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Introduction
L’immigration est souvent abordée de manière négative et suscite l’appréhension des citoyens. Cette note souhaite étudier les ressorts de ce mouvement vers nos pays riches de l’UE. Il n’est peutêtre plus l’heure de se positionner sur le fait de savoir s’il faut ou non ouvrir les frontières mais bien d’étudier ‘comment’ les ouvrir.
La démographie peut nous aider à comprendre l’interaction des enjeux qui se posent aux pays dits émergents et aux pays riches. Cette étude prend comme point de départ le rapport des Nations Unies de 2022 sur l’Etat de la situation mondiale1. Nous mettons en perspective la situation de quelques pays européens avec la situation des pays d’Afrique Subsaharienne2 La démographie mondiale sera donc notre clé de lecture des mouvements migratoires.
Enfin, nous dessinerons les vrais enjeux posés par ces flux migratoires.
1 United Nations Department of Economic and Social Affairs, Population Division (2022). World Population Prospects 2022: Summary of Results. UN DESA/POP/2022/TR/NO. 3
2 Afrique du Sud, Angola, Bénin, Botswana, Burkina Faso, Burundi Cameroun, Cap Vert, Comores, Congo (Brazzaville), Côte d'Ivoire, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Gabon, Ghana, Guinée, Guinée Equatoriale, Kenya, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Maurice, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Soudan Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie, Zimbabwe.
1 Etat de la situation mondiale et perspectives européenne et subsaharienne
En substance, le rapport des Nations Unies indique que nous serons 8 milliards d’humains sur Terre fin novembre 2022 et que la planète devrait compter 9,7 milliards d’habitants en 2050 et culminer à 10,4 milliards dans les années 2080. Un petit nombre de pays en Afrique et en Asie seront à l’origine de la majeure partie de cette augmentation.
Alors que certains pays continuent de croître rapidement, d’autres voient leur population décliner. Dans le même temps, la population mondiale vieillit, l’espérance de vie mondiale continuant à augmenter et la fécondité à diminuer
Pour rappel, la croissance d’une population est assurée par 2 facteurs. D’une part, le solde naturel qui calcule la différence entre les naissances et les décès. Ce solde naturel est notamment fortement influencé par le nombre moyen d’enfants par femme (taux de fécondité). D’autre part, le solde migratoire qui fait le bilan entre les immigrations et les émigrations.
Pour obtenir une croissance de la population, il y a deux explications : soit ces 2 soldes sont positifs (ce qui est donc le cas quand les naissances sont plus importantes que les décès et les immigrations plus importantes que les émigrations), soit un de ces 2 soldes est suffisamment positif pour compenser la diminution de l’autre. Inversement, la croissance de la population peut être ralentie, voire annulée, si ces soldes ne se compensent pas voire s’annulent. Enfin, elle décroit si ces soldes sont négatifs ou si un de ces soldes est négatif au point de ne pas être compensé par l’autre.
Chaque pays a ses propres dynamiques quant à ces soldes et surtout ses propres enjeux. Néanmoins, et comme nous le développons ci-après, de grandes disparités subsistent essentiellement entre deux ‘blocs’ de pays que sont les pays dits 'développés’ et ceux dits ‘émergents’.
1.1 Nombre d’enfants par femme et solde naturel
Un indicateur démographique clé dans le calcul du solde naturel est le nombre d’enfants par femme. On parle ici de l'indice conjoncturel de fécondité (ICF) qui est le rapport entre le nombre d'enfants nés vivants dans une génération au cours d'une année et le nombre moyen, durant cette même année, de femmes de ce groupe en âge de procréer. Cet indice est utilisé dans la plupart des études internationales et permet donc une comparaison plus aisée entre pays. Même si cet indice n’est pas le reflet exact du comportement d’une génération réelle, il s’agit d’une projection sur base de taux observés de procréation par catégorie d’âge.
En 2021, le rapport des Nations Unies faisait état d’un nombre moyen d’enfants par femme dans le monde de 2,3. Ce dernier devrait tomber à 2,1 en 2050 selon leurs projections. Pour l’UE, la progression naturelle de la population est négative depuis 2012, car le nombre de naissances est en baisse. Le taux est passé de 10,2 naissances pour 1 000 habitants en 2001 à 9,1 en 20203
En Belgique, le nombre moyen d’enfants par femme en 2021 est estimé à 1,59, soit une légère augmentation par rapport à 2020 (1,54)4. En France, le nombre moyen d’enfants par femme en 2021 est de 1,835 enfant par femme.
Comme le montre le tableau ci-dessous, ces niveaux sont très disparates. On observe par exemple en Afrique sub-saharienne un nombre moyen d’enfants par femme de 4,6 enfants C’est également dans cette région que l’on dénombre le plus haut pourcentage d’adolescentes-mamans 3
Pour prendre un indicateur plus facile à appréhender, nous pouvons prendre le taux de natalité pour 1000 habitants. En Belgique, il y a 10,2 naissances / 1000 habitants en 20216 soit 117 914 naissances vivantes sur l’année 2021. Pour la France, elle, ce taux s’établit en 2021 à 10,9 enfants/1000 habitants7 soit approximativement 738 000 naissances vivantes sur cette même année. En Afrique subsaharienne, la moyenne est de 30,81 naissances/1000 habitants en 20218
Ces chiffres doivent être mis en perspectives avec le taux de mortalité infantile. Alors que la Belgique et la France connaissent entre 3,3 et 3.6 décès/1000 naissances vivantes en 2020, l’Afrique du Sud en connait, elle, un taux de 25,89
Le solde naturel d’une population se calcule également en rapport au nombre de décès dans une population. Le taux brut de mortalité est le rapport du nombre de décès de l'année à la population totale moyenne de l'année. La Belgique a connu 112 291 décès en 2021 sur une population de 11 521 238 habitants (9,75 décès pour 1000 habitants) et en hausse de 2,4% par rapport à la période 20172019. La France a connu 657 000 décès en 2021 sur une population de 67 626 000 d’habitants (9,72 décès pour 1000 habitants). Sur le continent africain, le taux de mortalité pour 1000 habitants varie de 5,3 pour le Kenya à 11 pour le Nigeria10
1.2 Solde migratoire et croissance de la population
En Belgique et en France, le solde migratoire reste le moteur principal de la croissance de la population.
La Belgique connaît en 2021 une croissance de sa population de 62 770 habitants soit une augmentation de 0,5% largement soutenue par son solde migratoire. A long terme, la population belge continue certes de croître (12,8 millions d’habitants en 2070 par rapport à 11,5 millions en 2020), mais à un rythme moins soutenu que la moyenne observée sur les 30 dernières années. L’augmentation annuelle moyenne sur la période 2020-2070 est de 25.000 habitants supplémentaires (soit la moitié de la croissance annuelle moyenne sur la période 1992-2020)11 La France suit un schéma similaire et a
6 Statbel, Population – Naissances et Fécondité, 13 octobre 2022.
7 INSEE, Bilan démographique 2021, N°1889, 18 janvier 2021.

8 World Population Prospects. Nations Unies, 2022.
9 OCDE, Panorama de la Santé, Taux de mortalité infantile, 2021.
10 INSEE, Espérance de vie et indicateurs de mortalité dans le monde, Données annuelles 2020-2025, 17 janvier 2020.
11 Bureau fédéral du Plan Mars 2021 Perspectives démographiques 2020-2070 Scénario de référence et variantes
connu, elle, une augmentation de sa population de 0,3%. Croissance tirée également par le moteur qu’est le solde migratoire12
En revanche, l’Afrique subsaharienne a vu sa population croître de 2,6%. Et concernant ses mouvements migratoires, suivant les données de la Banque mondiale, pour l’année 2017, la migration nette totale de cette région était de -1 814 121 de personnes (avec des valeurs extrêmes comme en Afrique du sud avec + 727 026 habitants et – 870 998 habitants au Soudan du sud). Ces chiffres traduisent des mouvements importants de populations sur ce continent.
L’UE a connu, elle, en 2020 une immigration nette de 0,96 millions d’habitants. Sa population a diminué d’environ 100 000 personnes passant de 447,3 millions au 1er janvier 2020 à 447,2 millions au 1er janvier 2021 ou encore à 446,8 millions au 1er janvier 2022. Cette décroissance trouve son explication de la combinaison des trois facteurs : diminution du nombre de naissances (-97 172 de 2019 à 2020), augmentation du nombre de décès (+ 531 045 de 2019 à 2020) et baisse du solde migratoire (+ 2,25 millions d’habitants en 2020 au lieu de 3 millions en 2019)13
Dans les données de la Commission européenne14 relatives aux migrations vers l’UE en 2020, on constate que la part de la population européenne née en Afrique subsaharienne n’est pas significative et n’est même pas représentée dans leurs études. Par ailleurs, dans les 10 principales nationalités des personnes ayant reçu un premier titre de séjour délivré dans un État membre de l'UE la même année, aucune des nationalités d’Afrique subsaharienne n’y figure.
En parallèle, dans les nationalités des primo-demandeurs d’asile15, en 2021, là 25% de ces 535 000 demandes provenaient d’un pays d’Afrique soit 75 340 demandes pour 29% pour les pays d’Asie. En 2021, seules 39 % de toutes ces demandes aboutiront à une décision positive.
De manière générale, l’UE accueille peu des réfugiés comparativement à sa population totale à savoir 0,6% en 2020, là où des pays comme le Liban et la Turquie en accueillent respectivement 12,5% et 4,4% de leur population.
12 INSEE, Bilan démographique 2021, N°1889, 18 janvier 2021.
13 Données Commission européenne 2020 : https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/promoting-our-europeanway-life/statistics-migration-europe_fr
14 Commission européenne - www. ec.europa.eu - https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/promoting-oureuropean-way-life/statistics-migration-europe_fr
15 Personne qui demande la protection internationale d’un autre pays. Elle demande ainsi l’asile à ce pays.
2 Enjeux
2.1 Les pays émergents d’Afrique subsaharienne
Comme nous l’avons vu, les pays d’Afrique subsaharienne connaissent une forte croissance de leur population. La part de jeunes dans ces pays est donc très importante comparativement à leur population totale
Sources : World Population Prospectives 2022 (ONU)

Ce sont également ces pays où on observe une situation économique dégradée. En effet, la région est – et de loin – la plus défavorisée du monde sur le plan économique et social. En 2021, son revenu par habitant en parité de pouvoirs d’achat internationaux courants (PPAIC)16 5 830, 11$ (avec de grandes disparités entre revenues très élevés et plus petits). Par comparaison, le revenu par habitant en PPAIC est 51.072,12$ dans la zone euro17 (avec 59.460 $ pour la Belgique et de 51.850 $ pour la France) soit près de 10 fois supérieur.
De manière corrélée, ces pays ont la plupart du temps un indice de développement humain qui, même s’il s’améliore, reste très faible ces dernières décennies18
Ces conditions socio-démocratico-économiques ne leur permettent pas de répondre aux défis et aspirations de leur population notamment en termes d’accès aux droits fondamentaux (éducation, soins de santé, travail). Cette situation pousse une partie des jeunes adultes à prendre la route de l’exode.
2.2 Les pays développés de l’UE
Les pays développés tels la Belgique ou la France connaissent, quant à eux, des enjeux liés à leur démographie d’une tout autre nature. Comme nous l’avons vu, ces pays dits riches connaissent un
16 Pour pouvoir procéder à des comparaisons internationales de données économiques exprimées dans des monnaies différentes, les parités de pouvoir d’achat (PPA) permettent ces comparaisons de prix. C’est pourquoi, l’OCDE et d’autres organisations internationales utilisent fréquemment cet indicateur dans leurs études. Les PPA sont des rapports de prix en monnaie d’un même bien ou service dans différents pays.
17 Données extraites de la banque de données de la BIRD – Banque mondiale.
18 Ces pays ont une part non négligeable de leur population (part plus importante que pour les pays riches) vivant sous le seuil de pauvreté. Or selon la Banque mondiale, le nombre d’individus en situation d’extrême pauvreté dans le monde (vivant avec moins de 1,9 dollars par jour) est passé de 1,9 milliards en 1990 à 730 millions en 2020. Ceci étant, toutes ces personnes peinent à vivre et il y a encore beaucoup à faire pour leur assurer une vie décente.
ralentissement de l’évolution de leur solde naturel qui freine la croissance de leur population. Le flux migratoire est pour ces pays, dont la Belgique, le principal moteur de leur croissance démographique.
Les enjeux qui se posent à ces pays développés sont davantage liés au vieillissement de leurs citoyens. En effet, ces pays doivent souvent mettre en place des politiques sociales et économiques afin que leurs citoyens vieillissent bien c’est-à-dire en bonne santé. Pour ce faire, il est nécessaire d’avoir de bonnes conditions de travail, une qualité de vie améliorée, une pension décente qui assure un pouvoir d’achat réel et en phase avec la société dans laquelle ils vivent. Il est également primordial pour ces pays de penser à des structures d’accueil et de soins au long court pour accompagner les seniors en perte d’autonomie ainsi que des politiques de soins ambulatoires efficaces.
En parallèle, ils doivent également prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la pérennité de leur sécurité sociale. En Belgique, l’une des sources financières principales de ces deux systèmes de solidarité interpersonnelle sont les cotisations sociales ordinaires des travailleurs et des employeurs. Selon le comité d’étude du vieillissement, ce coût total du système de sécurité social passerait de 24,5 %du PIB en 2019 à 29,7 % en 2050. Les dépenses en soins de santé, elles, passeraient de 7,8 % à 10,5 % du PIB. Pour envisager donc de manière plus sereine l’avenir, il faut pouvoir faire entrer de manière régulière, rapide et pérenne des jeunes sur le marché du travail.
Par ailleurs, des institutions internationales tels que le FMI et l’OCDE concluent depuis longtemps sur les retombées économiques positive de l’immigration sur les pays d’accueil. De manière générale en effet, l’immigration (de nature principalement économique) vers les pays les plus riches améliore leur croissance économique et leur productivité19
Accueillir ces personnes représente un gain pour le pays qui les reçoit. Néanmoins, ça doit pouvoir s’accompagner de politiques d’emploi active, d’accompagnement et de formation de ces migrants mais également des autochtones qui ne parviennent pas à s’insérer sur le marché du travail faute souvent d’un manque de qualifications. Et cet enjeu ne paraît pas insurmontable.
2.3 Enjeux transnationaux
Nous pensons ici aux enjeux environnementaux où les dérèglements climatiques que nous connaissons vont accentuer les pressions migratoires sur les pays moins impactés pour l’instant par ces dérèglements ou qui ont une plus grande résilience du fait de ressources financière plus importantes pour y faire face.
Des populations entières n’auront plus d’autres choix que d’émigrer pour assurer leur survie. En l’absencedemesuresconcrètes,desfoyersdemigrationclimatiquepourraientapparaîtredès203020 Cette situation forcerait 32 millions de personnes en Afrique de l’Ouest à migrer à l’intérieur de leur pays d’ici 2050. Les estimations sont encore plus élevées pour la région du bassin du lac Victoria qui risque de compter 38,5 millions de migrants internes sur la même période.
Enfin, l’immigration touche également une question plus fondamentale du droit à la dignité humaine. Tout être humain devrait pouvoir bénéficier d’un égal accès à l’éducation, aux soins élémentaires. Bref aux droits fondamentaux leur permettant de vivre dignement. C’est ce que nombre de migrants viennent chercher dans les pays riches. Comme le rappelle le groupe de travail mené par Thomas Piketty sur les inégalités dans le monde : la question de savoir comment financer ces services essentielsestentièrementpolitiqueetdépenddoncdel’ensemblederèglesetd’institutionsquese donneront les sociétés du monde entier21
Il en résulte que les pays plus riches et les pays émergents ont tout intérêt à collaborer au niveau de leur politique immigratoires vs émigratoire. Et ce, dans le respect l’un de l’autre et surtout des populations de part et d’autre.
19 FMI, Perspectives de l’économie mondiale – chapitre 4, avril 2020 et OCDE, Perspectives des migrations internationales 2013 – chapitre 3 «L’impactfiscaldel’immigrationdanslespaysdel’OCDE ».
20 Banque mondiale, rapports Groundswell Africa, 27 octobre 2021.
21 Rapport sur les inégalités mondiales, 2022, Lucas Chancel, Thomas Piketty, Emmanuel Saez, Gabriel Zucman (dir.), Seuil, 22 avril 2022
Pour l’UE, il n’est, dès lors, plus question de se positionner pour ou contre l’immigration mais plutôt de réfléchir à la meilleure manière de l’organiser dans le respect de chaque pays partenaire et dans un esprit de collaboration transnationale. C’est la tentative de l’assemblée générale de l’ONU du 19 décembre 2018 qui conclue le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières22
Conclusion
L’évolution démographique de la population mondiale montre une évolution contrastée entre, d’une part, les pays riches (dits développés) où le taux de croissance de la population décroît et, d’autre part, des pays émergents connaissant des taux de croissance rapide et important. Ces deux phénomènes s’accompagnent évidemment des conséquences différentes et posent des enjeux cruciaux différents à chacune des parties.
Les pays riches doivent faire face à une population vieillissante et aux questions de soutenabilité de leur système de solidarité interpersonnelle, là où les pays émergents ont toutes les difficultés à gérer une population jeune avec ses besoins d’éducation, de services publics performants et d’accès au marché du travail. Le tout dans un contexte socio-économique où souvent les conditions d’accès minimales à ces droits fondamentaux ne peuvent être remplies.
Une immigration ouverte, concertée avec des visions partagées permettraient à chacun de ses pays de relever les défis respectifs qui se posent à eux.
Au regard de ces évolutions démographiques et ses enjeux accentués par les conséquences du dérèglement climatique, il semble que nous n’ayons plus le choix, pays riches et foncièrement ceux de l’UE, que d’être volontaristes et de mener à bien une vraie coopération et une entraide internationale avec tous les pays concernés et surtout avec les pays émergents. Bref il faut urgemment faire prendre corps au Pacte mondial sur les migrations de l’ONU signé en 2018 qui peine à se concrétiser pour les 193 pays signataires.
Les pays riches doivent désormais mobiliser la communauté internationale pour affirmer leur détermination à prendre en charge ses enjeux dans le respect des pays émergents aux prises avec l’organisation de leur Etat et la structuration de leur économie. Il faut désormais les aider dans cette transition en ayant certes une politique de coopération au développement sérieuse mais également en ayant des relations migratoires apaisées et concertées avec eux. Il en va du bien-être de ces migrants qui souvent non pas le choix économique ou politique de pouvoir rester dans leur pays d’origine.
Ceux qui souhaitent ériger la Belgique et l’UE en forteresses interdites aux ‘étrangers’ ne comprennent pas l’opportunité que représente l’apport de cette immigration en termes d’impulsion économique, sociétale et culturelle. Ils ne saisissent pas non plus que ces immigrés, une fois intégrer et acquis à nos valeurs démocratiques, de respect des droits de l’homme, d’émancipation de l’individu sont à leurs tours des ambassadeurs de ces valeurs et les porteront comme citoyens européens dans le reste du monde.