Catalogue Estampes Octobre 2023 - Galerie Sarah Sauvin

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ESTAMPES



SARAH SAUVIN

Estampes

n° 18 - Octobre 2023


1. Jean CHARTIER (c. 1500 - c. 1580)

Vigilantia [La Vigilance] Burin, 175 x 121 mm. Robert-Dumesnil 5, Andresen 1, IFF p. 213, état non décrit. Quatrième planche de la série de dix planches Les Blasons de vertus. Impression d’un 3e état non décrit, le titre complété. Dans les descriptions de cette estampe par Robert-Dumesnil et par André Linzeler (Inventaire du Fonds Français), le titre gravé en pied est Vigill. Sur notre épreuve, ce titre a été corrigé au burin en Vigilantia (le haut du second l encore visible), ce qui constitue un 3e état (sur 3). Très belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané. Le filigrane, difficile à lire, semble proche de Briquet 5374 et 5375 : trois croissants accompagnés du nom PERRET dans un cartouche. Ces deux filigranes, relevés par Briquet sur des papiers de Sens vers 1569 et 1571, proviennent selon lui de la papeterie de Mallay-Ie-Roy, près de Sens, que Claude Perret exploitait peu après 1559. Cette origine du papier et sa datation paraissent concorder avec la production d’estampes par Jean Chartier à Orléans entre 1557 et 1580. Ce filigrane est identique à celui de l’épreuve unique de Jean Chartier assis dans son atelier que nous avons vendue en 2021 au Rijksmuseum. De toute rareté.



Épreuve très légèrement rognée de 0,5 mm en pied et d’1 mm en haut à gauche. Un petit manque restauré de 7 x 6 mm dans l’angle inférieur droit avec petite retouche à l’aquarelle. Une petite trace jaunâtre très pâle. Le titre donné à la série est celui de la première planche, qui lui sert de frontispice. On y voit Jean Chartier dans sa librairie, tenant une grande banderole où il est écrit : Symbola Virtutum nobis num grata ? Quid ipsi Virtutum fructus ? Les blasons de Vertu, par Vertu se surmonte. La planche est signée I. Chartier pinxit et située à Aureliae (Orléans). Séverine Lepape note : « Chartier se présente comme l’auteur de la série (pinxit) et indique le lieu de publication sans dire qu’il en est l’éditeur - comme pour suggérer que les mentions précédentes l’impliquent. » (« The Production of Prints in France at the Time of Hieronymus Cock », in Simiolus, vol. 39, n°3, p. 218, traduit par nous). Les autres planches de la série sont La Vigilance (titre gravé Vigilantia), La Force (titre gravé fortitudo), La Justice, La Sagesse, La Prudence, La Tempérance (titre gravé Temperantia), La Patience (titre gravé Patient.), La Charité (titre gravé Pietas) et L’Abondance. Cynthia Burlingham observe qu’« En omettant la Foi et l’Espérance, et en faisant une place à la Sagesse, l’Abondance, la Vigilance et la Patience, le groupe se démarque des sept vertus canoniques si répandues dans l’art de la Renaissance. Le mode de présentation évoque la tenace tradition médiévale française des vertus héraldiques, habituellement représentées par des femmes assises désignées par divers attributs. […] Les élégantes figures maniéristes de cette suite sont placées dans des paysages avec des ruines antiques […] ou assises dans des intérieurs dont les fenêtres donnent sur des paysages.


Des livres sont souvent représentés, même s’ils ne font pas partie des attributs usuels du sujet, et rappellent la bibliothèque à l’arrière-plan du curieux auto-portrait de Chartier sur la page de titre de la suite. » (La Gravure française à la Renaissance, p. 393) On retrouve en effet deux épais volumes dans Vigilantia : la jeune femme écrit dans l’un tandis qu’elle en lit un autre posé sur ses genoux. Cette activité studieuse reflète peut-être le premier sens latin de vigilantia donné par Félix Gaffiot : l’habitude de veiller, tandis que le chien qui monte la garde à la porte illustre parfaitement le sens figuré. Guy de Tervarent relève « au revers d’une médaille florentine, faite à la fin du XVe siècle, pour Robertus Macingius, un chien prêt à bondir [qui] se tient aux pieds de « Vigilantia » (Hill, n°984, pl. 161). » (Attributs et symboles dans l’art profane, 1997, p. 123) A l’arrièreplan, un homme armé monte la garde à l’entrée d’une enceinte fortifiée entourée de douves au bord desquelles est installé un pêcheur.


2. Cornelis BOS (c. 1506/10 - avant 1555)

Le Christ sauve l'homme du péché (Le Christ détache le cœur de l'homme du monde) - 1554 Burin, 294 x 206 mm. Schéle 34, New Hollstein (Maarten van Heemskerck) 433. Gravé d’après une composition de Maarten van Heemskerck. Belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané (filigrane : licorne et nom difficile à lire, dans un cartouche). Bon état général. Quatre épidermures au verso, un infime manque comblé dans l’angle supérieur droit et deux petites taches claires. Le texte gravé dans l’angle supérieur droit est une citation de la fin du chapitre 7 de l’Épître aux Romains : « Malheureux homme que je suis ! qui me délivrera de ce corps de mort ? Ce sera la grâce de Dieu, par Jésus-Christ notre Seigneur. Et ainsi je suis moi-même soumis et à la loi de Dieu selon l’esprit, et à la loi du péché selon la chair. » (traduction par Louis-Isaac Lemaistre de Sacy).



3. Jan Cornelisz. VERMEYEN (1500 - 1559)

Henri II, roi de France - 1555 Eau-forte et burin, 146 x 105 mm. Hollstein 9, Popham 11, Horn A120, Passavant 9, Wurzbach 3. Épreuve rognée à 1 mm à l’extérieur de la marque du cuivre en haut et à droite, et sur la marque à gauche et en bas. Très bon état de conservation général. Petits restes de papier de montage au verso le long du bord droit. Rarissime épreuve. Hollstein ne cite que deux épreuves, dont l’une détruite pendant la seconde guerre mondiale (autrefois conservée à Berlin), l’autre conservée aujourd’hui au Rijksmuseum (RP-P-1910-2325) et reproduite au catalogue. Hollstein signale de plus l’existence d’une épreuve imprimée plus tardivement, conservée également au Rijksmuseum (RPP-1882-A-6307). Cette épreuve est imprimée sur la plaque bien essuyée. Notre épreuve, non décrite jusqu’à présent, est conforme à l’épreuve RP-P-1910-2325 reproduite au catalogue Hollstein, imprimée avec teinte de fond. L’inscription dans l’angle supérieur gauche désigne le modèle : Henricus Rex Gallorum, anno Dm̃ M.D.LV. (Henri, roi de France, l’an du Seigneur 1555). Ce profil d’Henri II en armure est proche de plusieurs autres petits portraits réalisés par Vermeyen, notamment celui du condottiere Ferdinand Ier Gonzague (1507-1557) (Hollstein 8) et surtout celui de Philippe II roi d’Espagne (1527-1598) (Hollstein 13) qui a des dimensions similaires et porte la même date, 1555 . Le style est également très proche : même usage



des tailles parallèles pour ombrer les bords du cuivre, même typographie employée pour l’inscription gravée Philippus Rex Anglorum, Princepsq[ue] Hispaniarum anno 1555. Cette typographie se retrouve également dans la tablette de la grande planche de L’Extrême onction (Hollstein 2). L’emploi de tailles et contretailles parallèles pour définir des ombres et des bordures est tout à fait caractéristique du style de Vermeyen et se retrouve dans nombre de ses estampes, par exemple le portrait d’Une jeune femme (Hollstein 15). Vermeyen avait gravé en 1555 un autre portrait de Philippe II, dont on ne connaissait qu’une seule épreuve, qui a malheureusement également été détruite pendant la Seconde Guerre mondiale (voir Hollstein 12). Il portait l’inscription la figure de Phililipes (…) comme il entra la ville de Bruxelles, le VIII de September Lan MDLV avec la signature Jo Maius fecit cũ Privilegio. Jan Cornelisz. Vermeyen, qui habitait alors Bruxelles, était au service de Charles Quint depuis des années. Ce dernier abdique en 1555 en faveur de son fils, Philippe II. On peut supposer que ces différents portraits gravés de têtes couronnées ont été réalisés par Vermeyen en 1555 pour rendre compte d’une actualité brûlante. La rareté des estampes de Vermeyen est soulignée par tous ses catalographes.



4. Julius GOLTZIUS (actif dans les années 1555-1601)

Un soldat fait ses adieux à sa femme - c. 1560 /1595 Burin, 165 x 280 mm. Hollstein 49. Première planche d’une série de quatre estampes illustrant des jeux de mots sur les relations entre maris et femmes. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané (P gothique surmonté d’une fleur). Trois petites déchirures restaurées dans la marge inférieure, sinon très bon état. Petites marges (feuille : 184 x 293 mm). Rare. « Dans les différentes planches [de la série], les femmes se plaignent spécifiquement des souffrances que leur causent leurs maris. Dans cette gravure, la femme se plaint de souffrir énormément parce que le soldat doit partir dès que sonne la "Sturmklock" (le tocsin). Il n'est pas impossible que cette série de gravures avec des inscriptions allemandes ait été commandée à Julius Goltzius par l'intermédiaire de Christophe Plantin, dont on sait qu'il négociait régulièrement auprès des graveurs des plaques de cuivre pour des tiers. En 1586, par exemple, Julius Goltzius a également travaillé par l'intermédiaire de Plantin pour l'éditeur allemand Hans Gundlach. » (Jaco Rutgers, Een Rijke Traditie, p. 25, traduit par nous). Les autres planches de la série sont : Hennentaster [Le Tripoteur de poules], Spinnende vrouw met haar echtgenoot [La Femme filant avec son mari], Veelvraat en Drinkeboer [Buveur et gloutonne]. Référence : Susan Anderson, Erik Ariëns Kappers, Britta Bode, Franziska Gottwald, Jaco Rutgers, Leonore van Sloten, Jaap van der Veen, David de Witt : Een Rijke Traditie - Twee Eeuwen Nederlandse Prentkunst uit Privébezit, 2015, cat. n°11.



5. Jan II COLLAERT (c. 1561 – c. 1628)

Politura Armorum - c. 1588 [L’Invention du polissage des armures] Burin gravé d’après Johannes Stradanus, 200 x 275 mm. New Hollstein (Johannes Stradanus) 339, 1er état/4. Planche 17 de la série des Nova Reperta. Très rare impression du premier état (sur 4), avant le numéro 17 dans la marge inférieure à gauche, et avant la modification du nom de l’éditeur. Superbe épreuve, aux noirs profonds, imprimée sur papier vergé filigrané (P gothique). Très bel état de conservation. Petites marges (feuille : 219 x 285 mm). La légende en latin dit : Enses, bipennes, arma Bellonae omnia, Nostro, haud vetusto, sunt polita tempore : Les épées, les haches à double tranchant, toutes les armes de Bellone, c’est de nos jours et non autrefois, qu’elles sont polies. Deux autres planches de la série des Nova Reperta ont un lien étroit avec la guerre : Pulvis Pyrius [L’Invention de la poudre], Staphae, sive Stapedes [Les Étriers]. Si la poudre est effectivement une invention récente qui a révolutionné la pratique des combats dans le monde moderne, les étriers étaient utilisés depuis longtemps, de même que les armures. Par son titre et sa légende, Politura Armorum précise donc bien le sujet de la planche : la pratique nouvelle du polissage mécanisé des armures.


Comme dans d’autres gravures de la série, Johannes Stradanus nous introduit dans l’atelier où tout un monde d’apprentis, ouvriers et contremaîtres s’affaire autour d’une importante machinerie qui s’impose comme le centre de l’attention : « L'œil est attiré par les engrenages, les roues dentées et les arbres d'entraînement de la machine à polir tout autant que par les hommes qui l'utilisent. L'action rotative des meules semble provenir d'une roue hydraulique située sous le bâtiment, comme l’indique l'arc en brique en bas à gauche. » (David Cressy, Renaissance Invention, p. 154-155, traduit par nous). Référence : Markey, Lia, éd. Renaissance invention: Stradanus’s Nova reperta. Evanston, Illinois: Northwestern University Press, 2020


6. Jan II COLLAERT (c. 1561 – c. 1628)

Conspicilla [L’Invention des lunettes] - c. 1588 Burin gravé d’après Johannes Stradanus, 205 x 270 mm. New Hollstein (Johannes Stradanus) 337, 2e état/4. Planche 15 de la série des Nova Reperta. Impression du 2e état (sur 4) avec le numéro 15 dans l’angle inférieur gauche. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané (filigrane : double C couronnés). Feuille légèrement jaunie. Petites marges tout autour de la composition (feuille : 245 x 305 mm). La légende en latin précise : Inventa conspicilla sunt, quae luminum Obscuriores detegunt caligines [Les lunettes ont été inventées, elles qui ôtent des yeux le voile d’obscures ténèbres]. Sven Dupré rappelle que les lunettes à lentilles convexes corrigeant la presbytie furent inventées vers 1285 en Italie tandis que celles à lentilles concaves pour corriger la myopie se trouvaient facilement dès le milieu du 15e siècle. Notons que la qualité des verres restera cependant médiocre jusqu’au dix-septième siècle où les progrès de l’optique et le polissage des lentilles permettra de mieux les adapter à la vue. L’image de Conspicilla choisit cette fois de ne pas nous montrer l’invention ou la fabrication des lunettes mais leur commercialisation et leurs différents usages. Sven Dupré


observe qu’au seizième siècle les lunettes n’étaient plus un bien de luxe mais étaient produites en masse et qu’il fallait bien contrôler leur qualité avant de les acheter. Un vieil homme est penché sur le comptoir du marchand de lunettes qui extrait d’un présentoir différentes besicles que le vieil homme essaie les unes après les autres, tandis qu’un passant lorgne la scène à travers un monocle. On voit dans la même rue les étals d’un cordonnier et d’un libraire ou copiste qui portent également des lunettes, ainsi que leurs clients, contrairement aux enfants, dont la vue est encore bonne. Les lunettes ne sont donc pas seulement nécessaires à quelquesuns dont la vue est déficiente, elles sont indispensables à presque tous ceux qui, l’âge venant, ne pourraient pas sinon poursuivre leur activité manuelle ou intellectuelle et méritent à ce titre de figurer dans la série des Nova Reperta.


7. Philips GALLE (attribué à l’atelier de) (1537 - 1612)

Distillatio [L’Invention de la distillation] - c. 1588 Burin gravé d’après Johannes Stradanus, 201 x 269 mm. New Hollstein 129, 1er état/3. Planche 7 de la série des Nova Reperta. Impression du 1er état (sur 3) à l’adresse de Philips Galle. Superbe épreuve aux noirs très profonds imprimée sur papier vergé filigrané (filigrane : P gothique et huchet). Petites marges (feuille : 217 x 280 mm). Petite déchirure restaurée de 25 mm dans l’angle supérieur droit. Sinon parfait état de conservation. La planche porte une légende en latin : In igne succus omnium, arte, corporum / vigens fit unda limpida et potissima : Dans le feu, le suc de tous les corps, grâce à l’art, devient une eau pleine de vie, pure et très puissante. Olivia Dill a analysé Distillatio dans le contexte de la pratique contemporaine de l’alchimie, notamment à la cour des Médicis à Florence, avec laquelle Johannes Stradanus entretenait des rapports privilégiés (« Invented Processes : Stradanus’s Distillatio and Lapis polaris magnes », in Renaissance Invention Stradanus’s Nova Reperta (ed. Lia Markey)). François Ier de Médicis s’intéressait personnellement à la pratique de l’alchimie. Johannes Stradanus réalisa son portrait en 1570 pour le studiolo du Palazzo Vecchio : François Ier de Médicis dans son laboratoire, également connu sous le titre Le Laboratoire de l’Alchimiste.


Près de vingt ans plus tard, la gravure reprend des éléments de ce portrait peint, mais en modifie la portée : elle élargit le cadre, détaille davantage l’atelier et ses ustensiles et multiplie les protagonistes. Elle déplace également vers le centre l’alambic à multiples récipients qu’on distinguait plus difficilement dans le fond obscur du Laboratoire de l’Alchimiste : le sujet principal, souligné par la légende, est le processus de la distillation et sa pratique au sein d’un atelier collectif : comme dans d’autres gravures de la série (Sculptura in æs, Impressio librorum…), une multiplicité de tâches, menées à bien en même temps et dans un même lieu par de nombreux acteurs de différents statuts, concourent à perfectionner le processus et ses applications. Référence : Markey, Lia, éd. Renaissance invention: Stradanus’s Nova reperta. Evanston, Illinois: Northwestern University Press, 2020.


8. ANONYME (Famille COLLAERT ?) C. 1600

Allégorie de la Mort Deux burins formant une paire

La Mort n'est pas impressionnée par la Richesse et la Beauté Burin, 186 x 121 mm. New Hollstein (The Collaert Dynasty) 1143, état non décrit. Impression d’un premier état non décrit, avant l’adresse de Karel Collaert (Carolus Collaert excud.) en bas à gauche. Superbe épreuve imprimée sur papier vergé (filigrane difficile à identifier). Un infime point de rouille avec un très petit trou et quelques pâles rousseurs, sinon très bon état et petites marges (feuille : 204 x 135 mm).

La Mort n'est pas impressionnée par le Courage et la Force Burin, 186 x 121 mm. New Hollstein (The Collaert Dynasty) 1144, état non décrit. Impression d’un premier état non décrit, avant l’adresse de Karel Collaert (Carolus Collaert excud.) en bas à gauche. Superbe épreuve imprimée sur papier vergé (filigrane difficile à identifier). Très bon état de conservation général. Infime tache pâle dans la marge supérieure ; petites marges (feuille : 202 x 132 mm). Ces deux estampes sont de toute rareté.





9. Jan MULLER (1571 - 1628)

Portrait de Dirck Volckertsz. Coornhert - 1590 Burin, 186 x 128 mm. Bartsch 34, New Hollstein 34, 2e état/2. Impression du 2e état (sur 2) avec la signature de Muller. Le premier état est très rare. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé. Épreuve rognée à la cuvette ou filets de marge, petite déchirure dans l’angle supérieur droit. Pointes des angles supérieur et inférieur gauches restaurées. Provenance : Pierre Mariette II (1634 - 1716). Sa signature à l’encre et à la plume au verso suivie de la date 1670 (Lugt 1789). Le Portrait de Dirck Volckertsz. Coornhert a été gravé par Jan Muller d’après une peinture de Cornelis Cornelisz. van Haarlem dont on connaît plusieurs versions. Jan Piet Filedt Kok (New Hollstein) indique qu’un dessin au lavis de Muller conservé à Haarlem a probablement servi de modèle de travail pour ce burin (Teylers Museum; Reznicek 1980, 9, ill.). Judith Niessen observe dans Cornelis van Haarlem 15621638 que « Le second portrait de cette époque est celui de Dirck Volkertsz Coornhert, que nous ne connaissons que par la gravure qu’en a faite Jan Muller (ill. 83) et aux copies sans valeur, dont la version du musée Frans Hals est la meilleure (ill. 84). Cornelis a peut-être peint le portrait de Coornhert entre 1586 et 1588, mais la gravure n'a été publiée qu'après la mort de Coornhert en 1590 » (traduit par nous).



10. Christoph MURER (1558 - 1614)

L'Indigent et le richard - 1596 Eau-forte, 242 x 195 mm au trait carré. Bartsch 2, Nagler 4, Andresen 7, Hollstein 26, 2e état/2. Impression du 2e état (sur 2), à l’adresse Elias Wöllhöffer excudit. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané (aigle à deux têtes et lettres A et R). Filets de marge de tous les côtés autour du trait carré. Quelques petites taches brunes dans le sujet, pli horizontal de séchage normal, sinon très bon état de conservation. Très rare. Adam Bartsch notait déjà : « Le peu de pièces qu'il a gravées à l'eau-forte, est devenue très rare. » (Bartsch, p. 384) Thea Vignau-Wilberg note que Murer « réalise en 1596 l’eauforte allégorique Mut ohne Gut, Gut ohne Mut, dans laquelle se trouvent confrontés un marchand riche et accablé de chagrins et un jeune homme pauvre et heureux de vivre. Comme d'autres estampes de Murer, elle devait être un modèle pour les arts décoratifs. » (Christoph Murer, p. 29, traduit par nous).



Christoph Murer ou Maurer était peintre sur vitraux, graveur, et dessinateur. Comme graveur, il est surtout connu pour sa série d’eaux-fortes Emblemata Miscella Nova (Hollstein 84) et ses illustrations gravées sur bois. Il a également produit quelques estampes isolées notamment plusieurs allégories : Allégorie sur l’Ambition (Hollstein 25, dont une épreuve est conservée à Munich), Allégorie sur la peinture (Hollstein 27), qui est décrite par Andresen mais dont aucune épreuve n’est actuellement localisée. L'Indigent et le richard appartient à ce registre d’œuvres allégoriques.

Christoph Murer

Study for a Stained Glass Window [Étude pour un vitrail (Metropolitan Museum of Art)

La gravure est signée CMurer Fecit en bas à gauche et située Tiguri, c’est-à-dire Zurich, ville dont Murer est originaire. Le titre varie selon les catalogues. L'Indigent et le richard est le titre donné par Bartsch, tandis que dans la série Hollstein, Robert Zijlma l’intitule Allegory on Fortune and Happiness [Allégorie sur la Fortune et le Bonheur]. Le catalogue d’Andresen, repris



par Thea Vignau-Wilberg, la désigne par la partie allemande de la légende gravée au bas : Mut ohne Gut, Gut ohne Mut (« L’Energie sans la Richesse, la Richesse sans l’Energie »). Cette légende divise l’image en deux parties, chacune correspondant à l’un des deux personnages principaux. À gauche un jeune homme, dont la pauvreté se voit à l’état de ses chaussures : il ne possède presque rien mais il est plein d’entrain, comme il le proclame : Nulli sunt num(m)i, sed sunt mihi gaudia multa [Je n’ai aucune richesse, mais j’ai beaucoup de joie]. À droite, un vieillard assis à une table, semblant s’être endormi en comptant ses richesses devant un épais registre ouvert, dit à l’inverse : Multi sunt nu(m)i, sed sunt mihi gaudia nulla [J’ai beaucoup de richesse, mais je n’ai aucune joie].


L’arrière-plan illustre cette antithèse : à gauche une joyeuse assemblée danse et se restaure gaiement, tandis qu’à droite des commerçants s’affairent autour du chargement d’un navire. L’indigent et le richard sont cependant réunis sous une double banderole tenue au-dessus d’eux par un ange. On y lit en latin : Utraq(ue) dividite ex (a)equo, tunc dives uterque (Partagez l’une et l’autre à égalité, alors vous serez riches l’un et l’autre ) ; et en allemand : Teilends gleich, so sind ir beid reich (En partageant à parts égales, vous serez tous deux riches). Référence : Thea Vignau-Wilberg, Christoph Murer und die "XL. Emblemata miscella nova", 1982




11. Gillis VAN BREEN (c. 1560 - 1602)

Allégorie sur le bon arbre et sur l’arbre corrompu - c. 1600 Burin gravé d’après Karel van Mander (1548 - 1606), 193 x 285 mm (feuille). Hollstein (Gillis van Breen) non décrit, New Hollstein (Karel van Mander) 89, état non décrit. Rarissime épreuve d’un premier état non décrit avant l’adresse de CJVisscher qui figure sur l’unique autre épreuve répertoriée de cette estampe, conservée au British Museum (1937,0915.289) dont la notice mentionne : « C’est la seule épreuve de cette estampe répertoriée dans le volume du New Hollstein. » (traduit par nous) Très belle épreuve, très contrastée, imprimée sur papier vergé filigrané (filigrane : armoiries avec bande). Très légèrement rognée dans la tablette blanche en bas avec légère atteinte au nom de C. Schonaeus. Petites marges sur les trois autres côtés. Une infime rousseur dans le sujet, sinon très bon état de conservation. Cornelis Schonaeus est l’auteur des vers latins que l’on trouve sous l’image, Seducit miseros carnis damnosa voluptas:/ Spiritus ad Christum contendit, et aetheris arcem : La volupté funeste de la chair égare les malheureux:/Le Saint Esprit les ramène vers le Christ et la citadelle des cieux.


Cette allégorie illustre un passage du chapitre 7 de l’Évangile selon Saint Mathieu, versets 15 à 20 : « Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous couverts de peaux de brebis, et qui au dedans sont des loups ravissants. Vous les connaîtrez par leurs fruits : peut-on cueillir des raisins sur des épines, ou des figues sur des ronces ? Ainsi tout arbre qui est bon, produit de bons fruits ; et tout arbre qui est mauvais, produit de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut produire de mauvais fruits, et un mauvais arbre ne peut en produire de bons. Tout arbre qui ne produit point de bon fruit, sera coupé et jeté au feu. Vous les reconnaîtrez donc par leurs fruits. » (traduction par Louis-Isaac Lemaistre de Sacy). On retrouve le couple richement vêtu dans une estampe de dimensions similaires, également gravée par Gillis van Breen d’après Karel van Mander et légendée par Cornelis Schonaeus : Allégorie sur la voie étroite et la voie large (voir l’épreuve conservée au Rijksmuseum). Cette estampe illustre les versets 13 et 14 du même évangile.


12. Karel van MALLERY (1571 - 1635)

Le Fils sur le dos de l'âne, le père à pied. Deuxième planche d’une série de six estampes illustrant la fable d’Esope sur le père, le fils et l'âne. Burin, 194 x 248 mm. Hollstein 125, épreuve à l’adresse de Philipp Galle. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané (filigrane : gant). Petites marges (feuille : 220 x 265 mm). Deux petites rousseurs. Très bon état général. Les planches ont été gravées par Karel van Mallery d’après Ambrosius Francken I (1544 - 1618). Après une planche de titre, Le Fils sur le dos de l'âne, le père à pied est la première des cinq planches illustrant la fable d’Esope. On y voit un père et son fils se rendant au marché, critiqués par des passants parce que c’est le fils, jeune et fort, qui est porté par l’âne, tandis que son père va à pied. Dans la seconde illustration, c’est au contraire le père qui est sur l’âne, mais ils n’en sont pas moins blâmés : le père ne se soucie pas de son fils et le laisse s’épuiser! Les planches suivantes ne satisfont pas plus les passants : que tous les deux le montent ou aillent à pied à côté de l’âne, les passants ne sont jamais contents. Inutile de dire que la dernière solution - le père et le fils portent l’âne sur leur dos - ne les convainc pas davantage ! La planche de titre annonçait déjà la morale de l’histoire : il n’est pas possible de satisfaire tout le monde.



13. Giovanni Battista COSTANTINI (actif vers 1615-1628)

Bacchanale au Silène ivre - 1619 Eau-forte, 243 x 252 mm (hauteur et largeur du cuivre octogonal). Le Blanc 1. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé. Très bon état général. Petite déchirure de 25 mm anciennement restaurée sur le bord gauche des grandes marges (feuille : 324 x 282 mm). Deux petites taches et quelques petits plis dans les marges. Marque de collection à la plume et à l’encre dans la marge inférieure, proche de Lugt 2903b (marque non identifiée, relevée sur des dessins italiens des 15e et 16e siècles) ou de Lugt 3805 (marque non identifiée, relevée sur une estampe publiée à Rome au 17e siècle).



Le sujet de cette bacchanale trouve son origine dans un célèbre plateau en argent gravé par Annibale Carracci (conservé aujourd’hui au Museo di Capodimonte à Naples), qui servit également de matrice pour imprimer plusieurs épreuves dont une est conservée au Metropolitan Museum of Art. La Calcografia Nazionale à Rome conserve une copie octogonale du plateau, probablement gravée par Luca Ciamberlano. « En 1619, Guido Reni dessina un pendant du Silène ivre, non pas de l'original d'Annibale, mais de sa copie octogonale. Ce dessin fut gravé par Giovanni Battista Costantino. Il est octogonal comme son prototype, présente une couronne de fleurs similaire et, au centre, Silène ivre, allongé sur son âne, un satyre l’aidant à garder son équilibre précaire ». (Otto Kurz : “Engravings on Silver by Annibale Carracci”, in The Burlington Magazine, 1955, Vol. 97, N°630, p. 286, traduit par nous).



14. Cornelis SCHUT (1597 - 1655)

Saint Sébastien Eau-forte, 141 x 104 mm. Wurzbach non décrit, Hollstein 106. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé. Filets de marge à droite. Rognée au cuivre sur les trois autres côtés. Quelques rousseurs très pâles. Provenance : Capitaine Fachot (documenté de 1796 jusqu’en 1811), peintre et collectionneur (Lugt 4372) Très rare. Le British Museum, seul musée cité pour cette estampe au catalogue raisonné Hollstein, en conserve deux épreuves. On connaît deux autres versions du martyre de Saint Sébastien gravées par Cornelis Schut qui représentent, l’une, le saint mourant soutenu par des anges (Hollstein 104) l’autre, par Sainte Irène (Hollstein 105). La seconde est proche de son tableau : Saint Sébastien assisté par Sainte Irène, datant très probablement de 1650 (Église Onze-Lieve-Vrouwekerk de Temse en Belgique.) Notre estampe représente le martyre de Saint Sébastien de manière plus classique : ligoté à un arbre, le visage serein, bien qu’ayant le torse déjà transpercé d’une flèche. Le format réduit de la gravure et son traitement la rapprochent d’un ensemble important de petites estampes de Cornelis Schut représentant des personnages de la Bible ou de la mythologie ainsi que de nombreux putti.







15. Jacques CALLOT (1592 - 1635)

Les Deux grandes vues de Paris : Vue du Louvre et Vue du Pont-Neuf - 1630 Vue du Louvre : Eau-forte, 161 x 339 mm (feuille). Lieure 667, 2e état/5. Impression du deuxième état (sur 5), avec le nom de Callot mais avant l’adresse d’Israël Silvestre dans la marge inférieure et avant les retouches notamment sur les fleurs de lys. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé (filigrane : double C couronné et contre-marque au 4 lorrain (Lieure 29 et 34)), rognée sur le trait carré ou à 1 mm à l’extérieur et à 2 mm sous la composition en pied. Très bon état général. Pli vertical central peu visible.

Vue du Pont-Neuf : Eau-forte, 160 x 337 mm (feuille). Lieure 668, 2e état/5. Impression du deuxième état (sur 5), avec le nom de Callot mais avant l’adresse de Silvestre et avant les retouches. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé (filigranes : double C couronné et lion à l’étoile (Lieure 29 et 38)), rognée sur le trait carré ou à 1 mm à l’extérieur et à 2 mm sous la composition en pied. Très bon état de conservation. Trace de pli vertical presque invisible à gauche et petite épidermure restaurée au verso, infime taches pâles sur le côté gauche. « Callot a dessiné ces vues pendant son séjour à Paris en 16281630, elles furent probablement gravées après son retour à Nancy et il ne semble pas même que les cuivres aient été



envoyés à Paris, chez Israël, car les épreuves des deux premiers états sont généralement sur papier au double C (voir filigr. 29 et 30 et aussi filigr. N°33 et 34). Aucune épreuve ne porte l’excudit d’Israël (Henriet). Ce n’est que plus tard que les planches portèrent l’adresse d’Israël Silvestre. » (Lieure, p. 28) Les épreuves du 1er état sont de la plus grande rareté (notée RRRR au catalogue de Lieure). Quant aux épreuves portant le nom de Callot, Lieure remarque qu’« il est rare de les rencontrer en bonnes épreuves égales. » « Dans les bonnes épreuves [de la Vue du Louvre] on distingue, au-dessus du toit de la 2e maison à gauche, de nombreux petits points noirs causé par l’acide, qui est passé sous le vernis mal appliqué. » Ces petits points se voient clairement sur notre épreuve. Surtout, les fonds les plus lointains sont d’une grande netteté, sans aucune usure. Au 4e état de la Vue du Pont-Neuf, les fonds sont usés, particulièrement dans la partie gauche : ils sont au contraire très bien conservés sur notre épreuve. Ces deux vues de Paris sont parmi les estampes les plus belles et les plus célèbres de Jacques Callot. La Vue du Louvre, avec à gauche la porte et la Tour de Nesle et à droite la galerie du Louvre, est animée d’une fête nautique qui avait lieu à Paris le 25 août. Des joutes étaient alors organisées sur la Seine. La Vue du Pont-Neuf propose un instantané de l’activité quotidienne sur la rive gauche de la Seine : « A gauche coule le fleuve dans lequel se baignent des chevaux, parmi les bateaux des blanchisseuses et des marchands de bois. » On reconnaît aisément à l’arrière-plan Notre-Dame de Paris, le Pont-Neuf, les maisons de la place Dauphine à laquelle fait face la statue d’Henri IV et plus à gauche, la tour Saint-Jacques.



16. Abraham BOSSE (1602/4 - 1676)

La Vieillesse - 1636 Eau-forte reprise au burin, 257 x 322 mm. Préaud 129 ; Blum 155 ; Lothe 303. Planche de la série des Quatre âges de l’homme. Très belle épreuve en coloris anciens imprimée sur papier vergé. Deux petites éraflures, un infime trou d’épingle, quelques petits plis, sinon très bon état général. Filets de marges sur tous les côtés.



17. REMBRANDT HARMENSZ. VAN RIJN (1606 - 1669)

Jeune homme au béret de velours (Petrus Sylvius ?) - 1637 Eau forte, 97 x 83 mm. B. 268; K.G.Boon 268; BB 37-C; New Hollstein 164, ii/ii. Superbe épreuve imprimée sur papier vergé (partie du filigrane Lys de Strasbourg) ; petites marges (feuille : 109 x 100 mm). Légère trace de pli vertical visible en lumière rasante ; deux petits points de rouille sur le bord droit, sinon en excellente condition. Très rare (Nowell-Usticke RR) E. Hinterding et J. Rutgers (New Hollstein) comptent comme un 1er état une épreuve conservée par la Bibliothèque nationale de France présentant une petite ligne supplémentaire à l’arrière du chapeau et quelques points sur la joue gauche du modèle. Nowell-Usticke la considère comme une épreuve d’essai. Notre épreuve présente les barbes visibles sur les plus anciens tirages : sur les cheveux, la lèvre supérieure, le menton, l’œil gauche, les zones sombres du fond et des plis du vêtement ; ainsi que les deux éraillures : une ligne ondulée horizontale à gauche du visage et une ligne verticale au-dessus du béret (Usticke). Une aussi belle impression avec de belles marges et en excellente condition est très rare pour cette estampe, même dans les collections des grands musées.



Provenance: Collection Louis Jouas-Poutrel (né en 1874) ; par descendance. Louis Jouas-Poutrel était un aquafortiste normand. Le musée du Petit Palais conserve notamment ses vues de Rouen. Le modèle de ce portrait, que Bartsch intitulait Jeune homme assis et réfléchissant, était supposé être Ferdinand Bol (NowellUsticke) avant que l’inscription ancienne à l’encre Petrus Sylvius, au verso d’une épreuve ne soit considérée comme le nom du modèle (DeHoop Scheffer, Liber Amicorum Karel J. Boon, Amsterdam, 1974, p. 96-101). Cette épreuve de référence ayant appartenu notamment à Vivant Denon est conservée aujourd’hui au Musée cantonal de Lausanne. Petrus Sylvius était le fils du pasteur Jan Cornelis Sylvius dont Rembrandt a gravé deux portraits (NH 124, NH 235).





18. REMBRANDT HARMENSZ. VAN RIJN (1606 - 1669)

Jésus revenant du temple avec ses parents - 1654 Bartsch 60 ; Hind 278 ; New Hollstein 276, état unique. Contre-épreuve de l’eau-forte imprimée sur papier vergé avec partie d’un filigrane Folie au bord supérieur de la feuille (New Hollstein, text II, p. 227 ; Hinterding, Foolscap with five-pointed collar, [Folie à cinq pointes] Gb, 1654, vol. II p. 123) ; petites marges avec la présence d’une cuvette décalée de deux millimètres par rapport au sujet (feuille 100 x 149 mm). Annoté au crayon au verso : The Reverse [Contre-épreuve]. Provenance : Charles Delanglade (né en 1870) (Lugt 660) cachet de collection imprimé au verso. Quelques légères rousseurs ; petite déchirure verticale dans la marge inférieure à gauche entrant de 5 mm dans le sujet ; petite épidermure dans l’angle supérieur gauche ; sinon en très bonne condition. Le New Hollstein recense trois contre-épreuves de cette gravure : British Museum (1843,0607.36), Fitz William Museum (23.K.5-80), Petit Palais, collection Dutuit (GDUT7730).


Les contre-épreuves des estampes de Rembrandt qui ont conservé une marge peuvent présenter comme celle-ci une cuvette plus ou moins marquée : par exemple, Mendiants recevant l’aumône à la porte d’une maison ; La chaumière et la grange (British Museum) ; Famille de paysans en voyage ; Vue d’Amsterdam depuis le kadijk (Rijksmuseum). Contrairement à une idée répandue, la présence d’une cuvette témoigne d’une impression réalisée dans les règles de l’art en plaçant l’épreuve fraîchement imprimée sur la plaque retournée, comme l’explique Abraham Bosse :


« Avant que finir je vous dirai ce que c'est que les Imprimeurs appellent épreuve & contr'épreuve: Épreuve est la première, deuxième ou troisième estampe, qu'ils tirent d'une planche qui n'a point encore imprimé, ou de ceux que l'on remet en train : La contr'épreuve se fait avec ladite épreuve en cette sorte ; à savoir qu'ayant fait l'épreuve, l'on la met uniement toute fraîche par son envers sur la planche qui l'a faite ; puis l'on met sur la icelle épreuve une feuille de papier trempé, ensuite dessus la maculature & ensuite les langes ; & alors on fait passer le tout entre les rouleaux, & ayant levé ladite feuille, on trouve que l'épreuve a fait la contr'épreuve sur ladite feuille de papier : cela est fait d'ordinaire pour voir plus aisément à corriger, d'autant que ladite contr'épreuve est suivant le dessin, à savoir tournée de même côté. »1 (Traicté des manieres de graver en taille douce sur l’airin par le moyen des Eaux Fortes, & des Vernix Durs & Mols. 1645, p. 73). On lit également dans l’Encyclopédie méthodique de Watelet, à l’article Contr’épreuve, que l’impression d’une contre-épreuve « est utile aux graveurs, parce qu’elle leur montre l’estampe a laquelle ils travaillent dans le même sens que le dessin ou tableau qu’ils copient, & qu’elle leur fait voir plus aisément s’ils s’en sont écartés. ». Mais l’auteur de l’article ajoute judicieusement : « Cependant les graveurs négligent assez ordinairement de se procurer une contre-épreuve de leurs estampes. »2. Si Rembrandt a peut-être imprimé parfois certaines contre-épreuves dans le but de retravailler le cuivre, cela n’explique pas qu’il en ait souvent imprimé plusieurs et

1 Orthographe modernisée 2 Claude-Henri Watelet, Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts (1788) Panckoucke, 1788,

article de M. Levesque, p. 147


Rembrandt, Christ returning from the Temple with His Parents, vente Christie’s, 5 juillet 2022, lot 211, 94,500£


qu’elles ne portent aucune indication, comme le souligne Christopher White1. Le fait que certaines contre-épreuves soient imprimées sur papier Japon, comme celle de Jésus revenant du temple avec ses parents dans la collection Dutuit, laisse plutôt penser qu’il pouvait répondre à la demande de collectionneurs. La scène représentée dans cette gravure succède à Jésus au milieu des docteurs, qui, comme l’observe Charles Rosenberg, illustrait « un moment important dans les Évangiles synoptiques, car elle marque la première fois que le garçon, reconnaissant son destin, agit de manière indépendante et remet en question l'autorité de l'Ancienne Loi » 2. Charles Rosenberg rappelle également que Jésus revenant du temple avec ses parents était la première œuvre traitant le thème du retour du Christ à Nazareth avec ses parents après sa dispute avec les docteurs du Temple, et qu’elle a « de ce fait parfois été mal identifiée. Le catalogue d'Edme-François Gersaint l'a répertoriée comme une représentation de la Fuite en Égypte, et le catalogue d'Adam von Bartsch l'a désignée comme Le Retour d'Égypte 3. Jésus au milieu des docteurs et Jésus revenant du temple avec ses parents illustrent l’épisode relaté dans l’Évangile selon St Luc : « Les parents de Jésus allaient chaque année à Jérusalem, à la fête de Pâque. Lorsqu'il fut âgé de douze ans, ils y montèrent, selon la coutume de la fête. Puis, quand les jours furent écoulés, et qu'ils s'en retournèrent, l'enfant Jésus resta à Jérusalem. Son père et sa mère ne s'en aperçurent pas. Croyant qu'il était avec 1 Christopher White, Rembrandt as an etcher, Yale University Press, 1999,p. 11. 2 Charles Rosenberg, Rembrandt's Religious Prints: The Feddersen Collection at the Snite Museum

of Art. Indiana University Press, 2017, p. 29 3 Op. cit. p. 239


leurs compagnons de voyage, ils firent une journée de chemin, et le cherchèrent parmi leurs parents et leurs connaissances. Mais, ne l'ayant pas trouvé, ils retournèrent à Jérusalem pour le chercher. Au bout de trois jours, ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant. Tous ceux qui l'entendaient étaient frappés de son intelligence et de ses réponses. Quand ses parents le virent, ils furent saisis d'étonnement, et sa mère lui dit: Mon enfant, pourquoi as-tu agi de la sorte avec nous? Voici, ton père et moi, nous te cherchions avec angoisse. Il leur dit: Pourquoi me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas qu'il faut que je m'occupe des affaires de mon Père? Mais ils ne comprirent pas ce qu'il


leur disait. Puis il descendit avec eux pour aller à Nazareth, et il leur était soumis. Sa mère gardait toutes ces choses dans son cœur. Et Jésus croissait en sagesse, en stature, et en grâce, devant Dieu et devant les hommes. » (2, 41-52 ; traduction Louis Segond) Dans la gravure de Rembrandt, illustrant les derniers versets, le mouvement des personnages traduit l’état d’âme de chacun : la solidité de Joseph, marchant d’un pas ferme, bâton en main, protecteur de l’enfant, dont il tient la main serrée dans la sienne ; l’inspiration de l’Enfant Christ qui retient son pas, les yeux levés vers le ciel, la main posée sur celle de sa mère ; le recueillement pensif de Marie qui abandonne sa main à celle de l’Enfant, dont elle suit le pas. La composition de la gravure est inspirée du tableau de Rubens Le Retour d'Égypte de la Sainte Famille (conservé au Wadsworth Atheneum Museum of Art) dont Rembrandt peut avoir vu les gravures réalisées par Schelte Bolswert : Et erat subditus illis (1620) et Lucas Vosterman : Dei et Matris et Filii fvgam in Aegyptam (1620). La tension dramatique de la scène dans l’eauforte de Rembrandt contraste cependant avec la nonchalance et la tranquillité des personnages dans le tableau de Rubens et les deux gravures. Références : Abraham Bosse, Traicté des manieres de graver en taille douce sur l’airin par le moyen des Eaux Fortes, & des Vernix Durs & Mols. Ensemble de la façon d’en imprimer les Planches & d’en Construire la Presse, & autres choses concernans les dits Arts, 1645 ; Claude-Henri Watelet, Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts (1788) Panckoucke, 1788, article de M. Levesque, p. 147 ; Christopher White, Rembrandt as an etcher, Yale University Press, 1999, p. 11; Charles Rosenberg, Rembrandt's Religious Prints: The Feddersen Collection at the Snite Museum of Art. Indiana University Press, 2017.


Rubens

Vosterman

Bolswert


19. Carlo MARATTI (1625-1713)

Jésus adoré par les anges Eau-forte, 175 x 130 mm. Bartsch 4, état non décrit ; Bellini 4, 1er état/3. Rare impression du 1er état (sur 3) avant toute lettre. Superbe épreuve imprimée sur papier vergé, rognée au cuivre. Très bon état de conservation. Paolo Bellini écrit dans son catalogue raisonné de l’œuvre gravé de Carlo Maratti publié en 1977 : « Le premier état, très rare, est inconnu dans le catalogue de Bartsch, mais il est mentionné dans celui de Heller (J. HELLER, Zusätze zu Adam Bartsch’s, Le Peintre-Graveur, Bamberg 1844, p. 72. » traduit par nous). Adam Bartsch soulignait la « pointe nette et spirituelle » des eaux-fortes de Maratti. Seules quatorze gravures lui sont attribuées de façon sûre par Paolo Bellini. Référence : Paolo Bellini et Luisa Erba : L’opera incisa di Carlo Maratti, 1977.



20. Giovanni Battista PIRANESI (1720 - 1778)

La Colonne Trajane - 1758 Eau-forte, 552 x 410 mm (cuvette). Focillon 798 ; Hind 51, 1er état/7. Planche de la série des Vedute di Roma disegnate ed incise da Giambattista Piranesi architetto Ve(nez)iano. Rarissime impression du 1er état (sur 7) avant l'adresse Bouchard e Gravier. Superbe épreuve imprimée sur papier vergé, filigrane : fleur de lys dans un cercle simple (Hind 1). Petites marges tout autour de la composition (feuille : 615 x 490 mm). Bords de la feuille légèrement jaunis ; infime trou d’épingle sur le l de Scala, sinon très bon état général. Le 2e état porte l’adresse de Bouchard et Gravier. Giovanni Bouchard, ou plutôt Jean Bouchard, car il est originaire de France, arrive à Rome au début des années 1740. À partir de 1753, il est associé avec un compatriote, Joseph Gravier. À l’époque où il grave la Colonna Trajana, Piranèse publie déjà depuis longtemps des estampes chez Bouchard : son nom (orthographié Giovani Buzard) apparaît dans l’édition de 1749/1750 des Carceri. On peut supposer que les épreuves du 1er état sont des épreuves d’essai imprimées par Piranèse avant l’édition (rare elle aussi) par Bouchard et Gravier. La série des Vedute di Roma est une des plus importantes dans la production de Piranèse : elle comprend au total 135 planches, gravées sur une période de trente ans, entre 1748 et 1778.



21. David MARTIN (1737 - 1797)

Lewis Francis Roubiliac (portrait du sculpteur Louis François Roubiliac) - 1765 Manière noire, 380 x 255 mm. Smith 6, 2/2. Impression du 2e état (sur 3) avec la lettre. Le British Museum possède en effet une épreuve d’un troisième état non décrit au catalogue de Smith, avec des reprises dans les ombres. Belle épreuve imprimée sur papier vergé fin. Un petit cheveu au tirage, infimes frottements, sinon bon état général. Filets de marges. Ce portrait plein de vie du sculpteur Louis François Roubiliac (1702 - 1762) a été gravé par David Martin d’après un tableau d’Adrien Carpentiers (c. 1713 - 1778) conservé à la National Portrait Gallery, à Londres. On y voit le sculpteur travaillant sur la terre cuite préparatoire à sa statue de Shakespeare, conservée au British Museum puis à la British Library. Référence : John Chaloner Smith, British Mezzotinto Portraits : Being a Descriptive Catalogue of These Engravings, 1884.



22. Jean-Jacques de BOISSIEU (1736 - 1810)

Jean-Jacques de Boissieu. Portrait de l’auteur - 1796. Eau-forte, 377 x 298 mm. Boissieu-Perez 102, 4e état/8 Impression du 4e état (sur 8) avant remplacement du portrait de la femme de Boissieu par un paysage. Très belle épreuve imprimée sur papier vergé, rognée à la cuvette en haut, petites marges sur les trois autres côtés (feuille : 400 x 318 mm). Très bon état général. Si les épreuves du 4e état de ce Portrait de l’auteur sont rares, celles des trois premiers sont quasiment introuvables. Les épreuves du 1er état sont à l’eau-forte pure (nous n’en connaissons que trois épreuves, dont celle que nous présentons sur notre site) ; sur les épreuves du 2e état, Boissieu a ajouté de légères ombres à la roulette et à la pointe sèche ; au 3e état, il apporte des modifications dans ces ombres, sur le haut du bras gauche. Les épreuves du 4e état ne se distinguent de celles du 3e que par la suppression des morsures des étaux dans les marges du cuivre. Les étaux servaient à fixer la plaque pour la graver plus aisément. « Il s’agit de la plus célèbre estampe de Jean-Jacques de Boissieu. Le graveur, revêtu d’un costume soigné, s’est entouré, comme autant de blasons de métier et de culture, de ses outils, d’un moulage partiel du Laocoon, d’un libre et d’une plume trempée dans l’encrier. Tout en guettant l’amateur, il exhibe un cuivre dont les modifications seront spectaculaires : du portrait de sa femme, il passe bientôt à un paysage avec des vaches, certainement plus distinctif de sa production. » L’auteur ajoute que l’hypothèse selon laquelle son épouse était


décédée pendant la Révolution est inexacte, car Madame de Boissieu n’est morte qu’en 1834, vingt-quatre ans après lui (Boissieu-Perez, 1994, p. 227). Références : Marie-Félicie Perez : L’œuvre gravé de Jean-Jacques de Boissieu, 1736-1810, Genève, Cabinet des Estampes, 1994 (reprend et complète le Catalogue raisonné publié en 1878 par Alphonse de Boissieu).


23. Rodolphe BRESDIN (1822 - 1885)

Les Villes derrière le marécage - 1878 Lithographie, 191 x 156 mm. Van Gelder 124 A, III/III Impression du 3e état (sur 3), le ciel et la mare éclaircis. Superbe épreuve imprimée sur chine crème clair appliqué sur vélin fort. Excellent état de conservation. Une très petite tache sur le bord gauche. Grandes marges (feuille : 317 x 260 mm). Provenance : Collection Bernard Boutet de Monvel puis par descendance. Van Gelder signale qu’en septembre 1881 Boutet de Monvel a réglé une partie des dettes contractées par Bresdin auprès de l’imprimeur Lemercier (Rodolphe Bresdin, Monographie, p. 135). Les états I à III correspondent à deux entrées différentes du catalogue raisonné de Van Gelder : l’état I est décrit au numéro 124 sous le titre Le Papillon et la Mare, tandis que les états II et III, après transformation de l’image, sont décrits au numéro 124 A sous le titre Les Villes derrière le Marécage. Le Papillon et la Mare est un projet d’illustration pour la fable éponyme du recueil Fables et Contes d’Hippolyte de ThierryFaletans, qui paraîtra en 1871. Van Gelder écrit que ce « livre ne mériterait pas que nous nous y attardions s'il ne nous avait valu quelques lithographies de Bresdin (cat. 122-128) - sept au total (compte tenu des dessins recommencés), laborieusement exécutées entre la fin mars et la mi-septembre 1868 et que l'artiste retouchera à diverses reprises, certaines même dix ans plus tard ». (Appendices, p. 168)


Durant toute la période de conception des illustrations, la communication entre l’auteur et l’artiste est très laborieuse voire conflictuelle, comme on peut en juger par les quelques lettres conservées et citées par Van Gelder dans son chapitre La commande d'Hippolyte de Thierry Faletans (Appendice III) :


Thierry-Faletans assaille Bresdin de conseils et de recommandations, lui dictant avec forces détails ce qu’il veut voir dans ses lithographies ; Bresdin se plie à ses désirs, mais fait également quelques choix que Thierry-Faletans ne comprend pas : au final, l’auteur refuse Le Papillon et la Mare et Bresdin se trouve contraint de reprendre son travail sur une nouvelle pierre : ce sera Le Papillon et la Mare, version II, Van Gelder n°125. Bresdin n’abandonnera pas pour autant sa première pierre et la retravaillera dix ans plus tard. Van Gelder écrit : « Les remaniements datent de 1878. Une facture de Lemercier montre que Bresdin a fait tirer 50 exemplaires. Nous pensons que c'est pendant ce tirage que Bresdin a mis au point le troisième état, le second n'étant qu'un état intermédiaire dont n'existent sans doute que quelques épreuves d'essai. » Bresdin a élargi sa composition de tous les côtés en ajoutant une végétation très dense. Il a effacé les deux grands papillons dont les ailes se déployaient sur les bords supérieur et inférieur de l’image et retouchés de nombreux détails. Dans le troisième état, le ciel et la mare sont éclaircis. Le titre Les Villes derrière le marécage a été donné par Van Gelder. Il précise cependant qu’une facture de Lemercier du 2 octobre 1878 la nomme Le Rat philosophe. Bien que le rat ne soit pas un personnage de la fable de Thierry-Faletans, celui-ci avait évoqué la possibilité d’en ajouter un sur les bords de la mare, en compagnie de toutes sortes de petits animaux. On en voit ainsi un sur le bord inférieur de l’image au premier état, encore visible au-dessus des touffes d’herbe dans le coin inférieur droit du troisième état.



Images en haute définition visibles sur notre site en cliquant sur le titre des œuvres 1. Jean CHARTIER, Vigilantia 2. Cornelis BOS, Le Christ sauve l'homme du péché - 1554 3. Jan Cornelisz. VERMEYEN, Henri II, roi de France - 1555 4. Julius GOLTZIUS, Un soldat fait ses adieux à sa femme c. 1560 /1595 5. Jan II COLLAERT, Politura Armorum - c. 1588 6. Jan II COLLAERT, Conspicilla - c. 1588 7. Philips GALLE (attribué à l’atelier de), Distillatio - c. 1588 8. ANONYME (Famille COLLAERT ?), Allégorie de la Mort 9. Jan MULLER, Portrait de Dirck Volckertsz. Coornhert - 1590 10. Christoph MURER, L'Indigent et le richard - 1596 11. Gillis VAN BREEN, Allégorie sur le bon arbre et sur l’arbre corrompu - c. 1600 12. Karel van MALLERY, Le Fils sur le dos de l'âne, le père à pied 13. Giovanni Battista COSTANTINI, Bacchanale au Silène ivre - 1619 14. Cornelis SCHUT, Saint Sébastien


15. Jacques CALLOT, Les Deux grandes vues de Paris : Vue du Louvre et Vue du Pont-Neuf - 1629/1630 16. Abraham BOSSE, La Vieillesse - 1636 17. REMBRANDT, Petrus Sylvius - 1637 18. REMBRANDT, Le Christ revenant du temple avec ses parents (contre-épreuve) - 1654 19. Carlo MARATTI, Jésus adoré par les anges 20. Giovanni Battista PIRANESI, Colonna Trajana – 1758 21. David MARTIN, Lewis Francis Roubiliac - 1765 22. Jean-Jacques de BOISSIEU, Jean-Jacques de Boissieu. Portrait de l’auteur - 1796. 23. Rodolphe BRESDIN, Les Villes derrière le marécage - 1878

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