Catalogue Semaine de la critique 2013

Page 39

(Flowers from the Mount of Olives) ÕLIMÄE ÕIED «Eine sehr persönliche, intime Geschichte über das russisch-orthodoxe Kloster auf dem Ölberg und das ausserordentliche Schicksal einer Nonne, die bald ein Engel werden will.» (Heilika Pikkov) Un long chemin bordé d’oliviers et de cactus. Une nonne s’approche, elle tape sur un morceau de bois. La nonne Ksenya (85 ans), originaire d’Estonie, a, elle aussi, parcouru un long chemin. Et c’est ce que raconte la grande voyageuse dans le film de l’Estonienne Heilika Pikkov. L'auteur du film a rencontré Mère Ksenya il y a sept ans et a développé l'idée de cet extraordinaire portrait. Cela a pris son temps, des années et de nombreux échanges de courrier, jusqu’à ce qu’elles deviennent amies, raconte Pikkov. Les autorisations abbatiales du prêtre ont du être obtenues. C'est qu’alors que la Mère Ksenya s’est déclarée prête pour le film. «Finalement, je me suis rendue en 2010 au monastère à Jérusalem», dit la réalisatrice, «seule, avec une caméra et un enregistreur, pour préserver l'intimité. Le tournage a eu lieu au cours de deux années et j'ai passé deux mois dans le monastère.» Le film de Pikkov nous fait traverser une vie riche en évènements – à l’aide de photographies et des récits de la nonne qui n’est entrée au couvent qu’à plus de 60 ans, dans le célèbre monastère russe orthodoxe du Mont des Oliviers (The Mount of Olives Convent of the Ascension of Our Lord). En 1934, à 18 ans (selon son passeport militaire), elle a rejoint l’armée, bien qu’elle n’ait eu en réalité que 16 ans. Plus tard, elle a dû fuir l’Estonie, sa patrie, sans regrets: «J’étais libre – une évadée», confesse-t-elle. En Allemagne, elle épousa un Américain. Ksenya fouille dans sa boîte de photos, se souvient de ses amis de jeunesse, de son premier époux Enn, et du deuxième, qui l’a sauvé de la drogue, car elle était devenue dépendante après un traitement à la morphine dans un hôpital. Elle le suivit jusqu’en Australie où il se mit à boire jusqu’à en mourir. Puis, la vie continua. Ksenya étudia la médecine et la biologie, se maria une troisième fois. Elle resta mariée 21 ans avec un homme avec lequel elle n’eut presque pas de relation sexuelle. Puis, atteint d’Alzheimer, celui-ci mourut quatre ans et demi plus tard. Ksenya n’a pas eu pas d’enfant, mais avait adopté un petit garçon africain, elle dut renoncer à ce lien sur la demande de son «père spirituel» pour être autorisée à entrer au couvent. La vieille femme raconte tout cela avec une grande sérénité. Elle aime vivre seule aujourd’hui, presse des fleurs, soigne des plantes malades et attend le Grand Schème, la rédemption, avant de s’en aller. Mais son heure n’est pas encore arrivée, elle doit encore attendre, elle le sait, elle doit aider les autres et les conseiller. Elle envoie annuellement 300 cartes à des gens et prie pour 400 personnes. Un jour, Ksenya a du retourner en Estonie par décision de son abbé, elle avait 83 ans. La cinéaste l’a accompagnée. Les gens s’étonnaient de sa magnifique prononciation estonienne. À la question de savoir quelle était sa patrie, Ksenya répondit: Ce n’est pas l’Estonie, ni l’Australie, je n’ai pas de patrie sur la terre, je suis cosmopolite. Rentrée au Mont des Oliviers, une sorte de Babylone, elle s’occupe maintenant de ses tortues et suit les traces de Xenia de Saint Petersbourg qui a été, elle aussi, mariée, puis est devenue une sainte. Ksenya est une femme dont le visage se lit comme un livre d’histoires, qui règle elle-même son conflit entre vie séculaire et spirituelle. Grâce à des images simples et frappantes, Heilika Pikkov a documenté la vie de Ksenya, qui continue d’accomplir ses tâches au Mont des Oliviers, qui joue avec les tortues et qui attend la rédemption. (Rolf Breiner) Heilika Pikkov Née en 1982, elle étudia la mise en scène de cinéma et de télévision à l’Université de Tallin et effectua un semestre à l’University of Central Lancashire (GB). En 2005, elle travailla pour quelques mois dans une petite station de télévision en Israël et réalisa son premier film documentaire, Cherub’s Revolt, diffusé par la Télévision estonienne et présenté à différents festivals. Heilika Pikkov vit en Estonie, et a deux enfants. Son mari est également cinéaste et sera aussi présent au Festival international du Film Locarno 2013. Filmographie sélective: Normal (2010, documentaire); A Lett er From Ruhnu (2010, court métrage documentaire); Cherub’s Revolt (2006, documentaire); Windows (2004, film expérimental).

37


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.