Soma #45

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NUMÉRO QUARANTE CINQ / Camping sauvage






La Double de bienvenue

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45 Max Lemmens Kickflip - BRUXELLES © Thomas Marchal.


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Ours

NUMÉRO QUARANTE CINQ octobre - novembre - décembre 2016

Joel JUSSO - 360 flip sur un énorme téton finlandais - HELSINKI © Clément CHOULEUR

PHOTOGRAPHES

& rédacteurs Directeur de la publication

Fred DEMARD 06 14 24 33 94 fred@somaskate.com

Graphisme

Seb JOLY Publicité

Corinne LASMEZAS 06 07 75 75 61 corinne@somaskate.com

Photographe maison

Loïc « LB » BENOIT Petit reporter

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Lisa JACOB SOMA est édité par LES ÉDITIONS DU GARAGE SARL 13, rue de L’Isère 38000 GRENOBLE ISNN : 1959-2450 fred@somaskate.com

Clément Chouleur Julio Sola Fabien Ponsero Samu Karvonen Clément Le Gall Florian Lanni Nikwen Vincent Coupeau Fred Ferand Keke Leppala Thomas Marchal Clément Chouleur Guillaume Dalonneau ILLUSTRATEUR : Morgan Navarro BROUILLON : Arno Wagner Imprimé en France chez : IMPRIMERIE DES DEUX-PONTS

Toute reproduction, même partielle, du contenu de ce magazine est strictement interdite, blah blah blah, poursuites judiciaires, avocats, coup de pied au cul, etc, vous connaissez la chanson. Depuis le temps qu’on vous le répète… Mais vous savez aussi qu’on ne mettra jamais ses menaces à exécution de toute façon. Si vous êtes assez couillon pour reproduire tout, ou juste une partie de ce magazine c’est que vous devez sacrément vous ennuyer. Que voulez-vous qu’on vous dise ?



Sommaire

NUMÉRO QUARANTE CINQ octobre - novembre - décembre 2016

Après quelques petits ennuis de santé qui l’ont fait dormir deux bonnes semaines, Matisse Banc est bien reposé et il a une patate d’enfer ! Une part folle dans la vidéo Blaze, une interview dans Sugar et ce FS Lipslide dans Soma… C’est re-parti mon kiki !© Julio Sola

INTRO

FF DE MARS

Pour les premiers de la crasse et les pionniers de la rue

La Fédé vs La Fonky Family

P.12

P.32

P.64

5 JOURS À LYON

MASSACRE À LA TRONÇONNEUSE

L’MATOS Une board Phil Zwijsen pour le mur, une autre pour skater, et une autre pour plus tard…

P.40

P.70

CRAYON

ATOHM TATANE TOUR

LETTRE À MICHEL ONFRAY

Le dessin ridicule de Morgan Navarro en direct du futur

Une histoire de sandalettes et de gros sous en Croatie

Michel, si tu lis ce magazine, béh, t’es tombé vraiment bas…

P.18

P.50

P.74

LA CROISADE DE L’ENFER

LES VACANCES À L’ENVERS

LE VRAC

Bastien Marlin et Lionel Cabos en lune de miel dans Gay Paree

Vive les gros contests avec des prize money indécents

P.58

P.76

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P.20

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Ras le bol des gros contests. Vive les petits trucs locaux avec trois fois rien à gagner

P.14

Dustin Dollin en tour franco-français

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Les gars d’Etnies France se battent contre un fs flip en Josimardie

SHUT UP AND SKATE Deux vieux, un mec en roller et un one foot à Décath’



L’intro

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L’intro

octobre - novembre - décembre 2016

À LA RUE

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elon une étude mondiale et tout à fait sérieuse, réalisée sur un échantillon de 12 000 parents, il apparaît que le temps moyen de jeu des enfants a baissé de façon spectaculaire ces dernières années. On y apprend en effet que dans nos sociétés occidentales, la majorité des enfants passe moins de temps à l’extérieur que les détenus de prison. Rendez-vous compte… En cause, sans grande surprise, les nouvelles technologies. 78% des parents admettent que leurs enfants refusent de jouer sans l’usage d’écrans. C’est effrayant, et je sais que c’est vrai puisque je tiens cette info d’une pub pour de la lessive Skip (sans déconner). Alors c’est du sérieux. C’est terrible évidemment, mais ça n’est pas une si grande surprise non plus, et puis tant pis pour eux, ils n’ont qu’à faire du skate aussi ! Nous sommes bien placés pour savoir qu’il n’y a rien de mieux que traîner dans la rue, passer la journée dehors, s’allonger sur le trottoir pour se reposer, s’asseoir sur un muret pour talk-shitter pépère avec les collègues... C’est là qu’on peut se féliciter d’avoir le skateboard dans nos vies. À moins de vivre dans la rue, ce qu’on ne souhaite à personne, peu d’activités vous permettent de passer autant de temps dehors, à vous rouler par terre et permettre ainsi à Skip de vendre toujours plus de lessive. Quand on sera trop vieux pour oser s’exhiber dans la rue avec un skateboard (vers 112 ans), ce ne sont pas les 3-6 flips qui vont nous manquer, ce sont les heures passées à traîner et à utiliser la rue comme peu de monde a la chance de le faire. Savourez bien chaque instant passé à vous rouler par terre, parce que sans le skateboard, même si c’est sympa de bouquiner sur un banc, la rue n’a pas la même saveur. FD



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l’matos « LE SKATE C’EST LA LIBERTÉ, Y’A PAS DE RÈGLES… » HA HA HA, FOUTAISES ! SI T’AS PAS LE T-SHIRT QUI VA BIEN, LA BOARD QU’IL FAUT OU LES CHAUSSURES DU MOMENT, T’ES MORT MON P’TIT GARS ! 1

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# Boards 1 En attendant de se faire péter une Van Der Linden, c’est pas mal de commencer par une petite Anti-Hero « Robbie Russo ». Elle marche bien en bs smith grind. 2 Et encore un model pour Bowie. Il cartonne en ce moment dans le skate ! Antiz « Diamond Owls » 3 Aaaah, si le Blue Van de Antiz pouvait parler. Il en aurait des trucs à raconter… Antiz « Point Break » 4 Quel animal ce Justin Figueroa ! Il mériterait presque une dernière part dans une grosse vidéo … Baker « Figgy Made 2» 5 Attention, nouvelle série signée Brabs chez Cliché, attrapez les toutes ! Ici, c’est une « Max Géronzi »

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6 « Phil Zwijsen », ce génie, est officiellement professionnel de skateboard chez Element. Il était (sale) temps. 7 Comme Phil ne skate plus que sous la pluie de nos jours, il a besoin d’un sac pour garder sa planche au sec avant d’aller rouler dans les flaques. Normal. Element Board Bag 8 Nouveau pro lui aussi, « Blake Johnson » se retrouve en King Kong pour Santa Cruz

# Chaussures 9 Si même les meilleurs succombent à la mode du Toe-cap, vous ne pouvez plus résister : DC « Evan Smith » 10 Supra sait aussi faire simple... Ces "Flow" sont tout ce qu'il y a de plus basiques et fonctionnelles. Et elles ne montent pas jusqu'au genou...

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11 Celles-là, elles vont cartonner c’est sûr, en 1991… Airwalk « Enigma », gros succès à l’époque. Aujourd’hui on se demande un peu pourquoi.

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12 Une petite C1RCA « Essential » mi-camo / mi-pas camo, comme on aimerait en voir un peu plus souvent au skatepark…



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# Chaussures 13 Avec la Made 2 qui vient de sortir c’est le moment ou jamais de se faire péter une petite paire d’Emerica. Des « Reynolds /Indy » c’est pas mal pour commencer.

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La nouvelle Globe « Mahalo SG » pour skater avec la classe et la nonchalance de Mark Appleyard.

15 Une Vulc pas vraiment Vulc mais pas vraiment Cupsole non plus. Wafflecup qu’ils appellent ça . Le toucher d’une Vulc avec le soutien d’une Cupsole qu’ils disent. Vans « Kyle Walker »

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Avec un nom comme « Janoski », ils n’arriveront jamais à en vendre ! Ils sont vraiment à la ramasse chez Nike SB. Ils ont même rajouté « Hyperfeel XT » pour compliquer les choses… N’importe quoi !

# Wear etc 17 Un petit T-shirt HUF pour crâner au collège et pour changer du T-shirt de Rihana surtout, le Thrasher là… 18 Un bonnet d’une marque de casquettes, mais en collab’ avec une marque de board. Pourquoi faire simple quand on peut avoir un bonnet Hélas/Cliché ! 19 Méchant futal mi-caillera/mi-sport /mi-chino de chez Tealer, approuvé par my man Gorka De France ! Manque plus que la petite sacoche, et t’es bon !

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20 Trépied de l’extrême de chez XSories, carrément « pieuvresque » qui s’accroche de partout. 21 Levi's Field Jacket camouflage pour passer inaperçu dans la ville. Pas vu pas pris.

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22 Plus classique tu meurs, plus classe aussi. Veste Carhartt « Detroit » pour porter des sacs de ciment, ou pour faire le beau gosse le soir.

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La Croisade de l’Enfer

LA CROISADE DE L’ENFER Texte : Fredd - Photos : Fabien Ponsero & Samu Karvonen.

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ous les ans à la même période, les gars d’Antiz prennent leur matériel de camping, leurs bites, leurs couteaux, leurs plus beaux ticheurtes Motörhead ou Maiden et ils partent en pélerinage. Une quête mystique annuelle, toujours vers le même lieu de dévotion : Clisson, France, endroit sacré pour des milliers de beatniks métaleux venus communier leur amour du solo de guitare et du beuglement en rythme. Et de la bière aussi. Enfermés dans une grande cage de métal, sur des obstacles tout aussi métalliques, ils ont la lourde tache de faire l’animation pour des festivaliers assoiffés de sang. Trois jours et trois nuits à écouter du Heavy-Metal, ne pas dormir, ou très peu et très mal, à skater et cuire sur de la tôle en s’hydratant au houblon… Comment ne pas devenir complètement dingues dans de telles conditions ? Aucune idée.

Tous les ans, les gars d’Antiz s’entêtent à ne pas simplement faire l’aller-retour vers le fameux festival de l’enfer, mais ils s’appliquent à continuellement visiter des spots aussi atypiques que perdus dans la campagne française. Tous les ans Soma s’applique à rendre compte de leurs aventures dans ses pages. Et tous les ans, à force, on finit par connaître la chanson par cœur. Parce que vu de loin, les spots, aussi atypiques soient-ils, on commence à en reconnaître quelques-uns et les photos finissent par avoir un petit air de déjà-vu… Ajoutez à cela que tous les ans, les gars semblent enclins à de plus en plus faire la fête et on n’est pas loin de ce qui pourrait ressembler à un fiasco sur le plan médiatique. D’autant plus que cette année, ils ont mis les p’tits plats dans les grands en se faisant voler leur matos vidéo (avec tous les footages), et que Samu Kar- V i c t o r P e l l e g r i n vonen a eu la bonne idée de se casser le O l l i e - S a i n t e s pied dès les premiers jours. Et pourtant, © F a b i e n P o n s e r o .


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# 45 La Croisade de l’Enfer


et poooourtant, chantait Aznavour, et pourtant les photos que nous a ramenées Fabien Ponsero nous ont clairement donné envie de faire un numéro spécial sur leur croisade de l’enfer (avant de nous raviser)(parce que faut pas déconner non plus). Et puis, il faut reconnaître qu’ils ont fait l’effort de trouver un champ de full pipes, d’embarquer quelques guests prestigieux (attention breaking news) et que même quand ils disent qu’ils n’ont pas beaucoup skaté, ils ont toujours skaté plus que de raison et toujours nettement plus que la moyenne du skateur « professionnel » en Tour. Voici une interview de Julien Bachelier, le grand responsable de ce joyeux cirque itinérant qui vous expliquera tout cela bien mieux que moi qui n’ai jamais mis les pieds au Hellfest : C’est ton combientième Hellfest ? Troisième à la suite, mais sinon c’est le cinquième. On était allé au premier avec Carhartt, avec les modules en croix, puis après il y a eu le bateau pirate et on est revenu il y a trois ans. C’est vous qui dessinez les obstacles ? C’est Madneom qui dessine (et construit), Jérôme (Chevallier) était aussi impliqué cette année, et moi aussi un petit peu. On est revenu à un design en croix d’ailleurs. Vous n’en avez pas marre de vous faire le même pélerinage au Hellfest tous les ans ? C’est pas un peu éprouvant ? La première année, on avait fait tout un Tour et on avait fini au Hellfest. Mais après quinze jours de skate, t’arrives à Clisson et t’es un peu sec … Ça fait deux ans qu’on fait le Hellfest en premier et ensuite on part en Tour. Donc tu attaques par trois jours vraiment intenses où tu perds dix ans de vie à peu près, puis tu mets quatre jours pour récupérer … Parce que c’est des démos en fait, on fait six heures de démos de skate par jour.

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Jérôme Chevallier Fs flip (replaqué dans la petite courbe) © Fabien Ponsero.

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Six heures ! Mais vous faites des équipes ? Trois créneaux de deux heures par jour. On fait des équipes oui. C’est l’enfer… C’est vraiment du boulot en fait. Les gars skatent à fond, ils ne trichent pas. Ils se font mal… Samu s’est même fait une bonne cheville cette année, direct. Il y a trois ans, on avait fait le tour de la Bretagne, c’était mortel d’ailleurs, des spots incroyables et l’an dernier on est parti dans le Nord, en direction de la Belgique/Hollande avec les Russes de Absurd.


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Ah oui c’est vrai. Mais vu de loin, on a l’impression que c’est un peu tout le temps les mêmes spots. Bein, quand on a fait le tour de la Bretagne, on était parti de Limoges, puis La Rochelle et cette année on est descendu dans le Sud-ouest donc on est repassé par La Rochelle et donc il y a des spots qu’on a refaits. Y’a la coque de bateau… Mais ça c’est obligatoire. C’est magique !

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Et c’est quoi ce champ de Full Pipes ? C’est vers Cognac. On était à Saintes, on skatait le snake et les locaux, qui étaient vraiment cools d’ailleurs, nous ont montré deux/trois photos du spot. Ils nous ont dit que c’était à une heure alors on est parti direct ! On est arrivé là-bas, en pleine cambrousse, avec un énorme champ derrière et des bois, on s’est posé c’était idéal… Ce sont des citernes de Cognac, vides, y’en avait une quinzaine à la suite, quatre mètres cinquante de diamètre, tout en résine. Parfait ! Ce sont les meilleurs fullpipes que j’ai skatés. Ça ne glisse pas et avec le soleil qui passait à travers la résine y’avait une lumière qui était folle. Des couleurs incroyables. Ça fait partie de ces petits trésors sur lesquels tu tombes quand tu es sur la route. Faut profiter du moment… Et donc, l’an dernier avec les Russes on était parti direction Belgique/Hollande, rien à voir.

R e m y Ta v e i r a Fs carve - Cognac © Fabien Ponsero.


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Peter Molec Bs 50-50 - Saintes © Fabien Ponsero. Jérôme Chevallier Fs one foot- Fontenay le Comte © Samu Karvonen

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Ludo & Mika - Clisson © Samu Karvonen


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Exact. C’est vrai que c’est complètement différent. C’est peut-être le fait qu’il y ait toujours le Hellfest au milieu, ça donne une impression de déjà-vu ? En fait, les gars sont tellement motivés pour aller voir les concerts et passer du temps dans ce festival que voilà, on l’a refait… Et l’an prochain vous refaites ? Je ne pense pas… Vous allez vous faire un petit festival de Jazz à la place ? Ouais voilà, on va aller à Marciac… Et donc pour en revenir à cette année. Vous êtes allés où ? Alors, cette année y’avait un concept ! On est parti avec Pierrot (ex-boss du shop Sirocco à La Rochelle) qui est à bloc de Surf. Et donc, on a embarqué des boards de Surf et on a longé la côte vers le Sud. Sauf que personne ne sait surfer… Y’a Sam (Partaix) qui est un peu à fond depuis qu’il habite à Biarritz mais bon… En fait, il y a trois ans, quand on a fait le tour de la Bretagne, Pierrot nous avait fait faire du surf. On avait campé deux jours sur la plage, on a essayé de surfer et on a adoré ça. Donc cette année on s’est dit qu’on allait y aller à fond. Mais en fait c’était les Pieds Nickelés à la plage ! On a fait deux fois du surf. J’ai mis les pieds dans l’eau, je me suis retrouvé à 200 mètres du bord entre les drapeaux des baigneurs, j’ai senti le danger

et je suis rentré… Jérôme s’est charcuté le pied dans l’eau. Je crois qu’il s’est coupé avec ses méduses, ses sandalettes en plastique là... Et je ne sais pas si c’est lié mais il s’est même chopé un staphylocoque après. Enfin voilà, c’était drôle de voir des skateurs à la plage. Tout le monde est arrivé avec son pack de bières, on a pris le soleil pendant 3 ou 4 heures et voilà. On est surtout resté sous le parasol… Mais Pierrot était au taquet ! C’est qui Pierrot ? Pierrot c’est la personne qui a monté Sirocco à Nantes puis La Rochelle avec Christophe Bétille, en 92 je crois. C’est quelqu’un avec qui on s’est lié d’amitié au fil des années. Il a vécu le skate dans les années 80 et 90 avec Christophe et c’est génial de voir cet échange entre plusieurs générations de skateurs et de pouvoir continuer la route tous ensemble. Il est venu à Berlin avec nous aussi. C’est un peu le doyen, le papa sur certains Tours Antiz. T’étais juste content qu’il y ait quelqu’un de plus vieux que toi ! Oui voilà. On est super contents de l’avoir et il est content d’être là…. Donc bref, le concept, c’était de faire du surf sauf qu’on en n’a pas fait. On a fait La Rochelle, Saintes, Cognac, Bordeaux, Mimizan, Contis, Hossegor, Pau, Biarritz et Tarbes et voilà, fin du trip.

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On vous avait croisé à Biarritz d’ailleurs, et je me souviens que vous vous plaigniez un peu de ne pas avoir assez skaté… Disons que le Hellfest ça te tue ! Donc tout le monde était crevé au départ et finalement ça a vraiment skaté à partir de Saintes, parce que c’est vraiment mythique, ça faisait partie des spots incontournables. Cognac aussi. Avant vers La Rochelle, il y avait ce petit bled avec les coques de bateaux parce que c’est à voir, et donc c’était vraiment des spots à part, agréable à skater. Ensuite on est arrivé à Bordeaux, mais c’était la canicule et on restait très peu de temps… Puis plus bas, y’a vraiment de bons skateparks, mais j’avoue qu’on a un peu galéré avec les spots. Il faut dire qu’on a eu un peu de pluie et on faisait aussi la tournée des shops en même temps, mais on a vraiment eu du mal à trouver des spots. J’ai trouvé que le Sud-Ouest c’était difficile à ce niveau-là. Victor & Julien Mais c’est aussi parce que ça va Clisson trop vite, on reste très peu de © Samu Karvonen.


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Julien Bachelier Bs smith grind - Fontenay le Comte Š Samu Karvonen.

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Sam Partaix F s a i r- F o n t e n a y l e C o m t e Š Fabien Ponsero.


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temps au même endroit donc t’as pas trop le temps de profiter. Mais c’est pas grave au final. On a vraiment passé du bon temps avec tout le monde. D’ailleurs, c’était quoi ce guest improbable ? Oui, on avait Dustin Dollin. Il est bien pote avec Sam et je crois que ça faisait quelques temps qu’il suivait un peu ce qu’on faisait, de loin. Il nous a dit qu’il aimerait bien partir avec nous. Il nous a rejoint au Hellfest et il a fait tout le Tour avec nous. Il a skaté un peu ? Oui il a skaté ! Les fullpipes… À Darwin aussi, on s’est fait une bonne session et puis entre quelques bières, il nous a même fait un switch drop sur la big qui a mal terminé, à trois heures du mat… (il s’est mis une énorme tarte, coup de boule géant dans le plat). Mais oui, il a skaté. Il est un peu cassé par contre. Et puis je pense que boire des bières du matin au soir ça aide pas beaucoup… C’est dommage. Par contre, quand il y va, il y va ! C’est pour ça qu’il se prend des boîtes de taré. C’est hallucinant. Même quand c’est sûr que ça va pas rentrer, il reste dessus. Donc ouais, Dustin c’était vraiment génial de l’avoir, c’est un super gars, intelligent, avec qui on a passé des super moments, avec qui tu peux discuter, sensible, très sensible… Et puis là, on part bientôt en Roumanie, et Dustin revient avec nous. Et puis on va en Grèce après et je pense qu’il va venir aussi… Y’a eu un bon feeling, une bonne osmose, on faisait de la musique le soir, il a super bien accroché avec Jérôme (Chevallier). Comme tout le monde. Et puis oui, y’avaient Jérôme et Choco (le chien) qui viennent

tous les étés depuis trois ans avec nous, avec leur van. C’est génial. Jérôme c’était le MVP encore une fois ? Y’avait Victor (Pellegrin) cette année, autre guest d’ailleurs, qui a été un bon MVP. Il était au Hellfest et il nous a demandé si on pouvait le ramener chez lui (à Hossegor)… C’était génial de l’avoir, je le ne connaissais pas très bien et j’ai pas été déçu. Sacré numéro Victor ! C’est un chien fou. Tellement drôle. Et il est magique en skate ! Il est en train de prendre un niveau là… Son ollie à Saintes, il était aussi fou en vrai qu’il a l’air en photo ? Oui, c’était fou ! Et il l’a fait en très peu d’essais. Et l’histoire c’est que Ludo (Azemar) ne l’a pas filmé… De toute façon il se serait fait piquer le footage avec tous les autres après… Exactement ! Donc Ludo lui a demandé de le refaire, alors il a essayé deux ou trois fois, mais c’était tellement profond derrière qu’a un moment il a dit « j’vais m’faire mal » et il a arrêté. C’est vraiment chaud le transfert. Mocquin en 3-6 back c’est fou… Y’avait un local d’ailleurs, j’ai oublié son nom, qui était incroyable. Il avait plus de board, on lui en a passé une vieille, il l’a montée, il a fait le transfert first try, en grabant. Puis il a redémonté la board et il nous l’a rendue ! « Ouais trop bien, merci, j’en ai une autre à la maison »… Génial ! Y’a une bonne scène à Saintes. Vraiment sympa. C’est ça qui est bien dans ces trips, peut-être que ça se répète un peu, mais tu rencontres toutes les scènes locales et y’a une bonne dynamique dans ces petites villes. Tu partages des bons moments et c’est comme ça que tu découvres des nouveaux spots. C’était vraiment une bonne tournée de potes. C’est la caravane, t’embarques ceux qui sont motivés… On était quinze. Tout le monde se fait son petit campement, tout le monde met la main à la patte pour faire la bouffe.

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Vous ne vous êtes pas fait un petit hôtel à un moment ? Non. On s’est fait deux petits restaurants pour remotiver les troupes et parce que ça fait du bien quand même… Mais c’est tout, c’est low budget, mais c’est génial.

Dustin Dollin © Samu Karvonen.

Quentin Boillon Kickflip - Clisson © Fabien Ponsero.



FF De Mars

FF DE MARS L A

Lisa Jacob No comply tailslide pop out.

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Texte : Lisa Jacob. Photos : Clément Le Gall.

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omme la plupart d’entre vous j’imagine, je n’ai jamais bien compris à quoi pouvait servir une fédération dans le skate. Parce que ni vous, ni moi n’éprouvons le besoin de pratiquer en club pour s’intégrer à la communauté. Une fédération a en effet vocation à regrouper les pratiquants d’une même activité dans le but d’organiser et de cadrer sa pratique, en établissant des règles la régissant afin qu’elle puisse être tolérée par la collectivité. Hé oui, le skate est un « sport » reconnu par l’état depuis 1974, seulement ça ne nous empêche toujours pas de se faire virer des spots par les flics, de se faire insulter par des grands mères outrées et de vivre bien d’autres scènes de rues toujours aussi passionnantes. Ce n’est pas demain la veille que ça changera et que le skate sera vraiment accepté pour ce qu’il est. En attendant, ceux qui désirent une reconnaissance des pouvoirs publics sont contraints à l’assimilation (« l’assimilation culturelle est une forme d'acculturation, au

cours de laquelle un individu ou un groupe abandonne totalement sa culture d'origine pour adopter les valeurs d'un nouveau groupe »). Pour que le skate soit accepté par la société, il doit adopter ses valeurs (hiérarchie, compétitivité, soumission à des règles, valorisation de la performance, etc. Merci le capitalisme). D’où l’aversion des puristes pour l’institutionnalisation de la pratique. En effet, on a tous plus ou moins commencé le skate parce que l’on ne se reconnaissait pas dans ces valeurs coercitives, on se sentait opprimé par le système éducatif, soumis à l’autorité parentale, contraint de se conformer à la norme de peur d’être jugé, dénigré. En gros, on passait notre temps à s’autocensurer, à se dire que la liberté d’expression c’est une jolie théorie mais que c’est quand même plus simple de bien fermer sa gueule. Sur quoi on sortait faire du skate pour se créer un espace de liberté et extérioriser les frustrations accumulées tout au long de la journée dans ce monde de merde.


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des calins et une décoloration capillaire y avait Donc, comme vous le voyez, la fédération de rien à gagner... skate, ce n’était pour moi qu’une lointaine entité aux ambitions abstraites, cloîtrée entre les murs des skateparks et confinée aux circuits Tout ce que l’on nous avait demandé, c’était des championnats de France. Comme tout le de faire attention à ce qu’il n’y ait ni tabac, monde, je savais que ça existait mais ça me ni alcool sur les photos (pour ce qui est du faisait une belle jambe. Jusqu’à l’année dernière, texte, je sais plus...), easy, au pire y’a photooù j’ai participé pour la première fois à ce qu’ils shop. En fait c’est ça, j’ai compris, la fédération ont nommé le « collectif filles ». Traduction, sert à rassurer la société et les parents sur la dans le jargon non fédéral, ça signifie « tournée conduite du jeune skateur moyen : « oui de meufs ». Oui, maman, c’était fort car la promotion sympathique ce « EN GROS, ON PASSAIT du skate féminin petit voyage de fait partie de leur skate, on s’est bien NOTRE TEMPS À S’AUTOprogramme de dépensé aux entraîdéveloppement nements, j’ai même C E N S U R E R , À S E D I R E Q U E appris de nouvelles fédéral, ce qui me va droit au cœur, figures, les coachs L A L I B E R T É D ’ E X P R E S S I O N étaient gentils, ils cela va sans dire. En général, les nous laissaient C ’ E S T U N E J O L I E T H É O R I E regarder la télé velléités de promouvoir les filles jusque 10h du soir ne viennent pas et le matin on élaMAIS QUE C’EST QUAND souvent de la gent borait notre stratémasculine, mais gie d’attaque pour MÊME PLUS SIMPLE DE bon je ne leur jette les JO, ne t’inpas la pierre, moi quiète pas je n’ai BIEN FERMER SA aussi si j’étais un pas oublié de metmec, je m’en foutre mes protec’ .» GUEULE. » trais des meufs qui « Je déconne skatent, c’est clair ! maman, je me suis roulée par terre toute la semaine, j’ai pissé le sang, dégradé le mobilier urbain, je me suis J’avoue que la première année, j’avais un peu embrouillé avec un vieux con sur un spot et j’ai peur, je me disais qu’on allait passer nos journoyé mes courbatures dans l’alcool tous les nées dans des skateparks, qu’on allait peut-être soirs. » Mais attention pas d’amalgame, ça ne même nous obliger à porter des casques ou à veut pas dire que nous ne sommes pas des gens expliquer à des mères de famille l’importance respectables, un peu borderlines peut-être, de s’étirer après « l’entraînement »… Bin que néanmoins tout aussi dignes et intègres. N’ayez dalle, on faisait ce qu’on voulait en fait, c’estpas peur madame, votre fils ne finira pas forà-dire comme d’hab’, on dévalait les rues en cément junkie ou délinquant, il a moins de grillant les feux, on terrorisait le troisième âge chance que ça arrive en faisant du skate qu’en et on buvait des bières sur les spots, somme étant musicien d’ailleurs, si vous voulez mon toute un tour « classique », parfait quoi. Si on avis (méfiez vous des cours de guitare, ça comne me l’avait pas dit, je n’aurais pas cru à une mence comme ça et ça finit dans le club des initiative fédérale. Je pensais qu’ils étaient plutôt 27...). Et puis, grâce à la fédération, votre du genre trophées et médailles mais mis à part

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Hélène Gérard Kickflip drop-in


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FF DE MARS Chloé Bernard Bs Smithgrind Bowl de Fuveau

gens, mais je ne connais pas une fille qui se fasse des thunes en France grâce au skate (c’est déjà assez compliqué d’avoir du matériel, demandez à Chloé (Bernard), elle passe son temps à skater pieds nus ! ), ni en Europe d’ailleurs, même Vanessa Torres elle galère, elle paye son loyer grâce aux prize money des Xgames ou de la Street League, c’est moche, heureusement on a la CAF chez nous. Donc après avoir dilapidé mon RSA dans les pays du tiers-monde cet hiver, c’est tout naturellement que je me suis laissé invité gracieusement dans Vous voyez bien, pas de quoi s’affoler, vous le Sud. C’est dans pourrez le déposer le fief de Chloé, à au stade où il sera que pris en charge par « N ’ AY E Z P A S P E U R M A D A M E , Marseille, notre « conseiller des professionnels technique fédéral » diplômés d’état qui V O T R E F I L S N E F I N I R A PA S a décidé de nous le feront évoluer en emmener cette toute sécurité sur FORCÉMENT JUNKIE OU année. Ce qui est des espaces prévus à cet effet, bien D É L I N Q U A N T, I L A M O I N S D E un très bon choix étant donné la qualoin du péril de la lité du climat, l’acrue et des seringues. CHANCE QUE ÇA ARRIVE EN cueil toujours chaleureux des Trêve de blagues, FA I S A N T D U S K AT E Q U ’ E N locaux et le service revenons à ce trip, impeccable du je ne suis pas pour les écoles de skate É TA N T M U S I C I E N D ’ A I L L E U R S , Longchamp Palace. On a été logé et les compétitions S I V O U S V O U L E Z M O N AV I S » comme des princes dont le but est de dans la villa des sacrer un chamartistes de La Friche. On s’est occupé de nos pion mais je dois avouer que ce tour de skate courses et de nous faire à bouffer, on avait deux annuel est une chouette initiative de notre cher vans à disposition et une équipe média. Oui CNS (Comité National Skateboard). Je me vous l’avez compris, on baignait dans le luxe, demande bien où ils ont été chercher cette idée enfin certes c’était pas l’hôtel quatre étoiles et de génie ! Faudrait décliner le concept aux la limo, mais pour moi c’était pareil, j’ai pas collectivités territoriales, je vais en parler à l’habitude. Du coup, quand il y en a qui stresPatrick Kanner la prochaine fois que je vais sent parce qu’il manque un lit alors qu’il y a des dîner à l’Elysée. canapés partout, ça dépasse mon entendement. Niveau logistique rien à dire, ils s’y connaissent Et puis aussi, c’est mon seul trip défrayé de à la fédé. l’année donc bon, je ne crache pas dessus parce que le revenu universel n’a pas encore été voté. Je préfère préciser parce que parfois, on me L’équipe étant assez conséquente je vous pasdemande si je gagne des sous avec le skate. Je serai l’énumération de l’identité de chacune ne sais pas trop sur quelle planète vivent ces dont tout le monde se fout éperdument de toute

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enfant pourra pratiquer dans les meilleures conditions, je cite : « Le skateboard se développe au sein de clubs qui proposent des encadrements par des moniteurs qualifiés et passionnés. Sur des espaces de qualité et adaptés au niveau de chacun, la progression se fait en toute sécurité. Le port des protections comme le casque, les genouillères et les coudières, facilite un apprentissage sans risque. »


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Pauliana Laffabrier Carve grind Bowl de Fuveau

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avait de quoi faire dans le coin, mention spéfaçon. Neuf filles, de 17 à 34 ans. L’âge, en ciale à Pauliana (Laffabrier) qui a tout skaté revanche, c’est hyper important, par exemple sur son passage. là, on avait une mineure dans le groupe, ce qui a failli foutre la merde le soir où l’on s’est pointé à la soirée où Don Choa et Dj Djel Vu que c’était un peu la même équipe que l’anjouaient (FF de mars pour les incultes). née passée, on se connaissait assez bien pour Heureusement, elle a fait son plus beau sourire la plupart. Ce qui ne nous aidait pas à nous couaux videurs qui en une seconde ont perdu toute cher de bonne heure, mais je n’en dirais pas once de conscience professionnelle. Parce que plus là-dessus pour ne pas ternir l’image de c’est clair qu’on l’aurait planté là sinon, l’état sportif aseptisé de « l’équipe de France de d’esprit des skate ». Bon, sachez troupes n’étant pas aussi que le CNS à l’abdication, mais « S I O N N E M E L ’ A V A I T P A S dépend de la fédé bon j’imagine que de roller donc je ne D I T , J E N ’ A U R A I S P A S C R U voudrais pas que notre « conseiller technique fédéral » notre conseiller aurait dû prendre À U N E I N I T I AT I V E F É D É R A L E . technique fédéral ses responsabilités qui nous organise JE PENSAIS QU’ILS le cas échéant, ces petites vacances afin d’escorter chaque année les mineures vers É T A I E N T P L U T Ô T D U G E N R E perde son poste à des lendemains cause de moi. Au moins fun. moins, c’est un skaTROPHÉES ET MÉDAILLES teur à la tête du Il y avait une autre M A I S M I S À P A R T D E S C A L I N S CNS (normal vous me direz, sauf que fille assez jeune, non, ça aurait pu mais je ne m’en E T U N E D É C O L O R AT I O N être un type qui fait souviens pas bien, du « mountainelle a pris un train C A P I L L A I R E Y AVA I T board » ou du deux jours à peine « snakeboard »). après être arrivée, RIEN À GAGNER... » Comme dirait à croire qu’elle l’équipe média : était au bord de « c’est une belle personne ». Je soutiens son l’ennui avec nous. Nan, impossible, si vous voudévouement et même si on n’a pas forcément lez mon avis elle a dû confondre avec les chamle même combat lui et moi, on est du même pionnats de France. La preuve, elle a même bord. Croyez le ou non, mais grâce à lui on n’a laissé un message au « conseiller technique pas eu à se balader avec des maillots de l’équipe fédéral » après être partie, lui enjoignant de lui de France sur les spots. En même temps si on ramener sa planche et son casque, qu’elle avait avait dû faire ça, je ne serais pas venue et laissé à La Friche (trop lourd à porter, vous personne n’aurait voulu publier ces photos… comprenez), à la prochaine étape de la coupe D’ailleurs, je me demande quelle gueule ils de France. Sinon, si on parlait de skate ? Oui, auront les maillots de skate pour les JO, tiens parce que le reste de l’équipe était bien déterça fait bizarre de dire maillot de skate, j’espère miné à passer du bon temps, il y avait une qu’on ne va pas avoir à dire « match de skate » sacrée motivation sur les spots et ça, ça faisait un jour, si ça arrive, je raccroche les crampons, plaisir ! Pour contenter tout le monde, on a heu les slip-on pardon. décidé d’alterner street et transitions et il y

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Pauliana Laffabrier Boneless drop-in


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CINQ JOURS À LYON A V E C L E S G A R S D ’ E T N I E S F R A N C E

Texte : Fredd. Photos : Loïc BENOIT.

e me souviens bien de la réaction de mes collègues de session, mes compagnons de galère, quand je leur ai annoncé que je ne pourrais pas skater avec eux la semaine prochaine, parce que j’allais être à Lyon avec le team Etnies. « Ah génial ! » m’ont t-ils dit, avec un enthousiasme non dissimulé, « et y’aura qui ? », et moi de leur répondre dans la foulée : « un gars de Créteil, Gaétan Le Gor… », « Aaah, Etnies France ! », fin de la discussion... J’étais un peu vexé bien sûr, parce que je me vexe facilement, mais j’admets bien volontiers que « Gaétan Le Gorbelec, Hugo Rauch, Kim Conti et Anto Forot » ce n’est pas non plus l’équipe la plus prestigieuse du moment. On est assez loin du Nine Club ou du Hell Ride Crew, mais en même temps, avais-je bien envie de passer cinq jours avec Nyjah Huston ou Jake Phelps ? Pas vraiment. Donc les champions franco-franchouillards de chez V7

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(le distributeur français de Etnies), tout inconnus, ou « relativement inconnus » qu’ils sont, ça me convenait tout à fait, n’en déplaise à mes compagnons de galère de 3-6 flips… Surtout que pour le coup, ces quatre-là, c’était vraiment une bonne pioche. Ils étaient contents d’être à Lyon, contents de découvrir les spots, contents de skater, contents de dormir dans une tente dans le jardin de Loïc, contents de rencontrer d’autres skateurs… Bref, ils étaient contents, et tout ce bonheur, c’est des points de vie en plus.

S’organiser une petite semaine pour faire un article dans un mag de skate, ça n’a pas l’air sorcier à priori. On prend quelques gars qui savent sauter et un mec avec un gros appareil photo. Pour faire les choses bien on en prend un autre avec une caméra, et c’est parti. Mais être original dans une ville comme Lyon n’est pas chose aisée. Une ville qui depuis des décennies a vu

Anto Forot - varial heelflip. C e s p o t s e t r o u v e à l ’ e n t r é e d e s l o c a u x d u P r o g r è s , l e j o u r n a l r é g i o n a l d e Ly o n . Apparemment, les journalistes locaux n’aiment pas le bruit des skateboards quand ils travaillent, ce qui est très compréhensible. C’est bruyant ces petites bêtes. Ce qui l’est moins (compréhensible), c’est qu’ils appellent systématiquement la police sans prendre la peine de venir discuter au préalable avec les jeunes sauvageons qui font du skate devant leurs bureaux… Des journalistes qui balancent des jeunes aux flics c’est pas joli-joli si vous voulez notre avis… Du coup, on a dû revenir le lendemain de notre altercation avec la maréchaussée pour qu’Anto valide son trick et personne n’arrivait à savoir si c’était un NBD ou un ABD. Peut-être qu’on s’en fiche aussi, ce qui compte c’est qu’il l’a fait comme dans un rêve.


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Hugo Rauch – 50-50 to fs wallride. À un moment, le pied d’Hugo s’est coincé entre la barrière et le m u r, j ’ a i b i e n c r u qu’on allait le perdre, c’était pas beau à v o i r. P o u r t a n t , t o u t s’est bien passé. Il a bataillé un peu, mais il a rentré son trick comme un champion, et ça n’avait vraiment pas l’air simple… Puis il est allé se défoncer la cheville sur le spot suivant.


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session et c’était franchement chouette, ça passer à peu près tout ce que la planète peut redonnerait presque un peu d’espoir en l’espèce compter de professionnels du skateboard, ça humaine. Il est possible pour le coup que j’exapeut mettre un peu la pression. Mais innover, gère un peu, mais c’est beau de voir qu’on peut découvrir de nouveaux spots, surprendre les encore, en 2016, à l’heure de Pokémon Go et locaux, inscrire nos noms au panthéon local de Donald Trump, débarquer dans une grande n’était pas vraiment dans notre agenda. On capitale du skate et faire la tournée des spots avait plutôt choisi de la jouer profil bas et de avec tout le gratin local, comme si de rien se laisser porter par les évènements. Si on poun’était. C’est beau vait faire quelques de voir qu’on peut photos pas trop « M A I S I N N O V E R , D É C O U V R I R encore saluer un pourries au pasinconnu qu’on sage, filmer deux ou DE NOUVEAUX SPOTS, croise en skatetrois lines et renboard, juste parce contrer quelques S U R P R E N D R E L E S L O C A U X , qu’il est en skategars en chemin, ça board. Je ne dis nous allait déjà très INSCRIRE NOS NOMS AU pas qu’il faut highbien. Vous le savez, fiver, du verbe on se contente de P A N T H É O N L O C A L N ’ É T A I T high-fiver, tous les peu chez Soma. Or, gars en longboard contre toute attente, et les filles avec un dès le premier jour, PAS VRAIMENT DANS T-shirt Thrasher on s’est retrouvé sur un spot qui n’avait N O T R E A G E N D A . O N A V A I T (le magazine de Rihana), mais pas encore été débon, vous voyez ce fouraillé et de qui PLUTÔT CHOISI DE LA que je veux dire, le plus est, on avait skate, malgré déjà deux ou trois JOUER PROFIL BAS ET DE l’ampleur étourJosimards dans les dissante qu’il pattes… Au troiSE LAISSER PORTER PAR prend de nos sième jour, si je me jours, c’est encore souviens bien, on en LES ÉVÈNEMENTS. » une sacrée machine était à une équipe à rencontrer des de « guests » assez gens et cette semaine dans la capitale de la quefolle composée de, tenez-vous bien, tenez-vous nelle nous l’a bien rappelé. Parce que se faire mieux que ça : Jérémie Daclin, JB Gillet, des potes, c’est encore et toujours le meilleur Adrien Coillard, Guillaume Collucci, Steeve trick que tu puisses faire avec ton skateboard. Rami, Val Bauer, Arno Wagner, Mika GerEn parlant de ça laissez-moi vous présenter mond, Alex Maison, JP Villa, Jesse Moine… mes nouveaux copains d’Etnies France : Et j’en passe, et je ne compte pas les featurings de Al Boglio et des patrons de shops (ABS et Wall-Street) lors de nos sessions slappys de début de journée, ou de Matisse Banc qui est GAÉTAN LE GORBELEC passé un soir, après le boulot. Bref, c’était la Beau bébé ! Une vraie force de la nature. Le grosse, grosse équipe. On n’en demandait pas mec est équipé d’un pop qui ne peut que faire tant ! Franchement, qu’est-ce que les Lyonnais des envieux. Il a aussi une motivation et une pouvaient bien en avoir à faire de quatre gars détermination à la limite du raisonnable. sponsos V7 distribution ? Pas grand-chose, on J’avais jamais entendu son nom avant cette est bien d’accord. Et pourtant ils étaient là, ils semaine à Lyon, pourtant il vient de Créteil, il sont passés voir ce qui se tramait, partager la habite même à deux pas de la fameuse place à


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rayures, c’est plutôt bizarre qu’on ne l’ait pas vu plus tôt dans les magazines. J’avais jamais vu quelqu’un se mettre autant de missions dans la même journée, tous les jours, toute la semaine. Il était capable de galérer deux heures sur un trick en plein cagnard, pour

HUGO RAUCH

Le jeune. À 16 ans, il a dû négocier sévère pour réussir à faire sauter deux jours d’école et nous rejoindre en milieu de semaine. Autant vous dire qu’il était à chaud comme pas deux et prêt à faire parler la poudre. Sauf que dès le premier jour, il s’est fait une bonne grosse cheville et qu’il est reparti le « . . . J E N E D I S P A S Q U ’ I L F A U T lendemain à Bordeaux aussi vite qu’il était arrivé. Ça nous a fendu le cœur H I G H - F I V E R , D U V E R B E H I G H - F I V E R , parce qu’il faisait plaisir le jeune. On n’a pas le même point de vue sur la T O U S L E S G A R S E N L O N G B O A R D Street League et les J.O., mais il faisait plaisir. Il était à bloc d’être trimE T L E S F I L L E S A V E C U N T - S H I R T ballé par Jérémie Daclin dans le van Cliché, celui du Gypsy Tour, à bloc de T H R A S H E R ( L E M A G A Z I N E D E skater avec tout le monde, à bloc tout court. Il méritait de rester R I H A N A ) , M A I S B O N , V O U S valide un ou deux jours de plus… Mais on se remet vite à cet âge-là.

VOYEZ CE QUE JE VEUX DIRE ... » enchaîner sur une autre bataille dans la foulée, puis une autre, puis rebelote le lendemain. C’était assez dingue à voir. Il faut dire que dans la vraie vie, Gaétan est menuisier, il avait posé une semaine de congés pour venir alors il n’était pas là pour enfiler des perles…

KIM CONTI

Lui, il est un peu connu quand même. Mes collègues du skatepark n’ont sûrement jamais entendu parler de lui, vous non plus peut-être, mais moi qui m’intéresse un peu à ce qui se passe en France, je l’avais déjà vu dans Sugar, dans Youtube et même dans la vraie vie, une fois. Il est cool Kim et ça se sentait qu’il avait un peu plus de bouteille que

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Gaétan Le Gorbelec – Gap to fs boardslide to fakie Ce qu’on ne voit pas bien sur cette photo, c’est que Gaétan a essayé trois jours d e s u i t e d e p a s s e r l a b a r r i è r e e n f s f l i p , e n v a i n . C ’ é t a i t v r a i m e n t c h a u d , i l p a rt a i t d u t r o t t o i r d e r r i è r e , i l y a v a i t u n p e t i t g a p , e t i l f a l l a i t s u r t o u t p a s s e r p a rd e s s u s c e t t e j e r s e y. I l a v r a i m e n t f a i l l i l e f a i r e , m a i s p a r f o i s , m ê m e a v e c l a meilleure volonté du monde, ça ne marche pas. Heureusement qu’il a pensé à faire cet autre trick au passage... Ce qu’on ne voit pas très bien non plus c’est la taille du gap, du trottoir à la barrière, il y avait un bon petit mètre cinquante, c’était bien balèze encore une fois.


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Gaétan Le Gorbelec – Ollie Ce spot se trouve sur l’une des avenues à la circulation la p l u s d e n s e d e Ly o n , s u r l e s q u a i s d u R h ô n e . E n p l e i n e journée, comptez une fenêtre d’environ 15 secondes entre deux feux rouges pour avoir la possibilité de replaquer s a n s v o u s f a i r e é c r a s e r. A j o u t e z à c e l a q u ’ e n f a i t , l e s o l est affreusement pourri, que la barre est finalement plus haute que ce que vous pensiez et qu’il faut aller assez vite pour gapper le petit trottoir derrière et vous avez un spot franchement balèze, juste pour vous. À ce qu’on s’est laissé dire, personne n’y avait encore t o u c h é , d a n s u n e v i l l e c o m m e Ly o n c ’ e s t s i g n e q u e l a chose va vous donner du fil à retordre…

Kim Conti – Ollie over to nose manual nollie flip out Dans ce magazine, on n’aime ni les noms de tricks à rallonge, ni les séquences. Celle-là pourtant, il faut reconnaître qu’elle est vraiment cool. Méchante idée de trick, spot qui s’y prête à merveille, exécution parfaite… To u t y e s t .

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Hugo Rauch – Ollie up to bs tailslide Pas facile d’aller suffisamment vite pour slider sur ce genre de spot. J’en sais rien en même temps, j’ai pas essayé, mais j’imagine… On a bien tenté de lui mettre une plaque pour lui éviter le ollie up, mais il n’a pas voulu en e n t e n d r e p a r l e r. S t r e e t - c r e d o b l i g e ! L a p a l e t t e e s t u n m é chant spot à no comply par contre, pile la bonne hauteur… Je dis ça, vous-vous en foutez, je sais.


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Gaétan Le Gorbelec – Kickflip La place sur laquelle Gaétan prenait son élan pour sauter ce banc/muret en kickflip était composée de dalles qui bougeaient un peu quand on roulait dessus. C’était désagréable, et très déstabilisant, et pas très costaud surtout… Gaétan a pété une dalle en deux juste en roulant dessus au moment de taper le ollie. Faut pas le chercher… En plus de ce kickflip il a aussi fait un bs 180° roastbeef, pour rire. Ça nous a bien fait marrer d’ailleurs.

Gaétan et Hugo. Il n’était pas du style à se jeter tête baissée sur tous les spots, comme eux. Il attendait le bon spot, celui qui lui convenait, tout en skatant dans son coin. Mais quand il tombait sur quelque chose qui lui plaisait, il ne faisait pas semblant. La séquence du ollie pardessus le banc to nose manual flip out, il l’a fait trois, jusqu’à ce que le filmeur et le photographe soient convaincus que le nose n’avait pas touché le sol… Et pourtant, c’était bien balèze son truc. J’y croyais pas pour être tout à fait franc. Il allait vite, il y avait des passants de partout, des voitures, c’était franchement pas évident, mais il s’en est sorti comme un champion.

ANTO FOROT

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Lui non plus n’est pas totalement inconnu. Il a même eu une interview dans Soma, c’est dire si on a affaire à une vedette. L’interview avec Uryann Raudet et Quentin Boillon, souvenezvous, avec la femme en porte-jarretelles là… Disons qu’en terme de notoriété, il se situe juste entre Jérém’, mon voisin qui skate ‘achement bien et Tony Hawk (qui ne skate pas mal non plus). Voilà, je pense que vous voyez mieux. Bref, Anto, c’était le local de l’équipe et c’est pas toujours facile de se sentir en mission dans sa propre ville, sur les spots qu’on voit tous les jours... Mais il a fait le job, un vrai pro !


Tatane Tour

TATANE TOUR L E S G A R S D ’ A T O H M S K A T E B O A R D S À S P L I T ( C R O A T I E )

Texte : Fredd. Photos : Florian LANNI.

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artir l’été en Croatie sans penser à prendre une paire de tatanes, c’est comme aller à Dieppe sans voir la mer : c’est complètement con. D’autres auraient dit que « c’est comme aller aux putes sans sa bite » ce qui est très explicite également, mais bon, c’est un autre style. Après, qu’on appelle ça des tatanes, des sandalettes, des claquettes, des « nu-pieds » même… C’est à vous de voir, c’est une histoire de goût, d’affinité, bref, c’est personnel. Je ne me permettrais pas de juger. Quand les gars de chez Atohm skateboards sont partis à Split cet été, en Croatie donc, selon toute logique, le premier truc qu’ils ont mis dans leurs sacs, c’est leurs paires de tatanes. Ça, ils étaient tous équipés les mecs ! Il faut dire que les tatanes, c’est les vacances, c’est l’apéro sur la plage, le farniente à l’ombre du parasol, la détente… Bref, c’est l’idéal pour être bien productif sur un tour de skate… Ou pas.

Partir en Tour quand on est un skateboarder, c’est un peu une évidence, surtout l’été. Si on est du style sponsorisé et tout le tintouin, ça se fait plus ou moins tout seul, toute l’année. On part avec ses « team-mates » pour filmer un petit edit sympa et faire des photos pour les magazines. C’est du boulot, mais ça reste plutôt cool et puis c’est toujours mieux qu’aller bosser à l’usine. Ça fait rêver bien sûr, alors quand on est trop nul pour se faire payer quoi que ce soit, c’est pas grave, on part D a m i e n R u b i s s a i t t o u t f a i r e ! To u s l e s quand même. On va bosser à l’usine tricks, sur n’importe et on économise toute l’année pour q u e l t y p e d e s p o t . partir avec ses potes l’été. On s’en- C ’ e s t b i e n s i m p l e , i l tasse dans la tire à Dédé et on s’ap- s a i t m ê m e s e f a i r e plique à surtout bien rigoler et à ne g r i l l e r p a r s a c o p i n e dès le premier jour pas trop se prendre la tête. C’est une p o u r c a u s e d e version light du Tour de skate. La m a u v a i s e u t i l i s a t i o n rigolade, l’impression de faire comme d e s o n t é l é p h o n e … les pros sans les inconvénients de la U n g é n i e ! N o r m a l qu’il ait désormais deadline, la pression du team manager,

son nom sous une planche Atohm. Gap to Fs Five-0, sous haute surveillance.


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les impératifs quelconques liés à la réalisation d’une « vraie » vidéo ou la prise de photos. Bref, c’est là qu’on peut sortir les tatanes en toute quiétude et se la couler douce ! Et même s’ils ne font pas rêver la masse, ce sont souvent ces trips-là, entre potes et à la bonne franquette, qui sont les meilleurs (et qui font rêver les pros…). Quand on fait de l’Athlétisme ou du Pingpong, le truc normal en été (printemps plutôt

si je me souviens bien), c’est de partir aux championnats de France avec le club. On part avec tous ses potes dans un gros bus de 50 places, on rigole, ça fait des souvenirs, c’est super et si on a été bon, on rentre avec une médaille. Tout est payé par le club, la fédé, les impôts des parents… Bref, on ne se pose pas trop de question sur la rentabilité de l’opération quand on fait du saut en longueur. On part en bus, on rigole et c’est tout. Dans le skateboard, on est un peu plus sensibles aux questions de coût, de rentabilité, de qui paye quoi, pourquoi, comment. Bien sûr, ce n’est pas tout le monde qui s’en souci, il y a une bonne partie des skateurs qui « s’en battent les couilles » comme on dit dans le jargon, mais les gars sont en général un peu plus sensibles

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Arno Wagner à débarqué à Split avec l’épaule dans une atelle parce qu’il s’était mis un « gros caisson » la semaine précédente. Il a donc tout de suite annoncé à ses collègues que ça risquait d’être « difficile » le skate p o u r l u i … P r e m i e r j o u r, p r e m i e r s p o t , Arno a fait ce flip sous les yeux d’un flic qui a assisté à la scène sans b r o n c h e r. P a s m a l p o u r u n é c l o p é .


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Maxime Genin est la nouvelle recrue de Atohm, leur nouveau pro aussi. Entre deux shakers, une pause lecture et deux-trois soirées folles, Max a fait ce flip par dessus le ledge (de gauche à droite, en retombant dans le plan incliné), ce FS « alley oop » 180° to fakie 50-50 et bien d’autres cascades dont il a le secret, avant de repartir un peu plus tôt que les autres pour cause de contest en Pologne.


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To m L a f a y e s t u n ambianceur hors paire, un vrai troubadour ! Du style à vous coller une bonne ambiance dès le départ et à ne plus vous lâcher de la semaine. On vous le recommande vivement ! Fs lipslide.

à cette question. Plus qu’en Athlétisme quoi. Dans ce Tour, c’est Thomas, le boss d’Atohm, qui a tout payé de sa poche avec ses petites économies. Les billets d’avion pour tout le monde, le AirBnB, la loc’ de la voiture, les pâtes… Autant vous dire qu’avec ce que ça lui a coûté, il a bien dû prendre la tête à tout le monde pour être productif, pour rentrer des tricks à tire-larigot, pour se coucher tôt, se lever tôt, faire 43 spots dans la journée, skater par tout temps, pour que la vidéo et l‘article soient au top et que les gens à travers la France et le monde entier se rendent compte d’à quel point cette petite marque de boards est cool… Et bien pas tant que ça en fait… Apparemment,

être sérieux, ça ne fait pas trop parti de la culture d’entreprise. En fait, tout « patron » qu’il est, Thomas n’était jamais le dernier pour faire la fête, picoler plus que de raison, lancer une bataille de mousse à raser à 5 heures du mat’, bref, pour saborder son propre Tour. Une belle leçon de professionnalisme que ses riders auront bien retenue. Ils se sont fait payer un Tour en version Light, entre potes, avec des tatanes, sans aucune once de pression… Ils ont la bonne gâche les mecs ! Heureusement qu’ils se débrouillent plutôt pas mal avec leurs skateboards et que la profusion de spots à Split les a inspirés, parce qu’à ce niveau d’exigence, on n’aurait pas été surpris qu’ils rentrent bredouilles…


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A r n o W a g n e r, b u m p t o F S Boardslide entre le Ljekarna, trois groupies de 12 ans et un mini motard.


Les vacances à l’envers

LES VACANCES À L’ENVERS Texte et photos : Clément Chouleur.

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n été c’est bien connu les Parisiens abandonnent massivement les rues de la capitale, lui préférant les plages du Sud. Mais qu’en est-il des sudistes ? Et bien figurez vous que pour un certain Bastien Marlin et son acolyte Lionel Cabos, c’est le chemin inverse qui a été emprunté. Une petite semaine à Paris histoire de ne laisser aucun répit au macadam lutécien.

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L’avantage d’arriver en touriste par ici c’est que l’on a un regard frais sur la ville, pas blasé et de la motivation à revendre. Sillonnant la ville et sa banlieue sans rechigner et ce dès le matin, les gars n’étaient pas venus pour visiter les musées ni faire du bateau-mouche. Pour les accueillir, quelques gouttes de pluie, pas idéal pour commencer la semaine mais Paris sans gris n’est pas vraiment Paris. Pas de quoi décourager les deux vacanciers cependant et c’est sur un spot abrité qu’ont démarré les hostilités.

Les jours suivants furent davantage en notre faveur niveau météo, comme les glaçons dans le pastis à l’heure de la pétanque, pas indispensable mais tellement plus agréable, le soleil nous accompagnera jusqu’au bout. Créteil, Nogent-sur-Marne, Bondy, Boulogne, nous ne nous sommes pas contentés de l’intra muros et c’est tant mieux car la banlieue, cossue ou non, regorge de spots. Méfiance cependant pour les fumeurs d’herbe car la BAC veille et il est facile de se retrouver en plein épisode d’Enquête exclusive. À l’inverse du Comité Olympique, l’association drogue et skateurs est pour eux une évidence et si vous avez une tête de « gaulois » dans les quartiers « sensibles » vous pouvez être sûr que vous allez être contrôlés. L’épisode fut tout de même caustique car ils (la BAC) avaient du mal à comprendre que nous étions juste venus skater. À l’inverse, les locaux furent bien moins B a s t i e n M a r l i n hostiles et même plutôt ravis de voir O l l i e t o F S W a l l r i d e .


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Bastien Marlin Wallie.

Les vacances à l’envers


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Les vacances à l’envers


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un peu d’animation dans leur square. Tellement qu’à chaque trick réussi nous avions le droit à une ronde d’applaudissements. Pas désagréable comme sensation, imaginez un peu la période post J.O de Tokyo, les olas qui se déclenchent sur votre passage au lieu des insultes. Utopiste ? Oui certainement et puis ce n’est pas forcément ce que l’on cherche non plus mais pourquoi pas après tout ? On s’égare un peu mais une semaine sans se faire virer ce n’est pas négligeable, surtout quand elle a été riche en cabrioles. Mission accomplie donc pour Lionel et Bastien, ils ont bien rempli leurs carnets de vacances et peuvent attaquer la rentrée avec sérénité. La prochaine fois par contre, c’est promis, on ira boire une foutue coupe de champagne sous la Tour Eiffel…

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Lionel Cabos Lotti Shove-it.

Bastien Marlin Fs Feeble.


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NUMERO QUARANTE CINQ

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Jérémie DACLIN - FS Carve - ST ÉTIENNE © NIKWEN


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Mathias THOMER - FS Rock’n’roll - LA KANTERA / © Vincent COUPEAU.


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Steve MALET - FS Fifty-Fifty - PARIS / © Clément CHOULEUR


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Fred PLOIX - Ollie One Foot - PERPIGNAN / © Julio SOLA.


Massacre à la tronçonneuse

MASSACRE À LA TRONÇONNEUSE Texte et photos par Clément Chouleur.

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ans un monde où la course au toujours plus grand, toujours plus riche, toujours plus sérieux bat son plein, il est bon parfois de rappeler qu’un événement tout pourri où la seule récompense est une mauvaise nuit dans une tente, vaut toutes les médailles du monde. Un acte de résistance à haute portée politique en quelque sorte. Clément Chouleur est venu rigoler un coup avec nous à la montagne, il s’est tellement marré qu’il a tenu à faire un petit article. - FD

en France. Au cœur des montagnes iséroises, entre les sapins et surplombant un lac, se cache un petit bout d’Amérique. Un bowl fait maison par une bande d’artistes de la truelle répondant au doux sobriquet de M16. En cinq mois, sans plan et équipés d’une simple bétonnière, les Grenoblois ont façonné un bijou digne de l’Oregon. Incontournable si vous passez dans la région, notez tout de même que cette piscine est du genre intransigeante et qu’il vous faudra sûrement plus d’une session pour la dompter « façon maramé », avis aux amateurs !

Alors que la majorité de la scène skate euro-

En ce week-end du 15 août, alors que le bison

péenne (mondiale ?), s’en donnait à cœur joie à Copenhague, une poignée d’irréductibles Gaulois s’était donné rendez-vous à Chamrousse pour la première édition du « Massacre à la tronçonneuse », un non-événement (dés)organisé en pleine « Fête du bois » qui n’est autre que le plus grand rassemblement de bûcherons

futé voyait rouge, plusieurs délégations en provenance de Marseille, Nîmes et même Paris n’ont pas hésité à tailler la route pour venir faire chanter la margelle. Sous un soleil cuisant, sans pression, sans sponsors boissons mais pas sans compétition, S a m m y I d r i les bûcherons ont montré de quel bois N o C o m p l y Ta i l s l i d e .


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Adrien Burguière L i e n D i s a s t e r.

Raphaël Ostorero S t a l e f i s h Tr a n s f e r t .

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ils se chauffaient. Entre une course chronométrée autour du bowl qui en aura vu certains partir dans le ravin et une jam-session disputée jusqu’aux derniers rayons, nous avons eu le droit à un beau massacre. Un « contest » à la cool, un retour aux sources dans la simplicité qui nous rappelle que le but premier de ce bout de bois est de se fendre la poire. Pour récompenser tout ce petit monde des chemises de bûcheron et des trophées en forme de haches pour les plus méritants (tronçonnées dans d’authentiques planches à roulettes par un

mec qui n’avait vraiment rien d’autre à faire). Et pour clôturer les festivités, ou les entamer pour certains, c’est autour d’un grand feu comme dans Astérix, sous la bienveillance des étoiles que nous avons passé la nuit… Saucisses et quenelles grillées, Pastis au coping et Chartreuse au goulot jusqu'à ce que chacun tombe assoupi dans le bowl, les camions ou le bois joli.

Merci à Vans pour les chemises et aux Pères Chartreux pour l’ensemble de leur œuvre.


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La Lettre

LA LETTRE . . . À M I C H E L O N F R A Y P h i l o s o p h e , e s s a y i s t e

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CHER MICHEL,

Je t’écris suite à ton discours sur « l’infantilisation de la société » l’autre jour sur Europe1 (Ça Pique Mais C’est Bon”, émission du 31/08/16). Oui, je sais, c’est pas très glorieux d’écouter ça mais quand on est adulte, on n’a pas le choix. Je te cite : “Tout est fait pour qu’on ne soit pas adulte, et quand je vois ces grands adultes sur des trottinettes avec des shorts là, avec des chaussures de sport en train d’écouter des trucs avec des écouteurs; qui ont des tatouages partout comme dans le temps où on se faisait des trucs avec les MALABARS, vous savez, on se faisait des faux tatouages ! Mais là ce sont des vrais, hélas… Et là je me dis effectivement, il y a une infantilisation qui me déplaît. On ne peut plus être adulte, plus personne n’est adulte.” Bravo Michel, tu as tout de suite perçu le ridicule de la trottinette, l’invasion des chaussures de sport et la mode insupportable du tatouage ! Finalement, on a beaucoup de points en commun tous les deux. Toi le philosophe essayiste tu te proclames athée sans concession, tu recherches le plaisir et l’épanouissement, tu revendiques un petit côté anarchiste et tu as même collaboré à SINÉ hebdo le journal satirique. Nous aussi dans le milieu du skate, on partage un peu toutes ces valeurs. Et puis, on est très essayistes, à notre façon : on essaie beaucoup et on n’y arrive pas tant que ça. Quoi que, pour y arriver, on dit qu’il faut faire le vide dans sa tête et y aller sans réfléchir. Tout le contraire du philosophe en quelque sorte. Il faut se balarguer avec l’enthousiasme et l’inconscience d’un enfant… Et donnemoi une bonne raison de vouloir devenir adulte ! Tu en connais beaucoup des adultes qui font rêver ? Moi pas. Si c’est pour arrêter de mettre des shorts, ne plus écouter de musique, aller au bureau de tabac s’acheter des recharges de cigarette électronique et Valeurs Actuelles plutôt que des Malabars, ne plus jouer au skate avec les copains… Promener le chien en fredonnant du Sardou, nettoyer le Dacia Duster le dimanche, renouveler l’abonnement beeIN Sports pour pouvoir regarder le skate aux J.O. et pester contre les migrants en regardant les chaînes d’info…. Rentrer dans le moule, étouffer tout esprit critique, effacer son tatouage Black Flag. D’ailleurs, je te soupçonne toi aussi de dissimuler un petit tatouage rebelle dans les recoins les plus obscurs de ton corps d’éphèbe.

Et vous, les penseurs essayistes tellement sûrs de leur réussite qu’ils n’ attendent plus que leur fauteuil perpétuel à l’Académie Française, êtes-vous vraiment des adultes ? Nous aussi on rêve de l’Académie Française juste en s’imaginant la rigolade de se voir habillés tout en broderies et les combats d’épée qu’on organiserait pour gagner le trophée « Maître Capello ». Tiens, l’autre jour, je regardais l’excellente part de Jarne Verbruggen « Never Skatebored » avec son intro hilarante. Après un wallride fantastique, il lève les bras et crie sa joie devant un passant interloqué. À ton avis, Michel, lequel des deux est l’adulte ? Lequel des deux est celui qui s’amuse le plus ? Finalement, on devient adulte le jour où l’on ne s’amuse plus. Je terminerai par ces excellentes dédicaces du livre « Les doigts pleins d’encre » de Doisneau et Cavanna : « Pour les derniers de la classe et les premiers dans la rue » R. Doisneau « À tous ceux qui furent des gosses au moins une fois » Cavanna Ah oui, une dernière chose : Aurais-tu le n° de BHL ? C’est pour récupérer sa recette de tarte à la crème, y’a Finkielkraut qu’est intéressé…

GUIllaume D. E s s a y i s t e

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LES COMPÈTES D’AMÉRICAINS

Chris Russell Fs tailgrab à un endroit impossible, pendant le CPH Open © Keke Leppala

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Aron Busaz Fs Ollie Algorta © Fred Ferand

On entend sans arrêt que c’est la crise, qu’on va tous mourir dans d’affreuses souffrances, que François Copé va revenir… Et puis il y a des contests de partout, surtout en Europe, avec les pros américains qui débarquent en force, comme au bon vieux temps des Monster Master Championships et autres Grands-Bornand, souvenezvous, comment ça vous n’étiez pas nés ? Oui, tout plein de contests, tous plus gros les uns que les autres, avec toujours plus d’argent à gagner. Franchement, à ce rythme là, je ne serais pas surpris qu’un jour, le skateboard soit aux J.O. Non, quand même pas, mais bon, cet été c’était assez dingue quand même : Berlin, Copenhague, Helsinki, Malmö, Marseille, Nîmes, Algorta et je suis sûr que j’en oublie un bon paquet de douze. Des championnats du monde, des coupes du monde, des courses de la mort, des drôles, de moins drôles, bref, il va falloir commencer à économiser pour vous faire péter un billet interrail l’an prochain…



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L E C O N C O U R S P H O T O E L E M E N T S U R I N S TA

Il y a quelques temps, le 8 juillet 2016 pour être précis, et c’est important la précision, sur le réseau social Instagram et en collaboration étroite avec l’équipementier Element skateboards, nous avons initié une compétition de photographies arbitrée par le fameux photographe dandy : Frédéric Mortagne, aussi connu outre Atlantique sous le patronyme de French Fred. Après avoir dépouillé les quelques milliers de clichés reçus à nos bureau de Cognac-Jay, 56 923 pour être précis, c’est important la précision, Frédéric le Français a désigné cette photo comme la meilleure (nous avons aussitôt brûlé toutes les autres). L’heureux vainqueur, un certain Victor Fromageot s’est donc vu remettre en main propre par la factrice, un magnifique pack de tirages grand-formats de photos signées Ray Barbee, Fred Mortagne, Jake Darwen, Brian Gaberman et Marcel Veldman. Bref, on s’est pas foutu de sa gueule ! Merci à tous d’avoir participé et à bientôt pour un nouveau concours de ouf.

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L E C O N C O U R S D E WA L L R I D E S S KAT E D E L U X E

Les gens de chez skatedeluxe vous proposent de jouer et peut-être gagner un des trois sets, board + roues ici présent. Tout ce que vous avez à faire, c’est de nous envoyer votre meilleur wallride en vidéo à cette adresse : fred@somaskate.com en pensant bien à mettre : « jeux skatedeluxe » dans l’objet de votre email. Vous avez le droit d’utiliser un bank, les mains, poser un pied, faire tout ce que vous voulez, tant qu’il y a un wallride quelque part. Un jury composé de gars lamentables en skate mais influent au sein de la rédaction de Soma désignera les trois vainqueurs. Vous avez jusqu’au 15 novembre pour envoyer votre clip, cachet de l’internet faisant foi.

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D E PA R I S D E U X B O A R D S

On vous en parle dès qu’on en a l’occasion, parce qu’il fait du bon boulot le p’tit Zeb et là, il vient de se faire pêter deux chouettes boards signées Fernando Elvira (à droite) et le studio Jimbo (à gauche), en collab’ avec Nozbone. Et puis on se dit que ça doit être bon pour notre karma de dire du bien des autres. Plus d’infos sur www.deparisyearbook.com





Julien BÉNOLIEL BS Ollie CHAMROUSSE © Clément CHOULEUR

« Je crois que les tongs sont en cause dans l'échec de nombreuses relations. D'abord, ce sont les tongs, ensuite, c'est le pantalon de survêtement... C'est une passerelle directe vers l'abstinence sexuelle. »

Lady GAGA


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