Les Dossiers d'Acme (Eté 201) : Le roman russe au cinéma

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Les Dossiers

d’

Revue de cinéma intéractive

Le roman russe au cinéma Rhapsodies de la steppe enneigée

ÉTÉ 2011



Avant-Propos Roman russe. La sélection des œuvres littéraires comprend essentiellement les romans, nouvelles et pièces issus du répertoire classique soit à peu près une période qui s’étend sommairement de Pouchkine à Tchekhov. En outre, la langue valant pour nationalité de l’écrivain, seuls les écrits en russe ont été pris en compte. Sélection. Le présent dossier bien que fourni ne peut toutefois pas prétendre à l’exhaustivité. Toutes les adaptations filmiques de qualité n’ont pas pu être traitées et les choix relèvent souvent du subjectif, voire de l’original. Malgré la qualité de plusieurs œuvres de télévision, aucune (ou presque) n’a été prise en compte. Cependant, ces restrictions n’empêchent nullement de se forger une opinion plus globale des films appartenant au corpus qui se caractérise par la multiplicité de ses approches – d’hier, d’aujourd’hui et de demain Anachronismes. D’emblée faisons fi des considérations calendaires. L’année de la Russie en France et le centenaire de la mort de Léon Tolstoï sont passés. La belle affaire ! Il serait ridicule de limiter la portée des livres et films retenus à 2010 tant nombre d’entre eux sont indémodables.

Page : Passion fatale (1949) Couverture : Guerre et paix (1956) Au dos : Docteur Jivago (1965)


Les Dossiers d’Acme

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Sommaire Les symphonies des saisons et de la patrie de Sergei BondartchOuk Page 6 Le Don paisible : une production tumultueuse Page 13

Le roman russe au cinéma

Tarass Boulba aujourd’hui Page 36 en Russie par Vladimir Botko Page 37 en Ukraine par Viktor Gres Page 39 6

Des Démons de Dostoïevski aux Possédés de Wajda Page 40

Guerre et paix par King Vidor Page 18 Le roman russe en Italie Page 22 Le Manteau d’Alberto Lattuada Page 23 La Fille du capitaine, deux productions de Laurentiis Page 24 Riccardo Freda et Léon Tolstoï Page 26

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gogol et l’animation russe Page 44 Le Manteau par Youri Norstein Page 51 L’Aveu : Sirk adapte Tchekhov Page 54 Dostoïevski et l’ancien Hollywood Page 58

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Cinéma classique français et littérature russe Page 66

Samuel Goldwyn’s Resurrection Page 30 30

Filmographie Page 73


LA dAnSe deS ARBReS

Les symphonies des saisons et de la patrie de Sergei Bondartchouk D’abord acteur, Sergei Bondartchouk passe à la mise en scène à partir de 1956 en réalisant Le Destin d’un homme. S’ensuit le plus gros projet du cinéma soviétique : une adaptation monstre plus que fidèle à Guerre et paix.

Par Danilo Zecevic

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« Je suis russe dans le sens le plus complet du terme. » Piotr Ilitch Tchaïkovski

Le Cholokhov du cinéma ?

L’Histoire universelle

Le parcours du réalisateur Sergei Bondartchouk a souvent croisé celui de l’écrivain Mikhaïl Cholokhov. En 1965, les deux hommes considérés comme des artistes du régime sont au sommet de leur gloire. Alors que Bondartchouk remporte le premier Oscar récompensant un film soviétique pour Guerre et paix, Cholokhov se voit décerner un Prix Nobel de littérature tant mérité que contesté pour Le Don paisible. Mégaproduction considérée aujourd’hui encore comme la plus coûteuse de l’histoire, Guerre et paix n’est pourtant que le deuxième film de Bondartchouk réalisateur. Celui-ci avait fait ses débuts sur Le Destin d’un homme qui fut le premier des trois romans de Cholokhov qu’il porta à l’écran. S’en suivront Ils ont combattu pour leur patrie et Le Don paisible, œuvre posthume remontée en série télévisée après la mort du cinéaste. Complices et originaires de la même région, les deux hommes partagent, de fait, les mêmes convictions et les mêmes goûts pour l’antimilitarisme, le panthéisme et l’Histoire vue sous le prisme de l’art. Plus que tout, ils ont en commun une égale passion pour leur pays, les écrivains russes en général et le grand Léon Tolstoï en particulier. Des huit films réalisés et scénarisés par Bondartchouk, six sont des adaptations de classiques de la littérature russe puisque, outre Cholokhov, Bondartchouk transpose Tolstoï (Guerre et paix), Tchekhov (La Steppe) et Pouchkine (Boris Godounov). Même si le diptyque Les Cloches rouges demeure une commande, la popularité des Dix jours qui ébranlèrent le monde fait du texte de John Reed un incontournable en URSS. Waterloo demeure le seul film de Bondartchouk qui ne soit pas une adaptation mais il peut cependant se voir comme un prolongement de Guerre et paix inspiré par la partie que consacre Victor Hugo à la bataille dans Les Misérables.

Bondartchouk reste un interprète plus qu’un adaptateur. Sous la double casquette de scénariste et de réalisateur, il s’emploie à rester le plus fidèle possible aux textes originels. Le mimétisme entre les scénarios et ces derniers est tel que le travail de Bondartchouk consiste principalement à illustrer par la mise en scène et les procédés formels les dialogues, le rythme et les descriptions préexistants. Ceci s’explique sans doute par le profond respect qu’il a pour le matériau d’origine mais aussi par ses pratiques d’homme de théâtre tantôt habitué à relire le texte plutôt qu’à le réécrire. Il sait d’ailleurs s’entourer d’une troupe d’acteurs fidèles (Georgi Burkov, Ivan Lapikov et Irina Skobtseva, son épouse, reviennent régulièrement) et permet aux comédiens – comme au théâtre – de jouer les scènes en intégralité sans les couper dans leur élan par l’utilisation de cinq caméras qui tournent en simultané. Boris Godounov respecte les lettres et l’esprit de la pièce d’Alexandre Pouchkine tout en complétant l’espace laissé vacant par l’entre-deux scènes. Là où Pouchkine s’appuie sur la connaissance qu’a le lecteur et le spectateur de théâtre de l’Histoire russe, Bondartchouk illustre les non-dits et rend les sous-entendus plus explicites. La bataille que se livrent les troupes du tsar Boris et celles du faux Prince Dimitri sur une vaste étendue glacière – seulement évoquée en filigrane par Pouchkine – s’inspire (in) directement d’Alexandre Nevski. La scène shakespearienne se trouve ainsi renforcée par le dispositif cinématographique d’une séquence sans dialogue épique et guerrière typique de Bondartchouk. Il est resté connu pour cela et le clamait haut et fort : il était « attiré par tout ce qui est grand, fort, immense, par les espaces, les masses »1. La foule est pour lui un élément plastique quasi abstrait. Les plans en hélicoptères au-dessus de Waterloo et de Borodino 7

Page de gauche : Guerre et paix Page de droite : Le Destin d’un homme ; Sergei Bondartchouk et Mikhail Cholokhov dans les années 1970


LA neiGe et Le FeU Guerre et paix par King Vidor

Interpretée par un casting international prestigieux, l’adaptation de Guerre et paix par King Vidor marie le romantisme épique et la vision transcendantale du metteur en scène à l’univers sensitif et biologique de Tolstoï. Entre ciel et terre. Par Olivier Legrain 18


La nature impérieuse

A l’occasion de plusieurs entretiens, King Vidor déplorait de ne pas avoir pu diriger Peter Ustinov dans Guerre et paix (War and Peace, 1956). Il devait y tenir le rôle de Pierre Bezoukhov, l’ami du comte Rostov et de sa famille. Vidor désirait ardemment Ustinov car son physique volumineux correspondait à l’image qu’en donne Léon Tolstoï dans son roman. Au lieu de quoi, le cinéaste se retrouva avec Henry Fonda entre les mains. Peut-on imaginer apparence physique plus opposée que celle de Peter Ustinov et de Henry Fonda, grand, mince, regard bleu acier, distinction noble, honnêteté qui transpire d’un corps droit comme la justice, reconnu par John Ford comme l’allégorie des idéaux américains ? Pourtant, nous pouvons gager que le cinéaste fit un travail de direction d’acteur formidable car, le film projeté, Fonda paraît tellement adéquat que nous demeurons sceptiques devant les aptitudes d’un autre acteur à incarner ce personnage fort complexe, qui traverse une gamme d’émotions, d’inclinations, d’aspirations extrêmement large. Vidor mit beaucoup de lui-même dans l’approfondissement du caractère de Pierre Bezoukhov, sa vision du monde idéaliste, ses idées spirituelles. Lecteur passionné de Jung, initié à la Christian Science par sa mère, le cinéaste croit davantage en l’esprit qu’en la matière. Dans l’esprit réside l’idéal du monde totalement embrassé et compris ; dans la matière se terrent les pulsions, l’aspiration vers le mal et les faiblesses. Dans Guerre et paix, la matière se manifeste clairement dans les quatre éléments qui, d’après l’antique croyance, ordonnent une théorie du monde : l’eau, la terre, l’air et le feu sont ces substances qui, découlant d’une même matière déguisée sous des formes diverses, organisent l’univers et instaurent des conditions de vie sur notre planète. La dialectique matière / esprit trouve son pendant dans les états particuliers de chaque élément, solide / liquide / gazeux. Le solide et le liquide seraient du côté de la matière, le gazeux du côté de l’esprit. Or, cet affrontement inconciliable de contraires s’incarne aussi dans les racines profondes du héros vidorien, écartelé entre ses pulsions happées par la fange, salissantes (ce qui a trait aux sens, soit à la matière), et sa spiritualité douloureuse, éternellement envieuse de transcendance, de pureté, d’infini (ce qui a trait à la raison,

soit à l’esprit). Signes d’une nature impérieuse soutenue par un dessein divin, les quatre éléments, quand déferlent leurs forces prodigieuses, déterminent chez l’homme un rapport au monde, vaincu ou sublimé, inégal toujours. Cet homme n’est et ne s’appréhende qu’à travers sa capacité à surmonter les aléas violents d’une nature intrigante et hostile.

du rire au chaos

Parmi les belles images romanesques de la Russie impériale que travaille le film, il y a les grandes plaines enneigées qui s’étendent à perte de vue, glaciales et monotones. Sous les chœurs plaintifs de la musique traditionnelle russe réorchestrée par Nino Rota, les prisonniers russes de la Grande Armée vivent un supplice, marchant en colonnes interminables, diminués par le manque de vivres, et attaqués par l’eau dans ses éléments les plus pénibles : la pluie, la boue et la neige. Parmi eux, Pierre Bezoukhov assiste à la mort de ses proches, Pétia Rostov et Platon, ensevelis dans 19


Le RomAn RUSSe VU d’itALie Rendez vous sur www.revue-acme.com pour en savoir plus

Qu’il soit intellectuel ou populaire, le cinéma italien a souvent puisé son inspiration chez les écrivains russes. Illustration en trois temps : Le Manteau, La Fille du capitaine, Hadji Mourad.

Par Roland Fériaud

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Le roman russe au cinéma

LeS RÊVeRieS d’Un GRAtte-PAPieR SoLitAiRe Le manteau d’Alberto Lattuada

Alberto Lattuada avait le goût du roman russe. S’il échoua à porter Dostoïevski à l’écran (Le Joueur), il fut plus heureux avec Pouchkine (La Tempête), Tchekhov (La Steppe) et Boulgakov (Cœur de chien). Œuvre inaugurale de ce corpus, Le Manteau adapté de la nouvelle éponyme de Gogol résume tout à la fois ses choix littéraires et ses préoccupations sociales d’alors ancrées dans l’Italie de l’après-guerre. Akaki Akakievitch rebaptisé Carmine de Carmine conserve le caractère de ces étrangers au monde, solitaires rêveurs et apeurés par la lumière décrits par Tchekhov et Dostoïevski. Akakievitch / Carmine est cousin du narrateur des Nuits blanches, de Monsieur Prokhartchine ou du petit

subordonné écrasé par la hiérarchie dans La Mort d’un Fonctionnaire. Ainsi, Tchekhov définissait Ivanov comme un antihéros, l’homme le plus banal du monde, sa pièce comme « une satire aiguë et très drôle d’une société de petitbourgeois en décrépitude, bête, méchante, hypocrite, et avide de ragots pour nourrir sa vacuité ». La définition vaut également pour la nouvelle de Gogol et le film de Lattuada. De Carmine possède à la fois le caractère universelle du petit fonctionnaire délaissé dans son coin, humain invisible aux yeux de ses condisciples, et l’identité de l’italien cherchant à survivre dans un monde ravagé dont il ignore les combines et la corruption. Baigné d’une lumière 23

contrastée dans un décor urbain enneigé, Le Manteau se situe à mi-chemin du social onirique et du burlesque, trompe son monde lorsqu’il se présente sous les traits du néo-réalisme et annonce la comédie italienne. Le petit bonhomme moustachu qui s’en vêtit n’est que le dernier chaînon de l’humanité dont la misère confine à la dignité. Incapable de communiquer, Carmine gesticule son angoisse mais reste enfermé dans un cube en plexiglas d’où personne ne l’entend crier : il souffre sans émettre le moindre son gémissant et regarde éberlué le monde s’agiter vainement autour de lui. Sans laisser de traces lorsqu’il marche dans de la neige ou sur un sol carrelé, il ne peut être vu car avant même sa mort il n’est qu’un

Page de gauche : La Tempête


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Le CoSAqUe de LA diSCoRde tarass Boulba aujourd’hui

A l’heure du bicentenaire de l’écrivain tout juste passé, les adaptations de Gogol au cinéma ne font toujours pas l’unanimité. Côté russe, Vladimir Botko a réalisé un film polémique. Côté ukrainien, L’Iliade zaporogue de Victor Gres tourne à l’Odyssée. Par Stanislas Quesada

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Le roman russe au cinéma

Un patriote russe La version Vladimir Botko

Vladimir Botko méritait-il vraiment cela ? Coproduite par le ministère de la culture russe, sa version de Tarass Boulba suscita à sa sortie l’enthousiasme des uns et la répulsion des autres selon de quel côté de l’échiquier idéologique on se plaçait. Polémique ou pas, cette adaptation a le mérite d’être entièrement fidèle à la version 1842 du roman, plus longue, plus russophile et plus esthétique que celle de 1835. L’allégeance absolutiste faite à Gogol a néanmoins les défauts de ses qualités. Elle sert d’alibi autant qu’elle rend compte d’un attachement aveugle à l’œuvre d’origine. Botko partage visiblement la vision pan slaviste de Gogol mais semble avoir le tort de retranscrire de manière littérale à l’écran les préjugés inhérents au livre et à son époque. En tant que tel, son film peut apparaître comme anachronique. Mais n’est-ce pas là un trait de caractère qu’il partage avec Tarass Boulba lui-même que Gogol décrit comme « possédant un caractère qui ne pouvait se rencontrer qu’au rude 15ème siècle dans ce coin d’Europe peuplé de semi-nomades » ? Et de caractère primitif, ce Tarass Boulba n’en manque pas. Dans sa tendance à la fidélité quasi outrancière, Botko n’a pas non plus manqué de rendre compte de toute la sauvagerie du roman d’origine. Il montre tout y compris l’insoutenable dans un mélange anatomique de gore, de froideur chirurgicale et d’épique. Son goût pour l’Histoire vue sous le prisme de la chrétienté, de l’épopée et des corps mutilés n’est pas si différent de celui de Mel Gibson réalisateur. Il y a une intrigante corrélation entre l’arrièrefond guerrier de Braveheart et celui de Tarass Boulba, leur sanglant dénouement commun n’ayant de plus supplicié que le martyre de La Passion du Christ. Tout nationaliste que soit le discours de Tarass Boulba exhortant le patriotisme et l’esprit de camaraderie des cosaques devant le siège de Doubno, il n’en est pas moins une résonance des discours de Braveheart (pour le film) et d’Henry V (pour le roman) sur de semblables champs de bataille. En se jouant de la structure narrative pour replacer le discours en ouverture de film, Botko semble décupler son incidence belliqueuse et insister sur sa portée shakespearienne. S’inscrivant dans une certaine tendance contemporaine du

cinéma russe, Tarass Boulba allie discours local et esthétique globale, mélange de solennité théâtrale anglo-saxonne et d’envolées hollywoodiennes. Le film de Botko tient dans sa forme davantage du cinéma américain des années 1990 que des films en costume actuels. Son défi semble davantage humain que technique : les acteurs ont été choisis en fonction de leur physique ou de leur « gueule » qui déterminent le caractère des personnages ; le décor de la Setch a été construit dans son ensemble ; parmi les milliers de figurants, aucun n’est généré par ordinateur. Loin de la saturation des couleurs d’un Alexandre ou de la saturation de plans d’un Kingdom of Heaven, Tarass Boulba adopte un montage sec et structuré qui donne un ton organique aux séquences de bataille. Avec le même souci de lisibilité, chaque acte a sa tonalité propre. Le metteur en scène a choisi de sectionner les différentes parties de l’histoire en fonction de l’humeur de son héros et du passage des saisons. Il propose pour cela une diversité des filtres de


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LeS FeUX de L’APoCALYPSe des démons de dostoïevski aux Possédés de Wajda

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Lorsqu’il s’empare des Démons, Andrej Wajda n’en est ni à sa première ni à sa dernière incursion dans l’univers de Dostoïevski. Il a déjà adapté Crime et châtiment pour le théâtre et mettra en scène quelques années plus tard sa propre version de L’Idiot, Nastazja Filipowna. Par Magdalena Krzackyinski

« Sans cesse à mes côtés s’agite le Démon ; II nage autour de moi comme un air impalpable ; Je l’avale et le sens qui brûle mon poumon Et l’emplit d’un désir éternel et coupable. » Charles Baudelaire, La Destruction Toute la carrière d’Andrzej Wajda est possédée par un étrange souffle dostoïevskien, inspiration qui anime tant ses adaptations théâtrales et télévisuelles que filmiques, même si son obsession se focalise avant tout sur trois œuvres qu’il ne cesse de remettre en scène : Les Possédés (également traduit en français par Les Démons), Crime et châtiment, et L’Idiot. La version filmique des Possédés (qu’il avait déjà mis en scène pour le théâtre en 1971) est une œuvre à part, tournée en France en 1988, quelques années après Danton, avec le même scénariste, Jean-Claude Carrière, et une palette éclectique d’acteurs français et polonais.

Fiodor dostoïevski, Les démons Traduit par André Markowicz Ed. Actes Sud (1995) Collection Babel 3 volumes

Avant le tournage, le cinéaste polonais envisageait de confier à Robert De Niro le rôle de Stavroguine et à Roman Polański ou Wojciech Pszoniak celui de Piotr Verkhovenski. Rien de plus séduisant que ce casting qui confronterait d’excellents acteurs polonais face à l’ancien Corleone, figure emblématique du pouvoir et de la trahison, religieusement surnommé « Le Parrain ». Au final, Stravroguine sera joué par Lambert Wilson et c’est Jean-Philippe Écoffey qui s’insinuera dans la peau de Piotr Verkhovenski. Face à eux, Wajda confie le rôle de Chatov, qu’il pense le plus important (à l’origine le film devait même être centré autour de lui) à Jerzy Radziwiłowicz, figure récurrente du marginal et du contestataire dans son

cinéma. Hasard ou coïncidence, les acteurs de ses précédentes mises en scène dostoïevskiennes se retrouvent dans ce film. Radziwiłowicz, entre autres interprétait Raskolnikov dans son adaptation scénique de Crime et châtiment. Ainsi celui qui s’était accordé le droit de tuer devient ici celui qui soude de son sang les nouveaux détenteurs du droit de tuer. Dans la mise en scène allemande, Jutta Lampe incarnait Sonia au destin salvateur et devient ici la boiteuse à moitié folle au destin funeste. Etrange choix de casting qui semble souligner une fois de plus le cycle de mort chez Wajda. Après Crime et châtiment, Wajda met sur scène sa première version des Possédés en 1971 mais l’adaptation filmique nécessite un nouveau questionnement du temps et de l’espace. Roman long, dense et sinueux, Les Démons reste une œuvre rarement adaptée au cinéma. Dans l’impossibilité de garder la totalité du livre, Wajda décide donc de se focaliser sur la dernière partie de l’œuvre, de même qu’il l’avait fait pour Crime et châtiment (l’histoire ne commençait qu’après le meurtre) et pour Nastasja. Dans chacune de ces adaptations, l’histoire débute à son paroxysme tragique. La pièce de Camus, adaptée directement des Possédés, lui offrait un secours évident. Mais les démons de Camus et de Wajda ne sont pas les mêmes. Ainsi Wajda ne retient que très peu de 40



LA mAin dU diABLe Gogol et le cinéma d’animation

Ladislas Starewitch, Valentina Brumberg et Alexandre Alexeïeff affirment le goût des animateurs russes pour l’œuvre de Nicolas Gogol. Une assertion soutenue par Youri Norstein qui depuis vingt ans travaille sur une adaptation du Manteau. Par Danilo Zecevic

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Le roman russe au cinéma Page de gauche : Le Nez (1963) Page de droite : La Nuit de Noël (1913), La Lettre perdue (1945)

Starewitch avant la France

« L’animation est ce qui se rapproche le plus de la pensée et de la littérature russes. » Akop Korakosian, actuel directeur de la Soyuzmultfilm

effets spéciaux

Des sorciers qui jettent des sorts, le Diable attrapé par la queue, des membres du corps qui deviennent autonomes, des objets qui prennent vie. Le monde fantastique de Nicolas Gogol ne pouvait qu’attirer le cinéma d’animation. Hors du temps, hors des lieux, cet univers absurde et surréaliste, où les frontières entre la réalité et l’imagination, la mort et la vie, la nature et l’art sont brouillées, trouve un parfait écho dans un mode d’expression qui excelle à insuffler le mouvement et à créer le merveilleux et l’étrange. Avec la fascination de Gogol et de Moussorgski pour la peinture qui déboucha sur des œuvres majeures (Le Manteau pour le premier ; Tableaux d’une exposition pour le second), le rêveur avait les images conjuguées aux mots et à la musique mais le mouvement (visuel) restait à inventer. Voilà qui fut fait lorsque des cadavres de scarabées commencèrent à bouger sous ses yeux ébahis. Il est vrai que le format de ces histoires correspond particulièrement bien à la durée limitée des courts et moyens métrages mais il serait non moins faux de remarquer que les techniques employées représentent tout autant de sensibilités et d’interprétations de l’univers gogolien. Et si la plupart des œuvres « animées » de Gogol sont l’œuvre de réalisateurs russes, c’est bien parce que l’écrivain a su dresser le portrait d’un folklore et d’une société qui leurs étaient communs.

Ladislas Starewitch a déjà réalisé ses premiers films de marionnettes lorsqu’il signe un contrat avec Alexandre Khandjokov, l’un des plus importants producteurs russes des années 1910. S’en suit une fructueuse série de films – tantôt animés, tantôt à trucages – inspirés de fables et de récits fantastiques. Si les auteurs sont divers, ils sont surtout russes (citons, Pouchkine et Lermontov). La production dévolue à Gogol est cependant la plus importante puisque Starewitch adapte pas moins de six de ses nouvelles : Une terrible vengeance, La Nuit de Noël, Viy, Le Portrait, La Foire de Sorotchinsk, La Nuit de mai. Comme il l’explique pour Une terrible vengeance, le travail d’écriture était « simple » : « Je n’écrivais pas de scénario, me contentant de souligner le texte original – en rouge, pour les sous-titres ; en bleu, pour les scènes ; en noir, ce que je rejetais »1. Starewitch aimait Gogol pour son climat d’étrangeté. Il vit dans Une terrible vengeance où figurent de nombreuses scènes fantastiques le moyen d’assouvir ses goûts tout en poursuivant ses expérimentations techniques. Grâce à son ingéniosité, l’âme de l’héroïne quitte son corps et trois fantômes sortent de leurs tombes pour survoler la vallée. Pour le film suivant, Une Nuit de Noël, il se permit de mélanger les prises de vues réelles à l’animation. Il réalise ainsi l’un 45

1886 : après la mort de sa mère, s’installe chez ses grands-parents 1900 : passionné de dessin et d’entomologie, s’initie au journalisme et au théâtre 1907 : travaille au cadastre de Kovno (Lituanie) 1909 : tourne pour le musée ethnologique de Kovno ses premiers films dont Sur le Niemen 1910 : réalise son premier film d’animation « interprété » par des insectes morts Lucanus Cervus 1911 : signe un contrat avec le producteur Alexandre Khanjokov 1919 : quitte Moscou pour Yalta d’où il part pour la France l’année suivante


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Un PAPiLLon nommÉ SARAH L’Aveu : Anton tchekhov par douglas Sirk

A réalisateur européen, sujet européen. Deuxième film mis en scène à Hollywood par Douglas Sirk, L’Aveu est une amère et mordante adaptation de Tchekhov. Entre particularisme culturel et intégration à un système.

Par Anouchka Walewyk

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Splendeur et décadence de l’europe

juge débauché, tenté par l’honnêteté mais incapable d’y consentir, est indissociable des débuts de Sirk à Hollywood. Il est à ces fresques historiques ce que Rock Hudson sera aux mélodrames flamboyants. Quant à Edward Everett Horton, connu pour ses rôles de bourgeois ridicule aux côtés de Fred Astaire ou sous la direction de Lubitsch, il est ici brillamment utilisé à contre-emploi dans le rôle du comte. L’acteur, en incarnant l’un des personnages les plus antipathiques de la galerie sirkienne, témoigne d’une rare ambiguïté mêlant superficialité, lubricité et cruauté. Le choix de la sulfureuse Linda Darnell dans le rôle d’Olga est lui aussi particulièrement audacieux. Elle ne répond absolument pas à la description de la jeune femme blonde et candide du livre. L’actrice confère, au contraire, à son personnage une dimension particulièrement inquiétante et une forte charge érotique, à l’image des femmes fatales de films noirs. Si l’esprit proprement russe du roman de Tchekhov est quelque peu atténué, il se manifeste néanmoins dans le soin accordé aux rituels orthodoxes (la messe, le mariage d’Olga et Urbenin, la multiplication des croix dans le décor). Cette insistance est d’autant plus notable que les personnages semblent n’avoir aucune conscience religieuse. Comme souvent chez Sirk, c’est la nature qui, par opposition à la culture, joue le rôle le plus important. Elle abrite les scènes d’amour romantiques annonçant les réminiscences de Marylee dans Ecrit sur du vent ou la fuite nocturne de Reni dans Les Amants de Salzbourg. Mais elle est aussi un lieu de brutalité (pensons à l’altercation dans les bois entre Naomi et Dutch dans All I Desire) où l’on se livre à la chasse et finalement au crime. On retrouve également des scènes typiquement germaniques comme la promenade d’Olga dans les bois et sa chevauchée avec Fédor.

Mariée au paysan Urbenin, la belle et jeune Olga séduit le comte Volsky et le juge Petroff avant d’être assassinée par celui-ci. L’intrigue de L’Aveu reprend le thème classique du triangle amoureux, en le complexifiant par l’implication de cinq protagonistes dans le drame. Mais contrairement à beaucoup de romans, la victime est ici l’objet aimé et non l’embarrassant mari – pensons au Thérèse Raquin de Zola ou au Facteur sonne toujours deux fois. L’auteur de ce dernier, James Cain, avait d’ailleurs été engagé par Douglas Sirk pour écrire le scénario, l’histoire jugée finalement trop américanisée par le réalisateur qui en reprendra les rênes : « on aurait pu croire que Tchekhov avait voulu décrire le Milwaukee »1. La singularité du film réside en effet dans sa fidélité à l’esprit russe mais surtout européen. Inspiré d’un roman relativement méconnu d’Anton Tchekhov, Drame de chasse (publié en feuilleton entre 1884 et 1885), L’Aveu est le deuxième film hollywoodien de Sirk. On y distingue, ainsi que dans les deux suivants, A Scandal in Paris et Des Filles disparaissent, selon la formule de Jean-Loup Bourget « une tentative pour réaliser, à l’intérieur du système hollywoodien, un cinéma à l’européenne, tant par le sujet que par le propos »2. Situés dans un cadre typiquement européen, celui de la fin du 19ème siècle et du début du 20ème, ces films posent la question de la justice, du crime et de la corruption. L’auteur semble ainsi pointer du doigt la lente agonie et la perte d’innocence de cette Europe en crise qu’il vient de quitter, comme s’il devait d’abord régler ses comptes avec le Vieux Continent avant de s’attaquer à cette jeune et naïve Amérique en quête d’un bonheur factice. L’Aveu est également porté par un remarquable casting. Le cynique et brillant George Sanders, parfait dans la peau du 55


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Le GRAnd PeCHeUR dostoïevski à Hollywood

Avec des styles différents mais avec une ambition commune, Joseph Von Sternberg, Richard Brooks et Robert Siodmak se sont attaqués au monument Dostoïevski. Profondeurs de l’âme et métaphysique sous couvert de divertissement par l’ancien Hollywood. Par Anaïs Kompf

Page de gauche : Passion fatale, Les Frères Karamazov Page de droite : Passion fatale

Motif de reprise, l’œuvre dostoïevskienne s’affiche partout sur les écrans américains. Certains cinéastes assument l’emprunt aux personnages et structures romanesques qu’ils travaillent dans leurs propres créations, tel un Woody Allen qui adapte « très librement » Crime et châtiment dans Crime et délits, ou tisse un parallèle entre le destin de Raskolnikov (Crime et châtiment) et celui de Chris Wilton (Scoop). D’autres cinéastes aiment à rappeler une certaine influence qu’ils doivent à cet art de sonder les profondeurs de la psychologie humaine, dans lequel excella Fédor Dostoïevski, grâce à de simples clins d’œil : un livre de l’auteur russe posé en bonne place au milieu de la bibliothèque, un personnage qui le lit au moment clef, ou la balle perdue d’un meurtre fichée dans le millier de pages d’un des dits ouvrages. Et pourtant, malgré la prolifération de ces références, les romans dostoïevskiens n’ont que rarement fait l’objet d’adaptations cinématographiques outre-Atlantique.

question de titre

Le Hollywood classique s’est emparé trois fois, de façons notables, de ces récits. En 1935, Joseph von Sternberg fait une adaptation homonyme de Crime et châtiment (Crime and Punishment) pour la Columbia. Robert Siodmak porte à l’écran Le Joueur en 1945 avec Passion fatale (The Great Sinner) pour la MGM. De même Richard Brooks avec Les Frères Karamazov (The Brothers Karamazov) en 1958. Si von Sternberg et Richard Brooks affichent la filiation romanesque de façon directe dans des titres qui reprennent ceux de Dostoïevski, Siodmak transforme le sien dès lors empreint de l’âme plutôt que de la lettre dostoïevskienne. The Great Sinner ou « Le Grand pécheur », bien maladroitement renommé pour la version française Passion fatale, met déjà en avant un des grands thèmes que Dostoïevski n’a eu de cesse d’explorer et d’interroger tout au long de sa vie d’écrivain : celui de l’homme comme créature pécheresse, sous l’éternel regard divin. 58



SoUS Le SiGne de L’ALBAtRoS

Les adaptations de la littérature russe dans le cinéma classique français

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Les classiques de la littérature russe ont inspiré d’importants films français des années 1930 à 1950. L’inexorable érosion du romantisme allait leur être fatale.

Par Gilles Lefauconnier

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Le roman russe au cinéma

un technicien du studio ne soit impliqué dans le projet. Dans les années 1930 à 1950, les anciens réalisateurs de l’Albatros allaient s’essayer avec plus ou moins de bonheur aux adaptations des écrits de leurs compatriotes : Pouchkine pour Victor Tourjansky (Nostalgie, Volga en Flammes) et Fedor Ozep (La Dame de pique) ; Dostoïevski pour Georges Lampin (L’Idiot, Crime et Châtiment) ; Tolstoï pour le non Russe Marcel L’Herbier (Les Nuits de feu). Durant le tournage de Tarass Boulba, la réalité de l’extravagance russe dépassa la fiction. Alexis Granowsky avait tout de cette noblesse russe ruinée vivant au dessus de ses moyens afin de sauvegarder les apparences. Rolls Royce, manteau de vison, port altier, la trompeuse opulence du réalisateur masquait mal les difficultés financières de l’entreprise. La dernière scène n’était pas encore tournée que déjà les investisseurs commençaient à s’inquiéter des dépassements de budget. L’impayable Granowsky avait pourtant trouvé le moyen de couvrir ses ultimes dépenses puisqu’il emprunta la somme nécessaire… à son valet qui venait de gagner à la loterie. « Vladimir, mon valet de chambre, il m’aime comme un fils, confiait Granowsky à son dialoguiste Carlo Rim. Probablement, il sait que je suis peut-être son père. Sa mère, Verouchka était une créature ravissante… »2 Le style visuel marqué des productions Albatros s’exporte hors du cadre du studio jusqu’à influencer le cinéma français sur la décennie suivante. Le jeune Marcel Carné y fait ses premières armes en tant qu’assistant, Marcel L’Herbier profite de son passage pour poursuivre ses expérimentations, Jacques Feyder adapte Carmen et Gribiche. Influencés par l’évolution des arts plastiques, Boris Bilinsky, Georges Anenkov, Nicolas Toporkoff, Serge Pimenoff et Georges Wakhevitch deviendront des personnalités majeures de la scène cinématographique française. C’est à eux qu’on fait appel lorsqu’il s’agit de reconstituer la Russie de l’ancien temps – arrière-fond rêvé pour ces adaptations. Les deux premiers s’occupent des costumes des Nuits blanches de SaintPétersbourg, des Nuits de feu ou du Père Serge. Les deux suivants photographient le Saint-Pétersbourg de Au service

L’envol

Le studio de l’Albatros, créé par les émigrés russes en France dans les années 1920, navigua sur la corde raide dressée entre leurs deux cultures. Comme le constate François Albera dans l’ouvrage qu’il consacre au studio, ces exilés se signalèrent autant par la reproduction et la réinvention exotiques de leur pays d’origine d’avant la Révolution (en réponse au goût du public français de l’époque) que par leur franche volonté d’intégration et leur amour (préexistant à leur émigration) pour la culture de leur pays d’adoption1. En effet, pour deux adaptations d’écrivains russes (Le Diable blanc d’après Léon Tolstoï ; Le Chant de l’amour triomphant d’après Ivan Tourgueniev), combien de transpositions d’œuvres de la littérature française (Daudet, Maupassant, Dumas, etc.). Cependant, une « mode russe » – dépassant le simple cadre littéraire – allait jalonner la période du cinéma classique français. Aucun film issu de ce courant, aucune transcription cinématographique des lettres russes, ne fut alors abordé sans qu’un réalisateur ou 67

Page de gauche : L’Homme au chapeau rond Page de droite : Le Diable blanc (1930)


Les dossiers d’Acmé ÉtÉ 2011

Les Dossiers d’Acme

Mikhaïl Youriévitch Lermontov Михаил Юрьевич Лермонтов (1814-1841)

Nikolaï Semionovitch Leskov Никола́й Семёнович Леско́в (1931-1895)

Ashik Kerib(1837) (P) Idem, Sergueï Paradjanov, URSS 1988

Lady Macbeth du district de Mtsensk (1865) Lady Macbeth sibérienne, Andrzej Wajda, Yougoslavie, 1963

Un Héros de notre temps (1841) (R) Bella, fille des steppes, Stanislav Rosktotski, URSS, 1966

Ivan Sergueïevitch Tourgueniev Иван Сергеевич Тургенев (1818-1883) Un mois à la compagne (1850) (T) Secrets, Pierre Blanchar, France, 1943 Mémoires d’un chasseur (1852) (N) Le Pré de Béjine, Sergeï Eisenstein, URSS, 1937 Moumou (1854) (N) Idem, Anatoli Bobrovsky et Yevgeni Teterin, URSS, 1959 Idem, Youri Grimov, Russie, 1998 Roudine (1856) (R) Idem, Kostantin Voinov, URSS, 1976 Asia (1858) (N) Idem, Iosif Kheifits, URSS, 1977

RÉDACTEUR EN CHEF : Danilo Zecevic (danilo.zecevic@revue-acme.com) RÉDACTEURS : Roland Fériaud, Anaïs Kompf, Magdalena Krzaczynski, Gilles Lefauconnier, Olivier Legrain, Stanislas Quesada, Claude Ratinier, Anouchka Walewyk, Danilo Zecevic. CORRECTRICE : Corinne Raiff

Dmitri Sergueïevitch Merejkovski Дмитрий Сергеевич Мережковский (1866-1941) Paul Ier (1911) (T) Le Patriote, Ernst Lubitsch, Etats-Unis, 1928

Alexandre Ivanovitch Kouprine Александр Иванович Куприн (1870-1938) Oléssia, la jeune sorcière (1898) (R) La Sorcière, André Michel, France, 1956 La Fosse aux fi lles (1915) (R) Les Sœurs de Gion, Kenji Mizogouchi, Japon, 1936

MAQUETTE : Pascale Dufour (contact@ookah.com) REMERCIEMENTS : Pierre Berthomieu, La Cinémathèque française, Pier Paolo Crobeddu, Aurore Durozelle, Hervé Joubert-Laurencin, Chantal Lebel, Jacqueline Nacache, Perspectives ukrainiennes, Gilles Pidard, Alexandre Roy, Dominique Semren, Corinne Songeons, Aurore Thoron, Slobodan Zecevic, Vojislav Zecevic, Gaumont. REMERCIEMENTS PARTICULIERS : Sylvain Angiboust, Pierre Bas, Vincent Baticle, Pierre Borion, Fabien Delmas, Florian de Gesincourt, Ornella LantierDelmastro, Sébastien Léglise, Eric Nuevo, Ana Ostasevic, Alexis Pitallier, Lydie Quagliarella, Elisabeth RenaultGeslin, Solène Touly, Alissa Wenz. DIRECTEUR DE PUBLICATION : Danilo Zecevic

Le Chant de l’amour triomphant (1881) (N) Idem, Victor Tourjansky, France, 1923 *

Leonid Nikolaïevitch Andreïev Леонид Николаевич Андреев (1871-1919)

Pères et fi ls (1860) (R) Nakhlebnik, Vladimir Basov, URSS, 1953

Larmes de clown (1922) (T) Idem, Victor Seastrom, Etats-Unis, 1924

Premier amour (1860) (N) All Forgotten, Reverge Anselmo, Etats-Unis, 2000

RÉDACTION ET EDITION : Association Acme 4, rue Pierre Midrin 92310 Sèvres MAIL : contact@revue-acme.com Toutes les images sont © DR. L’iconographie est issue de photos d’exploitation, de plateau, de tournage ainsi que d’affiches promotionnelles et de captures DVD. © Les auteurs, Acmé, 2011. Tous droits réservés pour tous pays. Toute reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause est illicite et constitue une contrefaçon. Les textes n’engagent que leurs auteurs.

Les Eaux printanières (1871) (R) Idem, Jerzy Skolimowski, Grande-Bretagne / France / Italie, 1988 Clara Militch (1883) (N) Posle smerti, Yevgeni Bauer, Russie, 1915

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ISSN en cours ISBN : 978-2-9538761-1-6


Le roman russe au cinéma

eGALement ÉditÉ

Le présent numéro de la Revue Acme est sur le point de se refermer, mais l’aventure se poursuit sur internet.

John Milius, L’époque des hautes aventures

Placé en marge des articles, le logo : Les Dossiers

d’

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Les Dossiers d’Acme

Parmi les adaptations littéraires au cinéma, le roman russe est très certainement l’une des sources d’inspiration parmi les plus fécondes et intarissables. La volonté de porter à l’écran les auteurs de cette littérature devenue classique est aussi ancienne que le cinéma. On ne compte plus les différentes versions de Guerre et paix, les personnifications de Raskolnikov, les figurants morts sur les champs de bataille qui s’étendent à perte de vue. Cinéastes de tous horizons, de toutes périodes, s’essayent à la reconstruction et à la transposition des oeuvres originelles. Officiant dans le cadre du cinéma populaire ou indépendant, muet, classique ou contemporain, leurs nationalités sont diverses (le russe Sergei Bondartchouk, l’américain King Vidor, l’italien Riccardo Freda, le japonais Akira Kurosawa ou le français Claude Autant-Lara, pour citer quelques exemples parmi tant d’autres) mais tous s’évertuent d’un commun effort à transcrire l’universalité de ces écrits aux mœurs tellement russes. Faire revivre l’esprit de ces histoires, leur époque, leur lieu, c’est paradoxalement cultiver des clichés culturels qui invitent à s’en délecter. Les espaces blancs immenses, les danses folkloriques rythmées par des balalaïkas, le picaresque et le fatalisme des acteurs du drame buvant thé au 6 € TTC France samovar et vodka à la corne de bœuf ou la poésie visuelle de la farandole des couleurs sont des images qui émerveillent toujours. Elles entretiennent le mythe de la Russie éternelle à ISBN 978-2-9538761-1-6 l’âme excessive et à la cinégénie évidente. Grâce à elles, le grand écran n’a pas fini de voir s’étaler dans ses recoins les récits inspirés de Pouchkine, Tolstoï, Dostoïevski, Gogol et Tchekhov.

9 782953 876116


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