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Ordonnance AI
ÉCLAIRAGE
En novembre 2021, le Conseil fédéral a adopté la révision de l’Ordonnance AI. Or toutes les revendications des organisations de personnes handicapées n’ont pas été prises en compte. Petra Kern, cheffe des Assurances sociales chez Inclusion Handicap, nous explique les points critiques.
Nadja Venetz
Quels sont les aspects critiqués par Inclusion Handicap?
Nous ne sommes pas d’accord surtout sur deux points, le premier étant la procédure d’attribution d’expertises monodisciplinaires de l’AI, c’est-à-dire d’expertises basées sur une seule discipline médicale. Les expertises médicales sont décisives pour évaluer la capacité de travail des personnes handicapées et, par là
RÉVISION DE L’AI
Durant l’été 2020, le Parlement a adopté la révision de la Loi fédérale sur l’assuranceinvalidité (LAI). Fin 2020, le Conseil fédéral a mis en consultation les dispositions de l’ordonnance qui en découlent.
Toutes les organisations de personnes handicapées ont été invitées à soumettre leur avis sur ces dispositions d’ordonnance avant le printemps 2021. L’ASP a aussi pris position à ce sujet (voir Paracontact Été 2021). Le Conseil fédéral a ensuite fait des corrections là où il le jugeait nécessaire. La loi et les ordonnances révisées sont entrées en vigueur au 1er janvier 2022. Nous avions traité de l’une des principales nouveautés dans le Paracontact Hiver 2021, p. 16. même, l’octroi d’une rente AI. C’est pourquoi il est essentiel que la procédure d’attribution soit juste et que les expert·e·s travaillent de manière équitable et sérieuse. La pratique décidée par le Conseil fédéral est présentée comme une procédure de conciliation, mais ce n’en est pas véritablement une. Le second point concerne la détermination du revenu que les assuré·e·s peuvent encore obtenir avec leur handicap, et donc le calcul de l’invalidité. Nous critiquons le fait que l’on continue à s’en tenir aux valeurs statistiques existantes à ce jour, issues de l’enquête sur la structure des salaires (ESS), les fameuses échelles de salaires.
Qu’est-ce que cela signifie pour les personnes concernées?
Face à l’ordonnance d’une expertise monodisciplinaire de l’AI, la personne assurée ne doit pas hésiter à s’opposer activement à l’expert·e proposé·e. Si l’on désigne quelqu’un, l’assuré·e doit avoir son mot à dire. Alors seulement, cela devient une procédure de conciliation. Une démarche que beaucoup n’oseront pas entreprendre.
Le problème des grilles salariales est qu’elles reflètent le niveau de salaire des personnes en bonne santé et surestiment systématiquement les possibilités de revenu des personnes handicapées. Or, dans de nombreux cas, ces barèmes sont déterminants pour calculer l’invalidité et donc pour évaluer les droits à une reconversion ou à une rente AI. Il en résulte souvent des degrés d’invalidité trop faibles, pour lesquels aucune reconversion n’est accordée, ou une rente trop basse, voire l’absence pure et simple de rente. Avec l’introduction du système de rentes linéaire, il devient encore plus important de bien calculer le degré d’invalidité car une estimation de l’invalidité en décalage avec la réalité se répercute de manière encore plus directe qu’avant sur l’allocation des rentes.
Que demande Inclusion Handicap?
Suite à un mandat du Département fédéral de l’intérieur, un rapport a été rédigé sur les expertises médicales au sein de l’AI. Il contient notamment des recommandations relatives à la procédure de conciliation. Nous demandons à ce que ces dernières soient appliquées. Les personnes assurées doivent pouvoir choisir dès le départ parmi différent·e·s expert·e·s proposé·e·s.
Une étude du bureau BASS publiée début 2021 a montré que les échelles de salaires ESS étaient inadaptées pour déterminer le revenu des personnes atteintes d’un handicap. Nous demandons à ce que soient élaborés le plus rapidement possible des barèmes qui reflètent des possibilités salariales réalistes. Des propositions d’expert·e·s sont disponibles à ce sujet. Elles doivent être prises en compte.
Quelle va être la suite?
Pour la procédure de conciliation, nous misons sur une amélioration par voie légale. Le conseiller national Benjamin Roduit a déposé une initiative parlementaire demandant l’application intégrale des recommandations du rapport d’experts lors d’expertises monodisciplinaires de l’AI.