L'eau, outil d'urbanisme pour l'adaptation au changement climatique

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L’eau

Outil d’urbanisme pour l’adaptation au changement climatique Exploration dans la Région Grand Est

mémoire master 2 architecture structure et projet urbain

Noémie Thomas Directeur de mémoire Florence Rudolf Maître de stage Benoît Grandmougin avec le suivi de Delphine Rousset Année 2017-2018



Remerciements Je tiens à remercier l’ensemble des personnes qui m’ont aidé à la réalisation de ce mémoire, depuis le choix de mon stage jusqu’à l’écriture des pages qui vont suivre. Je remercie Florence Rudolf, qui a suivi ce mémoire, pour ses remarques et ses échanges constructifs. Je remercie mes collègues du Grand Est, notamment à Strasbourg, pour leur intérêt dans mon travail et leur aide précieuse. Je tiens particulièrement à remercier Delphine Rousset pour le temps qu’elle a consacré à suivre mon stage ainsi que Benoît Grandmougin pour la genèse de ce stage et son appui continu. Je remercie, également, l’ensemble des personnes que j’ai pu rencontrer qui ont pris le temps de discuter, répondre à mes questions et m’envoyer des documents. Je remercie Pascal Martin-Gousset pour m’avoir aidé à trouver ce stage qui m’a permis d’approfondir la question de l’aménagement et du changement climatique. Enfin, je remercie ma famille et mes amis pour leur soutien et leurs multiples relectures patientes et attentives. 3


Introduction

p.6

Chapitre 1

Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités 1. L’eau : une ressource vitale

p.9 p.10

a. Un point sur le grand cycle de l’eau : les formes naturelles de l’eau

p.10

b. Le petit cycle de l’eau : une circulation intra et extra urbaine

p.12

c. Les usages et acteurs de l’eau du Grand Est : multiplicités et nécessités

p.14

2. Les effets attendus du changement climatique

p.18

a. Brèves histoires des politiques climatiques

p.18

b. L’augmentation de la moyenne des températures

p.20

c. Le bouleversement du grand cycle de l’eau

p.23

d. Les conséquences sur la biodiversité et le vivant

p.24

e. L’impact sur les usages de l’eau

p.25

f. Définitions de notions clés

p.30

3. Les inondations entre préoccupation historique et augmentation du risque p.33 a. De la crue à l’inondation : motif d’un phénomène désastreux

p.33

b. L’organisation du territoire régional face aux inondations

p.25

c. Les évolutions futures des inondations au regard du changement climatique

p.36

4. La ressource en eau entre qualité et quantité : un intérêt vital

p.38

a. Les sécheresses : tension périodique sur la ressource

p.38

b. Les pollutions : une bataille quotidienne

p.39

c. Les évolutions futures de la ressource en eau au regard du changement climatique

p.41

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Chapitre 2

La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation

p.45

1. L’anthropisation du territoire : un chemin de l’eau contraint

p.46

a. La gestion des eaux : la saturation des réseaux

p.46

b. L’imperméabilisation : ruissellement

p.47

c. Canalisation des cours d’eau : l’inefficacité d’un système

p.48

d. La disparition des milieux et éléments paysagers : l’amplification des phénomènes

p.51

2. Remettre en question la ville pour profiter des bienfaits de l’eau

p.53

a. Les services écosystémiques de l’eau et ses milieux associés

p.53

b. Tirer avantage de la présence de l’eau

p.55

c. Ville perméable, Ville éponge, Ville résiliente : des villes concepts pour éveiller l’attention p.57 d. Les politiques et documents d’urbanisme à l’origine de la stratégie de demain

p.61

Chapitre 3

L’eau : un outil au coeur des villes de demain

p.65

1. Une adaptation au changement climatique par l’eau à lire entre les lignes

p.66

a. Un besoin de sensibilisation et d’éducation

p.66

b. Des projets inspirants

p.68

2. Élaborer les politiques régionales pour affirmer l’outil eau

p.72

a. Le SRADDET

p.72

b. Les aides régionales : des leviers pour accompagner les projets stratégiques

p.75

c. Le Grand Est vers la définition de nouvelles actions

p.82

3. A l’échelle du projet : de nouvelles attitudes à adopter

p.88

a. Les freins à l’action

p.88

b. Les atouts à valoriser pour mieux aborder l’adaptation

p.91

Conclusion

p.96

Bibliographie Acronymes Annexe

p.98 p.102 Livret annexe 5


La présence Lade présence l’eau estdeunl’eauélément fondateur est un élément fondateur de l’établissement humain

et de l’implantation des villes. Elle était une ressource nourricière et un rempart défensif. Si elle a peu à peu perdu son second rôle en France, elle reste un élément vital ainsi qu’un composant fort de l’identité géographique, paysagère et culturelle du territoire. De fait, elle a façonné les vallées et les plaines et continue de traverser de nombreuses communes, portant avec elle histoires, traditions et usages. Cependant, l’eau a également une facette hostile, source de risque et de désagrément. En effet, sous le paysage visible se cache de multiples problématiques qui nous touchent tous directement : depuis l'eau potable au monde économique en passant par notre fragilité et celles de nos lieux de vie face aux dangers qu’elle peut entrainer. Parmi ces problématiques, la plus perceptible est sans doute celle des inondations, dont la périodicité rapprochée, ces dernières années, interpelle. Aux hivers 2016 et 2018, à Paris, les crues de la Seine ont été fortement relayées par les médias tandis qu’à l’échelle de la Région Grand Est, ce sont les crues de l’Ill mais aussi de la Seine qui inquiètent. En été, de nouvelles communes plus éloignées de cours d’eau sont également touchées par des inondations d’origine orageuse. Dans le même temps, l’Accord de Paris signé en 2015, le Plan Adaptation et d’Atténuation au Changement Climatique de l’Agence de l’eau Rhin Meuse approuvé au printemps 2018, puis la publication du Plan Biodiversité du gouvernement français au début de l’été 2018 montre une éclosion des mouvements autour du changement climatique et des problématiques qu’il engendre. En effet, depuis déjà plusieurs années, le changement climatique est devenu un sujet essentiel pour les territoires. Un sujet qui s’impose de plus en plus au vu des prévisions de températures à l’horizon 2050 : 55°C dans l’est de la France (Jouzel, 2018). De fait, la question d’un lien entre les évènements climatiques tels la répétition des inondations et l‘évolution du climat se pose et engage des réflexions sur les mutations et la recomposition territoriale pour mieux aborder l’avenir.

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La pertinence de la question a été nourrie par mon stage au sein de la Région Grand Est durant lequel j’ai pu dialoguer avec différents acteurs qui s’intéressent au sujet depuis les services déconcentrés de l’Etat (DREAL, Agences de l’eau, CEREMA, BRGM, …) jusqu’aux techniciens des collectivités (Région, PNR, Eurométropole de Strasbourg, …). Ce stage avait pour objectif l’identification de points pour faire évoluer les politiques régionales afin d’entreprendre l’adaptation du territoire au changement climatique grâce aux entrées : eau, biodiversité et aménagement. Effectivement, si de nombreux acteurs se sont emparés de la question de la diminution des gaz à effet de serre, celle de l’acclimatation au bouleversement climatique et ses effets demeure latente. D’autant plus, lorsque l’eau est abordée comme un outil et un atout de l’aménagement et non plus seulement un élément de décor et un élément subi. L’exploitation des sources et des données recueillies durant le stage vont permettre de répondre à différentes interrogations : Sous quelles formes le changement climatique va-t-il se manifester ? Quels en sont les enjeux ? L’eau peut-elle être envisagée autrement que par la servitude et devenir un atout ? Comment mettre en œuvre l’adaptation au changement climatique sur l’ensemble du territoire et plus particulièrement dans les villes ? Ce mémoire intitulé « L’eau : outil d’urbanisme pour l’adaptation au changement climatique » tend à démontrer par l’exemple du territoire régional du Grand Est, qu’intégrer la question de l’eau dans les réflexions d’aménagement peut permettre d’agir pour le bien-être des habitants et la dynamique régionale quelles que soient les conditions climatiques à venir. L’eau par ses multiples bénéfices et les différentes formes qu’elle peut prendre est un composant pluriel, dont la présence peut permettre un meilleur confort de vie malgré les mutations climatiques. Après une première partie consacrée aux enjeux de l’eau dans la ville et sur les territoires habités, où nous chercherons à comprendre les problématiques du changement climatique et de l'eau, l'étude de la stratégie d’aménagement, en seconde partie, nous permettra de découvrir les difficultés qu’engendre l'urbanisme tel qu'il est fait actuellement et comment un changement de stratégie pourrait répondre aux enjeux et participer au processus d’adaptation. Enfin, nous verrons dans une dernière partie consacrée à l’eau comme outil au cœur des villes de demain : les moyens mis en œuvre dans la région et des solutions à apporter pour lancer l'adaptation.

pour lancer l’adaptation.

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Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habitÊs Chapitre 1


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L’eau : une ressource vitale

a. Un point sur le grand cycle de l’eau : les formes naturelles de l’eau Avant de comprendre les impacts du changement climatique sur l'eau, il est important de connaître le grand cycle de l'eau, c'est à dire le cycle naturel de l'eau. Celui-ci se forme par des échanges permanents entre le sous-sol, la surface de la terre et l'atmosphère. Depuis son apparition sur terre, le même volume d’eau circule et se transforme. L’eau sous toutes ses formes recouvre 72% de la surface de la terre (Les agences de l’eau, 2015). Le climat est en inter-connexion permanente avec le grand cycle de l’eau (température, pression atmosphérique, vent, ...). Pour simplifier :

1. évaporation L'eau de la mer et des océans s'évapore sous l’action du soleil, et forme des condensés de vapeur dans l'atmosphère. Ces nuages vont se déplacer au-dessus des continents et se greffer à ceux déjà présents.

4. COURS D’EAU L’eau tombée dans les cours d’eau va rapidement rejoindre la mer, de rivière en fleuve. À noter qu'une partie des cours d'eau, s'infiltre par le sol dans les nappes d'accompagnements et participe à alimenter les nappes souterraines. Un ensemble de cours d'eau se jetant dans un même autre cours d'eau forme un bassin. Ainsi il existe des bassins de rivière et des grands bassins correspondant aux fleuves.

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2. Précipitation Lors d'un changement de pression atmosphérique, l'eau va se décondenser et prendre une forme liquide ou solide selon les températures : pluie, neige ou grêle. Une partie de l’eau s’évapore directement, puis elle s’évapore des plantes, des animaux ainsi que des étendues d’eau douces et zones humides, pour retourner à la première étape.

3. RUISSELLEMENT ET INFILTRATION L'eau ainsi tombée, selon les caractéristiques du sol (pédologie, piézométrie, relief,...) s'infiltre sur place dans la nappe souterraine, où elle sera stockée, ou ruisselle jusqu'à un cours d'eau. La neige attendra de fondre mais prendra l’un ou l’autre de ces chemins.

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5. NAPPES

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Les types de nappe souterraine sont variables (caractéristiques de la roche, profondeur, volume, situation,...) mais forment des réserves d’eau plus ou moins captives. C’est-à-dire que certaines sont stables et peuvent dater de plusieurs dizaines d’années tandis que d’autres s’écoulent très lentement vers les mers et océans qu’elles rejoindront à plus ou moins longue échéance. Une partie de ces nappes réalimente les cours d’eau.

5 5 Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


b. Le petit cycle de l’eau : une circulation intra et extra urbaine Les différentes actions humaines forment un petit cycle de l’eau qui vient se superposer sur le grand cycle précédent. Ce dernier est totalement artificiel, créé par l’homme au XIXe siècle pour capter l’eau, la traiter et la distribuer. Aujourd’hui, le cycle s’est complexifié avec le traitement pour rendre l’eau potable, son stockage puis son assainissement pour la rendre suffisamment propre au milieu naturel. 2. TRAITEMENT

3. STOCKAGE

Elle est ensuite traitée pour la rendre potable c’est-à-dire conforme à la réglementation1. Ce sont des filtrations et des réactions biologiques avec, par exemple, du chlore ou du charbon actif ainsi que des dilutions qui vont rendre l’eau apte à la consommation.

L’eau une fois traitée est stockée en château d’eau. 4. DISTRIBUTION Les réseaux d’eau potable irriguent l’ensemble de la ville où elle sera utilisée pour un usage domestique mais aussi agricole (abreuvage) et industriel.

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1. CAPTAGE L’eau est captée en rivière, à la source ou dans une nappe selon la situation géographique.

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5. COLLECTE L’eau une fois utilisée constitue les «eaux usées». Elle est collectée dans un réseau de collecte (égouts) et menée à la station d’épuration. On différencie deux types de réseaux de collectes : 6. ÉPURATION

- Les réseaux unitaires dans lesquels eaux usées et eaux de pluies sont mélangées.

Avant d’être rejetées dans le milieu naturel, les eaux sont assainies. Elles passent dans une station où elles sont filtrées grâce à des techniques (traitement chimique, UV, filtres, grille, …) ajustées à chaque type de contaminants. Les contaminants pour lesquels la station n’est pas adaptée ne pourront être éliminés et iront dans le milieu naturel. Les eaux pluviales provenant de réseaux séparatifs peuvent suivre un chemin différent comme par exemple un bassin de lagunage où la végétation permet de filtrer les contaminants. Une zone tampon peut exister entre la station ou le bassin et le milieu naturel afin d’affiner la filtration et limiter un potentiel retour au milieu sans filtration.

- Les réseaux séparatifs permettant de traiter différemment les deux flux. Les eaux de pluies ne sont alors pas menées à la station d’épuration.

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7. REJET L’eau assainie est rejetée dans un cours d’eau. Une eau peut ainsi être prélevée et rejetée successivement jusqu’à la mer.

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Arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine mentionnées aux articles R. 13212, R. 1321-3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique.

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Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


c. Les usages et acteurs de l’eau du Grand Est : multiplicités et nécessités Plusieurs usages sont liés à l’eau. En premier lieu, l’eau est inhérente aux usages de survie c’est-à-dire au cycle vivant qu’il soit animal ou végétal. L’eau est en effet considérée comme la source de la vie et est à la base de tout être. Ainsi, végétaux et animaux boivent l’eau pour se développer et survivre puis la rejette par leur transpiration et leurs liquides biologiques. En second lieu, l’eau permet les usages liés aux activités humaines que l’on peut répartir ainsi : domestiques, énergétiques, agricoles, industrielles et sociales. Les acteurs de l’eau permettent de gérer, limiter, contrôler et aider ces différents usages. L’eau étant une ressource universelle et vitale, sa gestion s’organise de l’échelle européenne à l’échelle locale afin de répondre au mieux à tous les enjeux. UNION EUROPéENNE

Mission Interministérielle de l’Eau

Impose la DCE

CNE

dont Ministère de la Transition Energétique et Solidaire (MTES) Mettent en œuvre les politiques nationales

une par département

08 10 51 52

67

54 55 57 58

68

études et travaux

EPCI Agriculteur Commune EPTB Association Entreprise Citoyen Fédération

dont 3 Bassins sur le Grand Est

Rhin-Meuse Seine-Normandie Rhône-Méditerannée-Corse

Coopère et échange Met en œuvre ses politiques régionales

Met en œuvre ses politiques départementales

AFB

Contrôle usages de l’eau Usagers

Agences de l’eau

dont Service Eau et Biodiversité

dont Délégation de Bassin

département

Met en œuvre la DCE

Région Grand Est

DREAL Grand Est

ddt

n

s atif ult ns co es

éTAT FRANCAIS

or ga

Comités de bassin

Met en œuvre sa stratégie de bassin (SDAGE)

Recherche

Gouvernance

BRGM Grand Est CEREMA Est Hydreos Universités

Commissariat de massif CEN PNR SAGE

CLE


CNE Comité National de l’Eau à en charge la consultation pour les grands projets nationaux d’aménagement et le répartition des eaux, les questions communes aux bassins hydrographiques et la protection des peuplements piscicoles Il évalue la qualité et le prix des services publics de l’eau et de l’assainissement.

Depuis 2000, la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) de l'Union Européenne fixe comme objectif d’atteindre le bon état chimique et écologique de l’eau (pollution, espèces, quantité) sur l’ensemble du territoire européen, et donc français. à travers les Agences de l'eau, l’État français met en œuvre cette DCE et sa propre politique de l'eau. Les six Agences de l'eau sont réparties sur le territoire selon les grands bassins versants : ArtoisPicardie (AP), Loire-Bretagne (LB), Ardour-Garonne (AG), RhôneMéditerranée-Corse (RMC), Seine-Normandie (SN) et RhinMeuse(RM).

AFB Agence Française pour la Biodiversité A en charge la surveillance des milieux aquatiques et le contrôle des usages (en lien avec les agences de l’eau implantées dans chaque bassin hydrographique). Comité de Bassin Chacune des 6 agences de l’eau a son propre Comité qui rassemble les représentants des pouvoirs publics, des collectivités territoriales, des usagers économiques et associatifs. Il décide de la stratégie en faveur de la protection de l’eau et des milieux aquatiques et élabore un plan de gestion pour 6 ans, en cohérence avec les politiques européenne et nationale de gestion de l’eau. CLE Commission Locale de l’Eau SAGE Schéma d’Aménagement et de Gestion de l’Eau EPCI Etablissement Public de Coopération Intercommunale

La Région Grand Est réunit sur son EPTB Etablissement Public Territoriaux de Bassin territoire les bassins RM, SN et RMC. Le bassin Rhin-Meuse est le seul à être situé uniquement sur la Région Grand Est : il couvre 56% du territoire, avec pour spécificité la gestion de deux fleuves transfrontaliers. Le bassin Seine-Normandie est l’autre grand bassin du Grand Est. L’une de ces missions principales est la gestion des Grands Lacs de Seine dont le rôle est de limiter les inondations de la région parisienne. Enfin, le Bassin Rhône-Méditerranée s’insère au sud de la Région, à la source de la Saône dans les Vosges. Chaque Agence de l'eau rédige un SDAGE (Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux) pour une période de 5 ans, qui traduit dans un document opposable juridiquement, les politiques Européennes et nationales adaptées au territoire. Cette politique est fixée par les comités de bassin (élus, usagers et représentants de l'Etat). Elle doit répondre aux quatre priorités suivantes (Corinne BASCOUL, 2018) : • Une politique de l’eau plus solidaire, • Un programme d’intervention et de financement de la biodiversité, • La santé, • Le changement climatique dans le cadre de l’eau, Pour cette dernière priorité, les Agences de l'eau sont dans l'obligation de rédiger un plan (ou stratégie) d'adaptation au changement climatique. Le plan, en tant que tel, n’a pas de portée juridique. Cependant, il est pris en compte dans les objectifs du SDAGE et doit fournir sa réflexion. Les premiers plans ont été lancés dès 2012, mais leur généralisation date de 2015. 15

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


C'est également le comité de bassin qui vote les taux de redevances et le Programme d’intervention qui est renouvelé tous les 4 ans. Celui-ci est la transposition en actions et aides financières du SDAGE. En effet, pour appliquer sa politique, les agences de l'eau ont deux missions principales : •

Le prélèvement de taxe sur les personnes, entreprise, etc, qui prélèvent et polluent l’eau ou ont un impact sur les paysages et milieux aquatiques. Plus ils dégradent, plus la note est élevée.

Le reversement des taxes est faite sous forme d’aide aux porteurs de projets qui ont un impact positif (entreprise, collectivités, agriculteurs, association, organisme de recherche, …)

Cependant, les Agences de l'eau ne sont pas les seules à participer à la gestion de l'eau et à aider les porteurs de projet.

Répartition des trois bassins du Grand Est auquel sont rattachées les Agences de l’eau (source : Grand Est) 16


Les DREAL et DDT hébergent la police de l'eau qui a pour objectifs la préservation et la restauration des milieux et de la ressource en eau, mais également la conciliation des différents usages de l’eau. Elles ont également pour mission la continuité de la politique de l'eau et de sa gouvernance ainsi que le suivi et la surveillance des eaux ou des espaces naturels. Elles participent au pilotage des recherches sur des sujets majeurs du territoire tel que le changement climatique. La Région Grand Est agit sur son territoire afin d'appliquer sa propre politique de l’eau. Celle-ci est fixée par différents schémas directeurs, dont le SRADDET sur lequel nous reviendrons par la suite. Ainsi la Région pilote des projets de recherche, parfois en coopération avec la DREAL et les Agences de l’eau, et participe à la gouvernance de l'eau. Elle est notamment structure porteuse de trois cellules d'animation de SAGE (Schéma d'Aménagement et de Gestion de l'Eau) : bassin Houiller, bassin Ferrifère et Ill-nappe-Rhin. Les SAGE sont la déclinaison locale du SDAGE. Leur raison d'être est basée sur l’importance des enjeux de la nappe souterraine ou ceux des eaux de surfaces. Ils sont élaborés collectivement par les acteurs de l'eau du territoire regroupés au sein d'une assemblée délibérante : la commission locale de l'eau (CLE). Il existe dix SAGE dans le Grand Est dont quatre sont communs avec d'autres Régions. La Région aide financièrement ses partenaires tels les six PNR (Parc Naturel Régional) et les CEN (Conservatoire d'Espaces Naturels) ainsi que des projets divers participant à mettre en œuvre sa politique. Les critères de sélection des projets ainsi que les taux de financement sont fixés dans des dispositifs. Afin de proposer une action plus cohérente, un certains nombres d’aides sont menées en coopération avec les Agences de l’Eau. Toutes les aides, partenariats, stratégies, etc de la Région sont votés en commission par les élus. Cette multiplication, superposition et coordination des acteurs, permet une gouvernance basée sur la démocratie et adaptable à chaque territoire avec ses spécificités. Ainsi les problématiques et les enjeux seront différents pour la Région PACA, avec son climat méditerranéen et ses manques d'eau, que pour la Région Grand Est qui a un climat continental et des problématiques plutôt d'inondation et de qualité de l'eau. De la même manière, les problématiques des usagers sont diverses et variées comme les réponses apportées. 17

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


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Les effets attendus du changement climatique

L’un des grands enjeux commençant peu à peu à entrer dans les politiques locales est celui du changement climatique. Afin de mieux comprendre les enjeux auxquels les politiques doivent répondre, il est dans un premier temps nécessaire de comprendre l’origine des politiques climatiques et les effets attendus de celui-ci sur les populations et les zones urbaines comme rurales.

a. Brèves histoires des politiques climatiques Le sujet est apparu en 1979 sur la scène internationale avec la première conférence mondiale sur le climat. Peu après, en 1990, le GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Etude du Climat) publie son premier rapport qui sera suivi par le sommet de la terre de Rio où sera signée la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ratifiée aujourd’hui par 195 pays. En 1997, l’accord de Kyoto fixe les premiers engagements de baisse d’émissions de gaz à effet de serre (GES). En 2015, c’est l’accord de Paris qui lui a succédé avec de nouveaux objectifs engageant à partir de 2020 l’ensemble des pays signataires à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, afin de limiter le réchauffement à 2°C par rapport à l’ère préindustrielle (Caude, 2015).

1979

1990

1ère conférence mondiale sur le climat

1èr rapport du GIEC

1992 Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques

1997

2015

Accord de Kyoto

Accord de Paris

1. Agir pour la sécurité et la santé publique,

En France, la question du changement climatique émerge dans les années 2000 et se concrétise en 2006 par l’adoption de la stratégie nationale d’adaptation au changement climatique. Elle fixe quatre objectifs :

2. Réduire les inégalités devant les risques, 3. Limiter les coûts et tirer parti des bénéfices potentiels, 4. Préserver le patrimoine naturel. 18


Suite au premier Grenelle de l’Environnement, la France se dote en 2011 de son premier plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC). En effet, l’émergence d’une politique spécifique d’adaptation est apparue nécessaire au regard de l’irréversibilité du phénomène quelle que soit la politique d’adaptation. La stratégie d’adaptation de l’Union Européenne sera elle adoptée en 2013, avec une allocation d’au moins 20% du budget de l’UE dédiée à l’action climat. La publication en 2014, du 5e rapport du GIEC, invite les pays et les Régions à amplifier la mobilisation et les politiques. (ONERC, 2016).

Social Santé Urbanisme Économie Energie Ressource en eau

Biodiversité Paysage Températures Cycle hydrique Qualité de l’eau Qualité de l’air

Recharge de la nappe Qualité de l’eau Quantité d’eau

Les différents aspects qui seront impactés par le changement climatique

En Région, la transposition des politiques nationales est plus lente car elle doit s’adapter plus précisément aux réalités du territoire. Les Agences de l’eau rédigent leur plan d’adaptation au changement climatique depuis 2015 et ils sont peu à peu adoptés : 2014 pour RhôneMéditerranée-Corse précurseur sur le sujet, 2016 pour Seine-Normandie et 2018 pour RhinMeuse. Le changement climatique est Quant aux politiques régionales, leur définition un phénomène irrémédiable, déjà est laissée libre aux élus régionaux. Dans le apparu au cours de l’évolution de la Grand Est, il n'existe pas de ligne définie sur terre. La différence aujourd’hui est le changement climatique, exception faite des l’accélération de ce changement par politiques énergies. Cependant, sous l'impulsion les activités humaines et notamment des techniciens, des actions commencent à l’émission de gaz à effet de serre. Ses émerger dans les documents de planification, incidences sont visibles à l’échelle notamment dans les domaines de l'eau, de la mondiale mais se font de plus en biodiversité, de l'agriculture, des mobilités ou plus ressentir à l’échelle locale et de l'aménagement. dans de nombreux domaines : la santé, les activités économiques, les ressources naturelles, … 19

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


b. L’augmentation de la moyenne des températures L’effet premier de l’émission trop importante de gaz à effet de serre est le dérèglement des températures que traduit l’expression « réchauffement climatique » ou « changement climatique ». Son effet est divers selon la situation géographique et les saisons. Ainsi certains connaitront des hivers plus froids et des étés plus chauds. Sur la base des scénarios proposés par le GIEC en 2014, plusieurs études ont été menées en France, notamment par Météo France afin de traduire à l’échelle régionale, les effets climatiques de ce phénomène mondial. Dans le Grand Est, la hausse des températures est globale sur toute l’année. Elle est déjà visible et ressentie puisque sur la période 1959-2009, la température moyenne annuelle a augmenté de 1,5°C. Une augmentation qui place le climat actuel de Strasbourg au climat de Lyon en 1950 (voir schéma ci-dessous). Cette augmentation devrait se poursuivre, puisque d’ici 20702100 c’est la température de Marseille qui est attendu avec une augmentation de 4°C (voir schéma ci-contre) (Grand Lyon, 2015).

Prévision des températures moyennes à l’horizon 2070-2100 (source : Météo France, 2009 et Grand Lyon)

Évolution des températures de Strasbourg et de Lyon 1921-2014 (source : Météo France, 2015) 20


Cette augmentation de la température est surtout visible sur les deux saisons extrêmes, c’està-dire : - l’hiver, la température a augmenté de +1,7°C en moyenne et le nombre de jours sans-dégel a diminué de moitié durant les 50 dernières années. Une tendance qui va se poursuivre puisque selon les prévisions de Météo France basées sur les scénarios du GIEC entre 24 (si une politique climatique est mise en œuvre) et 38 (si rien n’est fait) jours de gel devraient disparaitre d’ici 2070. Cependant, la hausse des températures n’est pas linéaire. En effet, durant les dernières années, de grands écarts s’observent avec des hivers doux (2006/2007, 2013/2014, 2015/2016) qui ont succédés à des hivers très rigoureux (2005/2006 et 2008/2009).

- 50% depuis 1950

Évolution du nombre de jours sans dégel à Strasbourg, 19512015 (source : Météo France, 2015)

- l’été, la température a augmenté en moyenne de 2°C. Cela se traduit par de forts épisodes de canicule. 2003 est sans doute l’été qui a le plus marqué les esprits puisque ça a été le plus chaud depuis 1959, avec des moyennes dépassant les 4°C par rapport à la normale saisonnière (basée sur la période 1961-1990). 1983 et plus proches de nous 2015, ont également été des étés très chaud. A l’horizon 2070, Météo France prévoit avec les scénarios du GIEC entre 14 et 41 jours chauds supplémentaires.

+ 140% depuis 1950

Évolution du nombre de jours de fortes chaleurs à Strasbourg (T > 30°C), 1951-2015 (source : Météo France, 2015) 21

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


Concrètement, cette hausse des températures va se traduire par des vagues de chaleur qui pourront affecter la santé notamment des populations sensibles (jeunes et âgées) et avec des besoins en eau supplémentaires pour se désaltérer et se rafraîchir. Ce besoin va se corréler avec une sécheresse des sols et une nécessité pour les activités agricoles d’irriguer les plantations nécessiteuses. Selon les territoires, des manques d’eau pourraient survenir et des cours d’eau ne plus être alimentés. En outre, l’augmentation des températures va accentuer un phénomène déjà ressenti qui est l’îlot de chaleur urbain (ICU), c’est-à-dire une hausse des températures en milieu urbain, dûe à l’impossibilité pour

SNCF Infrapôle Parc des Contades

Parc des Remparts

Parc de l’Orangerie

Jardin Botanique

Centre-Ville

Port du Rhin

Gare

Parc du Heyritz

Parc de la Citadelle

D’importants écarts de température en surface à Strasbourg, entre les parcs et les zones minéralisées. (source : Thermographie ADEUS, 2014, USGS Landsat -BD Ortho IGN)

l’air de se rafraîchir durant la nuit. Cette augmentation s’explique par l’absence de circulation de l’air, la multiplication des matériaux réfléchissant l’air chaud (comme l’asphalte), la hauteur des bâtiments, l’absence de végétation, la présence d’activité rejetant de l’air chaud comme les industries ou l’utilisation de la climatisation. Ainsi à Strasbourg, on observe un écart de 12°C pendant une journée chaude entre un parc tel que l’Orangerie et le port industriel du Rhin (voir carte ci-dessus). 22


c. Le bouleversement du grand cycle de l’eau L’augmentation des températures va affecter le grand cycle de l’eau (voir I.1.a.) et modifier les temporalités hydriques. Cumul annuel de précipitations en France Si depuis 1959, il y a une augmentation du cumul annuel de pluie, notamment en automne, les prévisions prévoient peu de changement supplémentaire à l’horizon 2100. Cependant, c’est la répartition de ce cumul sur les saisons qui devrait se contraster, avec des automnes-hivers plus humides et une accumulation de pluies extrêmes très intenses sur de courtes périodes et des printemps-étés plus secs mais assujettis à de forts orages. En outre, la neige devrait se raréfier notamment en altitude où l’augmentation de la température pourrait la faire fondre de manière précoce. La conséquence de ce contraste saisonnier se ressentira sur les cours d’eau ainsi que sur les nappes phréatiques. En effet, la fréquence des pluies extrêmes et la fonte des neiges accumulées vont augmenter le débit des cours d’eau, amplifier les crues déjà connues, mais aussi les ruissellements, les coulées de boues et les remontées de nappe. Par ailleurs, la recharge des nappes souterraines sera rendue difficile par les précipitations extrêmes. En effet, une grande partie des eaux rejoignant le cours d’eau par ruissellement ne pourra s’infiltrer directement, puis au vue des débits des cours d’eau, ne s’infiltrera que très peu dans la nappe d’accompagnement de ces derniers.

Dans le Grand Est : Des Automne-Hiver doux et humides

Des Printemps-Eté chauds et secs

Au contraire, le changement climatique, en allongeant les périodes de sécheresse, pourrait accentuer la baisse de débit et allonger les périodes d’étiage (niveau le plus bas), voire mettre à sec les cours d’eau fragiles et les milieux humides associés. L’augmentation de la température de l’air, va participer à augmenter la température de l’eau et favoriser l’évaporation et l’évapotranspiration. Des petits cours d’eau et des zones humides pourraient disparaitre, fragilisant, de ce fait, la faune et la flore qui y habitent. Des coupures de la trame bleue pourraient donc être observées et les nappes connaîtraient de fortes périodes de tension quantitative. 23

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


En outre, sur les territoires captant leur eau potable sur des cours d’eau sensibles ou des nappes en tension, l’assec sera à la même période que l’augmentation du besoin d’eau (notamment potable et irrigation). Cette pression sur la ressource entrainerait une vulnérabilité sociale et économique due au manque d’eau. Rivières D’ici 2100

Evolution du débit de pointe

Evolution du débit d’étiage (septembre)

(février)

ARPEGE

6 autres modèles

ARPEGE

6 autres modèles

Bruche

[-28% ; -10%]

[-46% ; -20%]

[-11% ; +28%]

[+32% ; +84%]

Fecht

[-27% ; -8%]

[-40% ; -19%]

[+3% ; +39%]

[+47% ; +94%]

Ill (à Strasbourg)

[-18% ; -6%]

[-21% ; -8%]

[-4% ; +24%]

[+34% ; +66%]

Kinzig

[-27% ; -4%]

[-37% ; -14%]

[-5% ; +24%]

[+35% ; +65%]

D’ici à 2100, des amplitudes de volumes d’eau dans les rivières qui s’accentuent en hiver comme à la fin de l’été, d’après l’étude sur les cours d’eau et la nappe alsacienne. (source : S. Lecluse, CNRS, 2014) L’évolution des débits est calculé grâce à des modèles de prévision métérologique par rapport au débit moyen actuel. Le modèle ARPEGE est le modèle le plus utilisé par Météo-France et le CNRS. Les autres modèles permettent de nuancer les résultats.

Les modifications du régime hydrologique vont impacter la qualité des eaux : • en diminuant le pouvoir de dilution des polluants lors des sécheresses. Dans le même temps, ce pouvoir de dilution pourrait être amélioré par l’augmentation du temps de séjour dans les eaux et donc un temps de dégradation plus long, • en augmentant les flux polluants (surfaciques et stockés dans le sol) lors des fortes pluies et crues. Des phénomènes tels que l’eutrophisation (déséquilibre chimique lié à un apport trop important de phosphore et d’azote) ou la photo-activation (modification de la toxicité d’un polluant en fonction des rayons UV reçus) pourraient être observés. Ainsi, le changement climatique va autant impacter la répartition des précipitations et l’accentuation des périodes humides et sèches que la quantité et la qualité des cours d’eau.

d. Les conséquences sur la biodiversité et le vivant Cette quantité et cette qualité des cours d’eau a un impact direct sur la faune et la flore aquatique. Cependant, ce ne sera pas l’unique effet du changement climatique sur la biodiversité. Les milieux et les habitats vont être déséquilibrés par l’augmentation des températures et les mouvements des temporalités hydriques. Ainsi, certains habitats pourraient disparaitre car ils s’assécheront de manière temporaire ou plus prolongée, ou au contraire une nouvelle zone humide pourrait se créer. La faune et la flore 24

Trame verte et bleue Réseau formé de continuités écologiques, terrestres et aquatiques, c’est à dire, des espaces dans lesquels la biodiversité est riche et où les habitats naturels peuvent assurer leur fonctionnement, qui sont connectés pour offrir aux espèces des conditions favorables de déplacement.


ne seront plus adaptées et si elles ne sont pas en capacité de s’adapter ou de se déplacer, elles sont vouées à disparaitre. L’un des exemples les plus manifestes dans le Grand Est est celui des étages montagnards dans les Vosges qui en remontant ferait disparaitre les habitats les plus hauts (voir la répartition du Hêtre ci-contre). Une répartition du Hêtre qui diminue partout en France mais résiste dans le Grand Est (source : INRA, 2004)

En outre, l’évolution du climat va bouleverser les écosystèmes et donc attirer des espèces exogènes qui pourraient être envahissantes ou nuisibles. C’est déjà le cas dans le Grand Est, pour les espèces végétales telles que les renouées, les ambroisies, les balsamines ou les solidages mais aussi les espèces animales comme le ragondin, le rat musqué, l’ouette d’Egypte ou la perche du soleil. Cependant, ces espèces envahissantes peuvent participer à instaurer un nouvel équilibre là où elles s’installent. Les conséquences sur la biodiversité impactent également les activités humaines puisque les vendanges en Alsace comme en Champagne sont plus précoces puisqu’elles ont avancée de 18 jours en 20 ans. Si aujourd’hui les conséquences sont positives elles pourraient à terme poser des problèmes de maturation, de renouvellement des cépages, de véraison et donc de qualité (CGET, 2011). Des effets similaires s’observent sur d’autres cultures comme le blé ou le maïs, mais avec une ampleur moindre.

2000

2100

Présence de Hêtre Très Faible

Très Forte

Cependant, les activités agricoles ne sont pas les seuls usages humains touchés par le changement climatique.

e. L’impact sur les usages de l’eau Les milieux, et parmi eux les milieux aquatiques, les cours d’eau ou les nappes phréatiques sont support d’usages multiples à vocation souvent économique, mais pas seulement. En affectant les capacités de ces milieux, le changement climatique impacte les activités humaines associées à la ressource en eau : 25

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


- DOMESTIQUE : L’eau potable est l’un des premiers enjeux du changement climatique pour l’homme, tant dans sa quantité que sa qualité. Elle est au cœur des usages domestiques par sa nécessité : hydratation, alimentation, soin, nettoyage, sanitaire, … et est également utilisée pour d’autres pratiques comme l’arrosage ou le rafraîchissement en été. Le changement climatique va amplifier les difficultés de recharge des nappes par infiltration (en rivière, en milieu perméabilisé,…) et par conséquent réduire la quantité d’eau disponible dans certaines nappes. Or, dans le Grand Est les nappes fournissent une majeure partie de l’eau potable. Le changement climatique va également modifier le cycle hydrique des cours d’eau qui sont la source d’eau potable des communes en tête de bassin, mais pas seulement puisque de nombreuses communes prélèvent leur eau potable dans les rivières. Lors des étiages annoncés plus longs et plus intenses, ces communes seront plus vulnérables car elles ne pourront plus prélever une quantité d’eau suffisante (Agence de l’eau Rhin-Meuse, 2018). Concernant la qualité de l’eau, le changement climatique peut perturber les cycles d’autoépuration des milieux aquatiques par augmentation de la température de l’eau, prolifération de micro-organismes et saturation par certains éléments chimiques. Ainsi, la capacité d’autoépuration des cours d’eau pourrait être diminuée du fait d’un niveau d’eau plus faible et des habitats moins diversifiés. Certaines nappes seront également plus sensibles aux transferts de polluants (car proches de la surface). Déjà, la contamination par les nitrates et pesticides est généralisée voire importante dans les rivières et les nappes (Agence de l’eau Seine-Normandie, 2016). En outre, les stations d’épurations (STEP) ne sont pas toutes aptes à traiter l’ensemble des contaminants et en laissent filtrer dans le milieu naturel. Lors de fortes pluies, les eaux en amont des stations retournent dans les cours d’eau par surverse avant d’être traitées.

- ÉNERGÉTIQUE : 1. L’hydroélectricité représente 20,3% de la production d’énergie renouvelable (EnR) et environ 4% de la consommation finale brute d’énergie du Grand Est. Le Bas-Rhin et le Haut-Rhin concentrent 60% de la production du Grand Est mais ce sont les Ardennes avec la STEP de Revin (non EnR) qui est la première puissance hydroélectrique régionale (ATMO, 2017 - chiffres clés 2014). Les turbines et les générateurs d’électricité sont dépendants du mouvement de l’eau (chute) et du courant de la rivière. Les périodes d’étiages pourraient abaisser le débit de la chute d’eau et ainsi réduire la capacité de production d’énergie (CGET, 2011). Cependant, l’impact du changement climatique sur la production reste difficile à quantifier. D’autre part, l’accumulation d’eau en amont des barrages afin de maintenir la production en période de sécheresse pourrait entrainer des conflits d’usage, notamment s’il y a restriction sur la ressource. Dans les dernières années, la 26


20,3 % de la production ENR 1 2

4 % de la consommation brute d’énergie 1 2

60 % de la production du Grand Est en ex-Alsace 1 2

production s’est stabilisée et peu de nouvelles centrales ont été ouvertes. En période de fortes pluies, les barrages sont un moyen de régulation du volume d’eau et donc une façon de gérer les inondations tant en amont qu’en aval. 2. La géothermie est une utilisation de l’eau plus récente et moins développée puisqu’elle ne représente que 1,2% des EnR (ATMO, 2017 - chiffres clés 2014). Il existe trois types de systèmes géothermiques : air/air, air/gaz ou eau/eau. Cette dernière consiste à pomper de l’eau dans les aquifères à plus ou moins grande profondeur afin de produire de 1,2 % de la production ENR l’électricité, de la chaleur et/ou du froid. 1 Le changement climatique 2 impacte la recharge des aquifères. Le niveau piézométrique risque de diminuer voire d’atteindre des seuils critiques sur certains territoires. De ce fait, les installations existantes situées sur des territoires où les aquifères sont ou seront en tension seront affectées. Ces territoires sont donc peu propices à de nouvelles installations géothermiques avec un système eau.

D’autre part, le refroidissement de la nappe par la production de chaleur a été constaté même si les effets sur le sol (gel, durabilité des fondations, …) sont encore peu lisibles et contraignants. L’augmentation des moyennes de température due au changement climatique va entrainer des besoins en géothermie de refroidissement plus importants en période chaude. Par conséquent, un effet inversé de réchauffement de la nappe pourrait être observé. Les conséquences sur la stabilité des sols ou la qualité de l’eau sont peu étudiées. (Entretien Dominique Midot, 2018) Outre le changement climatique, des risques de pollution des nappes pourraient dégrader la qualité des eaux mais ceux-ci sont très limités si l’installation est bien réalisée. 27

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


- AGRICOLE : La surface agricole représente 43 % du sol est occupé 43 % du territoire régional (Grand par l’agriculture Est, 2018). Les cultures sont 1 diverses : céréalière, sucrière, 2 élevage, viticulture, maraîchage, fruiticulture, houblonnière, …. Selon leur besoin en eau et leur situation, leur irrigation pourra être affectée, notamment sur les secteurs en tension quantitative accentuée par le changement climatique (étiages, réduction de la nappe et assèchement des sources). De plus, l’agriculture sera touchée par la sécheresse des sols qui sera augmentée par le dérèglement du cycle hydrique (des pluies plus violentes et plus resserrées et donc des périodes sans pluies plus longues). Sur le plan de l’élevage, l’abreuvage des bovins dans les cours d’eau pourrait être affecté par les assecs. La sylviculture pourrait également être menacée par le changement climatique. En effet, la modification du climat peut altérer la croissance et la santé des arbres (recrudescence d’agents pathogènes et de ravageurs) ainsi que la distribution des espèces (INRA, 2004) (voir carte de la répartion des Hêtres). Le temps sylvicole étant long des questions émergent : Les espèces locales plantées aujourd’hui serontelles capables de survivre aux modifications des caractéristiques du milieu ? Fautil privilégier des espèces allochtones possiblement « mieux adaptées » au risque de perdre les espèces locales qui participent à l’identité paysagère et culturelle du territoire ? Comment ne pas aboutir à des forêts mono-spécifiques composées ?

- INDUSTRIEL : Les industries manufacturières, industries extractives et autres sont le 3e employeur dans le Grand Est. La plupart de ces industries utilisent l’eau dans leurs procédés afin de nettoyer, refroidir, diluer, etc. Ce sont des lieux à enjeux pour les économies en eau mais également le traitement des eaux en sortie de procédé et la grande perméabilisation des sites qui posent la question de maitrise des eaux pluviales et de la pollution lors des épandages. Comme pour l’agriculture, c’est principalement la quantité d’eau disponible qui pourrait poser problème, notamment en période d’étiage. L’enjeu de la qualité n’est cependant pas à négliger dans la mise en œuvre des procédés.

28


- SOCIAL : La biodiversité est à l’origine des paysages, cadre d’activité de loisirs, de tourisme et de bien-être. La biodiversité est fragilisée par une anthropisation non adaptée (bâtiments, barrages, digues,…) empêchant la libre circulation des espèces, des sédiments, de l’air, etc. Le changement climatique vient ajouter une menace sur la biodiversité et les activités humaines liées : 1. Le patrimoine (naturel ou bâti) est menacé par l’uniformisation des paysages et la disparition de milieux remarquables comme quotidiens. En effet, le changement climatique modifie les espèces (faune et flore) et les milieux (assèchement, dérèglement de la température, …). En outre, des milieux sont menacés par la construction ou l’abandon. 2. La pêche repose sur des milieux aquatiques riches en diversité piscicole. Or ceux-ci pourront être affectés : • Les étiages annoncés plus longs et plus intenses pourraient empêcher la circulation piscicole, voire réduire à néant l’habitat des poissons. C’est le cas notamment sur les cours d’eau les plus sensibles type phréatiques et les cours d’eau dont le lit mineur est surdimensionné. • L’augmentation de la température de l’eau créerait un nouvel équilibre ne convenant plus forcément aux espèces locales, mais propice à des espèces allochtones et/ou envahissantes.

Présence observée 2000-2008

Habitat actuellement favorable

Habitat potentiellement favorable en 2070 Répartion nulle

Habitat potentiellement favorable en 2070 Répartion illimité

Une répartition de la Truite qui diminue partout en France et notamment dans le Grand Est (source : Explore 2070, MEDDE/Biotope 2013 ) 29

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


3. Les sports nautiques de rivière seront contraints par les périodes d’étiages durant la période d’affluence estivale. Tandis que les sports sur étangs, lacs ou carrières pourraient être empêchés par la qualité des eaux. 4. Le ski concerne le territoire Vosgien. Le réchauffement du climat va réduire la couche neigeuse disponible et donc faire disparaitre l’activité. Des mesures d’adaptation comme les canons à neige ont été prises. Cependant ils nécessitent une recharge suffisante des lacs artificiels, des cours d’eau ou de la nappe, et des températures adéquates. Or ces éléments sont remis en question. Le territoire Vosgien réfléchit déjà à sa reconversion post-ski, notamment avec le VTT afin de maintenir son économie touristique (Entretien Nicolas Jurdy, 2018). Outre les activités humaines qui se sont construites autour, les milieux sont un enjeu pour l’ensemble des organismes vivants qui y trouvent leur habitat. L’intérêt des milieux repose sur leur diversité et leurs caractéristiques propres. Dans l’ensemble, les activités humaines reposent donc sur une quantité suffisante et une bonne qualité de l’eau afin de pouvoir continuer à perdurer. En l’absence de ces conditions, on assisterait à une vulnérabilité croissante du territoire du point de vue socio-économique et sanitaire, ce qui contribuerait à le déstabiliser durablement. Le processus d’adaptation est donc nécessaire pour les maintenir et limiter les conflits entre les usagers.

f. Définitions de notions clés Adaptation, atténuation, résilience, vulnérabilité ou changement de paradigme sont des notions clés lorsque l’on parle aujourd’hui de changement climatique et de réduction des risques. En effet, ce sont ses aspects que l’on cherche à ajuster pour concilier la vie du territoire et le changement climatique.

Changement de paradigme Concept philosophique de modification d’un modèle par révolution des fondamentaux, c’est-à-dire un changement des perceptions. L’expression est souvent utilisée pour le changement climatique. Son émergence est le témoin du dépassement de l’impasse qu’est le changement climatique par l’acceptation de la catastrophe (Quenault, 2016). Le changement de paradigme s’immisce dans les politiques comme une nécessité pour changer les méthodes d’approche et construire le territoire qui sera approprié dans son aménagement, ses modes de vie, ses transports, son économie, … 30

Résister (maitrise des risques)

S’adapter (diminution du danger)

Se préparer (atténuation de la catastrophe) d’après Quenault, 2016


Atténuation Intervention humaine pour limiter ou réduire les gaz à effet de serre (GES) liés aux activités humaines et améliorer les capacités de séquestration des GES (d’après le GIEC). L'objectif est de ralentir le changement climatique.

Adaptation Processus d'ajustement des activités humaines au climat et à ses effets, pour modérer ou éviter les nuisances et exploiter les opportunités bénéfiques. Dans certains systèmes naturels, l’intervention humaine peut faciliter cet ajustement (d’après le GIEC). L'objectif est de construire une société durable. L’émergence du concept d’adaptation dans les politiques publiques est une forme de reconnaissance de la fatalité du changement climatique, prônant la préparation à ses effets, voire l’acquisition de bénéfice. Cependant, le concept d’adaptation repose sur des prospectives mouvantes et des scénarii incertains ce qui a pour effet l’éclosion d’une pensée basé sur l’imagination, l’inventivité et l’audace (Rudolf, 2016). On distingue deux types d’adaptation (Magnan, 2012) : 1. l’adaptation environnementale qui a pour objectif : • la non-dégradation de l’environnement direct et des environnements voisins, • le soutien – ou maintien – de la fonction protectrice des écosystèmes face aux aléas naturels actuels et à venir, • la prise en compte des incertitudes sur les impacts du changement climatique et sur la réaction des écosystèmes, la valorisation des projets participant à la résilience et à la réduction de la vulnérabilité. 2. l’adaptation économique qui a pour objectif : • la cohérence vis-à-vis des caractéristiques sociales et des valeurs culturelles locales, • la prise en compte et valorisation des compétences et savoirs locaux, ou l’appel à de nouvelles compétences appropriables par la population, • le support à la création – ou au maintien - d’emplois, • le soutien à une relative diversification des activités et leur évolution sous l’effet du changement climatique afin que toutes ne soient pas menacées par les mêmes aléas.

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Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


Vulnérabilité Caractère de fragilité face à un évènement extérieur tel que l’aléa climatique et les risques naturels. Le degré de vulnérabilité d’un territoire ou d’une population est évalué par rapport à son exposition aux aléas et sa sensibilité à l’évènement et ses conséquences ; par conséquent elle ne réfère pas aux causes (Rudolf, 2016). L’un des objectifs de l’adaptation est la diminution de la vulnérabilité en réduisant la sensibilité aux aléas mais aussi en identifiant les causes et les actions qui permettent de s’en protéger. Une étude de vulnérabilité au climat permet d’imaginer comment les territoires réagiront demain à l’aléa climatique et ainsi, de cibler les points prioritaires d’adaptation.

Exposition aux aléas climatiques

Vulnérabilité

Sensibilité

Résilience Capacité d’un système à résister aux perturbations extérieures pour continuer à exister ; autrement dit, la capacité à absorber une perturbation puis à récupérer ses fonctions à la suite de celle-ci. L’objectif est de pouvoir anticiper, minimiser, réagir, rebondir et évoluer (Lhomme et al., 2012). Il ne s’agit donc pas tant de prévenir les aléas mais plutôt de se préparer à réceptionner et gérer la crise pour amoindrir les aléas. (Rudolf, 2016) La recherche de la résilience et l’anticipation des changements de long terme permettra de s’avancer vers l’adaptation.

Résilience

32

Adaptation

Anticipation


3

Les inondations entre préoccupation historique et augmentation du risque a. De la crue à l’inondation : motif d’un phénomène désastreux surface durant une période plus ou moins La crue est la période de fort débit durant longue avant infiltration ou évaporation. laquelle le niveau de l’eau s’élève suite à des pluies abondantes ou à la fonte des neiges. La saturation des réseaux est l’unique cause Durant cette période, le cours d’eau peut sortir non-naturelle des inondations. En effet, de son lit mineur pour se répandre dans son lit lors de fortes pluies, les réseaux urbains majeur et submerger les territoires avoisinants, récupérateurs d’eaux de pluies peuvent se on parle alors d’inondation. Aujourd’hui, saturer et ne plus accueillir et emporter les les zones d’expansion préférentielle sont eaux vers la station appelées zones d ’a s s a i n i s s e m e n t . d’expansion des L’eau reste alors en crues (ZEC). Elles surface et ruisselle font parties des jusqu’à trouver un zones inondables endroit où s’infiltrer, qui regroupent les ou pouvoir de nouveau territoires sujets rejoindre le réseau à deux autres (Aujolet, 2017). p h é n o m è n e s provoquant des inondations : les Quel que soit l’origine remontées de nappes du phénomène, les et la saturation Le Hameau de Ratzamhausen, Inondation de l’Ill, dommages sur les des réseaux janvier 2018 (source : Vanessa Meyer, DNA) biens et les personnes d’assainissements. peuvent être nombreux : de l’inondation des caves ou des rez-de-chaussée, au blocage Les remontées de nappes sont dues à une des routes et donc du fonctionnement général saturation de la nappe. Ce processus arrive des territoires. Selon les débits, l’inondation régulièrement si le toit de celle-ci est proche peut également avoir des répercussions du sol comme c’est le cas sur la nappe sanitaires (remontées des eaux usées, …), d’Alsace. Les phénomènes de nappe peuvent sociale (décès, impossibilité de vivre au également être dus à une saturation du sol en domicile, …) et économique (assurance, arrêt eau qui ne peut alors plus infiltrer les nouvelles d’industries, …). pluies. Dans les deux cas, l’eau reste à la 33

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


b. L’organisation du territoire régional face aux inondations Ces protections sont depuis 1995, complétées par de la réglementation et des programmes qui interdisent les constructions en zones inondables et prévoient de nouvelles actions pour réduire la vulnérabilité comme la reconquête de ZEC ou l’éducation à la culture du risque.

Face à ces risques, les communes essayent de se protéger. Historiquement, elles se sont surtout protégées des crues à travers des digues et des remparts afin de garder la crue dans son lit et l’empêcher d’entrer dans la ville. Qu’elles soient en béton ou en terre, ces digues ne sont pas toujours une protection efficace. En effet, elles peuvent céder sous la force du débit ou bien, plus en aval augmenter l’aléa dans une autre commune. Sur le territoire régional, de nombreuses infrastructures non répertoriées, existent pour endiguer les cours d’eau et protéger les habitations qui existaient ou qui se sont construites derrière, « à l’abri » du risque.

La réglementation la plus connue est le PPRI (Plans de Prévention des Risques Inondation), né de la Loi Barnier de 1995. Il permet de maîtriser l’urbanisation en zones inondables, et donc de limiter l’exposition aux risques des personnes et des biens (Loi Barnier, 1995). Le PPRI identifie les zones à risques et leur niveau d’aléa afin d’interdire les constructions où l’aléa est le plus fort et de préserver les ZEC pour ne pas aggraver le risque, ou en provoquer de nouveaux. L’objectif est de réduire la vulnérabilité aux inondations. Le PPRI constitue des servitudes d’utilité publique et est annexé au PLU (Plan Locale d’Urbanisme) (Lajartre, 2016).

L’une des spécificités du Grand Est est la présence sur son territoire des quatre grands Lacs de Seine construits de 1974 à 1990. Ce sont des lacs réservoirs visant à protéger Paris des crues de la Seine et de ses affluents en écrêtant les crues de novembre à juin, puis à soutenir leurs étiages c’est-à-dire à alimenter leur débit lorsqu’il est au plus bas afin notamment de maintenir le trafic fluvial (Grand Est, 2018).

1974

1990

Construction des lacs de Seine

Cependant, le PPRI s’intéresse principalement

1995

2007

2018

Loi Barnier PPRI

Directive eurropéenne inondation

PAPI 3 GEMAPI

aux inondations provenant de crues. La directive européenne inondation de 2007, oblige l’état français à réduire toutes les conséquences d’inondation de tous types (crues, ruissellements et remontées de nappes) notamment au regard des évolutions du risque dû au changement climatique. En France, elle se traduit en trois phases : l’évaluation des risques et le classement de certains territoires en TRI, l’élaboration d’une planification (PGRI) et la définition d’une stratégie (SLGRI). 1. Les TRI définissent des Territoires à Risques Importants d’inondation à partir de critères nationaux de caractérisation du risque. Ils désignent les sites où les enjeux notamment humain et économique sont les plus importants et où les acteurs doivent se mobiliser en priorité. Il existe 15 TRI dans le Grand Est (voir carte de gestion du risque inondation). 34


2. Les PGRI (Plan de Gestion des Risque Inondation) sont la déclinaison locale de la directive inondation, définis à l’échelle des grands bassins qui sont divisés en districts hydrographiques, par l’État. Ils ont une portée juridique et directe sur les PPRI, les documents d’urbanisme et les programmes de gestion de l’eau. Ils visent, à travers des dispositions, à réduire la vulnérabilité, augmenter la résilience, favoriser la coopération et développer la connaissance et la culture du risque.

Gestion des inondations Programme d’Actions de Prévention des Inondations (PAPI) PAPI complets PAPI d’intention PAPI en émergence Territoires à Risques Importants d’Inondation (TRI) Périmètres des Stratégies Locales de Gestion des Risques Inondation (SLGRI)

Ouvrages majeurs de protection Lacs réservoirs de protection pour le bassin de la Seine Ouvrages transfrontaliers de protection du Rhin Cours d’eau principaux Voies navigables Départements Région Grand Est

Le Grand Est est couvert par de nombreux plans et stratégies pour gérer le risque inondation notamment à l’est. (source : SRADDET (document de travail), Grand Est, Acteon. Données DREAL, Agences de l’eau, BdCartage IGN )

3. Les SLGRI (Stratégie Locale de Gestion de Risques d’Inondation) sont élaborées entre les parties prenantes pour chaque TRI, élargies au bassin de vie. Ils fixent des objectifs de réduction des impacts négatifs des inondations en cohérence avec le PGRI. Les stratégies sont ensuite mises en œuvre et animées à travers des PAPI (Programme d’Action et de Prévention des Inondations). Les PAPI sont des outils de prévention portés par les acteurs locaux, qui s’appuient sur des solutions environnementales pour gérer les inondations. Ils existent depuis 2002. Depuis 2018, c’est le cahier des charges PAPI 3 qui est applicable. Il vise à une meilleure intégration du risque dans les politiques publiques et notamment l’aménagement du territoire, l’urbanisme et l’environnement à travers 7 axes (CEPRI, 2018) : 35

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


• • • • • • •

amélioration de la connaissance et de la conscience du risque, surveillance, prévision des crues et des inondations, alerte et gestion de crise, prise en compte du risque d’inondation dans l’urbanisme, réduction de la vulnérabilité des personnes et des biens, ralentissement des écoulements, gestion des ouvrages de protection hydrauliques.

Afin d’améliorer le programme des PAPI, les acteurs peuvent intégrer la compétence GEMAPI (Gestion des Milieux Aquatiques et la Prévention des Inondations). Elle est depuis le 1er janvier 2018, devenue compétence obligatoire des EPCI (établissement Public de Coopération Intercommunale) mais peut être déléguée à un organisme supra tels que les Etablissements Publics Territoriaux de Bassin (EPTB). L’objectif de la GEMAPI est la gestion des risques existants pouvant s’aggraver avec le changement climatique (Nedey, 2018). Elle repose sur : • • • •

l’aménagement du bassin hydrographique ou l’une de ses fractions, l’entretien et l’aménagement des cours d’eau, canaux, lacs ou plans d’eau, la défense contre les inondations (et contre la mer), la protection des sites, des écosystèmes aquatiques, des zones humides et des formations boisées riveraines.

D’autre part, dans l’optique d’optimiser la gouvernance eau et risque inondation, la Région Grand Est a acquis, depuis le 21 juin 2018, la compétence d’animation et de concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques. Elle peut donc participer à la dynamique de la GEMAPI notamment à travers sa politique d’aide (voir III.3.b). Les actions réalisées jusqu’à maintenant participent à anticiper et réduire le risque sur certains territoires. Cependant, nombre d’endroits sont encore exposés au risque et cette vulnérabilité risque de s’intensifier au regard du changement climatique.

c. Les évolutions futures des inondations au regard du changement climatique L’ampleur de l’impact du changement climatique sur le phénomène inondation est incertain car l’événement est difficile à prévoir tant dans son amplitude que dans sa fréquence. Cependant, comme vu précédemment, l’un des résultats attendus du changement climatique est le renforcement des pluies. Le cumul annuel changera peu

mais c’est sa périodicité qui évoluera, avec des pluies plus intenses et plus fréquentes sur de courtes périodes. Ainsi, les crues seraient plus violentes et la saturation des nappes et des réseaux seraient potentiellement plus rapides résultant à plus de ruissellements, de coulées de boues et d’inondation.

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Superposer à la carte de gestion du risque tel qu’actuellement, la carte de vulnérabilité permet de visualiser les territoires qui sont et seront les plus exposées aux inondations de crues (Grand Est - DREAL, 2018). C’est le cas des bassins de la Meuse notamment, qui sont déjà couvert par un PAPI. Mais il existe également des territoires qui vont s’avérer de plus en plus vulnérables comme par exemple le bassin de la Lauch au sud-ouest de Colmar ou de certains bassins encore non-identifiés en Seine-Normandie (Agence de l’eau SeineNormandie, 2016). Sur le bassin Rhin-Meuse, la majorité des territoires vulnérables aux inondations sont compris dans un SLGRI, ce qui permet d’être déjà vigilant sur les risques et de mener une action préventive dès maintenant.

De ce fait, les répercussions sur les populations et leurs biens (vulnérabilité sociale) ainsi que sur l’économie du territoire (vulnérabilité économique) seraient plus conséquentes. En outre, les coûts de réparation et de dédommagement, suite aux inondations fluviales, pourraient coûter plusieurs dizaines de milliards d’euros par an à la France (CEPRI, 2014). En 2016, dans le cadre de la rédaction du plan d’adaptation et d’atténuation au changement climatique du bassin Rhin-Meuse, une étude de vulnérabilité intrinsèque a été menée par la DREAL Grand Est et la Région. Ils croisent des informations d’exposition aux inondations par crue et de sensibilité pour déterminer la vulnérabilité des territoires aux inondations.

Vulnérabilité aux inondations vingtennales Faible Moyenne Forte Très

Gestion des inondations Programme d’Actions de Prévention des Inondations (PAPI) PAPI complets PAPI d’intention PAPI en émergence Territoires à Risques Importants d’Inondation (TRI) Périmètres des Stratégies Locales de Gestion des Risques Inondation (SLGRI)

Ouvrages majeurs de protection Lacs réservoirs de protection pour le bassin de la Seine Ouvrages transfrontaliers de protection du Rhin Cours d’eau principaux Voies navigables Départements Région Grand Est

Superposition de la cartographie de gestion du risque inondation (diagnostic SRADDET) et de la carte de la vulnérabilité aux inondations face au changement climatique (étude vulnérabilité intrinsèque sur le bassin Rhin-Meuse). 37

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


4

La ressource en eau entre qualité et quantité : un intérêt vital

a. Les sécheresses : tension périodique sur la ressource Aujourd’hui, certaines ressources sont déjà en tension quantitative. L’AESN a défini des masses d’eau souterraines en déséquilibre quantitatif fort dans le: • Territoire de Reims, • L’Ornain, • Sompuis, • L’Arduisson

Les sécheresses qui risquent de s’intensifier au vu des perturbations hydrologiques et de l’augmentation de la température en période estivale, vont entrainer de nombreuses tensions sur la ressource. En effet, la sécheresse va entrainer des étiages et des assecs de cours d’eau, mais également des usages de l’eau intensifiés entraînant des pompages plus important sur la nappe ou les cours d’eau. Ces pompages qui ont pour vocation de rafraîchir, de s’hydrater, mais aussi d’irriguer les cultures risquent peu à peu d’abaisser le toit de la nappe qui a, de plus, des difficultés à se régénérer (Martin, 2004).

et en déséquilibre quantitatif moyen dans: • Le sud de l’Aire, • La nappe entre Nogent-sur-Seine et Troyes, • L’ouest de Châlons-en-Champagne. Mais cela touche également des bassins de Rhin-Meuse, en de moindre mesure. La nappe des GTI (Grès du Trias Inférieur) est la nappe régionale la plus vulnérable quantitativement notamment du fait du prélèvement pour la commercialisation d’eau en bouteille de la marque Vittel (Nestlé). (Grand Est - DREAL, 2018).

En résultat, des tensions entre les usagers risquent d’apparaître pour partager la ressource de manière équilibrée, sans vider la nappe ou aggraver les ruptures de continuités écologiques. Cette tension pose la question d’usages prioritaires et de l’accès à l’eau potable pour les populations les plus fragiles. En effet, quels usages arrêter ou restreindre ? Pourrait-on arrêter d’irriguer une culture ou d’alimenter une entreprise au risque de faire chuter l’économie et augmenter la vulnérabilité économique ? Comment garantir à tous un accès à l’eau potable tout en limitant les usages inopportuns ?

La gouvernance de la ressource en eau et des comités d’usagers doivent être mis en place. Des solutions doivent également être trouvées pour adapter le territoire à la possible échéance du manque d’eau et de fait à l’adaptation des cultures à moins d’irrigation, aux économies d’eau dans les procédés et à l’accessibilité à tous à l’eau potable. 38


b. Les pollutions : une bataille quotidienne Cependant, la tension sur la quantité d’eau et la possibilité d’un manque d’eau n’est pas le seul enjeu de la ressource en eau. En effet, la qualité de l’eau est un fort enjeu pour pouvoir continuer l’ensemble des usages. La problématique est déjà forte sans la question du changement climatique or cela risque d’influer la qualité des réserves que sont les nappes et les cours d’eau.

• Une partie de ces polluants se retrouve dans le réseau d’assainissement de la ville (voir I.1.b.) : 1. Par le réseau d’eau de pluie : les contaminants seront amenés dans des bassins de filtration ou de lagunage, où les végétaux décantent et filtrent la majorité d’entre eux. L’eau ainsi partiellement dépolluée rejoint le cours d’eau.

Aujourd’hui, les eaux sont dégradées par des polluants qui s’infiltrent dans le sol et rejoignent la nappe. La grande majorité de ces pollutions est connue (Grand Est, exposition) :

2. Par le réseau d’eaux usées ou unitaire : l’eau polluée s’écoule vers les stations d’assainissement. Cependant, souvent celles-ci ne sont pas adaptées à l’ensemble des polluants. De ce fait une partie rejoint les cours d’eau sans avoir été filtrée.

1. les pollutions diffuses : • les produits phytosanitaires, • l’apport de nitrate par épandage, • les contaminations issues des exploitations minières (fermées ou en activité), • les produits chimiques contenus dans la pharmaceutique, la cosmétique, etc.

Dans la majeure partie des cas, l’eau et les polluants finissent par s’infiltrer dans le sol, sur place ou dans la nappe d’accompagnement du cours d’eau :

2. les pollutions ponctuelles : • le déversement, le rejet, l’élimination de produits toxiques et les métaux lourds, • le rejet de nitrate et des stations d’épuration, • les fuites, pertes ou émanations de gaz, d’huile, d’hydrocarbure, • les fosses à purin, • les friches industrielles et les anciennes déchetteries de plein air (pollution des sols), • les solvants, etc.

1. Si la couche de sol entre la surface et la nappe est suffisante, la majeure partie des polluants est retenue dans les premières couches du sol, et ne rejoint pas la nappe. 2. Si la couche est très fine (<0.5m), ce qui est le cas sur la nappe du Rhin supérieur, cette capacité de filtration est diminuée et le risque de pollution de la nappe est augmenté (SAGE Ill-NappeRhin, 2015).

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Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


A l’échelle du Grand Est, 70% des masses d’eau souterraines sont en état médiocre (Grand Est, 2018). A savoir que le bon état est atteint si la quantité (équilibre entre prélèvements et alimentation de la nappe) et la qualité chimique de l’eau sont bonnes. Cependant, les résultats sont disparates dans la région. Ainsi, sur le territoire de Rhin-Meuse, 65% des eaux souterraines avaient un bon état chimique, en 2015. Une évolution allant dans le bon sens. Cependant, des zones ont une concentration de nitrates supérieure aux seuils de potabilité. C’est le cas notamment sur la nappe phréatique du Rhin supérieur. La nappe affleurante y est très vulnérable

Avec le changement climatique, l’augmentation des espèces indigènes ou invasives pourrait entrainer une recrudescence de l’usage des produits phytosanitaires, tandis que certaines espèces participant à la filtration de l’eau pourraient disparaitre. En outre, la modification des régimes hydrologiques, notamment les étiages, ainsi que l’augmentation de la température de l’eau vont diminuer le pouvoir de dilution, voire d’épuration. Enfin, la concentration des ruissellements chargés d’effluents qui se déversant dans les rivières risque d’augmenter la pression polluante.

Exemple de lecture :

La déséthyl-atrazine est un métabolite (hachure) d’une substance active interdite. Elle est quantifiée sur plus de 70% des 529 points de mesures et dépasse les limites de qualité de 0,1µg/l sur 2,5% d’entre eux.

Interdiction d’usage

Fonctions

Exemples d’usage sur culture

Nappe phréatique d’Alsace, Fréquences de quantification et dépassements de la limite qualité (0,1µg/l) des 25 molécules les plus quantifiées en 2016 (sur les 113 substances présentes dans la liste

de surveillance de l’état chimique - selon la directive eau souterraine 2006/118/CE) (source : Ermes-Rhin, 2018)

40


cela se traduit par : 44% sur le bassin RhinMeuse, 39% sur le bassin Seine-Normandie (pas de données spécifiques Grand-Est) et 52% sur le bassin Rhône-Méditerranée Corse un chiffre qui s’abaisse à 33% en BourgogneFranche-Comté (Région voisine auquel le Grand Est est rattaché sur le bassin RMC). A noter que l’état hydromorphologique (lits, berges et continuités) participe également au bon état ou à la dégradation des eaux, et non uniquement les contaminants.

aux contaminations polluantes comme le démontre l’inventaire de qualité des eaux de 2016 (Ermes-Rhin, 2018). Si la concentration en nitrate s’est stabilisée, la présence de pesticides reste forte et perdure dans la nappe même après leur arrêt d’utilisation (voir graphique «Ermes»). Ainsi, 282 captages sont dégradés notamment par la pratique agricole (nitrates et/ou pesticides) et sont identifiés comme prioritaires. Sur le bassin Seine-Normandie, le bon état chimique du bassin atteint seulement 28% compte tenu de la forte inertie des masses d’eau. Sur le Grand Est, la grande majorité est en état médiocre stable à cause des nitrates ou des pesticides. Entre Chaumont et Reims la tendance de la pollution par les nitrates est à la hausse. Seules les masses d’eau le long de la Meuse, au nord du Grand Est, sont en transition vers un bon état.

Ainsi, les pollutions sont principalement quotidiennes et diffuses. Elles proviennent d’usages agricoles et industriels mais pas seulement. Nos comportements et usages quotidiens participent également à polluer les ressources en eau. Prévenir les pollutions diffuses, quelqu’en soit la source, restaurer et assurer le bon fonctionnement des milieux aquatiques et humides permettra d’améliorer le bon état de l’eau, et la bonne santé des milieux participera à faire face aux changements climatiques attendus.

Quant aux eaux superficielles, seulement 32% des cours d’eau sont en bon état chimique (43% à l’échelle nationale). A l’échelle des bassins

c. Les évolutions futures de la ressource en eau au regard du changement climatique Au regard du changement climatique, l’avenir de la ressource en eau est difficile à prévoir. Il apparait que les tendances actuelles s’accentueront si rien n’est fait, quelque soit l’évolution du climat. De nouveaux polluants vont s’ajouter à ceux déjà présents dans la nappe, le sol et les rivières et les pressions anthropiques vont s’accentuer au vu de l’augmentation démographique et si aucune action n’est faite autour des consommateurs d’eau. L’accentuation de ces tendances est due à l’augmentation moyenne des températures et à la perturbation du régime hydraulique mais les processus anthropiques

ont également un rôle fort. De la même manière que pour les inondations, l’étude de vulnérabilité intrinsèque du bassin Rhin-Meuse montre certains sous-bassins plus vulnérables que d’autres. Juxtaposée à la carte des tensions quantitatives du bassin Seine-Normandie, on peut observer les territoires du Grand Est où des problématiques de quantité d’eau seront les plus importantes avant même de prendre en compte l’évolution des consommations d’eau. En effet, l’étude se fait par rapport aux consommations actuelles (voir la carte «nappes souterraines»). 41

Chapitre 1. Les enjeux de l’eau dans la ville et les territoires habités


Bassin Seine-Normandie Déséquilibre quantitatif des eaux souterraines Moyen Fort

Bassin Rhin-Meuse Vulnérabilité à la disponibilité en eaux souterraines Faible

Très

Des nappes souterraines dont la disponibilité en eau est menacée. (source : fusion de deux cartes Seine-Normandie, SDAGE, 2016 - Rhin-Meuse, Étude de la vulnérabilité intrinsèque des territoires, 2018)

Les observations faites dans le passé montrent que c’est lors des canicules, lorsque les nappes sont le plus en tension, car à leur niveau le plus bas, que la quantité d’eau prélevée est la plus importante. Cette faible quantité devient problématique lorsque le printemps a également été sec puisque c’est à cette période que la recharge des nappes et la plu importante (BRGM, 2018).

Évolution des volumes minimum mensuellement prélevés dans le bassin versant de la Barbuise et en bordure (source : BRGM, DDAF, 2004)

C’est pourquoi, les stratégies d’aménagement, ont besoin d’évoluer dès à présent, par exemple sur l’emplacement des consommateurs d’eau ou la gestion des espaces publics, afin de préserver tant la qualité de l’eau que la quantité. 42




La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation Chapitre 2


1

L’anthropisation du territoire : un chemin de l’eau contraint La Région Grand Est, tout les autres Régions françaises, ressent déjà des changements. Leur lien avec le changement climatique n’est peut-être pas évident ou prouvé, toujours est-il que ces bouleversements affectent les zones habitées, rurales comme urbaines, et donc leurs habitants. Agir sur la stratégie d’aménagement, c’est proposer des Anthropisation moyens d’habiter et de faire la ville autrement, ainsi que trouver des réponses aux problématiques de l’anthropisation qui créent, Transformation voire accentuent, la vulnérabilité. d'espaces, de paysages L’une des grandes vulnérabilités des territoires vient de l’eau qui coule à sa surface. Comme on a pu l’expliquer précédemment, l’eau engendre des dégâts qui sont amplifiés par l’anthropisation. En effet, l’urbain, le rural et la nature forment un cercle dont les changements entrainent des répercussions d’un milieu à l’autre. La présence de l’eau pourrait donc être mieux vécue si l’aménagement accompagnait l’eau plutôt que la contraignait.

ou de milieux naturels par l'action de l'homme. La déforestation, l’élevage, l’urbanisation et l’activité industrielle sont parmi les principaux facteurs d’anthropisation.

a. La gestion des eaux : la saturation des réseaux séparatifs, obligatoires depuis plusieurs années dans les opérations d’aménagement, finissent par rejoindre le réseau unitaire plus ancien et toutes les eaux sont mélangées sans distinction (CGEDD, 2017). Ainsi, le volume qui passe par le traitement complexe des eaux usées, est augmenté alors même que certaines eaux ne le nécessitent pas.

Aujourd’hui, le petit cycle de l’eau (I.1.b.) rend l’eau potable, récolte eaux usées et eaux pluviales et assinit. Cependant, il pose des problématiques d’inadaptation, puisque toutes les eaux sont conduites en station d’assainissement, qu’elles nécessitent un traitement ou non. Si les réseaux sont uniformément séparatifs, le traitement des eaux ne sera pas le même entre un simple bassin de lagunage pour les eaux de pluies et un traitement plus complexe pour les eaux usées. Cependant, dans beaucoup de communes les réseaux d’eau

En outre, les réseaux n’ont pas tous été diamensionnés pour récolter la quantité d’eau qu’ils reçoivent aujourd’hui, durant les fortes pluies, ou celle qu’ils recevront à l’avenir. De fait, l’eau des nouveaux quartiers 46


de la commune s’ajoute au volume déjà reçu auparavant et cela crée une saturation des réseaux dès que le volume maximum est atteint. L’eau ne pouvant s’écouler dans le dispositif actuel se retrouve en surface et ruisselle. Quant

à

l’eau

qui

arrive

en

d’assainissement, le volume acquis durant les fortes pluies peut ne pas être recevable et traitable par la station. Dans ce cas, le bassin de rétention déborde et, si aucune zone tampon n’est prévue, l’eau non traitée se déverse directement dans le cours d’eau, engendrant les problèmes de qualité évoqués en partie I.4b.

station

b. L’imperméabilisation : ruissellement

L’imperméabilisation du sol influe sur le ruissellement et l’infiltration de l’eau (d’après coastal.ca.gov) 47

Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


Sur les surfaces minérales Les eaux de pluies qui ne peuvent s’infiltrer, et rejoindre les réseaux d’assainissement déjà saturés, ainsi que celles qui débordent de ces mêmes réseaux et se retrouvent en surface, ruissellent sur les surfaces imperméables. Elles s’écoulent par gravité en cherchant un endroit où s’infiltrer. La problématique des villes est l’immensité de leur surface artificialisée. L’eau ne trouvant pas d’échappatoire coule et forme des cours d’eau temporaires avec des débits élevés qui se glissent partout où la topographie le permet. Les dégâts de ces ruissellements sont identiques à ceux des crues, avec des

inondations par eaux usées possibles. Si les ruissellements rejoignent le cours d’eau, celui-ci va se gonfler, augmentant les risques à l’aval. Ce phénomène est moindre dans les espaces où l’eau peut s’infiltrer là où elle tombe. De cette manière, elle ne vient pas s’ajouter aux eaux de surface. Ainsi, lorsque les eaux de pluie sont déconnectées du réseau d’assainissement, elles ne saturent pas les avaloirs qui sont déjà à leur capacité maximale. C’est ce qui est appelé « zéro rejet » ou « infiltration au plus près » (voir le schéma «imperméabilisation») .

Sur les surfaces dont la terre est à nu Un phénomène similaire à celui du ruissellement se produit dans les zones agricoles : les coulées de boue. La terre tassée et à nu, parfois striée dans le sens de la pente, n'est plus perméable. L'eau s’écoule vers le bas, accélérée par les rainures du labourage. Elle entraine avec elle la terre créant une boue qui va dévaler jusqu'à un obstacle, parfois les habitations.

Coulées de boue et ruissellements peuvent être regroupés sous un terme unique : celui d'eau non maîtrisée. Ces eaux ont la caractéristique commune de ne pouvoir s’infiltrer, de rechercher un autre lieu où le faire et d’être dépendant de la gravité. Le parcours emprunté par l’eau lors de cette recherche est appelé « chemin préférentiel » ou « chemin de l’eau ». Il est souvent identique d’une inondation à l’autre car dépendant de la topographie, des matériaux et des obstacles. Des réponses fortes et simples, agissant sur ce chemin de l’eau comme la désimperméabilisation, la nonimperméabilisation ou la végétalisation participent à réduire la vulnérabilité, en même temps qu'elles permettent au sol de retrouver ses services écosystémiques.

Des solutions de ralentissement grâce aux haies, aux bandes enherbées ou à la couverture des sols en hiver peuvent être trouvées mais sont encore peu développées (Chambre d’agriculture, visite 2018) et sont le fruit d’un long processus de compréhension et d’appropriation du risque engendré, par les agriculteurs, les habitants et les élus .

c. Canalisation des cours d’eau : l’inefficacité d’un système Les cours d’eau et les milieux aquatiques ont une longue histoire avec l’homme qui les a assagis, contrôlés ou fait disparaitre

selon ses besoins et ses usages. En effet, de nombreuses villes se sont construites près de l’eau, source de vitalité et de fertilité des 48


sols. Elles se sont construites légèrement éloignées, en hauteur ou entourées de rempart pour se protéger des crues. Lorsque les villes se sont étendues, de nombreuses zones naturelles d’expansion des crues ont disparu, comme par exemple les zones humides ou les marais qui servaient de zone tampon. La surface à protéger s’est agrandie, et divers ouvrages de protection ont vu le jour pour que l’eau ne fasse pas de dégâts dans les zones construites. La canalisation a été l’un des outils de protection. Sous le terme de canalisation, plusieurs aménagements sont évoqués (Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, 2018) :

• Le bétonnage des berges, voire du fond, • Le dragage pour approfondir le lit, • L’endiguement pour limiter le débordement des eaux, • La suppression des méandres, • Le recalibrage, c’est-à-dire la modification de sa section (profondeur-largeur) afin d’augmenter sa capacité.

La canalisation des cours d’eau s’est faite pour trois raisons : 1. Dans un premier temps pour faciliter la navigation fluviale afin de permettre de contenir un volume d’eau dans une section suffisante pour les bateaux et leur cargaison. 2. Dans un second temps, la canalisation s’est faite pour des questions de réduction de l’emprise de l’eau. En milieu rural, l’objectif était de simplifier les parcelles agricoles et d’évacuer rapidement les eaux de printemps afin de limiter l’inondation des cultures. En outre, chaque mouvement du lit mineur décalait les délimitations parcellaires. En milieu urbain, le but était de confiner la rivière à son lit mineur, alors endigué pour limiter les débordements et construire au plus près de l’eau, sans grignoter les terres agricoles. En effet, il était plus facile de construire au bord d’un cours d’eau canalisé et bétonné plutôt que près d’une rivière mouvante, occupant l’ensemble de son fuseau de mobilité et aux rives moins stables et moins constantes. 3. Dans un troisième temps, la canalisation des cours a également pu permettre la mise en place de centrales hydroélectriques, pour produire de l’énergie, et de plusieurs barrages visant à réguler le volume d’eau s’écoulant, ou à alimenter des dérivations pour des moulins ou des chemins d’irrigation (France Nature Environnement, 2010).

La problématique qui se pose aujourd’hui sur ces cours d’eau canalisés est l’efficacité ponctuelle de ces aménagements et ouvrages. Dans de nombreux cas, la canalisation, si elle a réussi à résoudre les problèmes à un endroit et à un temps t, les aggrave plus loin ou en cas de pluie forte et prolongée.

En effet, lors des crues, l’eau augmente en volume et en vitesse sans être arrêtée par les méandres qui n’existent plus. De plus, dans un angle droit ou dans une zone de transition (linéaire/méandre), le dépôt de sédiment va réduire les capacités du chenal et accentuer le risque d’inondation. 49

Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


Enfin, les barrages et seuils bloquent la circulation piscicole et le transit sédimentaire.

D’autre part, la construction d’habitations près des cours d’eau va limiter les zones d’expansion des crues, puisque ce sont des zones qui vont être protégées par endiguement, et donc inaccessibles à l’eau. La réduction des zones d’expansion des crues empêche le cours d’eau de se décharger en amont des villes et ainsi de ralentir son débit et sa hauteur d’eau. Au contraire, le cours d’eau s’accélère et aggrave les dégâts matériels et humains. En aval des infrastructures de protection, les populations et les territoires sont exposés à un risque accru d’inondation, tandis que la protection effective de l’ouvrage est contestable.

Les enjeux de restauration des cours d’eau sont donc nombreux mais font majoritairement face à des problématiques d’emprise parcellaire. Le fuseau de mobilité disparu, la place du cours d’eau est diminuée et fortement contrainte. La possibilité de redonner à la rivière un espace de liberté et de la reméandrer est donc limitée par la maitrise foncière et la présence d’éléments Ripisylve construits immobiles, ainsi que par la connaissance Élément écologique composé des dynamiques de l’ensemble de la végétation h y d r o m o r p h ologiques située sur les berges, arbres et du cours d’eau et des arbustes compris. En paysage, conséquences d’une la ripisylve est un marqueur fort nouvelle modification de la présence d’un cours d’eau sur les rives, le fond, la puisqu’elle permet de révéler sa population piscicole, les présence de manière verticale. sédiments, …

Par ailleurs, la biodiversité est appauvrie. En effet, l’absence de fond et de berges naturelles limite la présence d’habitats et de refuges pour de nombreuses espèces, notamment lorsque la ripisylve est supprimée. La suppression massive des ripisylves par l’artificialisation, en ville comme en milieu rural, induit la disparition d’habitat et donc la fragilisation d’espèces animales et végétales ainsi que le réchauffement de la température de l’eau (Agence de l’eau Rhin Meuse, 2018). De plus, une berge qui n’est pas protégée par une ripisylve est une berge moins maintenue et plus sensible à l’érosion provoquée par le débit de l’eau et par les ruissellements.

D’autre part, le blocage est social et culturel car la domination de l’homme sur l’eau et la nature reste très présente. De fait, voir une eau limitée dans son emprise est rassurant face au risque et donne une impression de netteté. Par ailleurs, les cours d’eau canalisés, font partie des Lessivage paysages urbains L’eau qui ruisselle du Grand Est, entraine les minéraux qu’ils traversent et éléments organiques de petits villages présents en surface, ou de grandes appauvrissant le sol et agglomérations. donc diminuant la qualité

En outre, les annexes hydrauliques et les îles sont déconnectées ou submergées, limitant les échanges et accentuant la disparition de milieux. Le recalibrage des cours d’eau et notamment leur approfondissement, va abaisser la nappe d’accompagnement, privant la végétation des abords de leur source d’alimentation en eau.

des cultures. Pour pallier à ce phénomène, l’action chimique (désherbant ou engrais par exemple) est souvent employée plutôt que la reconquête des haies.

50


d. La disparition des milieux et éléments paysagers : l’amplification des phénomènes Parmi les milieux traversés par un cours d’eau, les zones urbaines sont souvent l’apogée du défaut de biodiversité : • la section du lit est minéralisée, • la ripisylve est absente, • les effluents des routes sont emportés directement dans la rivière, • l’eau monte en température, en été. Cependant, les incidences les plus marquants de la disparition des milieux sont plus visibles en milieu rural et naturel. En effet, si la mécanisation de l’agriculture et la rentabilité des terres ont mené à la canalisation des cours d’eau, elles ont aussi entraîné la diminution progressive des linéaires de haies et des ripisylves. Celles-ci ont pourtant un rôle majeur dans le ralentissement des coulées

de boues, la filtration des polluants par leurs racines et la constitution d’habitats et de couloirs migratoires essentiels à certaines espèces. De fait, lorsque les parcelles agricoles ne sont pas plantées, c’est-àdire à nu, les phénomènes de lessivage et de coulées de boues sont accentués au lieu d’être ralentis. Dans les cours d’eau, l’absence de ripisylve va entrainer l’instabilité des berges et leur érosion, particulièrement dans les virages puisque l’eau cherche à prendre le chemin le plus court. La réponse souvent apportée est celle d’une stabilisation par bétonnage des berges. Mais comme on a pu le voir précédemment une restriction des mouvements naturels de l’eau peuvent avoir des conséquences plus désastreuses. T°C actuelle T°C après une reforestation

Principe de l’îlot de chaleur urbain (ICU) à Paris : une reforestation (arbre en vert) diminuerait la température moyenne. (source : groupe Descartes)

D’autre part, la déconnexion des annexes hydrauliques comme les bras morts ou les zones humides, ainsi que le drainage des prairies humides pour établir de nouvelles cultures agricoles ou une extension urbaine, affectent leur comportement de zone tampon. En outre, la qualité paysagère du site et la richesse de la biodiversité diminuent également. Or, les zones tampons permettent d’une part d’atténuer les transferts de contaminants vers le cours d’eau en les infiltrant, et d’autre part de limiter les inondations en servant de zone d’expansion des crues ou en ralentissant le retour de l’eau au cours d’eau.

Enfin, l’absence de milieux naturels, ou du moins végétaux en ville est l’un des amplificateurs de l’effet d’îlot de chaleur urbain. Effectivement, la végétation est peu présente dans les milieux urbains denses alors même que par son évapotranspiration, son ombrage ou son absorption de CO2, elle participe à abaisser la température. Ainsi, des écarts de 2 à 8°C sont observés entre une zone boisée, même urbaine, et le reste de la ville (voir schéma «ICU» ci-dessus). Un phénomène similaire est observable dans les parcs, car l’eau, les arbres et les surfaces perméables permettent des échanges de chaleur qui refroidissent l’ambiance thermique (ADEME, 2017). 51

Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


L’effet d’îlot de chaleur n’est cependant pas uniquement du à la minéralisation des villes mais également à quatre autres facteurs : 1. L’absence d’inertie thermique des bâtiments : c’est-à-dire le défaut de leur aptitude à stocker et restituer petit à petit la chaleur. Plus l’inertie est forte, plus le temps de restitution sera long et moins il participera à l’îlot de chaleur. La restitution de chaleur entraine des échanges d’énergie entre les bâtiments qui s’accroissent en fonction de la densité et peuvent influencer le réchauffement des températures.

2. La construction urbaine : c’est-à-dire l’emboitement entre le réseau viaire et le bâti, va plus ou moins piéger la chaleur. Ainsi, une ville aux rues très droites et perpendiculaires, et des façades alignées et linéaires empêcheraient la chaleur de s’évacuer. On parle de canyon urbain lorsque la rue est fermée et les bâtiments hauts et proches. Au contraire, une ville plus désorganisée comme dans les cœurs historiques permettrait à l’air de mieux circuler et donc de s’échapper, sauf dans les rues étroites (Verbaere, 2018).

3. Les matériaux utilisés lors de la construction de la ville, qu’ils soient au sol ou sur les façades peuvent également intensifier les élévations de températures. C’est leur capacité d’absorption et de réflexion du rayonnement solaire qui va jouer. Ainsi, une surface absorbant la totalité de la lumière va ensuite diffuser la chaleur tout au long de la journée. C’est le cas des surfaces noires (enduits, asphalte, béton gris-noir) mais aussi du sable brun-clair. Certaines surfaces réfléchissent mieux le soleil et ont donc un effet moindre de restitution de chaleur. Il s’agit des surfaces herbées ou végétalisées et dans une moindre mesure des revêtements plus clairs (dalles, pavés, bois, bêton gris,...).

4. Les émissions de chaleur des activités anthropiques sont des facteurs aggravant du réchauffement de l’air ambiant. Les zones industrielles et les transports sont les plus grosses sources de chaleur. Cependant, les activités tertiaires sont également émettrices. Par exemple, la climatisation dont la demande est amplifiée par l’effet d’îlot de chaleur, si elle a un effet refroidissant à l’intérieur du bâtiment va rejeter un air chaud à l’extérieur et venir s’ajouter aux températures déjà hautes (ADEME, 2017).

De fait, certains éléments sont difficiles à modifier en profondeur ou à court terme. Cependant, rectifier des éléments de leur environnement, que ce soit en milieu urbain ou rural, permettra de compenser les effets amplificateurs. En effet, la présence de l’eau, associée aux milieux végétalisés, rend de nombreux services écosystémiques qu’il est nécessaire de préserver, restaurer ou recréer. 52


2

Remettre en question la ville pour profiter des bienfaits de l’eau a. Les services écosystémiques de l’eau et ses milieux associés Dans les démarches d’adaptation au changement climatique, deux formats de solution sont souvent mentionnés (UICN, 2018) : • Les mesures « sans regrets » à savoir les solutions qui, quelle que soit l’évolution du climat et l’expression des impacts, ne les empirera pas même si elles ne s’avèrent pas aussi efficace que prévu.

• Les solutions « fondées sur la nature » c’est-à-dire une forme de mesure sans regret basée sur les capacités des écosystèmes et donc les services écosystémiques qu’ils peuvent rendre.

Les services écosystémiques regroupent l’ensemble des bénéfices apportés par la nature sous ses formes végétales ou aquatiques. La plupart ont été évoqués précédemment mais il semble important de retrouver ici un panorama de ces services qui sont les entrées à étudier pour aborder l’adaptation au changement climatique par une approche positive, basée sur la ressource en eau et le capital de biodiversité. Les services écosystémiques sont généralement répartis en quatre groupes : les services supports, les services d’approvisionnement, les services de régulation et les services culturels (Wallis, 2011). Nous étudierons ici, les services rendus plus particulièrement par l’eau : • Les services d’approvisionnement regroupent les ressources produites par l’écosystème comme l’eau douce (rendue potable pour la consommation humaine), les aliments (poissons, grenouilles, plantes, …), l’énergie ou le moyen de transport. Quelques ressources médicinales sont également présentes parmi les plantes aquatiques mais leur usage est limité par la connaissance des citoyens et leur quantité non industrielle.

• Les services supports ou de soutien sont le fondement des écosystèmes puisque qu’il s’agit des habitats, des espèces et le maintien de la diversité génétique, mais également la formation du sol ou la photosynthèse.

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Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


• Les services culturels regroupent • Les services de régulation émanent des l’ensemble des avantages immatériels fonctions régulatrices des écosystèmes. obtenus par la population. Ils ont trait L’eau, en s’évaporant, permet de à l’aspect esthétique et historique, diminuer la température de l’air durant l’attachement au site et aux effets sur les périodes de forte chaleur tandis que la santé. sa ripisylve fournit de l’ombre et permet Le tourisme repose sur l’aspect grâce aux arbres de réguler la qualité de esthétique de l’écosystème, c’estl’air par élimination des polluants. à-dire la qualité du paysage. Il est En outre, les zones humides (marécages, souvent lié à une activité économique prairies humides, étangs, …) et la (agrotourisme, pâturage, pêche, végétation sont des pièges à carbone, ce hébergement,…) et aux activités qui permet de stocker les gaz à effet de de loisirs et de serre et d’atténuer leur divertissement. effet sur le changement Dans le Grand Est climatique. de nombreux sites Ces mêmes zones touristiques sont liés humides, par leur à la présence de l’eau : comportement de zone • la grande île tampon, permettent Strasbourgeoise de modérer les risques entourée de l’Ill, climatiques tels que • la petite Venise les inondations, ainsi qu’est Colmar, que de réguler la • les lacs de circulation de l’eau Champagne et de pour l’alimentation des Lorraine, cours d’eau durant les • les voies vertes le étiages ou l’atténuation long des fleuves, des problématiques de • les cités thermales, sécheresse des sols • l’ensemble des pour les élevages par vallées creusées exemple. par les fleuves et ancienne affiche touristique Certains milieux les rivières aquatiques permettent de filtrer les eaux D’autre part, l’eau a une influence usées grâce à leur composition (sol, bénéfique sur la santé mentale par son végétation, faune présente, …). C’est aspect visuel, mais également sonore. notamment le cas des marais et c’est En effet, l’eau par son aspect de le processus utilisé dans les bassins mouvement tranquille, offre un espace de lagunage pour traiter les eaux de de repos loin du rythme quotidien. pluie en station d’assainissement. De Enfin, la présence de l’eau fait souvent manière plus générale, les cours d’eau naitre un sentiment d’appartenance et les milieux aquatiques et humides, dû à l’histoire et aux coutumes liées lorsqu’ils sont en bon état, permettent à celle-ci, mais aussi aux paysages qu’elle forme. L’aspect esthétique des le maintien d’une bonne qualité de paysages de l’eau est souvent traduit l’eau par autoépuration, filtration et dans l’art. infiltration dans le sol. 54


Quel que soit le service écosystémique, celui-ci se modifie selon les pressions extérieures exercées sur le milieu. C’est en empêchant, préservant ou améliorant certaines pressions que l’on pourra tirer avantage de l’eau et de tous les services écosystémiques, afin d’adapter les territoires au changement climatique. De plus, les services écosystémiques des milieux naturels sont également une source d’inspiration pour adapter les milieux où nature et eau sont aujourd’hui absents.

b. Tirer avantage de la présence de l’eau Dans la mesure où l’eau peut rendre à l’homme l’ensemble de ces services écosystémiques, il paraît nécessaire et avantageux d’en tirer profit en se la réappropriant et en la valorisant.

1. Embellir le cadre de vie : la nature en ville social car ils offrent des opportunités de rencontre et d’interactions et participent souvent à la vie du quartier à travers des évènements (voir affiche ci-dessous), des actions de pédagogie, … (Laille, 2013) Cette interaction est renforcée lorsqu’il est question de jardins partagés, d’agriculture urbaine, de production locale. Ces lieux permettent de voir et de suivre le végétal entre la nature et son assiette, voire d’interagir avec si l’on jardine ou cueille dans les vergers, les forêts ou chez le producteur. Un intérêt économique

L’une des clés de l’adaptation au changement climatique est de ne pas aborder la problématique de front mais plutôt par des entrées connexes qui parlent à tous, tout en ayant un impact significatif. Si l’eau est l’une de ces entrées, son occupation du sol se limite rarement à son unique présence mais se superpose plutôt avec d’autres emprises. C’est pourquoi, afin d’être plus exhaustif il est utile de les prendre en compte notamment celles liées à la nature et à la ville. De fait, les services écosystémiques de la nature sont proches de ceux de l’eau mais il semble important de les rappeler ici, pour comprendre comment ils viennent les compléter et pourquoi il faut également les prendre en compte dans la stratégie d’adaptation au changement climatique. En effet, autant que l’eau, la présence de la nature en ville, en participant au cadre de vie quotidien, est un facteur d’amélioration de la santé et du bien-être (service culturel). Cela passe par la qualité des espaces verts qui favorisent la réduction du stress, la pratique sportive ou encore l’état de santé ressenti, notamment chez les plus jeunes et les personnes âgées. Mais les espaces végétalisés sont aussi des vecteurs de lien 55

Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


connectés entre eux.

peut donc aussi être présent. Par ces différents biais, la nature en milieu urbanisé s’ancre dans le quotidien des habitants qui lui attribuent un statut particulier.

Les végétaux sont également des facteurs d’amélioration de l’air (service régulateur). En effet, par la transpiration, la végétation produit de l’eau qui a pour effet de rafraichir l’air et l’ombre des arbres permet d’éviter la surchauffe du sol, de l’eau et de l’air. Le végétal est donc un moyen de lutter contre les îlots de chaleur urbain. Il est également un bon régulateur thermique pour les bâtiments et un moyen de réduire la vitesse du vent. D’autre part, les arbres constituent des puits de carbone importants, particulièrement en forêt, ce qui permet d’améliorer la qualité de l’air. Enfin, la végétation permet de structurer et stabiliser le sol, ce qui le protège de l’érosion et du lessivage. Elle joue également, lorsqu’elle est en pleine terre, un rôle dans la filtration et l’infiltration de l’eau, et participe donc à la gestion des eaux de pluies, des inondations et à l’alimentation des nappes souterraines.

De ce fait, la nature en ville par l’attrait et l’attachement qu’elle génère, entraine la valorisation du bâti et l’augmentation du prix du foncier (excepté dans les quelques cas où le parc est source de gêne : criminalité, bruit, …). De même la vue sur un paysage est souvent une plus-value. Ainsi, le végétal et le paysage participent à l’ambiance de la ville et donc à son image. Ils sont un facteur d’attractivité pour les futurs habitants mais aussi pour les touristes. Au-delà du cadre de vie, la nature en ville ce sont également des services rendus à la biodiversité (service support) car les espaces verts représentent une densité végétale unique en milieu urbanisé et donc un refuge et un milieu propice au développement des espèces. Ils le sont d’autant plus lorsque l’entretien respecte l’équilibre naturel de la diversité des espèces et des habitats (gestion différencié, abandon des produits phytosanitaires, …). De plus, le végétal en milieu urbanisé participe à renforcer la trame verte, notamment lorsque les parcs sont

Enfin, le service d’approvisionnement se traduit par la vie des végétaux après leur mort puisqu’ils peuvent être valorisés énergétiquement ou en paillage de massifs pour protéger et nourrir ces derniers.

En 2014, dans son document Les Bienfaits du végétal en ville, Plantes & Cité résume par ces deux tableaux les différents bienfaits apportés à 3 catégories : l’homme, les équilibres naturels et l’économie. Le premier exprime le lien, c’est-à-dire l’effet avéré (d’après le nombre d’études réalisées) des bienfaits sur chaque catégorie :

Tangibilité et robustesse des arguments scientifiques sur la contribution du végétal aux différents bienfaits (d’après Konijnendijk CC et al.,2013) 56


Le second tableau montre les déterminants des bienfaits, c’est-à-dire les facteurs d’aménagement qui participent à augmenter l’effet du bienfait :

La nature en ville et l’eau sont très imbriqués et leur aménagement ne doit être ni linéaire ni parallèle, mais bien s’entrecouper, pour prendre en compte l’ensemble des bienfaits que chacun apporte et les moyens d’y arriver. A noter que pour les conséquences du changement climatique d’augmentation de la température, de modification du cycle hydrologique et de biodiversité, les 3 axes phares à prendre en compte selon le tableau de Plantes & Cités sont : 1. la quantité des surfaces végétalisées, que ce soit des surfaces perméables ou bien des murs et toitures végétalisés,

2. les capacités de régulation environnementale que ce soit sur le captage carbone, l’évaporation ou la filtration,

3. les équilibres écologiques que ce soit la gestion des aménagements, leurs interrelations, le choix des matériaux et plantations, …

Les deux autres axes jouent principalement sur l’aspect esthétique, le bien-être pour les habitants et l’accessibilité. In-fine, cela permet l’acceptation, l’appréciation et l’attachement à l’espace de nature, que celui-ci prenne la forme d’un parc, d’un square, d’une forêt ou d’une place. Cet attachement pourra jouer sur la défense du site et l’envie de le maintenir si celui-ci se dégrade avec le changement climatique. Il en va de même pour l’eau pour lequel la mise en valeur fait naitre un lien avec l’habitant.

2. Ne plus tourner le dos au cours d’eau Dans les formes urbaines passées, les bâtiments ont souvent été construits dos à l'eau. En effet, plutôt que d’appréhender les cours d'eau comme un atout, le choix a été fait de les ignorer voire dans certains cas de les

recouvrir pour gagner de la place et cacher la pollution. Ainsi, certaines rivières ont disparu du paysage urbain pour faire place à des parkings, des routes ou des immeubles. Si le risque d'inondation est ainsi limité là où l'eau 57

Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


meilleure intégration dans le lieu et le cadre de vie.

est couverte, il n'en est pas de même pour les sites en amont et en aval. D’autant que la biodiversité et la qualité de l’eau en pâtissent.

De plus en plus, l’eau apparait comme un élément qui ne doit pas seulement être une contrainte à traverser ou un décor figé et inaccessible. Comme pour la nature, tirer avantage de la présence de l’eau c’est aussi se réapproprier sa présence, investir ses abords et en faire un élément du quotidien. Outre le fait que les habitants pourront retrouver certains services écosystémiques, une nouvelle relation va se construire permettant de suivre l’évolution du cours d’eau et ainsi de mieux comprendre les enjeux qui y sont attachés.

Conséquemment à cette indifférence, les habitants perdent les services culturels et de régulation des cours d’eau par une limitation des accès publics et des abords qui ne sont ni esthétiques, ni riches en biodiversité, voire sujet à des problématiques de sécurité. Le cours d’eau est de fait rejeté par les habitants qui choisissent de l’ignorer alors même que plus loin sur son parcours il sera vecteur d’appartenance et de valorisation de l’ambiance urbaine (Pelletier, 1990). De la même manière, les bassins de rétention sont souvent enfermés, interdits au public, imposant dans l’espace des ouvrages mal dimensionnés qui s’excluent de l’espace public car jugés dangereux ; quand bien même un aménagement différent pourrait remplir les mêmes fonctions mais avec une

Tant dans le renouvellement urbain que dans les nouveaux aménagements ou sur des opérations publiques, l’eau peut être prise en compte comme un élément fondateur du projet.

3. Multiplicité des formes de l’eau dans l’aménagement Voir circuler l’eau de pluie, c’est aussi une nouvelle éducation pour les habitants qui peuvent se rendre compte de la quantité d’eau qui tombe et des transformations du paysage urbain qu’elle peut engendrer.

Le cours d’eau n’est cependant pas l’unique forme de l’eau. C’est pourquoi sa présence doit se réfléchir dans l’ensemble de ses aspects, usages et situations géographiques. Ainsi, la pensée du projet peut se construire autour des eaux pluviales ou de l’eau récréative, en jouant sur les temporalités et les mouvements afin de transformer des nuisances en agrément tout en répondant aux problématiques énoncées en première partie.

Faire circuler les eaux de pluies en surface grâce à un aménagement dédié répond à de nombreux enjeux comme l’infiltration des eaux de pluie, la diminution et l’épuration des eaux de ruissellement, la rétention des crues, la recharge des nappes, l’atténuation des îlots de chaleur ou l’accueil de la biodiversité. Durant les dernières années, une gestion dite « alternative » des eaux pluviales (GEP) est apparue pour répondre aux principes suivants :

Aujourd’hui, l’eau est cachée par le petit cycle de l’eau où tout passe par des tuyaux. Les eaux de pluies sont évacuées rapidement dans les réseaux et disparaissent de notre perception. C’est pourquoi, nous sommes si surpris lorsqu’elles ressortent et ruissellent.

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- Le « zéro rejet », c’est-à-dire qu’aucune eau pluviale tombant dans le périmètre du projet (quartier, parcelle, place, …) ne rejoint le réseau communal afin d’éviter les surcharges. - L’infiltration « au plus près » qui permet de répartir les volumes à absorber et à filtrer par le sol, de limiter l’accumulation de polluants dans les eaux de pluies ainsi que de mieux alimenter et recharger les nappes.

sans pluie

Sur le long terme, ces opérations sont moins coûteuses, tant en fonctionnement qu’en investissement, car il n’y a pas de patrimoine hydraulique à renouveler tous les 10 ans avec d’importants travaux VRD (Voiries et Réseaux Divers)(Venandet, 2018). Les postes de dépenses changent avec un entretien identique à celui des espaces verts. Par exemple dans la région de Douai, la gestion « alternative » des eaux pluviales (GEP) se développe depuis 25 ans et avec 25% de leur territoire couvert par la GEP. L’économie estimée est de 1M€ par an soit une baisse de 30 à 40% (Dennin, 2016).

pluie moyenne

pluie importante

Une grosse partie de cette nouvelle gestion des eaux pluviales passe par la non-imperméabilisation ou la désimperméabilisation des sols artificialisés. En effet, c’est la perméabilité qui va permettre de préserver ou reconquérir les capacités du sol : infiltration des eaux de pluies et filtration des contaminants mais aussi stockage du carbone dans les premiers centimètres et habitat pour la faune et la flore. Plus d’espace perméable, c’est également moins de matériaux réfléchissant ou absorbant la chaleur, ce qui participe à refroidir l’ambiance thermique. L’eau de pluie, si elle doit retourner dans les réseaux parce que le sol est pollué par exemple, peut tout de même être filtrée, utilisée et révélée en surface et ainsi, avoir diminué de volume avant le retour en réseau.

Un quartier zéro-rejet à Longpont (02) : schémas de remplissage des dispositifs de stockage et seuils d’inondabilité (source : ATM)

Pour des raisons d’entretien, d’aspects sociaux et esthétiques, la gestion des eaux pluviales se fait de plus en plus imbriquée avec la nature en ville. On parle alors de jardin de pluie et les services écosystémiques de l’eau se cumulent à ceux de la nature en développant une vision ludique de l’eau de pluie. En effet, entre les remblais qui dessinent des montagnes à escalader en temps sec et les étendues d’eau qui se remplissent en temps de pluies, l’imaginaire des enfants peut se nourrir de ces modelés de terrain, tandis que les adultes profitent d’une pente pour s’allonger et de l’eau pour voir leur quotidien 59

Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


autrement. D’autres éléments comme les parkings, les noues (fossés d’écoulement des eaux) ou les toitures peuvent aussi servir à perméabiliser la ville et faire entrer l’eau dans nos paysages urbains (Maytraud, 2018).

« L’objectif est de répondre à deux problématiques auxquelles font face les villes: la surchauffe et les inondations. En effet, à cause de l’asphalte, les villes absorbent la chaleur et repoussent l’eau ! La ville éponge est donc une façon d’aider la ville à faire face à ces problèmes, et ce en s’inspirant de la nature. »

D’autre part, l’usage ludique de l’eau est souvent limité à sa forme de fontaine esthétique, alors même que se développent de plus en plus des usages de rafraîchissement très appréciés lors des fortes chaleurs (possibilité de tremper les pieds, jets d’eau, rafraîchissement naturel de l’air ambiant,…). Cependant, pour beaucoup de ces espaces rafraîchissants, l’alimentation en eau Mickaël Carlier, président de Novae est réduit, voire pourrait s’arrêter, dès les restrictions d’alerte sécheresse enclenchées. En effet, ils ne sont pas prioritaires au vu de leur vocation jugée plus esthétique que d’utilité publique. Réfléchir à un circuit fermé permet le maintien constant de ces fontaines qui tempèrent les chaleurs et sont accessibles à tous y compris les populations les plus fragiles.

Le jardin d’eau de l’écoquartier des Rives de la Haute Deûle (59) sert à la fois de bassin de stockage des eaux pluviales en cas de grandes crues et de « marais épurateur » ainsi que de lieu de promenade et de détente, et de sensibilisation à l’importance des milieux humides (source : Bruel-Delmar).

Face à toutes ses propositions, le scepticisme ou l’incompréhension sociale reste forte. Pour mieux appréhender l’utilité de changer les stratégies urbaines, des villes concepts naissent avec pour objectifs d’alimenter les débats et les envies. 60


c. Ville perméable, Ville éponge, Ville résiliente : des villes concepts pour éveiller l’attention Ces trois noms de concepts regroupent en fait une même idée : la ville-éponge étant la traduction du terme anglophone de spongecity. Il s’agit de repenser l’intégration de la gestion globale de l’eau en gardant l’eau là où elle tombe, soit en l’absorbant soit en la réutilisant. L’idée est bien de garder l’eau dans la ville. Ce renouveau passe par une refonte des aménagements mais aussi par une sensibilisation de masse auprès des habitants. C’est ce que prévoit de faire la Chine avec le développement de villes éponges pilotes dont Shanghai qui prévoit d’ici 2020 la réutilisation de 70% des eaux de pluies et de leur absorption sur 80% de sa surface urbaine (Louvet, 2017).

avec les risques et les anticipent. Elles sont capables de les accueillir pour en atténuer les effets et s’en remettre rapidement. Les villes qui aujourd’hui se tournent vers ce type de concept, sont celles qui, par le passé, ont connu des incidents importants et qui ont les capacités d’ingénierie nécessaires à leur mise en place. Mais la plupart des communes se sentent à l’abri ou impuissantes face aux risques. De fait, elles n’anticipent pas les enjeux et continuent d’en subir les impacts ou bien les découvriront dans quelques années. C’est pourquoi, il est important de développer dès maintenant des actions initiatrices aux différentes échelles de la stratégie territoriale et notamment à travers les politiques et documents d’urbanisme.

Ce sont des villes en mouvement qui vivent

d. Les politiques et documents d’urbanisme à l’origine de la stratégie de demain En 2050, on estime que 50 à 70% de la population mondiale vivra dans les villes. Cela va se traduire par un besoin de logements supplémentaires. Au vu des conséquences de la hausse des températures moyennes, du changement hydrique et des bouleversements de la biodiversité, l’enjeu de l’adaptation des villes est majeur afin d’assurer le bien-être de ses habitants (chaleur, alimentation en eau, cadre de vie, confort énergétique) mais aussi la préservation de la biodiversité, des continuités écologiques et des paysages menacés par l’extension urbaine.

d’îlot de chaleur, d’imperméabilisation ou de rupture des continuités écologiques. Cependant, toutes les zones habitées sont possiblement touchées selon : • leur configuration (spatiale et géographique),

Les grandes villes (Metz, Mulhouse, Nancy, Reims et Strasbourg dans le Grand Est), comme les villes moyennes, sont par leur superficie les plus touchées par les problématiques

La vulnérabilité des milieux urbains est donc spécifique à chaque commune ou intercommunalité et est difficilement généralisable à grande échelle.

• leur politique passée et actuelle : • d’aménagement (présence et répartition des espaces verts, densité, trame urbaine, historique de gestion des risques, …), • de biodiversité, • de mobilité.

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Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation


Environnement de 2010 qui va définitivement renforcer la tendance (Caude, 2015). Depuis, le nombre de démarches réglementaires ou volontaires se sont multipliées à l’échelle nationale comme locale.

Ainsi, une commune peut subir de forts dommages dus aux coulées de boues tandis que sa voisine qui a mis en place une solidarité avec les agriculteurs avec une couverture permanente des sols, ne sera pas menacée (Jurdy, 2018).

Parmi les démarches d’urbanisme durable les plus connues, les Ecoquartiers du ministère de la Cohésion des Territoires ont labélisé 32 projets dans le Grand Est, dont 11 dans le Bas-Rhin. De plus, 3 territoires sont labellisés Eco-Cité (Strasbourg, Metz, Haut Val d’Alzette). Parmi les écoquartiers, 5 initiatives sont répertoriées dans le Cadre de référence de la ville européenne durable (RFSC), porté entre autre par le ministère du logement et de l’habitat durable et le CEREMA. En outre, 98 projets sont labellisés HQE (Haute Qualité Environnementale).

Depuis quelques années, certaines communes développent de plus en plus leur politique de biodiversité (charte, éclairage, sensibilisation, protection d’espaces naturels, …) et construisent leurs nouveaux logements avec une conception « durable ». Le concept de développement durable a commencé à être intégré aux réglementations dans les années 1990, puis dans la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain, 2000) et la loi POPE (Programme d’Orientation de la Politique énergétique, 2005). C’est la loi Grenelle

Ardennes Pays du Haut Val d’Alzette Metz Métropole Meuse

Marne

Strasbourg Métropole des Deux Rives

Moselle

Meurteet-Moselle

Bas-Rhin

Strasbourg Métropole des Deux Rives

Vosges Aube Haute-Marne Haut-Rhin

écoquartier écoCité

Des politiques de quartiers durables dispersés mais qui émergent. (source : DREAL, 2017) 62


Localement, les plans d’Action Agenda 21, les PCAET (Plan Climat-Air-Energie Territorial) et les démarches comme les Chartes d’Aménagement Durable naissent petit à petit dans les moyennes et grandes villes. La métropole de Strasbourg a rédigé sa charte en 2012 et elle devrait être renforcée par une OAP (Opération d’Aménagement et de Programmation) Air-Energie-Climat (Lux, 2018). Le Grand Reims délivre un label « Grand Reims Durable » aux projets intégrant les problématiques de développement durable. Tandis qu’en dehors du Grand Est, certaines communes comme Montpellier vont jusqu’à rédiger un référentiel d’aménagement pour que les services de la ville soient plus attentifs à la démarche d’urbanisme durable. Les communes plus petites sont souvent moins investies dans la démarche, soit parce qu’elles n’ont pas l’ingénierie et le financement nécessaires pour le réaliser, soit parce qu’elles ne se sentent pas concernées par la problématique du développement durable. Cette faible implication s’explique notamment par un ratio de surface anthropisé plus faible, même si elle augmente tous les ans. Or, les effets du changement climatique sont amplifiés par l’anthropisation en milieu urbain comme rurale. Réfléchir à une stratégie de développement durable permet d’anticiper des conséquences qui ne sont pas encore observables mais risquent d’apparaître. Cependant, dans ces stratégies de développement durable, si l’eau est prise en compte pour ses dangers, elle ne l’est pas forcément en tant que levier de l’aménagement, c’est-à-dire un outil multifonction qui œuvre à la qualité des villes. C’est pourquoi, il est nécessaire de comprendre comment se décomposent les actions actuelles, afin de proposer de nouvelles possibilités permettant de généraliser la prise en compte de l’outil eau.

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Chapitre 2. La stratégie d’aménagement : un processus d’adaptation



L’eau : un outil au cœur des villes de demain Chapitre 3


1

Une adaptation au changement climatique par l’eau à lire entre les lignes Cette troisième et dernière partie opte pour un regard pratique et pose la question des moyens de mise en action de l’adaptation. Elle propose des pistes de réflexion quant aux questions à se poser, aux actions à développer et aux obstacles à franchir pour mettre en œuvre une nouvelle stratégie urbaine dans laquelle l’eau est une ressource et une richesse.

Fort est de constater qu’aujourd’hui peu d’actions sont faites au nom du changement climatique, ou du moins pour s’y adapter, car l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre est déjà un sujet généralisé à tous les domaines. Cependant, des actions, même si elles ne sont pas faites dans ce sens particulier, y participent par répercussion.

a. Un besoin de sensibilisation et d’éducation La multifonctionnalité des milieux et des actions est souvent méconnue par les élus et les citoyens, tout autant que l’importance de s’adapter au changement climatique dès maintenant, sans attendre que ses conséquences frappent le territoire. En effet, si le sentiment d’impuissance face à l’augmentation des GES et ses conséquences à l’échelle mondiale peut l’emporter, l’adaptation peut agir à une échelle locale, avec des conséquences directes pour l’individu, la société et son environnement.

La sensibilisation ou acculturation est un élément qui revient constamment dans tous les échanges sur le changement climatique, comme « l’entrée clé pour l’adaptation » (voir les entretiens en annexe). D’une part, parce que c’est un sujet qui concerne l’ensemble d’entre nous, notre avenir et celui des prochaines générations, d’autre part parce que les actions ne peuvent se limiter à un groupe restreint de personnes si le nombre de projets doit se développer et subsister.

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Cette acculturation doit se faire en deux temps : 1. L’éducation et la formation, c’est-à-dire la compréhension de la problématique, des enjeux et des solutions qui peuvent être apportés : • Des élus qui ont un rôle pédagogique sur les citoyens et doivent s’emparer du sujet pour lancer sur leur territoire les projets qui auront l’impact souhaité, 2. Les témoignages, visites et recueil de projets • Des citoyens qui par leurs actions exemplaires sont les outils qui permettront participent ou atténuent le d’illustrer l’éducation en apportant des exemples changement climatique, concrets de projets réussis mais aussi des • Des élèves et des étudiants qui problématiques rencontrées par les élus et les sont le futur de la réflexion et de professionnels afin de ne pas reproduire les l’action, mêmes erreurs. Ils ont pour objectifs de montrer • Des professionnels (techniciens, ce qui fonctionne et les bienfaits propres et dessinateurs ou artisans) qui immédiats afin de convaincre élus comme agissent au quotidien et ont citoyens d’investir dans ce type de projet. besoin d’adapter leurs pratiques aux nouvelles solutions. L’objectif de cette éducation est d’agir en cohésion dès aujourd’hui sur l’urbanisme, la vie quotidienne et le développement du territoire, en préparant les actions à long terme, grâce à l’apprentissage des bonnes et des mauvaises pratiques menant à la compréhension de la nature et ses bienfaits, et à travailler avec elle plutôt que contre elle. La sensibilisation est un sujet complexe à mettre en œuvre, principalement parce que les personnes qui assistent à ce genre de formation sont souvent celles qui sont déjà impliquées ou convaincues par l’utilité de l’adaptation et des effets attendus du changement climatique (Gresse, 2018). Il est à noter que le premier temps est difficile à mettre en œuvre sans le second présentant des exemples concrets et visuels. Ainsi, si les théories sur le changement climatique, ses effets et ses solutions sont nombreuses, les illustrations et les actions concrètes sont plus difficiles à mettre à jour. D’une part, parce que l’adaptation n’étant pas le sujet principal, les effets du projet sur l’adaptation au changement climatique ne sont pas ou peu mesurables et d’autre part parce que les recueils de tels projets ne sont pas développés avec une thématique « changement climatique » ou à petite échelle. A noter que l’UICN (Union International pour la Conservation de la Nature) recueille des expériences de solutions « fondées sur la nature » à l’échelle nationale depuis 2018. 67

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


b. Des projets inspirants Les quatre exemples suivants ne sont pas des exemples situés dans le Grand Est mais des projets innovants qui pourraient faire partie du deuxième temps de l’acculturation et ont destination à inspirer de nouvelles démarches. Parmi les actions aux échos bénéfiques pour l’adaptation se retrouvent celles concernant la préservation et la restauration des milieux naturels et de leur continuité, le maintien ou la restauration de zone d’expansion des crues, la conception de quartiers résilients ou l’intégration de la biodiversité dans la ville.

Penser une stratégie de résilience à l’échelle régionale Fiche d’identité Ile-de-France

Maitrise DRIEE Réalisation 2018

Depuis le 5 mars 2018, la DRIEE (Direction Régionale et Interdépartementale de l’Environnement et de l’Énergie) a mis en place

« une charte d’engagement pour concevoir des quartiers résilients au risque inondation » notamment dans les projets de renouvellement urbain. L’objectif est de profiter des renouvellements urbains pour ne pas aggraver les enjeux, faciliter la gestion de crise et le

retour à la normale ainsi que développer la culture du risque. La charte est signée entre les services de l’Etat (DRIEE), les maitrises d’ouvrages (dont les collectivités), les CAUE et le conseil des architectes d’Ile de France, la fédération des promoteurs immobiliers, la fédération des agences d’urbanisme, les établissements publics d’aménagement et la société du Grand Paris ainsi que l’association régionale des HLM. Cette charte concerne uniquement les inondations, cependant, on peut imaginer des chartes similaires sur la disponibilité en eau, l’augmentation de la biodiversité, les chantiers exemplaires, voire plus globalement le changement climatique. Dans cet optique, l’AERM a rédigé une charte d’engagement liée à leur plan d’adaptation et d’atténuation et à destination d’un public similaire incluant également les entreprises.

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Une charte régionale pour une stratégie commune (source : DRIEE)


Retrouver une zone d’extension des crues et en faire le support d’une activité économique et sociale Fiche d’identité Blois (41)

Maitrise d’ouvrage AggloPolys (EPCI) Maitrise d’œuvre Atelier de l’île Grégory Morisseau Réalisation Depuis 2009

Sur la rive gauche de la Loire, Blois se prolonge par le quartier Vienne, protégé des inondations par une digue murée par endroits. Le déversoir de la Bouillie doit limiter le débit dans le lit endigué pour protéger la ville et notamment Vienne. Cependant, au fil des années, le déversoir s’était construit (400 habitants, 20 entreprises, aire d’accueil des gens du voyages, jardins familiaux, ...). En cas d’inondation, la zone aurait fait barrage et aggravé le risque. Le projet de l’agglomération de Blois est de retrouver l’usage de zone d’extension des crues du déversoir tout en y maintenant une multifonctionnalité à long terme. Deux actions majeures pour reconquérir la zone d’expansion des crues : 1.La désurbanisation par acquisition foncière (Agglopolys) et démolition des constructions. 2. Etude prospective pour une reconversion en parc agricole urbain avec du maraichage et des jardins familiaux. L’objectif est de retrouver une zone exutoire à l’eau : - en évitant la banalisation du territoire et la fermeture du paysage par l’installation d’une friche - en proposant une revitalisation de l’espace et une valeur ajoutée à travers le renouveau du paysage alluvial en entrée de ville et un projet économique et social. [en haut] Vue du quartier et du déversoir de la Bouillie aux franges du quartier endigué de Blois-Vienne, 2006. (source : Agglopolys, Philippe Lavallart). [en bas] Schéma du plan guide. (source : Grégory Morisseau).

69

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


Réinterpréter le passé pour restaurer le milieu et offrir un nouvel espace de vie Fiche d’identité

La renaturation de l’Aire est la 2e étape d’un grand programme de restauration du cours d’eau lancé en 1998. Elle fait suite à la restauration urbaine de 2011 dont l’objectif était la suppression Canton de Genève de protection d’ouvrage obsolète, la diversification des (SUISSE) habitats pour la faune et la flore et l’amélioration de l’accueil du public avec un point d’observation. Elle précède la remise à ciel ouvert prévu lors de la mutation du quartier Praille Acacias Vernets. Longueur de cours d’eau 1 900 m L’objectif premier était la suppression du Maitrise d’ouvrage République et Canton de Genève canal qui s’était formé pour l’agriculture Maitrise d’œuvre Group Superpositions au XIXe siècle. L’eau y était très dégradée Atelier Descombes & Rampini et il fallait retrouver le fonctionnement Coût 21 500 000 € estimé écologique de la rivière. Réalisation (1998) 2012 - 2016

Le projet qui a finalement été choisi combine le canal et un espace de divagation de la rivière qui va lui permettre de reconquérir son fuseau de mobilité. En superposant les deux aspects de la rivière, le projet va plus loin qu’un simple aspect écologique et permet de comprendre l’histoire du site tout en proposant une réinterprétation avec des successions d’ambiances et d’approches au-dessus de l’ancien canal. Pour la renaturation, la volonté de laisser la rivière dessiner son propre passage a été un élément clé. Ainsi durant le chantier des dizaines de losanges ont été creusés. L’Aire, en choisissant le tracé de ses méandres, va peu à peu les modeler. Une qualité de l’eau a été retrouvée et la faune aquatique est revenue, en même temps qu’une flore qui recolonise les berges et les îlots. Cette renaturation a permis de retrouver une plaine alluviale inondable en amont de la ville. Peu à peu l’Aire trace son cours au milieu des losanges qui s’effacent. Un contraste par rapport au canal rectiligne. (source : Fabio Chironi et Superpositions)

70


Désimperméabiliser pour introduire une nature sauvage au cœur de la ville Fiche d’identité Nantes (44)

Superficie 2 700m² Maitrise d’ouvrage Samoa (Société d’Aménagement de la Métropole Ouest Atlantique - SPL)

Maitrise d’œuvre Atelier de l’île de Nantes Coût 239 000 € Réalisation 2005

Après la fermeture de l’usine, la végétation a commencé à reprendre ses droits en se développant dans les anfractuosités de la dalle béton et les fissures de l’asphalte. L’idée du projet du Square Mabon est d’accompagner le développement de la friche végétale tout en y permettant une vie quotidienne. Des vues sont ouvertes sur la Loire, des cheminements traversent cette nature ordinaire, … Chemin en caillebotis L’entretien est limité : pas d’arrosage, (non imperméabilisé) pas d’arrachage et pas de nouvelles plantations. Seuls les branchages Friche végétale dépassant trop sur l’espace public sont coupés. Toutes les branches et feuilles mortes sont laissées sur place. La croissance végétale est libre y compris sous les caillebotis qui laissent passer végétation, lumière et eau. Les détritus anthropiques sont enlevés. En outre, l’espace sert d’expérimentation : scientifique d’une part et technique pour l’entretien d’autre part. Square de l’île Mabon, (source : iledenantes.fr)

71

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


2

Elaborer les politiques régionales pour affirmer l’outil eau a. Le SRADDET Le SRADDET ou Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Egalité des Territoires est le futur document de planification régionale regroupant de multiples thématiques, puisqu’il doit réunir une dizaine d’anciens schémas régionaux dans une optique de simplification (SRCE1, SRCAE2, SDTAN3 et SRIT4). Il est demandé par l’Etat depuis la loi NOTRe en 2015. Amorcé dans le GrandEst, dès la fusion des ex-Régions en 2016, il doit fixer une stratégie à l’horizon 2050 pour l’aménagement et le développement régional, à travers 6 thématiques : aménagement et urbanisme, transport et mobilité, air-

climat-énergie, biodiversité, eau et déchets. Il est rédigé par la Région mais élaboré en partenariat avec les différents acteurs du Grand Est (services de l’Etat, collectivités territoriales et acteurs thématiques). Ce principe de l’élaboration participative, effectuée grâce à des séminaires, des réunions et une plateforme de concertation, doit permettre l’acceptation du schéma et donc sa meilleure mise en œuvre après son adoption. SRCE : Schémas Régionaux De Cohérence Ecologique SRCAE : Schémas Régionaux du Climat, de l’Air et de l'Energie 3 SDTAN : Schémas Directeurs Territoriaux d'Aménagement Numérique 4 SRIT : Schémas Régionaux des Infrastructures de Transport 1 2

En effet, le schéma est un document de planification prescriptif, il doit donc être pris en compte et appliqué dans les documents de planification de même échelle ou inférieure. C’est le cas des SCoTs, des PLU(i), des PDU, des PCAET ou encore des Chartes de Parc Naturel Régionaux (PNR). Parmi les cibles du SRADDET on retrouve également les acteurs des déchets - en lien avec le Plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD) et les autorités organisatrices de la mobilité durable (AOMD). d’après le SDRADDET c’est quoi ? (source : Grand Est) Stratégie nationale bas carbone (SNBC) Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE)

des 3 bassins

SDAGE et PGRI

orientations objectifs

Opérations d’intérêt national (OIN Alzette-Belval) Projets d’intérêt général (PIG) Projets de localisation des grands équipements, des infrastructures et des activités économiques Orientations nationales pour la trame verte et bleue (ONTVB)

Schéma interrégional d’aménagement et de développement de massif (Massif Vosgien)

SRADDET

objectifs règles

à prendre en compte être compatible avec 72

SCoT

à défaut PLU(i), carte communale

PCAET PDU Charte PNR


Son écriture est assez courte pour un document d’urbanisme puisque lancé début 2017, son adoption puis son approbation devrait être effective à la fin 2019, comme le montre le schéma ci-dessous : Calendrier prévisionnel (source : Grand Est)

Publiques Associées)

Enquête publique

Préfet

Région

SRADDET Adopté

Avis PPA (Personnes

SRADDET Adopté

Consultation citoyenne 13 rencontres territoriales Contributions FASCICULE

Région

Règles, MA

Projet SRADDET

Contributions RAPPORT

2019 Restitution

6 séminaires de travail

Objectifs, carte

Projet RAPPORT

Lancement

Méthode

Diagnostic, enjeux

2018 Projet Fascicule

2017

Comme on peut le lire sur le calendrier prévisionnel, le SRADDET est divisé en 2 parties :

1. Le rapport, lui-même divisé en 2 parties : - Le diagnostic permettant de faire un état des lieux de la situation territoriale actuelle et d’établir les points forts ainsi que les faiblesses et les problématiques à venir. Il est rédigé par les référents thématiques de la Région grâce aux connaissances régionales et aux éléments fournis par les partenaires. Les diagnostics thématiques détaillés feront l’objet de documents annexes. - La Stratégie traduit le diagnostic en 40 objectifs qui ont été approuvé par les élus à travers 3 axes :

1 « Grand-Est, terre de coopérations, solidaire et européenne » qui regroupe des thématiques telles que la connectivité (numérique, urbaine, écologique, énergétique, transport), les solidarités et la lutte contre l’isolement ainsi que la gouvernance, l’implication et la coopération entre les acteurs mais aussi les citoyens.

2 « Grand-Est, terre de richesses et de savoir-faire » dont les objectifs s’articulent autour des ressources et de l’économie locale (savoirfaire locaux, agriculture, bois, énergie renouvelable, rénovation énergétique, multimodalités), du bonvivre (image, santé, tourisme, culture et proximité) ainsi que la préservation du patrimoine naturel (air, eau, foncier, paysage, fonctionnalité des milieux, déchets).

Grand Est, terre d’innovations et de solutions durables » axe la stratégie sur la vision à long terme du territoire notamment par rapport au comportement plus respectueux de la planète (corridors écologiques, renouvellement urbain, mobilité, habitat, démarches participatives) et aux solutions durables (économie circulaire, valorisation des déchets, énergie, industrie, agriculture, transports).

Les objectifs de la stratégie sont opposables avec un « rapport de prise en compte ». 73

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


2. Le fascicule est composé des règles générales, des mesures d’accompagnement et des

indicateurs de suivi et d’évaluation qui déclinent les objectifs de la stratégie. Les règles sont donc l’élément réglementaire principal du SRADDET puisqu’elles sont opposables avec « un rapport de compatibilité ». à l’écriture de ce mémoire, le SRADDET est encore en cours de rédaction. Les règles ci-dessous n’ont donc pas été approuvées par les élus cependant elles donnent un aperçu des thématiques abordées. Par définition, les règles sont des prescriptions dont la mise en œuvre est obligatoire, tandis que les mesures d’accompagnement sont fortement encouragées et suggérées, mais leur prise en compte est laissée libre. Parmi les grands objectifs affichés du projet de stratégie, quelques un nous intéressent plus particulièrement pour la question de l’eau comme outil d’adaptation au changement climatique des territoires. L’objectif 30 s’intéresse directement aux formes urbaines au vu de l’évolution du climat, tandis que d’autres objectifs s’intéressent plutôt aux impacts directs du changement climatique sans le citer : qualité de l’air, qualité de l’eau, quantité en eau, inondation ainsi qu’aux éléments amplifiant le changement climatique comme la diminution des espaces naturels, des habitats, des fonctionnalités

Objectif 30

‘‘ Faire du renouvellement urbain

de qualité et résilient aux risques et au changement climatique.

naturelles et Les règles et découlent de de cibler des la définition

‘‘

des corridors écologiques. mesures d’accompagnement ces objectifs et permettent actions plus précises telles de stratégie d’adaptation

Objectif 4 Préserver et reconquérir les corridors écologiques.

‘‘

au changement climatique à l’échelle de chaque territoire, le développement et la préservation de la nature en ville, la réduction du ruissellement et de l’imperméabilisation, la réduction de la consommation d’eau, la

Objectif 7

Développer les solidarités amont/aval et urbain/rural dans la gestion de l’eau. réduction de la consommation du foncier, la protection des aires d’alimentation de captages ainsi que la connaissance et la gestion du risque.

‘‘

Objectif 24

Améliorer la qualité de l’air et de l’eau en lien avec la santé.

Pour la Région, le SRADDET va donc être un moteur d’impulsion pour les politiques d’adaptation au changement climatique et ses sujets connexes. Cependant, les règles et mesures ne peuvent être l’unique déclinaison

Objectif 25

la quantité de la ‘‘ Gérerressource en eau.

de mise en œuvre des objectifs souhaités, c’est pourquoi les autres outils régionaux doivent également être mobilisés et notamment les politiques d’aides régionales.

Objectif 26

‘‘

Préserver le patrimoine naturel, les paysages et les fonctionnalités des milieux. 74


b. Les aides régionales : des leviers pour accompagner les projets stratégiques axée sur l’atténuation, notamment dans l’énergie et les transports. Et parce qu’il n’y a pour le moment pas de politique d’adaptation au changement climatique définie par les élus, même si elle commence à apparaitre dans le SRADDET. L’impulsion provient donc surtout des techniciens. D’autre part, parce que le sujet du changement climatique n’est pas une entrée qui va motiver la majorité des élus, associations, entreprises,… à déposer un dossier pour répondre au dispositif. Pour exemple, l’agence de l’eau Rhin-Meuse avait proposé un dispositif « Contribution à l’adaptation au changement climatique » pour lequel elle a reçu peu de réponses. Cette absence de proposition est en partie due à l’amplitude des réponses possibles et au manque de connaissances sur les réponses directes possibles. Cette expérience montre que l’entrée changement climatique frontale n’est pas la plus adéquate.

Afin de mettre en œuvre ses politiques et accompagner les projets sur son territoire, la Région propose des aides sous trois formes, que l’on nomme dispositif : 1. Le dispositif classique où les projets sont reçus « au fil de l’eau » c’est-à-dire toute l’année, ils expriment la politique régionale permanente. Ils sont mis à jour régulièrement afin de coller au plus près à l’évolution du territoire. 2. L’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) qui fixe des dates de sessions pour répondre, doit être renouvelé tous les ans. Les projets attendus doivent répondre à une problématique identifiée par la Région mais dont les solutions ne sont pas définies. Le projet est souvent en construction et n’a donc pas besoin d’être à un stade avancé. 3. L’Appel à projet (AAP) se rapproche de l’AMI par ses dates de session et son renouvellement, cependant les critères pour répondre à la problématique sont plus précis et les projets sont souvent plus définis même si à l’usage, des AAP financent les études d’avant-projet et donc des projets moins définis lors du dépôt. L’objectif étant de ne pas multiplier les dispositifs répondant à une même problématique.

Cependant, la Région propose plusieurs dispositifs d’aides qui, de manière plus indirecte, influent sur l’adaptation au changement climatique que ce soit en milieu rural ou en milieu urbain. Les projets proposés aujourd’hui sont principalement en zone rurale, autour des milieux habités mais rentrent encore peu dans les zones construites ou urbanisées. C’est notamment le cas des restaurations de rivière qui se font où les contraintes foncières sont moindres, ou de la trame verte et bleue qui contourne les zones habitées mais ne rentrent pas forcément au cœur des villages.

Tous les dispositifs sont rédigés par les techniciens au vu des enjeux et des problématiques qu’ils identifient sur le territoire ou afin de répondre à une volonté des élus, puis ils sont votés, y compris pour les mises à jours, par les élus lors des commissions permanentes (mensuelles).

Le tableau ci-contre, liste l’ensemble des dispositifs de la Région participant à l’adaptation au changement climatique. Ils concernent principalement l’aménagement des espaces naturels et construits. Cependant, les services de l’agriculture et de la compétitivité cherchent également à développer de nouvelles manières de consommer l’eau.

Aucun des dispositifs de la Région n’est aujourd’hui, épinglé « changement climatique ». D’une part parce que la réflexion changement climatique est majoritairement 75

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


Dispositifs du Grand Est participant à l'adaptation du territoire au Direction

Services

Dispositifs Etude et Travaux de prévention et gestion intégrée des inondations Restauration des cours d'eau et milieux aquatiques AMI - Eau et Territoire

Eau et biodiversité

Commune Nature (outils de la démarche zéro pesticides) Elargissement de l'accompagnement zéropesticides

Acquisition de connaissances, animation et outils de gestion pour la protection de

Elaboration d’un plan de desherbage et de gestion differenciee des espaces comm

Appui a la gouvernance locale et a la maitrise d’ouvrage de projets structurants da AMI - Trame Verte Bleue

DEA (environnement et aménagement)

Soutien des animations d’éducation à la nature, à l’environnement et au développ destination du jeune public dans le cadre scolaire ou en club nature

Transition Energétique

Territoires et ruralité

Politique biodiversité de gestion, protection et valorisation (PNR, RNR, …)

DAF (agriculture et forêt) DST (sports et tourisme)

DCC (Compétitivité et connaissance)

AAP - Urbanisme Durable Traitement et Requalification des friches AAP - Traitements des friches commerciales et agricoles en zones rurales

Développement de l’offre de service pour la rénovation énergétique globale et perf Efficacité énergétique des procédés AAP - Économie circulaire Diagnostics des bâtiments publics et associatifs + rénovation AMI - Soutien aux filières favorables à la protection de la ressource en eau Aide à la sécurisation de la ressource en eau Développer et diversifier l’offre des stations de montagne

AMI - Programme d’investissements d’avenir (PIA3) Grand Est - BE EST "EAU" - e l'amélioration durable de l'eau sous toutes ses formes (avec la BPI France)

AMI - Programme d’investissements d’avenir (PIA3) Grand Est - BE EST "bâtiment AMI - Programme d’investissements d’avenir (PIA3) Grand Est - BE EST "mobilité logistique et transports (y compris aéronautique et automobile)"

76


u territoire au Changement Climatique

ons

ur la protection des eaux souterraines

Perturbation du cycle de l'eau

Hausse des températures

Bouleversement des écosystèmes

X

X

X X

X X

X

X

X

X

des espaces communaux

X

ets structurants dans le domaine de l’eau

X

X X

ent et au développement durable à ture

X

, RNR, …)

X X

X X

nes rurales

X

que globale et performante

X

urce en eau

- BE EST "EAU" - en faveur de BPI France)

X

X X X X X X

X

X

- BE EST "bâtiment durable"

X

- BE EST "mobilité durable, intermodalité, "

X 77

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


Parmi les dispositifs qui concernent plus spécifiquement l’eau dans l’aménagement présent dans les tableaux, nous nous intéresserons plus précisément à cinq dispositifs qui peuvent jouer un rôle dans l’adaptation du territoire au changement climatique et donc mettre en œuvre les nouvelles politiques du SRADDET : - Étude et Travaux de prévention et gestion intégrée des inondations - Restauration des cours d'eau et milieux aquatiques - AMI - Eau et Territoire - Commune Nature (outils de la démarche zéro pesticide) - AAP - Urbanisme Durable

Étude et Travaux de prévention et gestion intégrée des inondations Le premier concerne les inondations et s’intéresse donc aux actions mises en place pour diminuer l’impact du phénomène et répondre à la directive inondation (DI) et au PGRI (Plan Gestion Risque Inondation), il pose donc trois objectifs : diminution de l’impact inondation, augmentation de la résilience et du retour à la normale et diminution de la vulnérabilité. Le choix de ce dispositif se base sur les évènements actuels mais il peut répondre aux problématiques changement climatique, telle l’augmentation de la fréquence d’inondation sur les territoires déjà touchés, ainsi que l’apparition et l’accentuation du risque sur de nouveaux territoires, notamment par saturation des réseaux et ruissellements. Aujourd’hui, il travaille en deux temps : Le premier temps permet d’augmenter localement les connaissances et de prévenir le risque, afin de développer la sensibilisation auprès du public et des acteurs du territoire, ainsi que la culture du risque pour favoriser l’acceptation du phénomène. C’est cette compréhension qui permet une meilleure prise en compte dans l’urbanisme et dans les travaux d’adaptation.

78

Le second temps cible la gestion de la crue et du risque lié, grâce au financement d’études et de travaux permettant de protéger les habitants, de diminuer les conséquences du phénomène (débit, écoulement, débordement) et de rétablir le territoire post-inondation. La réduction de la vulnérabilité se focalise sur les éléments permettant une résilience plus rapide, à savoir les réseaux, les services publics et les activités économiques.

A noter, que la cible principale du dispositif sont les inondations dont l’origine provient d’une crue intense et, de manière moins affirmée, les inondations issues de remontées de nappes et de non maitrise des eaux de pluie. En outre, les projets d’ouvrages en génie civil pouvant mener à la maladaptation sont financés au même titre que des projets s’attelant à une réflexion « sans regret » et fondées sur la nature. Leur fiabilité et leur durabilité reste incertaine notamment s’il n’y pas eu de réflexion globale à l’échelle du bassin versant afin de diminuer les risques et ne pas les concentrer en un point unique à l’aval.


Restauration des cours d’eau et milieux aquatiques L’objectif majeur de ce dispositif est de retrouver les services rendus par les milieux aquatiques et leur bon état, perdus au fil de l’anthropisation, c’est pourquoi il peut jouer un rôle dans l’adaptation. En effet, le dispositif « restauration » est assez complet quant aux problèmes de seuils, de recalibrage et de déconnexion. Il suggère une large possibilité d’actions afin de préserver et restaurer les fonctionnalités (zone tampon , reméandrage , création de mares et frayères, reconnexion de bras morts, création de zones humides artificielles, …). Or, toutes actions de préservations et restauration des services des milieux aquatiques participent à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique :

Zone tampon : création de milieux artificiels où se produisent les mêmes processus chimiques et biologiques que dans les zones humides naturelles dans le but d’atténuer les transferts de contaminants au cours d’eau (drains agricoles, rejet…) Reméandrage : création artificielle de méandres afin de retrouver un écoulement de l’eau naturel et limiter l’érosion et la vitesse de l’eau.

1. En leur permettant de remplir leur capacité de stockage et de dissiper l’énergie des eaux afin de réduire l’exposition au risque inondation, 2. En limitant et réduisant les pressions anthropiques tout en valorisant les services éco systémiques, 3. En permettant le maintien de la biodiversité, le déplacement des espèces et leur capacité de migration grâce aux continuités écologiques, 4. En stockant le carbone et en limitant le réchauffement des cours d’eau, 5. En garantissant des zones d’épuration des eaux. A noter que si la cible principale de ce dispositif sont les cours d’eau en zone rurale, cette politique de restauration des cours d’eau mériterait d’être plus approprié

par les élus locaux pour les cours d’eau qui traversent leur commune et leur centre-bourg afin d’améliorer les continuités et les habitats mais également le cadre de vie des habitants.

AMI - Eau et Territoire L’AMI Eau et Territoire n’a pas pour vocation à gérer l’ensemble des problématiques liées aux impacts du changement climatique sur les activités humaines, mais plutôt de mettre en valeur les services écosystémiques d’une rivière pouvant participer à un projet de territoire. Il le fait à travers deux objectifs :

79

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


1. Agir sur le patrimoine hydraulique vétuste selon leurs usages et enjeux

2. Développer des projets globaux de territoire autour des ouvrages et des rivières

afin de permettre de rétablir les continuités écologiques des milieux aquatiques soit en restaurant les continuités par l’effacement de l’ouvrage s’il ne représente plus d’enjeux soit de réduire l’impact environnemental par son équipement et aménagement si l’intérêt économique et/ou patrimonial doit être préservé.

par la valorisation des services écosystémiques afin de faire des rivières des atouts économiques, touristiques et environnementaux, supports d’activités et soutenant l’emploi pour encourager les villes et villages à retrouver un lien avec leur(s) cours d’eau, à le débétonner et le décanaliser.

Comme le projet restauration des continuités écologiques, l’AMI cherche à restaurer les continuités écologiques et les fonctionnalités. Cependant, il s’appuie sur un espace déjà anthropisé, en l’occurrence des seuils transversaux, pour faire évoluer le fonctionnement du territoire : • en y attachant de nouvelles valeurs socio-culturelles qui permettront de le préserver, • en y soutenant une diversification des activités qui permettra une meilleure résilience et apporter à une nouvelle vitalité au site, • en accompagnant l’émergence d’un nouveau lien entre la ville et son environnement. Grâce à ses objectifs l’AMI Eau et Territoire peut jouer un rôle dans l’adaptation au changement climatique car il finance des projets qui vont : - retrouver des espaces verts perméables notamment en cœur de ville, permettant de rafraîchir les ambiances thermiques, de stocker les gaz à effet de serre, et d’améliorer le cadre de vie.

- rétablir des continuités écologiques (trame verte et bleue) et donc la libre circulation piscicole - améliorer la résilience économique, sociale ou culturelle

Commune Nature (outils de la démarche zéro pesticide) Commune nature fait partie d’un dispositif plus large de « zéro pesticide » qui comprend par exemple l’accompagnement et la sensibilisation faite par les FREDON ou la semaine d’alternative aux pesticides. C’est une distinction pour les collectivités s’étant engagées dans la lutte contre les pesticides. L’engouement des collectivités pour la distinction en fait le symbole du zéro pesticide

dans le Grand Est. C’est une démarche porté par la Région et financée à 50/50 par la Région et les Agences de l’eau. Les collectivités signent la charte régionale d’entretien des espaces communaux et réalisent un plan de désherbage et de gestion différenciée. L’idée est ensuite de monter les 3 échelons d’engagement de 1 à 3 libellules. L’objectif premier est celui de la qualité des eaux des 80


nappes. Cependant la qualité des eaux de surfaces et la préservation de la biodiversité est de plus en plus présente. Depuis 2017, l’intérêt est d’aller plus loin que ce qui est exigé par la loi Labbé (qui interdit les produits phytosanitaires sauf exception). C’est pourquoi il semble intéressant de commencer à réfléchir à une évolution forte de l’outil pour intégrer les autres enjeux du changement climatique (quantité d’eau, qualité de l’air, gestion des eaux et acculturation) et récompenser les communes qui s’emparent de la problématique.

Affiche commune nature (source : Grand ESt)

AAP - Urbanisme Durable du tissu urbain (hors parcelle exploitée et corridor écologique), plus respectueux de l’environnement et de la santé). Les projets sont choisis sur leur approche globale multithématique (déplacement, habitat, biodiversité, paysage, déchets, eau, …) pour répondre aux différents enjeux de préservation et d’amélioration (biodiversité, continuité écologique, identité paysagère, ressource, cadre de vie et liens sociaux) ainsi que de gestion et développement (énergie, déplacement, économie locale, …).

Le développement durable appliqué à l’urbanisme a pour ambition de réinterpréter la ville pour répondre aux besoins actuels et futurs. Il propose d’inventer de nouveaux modes de vie et d’habiter, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, améliorer le cadre de vie, préserver les ressources naturelles et les paysages tout en stimulant l’économie locale. L’une des préoccupations particulières étant le changement climatique. L’objectif de cet appel à projet est donc de soutenir les projets d’urbanisme moins consommateurs de ressources naturelles et d’espace (les projets en extension sur des terres naturelles ou agricoles ne sont pas aidés, les projets financés sont des opérations de reconversion de friche, de renouvellement urbain ou de densification

Le dispositif fait une liste de 23 leviers dans l’urbanisation, qui permettent d’avoir une approche durable. Parmi eux, neuf sont des leviers d’une adaptation au changement climatique grâce à l’eau et aux milieux naturels qui lui sont associés :

1. Prise en compte des problématiques en lien avec l’habitat, les déplacements, la préservation de la biodiversité, des continuités écologiques et des identités paysagères, la gestion des déchets, la gestion naturelle des eaux de pluie, l’amélioration du cadre de vie et des liens sociaux … 2. Maîtrise de la consommation d’espace et de l’étalement urbain, 81

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


3. Cohérence de la nature dans l’espace urbain, préservation et restauration de la TVB et de la biodiversité, 4. Intégration paysagère des opérations et plantation d’espèces végétales locales/ patrimoniales, 5. Lutte contre l’imperméabilisation des sols, 6. Gestion alternative des eaux pluviales (conception visant le « zéro rejet », la réduction des consommations notamment pour les espaces publics, la réutilisation des eaux de pluie, la régularisation des écoulements d’eau par la végétation, …), 7. Cadre de vie harmonieux en valorisant la qualité architecturale et le patrimoine naturel et bâti en lien avec l’identité locale. 8. Urbanisme/cadre de vie favorable à la santé et au bien-être (qualité de l’air, bruit, activité physique, mobilité douce,…), 9. Démarche transversale et participative active associée à une sensibilisation au développement durable, dans le sens de pratiques réfléchies à long terme et au regard des préoccupations et évolutions futures qu’elles soient climatiques mais aussi sociales, économiques ou environnementales.

Par cet appel à projet, la Région Grand Est pose les bases de réflexion d’un nouvel urbanisme à l’échelle régionale qui, même s’il reste encore peu développé, et ne s’occupe pas de l’ensemble des modèles urbains, va

c. Le Grand Est vers la définition de nouvelles actions Si ces dispositifs participent, d’ores et déjà, à adapter le territoire au changement climatique, des évolutions possibles peuvent être identifiées. L’objectif de ces évolutions serait de privilégier les projets permettant

une adaptation, c’est-à-dire diminuant les impacts et réduisant les amplificateurs tout en maintenant un développement dynamique, et ce, quelle que soit l’échelle.

Pour mieux sensibiliser et faire comprendre les risques Généraliser le choix des projets en 2 temps, c’est-à-dire avec un premier temps obligatoire à l’ambition d’acculturer et d’expliquer le projet et ses effets grâce à un format libre, puis, en second temps, une réponse à l’objectif initial du dispositif.

82


Valoriser les projets illustrant la mémoire du lieu, montrant le chemin de l’eau ou exprimant une culture du risque, en développant le critère du dispositif inondation «Sensibilisation, connaissance et conscience du risque» pour tous les projets. L’axe est obligatoire dans les PAPI, mais l’intérêt sur ce point est de pouvoir développer la mémoire du risque à l’ensemble des territoires et de créer de véritables outils de sensibilisation à l’échelle régionale (Morisseau, 2012). Inciter au développement de réseau d’alerte (communication et information) local sur les étiages, la sécheresse, le manque d’eau ou la disparition d’espèces. Soutenir la réalisation d’éléments de communication après la réalisation du projet pour participer à un recueil de retour d’expérience (témoignage vidéo, réunion, …) et valoriser le projet à l’échelle régionale. L’objectif étant la construction d’un recueil de projets adaptant le territoire au changement climatique, qui pourraient être reproductibles et/ou inspirer d’autres porteurs de projet afin d’accroitre les projets d’adaptation. Accompagner les porteurs de projets dans leur stratégie d’adaptation dans les documents de planification mais aussi le développement des projets, notamment dans les petites communes et intercommunalités qui n’ont pas l’ingénierie nécessaire. Développer les programmes de recherche locaux à l'échelle la plus adaptée (acquisition de données, modélisation, …) sur le changement climatique, ses conséquences locales et les solutions envisageables. Le premier objectif est de pouvoir déterminer les territoires les plus vulnérables au changement climatique, où la vigilance doit se focaliser et où les politiques régionales pourraient être mises en action en priorité. Le second est de développer de nouvelles approches. Bonifier les approches innovantes sur la concertation, la perception sociale, la communication autour du sujet de l’eau qui permettront l’acceptabilité du sujet et son appropriation afin de mieux protéger la ressource. Développer les formations autour du sujet que ce soit dans les collectivités, pour les élus, ou encore les étudiants et les professionnels (voir III.1.a.).

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Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


Pour améliorer le cadre de vie tout en atténuant les risques Affirmer l’effet de lutte contre les îlots de chaleur par la réouverture des cours d’eau et leur renaturation. Interroger les interconnexions entre les espaces de biodiversité et de nature en ville, afin de comprendre leurs interactions et leurs participations à la trame verte et bleue fine. Autrement dit, questionner l’inscription d’un réseau d’espaces verts et ouverts, au sein de la commune et non uniquement sur ses abords. Une commune avec des corridors est tout autant agréable Le CBS définit sur la surface pour la faune et la flore que pour les habitants de la du projet d’aménagement commune. En effet, ces derniers privilégient les espaces (neuf ou rénovation) la part bien connectés au reste de la commune, agréable et facile de surface favorable à la d’accès (Laille, 2013). biodiversité (selon l’ADEME). Inciter à la désimperméabilisation d’espace minéralisé et/ou perméable afin de renforcer les espaces verts dans un objectif d’amélioration de la qualité de l’air et de la biodiversité ainsi que d’infiltration au plus près. Cette incitation peut aussi passer par l’utilisation d’un système de coefficient de perméabilité tel que le coefficient de biotope (CBS ). Développer les surfaces végétalisées sur les murs et toitures, dans la mesure où elles s’harmonisent avec la qualité architecturale locale des constructions. Les surfaces végétales même si elles ne font pas partie des aménagements paysagers de renaturation participent à stocker l’eau de pluie, à la TVB et à lutter contre les îlots de chaleur.

La surface éco-aménageable est calculée à partir des différents types de surface. A chaque surface est associé un coefficient. L’ensemble de la surface de projet est prise en compte, bâti d’habitation compris. Il a pour objectif l’amélioration du microclimat, l’infiltration des eaux pluviales et l’alimentation de la nappe phréatique ainsi que la création et la valorisation d’espace vital pour la faune et la flore. L’outil est né à Berlin, il se démocratise en France depuis 2014 et la loi ALUR. Il peut être exigé par un document d’urbanisme, de l’échelle de la parcelle à celle du PLUi, mais n’est pas obligatoire. Le coefficient minimum à atteindre est fixé par la maitrise d’ouvrage et peut être variable.

Valoriser les projets de restauration de ripisylve qui participent fortement à l’adaptation au changement climatique en favorisant la biodiversité et l’autoépuration, en ralentissant les coulées de boues et les ruissellements, en réduisant les îlots de chaleur en milieu urbain et en réduisant le phénomène d’érosion des berges notamment lorsque le débit est élevé (phénomènes violents). La ripisylve participe à renforcer la TVB en formant des corridors écologiques. Son développement participe à retrouver le bon fonctionnement du cours d’eau et à favoriser des paysages naturels. 84


Amplifier le nombre de projets de gestion des eaux pluviales en favorisant l’hydraulique douce dont les obstacles contre les coulées de boues, la filtration végétalisée, l’infiltration de l’eau au plus près, l’évacuation de l’eau de pluie hors réseaux, le renforcement des obstacles ralentissant les coulées de boues – haies, ripisylves, bande enherbée, en collaboration avec les chambres d’agriculture et les agences de l’eau. L’objectif étant de ralentir le ravinement, les écoulements, de ne pas sursaturer les réseaux et d’éviter la concentration de l’eau en un seul endroit ainsi que le transport d’effluents (provenant des routes et parkings notamment) (voir III.1.b. penser une stratégie de résilience).

Pour favoriser l’attachement social aux espaces naturels et aquatiques Privilégier l’usage multifonctionnel des sites de projet et promouvoir les projets territoriaux autour des milieux aquatiques attachés à la vie quotidienne ou à un intérêt patrimonial, culturel et paysager. L’idée étant de transformer ou maintenir le site de projet comme un support de nature, d’îlot de fraicheur, de valorisation paysagère, de corridors de biodiversité, d’activités et d’usage. L’objectif est d’une part, de faire participer l’espace utile à la lutte contre les inondations, la gestion des eaux et le renforcement de la trame verte et bleue pour la valorisation du site et de la vie du territoire. D’autre part, de sensibiliser les habitants et de changer les regards sur la nature ordinaire par le côtoiement (au-delà d’action ponctuelle) (voir III.1.b. désimperméabiliser pour introduire une nature sauvage). Cette multifonctionnalité doit se faire dans un but d’amélioration du cadre de vie, en lien avec les services écosystémiques de manière à faire de l’eau un élément paysager de la vie quotidienne et pouvoir observer ses variations à chaque pluie. En effet, les espaces qui vivent avec l’eau sont des espaces évolutifs qui accompagnent les saisons et le rythme du territoire. Il est nécessaire d’intégrer l’eau comme un élément de l’aménagement afin d’éviter la fermeture de l’espace public avec par exemple des bassins entourés de grillage alors que l’eau de ses bassins, ou issue des inondations, peut être un point fort de l’ambiance paysagère du quartier. Cette multifonctionnalité peut se traduire par différents moyens : l’inscription du site dans un parcours de (re)découverte du milieu avec des sites d’observation (bancs, cabanes, borne explicative, parcours immersif,…), un projet de valorisation du paysage (lecture du paysage depuis un point de vue), un parc public comme le parc de la Seille à Metz, des friches végétales , des maraichages, des jardins partagés ou des vergers communaux en libre accès, la réappropriation du cours d’eau par les habitants avec un usage économique durable ou associatif ou encore la gouvernance pour lutter contre les inondations à l’échelle intercommunale ou du bassin. 85

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


Soutenir les projets connectants à travers des espaces publics : la ville, les cours d’eau et les divers milieux aquatiques à proximité (bras, étangs, carrières, ballastières, zone humides, …) afin de faire entrer la trame verte et bleue dans la ville et donc la biodiversité, favoriser l’attachement social aux espaces naturels et aquatiques et par conséquent protéger la ressource et l’espace naturel.

Pour ne pas aggraver les risques Prendre en compte la quantité d'eau disponible, actuelle et future dans la réflexion sur les projets car l’apport de nouveaux consommateurs d’eau sur les nappes en tension quantitative (la quantité d’eau consommée dépasse la quantité rechargée par infiltration) ne sera pas durable notamment si le quartier n’est pas adapté et économe en eau.

Mettre en avant l’économie de la ressource en eau autant que celle de l’énergie pour des constructions sobres et économes, ainsi que pour l’entretien des espaces extérieurs, en développant les stratégies d’arrosage mais aussi le choix des espèces plantées, du couvert végétal ou l’origine de la ressource (réutilisation d’eau de pluie).

Rechercher des solutions alternatives à l’alimentation en eau potable pour les territoires dont les captages sont vulnérables face à la quantité ou la qualité de leur nappe. Attention : cette démarche ne doit pas se substituer à la préservation et la reconquête du captage. La recherche de nouvelles possibilités d’adduction doit être une solution temporaire et n’implique pas la fermeture et/ou l’abandon du captage.

Subordonner le financement des ouvrages de protection à une étude d’impact sur les territoires avals et les milieux aquatiques de manière à ne pas financer de projets qui élèveront le risque des territoires voisins.

Limiter la maladaption des professionnels (agriculteurs, entreprises,…) en les encourageant à modifier leur modèle économique et leur stratégie pour développer des actions d’adaptation.

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Pour construire des projets durables Privilégier les stratégies liées aux dynamiques de crue (renaturation de cours d’eau, création, restauration ou maintien de zone d’expansion des crues, maintien de zone humide y compris « ordinaire »…) avant la création d’ouvrages de génie civil type digues, systèmes d’endiguement ou filtration chimique. L’idée n’est pas de stopper le financement des ouvrages hydrauliques mais de réfléchir en amont à d’autres solutions durables et plus adaptées au changement climatique. En effet, les ouvrages hydrauliques posent des questions de dimensionnement, de volume, de débit et de vitesse qu’il est difficile de mesurer et qui pourraient aboutir à une maladaptation ; c’està-dire un ouvrage qui ne sera pas résistant ou ne suffira plus lorsque les effets du changement climatique se feront sentir (voir III.1.b. retrouver une zone d’extension des crues).

Accompagner le recalibrage des sections de cours d’eau pour maintenir une concentration d’eau suffisante lors des périodes d’étiage et ainsi maintenir la continuité écologique (circulation piscicole).

Veiller au dimensionnement des ouvrages, adaptés à l’évolution du climat, et aménagements de gestion des eaux : bassins filtration, infiltration, noues afin qu’ils ne soient pas surdimensionnés mais puissent accueillir les crues en prenant en compte l’évolution des crues centennales sous l’effet du changement climatique (notamment en prévision de l’augmentation des volumes de pluies – moins régulières et plus intenses sur une courte durée).

Optimiser la maitrise foncière du fuseau de mobilité des cours d’eau ou des zones humides (voir III.1.b. réinterpréter le passé pour restaurer le milieu).

Suivre et lutter contre les espèces invasives afin de préserver la biodiversité locale tout en n’empêchant pas l’apparition d’un nouvel équilibre qui pourrait reposer sur des espèces allochtones.

Le développement et la mise en place de ces nouvelles actions, qu’elles soient au sein de la Région ou plus globalement étendues à l’ensemble des collectivités, des services de l’état et des professionnels, ne se fait pas sans freins. C’est pourquoi, il est nécessaire de développer de nouvelles attitudes en abordant cette adaptation avec une vision positive. 87

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


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A l’échelle du projet : de nouvelles attitudes à adopter a. Les freins à l’action Certains blocages ou freins ont été évoqués au fil des parties précédentes mais c’est l’accumulation de ces freins qui font obstacle à l’adaptation.

1. La culture individuelle Le premier frein est culturel et psychologique. En effet, contrairement à l’apparente tendance actuelle, il n’y a pas d’acceptation de la nature. C’est-àdire que collectivement, chacun souhaiterait plus de nature et de verdure avec un cadre de vie agréable, mais lorsque la suppression de places de parking est évoquée, le droit individuel reprend le dessus et chacun se bat pour conserver sa place de parking et pouvoir se garer au plus près de chez lui. Des réactions similaires sont lisibles sur la taille des parcelles, dont la diminution est peu acceptée en campagne malgré les politiques de réduction de la consommation de terre agricole et naturelle ou lorsqu’est évoquée la gestion différenciée des pelouses privées comme publiques. Le concept de verdure est souhaité mais pas au prix de concession individuelle. Les solutions fondées sur la nature sont même parfois considérées comme rétrogrades car on revient au fossé que l’on avait remplacé par des tuyaux et ce sans l’usage de solutions technologiques.

2. Le projet de vie face à l’inconnu En continuité du blocage culturel se retrouve la peur de la nouveauté. Les projets ne s’adressent pas spécifiquement à un public averti et/ou aisé, ils doivent donc être efficaces avec un bon rapport qualité/prix avant de s’intéresser à répondre à un enjeu tel que le changement climatique. Il faut réussir à convaincre que le projet proposé est de meilleure qualité devant un public qui se retrouve face à une nouveauté dont il ne connait pas la durabilité au contraire de ce qui se construit depuis plusieurs générations (Morelle, 2018). Cette difficulté est d’autant plus accentuée par les sommes d’argent engagées, que ce soit des particuliers pour lesquels il s’agit de leur projet de vie, que pour une collectivité ou un professionnel qui investissent et souhaitent un projet résistant. 88


3. L’oubli des risques Malgré cette méfiance face à l’inconnu, les citoyens ne sont culturellement pas adaptés aux inondations. En effet, la culture du risque est peu développée, ce qui a pour effet l’oubli des inondations passées et leurs conséquences, notamment lorsqu’elles ont une récurrence supérieure à 10 ans. De fait les acheteurs et les résidents de zone inondable parient sur la non-récurrence des inondations, en espérant échapper au risque tout en profitant de l’attrait des paysages aux bord de l’eau. Cependant, aux premières inondations, l’odeur et les dommages sont sources de mécontentements et les assurances payent d’énormes sommes. Aujourd’hui, il est estimé que le montant des dommages liés aux inondations sera cinq fois plus élevé d’ici à 2100 (CEPRI, 2016). Dans la manière de construire également, le risque est moins pris en compte. Par exemple, dans les années 1920, les habitations en zone inondable étaient surélevées et rien de précieux n’était mis à la cave. Aujourd’hui, les maisons sont construites de plain-pied et les appareils multimédia à la valeur élevée sont situés au rez-de-chaussée.

4. La logique des bassins versants En outre, même si les inondations sont connues, il existe une forme de renonciation à l’action. En effet, aujourd’hui, la compétence GEMAPI comme celle de lutte contre les risques sont confiés aux EPCI. Cependant, dans le cadre de l’eau et des inondations par crues, la problématique se situe à l’échelle du bassin versant. Pour les villes situées en aval, les possibilités sont limitées, il faut atténuer les risques qui se sont amplifiés en amont mais de fait, l’action n’est pas à la source du problème, donc son efficacité n’est pas absolue. Le travail à l’échelle du bassin versant est donc essentiel par contrat de territoire ou sous la coordination d’un syndicat mixte. En outre, il est nécessaire de trouver l’échelle adéquate pour ne pas bloquer le travail des bassins versants aux limites administratives (Lux, 2018).

5. Le manque de positif sur l’adaptation au changement climatique Face aux climato-sceptiques, il est nécessaire de trouver un angle d’attaque qui ne soit pas la vision catastrophe, constitué d’une liste de problèmes sans solution (Jurdy, 2018). Il faut donner envie d’agir et de chercher la solution positive qui sera bénéfique à tous, que le changement soit réel ou non, afin de convaincre élus et citoyens et faire la Région résiliente de 2050. L’objectif n’est pas de survivre à la fin du monde mais de construire le territoire idéal, par exemple avec des circulations apaisées et plus de végétalisation. 89

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


6. L’inattractivité politique et le défaut de reconnaissance de leur légitimité Les effets du changement climatique sont vécus comme des réactions à long terme vis à vis du temps politique. En effet, les élus sont à leur poste pour 5 à 6 ans et ont besoin de s’accaparer de projet avec des résultats visibles durant leurs années de leur mandat. Pour eux, se lancer dans un horizon à 2050 reste un danger, avec des résultats sur leur électorat qui sont incertains. De plus, il existe pour les élus mais aussi pour d’autres acteurs et citoyens, un rejet de l’action ou du manque d’action sur les autres parties, c’est-à-dire un manque de reconnaissance de la légitimité à agir, avec ou sans les autres parties. L’origine de cette négativité provient majoritairement de la peur de l’absence de résultat et des contraintes subies alors même que les autres n’agissent pas. Cependant, chacun est en capacité de réfléchir à l’adaptation à sa propre échelle (de sa parcelle à la ville voir au grand territoire) pour améliorer sa résilience. En 2015, l’Accord de Paris légitime, dès son préambule, les efforts de tous parties à s’investir dans les actions climatiques :

« La Conférence des Parties, […] Convenant de soutenir et de promouvoir la coopération régionale et internationale afin de mobiliser une action climatique plus forte et plus ambitieuse de la part de toutes les Parties et des autres acteurs, y compris de la société civile, du secteur privé, des institutions financières, des villes et autres autorités infranationales, des communautés locales et des peuples autochtones (...) » Préambule de la Décision d’Adoption de l’Accord de Paris, 2015.

7. La rémunération des équipes mandataires En outre, les équipes de maitrise d’ouvrage font face à des maitrises d’œuvre qui n’ont pas forcément la philosophie développement durable ou adaptation au changement climatique. De plus, depuis la loi Sapin, le montant de rémunération des bureaux d’études est proportionnel aux montants des travaux. De fait, ils vont préférer faire un revêtement minéral cher plutôt que créer un bassin de rétention en herbe ou des noues, car plus le coût des opérations sera élevé, plus ils gagneront. Enfin au contraire des modes de travail classique où chaque spécialiste travaille séparément, le choix d’une approche « intégrée » ou pluridisciplinaire nécessite plus de temps de travail en amont, plus d’études, plus de conception et d’interactions entre les différents acteurs du projet, ce qui rend l’approche plus complexe pour l’ensemble des corps de métiers (Maytraud, 2014).

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8. La difficulté de chiffrer A cette question de rémunération des maîtrises d’œuvre s’ajoute la question du prix total des travaux d’un projet climato-compatible. Aujourd’hui, les actions d’adaptation au changement climatique restent peu 1 coût est estimé inconnu car nombreuses et donc difficiles à chiffrer. Ce sont des leLenombre de projets réalisés ne actions au coût « inconnu » 1 et sans retour à court terme permet pas d’estimer un montant sur les résultats attendus, c’est donc un investissement stable au regard des imprévus qui peuvent être rencontrés, par « risqué ». exemple, si les corps de métier Par exemple pour les inondations, les estimations de coûts faites par l’Eurométropole de Strasbourg sont les suivants :

ne sont pas initiés à ce type de réalisation. En outre, le manque de vision à long terme rend difficile l’estimation des travaux d’entretien et la décision d’engagement.

Coût des actions curatives : 100 000€ Coût des actions préventives en génie civil : 10aines millions € Coût des actions préventives en solutions vertes : inconnu Coût de l’inaction : 20 000 000€ / inondation Cependant, si tous les acteurs ne sont pas en accord sur les coûts de ce genre de projet, ils notent que si l’investissement peut potentiellement être plus élevé, le coût à long terme, notamment sur l’entretien, est moindre et les bénéfices connexes sont plus élevés. Face à ces obstacles, il apparait nécessaire de développer les connaissances et les expérimentations sur le sujet, mais également de faire évoluer la manière dont est abordée l’adaptation pour ne pas en faire uniquement une nécessité mais bien une chance de dynamisation et de confort.

b. Les atouts à valoriser pour mieux aborder l’adaptation Pour faire entrer l’eau comme outil de l’aménagement des villes, il est nécessaire de comprendre les différentes formes qu’elle prend et de quelle manière elle est aujourd’hui présente dans les villes ; ses mouvements réguliers comme ponctuels ainsi que l’ensemble des bienfaits qu’elle peut apporter en étant plus prise en compte et plus présente. Car si l’une des clés de la mise en œuvre de l’adaptation c’est de positiver les actions en sa faveur, il est nécessaire de comprendre les bénéfices d’une meilleure résilience aux

risques à l’amélioration du cadre de vie et du confort thermique. Mieux aborder le changement climatique, c’est l’approcher avec un angle optimiste et positif en favorisant la multifonctionnalité de l’aménagement afin que l’adaptation ne soit pas l’unique objectif, mais plutôt l’objectif bonus qu’il est agréable d’atteindre et pour lequel les contraintes n’ont pas été supérieures aux bénéfices. Ainsi, le Parc de la Seille à Metz, permet 91

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


d’anticiper les inondations et de gérer les eaux pluviales du quartier tout en proposant

un espace de détente, de promenade et de rencontre très apprécié des Messins.

Anticiper les inondations grâce à un parc public inondable et la restauration d’un cours d’eau Fiche d’identité Metz (54)

Superficie 20 ha Maitrise d’ouvrage Ville de Metz Maitrise d’œuvre Jacques Coulon, paysagiste - Laure Planchais, paysagiste Sinbio, hydrologie - Ingerop, géologie - Coup d’Eclat, lumière Coût 7,6 millions € Réalisation 2000-2002

Au sud du Centre Pompidou-Metz (2010) est construit depuis 2002, le parc Jean-Marie Pelt (ou parc de la Seille). C’est le premier aménagement du quartier de l’amphithéâtre et sa forme est destinée à répondre à plusieurs enjeux : 1. Gérer les eaux de pluies du quartier amphithéâtre (28 ha) 2. Créer une zone tampon pour les inondations entre la Seille et le nouveau quartier 3. Retrouver un cours sinueux à la Seille, canalisée depuis le début du XXe siècle, afin de restaurer des milieux et casser le débit en cas de crue. 4. Offrir un espace de loisirs, de détente et de rencontre aux portes du centre historique Le parc a été dessiné pour rester fonctionnel avec des pluies décennales. Les différents bassins : filtration (roselière de 2000m²), lagunage (2500m²), sec, plan d’eau (8000m3 stockée) sont donc dimensionnés en conséquence. En cas de pluies supérieures ou de crues, le jeu de topographie, les jardins et prairies humides permettent de réduire le risque en créant une zone tampon, inondable et infiltrant l’eau.

Jeux de niveau

Centre-ville

Seille

Bassin sec

Prairie humide

Roselière

Quartier de amphithéâtre

Parc Jean-Marie Pelt, (source : Noémie Thomas) 92


Les actions qui sont faites pour le climat, pour être lancées puis acceptées et suivies, doivent parler aux citoyens et aux élus, en leur expliquant les bénéfices propres et immédiats qu’ils en retireront. Contrairement au changement climatique, la vision ne doit pas être à long terme mais bien à court terme. Pour l’élu, il s’agira d’un horizon à 5 ans afin de coller aux calendrier des électeurs, tandis

que, pour les électeurs, le terme peut être plus court puisque le rapport au projet sera direct et immédiat, tant dans l’amélioration du quotidien que dans l’appréciation qui en est faite. Le terme sera d’autant plus court si son efficacité est avérée (résilience à l’inondation, bonne gestion des eaux pluviales, (ré) apparition de la biodiversité, …

Recalibrer le cours d’eau pour se préparer aux étiages Fiche d’identité Ile-de-France

Longueur Maitrise d’ouvrage Maitrise d’œuvre Coût Réalisation

2,8 km Commune de Muttersholtz Sinbio 372 894 € 2013-2017

Les deux ruisseaux phréatiques traversent le village de Muttersholtz et ses environs. Avant les travaux ils étaient sur-calibrés (très large et profond avec un fond plat) ce qui entrainait : - des écoulements lents et un envasement du fond, - des assecs de longue période lors des sécheresses, impactant la biodiversité, - une absence de ripisylve Avec le changement climatique, les étiages devraient être plus longs et plus sévères accentuant le phénomène actuellement observé. L’absence de ripisylve accentuera les phénomènes d’augmentation de la température de l’eau et des problèmes d’autoépuration. L’objectif du projet était d’améliorer la diversité des écoulements et des habitats, de diminuer les périodes d’assecs, d’instaurer une gestion différenciée de la ripisylve et d’améliorer la qualité cours d’eau phréatique de paysagère notamment en milieu urbain. Pour ce faire le cours Muttersholtz d’eau et les sections de lits ont été retravaillés à l’aide de (source : SAGE Ill-Nappe-Rhin) banquettes végétalisées, de plantation et d’épis de peigne. Le projet a permis de retrouver une bonne dynamique du cours d’eau, avec une continuité d’écoulement des eaux et donc piscicole plus pérenne. Une espèce de poisson est d’ailleurs réapparue. D’autre part, la végétalisation en bord de cours d’eau et le maintien de l’eau en période estivale permet d’abaisser la température de l’air à proximité, de piéger le carbone et d’ombrer le cours et stabiliser sa température. 93

Chapitre 3. L’eau : un outil au cœur des villes de demain


Mener des actions efficaces pour l’adaptation passe également par le refus des techniques de green washing et l’éloignement des solutions basées sur le tout-technologie. Les solutions efficaces et durables ont besoin de se construire sur le trio eau-arbre-sol, c’està-dire des modèles vivants, organiques dont la plasticité et les capacités sont multiples et souvent méconnus.

Tandis que dans les zones urbaines, ce sont des projets tels que les QPV (Quartier Prioritaire de la Ville), les projets de rénovation urbaine ou les grands projets de territoire qui sont le reflet de la politique régionale, qui devront devenir des fers de lance de l’adaptation au changement climatique, tant dans le choix du bâti que sur les espaces publics. Dans les deux cas ce sont des territoires accompagnés voire financés par la Région, dont l’amplitude des publics touchés peut permettre d’amorcer la dynamique d’évolution recherchée.

Par exemple le PNR des Vosges du Nord, a fait le choix de miser sur la plasticité des espèces locales, historiquement présentes sur leur territoire plutôt que sur des espèces exogènes, issues de la pression économique à court terme (PNRVN, 2018). D’autres communes font le choix de rouvrir leurs cours d’eau et s’appuyent sur leur patrimoine hydraulique pour lancer une nouvelle dynamique paysagère, culturelle et touristique dans leur ville.

S’il est possible de faire évoluer les politiques publiques et la sélection des projets financés, il existe de nombreux freins qui contraignent encore les maitrises d’ouvrage et les maitrises d’oeuvre à s’investir dans l’adaptation au changement climatique. Mais pas seulement puisque le frein psychologique est également présent chez les habitants.

Enfin, l’adaptation fonctionnera si les visions sur le projet se multiplient tant d’un point de vue pluridisciplinaire que par les acteurs du territoire. C’est un dialogue qui a besoin de s’instaurer pour que la compréhension et l’action touche l’ensemble des personnes concernées et en capacité d’agir. Adapter le territoire doit être un cheminement collectif, c’est pourquoi s’appuyer sur d’autres expériences ainsi que sur les compétences existantes a son importance qu’il s’agisse du pôle de compétitivité de la filière eau : Hydreos ou du laboratoire du CEREMA (Nancy) qui travaille sur la nature et l’eau en ville. Des territoires plus spécifiques peuvent également être mobilisés. En zone plus rurale, ce serait notamment les PNR au nombre de 6 en Région Grand Est et les territoires porteurs de Plan Paysage comme le SCOTAM en région messine.

Une vision bénéfique de l’adaptation ainsi qu’un changement de regard sur l’eau pour ne plus l’envisager seulement comme un risque, une contrariété ou un accessoire mais plutôt comme un agrément et un outil au service du climat et de la vie quotidienne permettra de faire émerger des projets dès aujourd’hui.

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Conclusion L’adaptation au changement climatique est en pleine expansion. En effet, il apparaît de plus en plus évident que malgré les mesures prises pour atténuer les émissions de gaz à effet de serre, les conséquences de l’augmentation des moyennes de températures, de la modification du grand cycle de l’eau et du bouleversement de la biodiversité, se feront ressentir. L’adaptation des modes de vie, de l’économie et du territoire sont donc nécessaires. Si au fil des années, diverses réflexions se sont développées à travers l’architecture, l’énergie ou le transport, l’eau reste en retrait. De fait, le questionnement s’est principalement construit sur les risques encourus en raison des inondations ou de la dégradation de la ressource en eau. Cependant, les problématiques qui gravitent autour de l’eau sont plus nombreuses. Par exemple, la pérennité de la biodiversité et la viabilité des usages à long terme sont fortement fragilisées. La diversité des services écosystémiques de l’eau et les superpositions possibles avec d’autres usages, font émerger plusieurs réponses aux enjeux « eau ». En effet, gestion de l’eau à la surface, désimperméabilisation des sols, réouverture de cours d’eau, participation à la trame verte et bleue, diminution des îlots de chaleur, amélioration du cadre de vie, etc. participent à diminuer les enjeux et s’ajuster aux modifications. Utiliser l’eau comme un outil de l’aménagement apparaît alors comme une évidence pour adapter le territoire au changement climatique. Néanmoins, si la théorisation de ses solutions se développe déjà depuis quelques années, leur traduction en projet est plus rare. Face à ces

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réponses, persistent, en effet, une barrière psychologique à propos des résultats possibles et des bénéfices reçus ainsi qu’un frein économique fort. Durant les cinq mois de mon stage, la question de la sensibilisation est revenue régulièrement pour abaisser ses freins et développer le nombre de projets d’adaptation. Les acteurs du territoire ne sont, en effet, pas encore tous convaincus du changement climatique, du besoin de s’adapter, de la pertinence des solutions « fondées sur la nature » ou que l’eau peut être une ressource plutôt qu’un danger. La préservation de leur territoire et de sa dynamique ainsi que l’amélioration du quotidien et la protection des habitants peuvent, toutefois, être des arguments. Cependant, il paraît évident que, si l’acculturation peut permettre un nouvel essor et toucher de nouvelles personnes et corps de métier, le témoignage le plus percutant reste la démonstration par l’existant. Afin de déployer l’adaptation et changer les regards sur l’eau, deux stratégies se détachent. La première est l’incitation réglementaire, financière ou honorifique. Elle peut se faire de l’échelle régionale à l’échelle communale ainsi que sur l’ensemble des territoires. La seconde se situe dans l’accompagnement et la sélection des projets mis en place pour aller vers plus de qualité et de finesse dans la composition et la réflexion. Enfin, il apparaît que les territoires où les enjeux sont les plus forts et ceux où la mobilisation est la plus grande sont les plus à même de soutenir la mise en place de ces stratégies et devenir des territoires témoins. Pour conclure, l’adaptation est une démarche proactive au changement climatique. L’eau est l’un des multiples outils qui peuvent participer à cette adaptation. Ouvrir et explorer les occasions, développer et valoriser les projets, structurer et renforcer la coopération entre les acteurs, tels sont les défis qui s’offrent aujourd’hui afin de pérenniser, partager et transmettre le territoire.

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Entretiens AMAT Amandine, CCI, direction Industrie et Développement Durable, 15 mai 2018. BASCOUL Corinne, Agence de l’eau Rhin-Meuse, direction de la planification, 21 mars 2018. DRONNEAU Christian, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), service eau et biodiversité, 23 février 2018. DUPUY Adeline, Agence de l’eau Seine-Normandie, direction territoriale des vallées de Marne, réalisé avec Delphine Rousset, Région Grand Est, 11 avril 2018. GRESSE Lionel, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), service eau et biodiversité, 2 mai 2018. HERTH Marie, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), pacte pour la ruralité, 1er mars 2018. JURDY Nicolas et BACHMANN Vincent, DREAL, service eau biodiversité paysage, 25 mai 2018. LIZIARD Sophie, ENGEES, Laboratoire GEStion Territoriale des eaux, réalisé avec Delphine Rousset, Région Grand Est, 20 avril 2018. LUX Mickaël, EuroMétropole de Strasbourg, chargée de mission PCAET, 25 juin 2018. MIDOT Dominique, BRGM, directeur du Service Géologique Régional de Lorraine et directeur interrégional de la zone Nord-Est, 6 avril 2018. MORELLE Sébastien et l’Equipe du parc, Parc Naturel Régional des Vosges du Nord, 28 juin 2018. PEPPOLINI Christine, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), service transition énergétique, 22 mars 2018. PINAUD Vanessa, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), service ville et espaces urbains, 19 mars 2018. 100


PITREL Marina, Agence de l’eau Rhin-Meuse, direction de la planification, 17 mai 2018. ROSSI Alexandra, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), service eau et biodiversité, 7 mars 2018. SCHMITZBERGER Katia et MONACO Guillaume, Agence de l’eau Rhin-Meuse, direction de la planification, 21 mars 2018. SUAIRE Rémi et BOUYER Julien, BRGM, CEREMA, laboratoire de Nancy, unité nature en ville, eaux et territoire dans la ville, réalisé avec Delphine Rousset, 6 avril 2018. VENANDET Nicolas, Agence de l’eau Rhin-Meuse, direction des politiques d’intervention, réalisé avec Delphine Rousset, Région Grand Est, 10 avril 2018. VENANDET Nicolas, Agence de l’eau Rhin-Meuse, direction des politiques d’intervention, 5 juin 2018. VUIDEL Carine, Région Grand Est, direction de l’environnement et de l’aménagement (DEA), service territoire et ruralité, 16 mars 2018.

AUTRES Interview radio avec Jouzel Jean, climatologue, vice-président du GIEC, propos recueilli par Anaïs Huet, Europe 1, 22 juillet 2018. [http://www.europe1.fr/sciences/canicule-dici-2050-des-temperatures-records-de-

lordre-de-55-degres-dans-lest-de-la-france-3716708]

Interview de Maytraud Thierry, Maîtriser l’eau : quels enjeux pour demain ?, propos recueilli par Marie Schiewe, Eco-quartiers.fr [en ligne], 2014 [consulté en juillet 2018] http://www.eco-quartiers.fr/#!/fr/blog/2014/06/ maitriser-l-eau-quels-enjeux-pour-demain-rencontre-avec-thierry-maytraud-de-l-agence-atm-142/

Chambre d’Agriculture Alsace, visite guidée des actions contre les coulées de boues dans le Bas-Rhin, mai 2018. De LAJARTRE Arnaud, cours de droit de 4e année, Ecole de la Nature et du Paysage, INSA Centre Val de Loire, 2016. Région Grand Est, Exposition : La nappe phréatique du Rhin supérieur, coordonné par l’Ariena.

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Acronymes ACTEURS AFB BRGM CEN CEREMA

Agence Française de la Biodiversité Bureau de Recherches Géologiques et Minières Conservatoire des Espaces Naturels Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’Environnement, la Mobilité et l’Aménagement

CLE

Commission Locale de l’Eau

CNE

Comité Nationale de l’Eau

DDT

Direction Départementale des Territoires

DREAL

Direction Régionale de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement

EMS

EuroMétropole de Strasbourg

EPCI

établissement Public de Coopération Intercommunale

EPTB

établissement Public Territorial de Bassin

GIEC

Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’évolution du climat

PNR

Parc Naturel Régional

UICN

Union Internationale pour la Conservation de la Nature

Politique et Réglementations AEP CCNUCC CP(i)ER

Alimentation en Eau Potable Convention-cadre des Nations unies sur les Changements Climatiques Contrat de Plan (Interrégional) Etat/Région

DCE

Directive Cadre européenne sur l’Eau

DCI

Directive Cadre européenne Inondation

GEMAPI

Gestion de l’Eau et des Milieux Aquatique et la Prévention des Inondations

PAEC

Projets Agro-Environnementaux et Climatiques

PAPI

Programme Action Prévention Inondation

PCAET

Plan Climat Energie Territorial

102


PDU

Plan Déplacement Urbain

PGRI

Plan de Gestion des Risques d’Inondation

PPRI

Plan de Prévention des Risques Inondations

PLU(i) PNACC

Plan Local d’Urbanisme (Intercommunal) Plan National Adaptation au Changement Climatique

PSR

Plan Submersion Rapide

OAP

Orientation d’Aménagement et de Programmation

SAGE SDAGE SCoT SLGRI SRADDET TRI

Schéma d’Aménagement et de Gestion de l’Eau Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion de l’Eau Schéma de Cohérence Territorial Stratégie Locale de Gestion des Risques d’Inondation Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires Territoire à Risque important d’Inondation

Concept CBS

Coefficient de Biotope

ICU

Ilot de Chaleur Urbain

GES

Gaz à Effet de Serre

GEP

Gestion des Eaux Pluviales

HQE

Haute Qualité Environnementale

QPV

Quartier Prioriataire de la Ville

TVB

Trame Verte et Bleue

ZEC

Zone d’Expansion des Crues

ZI

Zone Inondable

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NoĂŠmie Thomas

MĂŠmoire Master 2 Architecture Structure et Projet Urbain

2017-2018


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