St-Nazaire_Mixité vécue

Page 1

CONCEVOIR ET GÉRER LA MIXITÉ DANS LE LOGEMENT SOCIAL

VOUS AVEZ DIT

Document librement inspiré de l’hebdomadaire le 1, ne peut en aucun cas faire l’objet d’une utilisation en dehors du seul contexte du projet collectif tuteuré

MIXITÉ ?

N°1

mercredi 18 décembre 2019

les

LA COMMANDE IL S’AGIT aujourd’hui de concevoir et de gérer des ensembles immobiliers caractérisés par la mixité des modes de gestion des logements et du statut d’occupation des habitants, dans l’objectif d’y assurer une bonne cohabitation et un cadre de vie agréable. En effet, la loi ELAN conduit à un renforcement de la logique de coprésence de logements au statut d’occupation différent dans les mêmes ensembles immobiliers, par les deux phénomènes de vente Hlm et de VEFA. [...] Ces évolutions posent la question de la mixité des statuts d’occupation et des modes de gestion à l’échelle d’un ensemble immobilier, d’un immeuble voire d’une cage d’escalier. Quels sont les effets sur les relations de voisinage de la cohabitation dans un même immeuble de logements sociaux et de logements libres ? Quels défis de gestion soulève cette forme de mixité ? Cette mixité des statuts d’occupation et des modes de gestion appelle-t-elle un renouvellement de la conception architecturale du logement social ?

PROFESSEURS ENCADRANTS

L’ÉQUIPE DES 7

ENSAPBX Stéphane Hirschberger Géraldine Vallois SCIENCES PO BORDEAUX Gilles Pinson

Cécile

TUTEUR

Emma

AGENCE DEUX DEGRÉS Mathieu Zimmer Anouk

COMMANDITAIRES ESPACE DOMICILE Lise-Anne Le Hay Laurent Caffin

Marion Candice

SILÈNE Laetitia Peron CARENE Raphaëlle Desperiez

Juliette Cécile

lire la suite dans le poster


MERCREDI 18 DÉCEMBRE

2019

EDITO

LE LOGEMENT représente une part importante dépossèdent pas pour autant le bailleur de toute possibilité de l’identité de tout individu. Il peut aussi se comprendre de porter une vision et certaines valeurs. A une nouvelle comme un construit à trois échelles, celle de l’unité d’habistratégie de territoire, doit répondre une nouvelle stratégie tation, lieu d’intimité ; celle de la résidence et donc du comd’entreprise, toujours au service de l’intérêt général. Les mun ; et enfin celle du quartier et par extension du territoire stratégies de vente Hlm et d’achat en Vefa qui généralisent au sein duquel il s’inscrit. les copropriétés sont à la fois la pierre angulaire et le laboIntime d’abord, parce que le logement construit le ratoire de ces changements de pratiques du bailleur social. A foyer, autant que le foyer le construit en l’investissant et en la fois contrainte et solution, donc. Il s’agit de garder à l’esse l’appropriant. Il ne suffit pas d’avoir un toit sur la tête prit que l’expérience habitante et la vie de la résidence sont pour habiter. Commun , ensuite, parce que le logement plus organisées autour des concepts de vivre-ensemble et ne fonctionne pas tout seul. Ses limites constituent l’interde lien social que de cohabitation des statuts d’occupation. face avec le voisinage. La porte d’entrée dirige vers l’intime L’important est donc de créer des conditions d’émergence dans un sens, mais ouvre aussi sur le commun dans l’autre. des temps collectifs entre habitants, de valoriser leur attaTerritoire , enfin, parce que ce commun que l’indivichement à leur cadre de vie, et de faciliter l’intégration du du fréquente aux marges de l’intime parc au fonctionnement du quartier. constitue lui-même un sas d’accès Sans tomber dans l’utopie particivers la ville. Ces échelles ne doivent ni pative, la manière dont le bailleur se être étrangères, ni hostiles à l’indivisaisit de ces concepts et le rôle qu’il du, mais bien représenter des peaux choisit de jouer peuvent constituer un supplémentaires qu’il est à même de véritable levier d’amélioration des renouveler, modifier par ses pratiques conditions de vie habitantes et d’évoet ses usages. « Le logement social lution de son métier. Placer l’archipeut faciliter ces interconnexions car tecture et l’expérience habitante au il est à proprement parler social, non centre de tout projet permet de rendre pas seulement dans sa vocation d’acintelligibles ces interactions entre les cueil des foyers les plus modestes, échelles de l’intime, du commun, du mais aussi et avant tout dans son acterritoire, et d’appréhender le logeF.Hundertwasser, architecte et ception redistributive, solidaire, bref, ment au delà de ses frontières matéartiste autrichien de partage1. » rielles, en tant qu’habitat.

« L’Homme a trois peaux, la sienne, ses vêtements et sa maison. Toutes ces peaux doivent se renouveler, grandir et changer »

Jean-Marc Stébé, Le logement social en France, Que sais-je, 2016, PUF

e lles d l’habi ta

1

Les tr ois

he éc

La nouvelle législation qui encadre l’action du bailleur bouleverse les modalités de gestion dudit habitat. Compte tenu de ce double phénomène de vente HLM et d’achat en Vefa, la part du parc en copropriété augmente dans une telle mesure qu’il n’est plus possible de se contenter de bricolage. Cela pose la question d’une réorganisation des services en interne, via le développement de nouvelles compétences et l’arbitrage entre internalisation et externalisation de certaines missions. Ces phénomènes ont aussi une résonance en termes de gouvernance sur l’ensemble du territoire intercommunal. Le bailleur est poussé à changer d’algorithme sans abandonner sa culture de l’habiter. Il est confronté à de nouveaux publics, plus larges que ses locataires traditionnels, ce qui constitue une opportunité pour lui de devenir un véritable acteur-créateur de la ville au-delà des missions gestionnaires. Si de nouvelles contraintes s’imposent bel et bien, elles ne

t

2./

Hundertwasser house, Vienne © archzine.fr


LES 7

L’ODYSSÉE NAZAIRIENNE LÉO GEMPTEL

LES ECLUSES

REPÈRES JANVIER 2019 : LE FORUM URBAIN ORGANISE UNE EXPOSITION DES PROJETS COLLECTIFS 2018 • COMMANDITAIRES CONVIÉS • PREMIÈRE RENCONTRE

LES ÉCOLES

LES KERHINS

E O EDC MASLRN SA STBE GUE

JARDINS DE L’ESTRAN ST ANDR

É DES EA

UX

C TRIGNA

VILLAS MARINA

MARS 2019 : A LA DÉCOUVERTE

DU TERRITOIRE NAZAIRIEN, PREMIÈRE PHASE DE TRAVAIL LANCÉE

MONTO BRETAGIR DE NE

3./ PORNICHE

ÉCHELLE COMMUNALE

T

BOTANICA MODE DE VIE DES HABITANTS

DÉMARCHE QUALITATIVE

VILLA ENERPOS CADRE LÉGISLATIF

MAI 2019 : RENDU INTERMÉDIAIRE AU SIÈGE SOCIAL D’ESPACE DOMICILE

SEPTEMBRE 2019 : CONSTITUTION D’UNE NOUVELLE ÉQUIPE

OCTOBRE 2019 : A LA DÉCOUVERTE D’UN NOUVEAU TERRAIN D’ÉTUDE DÉMARCHE QUANTITATIVE APPROCHE MULTI- ACTEURS

DÉCEMBRE 2019 :

RENDU FINAL REMIS AUX COMMANDITAIRES

MÉCANISME DE JEUX D’ACTEURS

LE SAPHIR LE SAPHIR

NOTRE ÉTUDE s’est déroulée de janvier à décembre 2019. Elle est basée sur plus d’une vingtaine de rencontres avec des acteurs de l’habitat, de l’architecte au promoteur, en passant par le chargé de secteur, des élus et des administrations territoriales. Ces entretiens sont complétés par un travail de terrain réalisé en deux temps auprès des habitants en mars et octobre 2019, ainsi que d’un questionnaire mis en ligne d’octobre à novembre 2019 à destination des résidents du parc hlm d’Espace Domicile et Silène. Ainsi, ce numéro permet de discuter les leviers de (re)positionnement du bailleur dans ce nouveau cadre contraint. Comment penser la stratégie de vente Hlm et d’achat en Vefa à l’échelle de l’intercommunalité ? Quelle place le bailleur prend-il dans la vie d’une copropriété ? Doit-il assumer une double casquette de copropriétaire et de syndic ? Quelle place pour le numérique et le digital dans l’accompagnement de cette mutation ? Peut-on imaginer des instances de mise en relation des différents acteurs de l’habitat au profit d’un diagnostic partagé et d’une logique d’action commune ? Ces questions trouvent leurs réponses non seulement dans une adaptation des modalités de gestion, mais aussi dans un traitement architectural spécifique des transitions entre intime et collectif. Du salon à la terrasse partagée, de la terrasse partagée au hall d’entrée, du hall d’entrée à la rue.


MERCREDI 18 DÉCEMBRE

LA VOIX DU POÈTE

LES 7

2019

LA BRIÈRE

Poème de Emma LAMOTHE-DUBROCA

A

1

Poème illustré par CÉCILE METEIER

Il n’est point d’espace où le vent ne souffle, Point d’abris contre les éléments, Et nos corps battus par la tempête Ont su trouver refuge Sous les toits de chaume et les murs blanchis à la chaux, Dans le marais faisant de nous des naufragés, Dans le ventre d’une baleine Nous nous sommes désaltérées, Sous le béton armé érodé de la base-sous-marine, qui s’étend menaçante et inébranlable vers un infini incertain. Nous nous sommes réchauffées Aux sourires d’habitants de ce territoire armoricain, Accrochées à leurs histoires comme à une ligne de vie, Celle de nos attentes et de nos envies. Dans notre arpentage nous connûmes aussi Les portes claquées, les regards fuyants, Par manque de temps? Mais ce périple achevé, C’est une équipe qui s’est formée.

LE MOT [Mixité] « BUREAUX, COMMERCES ET LOGEMENTS : notre objectif était la mixité. » « Ce quartier est affaire de mixité : mixité sociale, fonctionnelle et architecturale aussi. » « Le mot d’ordre du cahier des charges ? » La mixité, encore et toujours. [...] Pas un territoire, un quartier, ou un bâtiment qui ne soit bâti au nom de la mixité. Mais de quelle mixité parlons-nous ? L’apparition du vocable dans les discours des architectes, des urbanistes comme des élus est liée, en France, à la loi SRU (loi Solidarité et Renouvellement Urbain du 13 décembre 2000), qui impose à chaque commune de plus de 1500 habitants en Île -de-France (et 3500 dans les autres régions) de disposer sur son territoire

d’au moins 20% de logements sociaux d’ici 2020 (25% depuis 2013). Objectif : la fin de la ségrégation sociale, obtenue en mêlant logements sociaux et logements en accession à la propriété. A cette mixité sociale est liée une mixité dite « fonctionnelle » (ou programmatique) associant aux programmes d’habitation bureaux, commerces et équipements. La mixité se présente comme un plaidoyer en faveur de la ville plurielle, contre les ghettos. Dans un texte intitulé La mixité sociale : une utopie urbaine et urbanistique datant de 2007, son auteur, le sociologue Gérard Baudin, observait déjà : « La mixité serait un remède aux maux de la ville actuelle, voire engendrés par elle [...] en assurant un brassage des différentes catégories sociales, ce brassage étant quant à lui un garant de la cohésion sociale. » Une idée qui

ne date pas d’hier. Le phalanstère de Fourier ne prônait-il pas une vie communautaire des plus harmonieuses ? Par ailleurs, aujourd’hui encore l’immeuble haussmannien est régulièrement invoqué par les architectes comme l’une des figures de référence en la matière. [...] A l’étranger, la catégorie « mixed-use » semble encore parée de toutes les vertus, et s’accompagne généralement d’une mixité de façade : l’enjeu ne suffit pas , il faut que cette bonne volonté soit affichée. Ainsi, quand MVRDV compose, en 2002, un phalanstère des temps modernes pour la ville d’Amsterdam, le Silodam, les différents types de logements abrités dans ce monolithe sont incarnés par des variations de revêtements en façade. Un habillage qui semble obsolète à mesure que, dans les discours,

la « mixité » cède le pas à la « réversibilité », autrement appelée « mutabilité ». Et si plutôt que de mêler fonctions et catégories socioprofessionnelles, il fallait inscrire dans l’ADN même d’un bâtiment son futur changement d’affection ? Séduisante a priori, l’idée semble aussi portée par un syllogisme techniciste : la flexibilité permet l’évolution, un bâtiment flexible répond à une géométrie constructive précise, principes constructifs qui garantissent donc l’évolutivité du bâtiment.

Emmanuelle BORNE L’Architecture d’Aujourd’hui n°416


MERCREDI 18 DÉCEMBRE

2019

CHANGER DE P

À VENDRE OU À ACHETER ? Stratégie de vente HLM et positionnement vis à vis de la Vefa

CHA

ACCOMPAGNER LA TRANSITION Le développement exponentiel des coprosation et un certain cloisonnement entre les priétés impose au bailleur de prendre une différents services (copropriété, syndic, gesvéritable décision stratégique afin de profestion locative), mais aussi par une communisionnaliser et systématiser la gestion de ces cation et une transversalité croissante entre ensembles, car la gestion au cas par cas par chaque niveau qui recueille une partie des un bricolage des outils de gestion classiques informations nécessaires à la gestion cousera intenable à partir d’un certain seuil de rante des résidences. La pierre angulaire de la copropriétés. Il s’agit réussite du tournant également d’accomvers la copropriété pagner les habitants est le partage de du parc HLM dans ce l’information, à la changement, partifois entre gestionculièrement les accénaires et avec les hadants à la propriété, bitants, qui en resResponsable de copropriété qui doivent s’accultusentent parfois le rer à leur nouveau stamanque. Le bailleur tut, et les locataires vivant dans la copropriédoit investir son rôle de copropriétaire pédaté qui voient le fonctionnement de leur lieu de gogue, en faisant partie des conseils syndivie se transformer. L’organisme Hlm est aincaux, grâce à des livrets d’accueil des coprosi contraint de jouer un double, voire triple priétaires, à des temps dédiés à l’échange, ou rôle, en tant que bailleur, copropriétaire, et encore en proposant un interlocuteur unique parfois Syndic. Il doit donc s’organiser en aux copropriétaires. interne, non seulement par une hiérarchi-

Siè

Un copropriétaire à vocation sociale ences Ag

ge

chargé de secteur = bailleur copropriétaire

chargé de mission copropriété

chargé de secteur = bailleur copropriétaire

ge

chargé de chargé de mission mission syndic copropriété

ge

Siè

at ari SAC Syndic Coopairs Mésolia

ences Ag

ge

chargé de secteur = bailleur copropriétaire

Par ten

juriste spécialisé copropriété

ences Ag

Siè

at ari Syndics commerciaux

un référent copropriété par secteur

Service Syndic at ari

Service qualité copropriété Par ten

Siè

ences Ag

Par ten

« On faisait de l’artisanat, il nous faut passer à l’industriel »

Par ten

5./

Les pratiques de Vefa et Vente Hlm ne doivent pas endommager la vocation des organismes à produire du logement pour tous, partout, ni évacuer la question des usages et du vécu des habitants, premiers concernés par les formes d’habitat au statut hybride qu’elles engendrent. A cette fin, le bailleur social se doit de muscler ses capacités de négociation face aux promoteurs et se présenter comme un « facilitateur de l’opération » sur le volet financier et programmatique, et développer une logique de partenariat avec quelques uns, pour pouvoir prévoir en amont la répartition des logements sociaux dans ces opérations. Puisque la localisation du logement ne semble pas influencer ni l’éventuelle stigmatisation des locataires sociaux, ni la manière dont la mixité des statuts d’occupation est vécue, il peut être plus commode pour le bailleur d’envisager des opérations VEFA en macrolot, où ses logements auraient des parties communes dédiées. Par ailleurs, aucune recette générale ne peut s’appliquer pour la vente-Hlm. Elle doit être étudiée au cas par cas, en fonction des besoins financiers de l’organisme mais aussi des caractéristiques de chaque bien. La vente de petits collectifs semble apporter plus de fonds propres et peut permettre d’éviter une multiplication des copropriétés, mais l’organisme doit être vigilant à conserver une diversité des typologies dans son parc locatif. Enfin, le rôle de l’EPCI dans la constitution d’un fléchage des ventes par quartier est essentiel pour répondre à la fois aux objectifs SRU des communes et aux impératifs de financement des organismes.

outils techniques communs

DÉVELOPPER UN NOUVEAU MÉTIER

partage de l’information former/conseiller mandater

at ari bailleurs partenaires lors d’AG

rendre des comptes

Être syndic HLM

INTERNALISATION

MAINTIEN EN INTERNE DE LA GESTION ET COMPÉTENCES DU GROUPE

PAS DE CARTE PROFESSIONNELLE OBLIGATOIRE

MOINS COUTEUX AU DÉPART

SYNDIC DE DROIT EN VENTE HLM UNIQUEMENT

FILIALE MUTUALISATION POSSIBLE DANS UNE S.A.C

CARTE PROFESSIONNELLE OBLIGATOIRE

ORGANISME HLM PRESTATAIRE DE SERVICES

INVESTISSEMENT VIA LES CONSEILS SYNDICAUX

CLARTÉ DU STATUT POUR L’ORGANISME PROPRIÉTAIRE

PERTE DE GESTION IMMOBILIÈRE

La charte du syndic Sécurisation financière

Mensualité des charges Cagnotage État des dépenses via l’extranet

Expertise et écoute

Interlocuteur dédié Plan pluriannuel de travaux à moyen et long terme Contrat cadre pour appels d’offre travaux

Transparence avec les copropriétaires

SUIVI DES NOUVELLES COPROPRIÉTÉS

Formation aux nouveaux copropriétaires Au moins 3 réunions avec le conseil syndical par an

Communication et présence

INCOMPATIBLE AVEC PRÉSENCE AUX CONSEILS SYNDICAUX

Au moins 20 passages sur site par an Chargé de copropriété relaye l’info aux locataires Accompagner les représentants de locataires en AG

TAILLE CRITIQUE 1500 LOTS

L’activité de Syndic-Hlm peut être un moyen d’apporter une expertise au service des résidents tout en garantissant le maintien en l’état de son parc. Les représentants des bailleurs sociaux expliquent le décalage souvent constaté entre la réactivité des services des Syndics commerciaux, et celle des services internes aux bailleurs, parfois source de frustrations chez les locataires Hlm et les copropriétaires issus de l’accession sociale. Ainsi, par la création de ce nouveau métier de Syndic, les offices Hlm espèrent pouvoir main-

EXTERNALISATION

SERVICE EN RÉGIE

« En matière de copropriété, il est nécessaire qu’on coupe le cordon, qu’on dise clairement ce que sont les choses » Responsable de copropriété

tenir le service rendu aux locataires, et éviter que se développe un sentiment selon lequel il existerait des locataires à deux niveaux. Le service Syndic doit être incarné par des interlocuteurs et une comptabilité dédiées, avec une politique claire, affichée dans un document de référence tel une charte de Syndic, et séparé du service représentant le bailleur copropriétaire. Il doit également construire une relation avec les Conseils Syndicaux. Ce Syndic Social permet d’éviter le spectre d’une transition molle qui impacterait le fonction-

nement de la copropriété. De plus, les bailleurs sont en capacité de proposer un service unique car ils possèdent déjà des compétences techniques, financières, sociales pouvant être mises à profit dans le cadre de cette nouvelle activité. Le coût financier et organisationnel ne doit pas occulter toutes les externalités positives permises par cette activité : montée en compétence, sécurisation des parcours résidentiels, facilitation de la communication entre parties prenantes, maintien du service rendu …


LES 7

PRATIQUES

ANGER DE TACTIQUE UN BAILLEUR 2.0 Tirer profit des outils numériques Le numérique peut être un nouveau motif de différenciation pour un secteur connu et reconnu pour ses prises de position innovantes. S’il ouvre la voie à un service au résident, plus réactif, plus adaptatif, et fluidifiant les relations entre parties prenantes, du locataire au prestataire en passant par le bailleur et le syndic (applications), il renouvelle aussi la nature des outils de collecte, exploitation et gestion de données en interne (systèmes d’information). Ces deux axes sont repris dans le schéma ci-dessous. L’enjeu ici est bien de travailler la transversalité de l’information nécessaire à la gestion d’un parc qui ne peut plus être pensé comme une

succession d’enclaves en monogestion, ainsi que de proposer aux individus une nouvelle manière de se rendre acteurs de leur logement, de leur résidence et plus largement de leur territoire. Ceci étant dit, nous tenions à interroger l’engouement que provoque le numérique. Son application à la sphère aussi privée que celle du logement pose question à l’heure où il fait l’objet d’injonctions paradoxales: vecteur d’une nouvelle forme d’action et de réponses aux besoins, mais aussi porteur de certaines craintes quant à l’intrusivité des outils dans la sphère personnelle. Une vigilance est donc de mise afin de différencier ce qui relè-

verait d’une réelle évolution du service rendu ou de la mesure cosmétique. Les outils numériques, surtout s’agissant de leur dimension facilitatrice en termes de lien social ne garantissent pas une meilleure vie commune. D’abord car la simple mise à disposition d’une application n’induit pas une hausse mécanique de l’implication des individus pour le collectif; ensuite parce que concernant la notion de service rendu, l’outil numérique ne peut pas se substituer au travail de proximité fondamental que fournit un bailleur: il s’agit de rester un visage.

GESTION ET PILOTAGE DU BAILLEUR

SERVICES AUX RÉSIDENTS

GESTION ET SUIVI DE LA VIE DE LA RÉSIDENCE

NOUVEAUX SERVICES AUX RÉSIDENTS Un guichet unique du logement à la ville

Plateforme d’échanges transversaux entre services et personnel de terrain

Réseau social de proximité

Service à la personne Autonomie, vieillesse handicap

Centralisation de données concernant les AG cagnotage, taux de présence

NUMÉRIQUE ET LOGEMENT SOCIAL

CHANGER DE PRATIQUES CHANGER D’ALGORITHME

Facilier et fluidifier les échanges Suivi en ligne des réclamations, Réponses aux questions, newsletter de la résidence/quartier

PILOTAGE TECHNIQUE ET EXPLOITATION

Suivi en temps réel des consommations Gestion des alertes ex: fuites...

Dématérialisation:

réception et transmission de documents, paiements en ligne ...

SENSIBILISATION ET APPROPRIATION DU LIEU DE VIE Mesure et ventilation de l’énerigie produite localement

Aide à la décision et priorisation des investissements sur le parc

quartier

Suivi des actions des prestataires

résidence

Désinermédiation partage de l’information Bailleur-Prestaire

logement

Sureté & Sécurité Incendies, dégâts des eaux vol, intrusion

Ils l’ont fait ! Le bailleur syndic Le bailleur acquis au numérique Le bailleur copropriétaire

Désintermédiation: Signaler un incident, contrôler une réalisation ...

Maîtrise et répartition des charges Vigilance énergétique

POUR ALLER PLUS LOIN MULTIFA

L’ANNEXE DES 7

Nous étions désireuses de travailler à l’intégration du logement social et de sa qualité architecturale dans un contexte de centrebourg dont les caractéristiques patrimoniales, de vitalité commerciale et de densité occupent de plus en plus de place dans le débat public. Le site des Ecoles à Saint-Joachim s’est imposé comme une évidence.

Nous développons de manière plus factuelle les bonnes pratiques des bailleurs et des autorités publiques dans le nouveau cadre législatif. Nous reprenons les thématiques présentées dans le magazine “Les 7” afin de justifier les orientations et les principes proposés dans celui-ci. Vous pourrez y trouver les résultats du questionnaire habitant réalisé d’octobre à novembre 2019.

Faire [Bourg]eonner St Joachim

6./


MERCREDI 18 DÉCEMBRE

LES 7

2019

LE VOISINAGE, ÇA S’ORGANISE!

Afin d’illustrer les conclusions que nous avons tirées de notre étude d’un an nous avons réalisé un projet hypothétique sur la parcelle du Saphir appartenant au patrimoine d’Espace Domicile. Ce projet retranscrit plusieurs grands principes qui seraient pour nous des solutions à la problématique du bien vivre ensemble en copropriété.

LA «SALLE EN PLUS» LE DÉVELOPPEMENT d’un espace commun de la résidence est une réponse pragmatique et conviviale aux nouveaux besoins et désirs des habitants. Maîtrise d’ouvrage : le bailleur Propriété : le bailleur

LA HALLE NOUS AVONS souhaité inscrire notre projet dans le renouveau de la vie de quartier de la Trébale en offrant des espaces conçus pour accueillir des associations en lien avec la maison de quartier. La halle, bordant tout notre projet, change en fonction des jours et des activités de chacun.

Ils l’ont fait :

Superficie : 75m²

Maîtrise d’ouvrage : le bailleur Propriété : le bailleur

LE POTAGER L’ESPACE POTAGER fonctionne suivant un principe de coopérative. L’activité est encadrée par une association spécialisée qui encadre l’entretien, répartit la charge de travail entre les adhérents volontaires suivant les souhaits et contraintes de chacun, et organise le recours à la main d’oeuvre qualifiée nécessaire. La production est vendue pour financer les couts de fonctionnement, et l’exédent est réparti entre les travailleurs bénévoles.

Maîtrise d’ouvrage : service innovation sociale du bailleur Maîtrise d’oeuvre : Association Jardicompost Superficie : adaptable en fonction de l’engouement

Maîtrise d’usages: mise à disposition de la Ville de Saint Nazaire sous conventionnement et contre charges de fonctionnement.

Financement : bailleur, CARENE, fonds pour l’innovation sociale de la fédération des ESH.. Ils l’ont fait : JardiCompost et la CARENE sur plusieurs résidences

LE LOGEMENT EVOLUTIF AVEC DES BESOINS toujours en évolution nos logements pourraient assurer une certaine sédentarisation des habitants en offrant des logements adaptables tout au long de leur vie. Concrètement, le départ de l’étudiant qui occupe le studio en R+1 pourrait permettre à la famille qui vient de s’agrandir d’occuper l’étage.

Maîtrise d’ouvrage : Ils l’ont fait : le bailleur Propriété : le bailleur Superficie : 825m²

LE COWORKING-CAFÉ CET ESPACE permet de proposer une offre adaptée aux free-lance et aux télé-travailleurs, mais aussi aux étudiants et à tous ceux qui souhaitent s’isoler dans un lieu studieux. Ce programme permettrait de répondre aux attentes des jeunes actifs nantais et parisiens de plus en plus présents sur le territoire nazairien.

LE LOGEMENT ADAPTÉ (ACCESSION) LES TYPOLOGIES des programmes qui constituent aujourd’hui encore la majorité du parc des bailleurs sont issus d’une idée d’organisation des ménages datant des années 60, c’est à dire suivant le modèle d’une famille nucléaire composée du père, de la mère et des enfants et ne se développant pas plus que sur 2 générations. Pourtant aujourd’hui la société a vieilli et se com-

L’étudiant

Les jeunes actifs

Maîtrise d’ouvrage : le bailleur Propriété : le bailleur Superficie : 275 m² Maîtrise d’usages: AMI pour le porteur de projet Animateurs: Structure ayant remporté l’AMI Financements: bailleur, CARENE, fonds ANRU secteur QPV “Territoire entrepreneurs”, fonds pour l’innovation

sociale de la fédération des ESH, subventions Tiers-lieux, Les Cigales Loire-Atlantique, ANJE, cotisations des membres Ils l’ont fait :

pose de 4 générations. On a une atomisation des foyers qui se séparent et se reforment. On entre donc aujourd’hui dans des schémas de ménages beaucoup plus complexes à cerner et à gérer. Nous avons donc choisi de nous libérer un peu des programmes préétablies pour proposer des hypothèses de logements qui pourraient répondre à cette mixité de foyer.

Le free-lanceur

Les jeunes parents

La famille classique





l’annexe des

Anouk

Juliette

Cécile

Marion

Emma

Cécile

Candice

Ce rapport présente de

manière croisée les différents travaux de terrain et de benchmark que nous

avons menés pour ce projet, notamment le questionnaire envoyé aux locataires du parc d’Espace

Domicile et de Silène. Il vise à développer de manière plus factuelle les bonnes pratiques des bailleurs et des autorités publiques dans le nouveau cadre législatif.

Nous

© Antoine Corbineau

reprenons les thématiques présentées dans le magazine

“Les 7” afin de justifier les orientations et les principes proposés dans celui-ci.


Remerciements Anouk

Juliette

Cécile

2./

Marion

Emma

Cécile

Candice

A l’issue de cette année de travail nous tenions à remercier tout d’abord nos commanditaires, pour leur présence et leur confiance, Espace Domicile, Silène Habitat et la CARENE, qui, en plus de nous avoir fait découvrir leur territoire, nous ont permis de nous plier à un exercice très formateur. Nous voulions aussi remercier toutes les personnes, habitants et professionnels, de la région nazairienne, bordelaise ou d’ailleurs, qui ont donné de leur temps pour répondre à nos questions et alimenter notre réflexion ; Mathieu Zimmer notre tuteur pour ses conseils, Gilles Pinson, directeur du master de Sciences Po Bordeaux, Stéphane Hirschberger et Géraldine Vallois, professeurs du master de l’Ecole d’architecture de Bordeaux pour leur encadrement ; le Forum Urbain pour son accompagnement. Enfin, l’équipe ayant été largement remaniée d’un semestre à l’autre, nous voulions remercier Bianca, Nicolas et Clarisse, nos camarades ayant participé au projet durant sa première phase de diagnostic entre janvier et mai et 2019.


Sommaire 1.

« Parlez nous de chez vous » Résultats du questionnaire habitant

2.

Une commande, cinq enjeux

2.1 Pour une gouvernance intégrée au service de la qualité de l’habiter 2.1.1 Le logement, un enjeu intercommunal 2.1.2 D’une charte de la production en Vefa... 2.1.3 ... à une instance métropolitaine de régulation des prix du foncier 2.1.4 L’échelon intercommunal pertinent pour aborder la vente HLM

2.2 Vefa et Vente-Hlm : élaborer une stratégie de vente et d’achat 2.2.1 La Vefa : muscler ses capacités de négociation et de partenariats avec les promoteurs 2.2.2 La Vente Hlm : une stratégie à adopter du territoire à la résidence

p5 p15 p16

p18

3./

2.3 L’organisation interne de la gestion des copropriétés

2.3.1 Information et service rendu : appréhender chaque statut d’occupation 2.3.2 Bailleur copropriétaire : des intérêts à faire valoir 2.3.3 La montée en puissance des copropriétés : se réorganiser en interne

2.4 L’activité de Syndic-Hlm

2.4.1 Le bailleur syndic : s’engager pour les copropriétés 2.4.2 Organiser la montée en compétences 2.4.3 Une activité qui reste exigeante : des limites à l’internalisation ?

2.5 Les enjeux des outils numériques dans le logement social

2.5.1 Agilité et personnalisation des services aux résidents 2.5.2 Gestion et pilotage du parc de logements : vers une optimisation du suivi ? 2.5.3 Le numérique, un outil nécessaire mais pas suffisant

3.

p20

p22

p24

Bibliographie

p26


Ploërmel

Guérande Le Croisic

Saint Joachim

Saint Nazaire

Saint Michel Ch

Porn

La Be

Villes d’origines des réponses au questionnaire


01.

« Parlez nous de chez vous »

Résultats du questionnaire habitant

Blain

Savenay

hef Chef

nic

ernerie-en-Retz


Partis-pris et vigilances méthodologiques

6./

CE QUESTIONNAIRE a été pensé comme un outil de cadrage des orientations programmatiques retenues pour les projets architecturaux. Il nous permet aussi de rendre compte de manière statistique des ressentis et intuitions que nous avions eu lors de notre premier terrain de mars 2019 où nous avions eu une démarche qualitative ; notamment concernant les volontés d’engagement pour le collectif et

locataires du parc social – qu’au contexte (sociologie des habitants, forme architecturale, situation géographique …) particulier de chaque résidence. Par exemple, une locataire du parc social dans une résidence en copropriété à La Chapelle des Marais rencontrée en mars 2019 nous avait fait remarquer : « Ce n’est pas la Bouletterie ! Ici, je suis mieux » retournant son propre stigmate, et recherchant un voisi-

les différents leviers d’appropriation des sphères de vie, du logement au quartier. Ainsi, ouvert de début octobre à début novembre 2019, 262 réponses ont été enregistrées avec une participation variable en fonction des questions. Le questionnaire a été progressivement ouvert à l’ensemble des locataires du parc des deux bailleurs sans focus sur les seules copropriétés pour deux raisons. D’abord, concernant les finalités d’une telle entreprise, au-delà de la simple mixité de statuts – qui nous le verrons n’est pas corrélé au désir de collectif – le questionnaire devait nous permettre de sonder les conditions permettant de rendre possible le vivre-ensemble. Nous rappelons ici au lecteur les conclusions avancées lors du rendu intermédiaire de mai 2019 qui mettait en avant cette dimension de vivre-ensemble. Il semble qu’il soit bien moins lié à la mixité des statuts – idée selon laquelle la vie d’une résidence est rendue plus complexe par la mise en cohabitation de statuts d’occupation distincts alimentant la stigmatisation des

nage différent. Ensuite, selon des considérations matérielles pragmatiques, ouvrir le questionnaire à l’ensemble du parc permettait d’assurer l’enregistrement d’un nombre supérieur de réponses, permettant de lui donner une substance statistique. En ce sens, si des questions portent directement sur les copropriétés, le questionnaire doit être aussi envisagé comme à dimension plus générale portant sur les intérêts/les freins des habitants à créer du collectif, sur les aménités de leur lieu de vie, leurs idées pour l’améliorer. A chaque question posée, le renseignement d’une rubrique « autre » permet de placer les répondants en posture active quelle que soit la nature de cette question, constat ou prospective. A noter aussi que les mécontents sont bien souvent ceux qui se mobilisent le plus … Après avoir rapidement brossé le portrait des répondants (âge, sexe, taille du ménage, statut d’occupation …), nous pourrons aborder l’analyse et l’interprétation des résultats.


Caractéristiques des répondants

7./ Au fait !

97% des répondants sont des locataires


Analyse et interprétation des résultats Termes de l’engagement accepté Après avoir brossé le portrait des répondants au questionnaire, nous pouvons analyser et discuter la nature des réponses aux différentes questions portant sur la relation au bailleur, la perception du logement, de la résidence et les velléités d’investissement dans le commun.

8./

Engagement et statut du locataire Si 100% des répondants sont locataires, nous pouvons exploiter la différence entre locataire du parc social et locataire du parc privé :

En ce sens, nous pourrions conclure que les locataires sociaux sont davantage disposés que des locataires du parc privé à s’engager pour le commun. Pourtant, ici la part des répondants locataires du parc privé n’est pas représentative : trois personnes sur seulement cinq ayant répondu ne souhaitent pas s’engager.

Engagement et structure du foyer

L’enquête donne des résultats contrastés en termes d’appétence pour l’engagement. Si 100% des répondants sont locataires, 54,4% ne sont pas prêts à s’engager, contre 45,6% s’annonçant comme volontaires. La durée de l’engagement potentiel se concentre entre 1 et 2h, 43,9% des répondants s’étant annoncés volontaires acceptant un investissement d’1h et 41,2% pour 2h. Ces données viennent alimenter notre réflexion sur le lien entre statut d’occupation et appropriation du logement. Au cours de nos rencontres, nous avions déjà pu affirmer la grande place prise par la psychologie et le caractère de chacun dans la conception du commun et de la place de l’individu en son sein. Ici, nous voyons bien que la part des personnes s’annonçant comme désireuses de s’engager talonne celle de ceux qui s’y refusent. Pour aller plus loin, nous croisons les déclarations d’engagement ou non avec trois autres types de données.


Engagement et ancienneté dans le logement

Nous observons que la part des répondants ne se considérant pas disposés à s’engager pour le collectif est plus importante pour les couples avec et sans enfant(s), respectivement à 65% et 63%. L’écart se comble concernant les personnes seules sans et avec enfant(s). En effet, l’équilibre est quasiment parfait pour les personnes seules entre la part de celles prêtes à s’engager, et celles qui ne le sont pas. Pour les personnes seules avec enfant(s), la part de celles prêtes à s’engager pour le collectif atteint 45%. Les personnes seules se montrent ainsi plus aptes à donner de leur temps pour le collectif. Néanmoins, l’écart entre désir et refus d’engagement pour le collectif se creuse davantage lorsque l’on s’attarde sur les répondants en couple avec enfant(s) ou non. Par ailleurs, dans aucune des quatre configurations de foyers répertoriées le désir d’engagement ne s’impose par rapport au refus.

Engagement et âge du locataire

Encore une fois, nous voyons que les résultats ne donnent pas une orientation franche. Le non l’emporte pour la quasi-totalité des tranches d’âge mais reste sous la barre des 60%. C’est entre 41 et 60 ans que la réticence à l’engagement est la plus haute. Au contraire, pour les plus de 70 ans, l’engagement pour la vie de la résidence est envisagé à près de 63%. Ainsi, l’âge ne semble pas impacter de manière significative l’intérêt pour la vie de voisinage.

Une précaution est à prendre ici pour la lecture : jusqu’en 2005 les réponses sont de l’ordre d’un seul ou deux individus, ce qui ne peut en aucun cas être représentatif. En effet, la majorité des personnes touchées appartiennent au parc d’Espace Domicile, très récent. Les réponses ne se comptent en dizaines qu’à partir de 2012. L’ancienneté dans une résidence n’est pas corrélée à l’envie de s’engager ou non. Par ailleurs, les répondants ne désirant pas s’engager dans la vie de la résidence le justifient de manière différente. Nous avons regroupé les déclarations par occurrence de grands mots clés. Les motifs récurrents sont le manque de temps, le manque d’envie, raisons de santé, relogement et enfin questions de relations au voisinage. Certains expriment un sentiment désabusé face à un engagement personnel trop peu reconnu.

« C’est trop ingrat. Quoi que l'on fasse c'est toujours mal » « En quoi cela consisterait de plus car j'entretiens mon escalier, enlève les mauvaises herbes et fait attention à ce que mon environement soit agréable pour mes voisins ainsi qu'à moi »

9./


La relation au bailleur s’impose aussi comme un élément structurant de l’appropriation du logement. Le bailleur est celui qui attribue, gère et entretien le logement, le lieu de vie de ses locataires, conditionnant ainsi quelque part la qualité du cadre de vie. Nous avons donc voulu questionner trois aspects :

Accueil lors de l’entrée dans le logement

A noter qu’il semble y avoir une certaine corrélation entre l’absence d’envie de partager du temps avec ses voisins et la typologie du logement. En effet, les habitants rencontrés vivant dans un pavillon, ainsi que plusieurs répondants dans les espaces d’expression du questionnaire, ont indiqué qu’habitant dans une maison, ils ne voyaient pas d’utilité/n’éprouvaient pas le besoin de passer du temps dans la

10./

vie collective du quartier. L’exemple de la Villa Enerpos de Pornichet était frappant, entre forte envie de collectif chez les locataires de la résidence, et absence d’intérêt chez les deux habitants de pavillons rencontrés, faisant d’ailleurs état d’une méconnaissance envers l’ASL de quartier. Ceci rejoint une certaine idée que l’on se fait de l’impact de la forme architecturale sur la vie collective d’un ensemble d’habitation. D’après nos observations lors de nos terrains, le recoupement des discours tenus par les habitants rencontrés et les enseignements de ce questionnaire, on peut inférer que le collectif et le semi collectif constituent une forme urbaine à même de faciliter le commun. Pourtant, des contre exemples sont aussi ressortis de notre étude. Rappelons l’écart de structuration du collectif entre les Villas Marinas et Pornichet et les Kerhins à Saint André des Eaux. La première résidence est un petit collectif urbain, où la copropriété fonctionne en un sens mais avec très peu de place laissée – à la fois physiquement et sociologiquement – à la formation d’un commun. Les Kerhins, lotissement implanté sur des espaces nouvellement urbanisés de cette petite commune des marais de Brière, présente quant à lui des motifs de commun bien qu’il soit pensé en parcelles individuelles. Les échanges se structurent autour des enfants, les foyers se trouvant majoritairement à la même étape de leur cycle de vie (première propriété, jeunes enfants …) et autour de l’ASL, ce qui ne prémunie évidemment pas de certaines tensions. Ainsi, ni le statut d’occupation, ni les caractéristiques sociologiques des répondants ne semblent réellement impacter les opinions sur la vie de la résidence. Il s’agit avant tout d’envies – ou de manque d’envies – personnelles. Cette analyse impose une forme de réalisme envers l’engagement ressenti pour le collectif, mais ne peut en aucun cas dédouaner le bailleur pour développer et garder un rôle d’impulsion afin d’offrir un champ des possibles à ceux qui en ont la volonté.

Les locataires se sentent majoritairement bien accompagnés lors de leur entrée dans le logement.

Réactivité : le bailleur « responsive »

Les répondants sont mitigés, bien que relativement satisfaits, quant à la réactivité du bailleur à leurs sollicitations. Cette question renvoie à la dimension de service rendu et de contrôle du bailleur sur son parc, un aspect qui semble être à première vue mis à mal par la multiplication des copropriétés : le bailleur n’est plus le seul pilote à bord.


Relais de l’information sur la vie du quartier/de la résidence

Place donnée au syndic Le syndic s’impose comme une figure dans le paysage du logement social du fait de l’accélération des mises en copropriété. Bien que le statut du locataire ne l’invite normalement pas à interagir avec le syndic, restant l’interlocuteur des copropriétaires, il est d’après nous un nouvel acteur du service rendu dans le parc social. Aussi, il est au plus près de la vie des résidences par sa fonction très opérationnelle. En ce sens, il se pose aussi un nouvel enjeu d’appropriation du logement pour le locataire du parc social, qui en accédant à l’information cesse d’être un « habitant de second rang ».

Là encore, les répondants sont mitigés est d’ailleurs plutôt peu satisfaits. Si l’on observe des avis agrégés mitigés, les remarques individuelles témoignent d’une réalité contrastée.

« Que désirer de plus ? Appartement tout neuf ...bien isolé ....avec ascenseur, cave et place de parking ! à un prix de location défiant toute concurrence ...en plein centre de La Baule ....Merci la France de m'octroyer un tel appartement ! » « De simples circulaires ne suffisent pas pour régler les problèmes liés aux voisins les plus irrespectueux ! » Les remarques formulées sont en général négatives en ce qui concerne l'entretien des espaces collectifs, extérieurs, la qualité des prestations dans le logement. Les locataires s’affichent souvent comme déçus par le manque de réactivité du bailleur.

Une vigilance de lecture ici : il serait aisé de comprendre ce 51,50% de non-concernés comme la part des répondants ne relevant pas de la mise en copropriété de leur résidence. Or, si les locataires d’une résidence sociale ont répondu, il se peut que certains locataires sociaux au sein de résidences en copropriété l’aient fait aussi, conscients que le bailleur reste le propriétaire. Néanmoins, les locataires ont droit à l’information sur les actions les plus importantes engagées par le syndic, par voie d’affichage ou par courrier, un droit d’ailleurs renforcé par la loi ELAN. L’idée était ici de voir à quel point le syndic pouvait s’illustrer comme composante « du service logement social » pour les locataires.

Les répondants sont peu satisfaits de l’action du syndic. Notons ici que l’avis est indépendant du droit ou non d’accès à l’information concernant cette action. La réponse peut être motivée par une simple observation. Nous avons encore une fois étudié les occurrences de mots clés dans les encarts d’expression libre concernant le sujet. Trois groupes de remarques se sont nettement détachés bien que les motifs de remarques soient très variés (nuage de mots).

11./


A noter que le traitement des contributions libres par la méthode des nuages de mots ne permet pas de rendre compte de l’argumentaire de chaque réponse dans son ensemble. Un attrait certain pour les attributs de la maison individuelle, vecteur de l’appropriation du logement est notamment formulé: « un bout de jardin ce serait top ! »

Résidence et cadre de vie : une autre sphère d’appropriation Dans un premier temps, poser les questions des avantages et des inconvénients de son lieu de vie permet de placer le répondant dans une posture d’état des lieux, tout en faisant émerger des éléments importants de la conception de son espace de vie « hors logement ».

Le logement : première sphère de l’appropriation de l’habitat

12./

Lieu de vie au premier titre, le logement est plus ou moins bien approprié. Certaines nuisances du cadre bâti peuvent interférer dans le processus d’appropriation. La notion de réactivité du bailleur en ce sens est fondamentale. En plus des réponses proposées, l’intérêt était de pouvoir décortiquer la catégorie « autre ». Ici encore, un nuage de mot permet de figurer par la taille de celui-ci son occurrence dans les discours des répondants.

Remarquons que la question des parkings est la plus clivante et que la qualité des espaces verts s’impose d’avantage que la question des espaces collectifs pour les répondants. Mais l’intérêt est aussi de sonder les rubriques « autre ». Pour ce qui est des avantages, cette section laissée libre à l’expression des répondants permet de mettre en avant l’importance des aménités paysagères du cadre de vie. Il en va à la fois des qualités du territoire en question comme on peut le voir avec l’allusion au littoral, mais aussi à la place donnée à la qualité architecturale.

Concernant les points faibles, l’accent est mis sur des éléments connus, l’entretien, les conditions de sécurité, la qualité des parkings …


Dans un second temps, tout en restant dans une démarche d’état des lieux, poser la question des manques sur la résidence permet de placer le répondant dans une démarche prospective. Ces propositions sont de nature matérielle, et peuvent relever d’une mise en œuvre de court-terme.

37% des répondants estiment qu’il manque des espaces de jeux, 21% des jardins partagés et 16% des espaces verts, ce qui, additionné, représente 74% des répondants qui aimeraient des espaces extérieurs mieux pensés. On voit là toute l’importance de penser les espaces tampons entre le logement et la ville. Remarquons la relativement faible place donnée au numérique dans les réponses. Ceci nous amènera à prendre une position de vigilance face à ces outils, la présence du bailleur restant fondamentale dans perception du service rendu. Dans un troisième temps, nous avons plutôt posé la question du relationnel et des dispositifs de structuration du collectif.

Manifestation d'intérêt des répondant.e.s en % 120

45,40%

100 80 60 40 20

25,60% 15,90%

19,80%

19,40%

25,60%

3,20%

0

Comme pour la question concernant l’engagement pour le collectif, une grande part de répondants restent en retrait. Pourtant, le commun ne pâtie pas d’un désintérêt total. Ce sont les mécanismes de facilitation des rencontres avec le voisinage qui sont en tête : information des départs et arrivées, événements … L’analyse des contributions libres permet de relever l’occurrence de mots clés allant en ce sens. Les répondants parlent de communication, information, d’échange, d’écoute. Certaines remarques, bien qu’émanant d’un seul individu peuvent retenir l’attention. Un répondant fait allusion à l’importance du parcours résidentiel et à la possibilité de pouvoir changer d’appartement plus facilement lorsqu’il s’agit de rester dans la même résidence afin de ne pas déstabiliser les liens de voisinage : « droit des locataires en matière de mutation au sein de la résidence afin d'éviter le turn-over »

13./


Š Les sÊcheries


02.

Une commande, cinq enjeux


2.1 Pour une gouvernance intégrée au service de la qualité de l’habiter Le logement, un enjeu intercommunal La tension sur les marchés immobilier et du logement dans les métropoles n’est pas nouvelle et a généré ces dernières années une prise en compte accrue de ces sujets et le développement de stratégies d’encadrement, plus ou moins globales, par l’échelon intercommunal. De manière variable selon les enjeux spécifiques et les caractéristiques propres des territoires, nous avons noté que l’intercommunalité s’est saisie du sujet et semble être considérée par les acteurs comme une échelle pertinente pour tenter de réguler, encadrer et propager une vision commune du territoire et des modalités de logement sur celui-ci. Nous avons retenu à l’issue de nos entretiens et recherches quelques exemples d’instance et documents-cadres qui nous semblent particulièrement parlants au regard des stratégies développées dans le cadre d’une gouvernance intercommunale.

D’une charte de la production en Vefa…

16./

Sur le volet de la Vefa la profondeur d’intervention diffère entre la métropole strasbourgeoise et la métropole bordelaise, du fait des logiques d’action différenciées des opérateurs et des niveaux atteints par ce type de production sur le territoire. Si à Bordeaux la Vefa sociale n’a pas été identifiée comme un enjeu spécifique nécessitant une intervention de l’agglomération, les taux de Vefa dans la production neuve atteints à Strasbourg ont eu pour effet de déclencher une action régulatrice de la part de la métropole. Cette part est passée, en effet, pour l’OPH strasbourgeois, de 5% environ il y a une décennie à 50 voire 60% de la production neuve, contre 40% à Bordeaux. Ces chiffres résultent notamment d’une stratégie du bailleur de privilégier la rénovation de son parc ancien plutôt que de s’engager dans de la construction en propre. Une « charte Vefa » a ainsi été rédigée par l’Eurométropole et imposée aux acteurs de la promotion. Elle fixe un prix de vente plafond du m2 hors taxes avec une marge de +/- 5%. Parallèlement la logique partenariale entre le bailleur et le promoteur est encouragée.

…A une instance métropolitaine de régulation des prix du foncier A Bordeaux, si la question de la Vefa est abordée par la métropole, c’est par l’entrée du foncier dont l’envolée des prix constitue un enjeu de taille. Le constat que les opérateurs font face à une difficulté d’accès au foncier, non du fait d’une pénurie mais à cause de la pression opérée par les opérateurs, est fait depuis plusieurs années. Les programmes mixtes, ces “mariages forcés dont naît la Vefa” (chargée de mission PLH de la métropole) ont été systéma-

« Les programmes mixtes, ces mariages forcés dont naît la Vefa ont été systématisés » Chargée de mission PLH de la métropole tisés avec un taux de 35% de logement locatif social imposé sur la quasi-totalité des opérations et même de 50% de logements aidés sur les opérations de plus de 2000m². La Vefa n’est pas abordée en tant que telle, mais surtout par la promotion par la métropole d’une maîtrise des prix du foncier en amont pour éviter le versement de subventions ayant vocation à compenser l’escalade des prix. Après quelques tentatives moins directes de régulation de la hausse des prix, la métropole a donc été à l’initiative de la création en 2017 de la « conférence permanente des opérateurs du foncier ». Cette instance invite sans distinction tous les opérateurs, soit une centaine de promoteurs. En amont de la première réunion, les services de la métropole ont cartographié tous les fonciers disponibles et mobilisables pour de l’habitat, de manière à pouvoir travailler à l’élaboration d’un diagnostic partagé. L’instance se réunit trois à quatre fois par an depuis 2017 en plénière et des réunions de régulation sont fréquemment organisées avec les représentants des acteurs de la promotion et des bailleurs sociaux. Au-delà de la régulation des prix du foncier, l’intercommunalité a pour projet de tirer parti de cette instance pour générer des pratiques collaboratives entre bailleurs et promoteurs, avec un cahier des charges qui reste à définir.

L’échelon intercommunal pour aborder la vente HLM

pertinent

L’expérience bordelaise montre aussi les gains qui ressortent du positionnement de l’intercommunalité comme pivot entre les bailleurs et les maires sur la question de la vente HLM, en binôme avec les représentants de l’AROSHA, association des bailleurs aquitains. L’échelon intercommunal a œuvré là encore à la définition d’un diagnostic partagé

« Ce dévoilement de chaque bailleur par rapport aux autres n’était pas évident et pas gagné d’avance. » Chargée de mission PLH de la métropole


et d’une vision commune du territoire en cartographiant précisément les enjeux. La métropole comme l’AROSHA se font les relais de la parole de chacun, auprès des communes et des bailleurs sociaux, pour évaluer les points blocages et les marges de manœuvres à exploiter. Ces deux interlocuteurs centralisateurs sont fondamentaux dans le processus de construction d’une vision à l’échelle du territoire. Concrètement, un travail en « interbailleur » est organisé à l’initiative de la métropole et de l’AROSHA depuis l’été 2018. Des critères communs de sélection des opérations à céder ont été définis et des ateliers organisés pour travailler sur les stratégies patrimoniales. Ce dévoilement de chaque bailleur par rapport aux autres n’était pas évident et pas gagné d’avance. Il n’est possible que si l’agglomération s’engage à représenter les fruits de ce travail auprès des élus. (chargée de mission PLH). Les communes sont invitées par la métropole à exprimer également les points sur lesquels elles n’entendent pas transiger. La métropole cartographie les plans de vente pour vérifier la bonne concordance des chiffres avec les objectifs PLH, la loi ELAN n’obligeant pas les bailleurs à produire du neuf dans la commune où ils ont cédé une part de leur parc. L’agglomération est réellement l’élément central du partage de vues, garantissant relais et transparence, au service de la qualité et de la quantité de l’offre locative sur le territoire. Ces expériences ainsi que les résultats et enseignements qui en sont déjà tirés par les acteurs eux-mêmes nous amènent à penser que l’instauration de telles instances de discussion et de tels documents-cadres pourraient être bénéfiques à l’échelle de la CARENE, que ce soit pour définir une stratégie de vente HLM, un modèle de collaboration dans le cadre de la production neuve en Vefa et aborder les questions foncières. L’impulsion actuelle de la CARENE en faveur d’une réflexion commune et de la constitution d’un diagnostic partagé avec les acteurs de la promotion ne peut à ce titre qu’être saluée et approfondie.

17./


2.2 Vefa et Vente-Hlm : élaborer une stratégie de vente et d’achat

18./

La mise en copropriété du parc social de Silène et Espace Domicile vient principalement de deux processus: la production en Vefa et la vente HLM. Du côté de la VEFA, il convient de bien réfléchir à la localisation des logements locatifs sociaux, mais aussi être vigilant quant à la qualité globale de l’opération afin d’éviter le développement d’un parc à deux niveaux. Du côté de la vente, il s’agit d’effectuer un repérage très fin des logements potentiellement cessibles, pour permettre à la fois d’éviter que la vente ne soit qu’un apport de liquidités à court terme et de bien penser la propriété des différents espaces dans la résidence, qui impactera sa future gestion : quels espaces sont communs, lesquels restent à la charge du seul bailleur social, etc.

La Vefa : muscler les capacités de négociation et de partenariat avec les promoteurs Premièrement, l’augmentation de la production de logements neufs en VEFA peut faire craindre chez les bailleurs la perte de capacité de maîtrise d’ouvrage. Les organismes rencontrés pendant l’enquête ont à ce titre insisté sur la nécessité de muscler les capacités de négociation face aux promoteurs, en se faisant connaître d’eux, en apportant une véritable expertise en tant qu’opérateur travaillant sur toute la chaîne de valeur du logement.

« Je n’achète que s’ils s’adaptent à ce que j’ai décidé d’avoir comme qualité d’usage » Directrice générale Un argument clé joue en la faveur des bailleurs : la sécurisation financière des opérations. L’opération ne sort parfois pas de terre sans l’apport de fonds des bailleurs, ce qui justifie que leurs exigences soient prises en compte. Il s’agit de nouer des relations avec quelques promoteurs sur le long terme en se présentant comme un atout à l’opération, bien

que cette alliance en amont doive rester informelle puisque le bailleur ne peut légalement pas s’impliquer avant le dépôt du permis de construire. Contrairement à une idée reçue, le promoteur peut apprécier l’implication du bailleur social. En effet, lors d’un entretien avec un responsable de promotion bordelais, celui-ci nous expliquait que la collaboration avec un “interlocuteur expert, bien implanté sur le territoire en question”, réactif, clair et précis (disposant donc d’un cahier des charges), était essentiel pour produire des VEFA sociales correspondant aux critères de l’organisme Hlm et au modèle économique du promoteur. Le directeur général Ophéa, OPH de l’Eurométropole, insis-

« Il faut être un facilitateur de l’opération ; le bailleur propose au promoteur » Directeur général

tait sur la logique de “partenariat” avec un petit nombre de promoteurs sur l’Eurométropole, d’autant plus crucial que cet office produit plus de la moitié de ses opérations neuves en VEFA. Enfin, l’exemple donné par une architecte ayant travaillé sur une opération en co-maîtrise d’ouvrage avec un bailleur social et un promoteur, a montré que la coopération permet des échanges informels de services (vente de parkings du bailleur au promoteur, et achat de logements sociaux supplémentaires dans l’immeuble réservé au promoteur), il s’agit de créer des “vases communicants en bonne intelligence”, selon l’expression de l’architecte. Ceci est facilité lorsqu’une autorité supérieure définit les règles du jeu. L’opération en question faisait partie du projet “50 000 logements” lancé par l’aménageur de Bordeaux Métropole, la Fab. On retrouve là l’importance de l’échelle du territoire comme garant d’une stratégie d’habitat globale. Sans cela, la co-maîtrise d’ouvrage est complexe selon le promoteur, car les temporalités du bailleur, qui doit passer par un marché public, et du promoteur, qui doit construire au plus vite pour revendre, ne sont pas toujours compatibles. Deuxièmement, la VEFA sociale amène à réfléchir à l’implantation des logements sociaux dans l’ensemble : vautil mieux concentrer les logements dans une cage d’escalier dédiée, voire, sur des opérations d’ampleur sur un bâtiment, ou les répartir de manière diffuse sur tout l’ensemble? Le premier enjeu derrière cette question est en fait de savoir si les locataires sociaux risquent de faire face à une


plus grande stigmatisation dans l’une ou l’autre forme de répartition. Or, nos recherches depuis janvier 2019 sur ce point n’ont pas conduit à une réponse véritablement satisfaisante. En fonction des ensembles visités ou des métiers interrogés, les réponses varient. Il semble que le processus de stigmatisation des logements sociaux soit lié à l’existence de lourds préjugés au niveau de la société plus qu’à la manière dont sont répartis les logements en question. Que les logements soient concentrés ou diffus, le voisinage réticent opérera des stratégies d’évitement voire des critiques ouvertes. A noter également que les locataires sociaux rencontrés lors des différents terrains ne font pas du placement de leur logement dans l’ensemble une question primordiale. On remarquait à la Chapelle des Marais une très faible communication entre les logements collectifs de Silène et les pavillons qui leur font face, de même aux Kerhins avec le petit collectif d’Espace Domicile. En octobre à Botanica, même avec une répartition plus diffuse, les voisins ayant noué une relation étaient plutôt des locataires sociaux, sans que cela ne soit perçu comme un problème. Le vécu de la mixité des statuts à l’échelle de la résidence n’est pas plus problématique que la mixité sociale à une échelle plus globale. Le deuxième enjeu derrière la répartition des logements concerne la gestion locative. Ici, il semble très clair que l’achat en macrolot facilite le travail de gestion, comme cela a été confirmé par la plupart des gérants de copropriétés, notamment parce que cela rend possible l’individualisation des parties communes du lot réservé aux logements sociaux. Ainsi il est possible de faire intervenir en régie les services du bailleur sur ces parties, et de réaliser des économies de charges non négligeables. D’où la nécessité lors des négociations avec le promoteur de bien clarifier la question de la propriété de chaque espace, et de s’accorder sur un mode de gestion au préalable. Notons que le responsable copropriétés Aquitanis réfléchissait à acheter des logements en diffus en VEFA, pour faciliter la revente après les 10 années réglementaires - l’état de division des lots étant déjà réalisé. On peut se demander si cette stratégie de vente-Hlm des logements les plus récents est réellement plausible ; cela peut être une stratégie sur Bordeaux où le marché est cher et haussier, mais moins réaliste sur la CARENE. D’où la nécessité d’envisager la VEFA à une échelle politique plus large, comme nous l’avons décrit par ailleurs.

La vente-Hlm : une stratégie à adopter du territoire à la résidence Il est essentiel de repérer les résidences ayant un potentiel de vente bénéfique à l’organisme, tout en ne déstabilisant pas le quartier voire la commune. Lors de notre entretien avec le responsable des ventes de Domofrance, nous avons pu voir que la logique financière primait sur les autres critères de vente. En effet, l’autofinancement de l’organisme reposant à 90% sur la vente, l’objectif est de pouvoir obtenir 3 logements neufs avec la vente d’1 logement, en sachant que le coût induit de la vente est de ne plus percevoir de loyers, ce qui peut se révéler une véritable perte sur des biens quasiment amortis.

« Il faut que ça dégage le plus de cash pour pouvoir en réinjecter » Responsable des ventes Le deuxième critère porte plutôt sur les caractéristiques techniques du bâti et le cycle des travaux : les immeubles avec d’importants travaux à effectuer dans les premières années de la mise en copropriété sont évacués, pour éviter tout risque de copropriété dégradée. Ensuite, le peuplement et particulièrement les ressources financières et l’âge des habitants de la résidence en question conditionnent la possibilité des ventes, ainsi que le taux de rotation. Enfin, les questions d’organisation de la propriété permettent de faire la différence entre deux ensembles à potentiel de vente : c’est celui dont le modèle de gestion a posteriori paraît le plus simple (création d’une ASL par exemple) qui sera retenu. Le profil idéal est souvent une opération entre 20 et 50 logements, qui évite un montage de copropriété complexe. Du côté des formes architecturales, les pavillons individuels ont tendance à se vendre plus facilement, mais peuvent également être moins rapporteurs de fonds propres. La mise en vente d’un petit collectif est généralement plus profitable, car les taux de rotation sont plus élevés et ouvrent la possibilité de vendre des logements au fil de l’eau. Domofrance privilégie la vente de collectifs pour cette raison, ce qui n’est pas sans appeler à un paradoxe : le discours de la vente-Hlm est basé sur le parcours résidentiel du locataire et l’appropriation du logement, et pourtant, un taux de rotation faible limite les possibilités de vente puisque que les locataires ont le droit au maintien et ne peuvent être délogés si le bailleur souhaite vendre, contrairement au secteur privé. Enfin, notons qu’en matière de vente-Hlm, encore une fois l’enjeu politique est très présent. Encore beaucoup de communes restent réticentes à la vente notamment celles qui n’ont pas atteint leur taux SRU. L’engagement de l’EPCI sur un territoire donné est donc extrêmement important pour garantir que la vente-Hlm serve les objectifs de financement de l’organisme tout en préservant le grain de mixité des logements à l’échelle du quartier, de la commune, et de l’agglomération. Finalement, la vente Hlm opérant déjà dans un contexte très contraint, on ne peut pas véritablement présenter un modèle idéal de vente. Il s’agit plutôt de développer un modèle très précis de connaissance du parc mais aussi du marché immobilier pour pouvoir calculer l’opportunité de la vente au cas par cas en fonction de chaque résidence, avec l’EPCI coordonnant le phénomène.

19./


2.3 L’organisation interne de la gestion des copropriétés Les organismes Hlm, lorsqu’ils possèdent des logements locatifs dans un immeuble en copropriété, se trouvent au croisement de plusieurs rôles, en tant que copropriétaire, bailleur, et parfois syndic. Il s’agit donc de repenser le mode de gestion du parc locatif social à l’aune de cette complexité, en étant attentif au respect des droits de chacun.

« On n’est pas là pour écraser les autres. le but, c’est que la copro vive bien » Chargée de mission copropriété

20./

Information et qualité du service rendu : appréhender chaque statut d’occupation La question de l’écoute du vécu quotidien et du principe de qualité de service rendu doit être au coeur de l’action des organismes Hlm. Le questionnaire et les rencontres sur le terrain ont permis de relever l’importance de la transmission d’informations autour de la vie de la résidence. Sur les 262 personnes interrogées par le questionnaire, 30% déclaraient ne pas recevoir d’informations suffisantes sur les interventions du Syndic, et 36% estimaient que le bailleur social relayait moyennement les informations. Pourtant, savoir ce qui se passe dans l’immeuble, connaître la date des travaux, des passages du bailleur, voire des AG afin qu’une association de locataires puisse y être représentée, bref, être informé sur ce qui se passe dans son lieu de vie, constitue le ciment qui doit permettre un dialogue et éviter d’éventuels conflits de voisinage, ou du moins, de trouver des moyens de les régler par la discussion. Ainsi, dans les améliorations proposées dans le questionnaire, 25% des répondants cochaient la proposition “être informé des départs et arrivées”, 16% celle “être informé sur ce qui se dit lors de l’AG des copropriétaires”, et 20% étaient intéressés par la création d’une association de locataires. Si le partage d’information relève généralement du Syndic, l’organisme Hlm doit aussi prendre ses responsabilités, qui sont de trois ordres : D’une part, bailleur, vis à vis de ses locataires, il doit informer du fonctionnement de la copropriété, des décisions prises en AG, et de l’intervention du Syndic. Il s’agit d’une

obligation légale puisque dans le bail un extrait du règlement du copropriété doit être signé par le locataire. Ce droit d’apparence anodin se révèle particulièrement important dans des résidences où existent des espaces partagés que les locataires peuvent également utiliser. Cela constitue un tremplin pour renforcer l’adhésion des locataires à la logique de la copropriété. D’autre part, vis à vis des accédants à la propriété, le bailleur-vendeur se doit de contrôler la solvabilité des ménages concernant les charges, mais surtout, sensibiliser autour de l’importance que chaque copropriétaire s’investisse dans les différents temps forts. Pour cela, plusieurs bailleurs sociaux ont développé un livret de la copropriété : s’il ne constitue pas un document suffisant pour s’assurer de l’investissement des acquéreurs dans leur résidence, il n’en reste pas moins nécessaire pour débuter le processus d’acculturation aux droits et devoirs du copropriétaire. Ce livret est un élément symbolique qui témoigne de la volonté d’accompagnement de celui-ci. De plus, il constitue une bonne référence sur laquelle s’appuyer pour les référents copropriétés lors des Assemblées générales constitutives, dans lesquelles, comme le précisait la chargée de mission Domofrance, les copropriétaires découvrent les règles et ont tendance à poser de nombreuses questions.

« Il ne faut pas oublier que le bailleur est un copropriétaire comme les autres, à la différence qu’[on] maîtrise. Ca leur donne un regard professionnel autre que le Syndic» Chargée de mission copropriété

Enfin, en tant que copropriétaire à vocation sociale, l’organisme Hlm peut également encourager la tenue d’événements divers qui permettent un dialogue avec les habitants et ce, quel que soit le statut d’occupation, ce qui permet à chacune des parties (syndicat de copropriété, association de locataires, etc) de s’identifier, se connaître au delà des discussions autour des charges, qui accaparent une grande partie des assemblées générales. Aquitanis a par exemple expérimenté l’animation de “Conseils de résidence” où sont invités les habitants pour échanger sur les améliorations, voire éventuels projets que la résidence souhaiterait mettre en place, et qui sont ensuite rapportés au Conseil Syndical. Le bénévole de l’ARCNA, en tant que président du Conseil Syndical, organise plusieurs événements convi-


viaux (galette des rois/fête des voisins) que la copropriété finance. Gironde Habitat affirme également l’importance de continuer à animer ces résidences avec des outils “non spécifiques à la copropriété” dans l’optique de favoriser un lien social. Sous l’impulsion de quelques habitants encouragés par les chargés de secteur, des ateliers thématiques (bricolage, cuisine, jardinage) entretiennent un certain niveau de convivialité, qui n’est pas inatteignable, même en copropriété!

Le Bailleur copropriétaire : des intérêts à faire valoir La viabilité de l’organisme Hlm repose sur un parc qui reste entretenu à très long terme; il doit donc être vigilant aux dépenses encourues dans les copropriétés, puisque cela affecte la valeur de ses biens. Pour cela, il doit être visible et connu des autres propriétaires, en étant présent à chaque AG, et exprimer son opinion, en prenant la parole lorsque sont évoqués des problèmes liés à ses locataires ou aux espaces communs qu’il partage. Deux éléments nous ont frappé lors des divers entretiens menés. Premièrement, l’implication forte des bailleurs dans les Conseils Syndicaux est perçue comme un élément permettant de se faire connaître et d’orienter les décisions du syndicat de copropriété lorsqu’il s’agit de décisions techniques parfois difficiles à prendre. Pour défendre ses intérêts, la seule présence en AG est parfois insuffisante: le syndic est en relation avec le Conseil Syndical, et les deux instances ont tendance à co-décider, puis à demander une simple validation en AG, ce qui peut se révéler dangereux pour le bailleur si certains postes de dépenses ne sont pas votés. Sa présence en Conseil

« On sait qu’ils ne rechigneront pas pour les appels de fond pour de gros travaux, à condition qu’on ne fasse pas n’importe quoi bien sûr» Copropriétaire

assure un certain degré de légitimité aux décisions. Dans le cas d’achats en VEFA où le bailleur n’a pas pu se proposer comme Syndic, la présence au Conseil n’en est que plus essentielle pour communiquer. Deuxièmement, de la part des autres copropriétaires, la présence des bailleurs dans l’immeuble est plutôt plébiscitée (une fois passée l’appréhension liée aux locataires sociaux, encore très prégnante), car, comme le décrit le bénévole de l’ARCNA, leur préoccupation autour du maintien en l’état du patrimoine apporte une sécurité financière non négligeable à l’ensemble. De plus, l’organisme Hlm représente souvent une expertise professionnelle très appréciée chez les copropriétaires qui ne peuvent pas être spécialistes de toutes les questions liées à l’entretien du bâtiment. En se positionnant au sein des Conseils Syndicaux comme expert au service de l’intérêt général de la copropriété, le bailleur peut à sa manière contribuer à développer des relations pacifiées entre les résidents.

La montée en puissance des copropriétés : se réorganiser en interne Etre visible à la fois en tant que propriétaire défendant ses intérêts, Syndic, bailleur social, suppose une organisation interne claire. Ophéa ne dispose au niveau central que d’un juriste référent copropriété. En effet, la part des copropriétés est faible, car même avec une forte production en VEFA, Ophéa individualise la plupart de ses espaces en achetant en macrolot. Le juriste conseille les chargés de secteur concernés par les copropriétés qui se rendent aux AG. Aquitanis a scindé sa gestion des copropriétés en 3 : un syndic mutualisé dans une SAC, des responsables d’agence représentant Aquitanis-propriétaire, un responsable de copropriété-syndic qui développe la stratégie globale au siège, issu non du monde de la gestion locative sociale, qui s’est formé au fur et à mesure des premières ventes HLM. Cette organisation est actuellement remise en question, car le nombre de copropriétés augmentant très vite, les responsables de secteur se trouvent en difficulté pour représenter Aquitanis, particulièrement sur deux agences qui sont concernées par un important mouvement de vente sur leur secteur. Domofrance possède un nombre de copropriétés bien plus élevé (300 environ) et à ce titre a développé une organisation plus hiérarchisée et cloisonnée : un service qualité-copropriété de 3 personnes (1 responsable et 2 chargées de mission issues de la gestion immobilière) qui représentent les intérêts de “Domo propriétaire”, un service Syndic, et un service dédié à la vente Hlm. Les services sont épaulés par des référents copropriété, c’est à dire des chargés de secteur responsables des lots en copropriété. Ainsi, chaque rôle est clairement identifié par un service avec un représentant différent, tout en ayant une communication facilitée par des outils informatiques tels que des groupes de discussion par secteur géographique : cela permet à chaque service de transmettre des informations reçues lors des visites sur le terrain par exemple. Gironde Habitat, présent sur environ 140 copropriétés assure les missions de Syndic via un service interne. L’office a récemment recruté une chargée de mission pour représenter ses intérêts en tant que propriétaire, issue du monde de la relation client. Présent sur toute la Gironde, le partage d’informations par les chargés de secteur est essentiel, mais il n’y a pas de “référent copropriété” au niveau des agences de proximité : la personne référente sera la nouvelle chargée de mission. Chaque organisme Hlm se réorganise au fur et à mesure de l’agrandissement du parc en copropriété, avec quelques différences, mais globalement une même idée de fond : séparer au niveau interne chaque rôle que le bailleur social peut jouer au sein de ces nouveaux ensembles.

21./


2.4 L’activité de Syndic-Hlm Il s’agit ici de mettre en valeur les arguments en faveur de cette organisation, mais également les points de vigilance sur lesquels garder un oeil attentif lors du lancement de cette activité.

Le bailleur syndic : s’engager pour les copropriétés

22./

Dans ce nouveau contexte où le nombre de copropriétés mixtes semble amené à se multiplier, l’activité de Syndic permet au bailleur de garder la main sur son patrimoine. S’il n’est pas à l’origine des décisions, il joue néanmoins un rôle très important pour accompagner les copropriétaires dans cette prise de décisions, notamment en ce qui concerne les travaux. Ce rôle d’accompagnement se révèle essentiel dans les débuts de la copropriété, afin de garantir que chaque copropriétaire soit conscient de ses responsabilités, comprenne la répartition des charges, mais aussi pour le locataire, qui doit comprendre qu’un intermédiaire existe désormais entre le donneur d’ordre et l’exécutant. A titre d’exemple, le tableau ci-contre permet de comparer les engagements pris par différents bailleurs sur cette activité. Ces engagements visent d’une part à assurer la sécurité financière et du bâti, mais aussi à aider les copropriétaires à s’approprier leur statut. Ils constituent aussi le cadre d’éventuels partenariats avec un syndic commercial, notamment dans le cas de la VEFA.

De plus, ce service de “syndic social” est très apprécié des collectivités, souvent effrayées par le spectre des copropriétés dégradées. En effet, les collectivités voient également la composition urbaine de leur territoire changer, puisque le parc précédemment social devient progressivement privé. Elles peuvent donc craindre une déstabilisation du quartier et l’apparition de copropriétés en difficulté. La présence du bailleur sécurise donc les ensembles, d’une part parce qu’en tant qu’acteur local de l’habitat, il peut apporter sa connaissance du lieu et son expertise technique aux copropriétaires, d’autre part parce que sa présence sur le terrain et son expérience d’animation avec les habitants est très utile pour le recouvrement des charges.

Organiser la montée en compétences S’il ne s’agit pas d’une activité extrêmement rentable, car fonctionnant sur de très petites marges, c’est une manière de développer une nouvelle branche d’activité et de monter en compétence dans la gestion des copropriétés mixtes. Le syndic peut faire le lien entre copropriété et services en régie en faisant intervenir ces derniers comme prestataires sur les copropriétés. Par exemple, le Syndic 1001 Vies Habitat et le copropriétaire-bailleur 1001 Vies Habitat ont signé une convention de transfert volontaire du personnel sur une très grande résidence à Aubergenville. Le personnel de proximité est employé par le bailleur pour des missions fixées en assemblée générale par le syndicat. Plusieurs organisations et stratégies sont possibles pour créer son activité de Syndic : Aujourd’hui, le service AquitaniSyndic gère seulement 13 copropriétés et 16 ASL. Aquitanis a fait le choix de mutualiser ce service avec un autre bailleur local, Mésolia, dans le cadre d’une société de coordination nommée Coopairs, afin d’agrandir la taille du parc géré par ce futur service, et réaliser des économies d’échelle. Il s’agira donc d’une structure autonome, sous contrôle des deux bailleurs, qui devra développer son activité au delà des copropriétés issues de la vente Hlm. Aquitanis compte ainsi sur sa filiale d’accession sociale, Axanis, pour étoffer le nombre de lots gérés par le Syndic mutualisé. Ceci n’est pas sans poser de contraintes : il faudra créer un outil de co-gestion du parc entre le Syndic et les chargés de proximité pour partager au mieux l’information récoltée par l’un ou l’autre et éviter le double emploi. Gironde Habitat et Domofrance ont leur propre service en interne, leur parc étant plus grand : Gironde Habitat est présente dans 140 copropriétés (sur 18 000 logements), et Domofrance sur plus de 300 copropriétés, soit près de 7000 logements. Les mutualisations envisagées par ces deux derniers se concentrent sur la comptabilité, les services informatiques et autres outils techniques, mais les 2 bailleurs tiennent à conserver en interne leur outil de Syndic. En revanche, la stratégie de développement du service est diffé-


rente : Gironde Habitat propose son service lors des achats en VEFA et n’hésite pas à se présenter aux différentes AG constitutives pour être élu Syndic, tandis que le Syndic Domofrance ne travaille que sur les ensembles issus de la vente Hlm.

Une activité qui reste exigeante : des limites à l’internalisation ? D’abord, ce choix de proposer un service de Syndic Social ne fait pas nécessairement consensus pour toutes les parties prenantes dans une copropriété mixte. Il faut garder à l’esprit que les copropriétaires peuvent se sentir doublement biaisés si le bailleur social majoritaire en tantièmes propose également son propre Syndic : ils peuvent redouter que la structure Hlm privilégie ses propres intérêts au détriment des contraintes (notamment financières) des autres. L’Association des Responsables de Copropriété indique ainsi “[qu’un] bailleur HLM majoritaire ou proche de l’être peut facilement imposer aux autres copropriétaires surtout minoritaires l’ensemble des décisions relatives à la gestion et à l’entretien de la copropriété. Cela entraîne un sentiment de dépossession et donc de démobilisation des copropriétaires «individuels»”. L’expérimentation que cette association a mené avec le bailleur Coopération et Familles entre 2014 et 2016 a donné lieu à l’élection d’un Syndic externe pour pacifier les relations entre le bailleur Hlm et les copropriétaires individuels.

« Il faut une séparation entre Syndic et copropriétaires. On refuse systématiquement que le promoteur ou bailleur propose son service, pour moi il y a conflit d’intérêts» Copropriétaire

L’échange avec un bénévole de la branche régionale de cette association a confirmé la défiance face à un bailleur social simultanément copropriétaire et Syndic: l’association encourage les Conseils Syndicaux à élire un autre Syndic dès que possible, pour éviter tout “conflit d’intérêt”. Pour pallier à cette éventuelle défiance, les organismes Hlm doivent structurer clairement leur organisation en distinguant le service Syndic du service le représentant comme copropriétaire. Domofrance a particulièrement bien cloisonné ces deux services, qui, bien que leurs relations soient facilitées par l’appartenance au groupe et le partage de mêmes locaux, s’attachent à ne pas dépasser le cadre de leurs compétences. Le service Syndic envoie par exemple des courriers en cas de manquement de Domo copropriétaire comme il le ferait à chaque membre du Syndicat. Les habitants ont donc face à eux deux interlocuteurs correspondant à ces deux fonctions qui permettent d’identifier les rôles respectifs de toutes les parties prenantes.

Ensuite, le volet financier ne peut être ignoré dans la mise en place d’une structure spécifique. Selon l’USH, une activité ne peut être équilibrée qu’à partir de 1500 à 1700 lots. A titre d’exemple, la filiale de Syndic FDI ICI, du groupe immobilier FDI à Montpellier, gère plus de 13 000 lots. Il existe bel et bien un effet de seuil en dessous duquel la création d’une filiale ne semble pas envisageable. Dans le cas de la CARENE et plus particulièrement des bailleurs Silène et Espace Domicile, la création d’un service interne aux organismes qui géreraient au moins les lots issus de la vente Hlm, tel que la loi le permet, paraît donc plus appropriée. Cela permet à la fois d’assurer une transition progressive du patrimoine vers la copropriété et d’en conserver la gestion, à condition d’avoir un service performant et séparé des autres missions, ce qui implique certains coûts d’investissement : commande d’un logiciel à un éditeur spécialisé, recrutement de personnel... A ce sujet, notons que tous les bailleurs interrogés ont recruté au moins une personne issue du monde de la gestion des copropriétés au niveau des services centraux, ce qui permet aux gestionnaires copropriété en agence d’être épaulés et formés en interne. Enfin, il convient de rappeler que d’autres bailleurs ont effectué le choix délibéré de confier l’activité de Syndic à un prestataire externe. C’est le cas par exemple d’Ophéa, qui n’a pas atteint le seuil critique d’ensembles en copropriété. En effet la métropole de Strasbourg ayant bloqué la vente Hlm, le nombre de copropriétés est marginal et ne suffit pas à créer un service ou une filiale, même avec une part de la production neuve en VEFA assez élevée. On retrouve encore une fois l’idée d’un seuil à atteindre avant d’envisager l’activité de Syndic. Le bailleur Batigère Grand Est a également préféré externaliser cette activité et se concentre sur le développement d’un outil de suivi du patrimoine en copropriété, certifié ISO 9001, afin d’alerter sur d’éventuels dysfonctionnements et les signaler aux Syndics ou aux pouvoirs publics, afin de mettre en place des plans d’action partenariaux. L’analyse de ces indicateurs est opéré par un référent copropriété recruté dans ce but.

23./


2.5 Les enjeux des outils numériques dans le logement social Avec la loi ELAN et comme son nom l’indique, logement et numérique sont liés dans une orientation renouvelée de politiques nationales. De la même manière, le Ministère de la Cohésion des Territoires a publié en 2017 la charte “Bâtiments connectés, bâtiments solidaires et humains” affirmant une volonté de mettre en oeuvre une « approche renouvelée de l’exploitation et de la maintenance d’un bâtiment, de l’information du citoyen sur son environnement pour faire du bâtiment une plateforme de services pour l’habitant et pour les professionnels pour davantage de confort d’usage et un habitat ou un espace de travail repensé ». Au cours de nos rencontres avec différents acteurs, la question du numérique s’est avérée tenace bien que sous-jacente. Un gestionnaire technique immobilier d’un bailleur nous a fait part de la nécessité pour les offices hlm de “changer d’algorithme, dans les deux sens du terme”.

« Il s’agit de changer d’algorithme, dans les deux sens du terme»

24./

Responsable Copropriété

De la même manière, une chargée de mission copropriété d’un autre bailleur faisait remarquer un changement simple mais pourtant crucial de sa manière de travailler et d’être actrice lors des Assemblées Générales des différentes résidences dont elle est responsable, lorsqu’elle a obtenu un ordinateur portable professionnel et un VPN permettant d’accéder en temps réel à tous les documents concernant le bailleur comme le copropriétaire, ou encore la mise en place d’un chat transversal permettant à plusieurs services d’échanger sur un même sujet en temps réel. Nous portons ici l’idée selon laquelle la prise en main du numérique au sens large permettrait d’une part aux bailleurs de proposer de nouvelles formes de services aux locataires, et plus largement aux résidents du parc quelque soit leur statut; d’autre part d’apporter de nouvelles solutions pour piloter et gérer le parc où les enclaves en monogestion se raréfient.

Agilité et personnalisation des services aux résidents Trois dimensions peuvent être mises en avant sur l’apport du numérique au logement social. D’abord, celle de la facilitation des relations de voisinage au sein d’une résidence: la valeur d’usage des parties communes et les relations au voisinage peuvent être améliorées en mettant à disposition un lieu virtuel d’organisation d’évènements et de proposition de services entre voisins. Ensuite, certaines applica-

tions peuvent dépasser le seul périmètre de la résidence et faire office de réel “guichet unique”, de porte d’entrée vers le quartier et la ville dans son ensemble. Un certain nombre de services de proximité peuvent y être répertoriés. Enfin, il s’agit de faciliter et fluidifier le service rendu aux habitants, tout en leur permettant de monter en compétence et de s’approprier plus avant leur lieu de vie. Une application peut permettre au résident de faire remonter en temps réel des informations concernant l’état de fonctionnement de son lieu de vie ou encore consulter sa consommation et la répartition des charges qui en résulte. La mise en contact entre les parties prenantes, bailleur, syndic, prestataire, résident, est facilitée. En plus d’un gain de temps, l’information est centralisée et redirigée vers le bon interlocuteur, dans une démarche d’amélioration du service rendu. Plusieurs start ups développent aujourd’hui ce type de plateforme. CitizenDesk, en plus de proposer un espace de partage d’information entre bailleur, locataire et prestataire, offre un espace de discussion entre habitants, et développe tout un volet de mise en relation du résident à la ville et ses services. Billiote & Co est une agence de communication ayant déjà développé ce type de plateforme pour le compte de bailleurs sociaux de la région Grand Est. Le locataire peut y formuler des réclamations, annoncer son désir de changer de logement, déposer des documents administratifs et payer son loyer et ses charges en ligne. Vicinity s’est elle spécialisée dans la mise en relation des voisins avec le syndic de copropriété. Enfin, Chouette Copro communique sur la réduction de la chaîne d’information entre le résident déclarant un dommage, le bailleur mandataire et le prestataire réalisant les travaux. L’efficacité du gestionnaire est valorisée et pour ce dernier une baisse des coûts d’exploitation est observée notamment du fait de cette interopérabilité des données entre locataire qui signale, bailleur qui traite et prestataire qui réalise les travaux.

Gestion et pilotage du parc de logements : vers une optimisation du suivi ? Les outils numériques doivent permettre au bailleur d’optimiser ses capacités de gestionnaire et de centraliser les données nécessaires au pilotage de son parc. Par exemple, l’ESH Batigère développe un logiciel de gestion intégrée: un réel SIG -Système d’Information de Gestion - et non géographique selon l’acronyme plus répandu. Y sont répertoriées en temps réel les informations concernant l’état de fonctionnement des résidences, les travaux à réaliser et une mise à jour des données concernant les assemblées générales et les décisions qui y sont prises. Tout l’enjeu est de pouvoir lier les informations émanant du terrain avec celles détenues au niveau central. Les informations communiquées à la fois par les locataires, les potentiels concierges,


et les chargés de secteur lors de leurs visites de sites peuvent être traitées de manière centralisée, qu’il s’agisse de données de (dys)fonctionnement (réclamations concernant le logement, entretien des espaces communs, consommation d’énergie) du bâti ou de gestion de la copropriété. Finalement, le numérique facilite le passage d’une logique de silo à une logique plus transversale concernant à la fois la gestion du bâti et des relations entre acteurs. Aussi, il peut permettre d’augmenter la valeur d’usage d’une résidence, d’un quartier, par la mise en oeuvre d’une palette de services évolutifs et adaptatifs pour la diversité des publics habitant en copropriété.

Le numérique, un outil nécessaire mais pas suffisant Dans les deux cas exposés plus haut, qu’il s’agisse du développement d’un application ou d’un logiciel de gestion intégrée, les coûts sont importants, que ce soit en termes financiers ou organisationnels. Si les gains de production sont certains, une grande réorganisation en interne reste nécessaire, ainsi qu’un lourd investissement primaire. Un autre obstacle, éminemment technique, est celui de la mise en cohérence des différents outils. Il s’agit de créer une passerelle entre une application et un ERP contenant la base de données en interne. Nous avons noté que cette évolution pose d’autant plus de difficulté au groupe CISN qu’Espace Domicile et CISN promotion ne disposent pas du même ERP. Aussi, si 60% des résidents du parc hlm disposent d’un smartphone ou d’une tablette, quid des 40% restants ? Les inégalités d’accès au numérique doivent être prises en compte, qu’il s’agisse d’un écart générationnel et/ou socio-économique. Ensuite, l’objet copropriété, pourtant à l’origine d’un tel engouement pour ces outils, peut aussi s’avérer être une limite. En effet, si la “charge” d’une application de résidence est comprise dans le bilan du promoteur, au moment de renouveler le contrat les copropriétaires votent pour maintenir ou non le service, qui peut s’avérer coûteux et dont l’utilité peut aussi faire débat entre eux. Soit, si le locataire d’un bailleur social peut être sûr du maintien du service, la fonction de mise en relation du voisinage peut vite être vidée de sa substance si le reste des copropriétaires abandonnent l’application. Cela pose la question de sa durabilité à l’échelle d’une résidence en copropriété. Enfin, de manière plus générale, il faut relever “l’importance d’être un visage” chargée de mission copropriété. Le numérique vient alors en facilitation et en fluidification du service rendu mais en aucun cas ne remplace la notion de proximité. Il reste un outil et non une fin en soi. D’ailleurs, remarquons que lors de l’enquête menée entre octobre et novembre 2019, seulement 8% des répondants disaient manquer d’outils numériques de mise en relation du voisinage sur leur résidence.En ce sens, on en revient à la nécessité de rester réaliste quant à la capacité et la volonté des gens à entrer en contact, ceci même via une application. Le bailleur social ne peut pas non plus s’en remettre entièrement à l’outil numérique au risque de générer des craintes sur une forme de désengagement insidieux de sa part sur le terrain.

25./


Bibliographie ANAH, “Plan initiative copropriétés : des dispositifs pour accompagner les interventions locales”, Recueil d’outils et d’expériences, septembre 2019 ARC “Copropriétés mixtes : quels dysfonctionnements et quelles réponses de l’ARC ?, Actions, 21/09/2018 Conseil social de l’Union Sociale pour l’Habitat, “Vente hlm, mirage pour miracle pour l’avenir du modèle du logement social?”, Avis n.1, juin 2018 CAUE Ile-de-France, “Le logement en question: Quelle insertion à l’échelle urbaine ?” Cahier thématique n.2, 2018 CAUE Ile-de-France, “Le logement en question: Quels espaces collectifs pour l’habitat ?” Cahier thématique n.3, 2018 Les cahiers techniques du bâtiment, “Dossier Logement Social. Des parties pas si communes dans un projet de logement”, n.344, septembre 2015 Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, “La production de logements locatifs sociaux par recours à la vente en l’état futur d’achèvement”, Rapport de fin de mission, Décembre 2014 Ministère de la Cohésion des Territoires, Charte Bâtiments connectés, bâtiments solidaires et humains, 2017 Smart Building Alliance, “Le numérique face aux enjeux du logement social”, théma 2, 2018 USH, “Gérer les copropriétés : savoir-faire et valeur ajoutée des organismes Hlm”, Les cahiers, n°117, déc 2007 USH, “Préparer la mise en copropriété du patrimoine :: quelles étapes clés et quels points de vigilance?” Les outils n.5, janv. 2014



Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.