Alter Ego

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SOPHIA EL MOKHTAR

ALTER EGO EGO ALTER résidence d'artiste au lycée jacques ruffié de limoux



SOPHIA EL MOKHTAR

ALTER EGO résidence d'artiste au lycée jacques ruffié de limoux



Présentation

Dans mon travail, j'ai avant tout le désir de changer mon rapport au réel en construisant et racontant des histoires. Il y a au départ une volonté de passer les barrières de la timidité, des convenances, du savoir vivre ou savoir parler. Les différents personnages que je joue sont inspirés de situations vécues mais la façon dont je les incarne tourne au grotesque à l'exagération ou au ridicule. Ce que je produis forme un ensemble centré sur une action « live », soit la performance comme une tactique d'insertion dans le monde, à travers laquelle je suis maîtresse du jeu.

Du 20 février au 28 avril 2017, j'ai réalisé la résidence d'artiste ALTER EGO au Lycée Jacques Ruffié de Limoux avec le soutien de la Région Occitanie et de la DRAC Languedoc Roussillon. Le dispositif artistique ALTER EGO s'est articulé autour d'un studio-photo installé au coeur du CDI ce qui m'a permis de travailler avec 100 lycéens sur des sessions d'au moins une heure, 64 écoliers de la Haute Vallée de l'Aude lors de Manifestascience du 27 avril 2017, et 22 élèves de l'école Jean Moulin de Limoux pour le Prix des Incorruptibles. Le livre ALTER EGO présente une sélection de ces productions.










J-1 Mon corps est tremblant. Je viens d'arriver à l'Hôtel et y déposer mes affaires, et maintenant je mange une salade luisante aux lardons. Je n'ai pas résisté à prendre un verre de rouge. “Qu'il est bon, …b***** de c******* m***** !” Ouep, j'ai besoin d'écrire des obscénités face à la tablée bruyante des vingt mâles musiciens qui m'ont accueillie par des “petites phrases” inutiles, des ricanements, et autres gloussements de vieux coqs… Ils parlent fort avec l'accent limouxin, de leur expérience du Carnaval de Limoux. C'est plus de la rocaille qui court dans leurs gorges, mais du sable gargarisé à l'infini. Je luis dis : “Moniqueuuuuue!“, - T'entends ses talons aiguilles, tu la reconnais direct Monique, hein!? - Moniqueuuue!!! Vingt minutes pas plus pour atteindre le bar de la Place, sinon je te le redis tout net, moi j'arrête de jouer et tu te retrouves toute seule”. Ils partent. Les chaises s'entrechoquent. Le plus petit, gros et chauve s'excuse pour le bruit en vrillant son corps en ma direction. La musique est désormais audible. RTL. Ça ne me plaît pas. Les lambris roux, la lumière jaune, les plantes vertes, les vapeurs des lasagnes bolognaises et ma joie me poussent à me lever, verre à la main, en direction de la carafe des musiciens disparus et à me servir un peu plus de ce délicieux vin... Ce soir je veux flotter en songeant à la multitude des possibles que m'offre la résidence d'artiste au lycée qui débute demain. ***** : Libre choix des grossièretés, cependant je tiens à préciser que, pour être au plus près de l’esprit féministe de mes écrits, les gros mots doivent plutôt pencher du côté de la misandrie que de la misogynie.


Jour J Il fait froid dans la salle du petit déjeuner de l'Hôtel. Je ne stresse toujours pas. Va savoir pourquoi. Moi qui stresse pour un rien. Faut dire que j'ai une armée de bonnes femmes avec moi : ce matin je serai “la manutentionnaire”, la meuf qui charge et décharge les marchandises. Avec des dents ou pas? Je vais finaliser le costume dans la chambre. Ah au fait le petit déj’ est dégueu : le café n'en est pas, et le croissant c'est du carton. Toutes les tables vides à côté de moi montrent un croc dans le croissant délaissé dans l'assiette. La petite brique de nectar multifruits leader price me sauve un peu. Dans deux heures j'entre au lycée. Je me suis vue tellement de fois rentrer au lycée que j'ai du mal à croire que c'est aujourd'hui que ça se passe. Ce qui est certain, c'est que, quoiqu'il arrive je vais bosser comme une bête. Que peut-il se passer de pire en tant qu'artiste intervenante au sein d'un lycée? Que l'on ne comprenne pas le sens de ce que je fais (par ma faute), et que même l'équipe enseignante me délaisse totalement. Alors ça, ce serait le pire des tableaux - moi je dis “impossible” - mais prenons ce cas extrême de la chauve souris qui sonne à MA porte… Encore faut-il que je lui ouvre, je veux dire qu'au lycée, même si rien ne marche avec les étudiants, et que ce que je propose ne fait écho à rien en eux, le néant quoi, ben ce sera de la matière à bosser, …enfin de la non-matière sur laquelle philosopher et produire de nouvelles oeuvres. Comme quoi, même dans le pire des cas, cette résidence d'artiste au lycée est d'ores-et-déjà une réussite.


La manutentionnaire Pendant que je déchargeais la tonne-cinq de matos de mon Expert Peugeot : - un lycéen à la barbe naissante mêlée à l'acné m'a sifflée, enfin non, a ruminé un truc dans sa bouche genre miam miam, tu sais le “mmmmhh” des vieux libidineux, j'ai d'abord fait mine de n'avoir rien entendu, puis il a recommencé!! Là je l'ai regardé dans les yeux à chaque fois que je passais devant lui. Il n'a plus émis le moindre râle. - de nombreux jeunes m'ont tenu la porte, - quelques autres me l'ont lâchée en pleine gueule (mdr), Pendant que je m'installais dans le CDI : - quelques uns m'ont proposé leur aide (trop mignon), - d'autres se sont foutus de ma gueule gentiment, - de nombreux élèves ont fait les curieux et m'ont demandé ce que je préparais. J'ai quitté le lycée à 17h45, après avoir rencontré Madame Hernandez, la professeure de l'unique classe de 3ème du lycée avec laquelle je vais travailler demain dès 8h. Ça va être intense, je les ai de 8h à 10h puis de 14h30 à 15h30. Je suis crevée. Je vais me coucher.






Je veux me faire des seins Mister N, petit brun, au visage doux et fin, n'a pas hésité une seconde, il a été le premier à se lancer pour créer Bairnadète, retraitée, qui ne fait rien de ses journées. Portées par l'enthousiasme de leur camarade Miss V et Miss K ont créé la Reine d'Angleterre et Jasmine. - Et qu'est-ce qu'elle fait Jasmine dans la vie? - Elle vole. - ...?! - Ben oui, sur un tapis volant! Puis Mister L s'est levé puis rassis. - Allons Mister L viens créer ton personnage! - Euh noooon ! Là je monte sur la table en tendant le bras en sa direction : - Viens ! Je te dis,... sinon je viens te chercher ! Ce qui a eu l'impact escompté, puisqu'il a créé François, qui aime le pastaga et le sauciflard. Puis je suis allée chercher Mr J-L en le tâtant par l'épaule, puis en l’empoignant par les deux bras et il s'est totalement engagé et a créé Ginette, la mémé il a véritablement sculpté son personnage, couche après couche : - Je veux me faire des seins… j'essaye avec une trousse?! - Bonne idée! - Madame, ça tient pas?! - Essaye avec du tissu, tu vas y arriver! Je te laisse, faut que je trouve les moustaches pour Mr L!!! File donc ta trousse à Bairnadète qui veut des petits seins.


Miss T s'est d'abord consacrée au maquillage de ses camarades pour enfin composer rapidement un très beau personnage La mariée. J'ai fait un polaroïd, et 5 à 10 photos par élève. Cette session de deux heures s'est passée le matin. L'aprem ils sont revenus pour une heure de travail dessin/écriture. Pour ceux qui avaient créé un personnage, ils devaient dessiner ce personnage et/ou écrire des mots, phrases ou textes pour décrire ce personnage, les autres devaient dessiner le personnage qu'ils auraient aimé créer si ils avaient osé se déguiser et/ou écrire son histoire, sa vie toujours en mots, phrases ou texte. Cette heure de travail a été plus laborieuse, il a fallu les encourager : - C'est très bien, ce sera encore mieux en corrigeant les fautes d'orthographe ! - Où? aiment-ils lancer avec un effarement délicieux, digne de l'Actors Studio. - Là, là et là ! - Ah oui ! Sur un ton rassurant, feignant l'égarement momentané. - Fais-moi le dessin maintenant! - Je ne sais pas dessiner. - C'est pas grave, je veux voir ce qui sort de ça (en montrant les mains) et de ça (en montrant la tête).




Préparation de la performance de l'institutrice stricte Objectifs de cette session : Les élèves ayant manifesté de la curiosité vis à vis de mon travail et deux d'entre eux venant travailler sur une performance en semaine 3, je leur présenterai : - 1 à 5 de mes performances filmées - la série de photo-montages Ceci devrait prendre en tout (intro + présentation) 15 à 20 minutes. Ensuite, il me faut penser à récupérer les trois dentiers à positionner dans des sachets étiquetés à leur nom, afin que l'on soit tous sûrs que le jour de tournage d'une performance ils aient bien leurs dentiers sur place, et non dans le fin fond de leur chambre… Programmation de performance/s : rappel des rendez-vous pris et prendre de nouveaux rdv. Restera en gros 20 minutes pour faire une performance d'autorité : je me vois, raide, droite, hautaine dans l'entrebâillement de la porte, transvasant mon poids du corps d'une jambe à l'autre, permettant ainsi à mon buste d'apparaître ou disparaître aux yeux des gamins, ce qui induit qu'ils se lèvent, puis se rassoient, se relèvent, se rassoient, restent en flexion souple plus ou moins déployée, se rassoient, se relèvent… etc Leur remettre finalement les billets à l'effigie du personnage qu'ils ont créé et/ou dessiné.


Performance de l'institutrice stricte Je suis l'institutrice stricte dans ma longue robe noire, marchant à grandes enjambées, le long du couloir en direction de la salle 109, et saluant les élèves que je croise. J'entre dans la salle vidée de ses élèves, encore vaporeusement moite. Je pose le matos, installe la Go-Pro et j'ouvre l'immense fenêtre. Je contemple l'Esplanade François Mitterand, avec toute la fierté que j'ai d'être à ce moment précis la maîtresse de cette classe encore en récréation. Je suis cette incontestable ancêtre qui fait régner l'ordre ne serait-ce que par l'austérité de sa posture. Sa raideur et son air hautain soumettent tout individu à préjuger de sa bonne moralité. Je cherche des regards d'étudiants, histoire de me chauffer un peu pour la performance à venir. Je salue une jeune fille, qui me salue à son tour timidement, en riant nerveusement. Un fil de sept à dix mètres semble nous relier, ce fil imaginaire dessine une ligne entre le 1er étage du Lycée et l'Esplanade. L'étudiante explique à ses amies ce qu'il vient de se passer. Je me détourne d'elles, pour laisser se tisser une histoire autour de mon apparition, je regarde mon reflet dans la vitre : je suis cet alter ego. Ça sonne. Ils entrent. Certains ressortent aussitôt comme effrayés. Puis ils entrent tous. Je sens que ce sera plus dur d'intervenir dans leur classe, mais d'autant plus fort si je réussis quelque chose au final. Je mets en application les conseils de Madame Gardair professeure-documentaliste au CDI, concernant les notions de “tissage” et de “climat”. Il s'agit de créer le lien entre les séances : et là j'avais un boulevard, puisque c'est suite aux nombreuses questions posées par les adolescents sur mon travail d'artiste que j'ai proposé cette intervention.


Les 5 premières minutes font apparaître qu'ils ne m'ont pas reconnue. Si il est vrai que je me teste, curieuse de savoir comment je vais gérer ou pas cette performance, ils me testent eux aussi en s'agitant, riant ou parlant quand je parle,... mais l'institutrice stricte que je suis, remet l'ordre d'un coup de tête, prolongé par un regard perçant. Il y a juste un truc “foireux”, limite paranormal, ma voix n'était pas à la hauteur de la situation, elle était planquée, coincée dans le fond de la gorge, je l'ai cherchée avec eux, en faisant des tests vocaux : - UN - DEUX - UN - DEUX - AAAAAAAAAAAAAHh AAAAAAAAAAAHHHHHH. Une fois la voix retrouvée et le “tissage” fait, l'institutrice stricte a posé “LA” question, avec toute la rigueur et le sérieux requis par rapport à la gravité de la situation : - Avez-vous vos dents? - Hein??? Hihi de quoi elle parle? - Mais oui tu sais y'en a qui ont mis des fausses dents. - En effet, certains d'entre vous ont créé un personnage avec des fausses dents? Et qu'est-ce que j'avais dit?… Qu'il vous fallait toujours avoir vos dents, sur vous? De façon à ce qu'on puisse travailler n'importe quand ! - Mais madame, on savait pas que vous viendriez aujourd'hui! - Cela montre que ce n'est pas la bonne solution : donc, il faut que vous me rameniez vos sachets de dents, je les étiquetterai à vos noms car ce sont les vôtres, et je les garderai au CDI. À la fin de la résidence, je vous rendrai vos dents. PS : Pour la petite histoire, ils m'ont ramené leurs dents dès la première heure le lendemain matin.






La galeriste La classe de seconde PRO arrive dans mon espace au CDI. C'est tendu du côté des élèves. Ils me montrent qu'ils sont horrifiés et rejettent d'emblée ce qu'ils pressentent que je vais leur proposer. Le challenge est d'autant plus excitant qu'il semble insurmontable. Je ne me démonte pas, car je suis La galeriste, cet alter ego puissant et indestructible - Wonder Woman, en gros quoi. Je me présente viteuf, ainsi que mon boulot, et je les invite à créer eux-mêmes un personnage. - Ça va pas? - Sans moi! Elle délire ou quoi? - Me touchez pas! ME TOU-CHEZ PAS! - Moi, me déguiser? Jamais! - N'importe quoi. Les filles forment un clan redoutable, qui dit « non » avec fermeté. Et là mon cerveau du matin a un flash plein de malices… : - Les filles, vous êtes sûres de ne pas vouloir créer un personnage? - Ben oui… Pfff - C'est sûr?...? - OUI. - Vous serez donc les coachs en maquillage, et accessoires. - Ça veut dire quoi ça? - Ben que c'est nous qui allons maquiller les autres! - Ah! C'est cool ça… - Tout le maquillage est là. Important : il y a deux types de lingettes “pour les mains” et “pour le visage”. - C'est que les filles qui se maquillent, pas vrai!? - Non.




Les filles nouvellement désignées “coachs”, sont impatientes de maquiller leurs camarades : - Allez, viens que je te maquille, toi! Cinq garçons se sont greffés à une table, et ils n'envisagent pas de faire autre chose que “rien”. - Vous êtes sûrs de ne pas vouloir créer un personnage? -… - Vous êtes sûrs? -… - Voici du papier et des crayons, vous allez me faire le dessin du personnage que vous auriez aimé créer. Mister M fait une caricature de La galeriste, il la fait apparaître en quelques coups de crayons. C'est très bon, je le lui dis mais il s'en fout, ou signifie au reste de sa classe qu'il s'en fout, standing de rebelle à tenir. Miss P, l'une des coachs en maquillage, me fait la bonne surprise de créer un personnage. Au final, quatre lycéens sur neuf auront créé un personnage : Bernadette, la mamie vendeuse de drogue (c'est la 2ème), l'ancienne prostituée, Madonna, et le professionnel du scotsh. Une heure très difficile, physique car je ne pouvais enchaîner deux mots sans que les gamins ne parlent… Ça c'est hard. À en devenir folle. Alors je m'arrête de parler en lançant un regard perçant en direction de celui qui cause, puis je reprends, et je dois encore m'arrêter… Pause plus longue, appuyée, je reprends, cinq mots de plus et je dois me taire une nouvelle fois... jusqu'à ce que sortent ces mots appuyés, qui résonnent dans les 100 m² du CDI : - Ouuuh!!!! MAMMA MIAAAAA! En levant les yeux au ciel, et en faisant des grands gestes. Stupéfaits, ils se taisent enfin.

Dessin de Mister M. Seconde Pro


Alors… Oui c'était dur. Oui je suis sortie de cette heure épuisée, vidée. Oui j'ai souffert, mais cela m'a beaucoup intéressée de me confronter à ce contexte difficile… Et puis il demeure un challenge, c'est de parvenir à les intéresser tous, et qu'ils produisent tous du bon boulot en grande liberté. Je les revois vendredi. Soit ils ont ma peau, soit on excelle ensemble…



Terminale Pro Les personnages créés : - la cheffe d'entreprise - le savant fun - le rockeur à la poubelle - la hyppie - l'actrice de films d'horreur - l'artiste de cabaret - le touriste - Haute en couleurs, la styliste Pour chacun, je réalise un polaroïd comme d'hab’, puis une série de 10 à 20 photos. Durant le shooting photo me viennent ces questions : - Qui es-tu? - Que fais-tu dans la vie? - Quel est ton but dans la vie? - Comment tu vois ta vie? - Quelle est ta passion? Desquelles sortent des mots qui permettent de sculpter le personnage au travers du travail corporel. Dans un premier temps je les laisse totalement libre d'être leur personnage, puis, si besoin, je les pousse à aller plus loin dans certaines postures par des expressions, ou par des postures exagérées que je fais depuis mon poste de photographe… j'adore faire ça ! PS : les élèves de Terminale Pro ont eux-mêmes créé les fonds, ainsi que l'incrustation du personnage lors d'une session d'infographie sur les ordinateurs du CDI.







Lorenzo et Le Marin Je les ai laissés composer leur personnage, parfois les aiguiller, les questionner ponctuellement. Je tourne autour d'eux, je les observe, puis cesse de les regarder pour qu'ils me surprennent à nouveau. Je les vois sérieux dans cette action pouvant sembler irrationnelle vue de l'extérieur, ils sont totalement dans l'action, ils sont vrais, ils semblent connaître les enjeux cruciaux de cette expérience, tout comme moi-même il me semble en connaître les tenants et les aboutissants lorsque je suis autre… Je suis certaine qu'il est essentiellement question de recherche de vérité, expérimenter l'altérité pour mieux être soi-même. Un alter ego permettant de se révéler.

Didier Water, Le Marin Il est dix-sept ans après mon premier jour de vie, je me retrouve seul à faire la rencontre maritime. Mister Y 3ème PRO



Lorenzo par Mister B. Bang Bang Uno Uno Le temps passe Et je marche Dans la rue Et Bang Bang Avec mon glock Pour faire des sous C’est pas du RAP C’est la mafia italienne Bang Bang Je viens de l’Italie Limoux c’est chez moi Donc personne ne rentre Vous avez compris Tu sais dans la vie On peut pas avoir d’amis Y’a partout des ennemis Je suis Lorenzo et personne peut me toucher Bang Bang Mister B 3ème Pro



J'ai pas besoin de me déguiser pour être le personnage

Mister N, Mr L, Miss V et Mr J-L sont arrivés dans le studio-photo pour travailler sur leurs duos de performance. Je sentais que je pouvais perdre Mr N, qui me semblait osciller entre “ ‘tain c'est n'importe quoi” et “chuis à fond”. Il m'est apparu rapidement que parler de projet de performance filmée était impossible, sans être les personnages. Puis Mr L a lancé : - J'ai pas besoin de me déguiser pour être le personnage. - Intéressant! Bon, vas-y, sois François! Moi, j'y arrive pas. - C'est vrai Madame, ce matin il m'a fait François, comme ça, ça lui arrive souvent. - Bon, ben vas-y, lui dis-je sourire en coin, fascinée par cette proposition. - Attendez, il me faut un peu de temps pour être le personnage… - …. Oui…???!! Alors…? -… - Allez, on n'a pas beaucoup de temps, on se déguise pour faire apparaître les personnages! - D'accord mais on se maquille pas, hein?



Une fois déguisés, sans maquillage il ne restait plus qu'un quart d'heure !?!… Fou-rire solo, mais pas de temps à perdre, il fallait produire au moins un test de performance filmée. - Mister L et Mr N, vous êtes Bairnadète et François, ça se voit, vous avez vos postures. Je vous le redis ne cherchez pas à faire du théâtre, ce qui m'intéresse c'est votre présence. Chacun mène un duel avec la caméra, Bairnadète mène un duel avec la caméra, François mène un duel avec la caméra, et bien sûr vous travaillez en duo, c'est à dire que vous avez toujours conscience de votre partenaire. Au début, je veux que vous restiez face caméra pour qu'on sente de la tension, et qu'on sente bien votre présence. On va faire un essai, pour voir ce qui se passe, ce sera notre vidéo-test à partir de laquelle on travaillera. C'est parti !



Five Girls

Mercredi 8 mars 11h30, je suis dans mon espace de travail, assise à la table, près de la baie vitrée. Je me sens zombie, je me vois même comme une blatte-zombie, je cours après le temps, dès que j'ai fini de ranger je travaille (écriture, ou retouche-photos, calculs divers). Le CDI est très calme ce mercredi, je travaille les yeux quasi fermés, je m'endormirais presque, mes gestes à l'ordi se font de plus en plus lents, mes doigts tapotent sur l'outil “baguette magique” sans la dynamique de mon cerveau. Cette action est pourtant répétitive et machinale, ben, sans le cerveau, j'avance pas! Je suis dans du coton, mes paupières sont lourdes, état comateux, je sombre doucement vers quelque chose d'absolument délicieux qui m’englobe et m’envoûte jusqu’au point de non retour, je me sens partir, c’est donc ainsi vautrée sur la chaise, les pattes écartées, la gueule mi-ouverte, les bras ballants que je terminerai ma journée de travail, ok je me laisse aller, je valide cette décadente posture, je suis prête à lâcher, tout - pourvu que je ne ronfle pas ce serait too much - aaaahhhhh je paaaaaaaaaaaaaaars…… - Bonjour Madame, qu'est-ce qui se passe ici? - !!!!???? BONJOUR! vous imaginez ma tronche à ce moment précis : sursaut de droiture, à la limite de me faire un torticolis, les yeux écarquillés genre “quoi? y’a quelqu’un qui dort dans le CDI? Pwark! C'est dégueu” puis je reprends mes esprits… : - … Blabla artiste en résidence…. se déguiser pour créer un personnage… Blabla fausses dents… Blabla … Accessoires… Blabla on prend rendez-vous!?



- Ben, on est dispo cet aprem’, mais est-ce qu’on peut le faire quand y'a plus personne au lycėe? Genre tout à l'heure de 16h30 à 17h30? - Une heure c'est court… vous serez combien? - Quatre filles. - Il nous faudrait 1h30 de travail. - Ok, super à tout à l'heure ! J'ai une heure pour leur préparer l'espace : la zone de maquillage, les fringues à déployer, l'appareil photo sur pied, les projecteurs à orienter, les accessoires bien visibles, tous les appareils chargés et prêts à l'emploi, le timing bien en tête! 16h30 elles arrivent. Elles sont finalement cinq. Je les laisse s'emparer des lieux en leur jetant ponctuellement des expressions qui les plongent petit à petit dans un état de quasi-transe solo, pour que leur unique but soit d'être au plus juste du personnage créé. La plus réservée du groupe, celle qui disait qu'elle n'allait pas faire ceci ou cela, est finalement celle qui se révèle être la plus excentrique. Je pense que je peux émettre une hypothèse faisant office de dura lex : Dans le cas où nous sommes en présence d'individus libres, soit des individus ne subissant aucune pression de la part d'un tiers, et que nous les invitons à une session ALTER EGO, alors ceux qui manifestent verbalement leur timidité et leur gêne au tout début de la session se révèleront être les plus extravertis, et les plus extravagants.




L'infinie rotation de la Reine Mister JL et Miss V débarquent à l'atelier, c'était pas prévu. Super cool, on va filmer la performance que l'on avait programmée, soit un jeu d'imbrication de Ginette avec la Reine d'Angleterre. - Je vous laisse vous préparer pendant que je prépare le studio photo. - Miss V n'a pas son gros pull pour me faire les seins ?!… - Pas grave Mister JL, tu vas trouver de quoi faire parmi toutes mes fringues, et toi Miss V, il faut que tu te fasses tes fesses aussi! - Du tulle dans le collant fera l'affaire! Ça tourne! La Reine d'Angleterre tient la posture quasi militairement, droite et fière, Ginette a le challenge de créer la connexion avec la Reine, son objectif étant d'osciller de façon à ce que leurs formes généreuses s'entrecroisent et n'empêchent pas l'infinie rotation de la Reine.


Tac-tac t'as vu Mr P de 3ème Pro est venu pour créer son 1er personnage, et je ne compte pas le laisser vagabonder dans l'espace, fuir tout en étant présent, je le suis comme son ombre en lui larguant des remarques qui le font sourire, je lui pose des trucs sur la tête, il repère une perruque, le paquet est difficile à ouvrir, je le lui ouvre de façon à ne pas lui laisser de temps au doute. Je l'ai pas lâché, mais fallait faire vite le shooting photo… Je sentais qu'il y avait quelques limites à sa patience. L'impact de la production du polaroïd est stimulante, j'ai l'impression qu'il se dit un truc du genre : “ça c'est fait! L'artiste a fait son pola, tac-tac t’as vu elle est contente, maintenant c'est la série de photos… Bon, abrège l'artiste, je veux bien jouer, mais bon, fais vite.”

Le Touriste à Haïti Il part de Jamaïque en voyage à Haïti pour visiter les plages et les monuments de là-bas. Il a bientôt visité tous les pays du monde. Il a un sac avec tous ses souvenirs du monde. Il est célibataire et il est riche car il a gagné au loto avec le 1 2 3 4 5 6 et 7. Il a pris un coup de soleil. Mister P 3ème Pro




Validée corporellement par l'assemblée Malgré l'aide précieuse de Mister B pour ranger mon espace de travail au CDI, je suis en retard pour le Conseil de Classe. Je frappe à la porte de la salle polyvalente, et j'entre. Le Proviseur, les professeurs, et les Délégués de classe sont assis autour d'une agglomération de tables. Situation oppressante de l'artiste femme faisant irruption dans une salle de Conseil de Classe, l'artiste, qui en plus d'exercer cette fonction trouble (du point de vue de la société en général), arrive en retard, et qui en plus a l'apparence d'un être peu fiable, limite titubant d'un trop plein de timidité, qui en plus du déjà trop est aujourd'hui une adolescente avec un tee-shirt à capuche, écru à pois multicolores, avec une jupe en laine, des collants bariolés agrémentés de jambières et des tennis argentés… J'ai retiré la perruque blond vénitien et les fausses dents appareillées (ceci dit, avec cet attirail, j'aurais pu m'exprimer avec aisance et conviction). Je me sens un peu bête et d'ores-et-déjà incapable d'aligner trois mots si la demande devait m'être faite. J'interviendrai ponctuellement si besoin. Une fois ma posture de spectatrice active validée corporellement par l'assemblée, j'ai pu apprécier mon premier Conseil de Classe et découvrir les enjeux d'une section Pro.


Le clan du « non » Je ne me souviens plus de mon état d'esprit avant de recevoir pour la 2 ème session, la classe de seconde Pro qui a été la plus difficile durant la première semaine d'intervention. Je devais être un peu stressée, mais sans plus, sinon ça resurgirait spontanément à ce moment de l'écriture. Mes objectifs de production avaient pris le dessus sur mes émotions. De toutes façons, je n'étais pas moi-même, enfin oui et non, j'étais une part 100% vraie de moi, par le biais de la Grosse Dure, soit un personnage typée rap, qui porte un sweet à capuche gris, capuche tendue sur la tête tout le temps, dents en or, gros colliers, gros tennis et posture cool. J'étais focalisée sur la façon dont j'allais pousser les uns et les autres à créer un personnage. J'avais aussi préparé une boîte en carton dans laquelle il y avait des enveloppes vides… Les téléphones, ennemis des cours paisibles, allaient être déposés par chaque étudiant dans une enveloppe à leur nom, puis dans le carton. - Prenez une enveloppe, inscrivez votre nom, glissez-y le téléphone. Ensuite je referme le carton. Terminé - on n'en parle plus. - Ooohhh - Pff - Noooon Puis l'un ou l'une a commencé à prendre une enveloppe et quasi tout le monde a fait de même, sauf 2-3 mais qui se sont bien gardés de sortir leurs téléphones durant mon intervention.



Puis, on a pu débuter la session avec enthousiasme! Non, je plaisante. On a débuté la session avec quelques jeunes modérément enthousiastes, qui ont soutenu mes actions. (Et c'est déjà quelque chose) Le clan de Mister M était fermé et dur, on pourrait les identifier comme le clan du “non” ou du “me calcule pas, ça vaut mieux pour ta gueule”… Oui, mais... non ! 'Tain, je les ai pas lâchés… J'ai réussi à en extirper un, Mister A, et j'ai failli en extirper un 2ème Mr D, mais à chaque fois que je parvenais à le faire se lever vers les fringues, Mister D faisait une rotation sur lui-même pour s'agglutiner auprès de Mr M. Donc la session s'est à peu près déroulée ainsi, le clan de Mr M a dessiné, et très bien dessiné avec l'impulsion de Madame Gardair, d'autres ont écrit un texte sur leur personnage avec l'aide de Madame Claustres leur professeure principale, et les autres ont créé leurs personnages avec l'aide de Miss P qui a clairement stimulé les troupes. Sous ses airs de meuf blasée, Miss P a été une alliée véritable sans que cela ne soit trop visible aux yeux de ses camarades. Pour être plus claire, sans elle, que ce soit sur la 1ère ou la 2ème session, je n'aurais pas pu faire grand chose.

Dessin de Mister M. Seconde Pro



La Grosse Dure Entre autres choses entendues durant la session de deux heures : - … Tu vois, c’est un homme…. - N’importe quoi… elle a les traits fins, c’est une femme ! - Mais non, regarde… - T’es con, tu vois pas comment elle bouge !… - Hey! Z’êtes un homme pas vrai ? ça se voit que vous êtes pas une femme… !? Je me retourne - regard de Grosse Dure en direction du gamin qui sait très bien que je suis une femme, mais qui, comme pour rassurer ses propres cases dans lesquelles on lui a appris à mettre les mecs et les meufs, éprouve le besoin de poser cette question. - Ouais! chuis un homme.” Puis je me retire, et les laisse démêler non pas le vrai du faux (dont on se fout royalement), mais les stéréotypes eux-mêmes qu'ils abordent crûment par cette expérience. Ma réponse les a calmés en fait, ils ont fait une sorte de débriff’ chacun en pure introspection avec eux-mêmes, en fonction de leurs cases plus ou moins robustes. La réflexion en solo qu’ils ont eue, leur appartient, ce qu’ils ont déconstruit est peut-être un pan de mur entier pour certains, ou juste un grattage de crépis. Peu importe, il s’est passé quelque chose.



Madame Bojangles Mister M l'a composée rapidement, touche après touche, avec le souci du détail et la vision du style du personnage, la posture il l'a eue direct, comme si il se voyait être cette femme. Ce qui ressort sur les photos, c'est une posture façon “mannequin des années 50 de chez Dior”. Classe. Et à la fois son regard renvoie à une intériorité plus sombre, plus trouble (tout l'enjeu du livre réside dans cette dualité). Mr M a rendu lisible les deux mondes qui s'affrontent dans ce personnage avec d'un côté celui de la fête, la joie, l'insouciance, le luxe, la danse, l'amour fou, la légèreté, et de l'autre, la folie, l'inconscience, la maladie, l'alcoolisme, la futilité, l'irresponsabilité, la dangerosité.

La mère d'En attendant Bojangles d’Olivier Bourdeaut. “Comme par enchantement, Maman trouvait les bons vêtements quelques minutes avant l’arrivée des invités, à chaque fois c’était vraiment bluffant. Le temps de repeindre ses lèvres, de peigner ses longs cils et elle accueillait les gens avec la grâce naturelle de celle qui s’est réveillée comme ça.” Mister M. (Photo du fond prise par Mister M)





Victor Steiner Mister I est impressionnant, le travail corporel se fait dès l'approche des fringues, dès la manipulation des accessoires, il politise tout (au sens noble du terme), chaque geste semble prendre sa source dans ses propres questionnements, sa place dans la société, celle d'aujourd'hui, celle de demain. - Je veux être blanc, car Steiner était blanc... Et il me faudrait une écharpe qui fasse crédible pour l'époque…

Victor Steiner, Lever de rideau sur Terezin de Christophe Lambert Je me suis inspiré de Victor Steiner pour le portrait car sa personnalité est comparable à celle d'un artiste incompris. Il a subi les horreurs de la 2ème Guerre Mondiale et l'incompréhension, l'ignorance d'un père dépassé par les événements en France. Victor Steiner vit de sa passion : le Théâtre. Il serait prêt à mourir s'il le fallait pour le Théâtre qui est pour lui un moyen de s'évader de penser, de rêver, de s'exprimer en toute liberté. Victor Steiner précise lui même que le Théâtre est un second souffle pour lui. Victor Steiner est un penseur, un artiste incompris et persécuté par de simples ignares au sommet de la société. J'ai pris un malin plaisir à me maquiller pour interpréter avec respect et modestie le personnage de Victor Steiner car malgré que l'on soit au 21ème siècle des injustices, des bavures judiciaires et politiques persistent en ce bas monde. Le fait que je me sois maquillé en homme blanc alors que je suis noir de peau est simplement la preuve que nous sommes tous pareils, nous avons tous le droit de vivre de notre passion quelles que soient nos origines diverses et variées. Mister I



Leï, personnage du roman Le Royaume des cercueils suspendus de Florence Aubry. Cette photo représente un personnage présent dans le livre Le Royaume des cercueils suspendus, de Florence Aubry. Leï, jeune et belle femme du peuple Bââs : « Les cheveux sombres, toujours soigneusement peignés et nattés. » « Le visage parfaitement rond, le nez légèrement épaté, l'arc parfait des sourcils. » Leï est ici représentée enceinte devant la « cabane des femmes », qui se trouve dans un grand arbre. Les femmes s'y retrouvent quand elles ont leurs cycles. C'est donc ici que Leï s'est rendue compte qu'elle était enceinte : «Elle est enceinte, oui, elle attend un bébé!». Miss L Photo du fond réalisée au Lycée par Miss L




Du bel ouvrage Je les laisse créer leur personnage en leur rappelant que ce qui est intéressant à vivre c'est la création, la sculpture en solo de leur personnage, et d'y révéler une part d’eux-mêmes, et qu'il ne s'agit pas d'une session de déguisement entre potes ; je leur parle aussi du possible état de transe qu'ils pourront ressentir, emportés par la fabrique du personnage. C'est à chaque fois l'occasion de casser le penchant que les groupes ont, soit la tentation de créer en fonction de ce que crée leur copain/copine ça c'est niet! Cette remarque en début de session a l'impact attendu, et tue systématiquement ce penchant mou du déguisement pour lui-même. Mister I se plonge directement dans son nouveau personnage. Il continue à me raconter son histoire, non pas qu'il me parle directement, mais ce qu'il raconte dans ses gestes, ses postures, ses quelques mots que j'attrape au vol : noir, blanc, black panther, militant, malcom x, pacifiste, états unis, esclave. Il sait depuis la veille qu'il veut créer un personnage mi noir/mi blanc, je le guide sur ses besoins en maquillage. Son personnage est aussi puissant que celui de la veille. Impressionnant. Du bel ouvrage !




Aveu d'incertitude généralisée Je propose à Miss S de réaliser une performance filmée, dès cette après midi, à partir du scientifique qu'elle vient de créer. J'aimerais la filmer en transe en train d'écrire tout un raisonnement scientifique. D'emblée elle pense à un cours, je lui dis que ce n'est pas grave si ce qui est écrit c'est n'importe quoi, elle veut absolument écrire quelque chose de juste. Elle commence à réfléchir. Je lui explique aussi que je ne sais pas où je vais, mais qu'il faut essayer pour voir, je dis aussi que je ne suis pas sûre que cela fonctionne, en si peu de temps, vais-je filmer correctement? Vais-je savoir la guider? Comprendre ce qu'il faut faire pour faire sens? Cet aveu d'incertitude généralisée, couplé à un enthousiasme chevillé au corps, la convainc définitivement de se lancer dans l'aventure!

Le scientifique libidineux - “Ach! Fiens tan ma k-mio-nè-teuh!” - “Cheu fé t'enchaîner,… Euh t'enseigner les mathématikeuh” Miss S



Elle reconnaît en moi la chercheuse

Pendant qu'elle se maquille je prépare le matos, et essaye d'anticiper le déroulement de la session. Je doute de moi, et si je l'entraînais vers quelque chose de trop fou, vers quelque chose d'irraisonnable? Elle me fait confiance, totalement. Elle se dit que je sais ce que je fais, même si je ne sais pas où je vais. Elle reconnaît en moi la chercheuse. Elle a conscience qu'elle ne sait pas ce que je cherche, et cela ne la refroidit pas, probablement se dit-elle qu'un tel enthousiasme dans quelque domaine que ce soit est un bien précieux... Le 1er test vidéo me permet de dire à Miss S ce qu'elle doit abandonner (gestes en trop qui troublent la lecture, telle position sera meilleure pour telle raison, etc… Elle capte tout) Le 2ème test vidéo est déjà très juste, mais il faut encore quelques ajustements. Les remarques ciblées et argumentées ont un impact radical d'auto-correction, c'est pourtant pas simple,... on fait pas un sketch, on fait pas du théâtre, on fait de l'art. Oui, on fait de l'art, cette indéfinissable zone de totale liberté dans laquelle on peut se vautrer avec délice de tout son être, devrais-je dire dans la condition où l'on y met tout son être. Et c'est ce que fait Miss S, elle se plonge de tout son être dans l'expérience.



Ça ouvre à l'utopie Miss C arrive avec l'envie d'être Marie Curie - super! On consulte ensemble une série de photos de la scientifique jeune, et l'on part sur la perruque longue rousse, que l'on coiffera en chignon. Elle choisit la chemise qui fait la plus ancienne, celle en satin parme, et au niveau du col il manque quelque chose, on tente des trucs vite-fait, puis elle tranche sur le ruban de mousseline prune qui, noué autour du col, évoquera le style de l'époque. Les gestes apparaissent grâce à ses intuitions, c'est un travail très intéressant pour lequel j'aimerais avoir plus de temps. Là on a produit quelque chose d'intéressant et dans le même rythme que ce que je produis moi-même, mais dans l'idée de transmettre une pratique artistique, il faudrait prendre le temps de se poser vraiment sur la production. Faudrait compter cinq heures pour une performance filmée qui va au bout du bout, je veux dire qu'avec cinq heures de travail en duo avec l'élève ou un petit groupe on questionne le travail en lui-même de la meilleure des façons. Ce que l'on a fait là, c'est effleurer, les jeunes les plus intuitifs auront compris l'idée, mais ceux qui n'ont pas envie de trop se poser des questions, que conserveront-ils de cette étrange expérience? L'étrange expérience. C'est déjà quelque chose de fort. Ça ouvre à l'utopie. Un autre lieu est possible. Ce que je ne comprends pas, cette étrange chose que j'ai moi-même pratiquée sans connaître les tenants et les aboutissants, peut exister, peut être questionnée, peut être étudiée. Ça participe d'un monde plus ouvert à la création, à la différence, à l'autre.











Je veux être noir Mister JL est partant pour créer un scientifique. Mr N sera un rasta. - Je veux être noir. Mais je ne sais pas me maquiller? Vous pouvez pas me le faire? Et là, comme à chaque fois, j'explique pourquoi c'est plus intéressant qu'il se maquille lui-même, que c'est un temps qui permet de rentrer dans son personnage. Mr JL part à la recherche d'accessoires scientifiques complémentaires en dehors de l'atelier pour avoir tout un panel d'objets à manipuler durant la performance filmée. Il revient avec un trio de blouses blanches, une sphère transparente, des règles et équerres, un compas, deux pots, dans mes affaires on récupère une mallette, d'autres pots, des tubes de maquillage et de colle, un coton tige, des sachets, des feuilles en plastique. On fait d'abord la série de photos (comme d'hab’ le polaroïd et la série de photos), puis on se lance dans la performance filmée, on établit une action simple qui serait motrice, soit sortir les éléments de la mallette, et les y remettre, tout en parvenant à rendre crédible le scientifique, faire croire en son grand savoir alors qu'il réalise une action insensée. Je n'en dis pas plus, il valide l'action absurde et grotesque, et il se lance.





J'ai révisé leurs prénoms Au programme de cette session avec les seconde Pro, une sortie en ville pour prendre des photos qui serviront de fonds à leurs personnages. Je les attends, je suis prête, l'appareil photo est chargé, monté sur pied, prêt à être positionné selon les choix et les cadrages de chacun dans les ruelles de Limoux. Je suis très optimiste quant au déroulement de cette séance, en plus j'ai révisé leurs prénoms, je vais les bluffer sur ce coup-là (enfin, ils ne le montreront pas, mais je le saurai et ça me donnera des ailes). Il me faudra être stimulante et encourageante pour que chaque élève fasse des choix esthétiques justifiés et conscients : - Regardez ça si c'est pas magnifique ! - C'est laid. - Il y a du bleu, différentes matières, et ce double grillage… Ça n'inspire personne pour son personnage? - Ouais, si moi… - AAAAAAAAAAAAAHh ! Mister A, le riche héritier qui a tellement d'argent qu'il en est devenu idiot, c'est ça hein, ton personnage? - Ouais, à peu près… (´tain, la pauv’ meuf elle part dans un délire toute seule… Enfin ça semble la rendre heureuse, je vais pas lui casser ça) - Tiens l'appareil, là tu zoomes/dézoomes, là tu bascules l'appareil d'avant en arrière et tu bloques en tournant, là tu montes ou descends l'appareil, là tu peux faire une rotation, et là tu déclenches! N'hésite pas à te déplacer dans l'espace! Tu prends autant de photos que nécessaires.



/CLIK/ - Voilà j'ai pris ma photo. - Es-tu satisfait de ta photo? - Oui. - Voyons… C'est pas mal du tout ton cadrage, on voit bien le bleu, on voit les différentes strates de matières, et regarde si on se décale un peu on a plus de bleu, j'aime beaucoup la bâche bleue, ses plis, j'ai envie d'en voir un peu plus… Qu'en pensestu? /CLIK/ tiens prends-en une autre toi aussi, avec un autre cadrage! /CLIK/ Voilà comment la session s'est passée, dans une légèreté productive, j'ai eu les mêmes sensations que lorsque j'étais en arts appliqués, bon nous étions tous hyper passionnés par la chose artistique, donc on pouvait passer des heures face à un tel mur pour le dessiner, en entier ou des parties… Ah le kiff!

Sarah de l'Opéra Je suis Sarah de l'Opéra, je suis une Star de l'Opéra et quand je chante je donne des frissons à mes fans. Je suis la première du classement « femme » à l'Opéra. Quand j'étais petite je voulais chanter mais mes parents n'étaient pas de mon avis donc je m'entraînais dans ma salle de bains sous la douche, puis à l'âge de mes 12 ans j'ai décidé de poursuivre mon rêve et j'ai fugué pour aller à Paris, la ville des Stars. J'ai commencé à faire des castings, j'ai rencontré Marylin Monroe. C'est elle qui m'a tout appris et qui m'a fait devenir une grande Star de l'Opéra. Miss N. Seconde Pro Photo du fond et photomontage réalisés par Miss N



Merci mec Je cours pour rejoindre Mister A, de Terminale, nous avons une session alter ego, j'installe tout : les accessoires sont déployés sur la table, toutes les lunettes, le panel de bandanas et de moustaches, les perruques parfaitement présentées. Puis j'attends… Personne, je regarde partout autour de moi, au delà des vitres à 180° autour de moi, je suis un aigle royal, je suis prête à bondir sur ma proie pour la ramener dans l'atelier de travail… Je le vois enfin, démarche tranquille, l'air innocent, Mister A rentre au CDI, il se dirige vers les ordis, et s'installe peinard pour bosser je ne sais quelle matière primordiale. Je vole tout en sortant mon cou tendu, duquel tournoie une tête à l'affût : - Hey! Bonjour, on a rendez-vous! - Ah? C'est aujourd'hui? Je croyais que c'était vendredi prochain. - Ah non, c'est ce vendredi! - Aïe. Bon. Ben. Tant pis. - Quand peux-tu venir travailler la semaine prochaine? - Euh, la semaine prochaine, j'ai plein d'exams… -? - !?! - C'est dommage, j'avais tout installé pour travailler dans de bonnes conditions… Bon,…Bonne fin de journée à toi, travaille bien. Voilà, c'est mort, le mec n'est pas du tout motivé en fait. Il m'a piégée... Il m'avait déjà plantée lui au fait!? Ah le saligaud, alors que j'aurais pu travailler avec des jeunes vraiment motivés. Bon, ça fait partie du truc, et puis ça me teste aussi au passage. Je vais quand même pas lui dire merci… ? …?


Ben si, je vais lui dire merci. Merci mec. Merci mec, tu m'as plantée, deux fois en plus, grâce à toi j'ai expérimenté la loose absolue, celle où je te prépare l'atelier pendant vingt minutes, je t'avais même sortie la tenue de danse orientale, et toutes les moustaches, les quatre bandanas, et même la couronne de Reine, tous les chapeaux,… Tu vois j'avais sorti le grand jeu, je veux dire que je t'avais tout déployé pour ta session de deux heures, fallait bien ça! Puis je te cherche et je t'attends pendant encore vingt minutes, c'est énorme! Et tu rentres dans le CDI, avec un air agaçant de toutes façons puisque cela fait quarante minutes que je bosse pour du vent! Alors je viens te trouver, et tu joues la surprise, façon acteur de Sitcom française, on entend les bruits du décor en carton qui résonnent autour de tes mots, ´tain ça sonne faux mec, tu m'as plantée, deux fois, bordel! Tu te rends même pas compte du boulot que j'ai fait, t'aurais été parfait en danseuse orientale, je t'aurais mis de la musique, on aurait dansé sur les tables, tout le lycée aurait frappé des mains, France3 Languedoc Roussillon serait venu nous filmer, on aurait fait une thèse sur les stéréotypes genrés, et comment ces stéréotypes peuvent virer au sexisme, qu'ils assassinent les rapports humains, et qu'ils nous enferment dans des prisons virtuelles, parfois rassurantes et souvent terrifiantes, on aurait été invités par le nouveau Président de La République, on y serait allés, tous les deux en TGV 1ère classe pour recevoir la Légion d'Honneur du Mérite et du Savoir Ancestral et Progressiste pour l'action menée depuis ce fameux rdv du 17 mars,… Mais tu n'es pas venu.










Sarah Elle me raconte le personnage au travers de ses choix, le pull coloré c'est parce que Sarah est une bobo-bio très nature, elle la pense pas du genre à se maquiller, elle voyage beaucoup, c'est genre une baroudeuse, c'est pourquoi elle m'a demandé si j'avais une valise (et oui, j'ai même ça dans mes accessoires!), une meuf simple, sans chichi, un pull, des lunettes de soleil et une casquette et tout y est! basta!

Sarah, personnage du roman Ciel 1.0 - L’Hiver des Machines de Johan Heliot. - “Nous ne pouvons pas seulement respirer un air recyclé, insista Sarah. Cela nous ferait le plus grand bien de remplir nos poumons d'oxygène naturel, de voir la lumière du soleil également. Je vous ai obéi sans discuter jusqu'à présent. Vous pourriez nous accorder une escale en guise de récompense. - Je comprends le concept. Je vous fournirai la récompense demandée. Vous serez avertis en temps utile. - Tu vois ? fit Sarah. Ça vaut toujours la peine de discuter.” Miss I. Photo du fond réalisée au Lycée par Miss I.



Jenny, personnage du roman Ciel 1.0 - L’Hiver des Machines de Johan Heliot Je me suis déguisée en Jenny de Ciel 1.0, d'après, l'extrait du début, où elle est en soirée. Il n'y a pas vraiment d'indications sur son physique mais je l'imaginais ainsi. “Ce soir-là, la fête battait son pleincomme presque tous les soirs[…] Mais Jenny connaissait de nombreux moyens de lutter contre les frimas. Danser toute la nuit, par exemple. Ou avaler des shots de vodka, même si les effets désagréables commençaient à se faire sentir[…]Pas facile de se repérer avec les flashs des stroboscopes. Et inutile de chercher à se renseigner. Sa voix ne porterait pas loin, noyée sous les décibels projetés des haut-parleurs par le marteau-pilon de la techno. […]Elle constata qu'elle avait perdu tous ses repères. C'était le problème avec les teufs sauvages plus ou moins organisées dans les friches industrielles de la ville…” Cet extrait nous donne beaucoup d'indices sur le genre de soirées qu'elle fréquente : elle boit beaucoup, elle danse beaucoup, elle veut juste s'amuser peu importe où et comment elle le fait. Il est dit que la musique est techno donc je l'imaginais bien toute colorée, extravagante, délurée. Je l'imaginais extravertie aussi, vu qu'elle est venue toute seule, ce qui veut dire que ça ne la dérange pas d'être toute seule au milieu de tout ce monde. Miss C. (Photo du fond réalisée à Limoux par un lycéen de Snde ECM)



Ida Steiner, Lever de Rideau sur Terezin, de Christophe Lambert. Sur cette photo, on retrouve le personnage d’Ida tiré du roman Lever de Rideau sur Terezin, de Christophe Lambert. “Tout à coup, il cligna des paupières : il avait cru voir sa femme, Ida, parmi les déportés.” “Elle avait la peau blanche et les yeux grands ouverts, mais sans expression, comme ce jour où Steiner l’avait découverte morte, en rentrant chez lui. Ida était une femme fragile.” “Elle s’était éteinte dans un souffle, pareille à la flamme d’une chandelle, un après midi où elle lisait un roman de Marcel Proust assise dans un confortable fauteuil à côté de la fenêtre la mieux exposée de leur appartement. Une mort douce et calme à l’image de son caractère.” Pour le choix des accessoires, nous nous sommes basés sur les extraits ci-dessus, et sur notre imagination. Ayant le choix pour l’aspect physique, nous avons utilisé une longue chevelure blonde et un teint blanc qui nous semblait représenter une nymphe ou autre belle femme digne d’un personnage de mythologie. Pour le choix des vêtements, nous avons voulu coller le plus possible au style vestimentaire de l’époque. “Parfois, ses lèvres prenaient une teinte bleuâtre qu’elle tentait de dissimuler sous du maquillage rouge”, voilà ce qui explique la présence de la trace de rouge-à-lèvres sur la joue. Travail en binôme : Mister A. et Miss M. (Photo du fond téléchargée d’internet)



Jean Milton, Lever de rideau sur Terezin de Christophe Lambert. Le personnage ici illustré est Jean Milton issu du livre Lever de Rideau sur Terezin écrit par Christophe Lambert. L'histoire prend place en pleine IIème Guerre Mondiale, plus précisément entre 1943-1944 dans le camp de Terezin en Tchécoslovaquie. Milton est un chansonnier et humoriste, habitué de la scène parisienne il partage de nombreuses connaissances de Victor Steiner du fait de ce milieu restreint. De caractère blagueur, Milton apporte une touche de vie et d'espoir dans cette atmosphère de mort. Malheureusement cela va causer sa perte. «Jean Milton s'écroula, un trou fumant dans la tête. Sa casquette avait été soufflée par l'impact. Il tomba sans un cri. La neige se colora de rouge et commença à boire son sang. Plus personne ne riait. Plus personne ne bougeait. Le temps semblait coagulé.» Nous avons souhaité faire ressortir le style vestimentaire d'un civil français de cette époque à travers le choix du pantalon beige, la chemise blanche neige faisant référence à sa mort, la ceinture en cuir et surtout l'inévitable béret. Travail en binôme : Mister L. et Mister B. (photo du fond téléchargée d’internet)



Le mâche-eau Miss S a créé le macho (prononcé “mâche-eau”). - Un mâche-eau? C'est quoi… ???… ? Ahh macho! (“Mattttcho”) Hey! “Fillette, fillette, si tu t'imagines, xa va xa va xa va durer toujours…” Ben oui, fillette, faut xa claque quand on parle de ce type de mecs périmés, faut xa claque comme les bruits de bouche k-font ces bouffons à nos passages resplendissants, faut xa claque comme une gifle kon foutrait à tous ces mâles disgracieux ki prennent les meufs pour des objets, faut xa claque comme une fessée kon donnerait Q-nu à ce malotru d'outretombe qui pense qu'une meuf, ça reste au foyer et ça se cache, ouais “matcho”, fillette, fillette faut xa claque quand on le prononce, c'est une question de survie. Alors, j'ai pas du tout dit ça, mais je l'ai pensé fort, et mon message est passé par le non verbal, tu vois. La prononciation non claquante de macho en mâche-eau était mignonne et attendrissante, parce que j'y ai vu un féminisme débutant, elle a voulu traiter de cette posture débile de certains hommes, et s'en moquer. Ce n'est pas anodin de créer le personnage “le macho” quand on est une jeune femme, probablement victime du harcèlement de rue comme le sont toutes les femmes, y compris les vieilles biques comme moi.





Juan Carlos de la Vega, le Peintre SDF Juan Carlos de la Vega est un peintre cubain qui vit à La Havane. Etant en manque d’inspiration, il décida de vivre dans la rue, et depuis, l’inspiration lui est revenue. Miss R.

Marie-Antoinette de La Street. Marie-Antoinette de La Street, ou M.A.S., est une jeune aristocrate française qui a beaucoup changé depuis qu’elle a déménagé… Elle adore le “Street-Style” mais veut garder ses racines issues de la jeunesse privilégiée. Elle dépense l’héritage de son père en fringues “Nike”. Elle est un peu hautaine, mais genre, trop sympa! Miss Y.

La Reine du Ghetto Mon personnage habite dans un ghetto et fait partie d’un gang. Tout le monde la respecte dans son gang. Elle est mystérieuse mais les gens la remarquent. Elle hypnotise les gens à travers ses lunettes. Elle porte toujours un foulard pour montrer son gang et sa couronne pour montrer que c’est la Reine. Miss A.-M.






Intervention à l’école Jean Moulin de Limoux 21 avril 2017



Liens vers les blogs présentant les différentes actions menées durant la résidence ALTER EGO : - Ensemble des productions : http://alterego-residence.tumblr.com/ - MANIFESTASCIENCE du 27 avril 2017 : http://alterego-scientifique.tumblr.com/ - Prix D’un Livre à l’Aude : http://alterego-dlad.tumblr.com/ - Prix Les Incos : http://alterego-incos.tumblr.com/


Merci à Monsieur Laïb, Proviseur du Lycée Jacques Ruffié pour l’accueil qui m’a été réservé durant les deux mois de résidence au sein de l’établissement. Merci à Véronique Gardair, Professeure-documentaliste au CDI et Référente culturelle de la résidence, Nucy Hernandez, Professeure principale de la classe de 3ème Pro, Marie Deléage, Professeure en classe de Littérature et Société, Laure Claustres, Professeure principale des Seconde Pro et Terminale Pro, Philippe Boeuf, Professeur de Physique-Chimie et organisateur de l’événement Manifestascience-2017, Olivier Coquillard, Professeur d’EPS, Laurent Wenger, Directeur de l’école Jean Moulin de Limoux. Merci à Mathilde, Marisol, Aldja, Belkacem, Jean-Louis, Kelly, Louis, Nathan, Trécy, Vanessa, Néo, Mélanie, Leslie, Léa, Zoé, Chloé, Célia, Ian, Idrys, Emanuelle, Lucie, Sally, Rainazo, Alexis, Bilel, Juliette, Cécile, Loïs, Sirima, Quentin, Kassandra, Marie, Justine, Jean-Baptiste, Yevlena, Pierre-Jean, James, Priscilla, Romina, Noélie, Zak, Amaël, Angel, Salomé, Tess, Clara, Ida, Pauline, Louise, Agathe, Hannah, Anne-Marie, Dalia, Chloé, Niels, Rosa, Valentin, Amine, Raoul, Mathis, Sophia, Julie, Antoine, Luc, Baptiste, Rosie, Rosina, Gabriel, Emile, Félix, Hugo, Bilel, et tous les autres étudiants avec lesquels j’ai travaillé, ainsi que la classe de CM1 de l’école Jean Moulin. Ce livre a bénéficié du soutien financier de la Région Occitanie et du Ministère de la Culture et de la Communication-DRAC Languedoc Roussillon.



Sophia El Mokhtar sophia.elmokhtar@laposte.net 06 29 88 60 59 http://sophiaelmokhtar.com/


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