Je fais en sorte que l'équation financière ne rentre pas en ligne de compte et que le potentiel sportif des Français soit remis à son juste niveau. J'ai donc plus l'impression d'essayer de défendre l'intégrité du sport à travers le sport français, en donnant à celuici une chance qu'il n'a pas naturellement à cause du manque de financement. Ce n'est pas que du chauvinisme. C'est respecter le talent de nos pilotes tout en essayant de compenser les chances qu'ils n'ont pas eues via le système.

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un pur passionné de moto, enclin à piloter des machines pour le moins intimidantes...

pourquoi y a-t-il selon vous plus de français dans les championnats de motos issues de la production qu'en gp ? il y a deux raisons. Premièrement, rouler en Promosport ou en Supersport 300 coûte bien moins cher que de rouler en Moto3, voire en Pré-Moto3. Une saison en Moto3 coûte environ 250 000 à 300 000 euros quand une saison en Supersport 300 demande 60 000 à 70 000 euros. Deuxièmement, des pays comme l'italie et l'espagne ont réussi à capter le recrutement en GP en imposant au niveau national, aux plus jeunes, des catégories déjà pré-professionnelles. ils ont mis la barre à un niveau que l'on ne peut pas atteindre en France. Tout le monde n'a pas 40 000 euros pour voir si le fiston sait piloter.

avec des machines neuves que les gens peuvent se payer. rendre le critère financier le plus indolore possible augmente le nombre de participants et la quantité fera forcément ressortir la qualité. et si la filière française passe par le 300cc puis le 600cc afin de basculer ensuite pourquoi pas vers du Moto2, cela me va. Au final, le critère fric est tellement important en Moto3 ou Pré-Moto3 que tu ne sais même pas si celui qui gagne est le meilleur, rapport aux performances des machines.

il n'y aura en 2018 aucun français en Moto3 et en red Bull rookies cup. Que manque-t-il aujourd'hui pour solidifier la base de la pyramide du sport moto français ? Le problème est que la filière pour y parvenir est extrêmement coûteuse. C'est pourquoi j'ai pris le parti d'aligner une filière basée sur des moyens financiers les plus faibles possibles afin de redonner l'envie. A un moment, si nous voulons redonner un peu de sens à la promotion du sport, il faut au moins organiser des compétitions

la coupe yamaha yZf-r 125 et le challenge yamaha blu cru sont donc des solutions à votre avis ? Oui, car nous devons attirer le plus grand nombre afin d'être sûr que la base de la pyramide est solide. La Coupe Yam' 125 est une formule, au niveau des ressources financières, que les parents peuvent accorder à leur rejeton. et le Challenge bLU crU est une manière de contourner le problème financier. Une saison en Promosport 400 ne coûte pas très cher. Un jeune pilote talentueux qui

Février - MArS 2018


INTERVIEWS gagne la catégorie se retrouve automatiquement aux sélections pour le Challenge. S'il est choisi, on le retrouve en WSSP 300 parmi huit pilotes bLU cRU. Et de là, s'il termine la saison devant les sept autres, il aura accès à un guidon en Supersport l'année suivante. Ainsi, nous neutralisons ce critère fric qui depuis 20 ans empêche de nombreux talents français d'accéder au haut niveau. Et ce même jeune pilote peut penser au Moto2 s'il se fait remarquer en 600cc. C'est une toute autre approche de la sélection opérée par l'Espagne ou l'Italie. Que manque-t-il, alors ? Du temps pour que cela prenne ? Oui, exactement. Mais à côté de ça, il ne faut pas se leurrer. C'est du sport de haut niveau. A un moment, la marche est importante et dure à franchir. Mais ce qui m'importe, c'est qu'un pilote français puisse y avoir accès, qu'il soit ou non au niveau. Sans vous et Claude Michy, y aurait-il des pilotes français en Mondial ? Personne ne peut le dire... Je pense que Claude comme moi, nous savons très bien ce que nous faisons pour accompagner et aider à la révélation de pilotes français. J'ose espérer que nous y contribuions, mais j'espère aussi que quelqu'un d'autre le ferait à notre place si nous n'étions pas là. Ce qui nous caractérise, à mon avis, c'est que nous sommes des hommes de terrain. Nous avons des responsabilités, mais nous ne l'oublions pas. Et c'est le terrain qui nourrit une stratégie.

COULISSES

Vous apparaissez régulièrement sur les circuits aux côtés des pilotes Yamaha. Comment expliquez-vous cette passion pour la compétition moto ? Elle vient d'une tonne de choses, de mon père et d'émotions que j'ai connues enfant. J'aime le principe du pilotage moto. Il y a une prise de risque très importante et celle-ci vous amène à un degré d'exigence très élevé. Et cela fait qu'on ne peut pas tricher dans ce sport. C'est aussi une discipline responsabilisante envers soimême et envers les autres. L'apprentissage de la course est un apprentissage de la vie exceptionnel, qui vaut toutes les écoles du monde. Je ne me connaîtrais pas moi-même si je n'avais pas fait le Dakar. Seul au milieu du désert, lorsque vous vous parlez, ainsi qu'à votre moto, vous vous découvrez. Il n'y a qu'en course que vous vivez cela. Sans oublier l'adrénaline en pré-grille, la préparation, la concentration. Ce sont des moments très précieux. Je trouve que les valeurs de ce sport sont justes et cela doit être valorisé, préservé et transmis.

Avez-vous sous la main le futur de la vitesse française ? Non, ce serait bien prétentieux de dire ça. J'ai conscience de ce que je fais, mais disons que, en continuant de soutenir les jeunes qui le méritent, j'essaye d'apporter mon humble contribution au sport moto. J'essaye d'accompagner au mieux avec mes moyens. Et heureusement que je ne suis pas tout seul. Eric de Seynes nourrit ses stratégies sur le terrain.

Le CV D'ERIC DE SEYNES Né le 9 juin 1960 à Neuilly-sur-Seine (92) SES ATTRIBUTIONS ACTUELLES

Président, Chief Executive Officer de Yamaha Motor Europe

Executive Officer de Yamaha Motor Co (Japon)

Depuis 2018

Président de l’Association pour le Développement de la Pratique et de la Sécurité Moto (ADPSM)

2004 à 2009

Directeur Général de Yamaha Motor France

2009 à 2012

Président du Groupe Option

(organisation, presse, événementiel, régie publicitaire)

2001 à 2009

Participe au Challenge Honda 125

1978 et 1979

(Saint-Quentin - France)

Depuis 2016

Co-président et Président de la branche motocycles de la Chambre Syndicale Internationale de l’Automobile et du Motocycle (CSIAM)

2010 à 2017

Depuis 2014

ET PAR LE PASSÉ * C.E.O, Président Directeur Général de Yamaha Motor France

Operational Director Yamaha Motor Europe - Membre du Comité exécutif

Chief Operating Officer Yamaha Motor Europe - Membre du Comité exécutif

2012 et 2013

2014 et 2015

2015 à 2017

Directeur Commercial et Marketing de Yamaha Motor France

Directeur Marketing de Yamaha Sonauto et de Yamaha Motor France

1993 à 2001

1990 à 1993

Vainqueur du Trophée de l'avenir et 3e en catégorie amateur du Rallye de Tunisie Moto

Administrateur de MBK Industrie

Directeur du Sponsoring de la S.E.I.T.A.

(Team Ligier-Gitanes en F1 ; Yamaha Gauloises Blondes Mobil1 en GP500)

1989 et 1990 Président de Sport-Action

Participation au Paris-Dakar en moto

Participation au Paris-Dakar en auto

1982

1984

1981

*Par manque de place, nous n'avons pas pu être exhaustifs…

Membre du Comité Exécutif de l’Association des Constructeurs Européens de Motocycles (ACEM)

(production télévisuelle avec caméras embarquées)

1984 à 1986

Responsable Innovation Marketing et Développement Mobil Oil France

1987 à 1989

Engage son propre team en championnat du monde d'endurance

1986

FÉVRIER - MARS 2018

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couliSSES

iNTerviewS

CLAUDE MICHY

ORGANISATEUR ET PROMOTEUR DU GRAND PRIX DE FRANCE MOTO

D

urant le gp de france 2017, nous avons clairement identifié un phénomène Zarco, qui volait même la vedette en bord de piste au chouchou du public, valentino rossi. tirez-vous une satisfaction de faire partie de cette histoire ? Aucunement. Je ne suis pas sur la moto, un peu de décence ! Ce qu'a fait Johann en 2017 est magnifique. C'est un garçon que l'on connaît depuis longtemps. Tout le monde a beaucoup rigolé de Laurent Fellon, qui l'accompagne depuis toujours. Laurent n'est pas un garçon facile, mais s'il n'avait pas été là, Zarco ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui. Nous, on n'existe pas là-dedans. On a juste aidé comme on le pouvait avec la fédération [FFM], comme on l'a fait pour d'autres pilotes – Di Meglio, Baz… vous estimez-vous un défenseur des intérêts des pilotes français dans le sport moto mondial ? Non. Je pense simplement que, lorsque tu travailles dans un domaine, tu as besoin d'acteurs. Pas seulement de champions, mais d'acteurs qui portent les couleurs de ton pays. On est dans un pays où les ayatollahs verts ont inoculé à la presse généraliste – et à beaucoup de monde – tout un tas d'éléments dogmatiques qui rendent très difficile le fait de trouver des partenaires en sport mécanique. Pourtant, ça n'est pas en tirant sur la plante qu'ils l'ont faite grandir, les ayatollahs verts ! Tous les progrès dont profite l'ensemble des usagers du réseau routier sont tirés des sports mécaniques, auto comme moto. La sécurité, la conso, tout ce que tu veux… Bref, j'aurais beaucoup de choses à dire sur la tendance allant vers le tout électrique – alors que l'on nous demande déjà, aujourd'hui, de baisser nos chauffages quand il fait trop froid, de peur de manquer de jus. Toujours est-il que la France plonge dans une notion d'excessivité liée aux intérêts politiques. Ainsi, difficile pour des jeunes qui débutent dans des sports mécaniques d'intéresser des partenaires. Nous devons donc les aider. comment se concrétise généralement cette aide ? De plusieurs façons. Quand j'ai repris l'organisation du GP de France, en 1994, il n'y avait plus de pilote français. Donc, je devais organiser un GP mais je n'avais pas de "produit local" à y mettre en avant. J'ai alors discuté avec Jean-Claude Besse, nous avons parlé de budget, et nous avons décidé de monter l'equipe de France en GP250, avec Guintoli et de Puniet pour pilotes et Luc Alphand en parrain. en parallèle, la Dorna [le promoteur des GP] a fait progresser le championnat. Le team a tourné quelques années ; certains pilotes ont franchi des étapes, d'autres pas, mais les deux premiers ont plutôt pas mal marché. Après, quand on a arrêté ça, on a réfléchi à d'autres solutions. Avec Jacques Bolle [président de la FFM], on a donné un coup de main aux pilotes, mais j'ai aussi essayé de comprendre les intérêts et les enjeux pour la Dorna d'avoir des Français en GP. Carmelo [ezpeleta, le patron de la Dorna] a toujours été attentif au sujet. 86

Février - MArS 2018

claude Michy en discussion avec carmelo Ezpeleta, le grand ponte du Motogp.

Sa connaissance parfaite de l'échiquier nous a permis d'aider au placement de certains, comme par exemple de Loris Baz quand il est arrivé chez Avintia. Puis il y a la notion financière : ça n'est jamais simple. votre société pha investit-elle de l'argent dans les pilotes français ? Oui, il y a un moment, il faut mettre de la caillasse. Si tu n'en mets pas, rien ne se passe. Ça n'est pas utopique : je pense que cela peut servir la cause du GP de France. On ne peut pas gagner à tous les coups, mais pour gagner de l'argent, tu dois en dépenser. Cela fait partie du tout de l'organisation. comment procédez-vous pour essayer de placer un pilote français ? Je ne parle qu'avec Carmelo et le pilote ou son représentant. Après, à eux d'œuvrer : chacun son métier. Quel est votre point de vue sur les saisons 2017 de fabio Quartararo et Jules danilo en gp ? Je crois que chacun d'eux a un problème de stabilité. ils ont du mal à progresser de façon linéaire, ils montent et descendent. Pour deux raisons différentes. Fabio a – et c'est bien français – été mis trop tôt sur un piédestal : cela lui a trop vite mis en tête que tout allait bien se passer. et là, ça ne se passe pas bien, il se pose des questions. Le fait que son ancien manager, eduardo Martin, l'ait fait sortir du "système Alzamora" est pour moi une erreur fondamentale. il va falloir qu'il soit très fort pour revenir au plus haut niveau : je pense qu'il en a la capacité, mais il va falloir qu'il trouve l'équilibre nécessaire à tout sportif de très haut niveau, dans l'entraînement, le travail psychologique, la vie de tous les jours. Jules est un garçon intelligent, qui se pose en conséquence beaucoup de questions – peut-être trop. C'est un bon pilote… il fait partie des pilotes capables de faire des coups. J'espère qu'il nous surprendra, mais je pense aussi qu'il faut de tout pour faire un monde : il y a des gens qui, sur un plan de carrière comme en course, sont difficilement approchables par d'autres. Mais ces questions sont difficiles pour moi : tu demandes à quelqu'un qui est incapable de monter sur une mobylette de donner un avis sur quelques-uns des meilleurs pilotes du monde. Mon point de vue ne sert à rien ! (rires)


fabio Quartararo : un immense talent, mis trop tôt sur un piédestal selon claude Michy.

secret : il faut travailler, travailler et encore travailler ; il faut ne penser qu'à ça, être lucide, faire gaffe aux entourages… La réussite d'un pilote est une osmose entre différents ingrédients, il n'y a jamais de phénomène de hasard. Le talent ne suffit pas.

le promoteur du gp de france croit beaucoup en la filière Z&f (Zarco&fellon).

avez-vous beaucoup influencé le maintien de fabio Quartararo en Moto2 la saison prochaine ? Non, je ne pense pas... Mais tu sais, en aucun cas je pense être un élément clef dans ces choix. C'est un ensemble d'éléments qui s'additionnent les uns aux autres. Je ne veux pas m'attribuer quoi que ce soit dans la place de Pierre, Paul ou Jacques chez Pierre, Paul ou Jacques. Ça ne serait pas honnête. pourquoi y a-t-il selon vous plus de français dans les championnats de motos issues de la production qu'en gp ? Là, je suis bien incapable de répondre. Prends vincent Philippe, qui est aujourd'hui une grande référence en endurance : ça n'a pourtant pas fonctionné quand il est passé dans notre team. Je ne sais pas. Certains pilotes ont des qualités mais n'ont peut-être pas su les exprimer au moment où ils ont eu leur chance. Je ne veux pas dire que le Superbike est du recyclage, mais globalement, on sait que les meilleurs sont en GP. Tu le vois quand un randy, qui ne roule plus beaucoup, monte sur la Kawasaki d'endurance au Bol, ou quand un Bradley Smith et un Pol espargaro roulent aux 8 H de Suzuka : les chronos explosent. Je pense que c'est une forme de réponse : le niveau GP est un cran au-dessus du reste. Aussi, une fois qu'on y est, il faut veiller à ne pas se griller. il n'y a pas de

Suivez-vous ces championnats dérivés de la série ? L'endurance, un peu, car sans rentrer dans les détails, je suis à l'initiative du projet de promotion de l'endurance par eurosport events. Cela s'est concrétisé et je pense que François ribeiro [responsable d'eurosport events] est en train de donner un bon coup de fouet à cette discipline. Après, je ne suis pas spécifiquement les championnats – on ne peut pas dire ça, je ne suis pas un spécialiste : je surveille juste ce qu'il se passe. Que manque-t-il aujourd'hui, selon vous, pour solidifier la base de la pyramide du sport moto français ? il existe un championnat Pré-Moto3 en France, mais je crois beaucoup au projet de Z&F [la société de Johann Zarco et Laurent Fellon] sur le circuit d'eyguières. et puis, c'est comme tout : quand tu as un pilote de très haut niveau qui performe en catégorie reine, un challenger qui se frotte aux plus grands, ça crée des vocations. Nous n'avions pas ça auparavant. La fédération travaille aussi, mais il y a une différence entre le loisir et la performance. C'est un vrai sujet. C'est-à-dire que c'est déjà difficile de faire cohabiter ceux qui sont là pour s'amuser et ceux qui veulent gagner. ensuite, ce sport coûte un peu d'argent… il faut donc trouver un moyen de pouvoir aider ce type d'école. Si un sport/étude se met en place, comme c'est en projet actuellement entre la FFM et Z&F, cela pourra peut-être aider quelques garçons à évoluer et à développer leurs qualités. Ça va juste prendre un peu de temps. au fil des ans, le gp de france bat ses records d'affluence et fut en 2017 le deuxième gp le plus visité par les spectateurs après valence. Est-ce une fierté ? Ma fierté, c'est plutôt celle des équipes qui travaillent avec moi pour que ça marche. Pour moi, la satisfaction est le début de la régression. il faut avoir plaisir à faire ce que l'on fait et trouver les bonnes personnes : l'équipe de l'ACO, des commissaires de piste fantastiques, une direction de course exceptionnelle… Bref, ces Février - MArS 2018

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COULISSES

INTERVIEWS

opérationnels que l'on ne voit jamais et qui font tourner la boutique. C'est vrai que du coup, j'ai un fonctionnement un peu particulier : je parle avec les gens du terrain plus qu'avec les directeurs généraux. Je suis un peu déformé. Je n'ai pas d'ordinateur, tu imagines le b**del… Sans vous et Eric de Seynes, y aurait-il des pilotes français en Mondial ? Oui, bien sûr. D'autres gens auraient eu des responsabilités à notre place et auraient poussé dans ce sens. Mais pour moi, Eric est à un autre niveau : il a une importance, une influence très lourde. Le monde peut tourner sans moi ! Avez-vous sous la main le futur de la vitesse française ? Non ! Non, non, non, non… Tout ça est tellement subjectif. On pourrait passer dix minutes avec des arguments pour, et dix minutes avec des arguments contre.

nels : entre des footballeurs et des pilotes de moto, il n'y a pas de comparaison. Ces pilotes sont les derniers gladiateurs. Ils chutent à 250 km/h, et la première chose qu'ils font, c'est d'essayer de remonter sur leur mobylette ! Ça change des types qui se roulent par terre pendant 2 minutes après s'être fait toucher le protège-tibia… En plus, ce sont des hommes, dans l'ensemble, avec une sensibilité et un côté humain hyper prononcés. Rien que Valentino, quand je vois tout ce que l'on a fait avec lui, dont il n'a jamais voulu que l'on parle – à savoir recevoir des enfants malades ou des personnes en situation de handicap, en toute discrétion… C'est exceptionnel. La performance d'un pilote français au GP de France est toujours un immense moment pour moi, mais ces petits moments, à l'abri des regards, sont vraiment ceux qui me font adorer ce sport, ceux qui me donnent la chair de poule. ■

Pourquoi vous impliquer à fond dans le sport moto plus que dans un autre ? Moi, je suis un passionné d'organisation. J'aime quand il faut pauser 700 tonnes de pains de glace au Stade de France pour en faire une patinoire… Pour ça, il me faut des gens qui sont encore plus professeur Nimbus que moi ! Tu as une problématique, et mon rôle est de trouver les gens qui vont avoir les compétences pour la résoudre : je coordonne, j'essaie de communiquer l'envie d'être à 100 % et pas à 70. La moto, au fur et à mesure, a pris une place de plus en plus grande. C'est un monde peuplé de gens exception-

Le Grand Prix de France est le second GP du calendrier en termes d'affluence.

Le CV DE CLAUDE MICHY Né le 3 avril 1949 à Clermont-Ferrand (63) SES ATTRIBUTIONS ACTUELLES*

Membre du bureau de la LFP (Ligue de Football Professionnel) en tant que représentant des Clubs de Ligue 2

Président de l’UCPF (Union des

Clubs Professionnels de Football)

Depuis 2017

Nomination de Corinne Diacre au poste d'entraîneure du Clermont Foot 63

Prestataire associé à l’organisation du Salon de la Moto de Paris

Inauguration du Centre de Formation Partagé réunissant le Clermont Foot 63 et l’ASM Omnisports Section Rugby

2014

2015/13/11

2017

Co-organisateur du Trophée Andros sur glace au Stade de France

2011/08/06/ 04/01/00/1999

Champion d'Auvergne de ski

Création de l’Equipe de France Grand Prix (GP250)

2004 et 2003

2002

2001

1965

1973

FÉVRIER - MARS 2018

Pilote auto en rallye, course de côte et sur circuit

1977 à 1969

Depuis 2015

Depuis 2005

Organisateur de la finale du Trophée Andros à Clermont/ Super Besse

Promoteur/ organisateur du Grand Prix de France Moto

Depuis 1994

Promoteur du championnat du monde de Motocross à Saint Jean d’Angély

4e du championnat de France de Formule Renault

Président /actionnaire majoritaire du Clermont Foot 63 (Ligue 2)

ET PAR LE PASSÉ *

Organisateur des championnats du monde de Boxe

Devient maître confiseur et ruban bleu de la confiserie française

1963 à 1959 88

Depuis 2016

Consultant pour Eurosport Events dans le cadre de l'EWC

Gestion du département Marketing des 24 H du Mans Auto & Moto

2002 à 2000

Promoteur/ co-organisateur du Supercross/ Motorshow au Stade de France

Co-organisateur du rallye Paris Pékin

2002 à 1998

1995 Relations presse et promotion du championnat du monde de pétanque

Manager de Patrick Tambay en F1 chez Ferrari

Relations publiques d'Alain Prieur

Régie publicitaire/ organisation du Paris Dakar pour TSO

1982 et 1981

1984 à 1978

1993 à 1983

1994

*Par manque de place, nous n'avons pas pu être exhaustifs…


LE MEILLEUR DE LA VITESSE FRANÇAISE 200 PILOTES ET 12 DÉPARTS SUR LE WEEK-END

SUPERBIKE SUPERSPORT PIRELLI 600 S I DE - C AR S PRE-MOTO3

CALENDRIER 2018 LE MANS (72) NOGARO (32) LEDENON (30) MAGNY-COURS (58) PAU-ARNOS (64) CAROLE (93)

31/03 ET 01/04 28/04 ET 29/04 16/06 ET 17/06 30/06 ET 01/07 14/07 ET 15/07 25/08 ET 26/08

ALBI (81) 22/09 ET 23/09

PARTENAIRES PRINCIPAUX

PARTENAIRE OFFICIEL

ANIMATION MOTO ENFANT GRATUITE

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Ne manquez rien du Championnat de France Superbike

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PAR MAXIME PONTREAU /// PHOTOS PSP PEREC & DR INTERvIEw

RETRO

Dernière saison en GP et toujours en petite cylindrée avec cette 125 MBA ex-Pietroniro.

JACQUES HUTTEAU

Inaltérable passion

UNE FOIS N'EST PAS COUTUME, NOUS VOUS PROPOSONS UN ARTICLE SUR UN MEMBRE DE L'ÉQUIPE SPORT-BIKES. CECI POUR UNE BONNE RAISON : JACQUES HUTTEAU EST BIEN PLUS QUE L'UN DE NOS CONTRIBUTEURS. PRÉSENT DANS LE PADDOCK DES GRANDS PRIX DEPUIS PLUS DE 40 ANS, IL EST DE CEUX, RARES, À SI BIEN CONNAÎTRE CE MILIEU EN PERPÉTUEL MOUVEMENT. OUTRE UN ŒIL AFFÛTÉ ET DES CONNAISSANCES ENCYCLOPÉDIQUES, L'HOMME POSSÈDE UNE RÉELLE ET ENTHOUSIASMANTE PASSION POUR CE SPORT DONT IL A CONTRIBUÉ AU DÉVELOPPEMENT. VOICI POURQUOI NOUS SOUHAITIONS VOUS LE PRÉSENTER DAVANTAGE. FévRIER - MARS 2018

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Sur l’ABF 50cc avec laquelle il gagne un deuxième titre de champion de France en 1980. Une belle école, selon lui, pour apprendre le plat ventre et la recherche de la vitesse.

J

acques, depuis combien de temps arpentes-tu le paddock des Grands Prix ? Plus d'une quarantaine d'années déjà ! J'ai commencé à faire des saisons complètes en Grand Prix en 1977. Avant, je ne faisais que quelques courses par an. Mon idole était Jack Findlay à ce moment-là, ce pilote privé qui luttait contre les plus grands, et c'était un rêve que de l'imiter. Mon ambition n'était pas à ce niveau, même si j'en avais, mais je voulais réussir à vivre cette vie de nomade, de pilote privé tout en parcourant l'Europe. Nous avons donc tout quitté avec ma femme Léonie pour faire une saison complète de GP, pour partir sur la route. Comment t'es venue l'envie de faire de la compétition moto ? C'est un ensemble d'imprévus, si je peux dire. En réalité, dans mon adolescence, la moto était avant tout un moyen de transport. J'ai eu la chance d'avoir des deux-roues, notamment une Morini 250cc achetée au frère de Jean-Pierre Beltoise, Michel, avec laquelle je suis allé au GP de France 1967 à Charade. Je ne connaissais alors rien à la compétition, mais j'avais les yeux grands ouverts. Mike Hailwood, Phil Read, Bill Ivy... ce sont des noms qui ont résonné dans mon esprit. J'en suis revenu émerveillé. Je m'en souviens presque comme si c'était hier. Finalement, j'ai eu l'occasion d'acheter une Motobi 125cc Sport préparée pour la compétition. L'idée m'a trotté un temps dans la tête puis je me suis lancé en championnat de France fin 1967. Et je me demande toujours pourquoi... (rires) Tu as débuté les saisons complètes de Grand Prix dix ans plus tard. Il était simple à cette époque d'y participer ? Non, pas du tout, car tu n'obtenais pas d'engagement au préalable. Tu écrivais aux organisateurs pendant l'hiver, mais tu ne recevais généralement jamais de réponse. Il fallait donc prendre son courage dans une main, le volant du fourgon dans l'autre, et partir sur les circuits pour implorer les organisateurs de t'engager sur la course. N'ayant pas de résultats précédemment, tu te faisais souvent refouler, alors tu insistais. Il m'est arrivé de passer des jours entiers dans le bureau du responsable du circuit pour participer. 92

FévRIER - MARS 2018

Jacques (à droite) sur un podium du championnat de France 125cc avec (de g. à d.) Gilles Payraudeau, Pascal Serra et Jean-Claude Selini.

Et ça marchait une fois sur deux. Pour tout dire, une fois en Italie, à Imola, nous étions sept ou huit pilotes à pleurnicher depuis plusieurs jours pour rouler. Nous avons sympathisé et, étant le seul qui parlait italien, j'ai fait l'interprète pour chacun. Ils ont tous été engagés au fur et à mesure… sauf moi (rires) ! Bref, nous étions nombreux à agir ainsi et les plus téméraires, les plus patients, les plus courageux y arrivaient. C'était une drôle d'affaire. C'est impossible aujourd'hui car les listes sont pré-établies. A l'époque, c'était théoriquement impossible, mais on y arrivait en forçant. Quels sont tes principaux faits d'armes durant ces années de compétition ? J'ai fait onze saisons en GP, essentiellement dans les petites cylindrées 125cc et 50cc. C'est un ensemble de petites choses qui fait que je m'y suis cantonné. Bien sûr, j'avais avant tout une préférence pour ces machines, mais il y avait aussi énormément de Français en 250cc. S'y engager était donc impossible, surtout dans ma position. Il m'était aussi plus aisément possible d'obtenir une moto compétitive en 125cc. En fait, nous attaquions les Grands Prix


INtervIew

RETRO

Le paddock du GP de France 97 ; “C’est l’apocalypse !” avait lancé un spectateur qui venait de réussir à franchir le grillage.

À Salzburg avec Léonie, sa fidèle 'mécano' et son épouse depuis ses débuts.

À la poursuite de ses rêves et en quête des points.

avec deux motos, une 50cc et une 125cc. Cela me permettait de pleurer pour deux engagements et espérer en avoir un. C'était le jeu. J'ai failli tout arrêter en 1978, faute de moyens, jusqu'à ce que Bernard Fourés, le fabricant avec Jean Bidalot des 50 ABF, me propose de travailler avec lui. Il m'a préparé une 50cc très compétitive avec l'objectif de remporter le titre de champion de France, tout en participant aux GP. J'ai réalisé mes deux meilleures saisons en 1979 et 1980 en obtenant deux titres nationaux consécutifs et des top 10 aux classements finaux en GP. Puis j'ai continué en 125cc en GP jusqu'en 1987. Quels souvenirs gardes-tu de ces dix années ? Énormément de difficultés financières, de casses et donc de temps à faire de la mécanique. Je passais ma vie sous ma tente à travailler. Il y avait du boulot avec les deux machines. Après coup, je me suis aussi toujours dit que j'avais roulé un peu en deçà pour être certain de participer à la prochaine course. C'est bête à dire mais, inconsciemment, il y avait cette volonté de durer. J'ai tout de même fait de belles courses. J'ai aussi été parfois terriblement déçu. N'empêche

que pour diverses raisons il existait une certaine réserve, mais je n'ai aucun regret. C'est vrai que l'on a vu beaucoup de monde partir à cette époque. Pour la petite histoire, j'ai été déclaré mort à plusieurs reprises après de dramatiques confusions. Mais outre la course, il y a aussi de nombreux et inoubliables souvenirs. C'est cette vie de nomades, de forains, cette liberté, qui nous séduisait avec Léonie. Nous ne rentrions jamais, allant d'un circuit à l'autre. Sans oublier les rencontres. Nous avons sympathisé avec énormément d'étrangers qui menaient la même vie que nous. C'était une véritable caravane dotée d'une passion à l'état pur. Quand tout allait bien, on récupérait quelques centaines de francs avec les primes de départ et d'arrivée. Puis on voguait de course en course. Tu n'as jamais quitté le paddock après avoir arrêté la compétition en 1987. Quels sont les métiers que tu y as exercés ? Arrivé à la quarantaine, il fallait penser à faire autre chose. Mais après la vie que nous avions vécue, nous ne voulions pas rentrer dans les clous. Comme les expatriés qui travaillent longtemps à l'étranger, c'est dur de revenir au pays. Je voulais aussi voir les FÉvrIer - MArS 2018

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Eddy, son fidèle acolyte chez Elf, achemine en moyenne 7 000 litres d'essence sur chaque GP… et toujours avec le sourire !

Depuis 1998, Jacques travaille pour Elf. Faire le point avant la livraison aux équipes de GP est primordial.

autres facettes de la compétition, les autres métiers dans la course. Dans un camping où nous n'avions absolument rien à faire, ni lui ni moi, j'ai rencontré Mike Trimby de l'IRTA (l'association des teams en GP), tout juste créée. Il m'a proposé de bosser avec lui et je suis devenu paddock manager pour l'IRTA en 1988, et ce jusqu'en 1997. Mon rôle était d'organiser tout le paddock. Avant, cela ressemblait davantage à un champ qu'à un parc coureurs. Les pilotes et les équipes s'installaient comme ils le voulaient. C'était un b**del. J'ai donc exigé des modifications auprès des circuits, imposé des zones bien précises pour les camions, pour les camping-cars et, finalement, pour les hospitality afin que cela soit pratique et attrayant. Cela a été très dur de modifier les habitudes des gens. C'était une guerre. Il fallait leur démontrer que c'était dans leur intérêt. Mais le résultat est celui que l'on voit aujourd'hui et ça, c'est plaisant. Je suis ensuite passé chez Elf en 1998. Depuis, j'ai également été un temps commentateur pour Eurosport. Puis j'écris aussi depuis quelques années dans Sport-Bikes. Et en quoi consiste ton travail de consultant technique chez Elf ? Je suis pompiste itinérant (rires). Je suis l'intermédiaire entre les ingénieurs d'Elf et les teams. Je m'occupe de la vente des carburants et lubrifiants spéciaux, de leur distribution sur les GP et lors des tests, du suivi des commandes, mais aussi du relationnel. Tu es un véritable autodidacte en fait ? Complètement, mais j'ai quand même mon certificat d'études (rires). En fait, je n'ai jamais vraiment eu de métier. Avant de partir en GP, j'étais comptable de chantier. Ensuite, tout s'est présenté progressivement. Je pense que la curiosité, l'envie et le plaisir m'ont permis de réussir dans des boulots différents. C'est marrant. Je crois que si on veut, en se donnant beaucoup de mal, on y arrive dans tous les cas. 94

FéVRIER - MARS 2018

Le paddock est un milieu compliqué à intégrer. Est-il tout aussi difficile de le quitter ? (Rires) C'est clair. Je m'y trouve bien. J'ai toujours énormément de plaisir à reprendre, à rencontrer des gens, du simple mécano au plus grand pilote. L'émotion est toujours la même quand je reviens dans le paddock après l'hiver. C'est un milieu plein de passion, d'enthousiasme, d'ambition et de travail sérieux... je m'y régale. Et cela n'a tout de même rien de commun avec le travail dans le monde extérieur, où l'on n'y retrouve pas la même intensité, la même motivation, l'adrénaline et la remise en question perpétuelle... Voir des gamins débuter, grandir et devenir champion est tout aussi incroyable. Malgré mon expérience, c'est encore un monde épanouissant. Il y a toujours de nouveaux venus, mais tu connais aussi beaucoup de monde au bout d'un moment. C'est agréable. Quelle vision portes-tu sur l'évolution des GP depuis l'époque du Continental Circus ? Tout a évidemment énormément changé. C'est beaucoup plus professionnel que cela ne l'a jamais été. C'était un peu surprenant au départ. Les petits privés se sont fatalement fait écarter. D'un autre coté, cela a permis de sécuriser les circuits, de rendre la vie du paddock mille fois plus agréable, et aux équipes d'enfin rentabiliser leurs investissements. C'est vrai que la magie du Continental Circus en a pris un coup, mais il faut vivre avec son temps. Auparavant, c'était n'importe quoi, de l'amateurisme. Les pilotes n'avaient pas le droit de parole et nous étions traités comme des moins que rien dans beaucoup d'endroits et de pays. Cette évolution fait partie de la vie. Beaucoup ont craint que la moto ne devienne un sport de riches. Cela en a toujours été un je pense. Toutefois, certains ont prouvé le contraire en réussissant malgré peu de moyens, comme Marc Marquez par exemple. Quand est-ce que tout a changé selon toi ? Avec l'arrivée des Américains et de leurs gros camping-cars. Le paddock a commencé à se métamorphoser. L'atmosphère a changé. Le motor-home a créé une sorte de barrière avec une impression de richesse. Puis l'IRTA a commencé peu après à prendre le dessus sur la FIM et les organisateurs et là, la mentalité a changé avec une rigueur dans l'organisation. Les GP sont-ils plus impressionnants aujourd'hui qu'à l'époque ? Le problème est que mes souvenirs sont tronqués. Nous avons vécu des courses phénoménales, mais ces dernières années, que ce soit en Moto3, Moto2 ou MotoGP, nous assistons à des courses dantesques. Il y a très longtemps, les écarts étaient beaucoup plus importants et les courses plus ennuyeuses. Tu n'avais aucune


InteRvIew

RETRO

Johann Zarco lui a rendu hommage au GP d'Assen 2009 avec un casque à ses couleurs. “Un immense plaisir” pour le principal intéressé.

Mais où est Jacky ?

Depuis 40 ans qu'il suit la compétition, Jacques en connaît du monde. Et il aime plus que tout discuter, partager, échanger, écouter. Comptez plusieurs heures pour traverser le paddock avec lui...

chance face aux motos d'usine. C'est toujours un peu le cas, mais les écarts sont réduits. Les courses ont toujours été passionnantes. Il y a eu de bonnes périodes, d'autres plus creuses, mais celle-ci est exceptionnelle. Un regret finalement dans cette carrière longue et accomplie ? J'aurais bien aimé pouvoir consacrer un peu de temps à certains jeunes pilotes. J'aime bien aller aux sélections de la Red Bull Rookies Cup par exemple. Je n'ai jamais fait mes preuves, mais c'est le futur et cela m'intéresse. Le problème est que je serais incapable d'expliquer comment piloter, tout d'abord parce que je ne l'ai jamais su (rires). Mais l'accompagnement et l'aspect mental me plaisent beaucoup. Je sais à quel point il est facile de trébucher, j'en ai vu beaucoup rater des occasions, à cause d'un manque de confiance. Je le comprends. Réussir est un travail acharné et perpétuel. Ce sera évidemment au détriment de l'activité d'un gamin normal, mais c'est le prix. Tu es né le jour du premier GP de l'histoire, le 17 juin 1949. Sans le vouloir, tu avais déjà une prédilection... Oui, c'est marrant. C'est un signe. Pourtant, en réalité, la voiture m’intéressait plus que la moto quand j'étais gamin. Puis les choses ont fait que... ■ févRIeR - MaRs 2018

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REGARD

CHRONIQUE C'EST

JAKUTO

QUI LE DIT...

ANCIEN PILOTE, EX-PADDOCK MANAGER, COMMENTATEUR INTÉRIMAIRE ET CONSULTANT TECHNIQUE CHEZ ELF, JACQUES HUTTEAU APPORTE DANS CHAQUE NUMÉRO SON REGARD DÉCALÉ ET PLEIN D'HUMANITÉ SUR NOTRE SPORT FAVORI.

LA PASSION AU BOUT DU DOIGT ccroupis derrière le rail de sécurité, sous un soleil ardent qui les brûle ou sous des trombes d’eau, à peine protégés sous des impers qui les gênent pour travailler, ils sont nombreux tout au long des circuits, l’œil vissé derrière leurs appareils, à immortaliser ceux qui font le spectacle. La course n’est pas terminée qu’ils foncent déjà vers le podium, embarrassés de leurs encombrants appareils et téléobjectifs dépassant de chaque côté du scooter. Et puis rapide retour en position pour les autres catégories. C’est en avalant deux à deux les marches de l’escalier qu’ils vont enfin s’élancer vers la salle de presse pour expédier par internet leur récolte à peine retouchée vers les journaux ou les agences du monde entier. Les temps ont bien changé puisqu’il leur fallait auparavant trouver une bonne âme en partance dès la fin du week-end, acceptant de se charger des nombreuses pellicules pour les remettre à l’agence dans leur pays respectif. Une vraie course permanente ! Beaucoup évidemment sont payés pour ce travail difficile et physique, alors que d’autres, souvent décriés par les professionnels, vivent une expérience passionnante, en offrant sans doute trop généreusement leurs résultats à des sites d’amateurs particulièrement demandeurs. Avec des appareils pas toujours fringants, dans des conditions souvent ingrates, ce sont pourtant ceux-là qui forcent mon admiration. Profitant la plupart du temps d’un emploi stable totalement extérieur au monde de la moto, ils doivent s’organiser en utilisant leurs journées de congés pour assouvir leur immense passion de la course moto. Voyager toute la nuit juste après la journée de travail fait partie de leurs habitudes et des obligations. Leur voiture n’est pas de première fraîcheur, loin s’en faut, et il arrive quelquefois que le périple soit interrompu pour entamer une réparation de fortune. Un

A

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échappement égaré, une fuite d’eau ou un alternateur fatigué font partie des maux les plus fréquents et les moins gênants puisque le voyage pourra continuer. Après des heures et parfois des milliers de kilomètres, s’ils ont la chance de disposer d’un sésame permanent, ce sera du temps gagné. Sinon, il leur faudra attendre devant l’accueil pour espérer récupérer une accréditation pas toujours attribuée. Aller enfin garer cette bagnole qui pisse l’huile et sent l’essence à cause du scooter bien usé trimballé de circuit en circuit, et grimper les marches de la salle de presse avec l’espoir de trouver une armoire libre pour y ranger le matériel en fin de journée. Les essais ont parfois déjà commencé. Alors il faut vite trouver le bon emplacement avec l’éclairage adéquat, pas trop loin de la piste, celui où les angles sont intéressants et parfois même les chutes les plus fréquentes. Aujourd’hui, il fait beau. Que c’est bon d’en profiter, même si l’œil ne quitte que rarement le viseur ! Il faut pourtant déjà bouger pour rejoindre un autre virage. Mais ce sacré scooter refusant de démarrer va amuser les vrais professionnels, ceux qui n’ont pas à s’en soucier. Pour tous ceux-là, la journée va passer rapidement, à peine entrecoupée d’une pause déjeuner bien rapide composée le plus souvent d’un sandwich vite avalé. Savez-vous que les photographes sont souvent les mieux placés pour se rendre compte des performances des pilotes ? Ils voient ceux qui sont trop loin de la bonne trajectoire, ceux qui freinent trop tôt ou même trop tard, ceux qui attaquent fort et les autres moins motivés. Ils possèdent un vrai talent d’observateur derrière leur viseur. Mais n’est-ce pas là leur métier ? Pour certains, en tous cas, ce n’en est pas un. Sans doute pour n’avoir jamais osé franchir le pas, de peur de ne pas réussir et de perdre leur propre emploi.

Ils réussissent pourtant des prises exceptionnelles dont les vrais professionnels deviennent parfois demandeurs, faute d’avoir été au bon endroit au bon moment. Il arrive que le document leur soit payé. Mais trop souvent, il va passer de mains en mains et on en oubliera le vrai propriétaire qui aura pour unique satisfaction de voir sa photo apparaître dans les revues du monde entier. Le soir venu, après avoir déchargé leur moisson dans un ordi presqu’aussi vieux que l’appareil et le téléobjectif d’occasion, ils vont traîner dans le paddock pour chasser quelques clichés plus intimes de l’ambiance et des pilotes en civil. Ensuite, avec un peu de chance et de débrouillardise, il peut leur arriver de se faire inviter dans l’une de ces immenses hospitalities, et s’y restaurer en échangeant quelques bribes de leur journée entre passionnés. Sinon, il restera bien un morceau de saucisson au fond de la bagnole et il suffira de dérouler la couverture un peu tachée, celle qui recouvre le scooter, pour enfin s’allonger et se reposer après une longue nuit de voyage et une vraie journée de travail. Le dimanche soir, après un dernier tour en salle de presse pour présenter les meilleurs clichés à quelques collègues au cas où, il est temps de s’échapper. Et la route va de nouveau défiler, longue et monotone, avant de retrouver une douche salvatrice en arrivant au petit matin à la maison, alors que c’est déjà l’heure d’aller pointer. Alors oui, ils peuvent déranger les vrais professionnels, mais leur enthousiasme, leur passion, leur courage me les rendent tellement sympathiques que je voulais vous les présenter. Croyez-moi, il y a peu de gens capables de faire tout ça sans jamais se plaindre et en souriant la plupart du temps. Moi, je suis simplement admiratif et j’espère les retrouver dès le début de cette nouvelle saison. A bientôt sur les circuits ! ■


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