NISI Baptiste PFE 2023 - De La Ville à la Cité

DE LA VILLE À LA CITÉ

LES GRANDS MOULINS STARIONE

DE LA VILLE À LA CITÉ

LES GRANDS MOULINS STARIONE EUROMÉDITERRANÉE

Notice de PFE NISI Baptiste École Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille Juin 2023 Projet de Fin d’Étude, sous la direction de Matthieu Poitevin Domaine d’étude «DE2-4 : La Ville Euphorique»

Ode à la Ville

Ô ville, tu es le cœur battant de notre monde, Un lieu d’intensité, de créativité et de diversité, Tes rues grouillent de vie, de bruits et d’odeurs qui nous abondent, Un lieu pour s’évader et rêver.

De tes gratte-ciels qui percent les nuages, Aux parcs verdoyants qui offrent un refuge paisible, Tu es une symphonie de couleurs et de mouvements, Une ville qui vibre au son de ses habitants.

Tes rues sont une toile sur laquelle s’exprime l’art, Tes murs sont des pages qui racontent des histoires, Ta diversité est une force qui fait de toi une ville unique, Un lieu où chacun trouve sa place et où tout devient magique.

Les habitants, de toutes les couleurs et de toutes les origines, Sont unis dans leur amour pour cette ville, Ils célèbrent leurs différences et se réjouissent de leur diversité, Tous ensemble, ils en font un lieu de paix et de prospérité. Ô Marseille, tu es un joyau de la Méditerranée, Une perle rare dans un monde en mouvement, Nous sommes fiers de l’appeler notre foyer, Et nous en prenons soin avec amour et dévouement.

Photo de Yann Arthus-Bertrand

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2023 : la Ville

La ville ne répond plus à ses ambitions.

La Nature à presque disparu, les arbres sont abattus pour construire des parkings et des logements en béton, les oiseaux qui chantaient dans nos rues ont disparu, les jardins, parcs et autres refuges de la biodiversité s’en sont allés, desséchés par le manque d’eau, intoxiqués par la pollution et délaissés par ses occupants.

Les politiques ont échoué, le marché privé domine le foncier, nos rues se sont stérilisées, privatisées, l’espace public s’est dissipé face à la rapidité de notre société qui n’arrive plus à fédérer.

Le citoyen ne se retrouve plus dans ce modèle qui fonce droit dans le mur.

Ce modèle auquel il se réfère est celui de la Ville. C’est elle qui permet de faire société, de se retrouver, de partager, de flâner, de questionner, de rendre concrètes nos ambitions et celles de notre société afin de fabriquer un champ de possibilités infinies.

Un lieu du commun qui existe par et pour ses habitants.

Un lieu créatif, sensible, intense, surtout intense.

Un lieu où l’on s’épanouit.

Mais alors pourquoi la ville échoue t elle à devenir ce vertueux support de nos convictions ? Comment doit-elle se transformer et nous transformer, afin de répondre aux enjeux climatiques, sociaux et sociétaux ? Que représente la Ville aujourd’hui ?

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Manifesta

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Pour cela il faut regarder ce qu’il en est.

Si l’on s’intéresse à la strate supérieure de la ville que représente le logement, on se rend compte que ce lieu qui est, de par notre nature humaine et primaire, celui du refuge, de l’intériorité, de l’intime, de l’accomplissement, finalement le point de départ de la première expérience de l’être au monde ; est devenu une manne économique, un produit de spéculation financière normalisée fabriquant de manière pratiquement industrialisée des logements identiques et adaptables au plus grand nombre.

Il n’y a plus de prises de risques là où avant la commande publique permettait d’expérimenter de nouveaux modèles de logements aux gabarits tantôt audacieux et des typologies souvent généreuses et traversantes.

Désormais la promotion règne sur ces modèles, au point que nos logements, comparé à nos voisins européens, perdent en moyenne 10m² sur leurs superficies.

Photo DRAC Paca - Luc Vanrell 1994

L’explication à cela est politique. La réalité c’est qu’un T3 à Marseille à Paris ou en Ardèche fait la même taille. Que la vision est nationale, centralisée, et ne prend pas compte des territoires et du bon sens.

New Babylone A7

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Ce bon sens pourrait, et devrait s’incarner dans l’échelle locale, l’échelle de la collectivité qui symbolise la force décisionnelle de la Ville. Si les logements sont plus grands ailleurs, c’est parce que les collectivités imposent des minimums de surface aux promoteurs. La solution à l’air simple.

Mais le logement ne constitue qu’une strate de la Ville. Des logements plus grands ne peuvent être la solution pour panser les maux de la Ville. Le logement ne doit pas refléter un caractère sanctuarisé et idéalisé dans lequel il se substitue, de par sa réponse à nos « besoins » individualistes, à la strate du commun, du collectif. C’est cette échelle qui fabrique réellement la Ville et permet aux refuges de prendre racine sur une base saine, fertile, une société.

Si la Ville échoue, ce n’est pas que parce que les logements sont des boites à « habiter » mais bien en partie parce que les Rez de chaussée et l’espace publique ne participe plus aux foisonnements du commun et du vivant. Le sol des villes est séquencé, coupé par des rez de chaussée qui agissent comme des barrières et ne servent que de soubassement à l’empilement des logements. La rue n’est plus le lieu de la rencontre, de la flânerie, elle ne produit plus rien si ce n’est un moyen d’accéder à son espace privé. Elle n’est plus le support de la productivité, des commerces, des artisans qui font vivre et émerger un quartier.

Vider Paris, collage par Nicolas Moulin

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La rue qui permet de ramifier, de mettre en symbiose ses habitants à travers ce sol est étouffée par les voitures qui s’empilent ou s’étalent à travers la ville.

Le sol ne vit plus.

Il est inerte.

Stérile.

Artificiel.

La conception architecturale doit aussi évoluer et lutter contre le programme. Ce programme qui nous fait concevoir des surfaces de plancher au lieu de produire de l’Architecture, ce programme qui fige la conception, faisant que le projet est déjà obsolète avant sa livraison et ne peut muter, muer et s’adapter à ce monde en perpétuelle révolution.

Il faut laisser place au vide, aux rêves, à l’inattendu. Il faut perdre du temps pour gagner de l’espace, aussi naïf que cela puisse paraitre, c’est primordial.

Marseille Vert.

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Ilot des Grands Moulins Starione Euromed 1 & 2

Il est intéressant de regarder ce que Marseille produit en termes de mutation vers une ville nouvelle, plus verte, plus douce et ouverte.

Les projets Euroméditerranée 1 & 2 reflètent les ambitions de la ville à façonner un nouveau modèle, une nouvelle manière de reconnecter le Nord avec le Sud à travers un projet urbain alliant écologie, densité, mixité sociale, mixité typologique, parcs et mobilités douces.

Ces quartiers, comme celui du Parc Habité dans Euroméditérranée 1, sont réalisés à travers un chapelet d’ilots formant des barres, des tours et des cœurs d’ilots. Toutefois, ces réalisations promotariales sont souvent introverties, le cœur d’ilot est privé, protégé, sécurisé et peu végétalisé.

Les Rez de chaussée de ces opérations sont ici aussi des barrières, une coupure entre le public et le privé, en aucun cas une articulation.

Quelques fois on y trouve une surface dédiée aux commerces, mais rarement un vrai commerce pertinent qui permet d’intensifier le lieu. Il n’y a pas de lieux qui fassent places entre ses ilots, pas de dilation, de respiration, d’un lieu centrifuge, seulement des avenues et des contres allées desservant des rampes de garage et des places de stationnement.

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Ce quartier du Parc Habité n’est en finalité pas du tout un parc, il n’y a pas d’arbres, pas de zones végétalisées et les bâtiments qui devaient se matérialiser en un ensemble de jardins suspendus en sont finalement exempts.

La résultante de ces réalisations est de façonner des fragments de ville, non pas conçus de manière interconnectée et extravertie, mais bien figés, recroquevillés sur eux-mêmes et totalement mis à distance de la rue, du sol, de la Ville.

En total opposition à la ville traditionnelle qui se construit, certes à travers aussi une logique d’ilot, mais surtout à l’échelle de la parcelle et du cadastre, ces nouveaux ilots sont conçus comme une entité à part entière prenant place sur l’ensemble de la surface disponible à bâtir.

L’ilot est lisse, ne permettant pas aux pleins et aux vides de se rétracter et se dilater, de creuser une intériorité, des connexions.

Secteur Chave

Finalement ces ilots de Rue de Tivoli et de Rue d’Aubagne ne sont peut pas être si mal conçus ?

Rue de Tivoli

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De ces fragments de ville qui ont émergé du sol, il ne reste qu’un ilot qui reste vierge de toute intervention pour le moment, c’est celui des Grands Moulins Starione, à l’articulation d’Euromed 1 & 2.

Il se situe à la jonction du Parc Habité avec au Nord le futur parc de Bougainville ainsi que la connexion au parc du ruisseau des Aygalades jusqu’au quartier Nord, à l’Est les grands ensembles de Felix Pyat et l’opération Docks Libres de Nexity et à l’Ouest la cité scolaire Antoine de Ruffi, la cité scolaire internationale Jacques Chirac ainsi que les tours CMA CGM, la Marseillaise et le quai d’Arenc.

Le site industriel, toujours en activité, produit la farine de blé pour la marque Francine et Banette depuis 1885 et n’a cessé d’évoluer, se construisant de manière empirique et s’étalant sur pratiquement l’ensemble de la surface au sol.

Allant du silo de stockage du blé en béton, à une tour de production de farine, une autre de stockage, des espaces administratifs et enfin un ensemble imbriqué de petits bâtiments de logements, dont certains en péril, et d’entrepôts couverts, il ne reste que des routes étroites comme espace de vide, coupées de la ville par des murs d’enceintes et des portails.

Plan Masse Ilot des Grands Moulins Starione

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La fin de vie de ce site industriel est déjà actée, face à la pression foncière, l’industrie veut se déplacer plus au Nord de Marseille et le projet d’extension Dock Libres 2, toujours porté par Nexity, n’attend que le feu vert des bulldozers pour finaliser son opération.

De fait, ce site est un parfait cas d’étude pour imaginer la ville autrement, établir un modèle, un processus, non pas que pour densifier la ville et désimperméabiliser les sols, mais pour intensifier la vie de ses habitants, en faire un lieu ouvert, disponible, généreux, provoquant la rencontre, le partage et l’inattendu. Un lieu qui par sa sensibilité, ses ambiances et son échelle fabrique un cadre de vie renouant avec la ville traditionnelle méditerranéenne, un lieu qui met en exergue ses habitants et cultive la cité.

Ainsi le projet doit provoquer les changements qui doivent opérer à travers différents axes : La mutabilité des espaces bâtis, parce que les pratiques changent continuellement et l’architecture doit accompagner cette adaptabilité et ne pas se renfermer sur la fatalité.

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Des logements plus grands, non pas pour se sédentariser d’autant plus dans l’individualité mais bien pour s’épanouir et apporter confort et durabilité à ses modèles qui doivent, eux aussi, pouvoir muter, se transformer.

La nécessité de désartificialiser nos villes s’accompagne aussi par la densification. Une ville dense n’est pas une ville inhumaine. Il suffit qu’elle prenne racine dans un sol, une strate du commun, qui offre espace, culture, rencontre, partage et intensité à ses habitants.

La technicité constructive que questionne la densification doit s’accompagner par un objectif de neutralité carbone dans les matériaux mis en œuvre. L’architecture ne doit plus être obsolescente mais vivante.

Le sol comme base fondatrice de la Ville et du commun, non plus comme un espace servant la consommation et desservant le bon sens.

Un sol vivant, planté d’arbres à feuilles et de fleurs des champs, apportant fraicheurs, ombres et refuge à la biodiversité pour ne former qu’un tout en symbiose avec la Ville.

Une Ville des mobilités, désenclavée de ses voitures et de ses parkings. Une Ville naturelle, productive, accueillante et généreuse. Une ville forte de ses habitants, une ville qui fait société.

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2053 La ville a mué en cité.

LA CITÉ

Malgré les crises climatiques, sociales et le manque de ressources qui a impacté l’humanité, les villes ont su reprendre leurs droits.

Le vis-à-vis n’est plus une tare, cela permet à la cité d’être plus singulière, plus sensible et poétique. Les odeurs, les bruits, les balcons, les bars et cafés témoignent de la vie qui s’épanouit en ses lieux.

Les citoyens vivent désormais ensemble, soudés et connectés.

Ces lieux insolites participent à provoquer l’inattendu, partout.

L’échelle est redevenue locale. Les grands magasins de distribution ont disparu, les voitures bannies, à la place le sol de la cité pullule de petits commerces, de restaurants, d’agora diverses et variées partout dans la ville. Partout.

La réappropriation de bâtiments voués à la destruction ont permis de les transformer en lieu de synergie, accueillant des serres, des jardins, des centrales de traitement des eaux, des murs d’escalades ou des refuges urbains côtoyant le paysage et permettant l’évasion.

Les routes sont devenues des forêts, des pistes cyclables, des transports en commun, ça en a libéré de la place !

Le sol respire, transpire, vit et fait vivre ses habitants.

L’architecture est désormais malléable, à l’image du vivant elle arrive désormais à s’acclimater à chaque situation, à intensifier chaque richesse qui émerge de son sol, elle offre enfin un support pour exprimer la diversité de ses habitants.

Les logements sont tous traversant, il n’y a plus de climatisation, plus de chauffage. Ils ont été remplacés par des matériaux épais, naturels apportant inertie, confort et renouant avec le bon sens et la compréhension de son milieu.

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Les vides deviennent des esplanades de la culture, de la démocratie, des lieux vivants proposant des théâtres urbains ou tout à chacun peut s’exprimer, exposer, partager et se rencontrer.

La cité informelle a su incarner ce champ des possibles qui nous manquait tant, fabriquant un lieu de création et d’invention, manifestant la vie et l’euphorie !

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