



" Avoir un pays, ça veut dire ne pas être seul, et savoir que chez les gens, dans les arbres, dans la terre, il y a quelque chose de vous qui, même quand on est pas là, vous attend patiemment."
Cesare Pavese, Mers du Sud
Le pays dont parle Pavese ne se voit pas, mais il existe. Ceux qui ont quitté leur ville, leur rue d’enfance, le savent. Le territoire est fait de bien plus que la matière des routes, des murs et des maisons. C’est un monde intime qu’on emporte avec soi, fait des envies et des attentes, des rêves et des peurs, des habitudes et d’espoirs qu’on y a mis, un jour.
Ici les mots prennent une couleur particulière, une couleur que tout le monde connait, intimement, sans besoin de se le dire: cette digue qui est une fenêtre sur la mer, où l’on vient pour imaginer la rive en face, ce jardin qui devient un salon d'été, ce terrain
L'imaginaire ne nous sert pas à affabuler. Au contraire, il parle de nous, de ce qui nous relie aux lieux. Il raconte la relation intime qui s'écrit dans notre esprit avec chaque territoire que nous avons habité.
Les habitants le savent. Ensemble, ils partagent ce mode d'emploi intime des lieux. Ils savent ce que ca signifie de vivre, habiter, se rencontrer, ici. Les mots qu'on emploie, le rapport au vivant, au paysage.
Ils le savent à tel point qu’ils ne le formulent presque jamais. Car souvent, pour eux, cela relève de l’évidence.
Et les évidences ne sont jamais dites.
Alors elles échappent aux cartes, aux rapports, aux diagnostics. Et souvent à ceux qui dessinent les espaces de demain.
1Et si on regardait chaque territoire comme un mode d'emploi déjà-là, une forme particulière du vivre-ensemble, faite d'histoires, de rites, d'imaginaires
des dimensions qu'il faut aller capter par d'autres biais, par la fiction, l'écoute, l'écriture collective, les formes alternatives de réprésentation; que ce récit singulier du territoire puisse être porté auprès de celles et ceux qui pensent et concoivent les espaces de demain
mmet, ils sont seuls. Le roi promis le Simorgh, n’est pas là. On leur avait pourtant dit! Peu à peu, ils comprennent: le Simorgh, c’est le point de rencontre entre eux, la conjonction de ce qu’ils sont tous. Un espace démocratique, de rencontre de dialogue. C’est pour cette raison que les iraniens appellent aussi cette légende le parlement des oiseaux
12 chemins vers Shiraz
Consultation
internationale pour le réaménagement du centre-ville de Shiraz
Projet lauréat
Ch. Daubas + RiO + SHAA
Dans ces ateliers, on renverse le sens du savoir et de la question. On ne sonde pas les habitants sur la base d'un projet qu'on a en tête. D'une programmation qu'on voudrait installer.
On écoute et on apprend de ce qu'ils savent, de leur manière de voir leur territoire, d'y vivre. On imagine le futur du vivre-ensemble, à partir des valeurs et de l'imaginaire du territoire d'aujourd'hui.
Atelier national des territoires
Ch. Daubas + BASE + A. Arènes
Pour cela, il faut faire un pas de côté.
L'imaginaire et la fiction nous offrent l'opportunité de dire qui l'ont est, qui l'on veut être, en laissant de côté les dessins, les faisabilités, les contraintes.
Autour d'une table, dans un cadre plus individuel, les habitants, les élus, les enfants racontent une vie à venir, une vie enviable, écrite depuis ici.
Ce travail n'est pas un discours de la méthode, ni un projet: c'est une définition collective du vivre-ensemble, versée au dossier de ceux qui conçoivent, dessinent et réalisent les espaces de demain. Une matière à concrétiser.
A travers des uchronies urbaines, à l'aide de l'IA générative et de la fiction, nous proposons de revisiter l’histoire de quartiers ou d’événements urbains entrés dans l’imaginaire collectif, pour explorer des réalités alternatives, si proches de nous qu’elles en deviennent troublantes.
En atelier collectif, ou en chambre, nous produisons des récits en utilisant la fiction pour introduire une inflexion qui change le cours des événements. Là où la grande histoire, les choix politiques, et les récits du quotidien s’entrechoquent, émergent des paysages à la fois familiers et inattendues.
Ces uchronies sont une manière puissante de nous acculturer à l'histoire territoriale, au poids qu'ont sur notre vie les décisions du passé, les institutions, les habitudes de faire, la vision des villes et territoires.
Grâce au décalage produit, on interroge le réel, et on comprend derrière l'apparence des espaces construits la complexité des mécaniques qui sont à l’œuvre.
L’official speakeasy de Saint Pierre et Miquelon / La Tour mi-Eiffel / la Gare Montparnasse n’aura pas lieu / l’Octroi de Belleville / Angkor Vat sur Orge / La Défense, retour au sol Images P. Châtel-Innocenti.
Après une formation à Sciences
Po Paris, et un passage par l’Ecole d’architecture de la Villette, j’ai travaillé au sein de plusieurs structures publiques ou privées : l’Atelier Parisien d’Urbanisme, l’agence TVK, l’agence François Leclercq (Directeur de projet, 20072012), l’agence RiO architectes urbanistes (associé, 2012- 2022). Je suis également lauréat du concours EUROPAN XII.
Pendant 20 ans, j’ai participé à une diversité de projets, dans des situations urbaines et territoriales contrastées : à MARSEILLE dans le cadre du projet Euroméditerranée, sur le positionnement du quartier d’affaire de la Défense pour l’EPADESA, lors de la consultation internationale du Grand Paris, pour la reconversion de la Base aérienne 217 ou du Campus de
MONTPELLIER, pour des pays ruraux dans le cadre de l’Atelier
national des Territoires (Ministère de l’aménagement durable/DGALN), ou au travers de la coordination opérationnelle de projets urbains dans le cadre des ZAC à NANTES Erdre Porterie, ou NANCY.
J’ai publié plusieurs ouvrages sur la ville ainsi que deux romans, Cherbourg et le Procès des Rats, aux éditions Gallimard, qui racontent autrement mon intérêt pour la géographie, la ville et le territoire.
J’ai fondé le collectif Recitorii, pour prolonger ce travail sur les nouveaux récits de territoire, réfléchir à la place que peuvent avoir la fiction et les imaginaires habitants pour nourrir les projets.
Je suis professeur associé à l’École d’urbanisme de Paris depuis 2018 et enseignant à l’école Urbaine de Sciences Po Paris.
Photographe
Né aux Îles Saint-Pierre-et-Miquelon en 1982, je suis désormais basé à Paris, où je pratique la photographie d’architecture. Depuis plusieurs années, je m’intéresse aux nouveaux récits visuels, notamment grâce à l’intelligence artificielle générative, pour interroger et réinventer les imaginaires urbains, thème de ma dernière exposition, « Deus Ex Urbana », en 2024.
Mon travail, nourri des contrastes entre mon archipel natal et l’urbanité européenne, explore l’âme des espaces bâtis avec une approche minimaliste. Lauréat du concours de la Fondation Louis Vuitton en 2018, mon travail a fait l’objet d’un documentaire coproduit par France Télévision en 2023.
Jack Farman est spécialisé en anthropologie de l’environnement et ethnographie visuelle. Son travail explore les interactions entre les humains et leur milieu, en interrogeant la manière dont les territoires sont habités, transformés et racontés.
Diplômé en philosophie à McGill (Canada) et en anthropologie sociale à UCL (Royaume-Uni), il développe une approche qui croise recherche et création, cherchant à rendre perceptibles les dynamiques écologiques, culturelles et sociales à travers l’image et le son.
Son projet 'Espèces Pionnières' explore la manière dont des pratiques humaines participent à la transformation des écosystèmes. À travers des films, des installations et des collaborations avec artistes et chercheurs, le projet met en lumière les tensions entre régénération et pollution, entre mémoire des lieux et altérations environnementales.
Usbek & Rica est un média français qui explore le futur sous toutes ses formes. Fondé en 2010, il propose des analyses, des récits et des débats sur les grands enjeux de société, de technologie et d’environnement. Son nom fait référence aux personnages Usbek et Rica des Lettres persanes de Montesquieu, des voyageurs persans qui observent avec curiosité et esprit critique la société française du XVIIIe siècle.
Le média se décline en plusieurs formats
- Un magazine papier trimestriel, qui traite en profondeur des mutations du monde.
- Un site web, avec des articles, des tribunes et des interviews sur des sujets d’actualité liés à l’innovation et à la prospective.
- Des événements et conférences, pour stimuler le débat public sur des questions d’avenir.
- Des podcasts et vidéos, qui explorent divers sujets sous un angle original et accessible.