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Décembre 2014 - n°61
Edito La Cour d'Appel de Paris vient, dans un arrêt du 9 octobre 2014, de faire triompher les positions de l'industrie du disque et conteste le principe même de la gestion collective des droits des artistes interprètes.
Cette consécration sans réserves de la loi du plus fort par la Cour d'Appel de Paris constitue une remise en cause fondamentale des principes les plus élémentaires des droits des artistes.
En rejetant l'argumentaire de la SPEDIDAM et de plusieurs syndicats d'artistes interprètes, la Cour a refusé, sauf sur un point mineur, d'annuler l'annexe III de la convention collective de l'édition phonographique de 2008 en ses dispositions concernant les droits de propriété intellectuelle des artistes interprètes de la musique.
La SPEDIDAM forme évidemment un pourvoi en cassation contre cette décision.
Bien que cette convention collective constitue un dispositif qui contraint les artistes à céder leurs droits aux producteurs pour le monde entier et sans limitation de durée, la Cour d'Appel n'a pas craint d'affirmer que l'artiste musicien qui se voyait proposer ces contrats de cession globale des droits disposait d'une capacité totale de négociation. En répétant à plusieurs reprises cette fiction sur laquelle elle a entièrement fondé sa décision, la Cour d'Appel n'a tenu aucun compte des réalités les plus élémentaires dans les relations contractuelles entre artistes et producteurs et des contrats “d'adhésion” généralisés par l'industrie et imposés aux artistes interprètes. Les artistes concernés, qui n'étant pas des artistes de notoriété n'ont d'autre choix que de signer sans discuter les contrats par lesquels ils cèdent leurs droits s'ils veulent pouvoir travailler, apprécieront. Par ailleurs, la Cour a rejeté toute prise en compte de la mission de gestion confiée librement par l'artiste interprète à la SPEDIDAM.
Inacceptable sur les principes, cette situation conduit également à la situation inique existant aujourd'hui dans le marché de la musique en ligne : l'exploitation de masse des enregistrements musicaux sans aucune contrepartie pour les artistes interprètes de la musique autres que ceux disposant du statut de “vedette”. Cette exploitation est autorisée sans contrepartie spécifique par l'annexe de la convention collective qui, selon la Cour, permet à tous les artistes de négocier chaque élément de leurs contrats... mais qui aboutit systématiquement à leur cession globale pour le monde entier et pour 50 années. Il est donc urgent que les pouvoirs publics se saisissent de cette question et organisent un mécanisme légal de gestion collective obligatoire pour les services à la demande, seule possibilité pour un exercice des droits au bénéfice des artistes interprètes. François NOWAK Président