Au-delà du numérique, un avenir en commun

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INTERVIEW

Au-delà du numérique, un avenir en commun Le big data, c’est- -dire l’analyse et le traitement de données massives quasiment en temps réel les réseaux sociaux les plateformes collaboratives et plus largement les outils et applications numériques seraient-ils plut t un problème ou une chance pour les en eux de solidarité de nos sociétés mondialisées ? Les citoyens ont-ils les moyens en s’appropriant les nouvelles technologies d’être acteurs de la ville de demain ? Et de la rendre plus solidaire ? Les éclairages prospectifs de Valérie Peugeot.

Je crois que vous défendez un postulat selon lequel le numérique ne change rien en tant que tel, ou du moins que la transformation sociale vient moins de l’outil lui-même que de ce que ses concepteurs, ses porteurs, mais aussi et surtout ses utilisateurs en font. Est-ce bien ça ? VALÉRIE PEUGEOT : Je ne dirais pas que le numérique ne change Valérie Peugeot est chercheuse aux Orange Labs laboratoires de sciences sociales de l’opérateur et présidente de l’association Vecam qui travaille depuis une vingtaine d’années sur les en eux de citoyenneté et de solidarité liés au numérique Elle est l’une des deux commissaires en charge des questions de santé la CNIL Commission nationale informatique et libertés

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rien, bien au contraire. J’essaye en revanche de me garder de toute posture techno-déterministe. C’est une grande erreur que de préjuger de ce que l’arrivée d’une nouvelle technologie ou d’une découverte scientifique va produire dans la société. La technologie ne sort jamais de nulle part. Elle n’est qu’une pièce dans un vaste réseau d’acteurs et d’interactions. En amont, elle embarque la vision, les objectifs des concepteurs, VISIONS SOLIDAIRES POUR DEMAIN N° 2


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des chercheurs, des ingénieurs ou des développeurs à l’origine de son invention et de sa fabrication. Détail que l’on oublie trop souvent, elle embarque aussi une part de la vision de ses financeurs. La manière dont la recherche est financée a des conséquences sur le type de technologies qui sont produites ou non. La technologie dépend donc de son milieu de production. Mais elle transforme en retour le monde où elle s’inscrit, de façon parfois inattendue. Certains usages confirment les intentions premières de ses concepteurs. D’autres, au contraire, les détournent et opèrent ce que le philosophe Michel de Certeau appelait du braconnage. L’un des exemples les plus connus de tels détournements, c’est la façon dont les populations africaines se sont emparées de la téléphonie mobile pour pratiquer le transfert d’argent. En amont comme en aval, la technologie est juste inséparable du tissu social au sein duquel elle s’insère. Qu’il s’agisse d’Internet, de la téléphonie mobile, des réseaux sociaux ou des plateformes collaboratives, le numérique est indissociable de la mondialisation. Serait-il plutôt un facteur de diminution ou d’augmentation des inégalités ? V. P. : Il faut d’abord chercher les facteurs d’inégalités liés à la

mondialisation dans des phénomènes bien plus profonds, et parfois historiques : ce sont les conflits, les famines, le mal-développement, et maintenant le changement climatique qui jettent les gens sur les routes, contraignant le plus souvent les migrants à s’inscrire en bas de l’échelle sociale des pays où les hasards les font atterrir. Le numérique peut plutôt les aider. Certes, pour les privilégiés, le numérique contribue à renforcer le côté heureux de la mondialisation en simplifiant les mobilités personnelles et professionnelles. Mais à l’autre bout de l’échelle, les réseaux sociaux et les outils de communication permettent également aux exilés de préserver un lien affectif fort avec leurs proches et leur pays d’origine. Ce sont les « diasporas connectées ». Qu’en est-il, par exemple en matière de santé, de l’usage de ce que l’on appelle les big data, à savoir de la récolte, du traitement et de l’analyse d’un grand nombre de données, quasiment en temps réel ? Les big data, ou traitement massif de données, sont le symbole même de l’ambivalence des promesses du numérique pour le futur de nos sociétés. Leur potentiel rôle positif en matière de recherche médicale, de pharmacovigilance ou de connaissance et de prévention de grandes épidémies est incontestable. Sur ce dernier axe, je pense à un programme, AdaptFVR, mis en place au Sénégal pour comprendre et endiguer la diffusion de la Fièvre de la vallée du Rift qui touche le bétail et peut se transmettre aux humains. Les chercheurs ont croisé des informations sur l’expansion de la maladie avec des données climatiques pour comprendre comment la pluie joue sur la prolifération des moustiques,

Crédit photo : Richard Delaume

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vecteurs de la maladie. C’est ainsi qu’ils ont pu cartographier les zones de transmission de la fièvre, anticiper son devenir à court terme, et permettre aux gardiens de troupeaux de s’organiser pour protéger au mieux leurs bêtes. Un autre cas a marqué les esprits : après le séisme de 2010 à Haïti, l’analyse en temps réel des déplacements de population grâce au traitement des données de téléphonie mobile a été utilisée pour prévenir la diffusion de la malaria. Mais le souci, c’est que les mêmes données peuvent servir à des enjeux de solidarité ou de santé publique, dans des pays en ayant grand besoin, ou à l’inverse être utilisées pour mieux parquer des populations. Plus généralement, on tend à croire que lorsque les données sont anonymisées, c’est-à-dire quand les individus auxquels elles se rattachent ne peuvent être identifiés, le problème de protection de la vie privée est résolu. Or l’usage des données anonymisées peut quand même avoir des conséquences graves pour la vie des individus, au titre de leur appartenance à un groupe, par exemple dans le cas des habitants d’un quartier contaminé par une épidémie. Autre exemple, plus radical : un gouvernement répressif pourrait utiliser des données de géolocalisation concernant une population d’une certaine ethnie pour organiser des massacres. Cela s’est déjà vu. La question des finalités des usages des données est déterminante. Croyez-vous que les big data pourraient servir demain des objectifs de solidarité ? Soyons clairs : les big data, les algorithmes qui permettent de traiter ces données et d’en tirer du sens, ainsi que de plus en plus souvent leurs systèmes d’intelligence artificielle, sont aujourd’hui d’abord exploités pour des finalités économiques, comme le marketing ou la relation client, et non au service de la solidarité. Il existe heureusement des premiers contre-exemples ayant une finalité disons d’intérêt général plus que de solidarité proprement dite. Je pense, là encore, à l’utilisation des données de téléphonie mobile dans de grandes villes d’Afrique, pour enrichir des appareils statistiques jusqu’ici très pauvres et cartographier les déplacements des habitants, afin de construire des schémas de transports plus pertinents pour les va-et-vient quotidiens de populations qui font parfois des dizaines de kilomètres à pied chaque jour. V. P. :

L’open data, c’est-à-dire l’ouverture des données publiques, et dans une moindre mesure privées, serait-il plus propice aux initiatives de solidarité ? L’ouverture des données publiques à tous les citoyens, telle qu’elle a débuté en France autour de 2010, avait deux finalités : instaurer, d’une part, plus de transparence dans les politiques des collectivités territoriales et institutions publiques, notamment dans leurs choix budgétaires, donc un objectif d’ordre démocratique ; et mettre, d’autre part, ces V. P. :

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informations à disposition des start-up afin qu’elles imaginent de nouveaux services, liés par exemple aux transports, sur un axe économique. Les enjeux de solidarité n’y ont jamais été affichés comme premiers. Certains citoyens ont néanmoins pris des initiatives en ce sens, à l’instar du classement des villes les plus pauvres de France, réalisé par Nicolas Meunier en utilisant des données démographiques sur l’emploi et le coût du travail ainsi que le niveau de vie. Aujourd’hui se développent de plus en plus d’usages des données ouvertes avec des finalités écologiques, comme des cartes de l’agriculture biologique ou des pesticides en eaux souterraines. Autre exemple : dès 2011 est né à Rennes le projet Handimap, avec une cartographie de l’accessibilité des transports, stations et lieux publics pour les personnes à mobilité réduite, en s’appuyant sur des données de la mairie. Depuis, Handimap s’est développé et a essaimé à Lorient, La Rochelle, Montpellier et Nice, mais davantage grâce au crowdsourcing, c’est-à-dire aux informations venant des citoyens eux-mêmes, que par quelque politique d’open data. L’évolution de Handimap vers le crowdsourcing fait écho au projet Jaccede.com, plateforme qui offre aux internautes des outils communautaires et collaboratifs pour recenser tous les lieux accessibles, en France et dans le monde… L’open data coproduit par les citoyens – pour peu que l’on puisse ici utiliser ce terme d’open data – me semble beaucoup plus porteur en termes de pratiques solidaires que celui né de l’ouverture des données publiques. La coproduction de la donnée par les acteurs eux-mêmes est au cœur de projets en ligne comme Open Street Map, outil de cartographie ouvert et collaboratif, Open Food Facts, où tous partagent des informations sur la qualité des denrées alimentaires, ou Safecast, outil de cartographie contributive de la radioactivité, lancé au Japon après l’accident nucléaire de Fukushima pour fournir une mesure indépendante. V. P. :

L’enjeu des années à venir serait donc plus que jamais la réappropriation par les citoyens eux-mêmes des outils numériques à des fins de solidarité… Mais est-ce vraiment possible ? Qu’en est-il, par exemple, du projet Smart Citizen, qui est né à Barcelone avant d’essaimer dans d’autres villes européennes ? La première idée de Smart Citizen est de permettre à chaque habitant qui le désire de participer lui-même à la production d’informations sur la qualité de l’air de la ville où il réside. Chacun peut installer à son domicile un capteur dont les données vont servir à produire une information partagée sur la pollution atmosphérique, à petite échelle, donc complémentaire des dispositifs officiels. La difficulté, sur laquelle l’initiative a buté, réside dans la production en série de capteurs individuels à un prix abordable. Par ailleurs, il faut mobiliser les habitants autour de l’ambition de devenir eux-mêmes V. P. :

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les acteurs de leur « ville connectée » plutôt que de se contenter d’être des consommateurs de services de la ville, publics ou privés. C’est pourquoi, à Barcelone ou à Amsterdam, Smart Citizen a été intégré comme une brique à un projet plus vaste : Decode. Son objectif est de penser et de créer les conditions d’une smart city contributive, dont les citoyens seraient les premiers producteurs de données, sur la pollution, le trafic ou les activités des espaces publics, notamment grâce à des services de l’ordre d’une économie authentiquement collaborative (partage de places de parking, d’énergie, etc.) appuyée sur des infrastructures décentralisées. N’est-ce pas une petite révolution par rapport à la façon dont ces smart cities ont été conçues jusqu’à maintenant ? V. P. : Ce terme de smart city ne me plaît guère, car il recouvre

des vérités disparates. Historiquement, sa première concrétisation, loin d’avoir disparu, correspond à une conception « descendante » de la ville à l’heure numérique. Il s’agit de cités créées ex nihilo par de grands conglomérats industriels, associés à des responsables politiques, comme New Songdo en Corée du Sud. Le Rio de Janeiro du futur, imaginé par IBM à l’occasion des Jeux Olympiques de 2016, est une caricature de cette ville panoptique, hyper centralisée, pensée pour les habitants sans qu’ils aient leur mot à dire. La deuxième réalité de la ville connectée, c’est celle des Uber et des Airbnb, de toutes ces applications qui reconfigurent nos vies urbaines depuis nos smartphones. Les acteurs publics n’ont, a priori, que peu de place dans son modèle économiquement très libéral, qui interroge les modalités, voire la pérennité, de nos systèmes de régulation et de redistribution sociales. Enfin, la troisième approche de la ville connectée est celle de Decode et de Smart Citizen : une fabrique de la cité passant par des collectifs de citoyens pour partie auto-organisés. La municipalité et les acteurs privés coproduisent aussi cette ville, mais sans décider et agir en lieu et place des habitants. Je pense aux laboratoires citoyens madrilènes1 ou, en Italie, à la charte des biens communs de Bologne qui a permis de mener des actions de proximité autour de questions aussi différentes que l’accompagnement des personnes âgées ou le développement d’une écologie urbaine, etc. Ce dernier modèle est clairement le plus solidaire. Mais attention : « la » ville du futur n’existe pas. Toutes les villes connectées, qu’on les appelle smart cities ou non, seront différentes, plurielles, agençant à leur façon des pièces de chacune de ces approches et bien d’autres éléments imprévus. Beaucoup ont cru que ce que l’on a appelé l’économie collaborative pourrait contribuer à construire une société plus juste, plus partageuse… Pourquoi ce sentiment d’un échec ? V. P. : D’abord, parce que ce sont des sociétés comme Airbnb

et Uber qui sont devenues le symbole de cette économie collaborative, plus que des plateformes de crowdfunding 95


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comme Kickstarter, d’échanges non marchands comme Couchsurfing, ou que les fablabs, espaces ouverts de fabrication. Or Airbnb ou Uber, tout comme les réseaux sociaux, créent certes une vraie valeur d’usage, mais ne redistribuent que très partiellement la valeur d’échange : les commissions qu’ils prélèvent sont élevées et lorsque main-d’œuvre il y a, celle-ci est en situation de grande précarité, sans compter les impacts négatifs pour le territoire, comme la hausse du prix de l’immobilier en zone touristique. Ce que l’on appelle le « coopérativisme de plateforme », qui propose un partage de la propriété des plateformes sur le modèle des coopératives, comme ATX Coop Taxi, coopérative de chauffeurs de taxis à Austin aux États-Unis, est l’une des alternatives possibles. Plus généralement, le terme « collaboratif » cache la réalité de l’immense majorité des services « tech », qui se focalisent sur l’individu. C’est l’individu qui gère en solo sa santé, ses transports, ses consommations ; c’est l’individu qui devient tout seul plus mobile et plus autonome grâce au numérique… La dimension collective de notre quotidien est systématiquement effacée, alors même que ces outils peuvent réellement participer à outiller des dynamiques de contribution de tous les citoyens. Comment la réintégrer dans cet univers du numérique ? On parle de civic tech ou de social tech, de solutions technologiques conçues pour nous aider à participer, voire à devenir des acteurs de notre vie sociale et politique. Avec certains collègues, nous avons forgé également le terme de transition tech pour désigner la démarche de jeunes entrepreneurs qui conçoivent des outils pour aider les individus à changer leurs comportements et rendre leurs pratiques plus durables, pour participer à la transition écologique. Cette fraîcheur fait du bien. Mais pour durer, ces initiatives gagneraient à se confronter à l’économie sociale et solidaire et aux acteurs de la protection de l’environnement, aux associations, aux fondations et aux coopératives qui, depuis des années, agissent sur les terrains qu’ils veulent transformer. J’aimerais que ces deux mondes se marient. V. P. :

Ce que l’on appelle l’empowerment, c’est-à-dire l’émancipation des individus, mais aussi des collectifs, via les outils du numérique passerait par ce chemin ? Ce beau mot d’empowerment, quasi impossible à traduire en français, est historiquement lié à des engagements collectifs du début des années 1970, au mouvement d’éducation populaire de Paulo Freire au Brésil, au féminisme américain, ou encore à l’action des travailleurs sociaux dans V. P. :

les ghettos noirs de Chicago. L’émancipation de l’individu y était indissociable de l’émancipation collective. C’est cet état d’esprit collectif plutôt qu’individualiste qu’il serait passionnant que les acteurs du numérique réinventent, sans la naïveté de croire qu’il suffit d’une application plus maline pour rendre le citoyen actif ou responsable. Les communs seraient-il l’un des moyens de retrouver ce sens collectif ? Les communs, ce sont des communautés qui s’organisent et créent leur propre mode de gouvernance pour gérer une ressource partagée. Celle-ci peut être de la connaissance, de l’énergie, une forêt, une zone de pêche, des habitats partagés via des organismes fonciers solidaires, etc. Le numérique peut y jouer un rôle structurant, par exemple pour le logiciel libre, les bases de connaissance en ligne, des sites coproduits par les citoyens tels Wikipédia ou Open Street Map, qui sont autant de communs de la connaissance. Dans d’autres cas, le numérique permet simplement à la communauté de communiquer de façon déterritorialisée, d’échanger et de construire une gouvernance plus horizontale. Les communautés de communs participent de l’innovation sociale, au sens où elles offrent des solutions venant des citoyens à des problématiques que le marché ou les acteurs publics ont du mal à résoudre. Toutes n’ont pas une finalité solidaire ou écologique, mais la plupart de ces communautés poursuivent des finalités d’intérêt général. Par ailleurs, les règles de gouvernance des communs produisent bien plus d’échanges, donc de lien social, que des formats d’organisation plus classiques. Il en faut du temps et du dialogue pour inventer des gouvernances horizontales ! V. P. :

Que faudrait-il, au final, pour que les nouvelles technologies puissent demain, plus facilement qu’aujourd’hui, servir des objectifs de solidarité ? V. P. : Mobiliser

le numérique sur des logiques de solidarité suppose d’abord d’en finir avec la pensée magique du numérique. On parle beaucoup de privacy by design, c’est-à-dire de la capacité à concevoir dès l’amont des outils permettant à chacun de protéger ses propres données. Je défends quant à moi l’idée d’une solidarity by design. Cela veut dire que, dès la conception d’un outil, il faut embarquer les utilisateurs sur des finalités d’intérêt collectif, afin qu’ils soient coproducteurs d’une technologie qui réponde à leurs besoins et désirs. Propos recueillis par ariel Kyrou

1. Voir notre reportage à Madrid, « Les laboratoires d’une ville plus solidaire », page 62. 96

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Cet article en format PDF est directement tiré de Visions solidaires pour demain, revue papier annuelle dont l’objet est de réfléchir à ce qu’est, et ce que pourrait être dans le futur, la solidarité sociale. Ce fichier PDF est accessible au sein de la base de connaissances Solidarum, plateforme en ligne, gratuite et évolutive, qui propose à la consultation et au téléchargement des médias vidéo, texte, son et image : des visions et reportages créés spécifiquement pour elle, en Creative Commons. Solidarum et Visions solidaires pour demain sont édités par la Fondation Cognacq-Jay et réalisés par une rédaction autonome dédiée, avec l’appui d’un comité éditorial composé en majorité de personnalités extérieures à la Fondation.

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