Le monde

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Culture 25

0123 Jeudi 18 novembre 2010

Pierre Perret, un dévergondé soucieux des femmes Dans son 25e album, «La Femme grillagée», le chanteur dénonce la burqa et vante le pouvoir du sexe Musique

V

ingt-cinq albums, 500 chansons au catalogue : Pierre Perret pourrait partir à la retraite et buller en Normandie. Mais il publie simultanément un disque, La Femme grillagée, et un livre de cuisine, Tous toqués (Le Cherche Midi, 433 p., 25 ¤). Il prépare un recueil d’anecdotes sur la pêche en mer, autre passe-temps : « Pour raconter mes relations avec les poissons », dit en rigolant l’auteur, compositeur et interprète, qui a pris son indépendance discographique dès 1963 en fondant le label Adèle. Tout artiste est un personnage public, il défend un style, une image. Celle que Pierre Perret, 76 ans, a adoptée, parce qu’elle correspond à son tempérament, est d’être à la fois bon vivant, aimant la bonne chère et la belle chair, critique de son époque et chanteur rigolo. La Femme grillagée ne déroge pas au principe de la variété. Perret y titille les amateurs de Cul, texte très cru écrit (« La chanson avait neuf couplets, j’ai dû élaguer ») à la suite du Plaisir des dieux (2007) et des Dieux paillards (2008), deux recueils de chansons paillardes. Il ravira ceux qui aiment les chansons « de société », sur le modèle des incunables Lily, Mon p’tit loup et horripilera un peu plus les contempteurs du Zizi. «Dire qu’il faudra partir un jour, alors que tant de gens continueront à faire l’amour ! », écrivait Paul Léautaud (Propos d’un jour, 1947). DansLaFemme grillagée (le titre de l’album est aussi celui d’une chanson contre la burqa), Pierre Perret ose, sans s’encombrer des pudeurs de l’époque. « On parle peu de sexe

dans la société, on peut discuter des goûts culinaires, de littérature, de politique, d’amour, mais tout le monde est assujetti au sexe, à ses débordements,dissimulations,inhibitions. Je n’aurais pas pu faire ce constat il y a vingt ans avec autant de lucidité », explique-t-il, cheveux à boucles, œil pétillant, un soupçon anticlérical (La Vie du pape). Chanteur populaire, habile à écrire des mélodies et refrains faciles à retenir. « Je m’en suis aperçu, dit-il, un jour [en 1957] à Courbe-

Bon vivant, aimant la bonne chère et la belle chair, critique de son époque voie. Je gare ma vieille bagnole, je suisdoublépar unvélo,letype chante : “Moi j’attends Adèle pour la bagatelle.”C’étaitdrôle.»Quarantetrois ans après Adèle (« Elle sait qu’c’est pour ça qu’elle vient/Pas besoin d’lui faire un dessin »), voici la très crue Clémentine, chantée en swing manouche. Entre-temps, il y aura eu Fernande (1972) de Georges Brassens, que Perret a bien connu, et admiré, avant de le traiter de grand jaloux (desesventes)danssonautobiographie, A cappella, parue en 2008 (Le Cherche Midi). Ce crime de lèsemajesté a valu des ennuis à Pierre Perret.LeNouvelObservateurl’accusaitenjanvier 2009d’affabulation: ilauraitmentisursesrelationsavec sonmentor,lepoète PaulLéautaud, dans les années 1950. En mars 2009, le chanteur a riposté en déposant plainte auprès du tribunal de grande instance de Parispour « injures publiqueset dif-

FRANCK JUERY POUR « LE MONDE »

famation » contre l’hebdomadaire, qui reprenait la thèse de la légataire universelle de l’écrivain, Marie Dormoy,niantlaréalitédesrencontres entre Perret et le poète misanthrope. L’audience du tribunal,

«oùtoutvas’éclaircir »,prometPerret, est prévue le 22 mars 2011. En attendant, il a écrit une chanson à ce sujet : « Si la race des cons/N’est jamais éteinte/C’est que la mère des cons/Est toujours enceinte. »

Les chansons des Beatles sont disponibles depuis mardi 16 novembre sur iTunes, la boutique en ligne de téléchargement de fichiers musicaux de la compagnie américaine Apple Inc. Les spécialistes s’étaient interrogés sur plusieurs possibilités en tête desquelles un site musical sur abonnement et une extension des offres de vidéos. Les chansons des treize albums studios des Beatles, parus entre1963 et 1970, sont disponibles à 1,29euros chacune (le tarif le plus haut sur iTunes), les albums à 12,99 euros, le prix fort là aussi. L’arrivée du catalogue des Beatles sur iTunes avait été évoquée à plusieurs reprises depuis la création du site en janvier 2001 mais avait régulièrement été repoussée en raison de plusieurs conflits entre Apple Corps-Apple Records, fondé par les Beatles en 1968 et Apple Inc., fondé en 1976 par Steve Jobs et Steve Wozniak: utilisation d’un logo (une pomme) et du nom Apple; engagement d’Apple Inc. à ne pas se développer dans le secteur de la musique ; question centrale du montant des droits d’exploitation du catalogue des Beatles pour iTunes. Aucun représentant d’Apple Records, de son distributeur de disques EMI, des Beatles et leurs ayants droit ou d’Apple Inc. n’a fait la moindre déclaration sur ce qui a débloqué la situation. Moins de vingt-quatre heures après leur entrée sur iTunes, les albums des Beatles sont en tête des téléchargements. Trio gagnant: Abbey Road, l’« album blanc » et Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band. p Sylvain Siclier

La Femme grillagée, 1 CD Adèle/Naïve.

Cinéma L’affiche du film « Dernier étage gauche gauche » met les huissiers en colère

Les Berlinois, symbole du rock industriel des années 1980, fêtent leurs 30ans à la Cité de la musique

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n rappel, après une heure et demie de spectacle, comme pour condenser en deux titres trente ans de carrière. Le premier, piloté par une basse massue, estuneorgie destridences,fracas et glapissements.Lesecondproclame «Silence is sexy » au son d’une cigarette en train de se consumer – basse caressante et chant murmuré. Mardi 16 novembre, le groupe allemand Einstürzende Neubauten donnait, à la Cité de la musique, le premier de ses deux concerts parisiens (complet le 17 novembre) célébrant trois décennies de bruit

et de poésie. Ces immeubles neufs (Neubauten) en train de s’effondrer (Einstürzende) étaient ceux d’une Allemagne d’après-guerre reconstruite à la hâte. Autant, dans les années 1970, à Düsseldorf, les électroniciens de Kraftwerk proposaient une vision ironiquement idéalisée de la modernité associée à la propreté clinique de leurs ordinateurs. Autant Einstürzende Neubauten agitait le Berlin du début desannées 1980, en se livrantà une apologie de la destruction et de la décrépitude industrielle, pour se confronter à l’abrasivité de matériaux de récupération devenus leurs instruments.

Sur scène, on trouve plaques de métal, bidons, tuyaux de plastique, perceuses,chaînesoucâbles d’acier transformés en orgue, contrebasse ou percussions de fortune par N. U.Unruh, 53 ans, membre cofondateur au crâne dégarni mais à l’énergie intacte, secondé par un autre percussionniste, un guitariste, un bassiste et un clavier. On perçoit dans cette agitation bruitiste, une inspiration dadaïste, les échos du Berlin de l’effervescence anar, quand cette vitrine de l’Ouest était encore isolée par le Mur. Lors de leur premier concert à Paris, en 1983, au Centre Pompidou, les Berlinois avaient attaqué

L’humour glaçant de «Tout va bien» Inspirée de l’univers de «Full Metal Jacket», la pièce part en tournée Danse

T

out va bien », clame le chorégrapheAlain Buffard:il aintitulé ainsi, sur un ton de fausse bonne santé fanfaronne, sa nouvelle pièce pour huit interprètes. Comprenez évidemment que tout va mal, très mal même, au pays d’Alain Buffard. Au garde-à-vous, mitraillette au poing – des pieds de micro, mais l’effet est presque plus agressif –, la bande armée qui marche au pas militaire sur le plateau annonce le pire. Et le pire arrive. Tout va bien a été présenté au Centre Pompidou, à Paris, dans le cadre du Festival d’automne, du 13 au 17 octobre, avant une tournée en France à partir du 20 novembre. Cette pièce condense les obsessions et la marque stylistique d’Alain Buffard autour d’un motif quilui estcher:celuide l’apprentissage, du dressage, déjà présent, entre autres, dans Good Boy (1998) ou dans Dispositifs 3.1 (2001). Qui dit dressage, dans le contex-

te militaire du spectacle, dit haine del’autre,désirde lemater,dele briser en l’humiliant. Cela donne lieu à des scènes ciselées où la violence laplusfranche, laplusperverse aussi, se lit de façon oppressante.

Victime et bourreau Au centre de certaines manœuvres de coercition, Buffard pose le sexe comme but. La mitraillette, dans la bouche ou entre les cuisses, sert à tout. Dompter l’autre, c’est l’avilir en lui faisant peur d’abord, en le contraignant sexuellement ensuite. Les protagonistes de cette ronde nocturne endossent tour à tour les rôles de victime et de bourreau, dans un tournoiement de jouissance et de cruauté qu’Alain Buffard articule avec méticulosité. Tout va bien suggère des faits qui font la « une » de l’actualité (on ne peut s’empêcher de penser aux imagesdeGuantanamo). On reconnaît la griffe esthétique de Buffard : une élégance stricte dans la silhouette, une menace dans le

comportement, quelque chose d’intimement sous contrôle qui peut exploser à tout moment. L’humour, par exemple, est sur tous les visages, mais reste le plus souvent glaçant. Prendre au pied de la lettre une expression comme « kiss my ass » (« embrasse mon cul») entraîne des situations presque burlesques. Plus c’est ludique, plus c’est sadique, lorsqu’on sait qui est le chat et où est la souris. C’est en silence, dans un silence au nuancier subtil (d’angoisse, de plomb, de mort…), sans aucune bande-son extérieure, que le bruit des bottes, des voix déformées par la peur, emporte Tout va bien sur le grand air des Marines Mon fusil est mon meilleur ami. p Rosita Boisseau « Tout va bien », d’Alain Buffard. En tournée : 20 novembre, Le Phénix, Valenciennes. Les 8 et 9 décembre, Théâtre de Nîmes. Les 6 et 7 janvier, MC2, Grenoble. Les 4 et 5 février, CDC, Toulouse. Les 7 et 8 avril, Lieu Unique, Nantes.

un mur au marteau-piqueur (bon prince, le conservateur de l’époque leur avait demandé de signer le trou). L’architecture de Portzamparc n’a eu cette fois à subir aucun outrage.

Dandy en costume A l’image de l’autre membre d’origine du groupe, le chanteur Blixa Bargeld, 51 ans, ex-punk émacié devenu dandy en costume, a depuis longtemps habillé sa violence d’ambiances mélodiques et poétiques plus reptiliennes. Après avoir mené en parallèle une carrière de guitariste au côté de l’Australien Nick Cave, Bargeld a

Les Beatles disponibles sur iTunes

Il y a une forme d’humanisme de proximitéchez Pierre Perret :les manifestants contre la réforme de la retraite sont d’ailleurs revenus à 1968 en reprenant Cuisse de mouche (« On l’appelle Cuisse de mouche fleur de banlieue/Sa taille est plus mince que la retraite des vieux »). Il y a de l’argot et dulibertinage chez Perret, mais pas d’esprit «copainsd’abord »,oùlagentféminine est souvent trouble-fête, posture courante chez les chanteurs de sa génération. La chanson la plus réussie du nouvel album s’adresse aux femmes battues, « Tabassée à mort par amour/Paraît qu’c’est courant de nos jours/Le métier d’épouse n’est pas sûr ». Moquées au commissariat, honteuses en société, jugées coupables. Il y a aussi une bossa aérienne, Les Enfants d’là-bas, ceux à qui on « Ne dit pas tiens-toi droit à table/Bois ton bol de lait », parce qu’ils n’ont rien. « Cette chansonlà, elle est fringuée d’une façon magnifique », se réjouit l’artisan, qui a confié les arrangements à Frédéric Manoukian (déjà présent sur Les Dieux paillards) : du jazz, du swing, de la java, une valse (Chansonminable); descordes,dela clarinette, des sons orientaux. «Depuisla mort,en2000,de Bernard Gérard [arrangeur de Michel Magne, de Gréco, de Lily], je n’avais pas rencontré une telle qualité, dit Pierre Perret. La vertu du travail rend heureux, et permet de s’échapper de la médiocrité. Manoukian a toutciselé. Et moi, Femmes battues, j’en ai fait trente versions avant d’arriver à être concis. »p Véronique Mortaigne

L’élégance punk du groupe allemand Einstürzende Neubauten Musique

Musique

abandonnélasix cordes pourdevenir à plein-temps le conteur du groupe. Aidé par un autre ancien, le formidable bassiste Alexander Hacke, il juxtapose délicatesse onirique et groove tétanisant. Sa sombre élégance ne manque pas d’humour. « Et souvenez-vous, glisse-t-il en conclusion, quand, un jour, vous rencontrerez notre Créateur, de lui dire : “j’ai vu ton groupe préféré”. »p Stéphane Davet Einstürzende Neubauten Le concert du mardi 16 sera en écoute gratuitement pendant quatre mois sur le site Citedelamusiquelive.tv

La Chambre nationale des huissiers de justice a demandé l’interdiction de l’affiche du film d’Angelo Cianci, Dernier étage gauche gauche. On y voit un huissier, (incarné par Hippolyte Girardot) ligoté et bâillonné dans une baignoire, avec, en sous-titre «Cité Villon, on sait recevoir les huissiers… ». L’image porterait atteinte à l’intégrité physique des huissiers et constituerait un «trouble manifestement illicite ». Mardi soir 16 novembre, les affiches ont été retirées du métro parisien, la campagne prenant naturellement ce soir-là. Elles resteront apposées dans les 34 salles de cinéma qui projettent la comédie. Le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris devait rendre sa décision finale jeudisoir 18novembre. – (AFP)

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