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CETTE PROMOTION N’EST QU’UNEÉTAPE

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BIRDIE VIEW

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Jeremy Freiburghaus évoque son accession au circuit professionnel européen de référence, le DP World Tour. Le Grison de 26 ans voit encore plus grand.

INTERVIEW JÉRÔME REYNARD

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Jeremy Freiburghaus, que signifie pour vous cette accession au DP World Tour?

C’est mon objectif depuis que j’ai commencé le golf à l’âge de 8 ans. J’ai toujours voulu jouer sur le Tour européen ou sur le circuit américain. C’est un grand pas en avant dans ma carrière et je ne peux que m’en réjouir.

Vous parlez d’un objectif. C’était donc plus qu’un rêve?

Disons que c’était un peu des deux. C’est un petit rêve d’enfant qui se réalise, c’est sûr. Mais si je parle d’objectif, c’est parce que cette promotion sur le DP World Tour n’est pas une finalité. Ce n’est qu’une étape. Je vise encore plus haut.

C’est-à-dire?

J’ai envie de jouer des Majeurs, de gagner des tournois et des Majeurs. Mon véritable rêve, mon but ultime, c’est ça. Ce genre de discours peut surprendre, en Suisse, j’en suis conscient. On n’est pas vraiment habitués à ce type d’accomplissements dans le golf masculin. Mais ce n’est pas pour autant que je dois me l’interdire. Chaque professionnel aspire à ça, même si tout le monde n’ose peut-être pas l’affirmer comme moi.

Quand avez-vous réalisé que vous pouviez faire carrière au plus haut niveau?

Entre mes 10 et mes 14 ans, je jouais très bien. Mon gabarit me permettait de frapper plus fort et plus loin que les autres. J’ai compris que cette puissance pouvait me servir. J’ai connu plus de difficultés sur les parcours à l’âge de 16 ans, mais à la fin de ma carrière d’amateur, j’ai de nouveau performé. Alors je me suis lancé, avec la conviction que j’avais le niveau, car j’avais disputé quelques tournois du Challenge Tour en tant qu’amateur et cela s’était bien passé.

Jeremy Freiburghaus

Le Swiss Challenge était un petit jubilé pour Jeremy Freiburghaus. Le Grison a joué à Saint Apollinaire son 50 e tournoi sur le Challenge Tour. Après son 75 e rang, il se classe actuellement en septième position du classement annuel. Les vingt meilleurs joueurs à la fin de l’année obtiennent un droit de jeu sur le DP World Tour 2023 (anciennement European Tour). Avec le Rolex Challenge Tour Grand Final début novembre, il ne reste plus que quatre tournois au programme de la saison. Pour Jeremy Freiburghaus, la promotion est donc une simple formalité. «Pour le reste de la saison, il s’agit désormais de se placer le mieux possible dans le top 20, ce qui peut être décisif lors des grands tournois de l’année prochaine», explique Stuart Morgan, Performance Manager, à propos de la situation du meilleur professionnel suisse. La base de l’ascension de Jeremy Freiburghaus a été posée par ses deux deuxièmes places en mai et en août, auxquelles s’ajoutent encore cinq classements dans le top 10. Ajouté aux autres résultats, cela représente un prize money à hauteur de 110’000 euros. Aucun Suisse n’avait encore connu un tel succès sur le Challenge Tour. Le Grison de 26 ans devient ainsi le premier Suisse à obtenir un droit de jeu complet depuis Julien Clément (2003 et 2004), Joel Girrbach ayant pu participer à 17 tournois au total en 2019 avec une carte du Tour limitée.

Dans le monde professionnel, il vous a fallu quatre ans pour monter du Pro Golf Tour au DP World Tour en passant par le Challenge Tour.

J’ai beaucoup progressé, chaque année. Mais après, je pense que c’est un rythme d’ascension standard pour un joueur établi sur le DP World Tour.

Globalement, comment expliquez-vous votre réussite?

J’ai expérimenté de bons et de mauvais moments jusqu’ici durant ma carrière. Et les mauvais moments m’ont aidé à comprendre ce que je dois faire pour revenir sur le droit chemin quand ça ne marche pas pour moi. C’est-à-dire faire des choses simples, rester dans ce que je sais faire, sans douter de mon swing.

Lorsqu’on est un Suisse qui aspire au DP World Tour et qu’on entend année après année que le golf helvétique n’arrive pas à établir un joueur au plus haut niveau chez les hommes, comment le viton?

C’est frustrant. On a l’impression que les Suisses ne croient pas en nous. Mais d’un autre côté, ça donne envie de montrer que c’est possible. On est un petit pays, on ne peut pas avoir 10 joueurs sur le Tour comme la France ou l’Angleterre. Mais on est sur le bon chemin, avec beau coup de golfeuses et de golfeurs de qualité. Ça crée une émulation. Per sonnellement, la réussite d’Albane, Morgane et Kim m’a énormément motivé. Trois filles au plus haut niveau mais aucun garçon: ça ne pouvait pas continuer! (il se marre)

Cette attente autour du golf masculin peut-elle nourrir une pression négative chez les joueurs?

C’est probable. Mais de mon côté, je ne me suis jamais dit que je devais être "le" Suisse qui allait enfin jouer sur le Tour. Pour une raison toute simple que j’ai déjà évoquée: j’as pire à plus que cette pro motion.

Vous êtes en outre la preuve qu’on peut réussir en suivant la filière Swiss Golf, sans forcément passer par l’université aux Etats-Unis.

C’est vrai. Durant mon apprentissage dans l’informatique, j’ai eu la chance de tomber sur un employeur conciliant. Pour le reste, je ne peux que remercier Swiss Golf pour son soutien au fil des années. Et je ne parle pas uniquement de son soutien financier. Depuis deux ans, l’encadrement des joueurs est plus individualisé. Par leur expérience et leurs analyses, Stuart Morgan, Performance Director, et Roberto Francioni, Assistant, m’ont énormément aidé, principalement à connaître mon jeu et mes forces afin de mieux pouvoir m’en servir.

Vous avez évoqué le rôle qu’ont eu Albane, Morgane et Kim pour vous. A l’inverse, inspirer les autres et notamment les plus jeunes, est-ce quelque chose qui vous parle?

Absolument. Selon moi, on doit encore en faire davantage dans notre pays pour amener le golf chez les jeunes, pour le rendre plus accessible. Mon rôle, dans ce processus, c’est d’essayer de montrer que c’est un

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes qui espèrent un jour vous imiter?

De continuer à faire des choses simples et de toujours prendre du plaisir.

Comment faiton pour garder le plaisir?

Je vais être honnête: j’ai également connu des phases où le golf me gonflait. Et je suis loin d’être le seul dans ce cas. Quand ça ne fonctionne pas, ce sport n’est pas marrant. Mais je crois qu’en tant que professionnel, il faut être capable de voir le golf comme un hobby de temps en temps, d’avoir des moments de fun avec des amis sur un parcours. Si on pense sans arrêt à la compétition et aux résultats, qu’on voit notre sport comme un travail uniquement, le plaisir peut se perdre. Il faut trouver un bon équilibre.

Qu’est-ce qui va le plus changer pour vous sur le DP World Tour?

La saison est plus longue et plus fournie en tournois. Je vais devoir gérer mon calendrier différemment. Sur le Challenge Tour, il y a encore des semaines sans événement, où on sait qu’on va de toute manière se reposer ou s’entraîner intensivement. Sur le DP World Tour, il va falloir identifier les bons moments pour placer ces plages-là.

Qu’en est-il de votre équipe, de votre entourage?

Je joue bien avec le team qui est le mien actuellement avec mon papa comme coach, ma maman comme nutritionniste, un préparateur physique et un coach mental. Je ne vois pas de raison de changer. En revanche, je vais devoir me trouver un caddie fixe pour la saison.

Le niveau de jeu est-il beaucoup plus haut sur le DP World Tour?

Je dirais qu’il y a surtout une plus grande densité dans le champ des joueurs. Après, de ce que j’ai pu constater sur les quelques tournois du DP World Tour que j’ai déjà eu l’occasion de disputer, l’état et la préparation des parcours sont différents aussi, notamment au niveau des rough et des positions de drapeaux. Je vais certainement devoir ajuster mon jeu et ma stratégie. Sur le Challenge Tour, je suis quelqu’un d’assez agressif. Mais sur des greens plus fermes et avec des positions de drapeaux plus compliquées, il faudra jouer de manière plus intelligente. Je suis capable de m’adapter. •

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