Du rebut à la ressource - Valorisation des déchets dans les villes du Sud

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Valorisation des déchets et échelles de gestion

[de la collecte des déchets], tous les ans nous pouvons construire quatre à cinq espaces verts, et asphalter cinquante à soixante cuadras [5 à 6 hectares] » (Infonews, 31 juillet 2012). Malgré quelques expériences réussies, ces tentatives provoquent aussi la résistance des entreprises privées et surtout celle des ouvriers de la collecte (grève), soutenus par la Confédération générale des travailleurs et tout particulièrement le syndicat des camionneurs (El Diario Sur, 2016). Enfin, la décentralisation peine à donner des cadres territoriaux satisfaisants à la récupération informelle des déchets. Le déploiement de l’action publique en matière de lutte contre la pauvreté, de formalisation et d’aide à la consommation (comme le programme fédéral Argentina Trabaja) s’inscrit dans un maillage territorial continu. Il ne tient pas compte des dynamiques transjuridictionnelles et réticulaires de l’activité. Aussi, les récupérateurs bénéficient d’une forme de reconnaissance de leurs activités. Certaines municipalités mettent en place des dispositifs plus ou moins avancés qui leur permettent d’opérer la collecte des matériaux recyclables sous contrat de service. Ainsi, la ville de Buenos Aires soutient les coopératives qui opèrent sur son territoire parce qu’elles lui permettent d’effectuer des économies sur l’enfouissement des déchets. Néanmoins, les récupérateurs, même réunis en coopératives, continuent de vendre les matériaux collectés dans un cadre informel, souvent faute d’atteindre les exigences fixées par les entreprises de recyclage en termes de quantité de matériaux et de conditionnement de ces derniers. Cela les place dans une situation de précarité chronique, renforcée par les variations internationales des cours des matières premières secondaires à partir desquels les entreprises de recyclage fixent les prix d’achat. Enfin, l’absence de régulation des échanges commerciaux entre récupérateurs et entreprises de recyclage conduit à ce que ce pan de l’activité reste mal connu. La province de Buenos Aires – où se déroulent le conditionnement, la revente et la transformation – ne légifère pas en régulant les établissements industriels car ces activités soutiennent une économie déjà fragilisée par les crises. Les hypothèses de la protestation citoyenne et de l’affirmation des gouvernements locaux constituent ici des facteurs explicatifs intéressants pour souligner les apories des mouvements centralisateurs et décentralisateurs dans la métropole de Buenos Aires. Dans le premier cas, le poids croissant accordé aux mouvements citoyens et à leurs revendications d’un meilleur cadre de vie a aussi engagé la CEAMSE à répondre en introduisant davantage de technologies vertes sur les sites d’enfouissement. Désormais, cette activité se déroule dans des conditions techniques acceptables (surveillance des eaux souterraines et de surface, des mouvements de surface, stations d’épuration, drainage des gaz, aménagement paysager postenfouissement). Elle est aussi associée à des activités de récupération et de valorisation énergétique du gaz méthane, de recyclage des pneus, de compostage. Elle est accompagnée d’initiatives d’insertion sociale, à travers la construction de centres de tri des déchets recyclables laissés à la disposition de coopératives de récupérateurs (site de Norte III). Dans le second cas, la volonté 169


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