83 Faubourg March 2025

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(Nos couvertures)

Atelier de François, baron GĂ©rard NapolĂ©on en costume de sacre « NapolĂ©on, une collection historique »

Vente Ă  Paris le 25 juin 2025

François-Xavier Lalanne

Gorille dérangé

© Adagp 2025

Estimation : 200 000-300 000 € « Important Design »

Vente Ă  Paris le 20 mai

Zao Wou-Ki

14.5.86, 1986

Estimation : 800 000-1 200 000 € « Art moderne et contemporain »

Vente du soir Ă  Paris le 10 avril

Vente du jour du 2 au 11 avril

Antoine de Saint-Exupéry

15 dessins du Petit Prince (Alger, fin 1943-début 1944)

De la collection Pierre Amrouche et Suzanne Amrouche-Molbert « Livres et Manuscrits »

Vente en ligne du 4 au 18 juin

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La verriÚre du 83 Faubourg Saint-Honoré, les nouvelles galeries de Sotheby's France

Chers lecteurs, En couverture
 impossible de choisir, tantĂŽt ; le Gorille dĂ©rangĂ© de François-Xavier Lalanne ; Le Petit Prince qui nous invite Ă  une dĂ©licate poĂ©sie ; NapolĂ©on Bonaparte, dont le regard nous transperce et enfin une Ɠuvre de Zao Wou-Ki, vĂ©ritable invitation au rĂȘve et Ă  l’évasion.

L’écho de NapolĂ©on rĂ©sonne Ă  travers une vente exceptionnelle, hommage au faste de l’Empire, tandis que Betty Catroux, muse d’Yves Saint Laurent, se dĂ©voile Ă  l’occasion de notre vente « Important Design ».

L’univers des arts se poursuit avec un entretien exclusif de Mauro Moniz SodrĂ©, petit-fils de Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt, dont nous avons l’honneur de disperser la collection. Le regard Ă©rudit de Sir Norman Rosenthal, commissaire de l’exposition David Hockney Ă  la Fondation Louis Vuitton, nous plonge quant Ă  lui dans l’art vibrant et colorĂ© du peintre britannique, qui continue de nous Ă©merveiller.

Vous dĂ©couvrirez le duo mythique Dolce & Gabbana dans un entretien exclusif, oĂč les couturiers dĂ©voilent les coulisses de leur exposition « Du cƓur Ă  la main » au Grand Palais. Entre passion et savoir-faire, ils nous

livrent les secrets d’une mode enracinĂ©e entre artisanat et tradition italienne qui ne cesse d’embrasser la modernitĂ© avec audace.

Caroline Pigozzi nous ouvre les portes de son univers, en partageant son amitiĂ© prĂ©cieuse avec le sculpteur Diego Giacometti. À travers ses mots, l’artiste se rĂ©vĂšle dans toute sa simplicitĂ© et son gĂ©nie poĂ©tique.

Pour les amateurs de littĂ©rature et de cinĂ©ma, le manuscrit de À bout de souffle, prĂ©sentĂ© prochainement en vente, nous transporte au cƓur d’une Ɠuvre culte, oĂč chaque mot porte l’empreinte indĂ©lĂ©bile de la Nouvelle Vague.

Notre-Dame, symbole de Paris, s’anime sous le regard de Claire Tabouret et Ă  travers les mots de Jean-Charles de Castelbajac. Ces artistes insufflent une vie nouvelle Ă  l’ñme de la cathĂ©drale, en dialogue avec la lumiĂšre.

L’Art dĂ©co enfin s’affirme avec grĂące dans une rubrique inĂ©dite, offrant une exploration riche et Ă©clairĂ©e Ă  l’occasion du centenaire de ce style. Avec les contributions d’India Mahdavi et de Jean-Victor Meyers, cette esthĂ©tique sophistiquĂ©e, qui continue d’inspirer et de sĂ©duire, est cĂ©lĂ©brĂ©e avec passion.

Enfin dans la double page « Clairobscur », notre regard se pose sur les portraits des personnalitĂ©s prĂ©sentes Ă  la soirĂ©e d’ouverture de notre nouveau siĂšge parisien, tandis que Pierre Sauvage, figure incontournable de la scĂšne parisienne, partage ses coups de cƓur.

Enfin l’Asie, avec « L’Ɠil averti », vient complĂ©ter ce voyage, ouvrant de nouvelles perspectives sur la crĂ©ation hors de nos frontiĂšres.

Que ce voyage entre héritage et innovation, entre tradition et intime, vous inspire autant qu'il nous a enchantés à le composer.

Vice-président et co-directeur monde Design

Grandeur

3 Édito par Florent Jeanniard

8 DĂ©cors : NapolĂ©on, une collection historique

16 Le dernier cri

18 MĂ©cĂšne, rĂ©sistante, visionnaire : l’hĂ©ritage de Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt avec Mauro Moniz SodrĂ©

28 Haute culture par Pierre Sauvage

30 Diego Giacometti, ce merveilleux voisin par Caroline Pigozzi

32 Iconique avec Betty Catroux

34 Dolce & Gabbana : Italian Touch avec Domenico Dolce et Stefano Gabbana

40 Le détail qui tue

Estimation :

700 000-1 000 000 €

« Art moderne et contemporain »

Vente Ă  Paris le 10 avril

↑ Marc Chagall
AprÚs la lecture ou Homme lisant, vers 1930 © Adagp 2025

Sotheby’s France

83, rue du Faubourg Saint-Honoré

75008 Paris

Tél +33 (0)1 53 05 53 05

Prix

15 €

sothebys.com twitter.com/sothebysfr facebook.com/sothebys Youtube.com/sothebys

Instagram.com/sothebysfr

AgrĂ©ment no 2001–002 du 25 octobre 2001 –ISSN 2267-4993

Responsable de la publication

Pauline de Montgolfier

Directrice de la rédaction

LaurĂšne Beytout

Direction artistique

Emmanuel du Bourg

Élise de Terlikowski

42 NOTRE-DAME DE PARIS RENAISSANCE

44 La mémoire du verre avec Claire Tabouret

46 Au-délà de la mode avec Jean-Charles de Castelbajac

50 Follow back

52 Dans la lumiùre de : David Hockney avec Sir Norman Rosenthal

56 En toutes lettres

58 DOSSIER ART DÉCO par Guy Boyer

62 L'esprit Art déco en trois questions

66 Extraordinaire modernité avec Jean-Victor Meyers

68 Source d'inspiration avec India Mahdavi

70 Clair-obscur

72 L’Ɠil averti

74 Calendrier

80 Ici

82 Moteur

84 Contacts

Correcteur Christophe Parant

Photographes

© Art Digital Studio / Sotheby’s

© Micha Patault

Impression

Groupe Prenant

Remerciements

Bianca Biaggi

Antonia Canat

Laura Corsi

Anne Heilbronn

Florent Jeanniard

Carla Lee

Stefano Moreni

Pierre Sauvage

Léonie Siney

Régie publicitaire

Groupe Beaux Arts

Magazine

Hedwige Thaler

Tél. +33 (0)1 87 89 91 47

© Adagp, Paris, 2025

DĂ©couvrez notre nouveau restaurant imaginĂ© par le chef GaĂ«tan Thibert au cƓur de nos galeries d’expositions.

83 RUE DU FAUBOURG SAINT-HONORÉ, PARIS 8 e

N« NapolĂ©on, une collection historique »

Vente Ă  Paris le 25 juin 2025

Fauteuil de reprĂ©sentation par François HonorĂ© Georges Jacob-Desmalter, d’aprĂšs un dessin de Percier et Fontaine, pour le palais des Tuileries, vers 1804

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Assiette en porcelaine de SÚvres du service égyptien, commandé par Joséphine de Beauharnais, vers 1811

Assiettes en porcelaine de Sùvres du service d’Eugùne de Beauharnais, vers 1813, et divers objets lui ayant appartenu

→

Bicorne de l’empereur, modĂšle rĂ©alisĂ© par Poupard, offert par NapolĂ©on au gĂ©nĂ©ral Mouton aprĂšs la bataille d’Essling en mai 1809, timbale en argent du service de l’Empereur subtilisĂ©e lors du sac de la berline impĂ©riale au soir de la bataille de Waterloo le 18 juin 1815

École française du xixe siùcle

Portrait de l’impĂ©ratrice Marie-Louise

Cadre aux aigles impériales

Ancienne collection de l’impĂ©ratrice

→

Boßte à jeu en acajou au chiffre de Napoléon Ier, attribuée à Martin

Guillaume Biennais

LE DERNIER CRI LE DERNIER CRI

ÉlĂ©ments de travail et d’inspiration appartenant Ă  Karl Lagerfeld Estimation : 500-800 € Vendus : 26 400 € Vente « KARL, Karl Lagerfeld’s Estate V, Le Studio », 31 janvier 2025, Paris

MÉCÈNE, RÉSISTANTE, VISIONNAIRE

L’HÉRITAGE DE

NIOMAR MONIZ SODRÉ BITTENCOURT

« Collection Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt. La LibertĂ© pour dogme » Vente Ă  Paris le 10 avril 2025

: 250 000-350 000 €

↑ Piero Manzoni Achrome, vers 1962
Estimation
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Niomar Moniz Sodré Bittencourt dans les bureaux du journal Correio da Manhã, dans les années 1960

« L’hĂ©ritage de Niomar est celui d’une femme d’exception, Ă  la fois dĂ©fenseure des arts et des libertĂ©s. Elle incarne la rĂ©silience et le courage face Ă  l’adversitĂ©, son combat rappelant que la culture et la presse sont des armes puissantes contre l’oppression. »

Niomar Sodré et son petit-fils Mauro © Carlos Freire
MusĂ©e d’Art moderne de Rio de Janeiro

En un mot, qui Ă©tait votre grand-mĂšre Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt ? Courageuse. Niomar Ă©tait une femme d’une bravoure exceptionnelle, dĂ©fendant inlassablement les libertĂ©s individuelles, l’expression et la presse. Certains ont aussi dĂ©crit son tempĂ©rament comme orageux et indomptable, mais je peux vous assurer qu’elle Ă©tait aussi trĂšs amusante et spirituelle.

Votre grand-mĂšre a fondĂ© le musĂ©e d’Art moderne de Rio de Janeiro dans les annĂ©es 1950. Comment dĂ©cririezvous l’environnement culturel de l’époque ? Quels sont les modĂšles qui ont guidĂ© sa dĂ©marche ?

Dans les annĂ©es 1950, Rio de Janeiro Ă©tait une ville en pleine Ă©bullition culturelle. Le BrĂ©sil cherchait Ă  renforcer ses liens avec les ÉtatsUnis dans le contexte de la guerre froide et l’art moderne y Ă©tait en plein essor. Niomar et son Ă©poux Paulo Bittencourt Ă©taient dĂ©jĂ  de grands collectionneurs passionnĂ©s d’art. Proches de Nelson Rockefeller dont la famille avait fondĂ© le MoMA de New York, ils appartenaient Ă  une Ă©lite intellectuelle et cosmopolite. C’est d’ailleurs sur les conseils et avec le soutien des Rockefeller qu’elle a, en 1952, dĂ©cidĂ© de crĂ©er un musĂ©e d’art moderne Ă  Rio. Le MAM s’est d’abord installĂ© au palais Capanema, un Ă©difice emblĂ©matique conçu par de jeunes architectes brĂ©siliens, dont LĂșcio Costa et Oscar Niemeyer conseillĂ©s Ă  l’époque par Le Corbusier. L’enthousiasme du public fut immĂ©diat : expositions, publications, ateliers d’art pour enfants se multipliĂšrent, soutenus par une colonne dĂ©diĂ©e dans le Correio da ManhĂŁ, le journal appartenant Ă  Niomar et Paulo Bittencourt. En 1958, le MAM s’installa dĂ©finitivement dans un bĂątiment iconique au sein des jardins de Roberto Burle Marx. Ce projet ambitieux, portĂ© par un Ă©lan collectif, fit du MAM une institution phare, comme Niomar l’avait rĂȘvĂ©. Rapidement, le musĂ©e devint une institution incontournable, rassemblant une collection remarquable, dont une Ɠuvre de Jackson Pollock offerte par la famille Rockefeller. Avec l’aide d’amis parmi lesquels Marcel Duchamp et Maria Martins, Niomar parvint Ă  acquĂ©rir des Ɠuvres d’artistes Ă©mergents et confirmĂ©s pour la collection du musĂ©e devenue majeure.

Comment Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt a-t-elle constituĂ© sa collection personnelle ?

Issue d’une famille trĂšs cultivĂ©e et engagĂ©e dans la presse nationale, Niomar fut trĂšs tĂŽt sensibilisĂ©e Ă  l’art et Ă  la culture. Son mari,

INTERVIEW DE Mauro Moniz Sodré

Paulo Bittencourt, était un homme cosmopolite, formé à Cambridge, et ensemble ils explorÚrent les scÚnes artistiques du monde entier. Lors de leurs voyages à New York, ils nouÚrent des relations privilégiées avec les grandes galeries comme celles de Sidney

Alberto Giacometti

Femme debout, vers 1952

© Succession Alberto Giacometti / Adagp Paris

Estimation :

2 500 000-4 000 000 €

Janis et Pierre Matisse. Niomar se rendit aussi au PĂ©rou et au Mexique oĂč elle rencontra Diego Rivera, Frida Kahlo ou encore Clemente Orozco. Ensemble, ils collectionnĂšrent des Ɠuvres modernes et contemporaines, conjuguant art international et brĂ©silien. Leur appartement qu’ils avaient transformĂ© en une vĂ©ritable galerie d’art privĂ©e rĂ©unissait des chefs-d’Ɠuvre d’une qualitĂ© exceptionnelle. Malheureusement, en 1985, une grande partie de cette collection fut dĂ©truite dans un incendie, une perte inestimable pour l’art brĂ©silien.

Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt a jouĂ© un rĂŽle clĂ© durant la pĂ©riode politique troublĂ©e des annĂ©es 1960 au BrĂ©sil. Qu’est-ce qui l’a poussĂ©e Ă  s’engager politiquement ?

Niomar prit la direction du journal Correio da ManhĂŁ en 1963, aprĂšs le dĂ©cĂšs de son mari Paulo. FidĂšle Ă  l’hĂ©ritage du journal, elle s’opposa rapidement et fermement au rĂ©gime militaire installĂ© en 1964. Correio da ManhĂŁ devint un bastion de la contestation, dĂ©nonçant les atteintes aux libertĂ©s et plaidant pour l’amnistie des opposants. Cette posture courageuse lui valut d’ĂȘtre arrĂȘtĂ©e et emprisonnĂ©e, tandis que le journal subissait des attaques violentes. Elle fut finalement acquittĂ©e aprĂšs un procĂšs suivi par des observateurs de l’ONU. Son engagement, marquĂ© par une Ă©lĂ©gance inĂ©branlable face Ă  la rĂ©pression, fit d’elle une figure centrale de la rĂ©sistance intellectuelle brĂ©silienne.

Quels sont l’hĂ©ritage et l’actualitĂ© de Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt aujourd’hui ?

L’hĂ©ritage de Niomar est celui d’une femme d’exception, Ă  la fois dĂ©fenseure des arts et des libertĂ©s. Elle incarne la rĂ©silience et le courage face Ă  l’adversitĂ©, son combat rappelant que la culture et la presse sont des armes puissantes contre l’oppression. Son rĂŽle dans l’histoire du MAM et du Correio da ManhĂŁ reste un modĂšle pour les gĂ©nĂ©rations futures. En mars 2025, la parution d’un livre sur sa vie suivie de la vente de sa collection chez Sotheby’s permettront de mieux mettre en lumiĂšre sa vie hors du commun. Son engagement demeure une source d’inspiration, notamment pour les femmes qui, comme elle, osent dĂ©fier les conventions et poursuivre leurs idĂ©aux avec passion et dĂ©termination. ○

Propos recueillis par Stefano Moreni

Estimation :

1 200 000-1 800 000 € © Succession Picasso

Pablo Picasso
Femme nue Ă  la guitare, 1909

Le prĂ©sident du BrĂ©sil Juscelino Kubitschek, Georges Mathieu, Niomar Moniz SodrĂ© Bittencourt et le comte d’Arquian devant l’Ɠuvre sculptĂ©e de Maria Martins, symbole de BrasĂ­lia

↑ MusĂ©e d’Art moderne de Rio de Janeiro

ART MODERNE ET CONTEMPORAIN

Vente du soir à Paris le 10 avril — Vente du jour du 2 au 11 avril

Wassily Kandinsky

Lustiges Gelb, 1929

Estimation :

600 000-800 000 €

Zao Wou-Ki

14.5.86, 1986

Estimation :

800 000-1 200 000 €

Nicolas de Staël Composition, 1950

Estimation : 400 000-600 000 €

↓

Estimation : 400 000-600 000 €

↑ Jean Dubuffet
La Cave à liqueurs, 1965 © Adagp 2025

CASTLE HOWARD, ÉDITÉ CHEZ

FLAMMARION DANS LA COLLECTION «  STYLE ET DESIGN  »

Un ouvrage fascinant qui plonge le lecteur dans l’univers prestigieux de l’un des plus beaux chĂąteaux d’Angleterre. À travers des photographies Ă©poustouflantes et des rĂ©cits inĂ©dits, ce livre dĂ©voile l’histoire et l’architecture de Castle Howard. Un vĂ©ritable voyage au cƓur du raffinement, parfait pour les amateurs de patrimoine et de dĂ©coration.

GUILLAUME BRESSON AU CHÂTEAU DE VERSAILLES

J’aime beaucoup le travail de ce peintre français, dont le style est Ă  la fois trĂšs classique et extrĂȘmement moderne, et dont j’ai la chance de possĂ©der un diptyque. Dans cette exposition, l’artiste rĂ©investit le mode de reprĂ©sentation classique de la peinture religieuse et d’histoire, et prĂ©sente ses toiles dans les salles d’Afrique. Ses Ɠuvres hyperrĂ©alistes, reprĂ©sentant des personnages en proie Ă  des combats dans des scĂšnes de rue, seront confrontĂ©es aux tableaux historiques d’Horace Vernet, questionnant ainsi la mise en scĂšne de la violence en peinture. Du 21 janvier au 25 mai 2025.

150 ANS DU PALAIS GARNIER

En 2025, l’OpĂ©ra national de Paris cĂ©lĂšbre le 150e anniversaire de ce lieu emblĂ©matique de la capitale, avec notamment un gala anniversaire rĂ©unissant artistes, danseurs et chanteurs de l’OpĂ©ra.

Palais
Garnier
© Vincent
Desailly

Pierre Sauvage est PDG de Casa Lopez et de Tissus Choisis, deux maisons de dĂ©coration sur mesure Ă  Paris. Il est l’auteur de Un art de vivre (2018), de Chez eux (2020) et de Plans de table (2024).

Le palais de la DĂ©couverte rouvrira ses portes le 6 juin 2025. Ce musĂ©e consacrĂ© aux sciences et expĂ©rimentations, créé Ă  l’occasion de l’Exposition universelle de 1937, a marquĂ© mon enfance. J’adorais y aller, en particulier pour son planĂ©tarium. Je suis donc trĂšs curieux de le redĂ©couvrir. Avenue Franklin-Delano-Roosevelt, 75008 Paris. 5 4

LA MODE AU LOUVRE

Le musĂ©e du Louvre, emblĂ©matique de la capitale, prĂ©sente sa premiĂšre exposition mode de l’histoire. Il met en regard ses trĂ©sors issus de l’art classique avec les crĂ©ations des plus grands couturiers et des jeunes talents prometteurs. Une raison de plus de retourner dans ce musĂ©e incontournable !

Du 24 janvier au 21 juillet 2025.

PALAIS DE LA DÉCOUVERTE

C↑

Diego Giacometti, dans son atelier de la rue du Moulin-Vert, avec sa chatte Pita blottie dans ses bras, sous le regard complice de Caroline Pigozzi

© Droits réservés

↗

Diego Giacometti à l’Ɠuvre

© Droits réservés

aroline Pigozzi est d’abord reconnue pour sa vaste expertise du Vatican ; premiĂšre et seule Française Ă  avoir suivi trois papes : Jean-Paul II, BenoĂźt XVI et François. AprĂšs douze annĂ©es passĂ©es au Figaro Magazine, puis trente-deux comme grand reporter Ă  Paris Match, cette vaticaniste confirmĂ©e doublĂ©e d’un Ă©crivain a couvert d’innombrables Ă©vĂ©nements Ă  travers le monde : de l’Afghanistan Ă  l’Arabie Saoudite, l’AmĂ©rique latine, la Mongolie, la Papouasie, l’Afrique, les pĂŽles
 Elle a Ă©galement interviewĂ© cinq prĂ©sidents de la RĂ©publique française et bien sĂ»r le pape François, mais aussi Bernadette Chirac, Brigitte Macron, le roi Mohammed VI, Caroline Kennedy, Brigitte Bardot, Marcello Mastroianni, le dessinateur de bande dessinĂ©e Charles Schulz, auteur de Snoopy, et tant d’autres* ; Caroline Pigozzi a par ailleurs suivi nombre de personnages mythiques dont la reine Élisabeth II. Mais ce que beaucoup ignorent est que cette journaliste audacieuse Ă©tait une grande amie du sculpteur Diego Giacometti qu’elle connut toute jeune chez les Bokanowski et les Tubiana. Une profonde complicitĂ© qui reposait d’abord sur un amour commun et infini des animaux et en particulier des renards. Ainsi sont-ils restĂ©s trĂšs proches jusqu’à la disparition de l’artiste en juillet 1985. Quarante annĂ©es plus tard, elle partage avec nous les Ă©mouvants souvenirs de cette amitiĂ© privilĂ©giĂ©e. ○

* Pourquoi eux aux éditions Plon

Florent Jeanniard

Diego Giacometti parlait doucement, d’une voix chaude et posĂ©e, ponctuĂ©e de temps Ă  autre d’intonations italiennes, hĂ©ritage sans doute de son Tessin natal. Cette façon de s’exprimer avec des mots prĂ©cis donnait Ă  son interlocuteur la voluptueuse impression de pĂ©nĂ©trer dans l’univers privĂ© de l’artiste. D’ĂȘtre en quelque sorte un privilĂ©giĂ© partageant ses confidences
 mĂȘme s’il s’attardait peu sur les femmes qu’il avait sĂ©duites dont je me suis toujours demandĂ© s’il empruntait lĂ  une pudeur tout helvĂ©tique
 Diego aussi raffinĂ© qu’élĂ©gant, gĂ©nĂ©ralement vĂȘtu d’un pantalon de velours cĂŽtelĂ© et d’un pull vert, gris ou brun, parfois teintĂ©s de nuages des poussiĂšres de plĂątre de son atelier, apprĂ©ciait surtout les tĂȘte-Ă -tĂȘte, les bons repas mais pas vraiment les mondanitĂ©s !

Ces sympathiques parenthĂšses lui permettaient notamment des commentaires Ă©clairĂ©s sur l’actualitĂ©, car l’homme qui ne s’arrĂȘtait jamais de travailler sculptait en Ă©coutant la radio qu’il n’éteignait que lorsqu’il recevait ceux qui lui avaient commandĂ© des Ɠuvres. Souvent des personnages en vue – dans les domaines les plus Ă©clectiques : de Marguerite et AimĂ© Maeght, amoureux dĂšs les tout dĂ©buts de son travail, Ă  Robert Badinter, Simone Veil, le professeur Raoul Tubiana, l’historien d’art Jean Leymarie, le dĂ©corateur Henri Samuel, sans oublier JeanPierre Moueix, propriĂ©taire bordelais du grand cru de pomerol ChĂąteau PĂ©trus, pour ne citer qu’eux – traversaient Ă©merveillĂ©s la cour encombrĂ©e des bronzes dĂ©pareillĂ©s de l’atelier de la rue du Moulin-Vert. Un petit monde de proches qui ne se croisaient guĂšre et venaient avec une fausse candeur

« Diego avait le sens des mots, le culte de l’amitiĂ©, de l’amour des animaux, vertus que rien ne pouvait entamer ! »

demander Ă  l’artiste oĂč en Ă©tait leur commande, histoire de s’assurer que le meuble en bronze sculptĂ© ou la piĂšce qu’ils espĂ©raient tant Ă©tait bien inscrit au Bic bleu dans son cahier d’écolier aux pages jaunies. Alors Diego, que rien en rĂ©alitĂ© n’impressionnait, souriait, plissait les yeux
 Puis, pour faire diversion, commentait avec rĂ©alisme la politique, la poĂ©sie et le reste
 Toutefois la maĂźtrise des dates dans ce domaine restait la sienne ; il n’était pas question de faire de caprice avec ce grand artiste ! « Le temps est galant homme », lĂąchait-il, trĂšs gentleman, heureux que ce vieux proverbe italien vienne Ă  son secours
 Ensuite, il refermait dignement son cahier magique, objet des fantasmes de ses visiteurs qui tentaient d’y lancer un regard furtif.

Avec Diego nous parlions de tout, mais d’abord d’animaux, un sujet pour nous Ă©ternel ; les renards et ses deux chats bien sĂ»r – j’ai d’ailleurs hĂ©ritĂ© Ă  sa disparition en 1985 de Pita, le tigrĂ© qui a symbolisĂ© l’ñme de Diego dans mes murs. Car au-delĂ  de m’avoir fait aimer le xive arrondissement et incitĂ©e Ă  m’installer Ă  quelques jets de pierre de chez lui, nous partagions une fascination, le mot n’est pas trop fort, pour les renards. AprĂšs avoir Ă©vacuĂ© ceux de la politique, il me confessait avec Ă©motion sa tristesse quand une ravissante renarde rousse, venue s’abriter pendant la guerre dans sa cour avec ses petits qu’il nourrissait quotidiennement de pain trempĂ© dans du lait, Ă©tait nĂ©anmoins un beau matin repartie en direction de

Montrouge
 « À cette Ă©poque, soulignait-il, j’espĂšre, comme il y avait beaucoup moins de voitures, qu’elle ne s’est pas fait Ă©craser avec ses renardeaux. » C’est ce jour-lĂ  que je lui avais avouĂ© un rĂȘve d’enfant, celui d’apprivoiser un fennec, petit renard des sables aux oreilles pointues qui vit surtout dans le dĂ©sert. Nous pouvions aborder des heures durant toutes sortes de thĂšmes, mais le plus frappant chez cet ami merveilleux Ă©tait son naturel, son humilitĂ© puisque pour lui l’artiste c’était son frĂšre, le grand Alberto. MĂȘme s’il Ă©tait mort depuis 1966, l’ombre tutĂ©laire de cet aĂźnĂ© restait toujours tellement prĂ©sente
 D’ailleurs le matin, il se rendait rue Hippolyte-Maindron dans l’atelier oĂč il avait sculptĂ© avec Alberto et, l’aprĂšsmidi, Ɠuvrait chez lui. Diego n’avait guĂšre de date pour ses commandes. Sa logique dans l’existence Ă©tait d’abord celle de ses pulsions affectives, reposant sur ce que lui dictaient son instinct, son Ă©lĂ©gance de cƓur, son humour, les rires de ses visiteurs et le bon vin


Je laissais Moueix lui apporter de grands crus de sa production et moi j’osais lui offrir des pots de ma gelĂ©e de pomme et groseille sucrĂ©e au miel, recette que j’avais apprise enfant auprĂšs de notre cuisiniĂšre de famille. C’est alors que Giacometti, de sa belle voix, me lançait : « Ce que tu rĂ©ussis Ă  faire de tes mains est formidable ! » Quelle jolie dĂ©claration de sa part ! Diego avait le sens des mots, le culte de l’amitiĂ©, l’amour des animaux
 vertus que rien ne pouvait entamer ! Ainsi l’une de ses plus grandes joies secrĂštes Ă©tait d’ĂȘtre accueilli lorsqu’il rentrait chez lui par ses chats ronronnant de plaisir et se frottant contre ses Ă©pais pantalons. ○

Lalanne
Bar aux autruches Estimation sur demande
Vente Ă  Paris le 20 mai
Retrouvez le questionnaire de Proust de Betty Catroux sur le site de Sotheby's

DOLCE

&& GABBANA

Italian Touch

S’ils devaient choisir une ville italienne, ce serait Rome l’éternelle, ou peutĂȘtre Milan la dynamique, Naples la dĂ©cadente, Venise et sa lagune magique, Palerme et son meltingpot de cultures normande, baroque, byzantine et ottomane... Par leur mode, Domenico Dolce et Stefano Gabbana cĂ©lĂšbrent cette image de l’Italie : exubĂ©rante, foisonnante, jamais classique. Leurs collections Alta Moda, Alta Gioielleria et Alta Sartoria Ă©taient exposĂ©es au Grand Palais, Ă  Paris, Ă  l’occasion de la rĂ©trospective « Du cƓur Ă  la main » qui prĂ©sentait plus de 200 robes et costumes tous plus luxueux les uns que les autres. Une exposition baroque et somptueuse autour de leurs ateliers et de l’excellence du savoir-faire, visitĂ©e par des centaines de milliers de personnes. « C’est un immense honneur car cette rĂ©trospective n’est pas qu’une exposition sur nous, mais elle rend hommage Ă  l’artisanat italien, incarnĂ© par les centaines d’artisans avec qui nous collaborons. Cette exposition est pour eux ! », s’enthousiasme le duo de crĂ©ateurs. Aussi dĂ©diĂ©e Ă  la mode soit-elle, « Du cƓur Ă  la main » raconte aussi l’amour que les deux designers portent Ă  l’art. Rencontre.

L’exposition « Du cƓur Ă  la main » tĂ©moigne de votre relation unique avec l’art ancien. Comment celle-ci influe-t-elle sur votre mode ?

Domenico Dolce : Nous travaillons beaucoup en nous inspirant de l’art ancien qui a cette capacitĂ© unique de raconter des histoires, de nous transmettre des Ă©motions. C’est ce qui le rend si passionnant. Prenez le baroque : il exalte la passion, le drame, le théùtral, l’opulence. Une vision du monde qui nous parle, c’est une mode Ă  laquelle nous aspirons.

Stefano Gabbana : Moi, je dirais que l’art ancien dĂ©gage Ă  la fois du mystĂšre et de la perfection. Ce qui est sĂ»r, c’est que notre passion pour l’art ancien n’est pas qu’esthĂ©tique. Il vĂ©hicule une culture, une spiritualitĂ©. Mais il nous arrive aussi de nous en Ă©loigner. La Renaissance, le classicisme, l’art contemporain, voire le minimalisme, peuvent nous inspirer s’ils permettent de raconter une histoire de maniĂšre plus intense.

Dans l’exposition, il y a aussi de la place pour l’art sacrĂ©...

D. D. : Vous savez, nous Ă©voquons constamment la religion chrĂ©tienne dans nos crĂ©ations. Comme lorsqu’en 2017 nous avons voulu traduire la beautĂ© et le faste de la cathĂ©drale de Monreale, en Sicile, dans notre collection Alta Moda. Chacune des robes reproduisait sequin par sequin les motifs de ses mosaĂŻques.

S. G. : Mais attention, notre passion pour le sacrĂ© ne relĂšve pas uniquement du religieux ! L’idĂ©e des habits liturgiques, leur confection et la symbolique cachĂ©e derriĂšre chaque tenue nous passionnent. Pour nous, le vĂȘtement s’apparente parfois Ă  une rencontre mystique. VoilĂ  pourquoi nous avons inclus dans l’exposition une salle consacrĂ©e Ă  cet univers : on y accĂšde comme dans une chapelle, avec son halo de mystĂšre confĂ©rĂ© par le noir et l’or des habits, la musique liturgique qui rĂ©sonne... J’adore !

Comment s’est dĂ©veloppĂ© votre goĂ»t pour l’art ?

D. D. : Grandir en Italie facilite les choses car l’art est partout ! Au coin d’une rue, nichĂ© dans les palais princiers, affichĂ© au grand jour sur les fresques des Ă©glises, suspendu aux habits traditionnels des processions de PĂąques... C’est de l’art Ă  l’état pur.

S. G. : C’est tout Ă  fait juste. D’autant plus que nous avons toujours Ă©tĂ© passionnĂ©s par l’art et la beautĂ©, ce qui nous a amenĂ©s Ă  dĂ©couvrir, approfondir et collectionner les Ɠuvres.

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Domenico Dolce et Stefano Gabbana

Du cƓur Ă  la main, Dolce&Gabbana « White Baroque » →

Du cƓur Ă  la main, Dolce&Gabbana « Devotion »

« Pour nous, le vĂȘtement

s’apparente parfois Ă  une rencontre mystique. VoilĂ  pourquoi nous avons inclus dans l’exposition une salle consacrĂ©e Ă  cet univers : on y accĂšde comme dans une chapelle, avec son halo de mystĂšre confĂ©rĂ© par le noir et l’or des habits, la musique liturgique qui rĂ©sonne... J’adore !  »

INTERVIEW
Domenico Dolce et Stefano Gabbana

Quel style de collectionneurs ĂȘtes-vous ?

S. G. : Progressivement, nous avons commencĂ© Ă  acheter des Ɠuvres qui nous touchaient, sans pour autant avoir l’ambition de constituer une vĂ©ritable collection.

D. D. : Oui, nous fonctionnons Ă  l’instinct. Et quand on tombe amoureux d’une Ɠuvre, on ressent le besoin impĂ©rieux de l’avoir chez nous. Petit Ă  petit, nous nous sommes rendu compte que nous Ă©tions en train de constituer une collection qui racontait notre esthĂ©tique et notre façon de voir le monde.

Que dit votre collection de vous ?

D. D. : Elle est Ă©clectique ! Elle combine diffĂ©rentes Ă©poques artistiques tous azimuts, du baroque Ă  l’art contemporain, constituĂ©e de peintures, sculptures, photographies. Mais avec un fil rouge : des Ɠuvres Ă  l’identitĂ© forte.

S. G. : Elle raconte notre amour pour les Ɠuvres du passĂ© mais aussi pour des piĂšces plus avant-gardistes. Nos goĂ»ts s’influencent mutuellement. Parfois l’un est attirĂ© par l’art du passĂ©, tandis que l’autre est fascinĂ© par l’art contemporain, et vice versa. Progressivement, nous avons appris Ă  ordonner le chaos de nos sensibilitĂ©s, aussi bien dans notre travail que dans nos prĂ©fĂ©rences artistiques.

D. D. : Il y a plusieurs annĂ©es, Stefano m’a offert un portrait de femme de Tamara de Lempicka, car j’aime profondĂ©ment le travail de cette artiste polonaise. À partir de ce cadeau, nous avons commencĂ© Ă  nous inspirer des influences de l’Art dĂ©co. Le rĂ©sultat a Ă©tĂ© la collection automne-hiver 2000-2001 que nous avons dĂ©diĂ©e Ă  cette artiste !

Avec quels artistes contemporains aimeriez-vous collaborer chez Dolce & Gabbana ?

D. D. : Difficile de choisir ! Mais par exemple, pour l’exposition de Paris, avec la commissaire Florence MĂŒller, nous avons sollicitĂ© des artistes numĂ©riques : Vittorio Bonapace, Quayola ou Felice Limosani, qui ont créé des Ɠuvres spĂ©cifiques pour le projet. Le rĂ©sultat est extraordinaire ! Beaucoup de gens diabolisent l’art numĂ©rique, mais il ne faut pas oublier que, derriĂšre les machines, les ordinateurs, et mĂȘme l’intelligence artificielle, il y a et il y aura toujours un artiste et sa sensibilitĂ© propre.

S. G. : Sans oublier Anh Duong, qui depuis 2012 imagine une Ɠuvre d’art pour chacune de nos collections de Alta Moda. Nous avons rĂ©uni ses peintures dans la toute premiĂšre salle de l’exposition, comme pour introduire la visite.

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Sac baroque en bois laquĂ© et rĂ©sine avec Vierge Ă  l’Enfant peinte Ă  la main, Dolce&Gabbana

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Sandro Botticelli

Le Printemps, vers 1480

Musée des Offices, Florence

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Du cƓur à la main, Dolce&Gabbana, vue de l'exposition

Vous considĂ©rez-vous comme des artistes ?

S. G. : Plus que des artistes, nous essayons d’ĂȘtre les gardiens d’un artisanat qui risque de se perdre.

D. D. : La vĂ©ritĂ© c’est que nous avons lancĂ© nos collections Alta Moda et Alta Gioielleria prĂ©cisĂ©ment pour rendre hommage aux artisans qui, de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration, cultivent et transmettent un savoir-faire unique. L’art de la micro-mosaĂŻque, le tressage des paniers d’osier, la marqueterie de bois, le filigrane d’or, la broderie, les dĂ©corations du carretto sicilien... Nous nous efforçons de traduire ces procĂ©dĂ©s dans nos vĂȘtements. C’est notre façon Ă  nous de faire rayonner le Made in Italy et de clamer haut et fort que seul l’ĂȘtre humain sait crĂ©er de la beautĂ© qui dure. En 2012, nous avons lancĂ© le projet des « Botteghe di Mestiere » : une Ă©cole au sein de notre maison de luxe qui a pour objectif de transmettre les bases de la couture aux jeunes.

Pour finir, quelle Ɠuvre d’art seriez-vous ?

S. G. : La Primavera de Botticelli, pour sa beautĂ©, sa lĂ©gĂšretĂ© et l’idĂ©e du pouvoir de la nature et du changement qu’elle Ă©voque. Encore une fois, en 1993, nous avons conçu des vĂȘtements inspirĂ©s de cette magnifique peinture.

D. D. : Pour moi, ce serait l’intensitĂ© de Guernica de Picasso. ○

Propos recueillis par Ilaria Casati

Journaliste mode Ă  ELLE, Ilaria Casati dĂ©crypte depuis seize ans la scĂšne mode internationale. Enfant, elle se rĂȘve styliste de mode. Ensuite elle se spĂ©cialise dans le journalisme, puis finit par combiner ses deux amours. Depuis, elle Ă©crit les tendances, part en reportage lors des fashion weeks et rencontre les crĂ©ateurs du monde entier.

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Photographie prise par Raymond Cauchetier de Jean-Paul Belmondo et Jean Seberg sur le tournage dÊŒĂ€ bout de souffle
« QU’EST-CE

QUE C’EST, DÉGUEULASSE ? »

Cette phrase culte d’À bout de souffle est connue mĂȘme de ceux qui n’ont pas vu le film. La mort de Belmondo (Michel Poiccard), rue Campagne-PremiĂšre, reste gravĂ©e dans les mĂ©moires.

Au sol, agonisant, Michel comprend qu’il a Ă©tĂ© trahi par Patricia (Jean Seberg), une jeune Ă©tudiante amĂ©ricaine dont il est amoureux. « C’est vraiment dĂ©gueulasse », lui dit-il avant de mourir. Debout au-dessus de lui, en robe rayĂ©e, elle demande au policier qui lui a tirĂ© dessus : « « Qu’est-ce qu’il a dit ? – Il a dit, vous ĂȘtes vraiment une dĂ©gueulasse ». Elle prononce alors ces mots cĂ©lĂšbres : « Qu’est-ce que c’est, dĂ©gueulasse ? » face camĂ©ra, en se passant le doigt sur les lĂšvres comme Michel le fait Ă  plusieurs reprises au cours du film. Gros plan sur elle, elle se retourne avant que n’apparaisse le mot « Fin ».

Godard, Ă  29 ans, rĂ©alise son premier film, une histoire de gangsters dans le style amĂ©ricain. À bout de souffle deviendra un des films cultes de la Nouvelle Vague, aux cĂŽtĂ©s des 400 Coups de Truffaut.

Georges de Beauregard, son producteur, a compris trĂšs vite le talent de Godard et a voulu lui faire rĂ©aliser son premier film. Ce dernier lui apporta alors un synopsis de quatre pages vaguement Ă©crit par Truffaut et Chabrol qui lui plut et qui s’inspirait d’un

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Jean-Luc Godard

À bout de souffle, 1959

Scénario, dialogues, découpage de la bandeannonce, divers documents et photographies. Manuscrit autographe inconnu de 72 pages

Provenance : collection Bruna de Beauregard

Estimation : 400 000-600 000 €

« Livres et Manuscrits »

Vente en ligne du 4 au 18 juin 2025

fait divers qui dĂ©fraya la chronique en 1952 : « LĂ -dessus Godard a tout changĂ© et il a fait ce qu’il a voulu », dira Chabrol.

Sans l’audace de Georges de Beauregard, qui eut du mal Ă  monter financiĂšrement un tel film, lequel nĂ©cessita la mention fictive de Truffaut et de Chabrol au gĂ©nĂ©rique, À bout de souffle n’aurait jamais vu le jour. Le tournage, rapide, se dĂ©roule du 17 aoĂ»t au 15 septembre 1959.

« J’avais Ă©crit la premiĂšre scĂšne (Jean Seberg sur les Champs-ÉlysĂ©es) et, pour le reste, j’avais Ă©normĂ©ment de notes correspondant Ă  chaque scĂšne. Je me suis dit : c’est affolant ! J’ai tout arrĂȘtĂ©. Puis j’ai rĂ©flĂ©chi : en un jour, si on sait s’y prendre, on doit arriver Ă  tourner une dizaine de plans. Seulement, au lieu de trouver longtemps avant, je trouverais juste avant. Quand on sait oĂč l’on va, ce doit ĂȘtre possible. Ce n’est pas de l’improvisation, c’est de la mise au point de derniĂšre minute », dira Godard.

FilmĂ© camĂ©ra Ă  l’épaule, avec des dialogues Ă©crits au dernier moment que Godard demande Ă  ses acteurs de rĂ©pĂ©ter directement en une seule prise, les scĂšnes sont tournĂ©es en muet, avec l’utilisation de la postsynchronisation, des techniques innovantes comme les jump cuts (coupes franches dans les plans) et les faux raccords, les scĂšnes volĂ©es, les consignes courtes donnĂ©es aux acteurs font d’À bout de souffle un film « rĂ©volutionnaire » comme le qualifie Martin Scorcese. En effet, Godard choque et refuse les contraintes, crĂ©ant un « cri » cinĂ©matographique, selon Truffaut. En mai 1967, celui-ci Ă©crit qu’À bout de souffle marque un tournant dĂ©cisif dans l’histoire du cinĂ©ma, Ă  l'instar de Citizen Kane en 1940 : « Godard a pulvĂ©risĂ© le systĂšme, il a fichu la pagaille dans le cinĂ©ma. »

En rupture totale avec ce qui a Ă©tĂ© fait auparavant, Godard transforme le cinĂ©ma et le rajeunit. Il le rĂ©invente en partant d’une histoire conventionnelle, donnant l’impression de dĂ©couvrir les procĂ©dĂ©s cinĂ©matographiques pour la premiĂšre fois. « À bout de souffle Ă©tait le genre de film oĂč tout Ă©tait permis, c’était dans sa nature. Quoi que fassent les gens, tout pouvait s’intĂ©grer au film. J’étais mĂȘme parti de lĂ  », dira-t-il des annĂ©es plus tard.

Ce film ovni, au succĂšs interplanĂ©taire, deviendra l’un des plus grands mythes du cinĂ©ma. À voir ou Ă  revoir ! ○

Anne Heilbronn

Vice-présidente, directrice du département Livres et Manuscrits

Renaissance

Cinq ans aprĂšs l’incendie de Notre-Dame, la cathĂ©drale renaĂźt de ses cendres et retrouve sa splendeur grĂące Ă  une mobilisation extraordinaire et sans commune mesure. Symbole du gĂ©nie français, ce chantier titanesque a rĂ©uni des artisans d’exception – tailleurs de pierre, charpentiers, maĂźtres verriers – aux savoir-faire sĂ©culaires. Cette rĂ©habilitation magistrale place la crĂ©ation contemporaine au cƓur de son approche et affirme ainsi l’ancrage de Notre-Dame dans le prĂ©sent et l’avenir. Parmi les figures marquantes de cette rĂ©ouverture, deux artistes tĂ©moignent de ce dialogue entre tradition et modernitĂ©. Jean-Charles de Castelbajac, crĂ©ateur pop Ă  l’ñme visionnaire, a conçu les habits liturgiques portĂ©s par les cĂ©lĂ©brants lors de la cĂ©rĂ©monie d’inauguration. De son cĂŽtĂ©, Claire Tabouret, l’une des artistes françaises les plus adoubĂ©es de sa gĂ©nĂ©ration, rĂ©interprĂšte la lumiĂšre de la cathĂ©drale avec une sĂ©rie de vitraux figuratifs destinĂ©s Ă  remplacer d’anciennes verriĂšres historiques d’ici fin 2026. Un dialogue fascinant entre mĂ©moire et modernitĂ©, oĂč le sacrĂ© s’écrit au prĂ©sent.

InstallĂ©e dans le top 10 des artistes français les mieux cotĂ©s, Claire Tabouret a Ă©tĂ© retenue Ă  l’unanimitĂ© pour rĂ©aliser 121 m2 de vitraux figuratifs pour la cathĂ©drale Notre-Dame de Paris. Ceux-ci remplaceront, d’ici fin 2026, six verriĂšres en grisaille placĂ©es au xixe siĂšcle par Viollet-le-Duc, classĂ©es monument historique.

uelle est l’impression laissĂ©e, sur la rĂ©tine, par les vitraux de Viollet-le-Duc ? Quel souvenir, quelle sensation ont-ils ancrĂ©s en nous ? C’est un projet quasi impressionniste que l’artiste française Claire Tabouret a imaginĂ© avec les maĂźtres verriers de l’Atelier Simon-Marq pour la crĂ©ation de nouvelles baies dans la cathĂ©drale NotreDame de Paris, sur le thĂšme de la PentecĂŽte. Parmi les huit finalistes sĂ©lectionnĂ©s sur 110 candidatures, Philippe Parreno, Daniel Buren ou encore Yan Pei-Ming avaient aussi Ă©tĂ© auditionnĂ©s : « L’idĂ©e du vitrail dans le vitrail permet de faire le lien, d’ĂȘtre dans le respect de ce qui a Ă©tĂ© fait avant, de ce qu’il y aura aprĂšs
 », a expliquĂ© la plasticienne lors de la confĂ©rence de presse du projet, sur le chantier de Notre-Dame de Paris, le 18 dĂ©cembre dernier. L’artiste prĂ©sentait ce jour-lĂ  des esquisses de 2 mĂštres de haut (contre 7 mĂštres Ă  taille rĂ©elle). « Ce travail s’inscrit dans une histoire justement, un palimpseste, en faisant apparaĂźtre non pas tant une reproduction exacte des motifs de Viollet-le-Duc mais ce qui en serait la mĂ©moire, ce qui en demeurerait dans notre mĂ©moire visuelle » (source Le Figaro Live).

Avant d’obtenir des monotypes, un procĂ©dĂ© qu’elle connaĂźt bien, Claire Tabouret s’est servie de photographies Ă  faible rĂ©solution des vitraux, imprimĂ©es ensuite en grande format, dans une quĂȘte de « l’érosion des formes ». NĂ©e en 1981 Ă  Pertuis – aux portes du Luberon –, ancienne Ă©lĂšve des Beaux-Arts de Paris, la plasticienne a imaginĂ© au fil des annĂ©es une nouvelle peinture figurative, oĂč les formes humaines le disputent Ă  la mouvance du geste, Ă  l’indĂ©termination du rĂ©cit dans un nouveau champ des possibles : « Ma premiĂšre expĂ©rience de peinture, c’est une surface mouvante », racontait Claire Tabouret en 2019, dans une vidĂ©o au sujet des NymphĂ©as de Monet pour le musĂ©e d’Orsay. « La surface de l’eau est en perpĂ©tuel mouvement et, pour moi, la surface du visage a cette mĂȘme impermanence. » RepĂ©rĂ©s trĂšs tĂŽt par François

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Claire Tabouret

Sans Titre (Les DiadĂšmes), 2014

Estimation :

40 000-60 000 €

« Art moderne et contemporain »

Vente du jour du 2 au 11 avril

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Claire Tabouret

Travée 26 - Saint Joseph Courtesy of the artist

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Portrait de Claire Tabouret

© Mathew Scott

Pinault, les milles visages de Claire Tabouret posent dĂ©sormais leur regard partout dans le monde, du MusĂ©e national d’art moderne –Centre Pompidou Ă  l’Institute of Contemporary Art de Miami, en passant par la chapelle privĂ©e du chĂąteau de FabrĂšgues, lieu de crĂ©ation de Pierre Yovanovitch.

« Je me suis posĂ© beaucoup de questions avant de me lancer dans une candidature : je me suis demandĂ© si j’étais lĂ©gitime, ce que j’avais Ă  dire
 », poursuit Claire Tabouret. « Je me suis posĂ© des questions, aussi, sur le bien-fondĂ© du projet. Plus j’en ai appris, plus j’ai lu et plus j’ai Ă©tĂ© enthousiaste car j’ai de suite reconnu une grande audace dans ce projet » (source AFP). Aussi tĂ©mĂ©raires que controversĂ©s, les nouveaux vitraux de Notre-Dame de Paris ont alimentĂ© l’un des feuilletons de l’annĂ©e 2024, constituant pour certains une nouvelle querelle des Anciens et des Modernes, dĂ©cortiquĂ©e par les mĂ©dias du monde entier : « Pour s’immortaliser, “les prĂ©sidents amĂ©ricains ont leurs bibliothĂšques, leurs homologues français, eux, prĂ©fĂšrent le verre”, ironise The Wall Street Journal, aux États-Unis » (Courrier international). Le 11 juillet dernier, alors qu’elle n’en est encore qu’au stade de l’appel Ă  projets, l’initiative du prĂ©sident de la RĂ©publique Emmanuel Macron et de l’archevĂȘque de Paris, Laurent Ulrich, est rejetĂ©e Ă  l’unanimitĂ© par la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture – qui s’était, par le passĂ©, opposĂ©e Ă  la pyramide du Louvre et aux colonnes de Buren au Palais-Royal. Une pĂ©tition, lancĂ©e en dĂ©cembre 2023 par Didier Rykner, fondateur de La Tribune de l’art, a recueilli depuis plus de 270 000 signatures. ○

Propos recueillis par Mathilde Berthier Mathilde Berthier a signĂ© un chapitre sur le couturier Alexander McQueen dans HistoryCube (2021) et a Ă©crit, avec CĂ©line Cabourg, l’ouvrage Claquettechaussette & Corset, paru en 2022 aux Éditions de La MartiniĂšre.

INTERVIEW DE

Jean-Charles de Castelbajac

S’il s’assume aujourd’hui comme « rĂ©tro-futuriste », Jean-Charles de Castelbajac a toujours eu une longueur d’avance. Le couturier, qui a habillĂ© les 700 cĂ©lĂ©brants pour la rĂ©ouverture de la cathĂ©drale Notre-Dame de Paris en dĂ©cembre dernier, fait actuellement partie de l’exposition « Louvre Couture ».

mode audelĂ  de la

Portrait

Ce n’est pas la premiĂšre fois que vous crĂ©ez des vĂȘtements sacerdotaux. En 1997, vous habilliez le pape Jean-Paul II... En 1987 dĂ©jĂ , j’avais travaillĂ© sur la liturgie en prison et c’est Ă  cette Ă©poque que monseigneur Lustiger m’avait remarquĂ© et m’avait dit : « On se reverra. » Dix ans plus tard, il m’a rappelĂ© pour les JournĂ©es mondiales de la jeunesse. Ce fameux arc-en-ciel sur les chasubles, c’était comme un coup de tonnerre : on entrait vraiment en rupture avec le vĂȘtement liturgique traditionnel, dans son Ă©laboration brodĂ©e
 Je faisais presque du sweat-shirt, des ponchos de couleur avec des rayures, dans la continuitĂ© finalement des vĂȘtements liturgiques de prison rĂ©alisĂ©s avec K-Way. L’aumĂŽnier allant de prison en prison, il avait besoin d’un vĂȘtement transformable.

Votre carriĂšre s’est construite dans la transversalitĂ©, dans le dialogue entre les univers et ce, depuis vos dĂ©buts
 Mon travail a toujours Ă©tĂ© protĂ©iforme. J’ai ƓuvrĂ© pendant dix ans autour de l’accumulation. DĂšs 1971, j’ai imaginĂ© mes premiĂšres vestes en serpillĂšre, en upcycling. L’époque que nous vivons ressemble, je trouve, Ă  ce que j’avais envisagĂ© : quand j’ai commencĂ© Ă  travailler sur la rencontre entre l’art et la mode en 1982, avec Robert Mapplethorpe, Keith Haring
 mais aussi quand j’ai engagĂ© de premiĂšres collaborations, avec Weston par exemple.

Vous parlez d’« électriser l’histoire ». Dans « Louvre Couture », jusqu’au 21 juillet, vous exposez d’ailleurs un tailleur Ă  deux Bambi sur fond de tapisserie. Comment trouver le juste Ă©quilibre entre tradition et modernité ? Ma relation avec l’histoire est la plus instruite. Au moment de ma rĂ©trospective au musĂ©e Galliera, en 2007, on m’avait ouvert les tiroirs de l’histoire. Quand vous ouvrez ces tiroirs, vous trouvez le petit costume de Louis XVII au Temple, la robe de chambre de NapolĂ©on Ă  Sainte-HĂ©lĂšne
 Quand vous ouvrez ces tiroirs, ce sont des fantĂŽmes qui jaillissent. J’ai longtemps Ă©tĂ© dans l’anticipation et, aujourd’hui, j’ai tendance Ă  devenir rĂ©trofuturiste : j’aime aller chercher le contenu de l’histoire pour le ramener dans le prĂ©sent.

« ... j’aime aller chercher le contenu de l’histoire pour le ramener dans le prĂ©sent. »

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Collection « L’Archipel Sentimental » Gien × Jean-Charles de Castelbajac

© Philippe Garcia

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Tailleur de Jean-Charles de Castelbajac devant les tentures des « Chasses de Maximilien » Ă  l’exposition « Louvre Couture. Objets d’art, objets de mode », 2025

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Réouverture de Notre-Dame de Paris © Pascal Le Segretain

À l’approche de la rĂ©ouverture de Notre-Dame de Paris, sentiez-vous que vous Ă©tiez en train de faire quelque chose d’important ?

Parfois ça m’a coĂ»tĂ© cher
 mais je suis sĂ»r de moi. Cette dĂ©termination fait que le dernier mystĂšre qu’il restait, c’était la convergence entre les 120 banniĂšres et les 700 vĂȘtements liturgiques. Comment tout cela allait fonctionner ? se regrouper ? La rĂ©ouverture de la cathĂ©drale a constituĂ©, aussi, une mise en lumiĂšre du savoir-faire français. Ma fiertĂ©, ça a Ă©tĂ© d’emmener tous ces artisans du 19M, Lesage, Montex, Maison Michel, Goossens, Paloma
 Ă  cĂŽtĂ© des compagnons. Cette expĂ©rience extraordinaire m’a donnĂ© envie de refaire de la mode alors que ce n’était pas de la mode.

Ce n’était pas de la mode ?

Je pense que la paramentique va au-delĂ  de la mode : elle parle de sacrĂ©. La mode parle du visible et ce travail parle de l’invisible. La paramentique, ce sont des vĂȘtements qui accompagnent une cĂ©rĂ©monie, qui ne sont pas lĂ  pour paraĂźtre mais pour sublimer, pour magnifier, pour transcender le geste du cĂ©lĂ©brant
 VoilĂ  pourquoi je m’y sens aussi confortable : parce qu’il y a cette dimension d’intemporalitĂ©.

Avec plusieurs millions de téléspectateurs, vous avez touché un nouveau public.

Ce coup de projecteur sur mon travail est extraordinaire : des gens trĂšs diffĂ©rents viennent vers moi aujourd’hui, c’est trĂšs touchant
 Au-delĂ  de l’accomplissement qu’elle reprĂ©sente, cette expĂ©rience m’a donnĂ© des ailes. Moi-mĂȘme, tant que je reste « fan », je suis vivant. La « grande forĂȘt » s’est dĂ©peuplĂ©e, avec les disparations de David Lynch, Oliviero Toscani
 mais j’ai aussi beaucoup d’amis que j’admire, de la jeune gĂ©nĂ©ration. ○

Propos recueillis par Mathilde Berthier

DAVID HOCKNEY

INTERVIEW DE

Norman Rosenthal

Sir Norman Rosenthal connaĂźt David Hockney depuis plus de cinquante ans. En tant que secrĂ©taire des expositions Ă  la Royal Academy of Arts de Londres de 1977 Ă  2008, il a organisĂ© en 1995 une exposition consacrĂ©e aux dessins de l’artiste britannique. Il a Ă©galement jouĂ© un rĂŽle clĂ© dans la participation de Hockney Ă  deux expositions estivales de cette mĂȘme institution. Aujourd’hui, en 2025, il est le commissaire invitĂ© de l’exposition David Hockney 25 : « Do remember they can’t cancel the Spring » Ă  la Fondation Louis Vuitton. Cette rĂ©trospective explore les 25 derniĂšres annĂ©es de la carriĂšre de l’artiste et rĂ©unit des Ɠuvres rĂ©alisĂ©es avec une grande diversitĂ© de techniques.

PEINDRE LA VIE

Quand avez-vous rencontrĂ© David Hockney pour la premiĂšre fois ?

J’ai dĂ©couvert le travail de David Hockney en 1966, Ă  Bond Street, notamment Ă  la galerie Kasmin, juste aprĂšs avoir quittĂ© l’universitĂ©. Puis, en 1971, un ami, Karl Bowen, un jeune peintre, m’a emmenĂ© au Hard Rock CafĂ© le soir mĂȘme de son ouverture, prĂšs de Hyde Park Corner. À l’époque, c’était l’endroit le plus branchĂ© de Londres, et nous nous sommes retrouvĂ©s assis Ă  une table avec David Hockney.

Bien plus tard, en 1995, alors que j’étais secrĂ©taire des expositions Ă  la Royal Academy of Arts, j’ai organisĂ©, avec Marco Livingstone, une exposition de ses dessins. J’ai aussi ƓuvrĂ© pour qu’il puisse prĂ©senter certains de ses tableaux du Grand Canyon (1998) dans l’exposition d’étĂ© de la Royal Academy, et en 2012, dans cette mĂȘme exposition, son immense toile Bigger Trees near Warter or/ou Peinture sur le motif pour le nouvel Ăąge post-photographique, composĂ©e de 50 panneaux. Cette Ɠuvre figure d’ailleurs dans l’exposition de la Fondation Louis Vuitton, oĂč elle constitue le point d’orgue d’une salle dĂ©diĂ©e Ă  son travail dans le Yorkshire, rĂ©alisĂ© principalement au cours des dix premiĂšres annĂ©es de ce siĂšcle.

↑ David Hockney

27 March 2020.N1., 2020 lithographie offset

Qu’est-ce qui vous a amenĂ© Ă  ĂȘtre le commissaire de son exposition Ă  la Fondation Louis Vuitton ?

Il y a deux ans, David m’a appelĂ© chez moi Ă  l’improviste et m’a demandĂ© : « Norman, aimeriez-vous organiser mon exposition Ă  la Fondation Louis Vuitton ? » À ce moment-lĂ , j’étais dĂ©jĂ  commissaire de deux autres expositions, l’une Ă  Istanbul, l’autre Ă  Venise. Mais bien sĂ»r, aprĂšs avoir pris une grande inspiration, j’ai immĂ©diatement rĂ©pondu : « Oui ! »

Ces deux derniĂšres annĂ©es ont Ă©tĂ© un immense plaisir et un privilĂšge pour moi. J’ai pu mieux connaĂźtre David, Ă  la fois en tant qu’homme et, surtout, en tant qu’un des plus grands artistes de notre Ă©poque. Il est au sommet, aux cĂŽtĂ©s de Picasso : un artiste aimĂ© et admirĂ© par tous.

Comment interprĂ©tez-vous l’interaction entre sa vision et la diversitĂ© des mĂ©dias qu’il utilise ?

C’est un peintre et un dessinateur classiques, au sens noble du terme : il rĂ©alise des peintures, des gravures et des dessins. Contrairement Ă  Picasso, il ne sculpte pas vraiment. En revanche, il a aussi fait des films, qu’il considĂšre comme des peintures animĂ©es. Lorsqu’il travaille sur iPad, il dessine directement avec ses doigts, comme s’il utilisait un pinceau.

Ce qui m’a frappĂ© chez David, c’est le caractĂšre inĂ©puisable de son travail – encore une fois, exactement comme chez Picasso. Il trouve son bonheur dans la crĂ©ation quotidienne. Son Ɠuvre forme un tout incroyablement cohĂ©rent, malgrĂ© sa diversitĂ©. Il peint ce qui est devant lui, physiquement et mentalement. Par exemple, la maniĂšre dont il a peint les rondins est totalement diffĂ©rente de celle qu’il a utilisĂ©e pour reprĂ©senter les fleurs d’aubĂ©pine. Plus jeune, il peignait les murs des clubs gays, et pourtant, il applique la mĂȘme approche aujourd’hui en peignant les feuilles des pommiers en Normandie.

David Hockney

Christopher Isherwood and Don Bachardy, 1968

Acrylique sur toile, 212,1 × 303,5 cm

David Hockney

May Blossom on the Roman Road, 2009

[Floraison de mai sur la route romaine]

Huile sur huit toiles, 182,9 × 487,7 cm ensemble

David Hockney est passionnĂ© par l’histoire de l’art et a publiĂ© en 2001 Savoirs secrets. Les techniques perdues des maĂźtres anciens. Comment cette exposition reflĂšte-t-elle cet intĂ©rĂȘt ?

David s’intĂ©resse profondĂ©ment Ă  l’histoire de l’art et aux multiples façons dont les artistes ont reprĂ©sentĂ© l’espace en deux dimensions. Il sait qu’il s’inscrit dans une longue tradition et qu’il se tient sur les Ă©paules des maĂźtres du passĂ©, de Fra Angelico et Claude Lorrain Ă  Picasso. Il observe sans cesse les grands artistes et rĂ©interprĂšte leurs Ɠuvres Ă  sa maniĂšre, notamment celles de Van Gogh, Pissarro, Sisley et Picasso dans son travail normand. Ses Ɠuvres rĂ©alisĂ©es en Normandie sont absolument spectaculaires. L’exposition prĂ©sente la plupart des 220 peintures qu’il a rĂ©alisĂ©es en 2020, durant la pandĂ©mie, sur iPad et sur toile. Jonathan Wilkinson, directeur de son atelier, a conçu une magnifique mise en scĂšne de ces Ɠuvres numĂ©riques. Mais l’exposition inclut aussi des toiles de cette pĂ©riode que David continue de retravailler aujourd’hui, mĂȘme depuis Londres.

L’exposition consacre une section Ă  son entourage, avec des portraits de proches et de figures cĂ©lĂšbres comme John Baldessari, Frank Gehry et Harry Styles. Comment choisit-il ses modĂšles ?

Il peint les personnes qu’il connaĂźt, ses amis. Il ne rĂ©alise pas de portraits sur commande, Ă  une exception prĂšs, il y a longtemps. Il m’a d’ailleurs peint deux fois l’annĂ©e derniĂšre, simplement parce que j’étais lĂ , je suppose ! Dans l’un de ces portraits, je porte ma tenue de la Royal Academy of Arts, avec toutes mes mĂ©dailles et mon nƓud papillon blanc.

Comment dĂ©cririez-vous l’expĂ©rience de poser pour lui ?

Il lui faut environ cinq jours pour rĂ©aliser un portrait. Il faut rester aussi immobile que possible, mais il veille Ă  ce que la pose ne soit pas une torture. En gĂ©nĂ©ral, il se concentre sur son travail et parle peu. Il dĂ©crit ses portraits rĂ©cents comme des dessins, mĂȘme sur toile, car il les rĂ©alise directement, sans esquisse prĂ©paratoire. Il cherche avant tout la vĂ©ritĂ© visuelle.

« Il existe une poignĂ©e d’artistes dont le nom ne disparaĂźtra jamais de l’histoire. Un amateur Ă©clairĂ© peut citer cinq Ă  dix artistes par gĂ©nĂ©ration. Un historien de l’art, peut-ĂȘtre vingt-cinq. Mais David Hockney fait partie de ceux dont on se souviendra toujours. »

Une autre section de l’exposition est dĂ©diĂ©e aux dĂ©cors d’opĂ©ra qu’il a rĂ©alisĂ©s dans les annĂ©es 1970 et 1980. Comment a-t-il intĂ©grĂ© son amour de la musique Ă  son Ɠuvre ?

Il adore la musique, il l’écoute en boucle, et elle se transforme en couleurs, en formes et en espaces sur ses toiles. Il entend littĂ©ralement les couleurs. GrĂące Ă  ses appareils auditifs, il peut de nouveau Ă©couter de la musique, et il en profite pleinement. Nous avons eu la chance d’assister Ă  deux concerts extraordinaires dans son atelier : Yuja Wang a jouĂ© pour lui et une poignĂ©e d’invitĂ©s, et Pavel Kolesnikov et Samson Tsoy lui ont interprĂ©tĂ© Le Sacre du printemps de Stravinsky et la Fantaisie en fa mineur de Schubert. Nous avons mĂȘme rĂ©ussi Ă  faire entrer un piano de concert dans l’atelier !

Selon vous, quelle sera la place de David Hockney dans l’histoire de l’art ?

Il existe une poignĂ©e d’artistes dont le nom ne disparaĂźtra jamais de l’histoire. Un amateur Ă©clairĂ© peut citer cinq Ă  dix artistes par gĂ©nĂ©ration. Un historien de l’art, peut-ĂȘtre vingt-cinq. Mais David Hockney fait partie de ceux dont on se souviendra toujours. ○

Propos recueillis par Anna Sansom, journaliste et correspondante pour The Art Newspaper, The Design Edit et Artnet

VICE-PRÉSIDENTE, DIRECTRICE DU DÉPARTEMENT LIVRES ET MANUSCRITS

TOUT LE MONDE CONNAÎT MOLIÈRE, MAIS SON LIBRAIRE ?

Le titre à lui seul éveille notre curiosité.

Comment Jean Ribou, aprĂšs avoir publiĂ© de nombreuses piĂšces sans l’accord de MoliĂšre, envoyĂ© des espions dans les théùtres pour mĂ©moriser ses comĂ©dies et risquĂ© la prison, est-il devenu son libraire exclusif ? Alain Riffaud nous plonge dans l’univers insolite du théùtre et de la librairie Ă  l’époque de Louis XIV.

L’Étonnante Aventure du rusĂ©

Jean Ribou, bouquiniste des quais devenu l’éditeur de l’illustre MoliĂšre d’Alain Riffaud, MatiĂšre Ă  dire, 178 p.

GAINSBOURG ENFLAMME

LA FRANCE

Le 11 mars 1984, lors de l’émission « 7 sur 7 » et devant prĂšs de 10 millions de tĂ©lĂ©spectateurs, Serge Gainsbourg enflamme un billet de 500 francs, provoquant un vĂ©ritable scandale. Ce livre, illustrĂ© d’images inĂ©dites, de manuscrits et d’archives inconnues, tĂ©moigne d’une Ă©poque rĂ©volue et cĂ©lĂšbre l’hĂ©ritage inaltĂ©rable de Gainsbourg, poĂšte et chanteur du xxe siĂšcle.

Serge Gainsbourg. La flamme du scandale de Julien Paganetti, avec les photographies inĂ©dites de Michel GiniĂšs et la collaboration d’Alain Guiavarch, Herscher, 235 p.

POUR LES AMOUREUX DE DÉCOUVERTES LITTÉRAIRES ET PÉDESTRES

AprÚs Stevenson et son célÚbre Voyage avec un ùne dans les Cévennes, Giono nous entraßne avec cet inédit sur les chemins de la Haute-DrÎme en juillet 1939, et attise notre envie de découvrir ces paysages, le livre à la main !

Voyage Ă  pied dans la Haute-DrĂŽme.

Notes pour « Les Grands Chemins » de Jean Giono, Éditions des Busclats, Gallimard, 118 p.

LE CHEF-D’ƒUVRE DE CENDRARS ET LÉGER

Une réédition attendue et rĂ©ussie, celle d’un des livres illustrĂ©s de pochoirs les plus sĂ©duisants du xxe siĂšcle. Pour ceux qui ne peuvent s’offrir l’édition originale, parue en 1919 et qui se vend entre 2 000 et 3 000 €, en voici une parfaitement reproduite pour 34 €.

La Fin du monde filmĂ©e par l’Ange N.-D. Roman de Blaise Cendrars, compositions en couleurs par Fernand LĂ©ger, DenoĂ«l, 56 p.

↓ UNE PLONGÉE SAISISSANTE DANS L’UNIVERS DE NICOLAS DE STAËL

Encore une rĂ©ussite de l’illustrateur StĂ©phane Manel qui, aprĂšs CĂ©leste, imagine, Ă  travers ses dessins et ses souvenirs d’enfance, les derniers jours de Nicolas de StaĂ«l. Roman graphique ou livre d’art ?

Cet ouvrage, oĂč l’on cĂŽtoie Picasso, Matisse, Braque ou Char, ne peut que susciter notre admiration.

Exercices de Staël de Stéphane Manel, Seghers, 239 p.

ADÈLE HUGO SOUS UN JOUR NOUVEAU

Cet ouvrage met en lumiĂšre la personnalitĂ© vibrante et sombre d’AdĂšle H., souvent Ă©clipsĂ©e par l’ombre de son pĂšre. Ce livre, enrichi de photos, de lettres, de journaux intimes et d’écrits inĂ©dits, nous invite Ă  redĂ©couvrir son histoire et sa voix.

AdÚle Hugo. Ses écrits, son histoire de Laura El Makki, préface par Isabelle Adjani, Seghers, 213 p.

VRAI OU FAUX ?

DĂ©couvrez un bijou imaginĂ© par le gĂ©nial libraire du 7L : un catalogue de 1921, rĂ©vĂ©lant des hachures fascinantes –simples, composĂ©es, alphabets, ou vanitĂ©s. Plongez dans un univers oĂč chaque page invite Ă  la crĂ©ativitĂ©.

À vos crayons, plumes ou pinceaux ! Compagnie française des hachures. Fac-similĂ© du catalogue de 1921, prĂ©sentation de Vincent Puente, L’Éditeur singulier et Vincent Puente, 42 p.

BEAUX LIV R ES

↗ HISTOIRE D’UN AMOUR EN MOTS ET EN DESSINS

En sortant de l’exposition Niki de Saint Phalle au Grand Palais (juin 2025janvier 2026), n’oubliez pas, en rentrant chez vous, de dĂ©ployer ce livre-objet de 9 mĂštres de long pliĂ© en accordĂ©on. Cette petite merveille Ă©ditoriale, parue en 1971 et introuvable depuis, est ici reproduite Ă  l’identique de l’édition originale.

My Love de Niki de Saint Phalle, Gallimard.

← LA LIVE DE JULLY : POUR L’AMOUR DE L’ART

Ange Laurent La Live de Jully, amateur Ă©clairĂ©, dessinateur, graveur, musicien, historien, bibliophile, collectionneur et mĂ©cĂšne, est une figure incontournable du SiĂšcle des lumiĂšres. Cet ouvrage collectif nous plonge dans l’univers de cet homme aux multiples facettes, Ă  travers ses collections oĂč se cĂŽtoient peintures, sculptures, mobilier, objets d’art, estampes, livres et coquilles.

Ange Laurent La Live de Jully (17251779). Un grand amateur Ă  l’époque des LumiĂšres. Ouvrage collectif sous la direction de Marie-Laure de Rochebrune, conservateur gĂ©nĂ©ral honoraire, Éditions LiĂ©nart, 487 p.

↑ LA CHASSE AUX FOULARDS

Benoit Pierre Emery, crĂ©ateur passionnĂ©, a rassemblĂ© en 20 ans plus de 10 000 carrĂ©s de soie, accessoire de mode ultime. Ce catalogue en reproduit 2 178 et se dĂ©vore comme un livre. C’est un vĂ©ritable voyage au cƓur des couleurs, des formes gĂ©omĂ©triques et des crĂ©ations, qu’elles soient signĂ©es ou anonymes. En le refermant, on ressent une envie irrĂ©sistible de plonger dans cet univers chatoyant et inspirant.

Carré. A Vintage Scarf Collection de Benoit Pierre Emery, Steigl.

Le 28 avril 1925, l’Exposition internationale des arts dĂ©coratifs et industriels modernes ouvre ses portes sur l’emplacement des expositions universelles de 1889 et 1900 Ă  Paris, entre le Champ-de-Mars et les Champs-ÉlysĂ©es. Pendant six mois, des visiteurs venus du monde entier arpentent ses allĂ©es et visitent des pavillons montrant les rĂ©alisations les plus innovantes en matiĂšre d’architecture intĂ©rieure et de mobilier. Par la prĂ©sence remarquĂ©e d’artistes modernes dĂ©laissant les courbes florales de l’Art nouveau pour un style aux lignes plus orthogonales et aux motifs stylisĂ©s, elle devient rapidement l’emblĂšme du style Art dĂ©co. Reprenant la sobriĂ©tĂ© et la rigueur prĂŽnĂ©es par les crĂ©ateurs de la SĂ©cession viennoise quelque vingt ans plus tĂŽt, ce modernisme Ă  la française s’y dĂ©veloppe en particulier dans l’HĂŽtel du collectionneur, dessinĂ© par l’architecte Pierre Patout et dĂ©corĂ© par l’ensemblier JacquesÉmile Ruhlmann, et dans le Pavillon d’une ambassade française, rĂ©alisĂ© par la SociĂ©tĂ© des artistes dĂ©corateurs. Autour des meubles en bois prĂ©cieux de Ruhlmann, de Chareau et de Groult, des tapis de Lurçat, des laques de Dunand, des sculptures de Bourdelle et des toiles de Dupas se marient harmonieusement et crĂ©ent deux Ă©crins abritant des objets aux formes homogĂšnes. « L’art 1900 fut l’art du domaine de la fantaisie, explique le

peintre Charles Dufresne, celui de 1925 est du domaine de la raison. » Si l’Art dĂ©co (une appellation qui n’apparaĂźt que dans les annĂ©es 1960) se caractĂ©rise par son goĂ»t pour la symĂ©trie classique, son ornementation discrĂšte et ses lignes fluides rappelant la streamline des paquebots, il lorgne Ă©galement vers la fonctionnalitĂ© et certaines inventions formelles que reprendront les membres de l’UAM (Union des artistes modernes) Ă  partir de 1929 dans un registre plus industriel. L’Art dĂ©co ne dure donc qu’une petite vingtaine d’annĂ©es et ses crĂ©ations, aux matĂ©riaux onĂ©reux, sont destinĂ©es Ă  une clientĂšle Ă  la recherche de luxe et de perfection. C’est pourquoi, entre coĂ»t de la production et raretĂ© des piĂšces, l’Art dĂ©co atteint aujourd’hui des sommets. D’Ernest Boiceau Ă  Gustave Miklos, de Tamara de Lempicka Ă  Eileen Gray, des prix records accompagnent ces meubles en galuchat et macassar, ces tapis au point Cornely ou ces toiles prĂ©cieuses prisĂ©es par de grands collectionneurs internationaux. « L’Art dĂ©co est un art total », explique le dĂ©corateur Jacques Grange qui l’a dĂ©couvert trĂšs tĂŽt, lors de vacances dans la maison moderniste des Noailles, construite par Robert Mallet-Stevens Ă  HyĂšres. ○

La nef du musée des Arts décoratifs

Les Arts Décoratifs / Luc Boegly

UNE ANNÉE ART DÉCO

Le musĂ©e des Arts dĂ©coratifs (MAD) Ă  Paris lance dĂšs le mois de mars une annĂ©e Art dĂ©co. D’abord, Ă  l’occasion de l’ouverture de son nouveau cabinet d’arts graphiques amĂ©nagĂ© grĂące au mĂ©cĂ©nat de Sakurako et William Fisher et en l’honneur d’HĂ©lĂšne David-Weill et de Maggie Bult, avec une exposition autour des dessins, papiers peints et photographies de Jacques-Émile Ruhlmann (du 5 mars au 8 juin). Le musĂ©e possĂšde en effet vingt-six carnets de dessins, lĂ©guĂ©s par sa veuve en 1959, ainsi que les dĂ©corations murales de la CitĂ© universitaire, rĂ©alisĂ©es en 1933 et sauvĂ©es en les dĂ©tachant du mur en 2022. Le deuxiĂšme point fort a lieu pendant l’étĂ© avec « Paul Poiret, couturier, dĂ©corateur et parfumeur », montĂ© par Marie-Sophie Carron de la CarriĂšre. Il s’agit de la premiĂšre monographie dĂ©diĂ©e Ă  ce crĂ©ateur fascinĂ© par les Ballets russes et qui s’associe avec le peintre Raoul Dufy pour crĂ©er une entreprise de dĂ©coration et d’impression de tissus, La Petite Usine (du 25 juin au 11 janvier).

Rappelons au passage que l’Atelier Martine, fondĂ© par Poiret pour produire tous les accessoires de la maison, avait son magasin au 83 de la rue du Faubourg-Saint-HonorĂ©, qui est aujourd’hui le nouveau siĂšge de la maison Sotheby’s. Enfin, Ă  l’automne, l’historien de l’art Emmanuel BrĂ©on est chargĂ© de rĂ©accrocher les collections permanentes de l’institution parisienne autour des grandes donations comme celles d’HĂ©lĂšne de Rothschild, de Jeanne Lanvin et de Jacques Doucet. En complĂ©ment, une exposition sur l’Exposition de 1925 (du 21 octobre au 29 mars 2026) Ă©voque les changements de la sociĂ©tĂ© d’alors, les productions des grands magasins Primavera, Pomone et Studium, et surtout les crĂ©ations Art dĂ©co des grandes marques, de Puiforcat Ă  Lalique et Baccarat. N’oubliez pas, bien sĂ»r, un dĂ©tour par la galerie des bijoux du MAD, riche en piĂšces des annĂ©es 1930 de Raymond Templier, Jean DesprĂ©s et Jean Fouquet ainsi que des grandes maisons telles que Boucheron et Cartier. Quant Ă  la CitĂ© de l’architecture et du patrimoine, elle propose de redĂ©couvrir les Ă©difices emblĂ©matiques de l’Exposition de 1925 grĂące Ă  une maquette immersive du 24 octobre au 29 mars 2026. ○

LE BAL ART DÉCO

Sous la direction artistique de la rĂ©alisatrice Sofia Coppola et avec Jean-Victor Meyers en prĂ©sident du comitĂ© d’honneur, le musĂ©e des Arts dĂ©coratifs Ă  Paris lance cet Ă©tĂ© son Grand Bal. Aussi prestigieux que le Met Gala, organisĂ© au profit du Costume Institute du Metropolitan Museum of Art de New York, et aussi glamour que le bal des TĂȘtes, donnĂ© par Alexis de RedĂ© Ă  l’hĂŽtel Lambert en 1956, il veut ĂȘtre « la cĂ©lĂ©bration de la mode et de l’art de vivre Ă  la française » mais aussi un soutien au musĂ©e et Ă  ses collections. Un nouveau dĂ©fi pour celle qui a fait virevolter anachroniquement Marie-Antoinette au palais Garnier dans son film de 2006 et a donnĂ© Ă  son Paris du xviiie siĂšcle la lĂ©gĂšretĂ© d’une mousse fouettĂ©e. « Cette ville, que je considĂšre comme ma seconde maison, assure Sofia Coppola, me touche profondĂ©ment, et cĂ©lĂ©brer un tel symbole de la culture française est une source d’inspiration particuliĂšre ». Rendez-vous est donc pris pour le 6 juillet sous les voĂ»tes de la nef Lefuel au dĂ©cor xixe. En ces premiers jours de l’étĂ©, Paris redevient la ville de la fĂȘte et rĂ©affirme sa place de centre de la mode. ○

Jean Dunand

Pendule CaducĂ©e, piĂšce unique, 1913 « Collection FĂ©lix Marcilhac », 12 mars 2014

LÊŒesprit Art dĂ©co en trois questions

Avec Christian Boutonnet, disparu en 2020, Rafael Ortiz a fait de la galerie L’Arc-en-Seine, au 27 rue de Seine, un havre de paix et d’élĂ©gance pendant plus de vingt-cinq ans.

Trait → Ce qui caractĂ©rise le mieux l’Art dĂ©co est l’élĂ©gance gĂ©omĂ©trique de la ligne, fonctionnelle et rĂ©solument moderne, mise en valeur par le savoir-faire d’artistes exceptionnels.

Objet → Les crĂ©ations en plĂątre d’Alberto Giacometti pour Jean-Michel Frank, notamment les iconiques Albatros et Vase Aigle, car elles mĂȘlent Ă  la fois toute la poĂ©sie, la simplicitĂ© et la puissance du sculpteur au service de l’esthĂ©tique raffinĂ©e d’un dĂ©corateur.

Lieu → La villa Cavrois Ă  Croix (Nord), Ɠuvre d’art totale de Robert MalletStevens, avec ses volumes dĂ©pouillĂ©s, ses toits-terrasses et un confort exceptionnel. ○

CHESKA VALLOIS

InstallĂ©e depuis 1981 au 41 rue de Seine, Cheska Vallois dĂ©fend l’Art dĂ©co depuis les annĂ©es 1970. Dans sa galerie ou sur ses stands de la Biennale des antiquaires, elle a montĂ© des expositions importantes sur les plus grands crĂ©ateurs Art dĂ©co comme JeanMichel Frank, Paul Iribe ou Eileen Gray.

Trait → La modernitĂ© totale de l’époque Art dĂ©co et la magnificence des matĂ©riaux employĂ©s (ivoire, Ă©bĂšne, galuchat, marqueterie de paille).

Objet → La chaise longue Pirogue (1919) d’Eileen Gray, en bois laquĂ©, que j’avais prĂ©sentĂ©e en 2000 au Grand Palais.

Lieu → Les salles du musĂ©e des Arts dĂ©coratifs avec les Ɠuvres de Pierre Legrain ayant appartenu au couturier et collectionneur Jacques Doucet, telle la Chaise africaine (vers 1924). ○

JEAN-BAPTISTE DE PROYART

Libraire et expert en livres anciens et modernes, Jean-Baptiste de Proyart a créé le dĂ©partement des livres chez Sotheby’s Ă  Paris en 1998 (ventes Jaime Ortiz-Patiño, Renaud Gillet, Charles Hayoit
). Depuis 2004, il anime avec sa famille la boutique de livres et manuscrits au 21 rue Fresnel Ă  Paris.

Trait → L’apparition de formes nouvelles dans tous les domaines de l’Art dĂ©co me semble essentielle. C’est ce bouleversement des formes anciennes, créé par quelques artistes seulement et aboutissant Ă  une transformation gĂ©nĂ©ralisĂ©e du monde des objets, qui m’a toujours fascinĂ©. À cette Ă©poque, le livre a vĂ©cu une transformation complĂšte avec Pierre Legrain, Jean Dunand et François-Louis Schmied. Qui, avant Legrain, aurait songĂ© Ă  placer des coquilles d’Ɠufs sur les dĂ©cors de reliure ?

Objet → La reliure de Germaine Schroeder rĂ©alisĂ©e pour Coco Chanel sur le livre Vaslav Nijinsky. Six vers de Jean Cocteau. Six dessins de Paul Iribe.

Lieu → Le restaurant Prunier avenue Victor-Hugo et son dĂ©cor de 1924. On s’y croirait ! ○

Depuis 2008, Julie Blum a repris la galerie de sa mĂšre Anne-Sophie Duval au 5 quai Malaquais. Elle y poursuit le travail sur l’Art dĂ©co effectuĂ© par celle-ci depuis les annĂ©es 1960, et prĂ©sente Ă©galement des crĂ©ations contemporaines de Sylvain Dubuisson et SalomĂ© Lippuner.

Trait → Pour l’Art dĂ©co, le pluriel s’impose car on devrait parler des styles Art dĂ©co allant du baroque d’Armand Rateau jusqu’au purisme minimaliste de Jean-Michel Frank en passant par le style voluptueux d’AndrĂ© Groult. Pour moi, il s’agit davantage d’un mouvement que d’un style.

Objet → Le paravent et le bureau en laque de Jean Dunand, qui trĂŽnaient sur le stand de ma mĂšre imaginĂ© en 1972 par Karl Lagerfeld pour la Biennale des antiquaires. Celui-ci avait installĂ© au sol des dalles en caoutchouc pastillĂ© noires et des dalles de verre en hommage Ă  la Maison de verre de Pierre Chareau.

Lieu → La villa E-1027 d’Eileen Gray Ă  Roquebrune aussi bien que la boutique Guerlain sur les Champs-ÉlysĂ©es avec les dĂ©cors de Frank et Giacometti. ○

↑ Villa Cavrois, façade sud © Jean-Luc PaillĂ©Centre des monuments nationaux

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Le bureau de Jacques Doucet

↑ Villa E-1027
© Benjamin Gavaudo – CMN ↗
Alberto Giacometti Albatros

AMÉLIE MARCILHAC

Fille de FĂ©lix Marcilhac, le cĂ©lĂšbre marchand et collectionneur Art dĂ©co, AmĂ©lie Marcilhac est experte dans ce domaine et collabore avec une trentaine de commissaires-priseurs Ă  Paris et en rĂ©gion. Elle est l’auteur de plusieurs ouvrages dont une monographie sur Marcel Coard et le catalogue raisonnĂ© de Jacques Majorelle Ă©crit avec son pĂšre.

Trait → Le choix des matĂ©riaux et la noblesse affichĂ©e par rapport Ă  l’Art nouveau voulaient donner une nouvelle crĂ©dibilitĂ© aux crĂ©ations mobiliĂšres et renforcer l’idĂ©e de piĂšces uniques.

Objet → Le bureau de Jacques Doucet, entiĂšrement recouvert de python, qui a Ă©tĂ© donnĂ© par Mme Doucet au musĂ©e des Arts dĂ©coratifs. Ce fut l’un de mes premiers chocs esthĂ©tiques pour l’Art dĂ©co.

Lieu → Le musĂ©e de la Piscine Ă  Roubaix car c’est un lieu exceptionnel avec une superbe architecture Art dĂ©co et des collections qui dĂ©notent rĂ©ellement par rapport aux autres musĂ©es concernant cette pĂ©riode. ○

EMMANUELLE CHASSARD ET SÉBASTIEN MOINET-BECHAR

InstallĂ©e depuis 2013 au 26 rue de Seine, la Galerie Parisienne prĂ©sente des bijoux, du mobilier et des objets d’artistes du xxe siĂšcle. D’une parure de Suzanne Belperron Ă  un bracelet de RenĂ© Boivin, c’est le « Radical Chic » que mettent en avant Emmanuelle Chassard et SĂ©bastien Moinet-Bechar.

Trait → La gĂ©omĂ©trie nous semble la caractĂ©ristique la plus importante de l’Art dĂ©co. On la retrouve dans de multiples crĂ©ations joailliĂšres de cette Ă©poque.

Objet → La parure Girafe de Jean Dunand en orĂ©um et laque ayant appartenu Ă  JosĂ©phine Baker. Il s’agit d’une « vĂ©ritable relecture ethnique combinĂ©e aux subtiles gĂ©omĂ©trisations cubistes », a Ă©crit Yves Badetz.

Pierre Chareau

Lampadaire SN31 dit aussi

La Religieuse, vers 1928

« Collection Henri Chwast », 21 novembre 2016

Lieu → La Maison de verre de Pierre Chareau, situĂ©e rue Saint-Guillaume et construite entre 1928 et 1931 Ă  la demande de Jean et Annie Dalsace. ○ ↑ Le grand hall de la

↑ Le musĂ©e de la Piscine Ă  Roubaix

Alain Leprince

Maison de verre de Pierre Chareau, vers 1966

Extraordinaire modernité

Jean-Victor Meyers, petit-fils de Liliane Bettencourt, grand amateur et collectionneur d'Art déco, nous parle de ce courant artistique et de ses grands représentants.

Vous collectionnez, entre autres, des Ɠuvres de la pĂ©riode Art dĂ©co. Qu’aimez-vous dans ces crĂ©ations des annĂ©es 1920-1930 ?

Je suis d’abord sensible Ă  la perfection des proportions. Mais j’apprĂ©cie aussi particuliĂšrement la simplicitĂ© et l’élĂ©gance des lignes que rehaussent des matiĂšres parfois extrĂȘmement prĂ©cieuses ou au contraire pauvres.

Êtes-vous plutît sensible à la ligne rigoureuse d’un meuble de Ruhlmann ou aux courbes sensuelles des vases de Dunand ?

La rigueur de Jacques-Émile Ruhlmann est trĂšs souvent contrebalancĂ©e par des courbes sensuelles ! Il est, selon moi, le grand reprĂ©sentant d’un premier Art dĂ©co, oĂč priment l’excellence du savoir-faire et le raffinement ultra-chic de la ligne. Mais une vision plus Ă©purĂ©e du meuble apparaĂźt au mĂȘme moment avec de grands crĂ©ateurs comme Jean-Michel Frank ou Pierre Chareau et elle me touche tout autant.

Est-ce que le lien de ces objets avec la pĂ©riode de leur crĂ©ation (la France de l’entre-deux-guerres) est important pour vous ?

Il y a d’abord le lien de ces objets avec leurs crĂ©ateurs qui est important pour moi. J’adore Frank et Giacometti par exemple, qui sont des personnalitĂ©s remarquables au-delĂ  de leur singularitĂ© artistique. Mais, surtout, j’aime l’idĂ©e de cette Ă©poque qui a Ă©tĂ© particuliĂšrement propice Ă  la crĂ©ation dans tous les domaines et Ă  un certain art de vivre extrĂȘmement raffinĂ© et malheureusement rĂ©volu.

Les noms des grands crĂ©ateurs de l’Art dĂ©co, tels Rateau, Iribe ou Frank, sont souvent associĂ©s Ă  leurs commanditaires comme Jeanne Lanvin ou Jacques Doucet. Que pensez-vous de ces incroyables collaborations artistiques ?

On dit qu’on a les amis qu’on mĂ©rite ; peutĂȘtre les commanditaires de valeur ont-ils les artistes qu’ils mĂ©ritent Ă©galement ?

Le couturier Jacques Doucet s’est créé un univers Ă  nul autre pareil, oĂč les artistes de son temps ont su rĂ©pondre Ă  sa demande et imaginer pour lui des Ɠuvres exceptionnelles d’une grande modernitĂ©. Eileen Gray, Pierre Legrain sont nĂ©s aussi avec Doucet. Les Noailles, François Mauriac, Templeton Crocker et tant d’autres ont saisi chez Jean-Michel Frank le pouvoir expressif du vide, la beautĂ© des matiĂšres, la puretĂ© de la ligne, tout ce qui fait que chacun de ses dĂ©cors est unique et immĂ©diatement identifiable. Quant au maharadjah d’Indore, il a attirĂ© toute la crĂ©ation contemporaine pour donner vie Ă  un palais d’une modernitĂ© inĂ©galĂ©e Ă  l’époque pour l’Inde.

Les chefs-d’Ɠuvre de l’Art dĂ©co atteignent aujourd’hui des prix stratosphĂ©riques. Croyez-vous que seule leur raretĂ© les justifie ?

Les prix extraordinaires que peuvent atteindre les chefs-d’Ɠuvre Art dĂ©co sont Ă©videmment dus Ă  leur raretĂ©, mais aussi Ă  leur provenance. De moins en moins d’Ɠuvres sortent sur le marchĂ©, toutes sont dans des collections prestigieuses et l’apparition d’une piĂšce remarquable en vente est forcĂ©ment un Ă©vĂ©nement qui se paye cher. Ces Ɠuvres sont aussi le tĂ©moignage d’une Ă©po-

que trĂšs courte de l’histoire de l’art et du mobilier, et aussi de l’histoire tout simplement. Ces annĂ©es 1920-1930 sont un moment de renouveau, d’espoir et d’extraordinaire modernitĂ© avant un basculement tragique. ○

Propos recueillis par Guy Boyer, directeur de la rédaction de Connaissance des arts.

Jean-Victor Meyers

© David Sims − Art Partner / Trunk Archive

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Jean-Michel Frank

Cabinet, piĂšce unique, vers 1935

Vendu 3 681 500 € (record mondial pour l’artiste) « Collection FĂ©lix Marcilhac », 12 mars 2014

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Jean-Michel Frank

Table basse Aragon, le modÚle créé en 1928

Vendu 642 600 € (record mondial pour une table Aragon) « Important Design », 22 novembre 2022

Source dÊŒinspiration

Architecte d’intĂ©rieur de rĂ©putation internationale, India Mahdavi aime l’Art dĂ©co pour ses motifs stylisĂ©s et ses matĂ©riaux originaux mais l’adapte, dans ses crĂ©ations, Ă  l’aune de la contemporanĂ©itĂ©.

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India Mahdavi et la table basse Bugs Bunny © Alice Rosati

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Jean Dunand

Manteau de cheminée, piÚce unique, 1926

Vendu 1 927 500 €

« Collection Henri Chwast », 21 novembre 2016

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Paul Iribe

Fauteuil Nautile, 1906

Vendu 781 500 €

(record mondial pour l’artiste)

« Collection FĂ©lix Marcilhac », 12 mars 2014

L’Art dĂ©co est-il une de vos sources d’inspiration ?

Plus que le style Art dĂ©co, ce qui m’intĂ©resse dans cette pĂ©riode est l’ornementation, la richesse des motifs et des matiĂšres, toutes les techniques employĂ©es pour leur mise en Ɠuvre, les savoir-faire, le « craft » dans tous les aspects dĂ©coratifs. Je suis attentive aux matĂ©riaux choisis par ces crĂ©ateurs des annĂ©es 1920-1930. Ils utilisent cependant, de maniĂšre un peu arrogante, l’ébĂšne, le galuchat ou l’écaille, venus de l’autre bout de la planĂšte. Des matĂ©riaux ostentatoires, onĂ©reux et qui ne sont plus du tout en adĂ©quation avec notre Ă©poque soucieuse de protĂ©ger l’environnement. La stylisation des motifs Art dĂ©co m’intĂ©resse Ă©galement et j’aime les mĂ©langer avec ceux, plus floraux, de l’Art nouveau. J’aime casser les codes. Donc il ne s’agit pas pour moi de copier l’Art dĂ©co, comme certains dĂ©corateurs aiment Ă  le faire de maniĂšre un peu nostalgique, mais de le moderniser.

Comment y parvenez-vous ?

En le rĂ©interprĂ©tant. J’aime, par exemple, la marqueterie de paille comme celle que dĂ©ployait Jean-Michel Frank dans ses crĂ©ations. Avec l’atelier de Lison de Caunes, je la mets en Ɠuvre pour mes meubles mais je la fais « redescendre » car je l’ai utilisĂ©e de façon pop pour ma table Bugs Bunny Cela m’amuse d’utiliser des matĂ©riaux nobles et de les associer Ă  une imagerie populaire. Ou, Ă  l’inverse, utiliser une technique sophistiquĂ©e comme la marqueterie en l’adaptant Ă  des matĂ©riaux plus accessibles comme le rotin ou le formica. Ma table Bishop, circulaire et en rotin, et ma table basse Fullhouse, en noyer et dont le dessus est une association de carrĂ©s, peuvent rappeler l’Art dĂ©co mais rĂ©interprĂ©tĂ© au prisme de la contemporanĂ©itĂ©.

Irez-vous voir l’exposition des papiers peints de Ruhlmann au MAD ?

Est-ce qu’une prĂ©sentation de ce genre peut-ĂȘtre source Ă  rĂ©interprĂ©tation pour vous ?

Oui, car je suis toujours intĂ©ressĂ©e par les savoir-faire. J’ai utilisĂ© il y a quelque temps des papiers peints de William Morris imprimĂ©s par l’Atelier d’Offard. Des motifs prĂ©raphaĂ©lites, graphiques et colorĂ©s. La couleur me sert d’ornementation et permet de donner une identitĂ© Ă  un lieu. ○

Propos recueillis par Guy Boyer, directeur de la rédaction de Connaissance des arts.

© Julio Piatti

Symbole de la culture du royaume de Dali, cette statuette en bronze dorĂ© d’Avalokiteshvara, datant du xie-xiie siĂšcle, constitue une reprĂ©sentation rare et exceptionnelle du bodhisattva Guanyin Ă  onze tĂȘtes et seize bras.

Assise dans une posture noble, la figure porte une jupe nouĂ©e Ă  la taille et une Ă©charpe drapĂ©e sur son torse nu, ornĂ© de perles et de pendentifs. Ses trois tĂȘtes principales sont couronnĂ©es, tandis que les huit autres s’élĂšvent au-dessus, illustrant les Ă©tapes du chemin vers l’illumination. Ses nombreuses mains adoptent diverses postures et tiennent une panoplie d’attributs rituels destinĂ©s Ă  guider les fidĂšles vers le salut, notamment un bol et une branche de saule, symboles de guĂ©rison, une aiguiĂšre d’eau sacrĂ©e, une fleur de lotus et un chapelet.

Cette sculpture est caractĂ©ristique des Ɠuvres du royaume de Dali (actuelle province du Yunnan), oĂč une interprĂ©tation distincte du bouddhisme mahayana a prospĂ©rĂ© entre 927 et 1253. La pratique tantrique du bouddhisme Ă©sotĂ©rique vajrayana qui s’y est dĂ©veloppĂ©e reposait sur la dĂ©votion aux bodhisattvas, en particulier l’Acuoye Guanyin, divinitĂ© tutĂ©laire emblĂ©matique de la culture locale. Le panthĂ©on bouddhique y intĂ©grait ainsi des divinitĂ©s paisibles, Ă  l’image de cette figure, conçues comme supports de mĂ©ditation.

Le style de la rĂ©gion se distingue nettement des reprĂ©sentations bouddhiques voisines de la Chine et du Tibet. Les sculptures assises Ă  plusieurs bras et tĂȘtes adoptent gĂ©nĂ©ralement la posture noble, oĂč une jambe repose sur l’autre, plutĂŽt que la posture plus courante des exemples tibĂ©tains, oĂč les jambes sont croisĂ©es avec la plante des pieds visible. Se distinguant par leur silhouette Ă©lancĂ©e et leurs Ă©paules saillantes, ces figures partagent Ă©galement des traits faciaux distincts, tels que des yeux mi-clos, un nez large et des lĂšvres proĂ©minentes, tĂ©moignant de l’influence des traditions du royaume voisin de Champa, lui-mĂȘme inspirĂ© de styles venus d’Inde du Sud via l’IndonĂ©sie. ○

Par Carla Lee Cataloguer, Arts d’Asie ↗

Statuette d’Avalokiteshvara en bronze dorĂ©, royaume de Dali, province du Yunnan, XIe-XIIe siĂšcle

Estimation : 250 000-350 000 € « Arts d’Asie » Vente Ă  Paris le 12 juin

COLLECTION

NIOMAR

MONIZ SODRÉ

BITTENCOURT

VENTE À PARIS LE 10 AVRIL

IMPORTANT DESIGN

VENTE À PARIS LE 20 MAI

ART MODERNE ET CONTEMPORAIN

VENTE DU SOIR À PARIS LE 10 AVRIL

VENTE DU JOUR DU 2 AU 11 AVRIL

FINEST & RAREST

WINES | PARIS

EDITION

VENTE EN LIGNE DU 7 AU 21 MAI

MARC CHAGALL, LA SYMPHONIE DES RÊVES.

ƒUVRES PROVENANT

DE LA SUCCESSION DE L’ARTISTE

VENTE EN LIGNE DU 2 AU 9 AVRIL

ARTS D’ASIE

VENTE À PARIS LE 12 JUIN

LIVRES ET MANUSCRITS

→ VENTE EN LIGNE DU 4 AU 18 JUIN

Calendrier

Dessins réalisés à Alger fin 1943-début 1944 et offerts par Saint-Exupéry à Suzanne

Des petits princes par milliers Collection Pierre Amrouche et Suzanne Amrouche-Molbert
Amrouche-Molbert

BIBLIOTHÈQUE JACQUES DAUCHEZ

VENTE EN LIGNE DU 4 AU 19 JUIN

Jacques Dauchez fut notaire par dĂ©faut, succĂ©dant Ă  une lignĂ©e de notaires. GrĂące Ă  sa localisation, l’étude familiale comptait parmi ses clients de nombreux artistes, tels qu’Henri Matisse, dont l’atelier Ă©tait situĂ© quai de la Tournelle, ou Jean Dubuffet, alors marchand de vins Ă  la Halle aux vins, sur l’actuel emplacement de l’universitĂ© de Jussieu.

Pour Jacques Dauchez, une Ă©tude notariale Ă©tait comme une auberge espagnole : on y trouvait ce que l’on y apportait. Amateur d’art, il devint ainsi un notaire spĂ©cialisĂ© dans la crĂ©ation artistique, guidĂ© par sa curiositĂ© pour la dĂ©marche des artistes et des auteurs. Cette passion le mena Ă  devenir bibliophile et collectionneur.

De Jean Dubuffet, il eut Ă  cƓur de rassembler non seulement les livres illustrĂ©s, souvent imprimĂ©s sur les plus prĂ©cieux papiers, mais aussi les ephemera – invitations, programmes – retraçant sa carriĂšre, ainsi que ses lettres et manuscrits. L’univers de Dubuffet devint le sien : il collectionna les Ɠuvres des auteurs proches de l’artiste, notamment Ponge et Michaux, ainsi qu’un bel ensemble de publications sur l’art brut.

Sa seconde passion littĂ©raire fut CĂ©line. Il possĂ©dait notamment le manuscrit de Casse-pipe ayant servi Ă  l’édition originale, ainsi que tous ses textes en grand papier, dont Voyage au bout de la nuit sur Arches, avec envoi, et Mort Ă  crĂ©dit sur Japon.

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Jean Dubuffet

Anvouaiaje par in ninbesil avec de zimaje Paris, 1950. Un des 23 exemplaires. 9 lithographies. Exemplaire avec suite. Envoi de Dubuffet à Alfonso Ossorio. Estimation : 10 000-15 000 €

Votre conciergerie, dĂ©diĂ©e au luxe, prĂ©sente tout au long de l’annĂ©e des piĂšces d’exception de Joaillerie, d’Horlogerie, de Sacs Ă  main et autres objets aux provenances uniques, disponibles Ă  prix fixe. DĂ©couvrez Le Salon ou planifiez un rendez-vous. augustin.guilletdelabrosse@sothebys.com +33 1 53 05 52 80

FINEST & RAREST WINES |

PARIS EDITION

VENTE EN LIGNE DU 10 AU 24 JUIN

CLASSIC DESIGN

VENTE À PARIS LE 26 JUIN

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VENTE EN LIGNE

DU 26 JUIN AU 10 JUILLET

TABLEAUX ANCIENS, 1400-1900

→ VENTE À PARIS LE 11 JUIN

VENTE EN LIGNE DU 6 AU 13 JUIN

NAPOLÉON UNE COLLECTION HISTORIQUE

VENTE À PARIS LE 25 JUIN

MODERN & CONTEMPORARY DISCOVERIES

VENTE EN LIGNE

DU 1er AU 9 JUILLET

REJOIGNEZ LA COMMUNAUTÉ DE SOTHEBY’S

Retrouvez sur le site internet sothebys.com tous nos catalogues de vente ainsi que nos actualités en France et dans le monde, enrichies de vidéos, articles et interviews.

Ce calendrier prĂ©sente une sĂ©lection de nos ventes d’avril Ă  juillet 2025, sous rĂ©serve de modifications.

Estimation sur demande

« Tableaux anciens »

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Jean Siméon Chardin
L’Économe (dĂ©tail)

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MIDI-PYRÉNÉES

Florence Grassignoux On Kawara Oct.23.1992.

Provenant de la série Today No. 40

Estimation : 250 000-350 000 €

Vendu : 432 000 €

PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR

Florence Vidal

Van Cleef & Arpels

Collier or et diamants

Estimation : 14 000-22 000 €

Vendu : 38 400 €

ici

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RHÔNE-ALPES

Ghislaine de Montgrand

Peter Halley

Extant

Estimation : 50 000-70 000 $

Ici, dans nos rĂ©gions, de Lille Ă  Marseille, de Nantes Ă  Toulouse, nous avons dĂ©couvert des pĂ©pites que l’on retrouve en vente chez Sotheby’s Ă  Paris, New York et Hong-Kong.

Contactez nos consultants prùs de chez vous (page 84) ou à l’adresse suivante : vendreavecnous @sothebys.com

BRETAGNE –PAYS DE LA LOIRE ET TOURAINE

François d’Hautpoul

Estimation : Vendu :

AQUITAINE

Albert Marquet

Port d’Agay

Estimation : 60 000-80 000 €

HAUTS-DE-FRANCE

Pascale Bomy

Pierre Nicolas Beauvallet Narcisse se mirant dans l’eau 120 000-180 000 € 144 000 €

LANGUEDOC-ROUSSILLON

Joëlle Koops

Ancienne spĂ©cialiste & Deputy Director en art contemporain chez Sotheby’s Paris, JoĂ«lle Koops est dĂ©sormais notre nouvelle dĂ©lĂ©guĂ©e rĂ©gionale pour le Languedoc-Roussillon et votre contact pour toute demande d’expertise, toutes spĂ©cialitĂ©s confondues.

1 5 6 3 4 2 7

1964 Ferrari 250 LM by Scaglietti

Vendue 34 880 000 €

RM Sotheby's, le rendez-vous incontournable des passionnés au Carrousel du Louvre.

1954 Mercedes-Benz

W 196 R Stromlinienwagen : l’une des voitures de course les plus importantes au monde a Ă©tĂ© vendue Ă  Stuttgart, par Sotheby’s RM, en partenariat avec Mercedes-Benz Heritage Vendue 51 155 000 €

SOTHEBY’S FRANCE

Mario Tavella

Chairman, Sotheby’s Europe

PrĂ©sident, Sotheby’s France mario.tavella@ sothebys.com

Marie-Anne Ginoux

Directrice gĂ©nĂ©rale, Sotheby’s France marie-anne.ginoux@ sothebys.com

Florent Jeanniard

Chairman Vice-président florent.jeanniard@ sothebys.com

Pierre Mothes Vice-président pierre.mothes@ sothebys.com

Anne Heilbronn Vice-présidente anne.heilbronn@ sothebys.com

Stefano Moreni Vice-président stefano.moreni@ sothebys.com

Aurélie Vandevoorde

Vice-présidente aurelie.vandevoorde@ sothebys.com

Olivier Fau

Vice-président olivier.fau@ sothebys.com

Thomas Bompard Vice-président thomas.bompard@ sothebys.com

ART IMPRESSIONNISTE, MODERNE ET CONTEMPORAIN

Aurélie Vandevoorde

+33 (0)1 53 05 53 56 aurelie.vandevoorde@ sothebys.com

Thomas Bompard thomas.bompard@ sothebys.com

Étienne Hellman

+33 (0)1 53 05 53 73 etienne.hellman@ sothebys.com

DESIGN

Florent Jeanniard

+33 (0)1 53 05 52 69 florent.jeanniard@ sothebys.com

TABLEAUX & DESSINS ANCIENS ET DU XIXe SIÈCLE

Olivier Lefeuvre +33 (0)1 53 05 53 24 olivier.lefeuvre@ sothebys.com

MOBILIER FRANÇAIS DU XVIIIe SIÈCLE

Louis-Xavier Joseph +33 (0)1 53 05 53 04 louis-xavier.joseph@ sothebys.com

SCULPTURES ET OBJETS D’ART

Stéphanie Veyron +33 (0)1 53 05 53 65 stephanie.veyron@ sothebys.com

ORFÈVRERIE

Marine de Cenival +33 (0)6 45 72 66 77 marine.decenival@ sothebys.com

ARTS D’AFRIQUE ET D’OCÉANIE

Alexander Grogan +1 212 894 1312 alexander.grogan@ sothebys.com

ARTS D’ASIE

Christian Bouvet +33 (0)1 53 05 52 42 christian.bouvet@ sothebys.com

LIVRES ET MANUSCRITS

Anne Heilbronn +33 (0)1 53 05 53 18 anne.heilbronn@ sothebys.com

JOAILLERIE

Magali Teisseire +33 (0)1 53 05 52 37 magali.teisseire@ sothebys.com

HORLOGERIE

Camille Jucker +33 (0)6 07 22 22 88 camille.jucker@ sothebys.com

SACS À MAIN ET ACCESSOIRES

Aurélie Vassy +33 (0)6 37 74 19 62 aurelie.vassy@ sothebys.com

VINS ET SPIRITUEUX

CĂ©lian Ravel d’Estienne celian.raveldestienne@ sothebys.com

RM SOTHEBY’S

Benjamin Arnaud Directeur des ventes

France

+33 (0)6 13 55 05 29 barnaud@ rmsothebys.com

VENTES PRIVÉES

Olivier Fau

+33 (0)1 53 05 53 60 olivier.fau@ sothebys.com

DÉVELOPPEMENT ET COLLECTIONS

Pierre Mothes

+33 (0)1 53 05 53 98 pierre.mothes@ sothebys.com

INVENTAIRES

Stéphanie Denizet

+33 (0)1 53 05 53 78 stephanie.denizet@ sothebys.com

SERVICE CLIENTS

Constance Schaefer-Guillou

+33 (0)1 53 05 53 48 constance. schaefer-guillou@ sothebys.com

MARKETING

Pauline de Montgolfier

+33 (0)1 53 05 53 83 pauline.demontgolfier@ sothebys.com

COMMUNICATION

Romain

Monteaux-Sarmiento

+33 (0)6 33 30 83 08 romain. monteaux-sarmiento@ sothebys.com

LE SALON SOTHEBY'S

Augustin Guillet de la Brosse

+33 (0)1 53 05 52 80 augustin.guilletdelabrosse@sothebys.com

83 LE CAFÉ

+33 (0)1 53 05 53 05

PARTOUT EN FRANCE

Olivier Valmier (Aquitaine)

+33 (0)1 53 05 52 18 olivier.valmier. consultant@ sothebys.com

François d’Hautpoul (Bretagne – Pays de la Loire et Touraine)

+33 (0)6 86 67 87 12 francois.dhautpoul. consultant@ sothebys.com

Florence Grassignoux (Midi-Pyrénées)

+33 (0)6 87 40 99 91 florence.grassignoux. consultant@ sothebys.com

Joëlle Koops (Languedoc-Roussillon)

+33 (0)6 49 61 69 76 joelle.koops. consultant@ sothebys.com

Pascale Bomy (Hauts-de-France)

+33 (0)6 07 60 79 62 pascale.bomy. consultant@ sothebys.com

Florence Vidal (Provence-AlpesCĂŽte d'Azur)

+33 (0)6 15 35 13 96 florence.vidal. consultant@ sothebys.com

Ghislaine de Montgrand (RhĂŽne-Alpes)

+33 (0)6 70 60 43 58 ghislaine.demontgrand. consultant@ sothebys.com

CONSULTANTES

Anne de Lacretelle

+33 (0)1 45 48 44 57

Marie-France Ludmann

+33 (0)6 08 58 50 62 mariefrance.ludmann. consultant@ sothebys.com

SOTHEBY’S MONACO

Louise Gréther

+33 (0)6 31 68 10 75 louise.grether@ sothebys.com

Mark Armstrong

+377 (0)93 308 880 mark.armstrong@ sothebys.com

SOTHEBY’S BELGIQUE

Deborah Quackelbeen

+32 (0)2 479 8337 11 deborah.quackelbenn@ sothebys.com →

Pierre Soulages

Peinture 92 × 73 cm, 30 juin 1959

Estimation : 3 000 000-5 000 000 US$ « Modern Evening Auction » Vente Ă  New York, mai 2025

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83 Faubourg March 2025 by sothebysNY - Issuu