NEG (Hors-série)

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L I T E R A T I A Y O NEG 2 0 2 2
KEPONE Fashion www negmagazine art Toupatou Gwadloup Fashion new obsession: N E G LES SURVIVANTS DE LA CRISE KEPONE
NEG. Résistancesintellectuelles artistiquesetpostcoloniales Directrice de publication Tessa Naime Rédactrice en chef Tessa Naime Contributeurs Tony Bourguit, Matthieu Leseur, Georges Nicolas, Kévin Sapor, Marvin Londinfer, Ludovic Moradel, Mano D'Ishango, Noel Daufour, Sormain Sandro, David Erauss, Awno, Minwi, Mathieu Balagne, Joao Gabriel, Kévin Guimba Grandisson, Ludvik Jean Denis, Malik Duranty, Didier Destouches, Youri Richer Photographie de couverture Anais Colors Photographies Teddy Tavan, Cotton Bro Studio, AFP Relecture Noel Daufour Communication / Diffusion Tessa Naime EDITORIAL OFFICES Moreau, Goyave 97128 Goyave, GUADELOUPE +590 690 05 90 30 Sherbrooke, Québec J1K 1M1 CANADA Société Tessa Naime +590 690 05 90 30 Section Moreau 97128 Goyave GUADELOUPE NEG est un magazine indépendant, et n'est affilié à aucune structure politique www.negmagazine.art
editorial NEG 03 Tessa Naime RAP, IPOP KREYOL 22 POEZI 58 REVOLTES 30 TEKS DIVERS 07

Ici, se rencontrent des voix issues de territoires (anciennement) colonisés, de milieux divers, de réalités sociales divergentes, de sensibilités opposées Des hommes de professions différentes Des hommes de langages différents Parmi eux, des pères de famille, des militants, des travailleurs, des intellectuels, des penseurs, des artistes, des prisonniers politiques, qui ont tous en commun une chose que l’on ne peut nier : la liberté d’écrire.

Ici, entre l’intime et l’estime, se meurt une textothèque authentique, une mémoire littéraire combinant des écrits de tous genres : poésie, essais, pensées, portraits, script, mémoires et textes de rap

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Note de l'éditeur Tony Bourguit Matthieu Lesueur Kévin Sapor Georges Nicolas Marvin Londinfer Youri Richer
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Mano Di Shango Ludovic Moradel Noel Daufour Jao Gabriel Mathieu Balagne Sormain Sandro Kevin G. Grandisson Ludvik Jean-Denis Didier Destouches Malik Duranty David Erauss Arnaud (Awno) Minwi
LE MAGAZINE ANTI COLONIALISTE
NEG

CARBONARA

L’amour est toujours une expérience singulière, bien différente de ce que j’ai vécu auparavant Il revêt toujours cet exotisme qui se renouvelle constamment, arbore encore ce génie du contrepied qui sème toutes mes anticipations

Je suis passé du bouffage de cul compulsif à la douceur tiède et diffuse d’un sentiment qui se délite, effervescent au contact du temps, et qui, pour que tout se passe bien, doit mourir en même temps que ceux qu’il contamine

J’en suis encore plus convaincu que jamais : rien n’est à la hauteur de ce sentiment et toutes les tentatives de l’encadrer sont vouées à l’échec

Le couple n’y parvient pas car il consiste trop souvent en un arrangement entre deux jalousies respectives Le couple profite de l’amour, mais l’amour n’a besoin d’aucun statut Le couple est une fable sociale romantique, anachronique Je partage la vie de quelqu’un, je lui dis souvent « Je ne suis pas en couple, je suis avec toi » M’efforcer à « monovaginer », à ignorer que le monde est surtout constitué de tous les endroits où je ne me trouve pas présentement, à tasser mes frustrations mélancoliques et à considérer que demain n’existe pas, toute cette magie n’est possible que par elle C’est un monde fragile et absolu où la lucidité ne sert à rien puisqu’elle est tout ce que j’ai besoin de voir

Le sexe est encore un autre écueil Il est le vigile incompétent de la relation amoureuse. Il ne faut jamais avoir partagé le regard chimique d’une personne, ressenti cette chaleur qui part des entrailles pour complètement ensevelir son cerveau, se sentir parfaitement impuissant face à ce que deux corps en résonnance réclament, finir par baiser comme on se bat, se donner comme on veut se retenir, être là comme on veut partir, il faut vraiment ne jamais avoir connu cela pour considérer que le sexe ait un quelconque rapport avec l’amour L’amour n’a pas besoin du sexe Le sexe n’est pas un enjeu Le sexe est le sexe Point

La dernière chose que j’ai faite par amour, c’était d’apprendre la véritable recette de la carbonara alors que je ne peux pas blairer ça. J’ai raté cette putain de recette une bonne trentaine de fois, tantôt parce que l’eau des pâtes était trop chaude et que donc les œufs cuisent, tantôt parce que lesdites pâtes n’étaient pas « al dente »

C’est là que j’ai compris En m’efforçant à acquérir cette compétence En me faisant mal volontairement pour son plaisir : L’amour est une torture que l’on s’inflige volontairement pour le plaisir de l’autre en espérant que ce soit réciproque

01
Istwa N E G
Tony

Et si... je n'arrivais pas à devenir libre car je l'ai toujours été ?

Ça y est, je m’en rappelle. Encore dans ce lit, encore dans cette chambre Encore un réveil marqué par la fatigue de ne pas être qui je voudrais être, de ne pas être où je voudrais être Encore une journée qui commencera comme elle se terminera

Cette routine sans fin me laisse penser que je suis prisonnier de cette pièce, de ce domicile, de ce travail, de cette île, de ce pays, de cette planète, de cet univers, de cette vie Mais de quel droit puis je me sentir ainsi ? Puis je me permettre de me sentir aussi mal ? La raison me blesse, je finis par culpabiliser et m’enfermer davantage Quelle ironie ! Moi qui souhaite tant sortir. J’aimerais changer. J’aimerais me sentir libre, épanoui, heureux Mais, malgré mes efforts, si je m’endors dans l’envie, je me réveille toujours dans la frustration.Alors, dès que je peux, je rêve, je fuis. Je m’échappe avec mon imagination. J’explore des lieux que je n’ai jamais connus Je visite des souvenirs que je modifie selon mon humeur. Je vis ce qu’au fond de moi je crois impossible pour moi

Et, même dans mes voyages les plus excitants, je sens un poids accroché à mes pieds Je sens cette chaîne qui me lie à cette prison que tous appellent la vraie vie J’ai si idéalisé ma vie que j’en suis dégoûté. Tout me paraît fade. Même les plus belles expériences deviennent des souvenirs dépourvus de couleurs. Tout finit par passer et rien ne change. Je suis si lassé que j’y trouve une forme de salut On me dit parfois pessimiste, je me considère réaliste. Qui oserait prétendre être libre ? Quelle ironie !

Accepter la fatalité me libère. Parfois, une pensée me vient puis une autre et une autre. Perdu dans ma réflexion, je m’interroge sur ce que je veux vraiment Et si ce n’était pas la liberté que je désirais mais la libération ? Et si je ne pouvais être libre nulle part car je suis forcément quelque part, dans un lieu qui m’entoure et me limite ? Et si je n’arrivais pas à devenir libre car je l’ai toujours été ? Quelle idée stupide. Comment pourrais je être libre quand tout m’oppresse ? Comment pourrais je être heureux quand les choses vont rarement comme je le souhaite ? Comment pourrais je accepter cette réalité ? Je sens un conflit en moi. Ces vérités si familières s’opposent au doute créé par ces nouvelles questions.

E À
MATTHIEU LESUEUR C O M M E N T S A M A N T H A M A R N I E R R E S T E J E U N
4 0 A N S

Je choisis d’arrêter de réfléchir. À quoi bon ? Je préfère retourner au fatalisme que je trouve maintenant confortable Tout est déjà foutu, tant mieux. Cet état d’esprit me détend. Je n’ai rien à combattre, rien à douter, rien à chercher et rien à trouver. Je serais prêt à tuer l’ambition d’un enfant pour qu’il se libère de la souffrance et de la frustration

Je suis en paix et je veux que les autres le soient aussi. J’insiste Évidemment, qui écouterait un fataliste se prétendant réaliste ? Réalité alors qu’elle n’est pas celle dont je rêve ? Moi qui me prétends libéré, je ressens de la frustration et de la colère. Puis revient le doute. Et si j’étais dans l’erreur ? Les questions que j’avais mises de côté surgissent. Cette fois, je tiens à en finir. Je veux une réponse définitive.

Avant, j’écrivais pour me libérer. Aujourd’hui, j’écris car je me sens libre.

J’explore ces questions et en trouve une autre : Et si la liberté était une sensation si familière que je n’arrivais plus à la ressentir ? Peut être qu’il ne s’agit pas d’imaginer quelque chose de nouveau mais de retrouver ce qui a toujours été là. Je repense à toutes ces fois où j’ai ressenti un énorme stress car je ne trouvais pas mon téléphone, innocemment, dans ma main Peut être qu’il ne s’agit pas de regarder au bon endroit mais de regarder de la bonne façon Cette fois, je ne fuis pas. J’explore ces idées désagréables qui m’indiquent que je souffre depuis si longtemps car je cherche ce qui a toujours été là. J’ai beau vouloir les contredire, elles ont du sens Je peux me sentir prisonnier dans un château comme je me suis senti libre en emménageant dans mon premier studio. Finalement, est ce le lieu qui importe ou moi ? Chaque réflexion m’amène à penser que je suis si libre et heureux que j’oublie l’être Je cherche à me libérer car je crois être prisonnier. Et si ce n’était pas le cas ? J’observe l’extérieur et le laisse me définir. C’est pourtant moi qui définis l’extérieur. C’est moi qui refuse de me sentir X car autour de moi il y a Y. C’est moi qui définis ce monde comme une prison

Il n’y a jamais eu d’obstacle. Il n’y a jamais eu d’ennemi Rien ne peut m’empêcher de choisir ce que j’aimerais ressentir. Si j’arrive à me sentir libre maintenant alors je le suis Et quel bonheur de me sentir libre. Quel bonheur de ne plus avoir à combattre le monde, les autres, la colère, la frustration et surtout moi même. Avant, j’écrivais pour me libérer Aujourd’hui, j’écris car je me sens libre.

d'écrire

Libre
DÉCOUVREZ MAINTENANT KEVIN SAPOR

Libre d'écrire

Je perçois l'écriture comme: Un dialogue intérieur avec cet être enfoui en moi Ce "ti Mons" que je garde jalousement caché Toujours affamé de sensualité, et de jeux de langues. Assoiffés d'encre et de jouissance. Une façon de nourrir cet être mystérieux qui m ' a causé tant de maux Cette partie longtemps maudite qui ne trouvait grâce et joie que dans la poésie et les romans de Depestre et partiellement dans mes essais enchantés par les chantres de la littérature érotique Caribéenne. Je l'ai découvert au côté du marquis de Sade et du flamboyant Esparbec Sur les genoux de Depestre et Maryse Condé Il est intéressant d'évoquer ici dans une dynamique de liberté d'écri ture le nom de Sade Maintes et maintes fois censuré et condamné Mon écriture apparaît, je crois, pour lui, comme une petite promenade sur les flots trop calmes de ce que je semble être. Et je prends plaisir à le promener devant ma face comme miroir le long du chemin tumultueux de ma propre découverte Mon "ti Mons" Loin de moi l'idée de le rejeter à la mer Au contraire Par l'écriture, je le chéris Par l'écriture, je me guéris Aujourd'hui, je me sens plus libre, et ce malgré la censure arbitraire de certains réseaux sociaux ou du monde Libre de dire ce que je désire, parfois même ce que d'autres désirent Libre de jouir et faire jouir de l'écriture Ma convocation est que l'écriture, en dehors de son caractère cathartique, peut ou doit permettre la transcendance de la pensée, du désir, des fantasmes, des plaisirs, même les plus inavouables, et surtout leur poétisation

Faire du beau avec ou en faisant du sal Je vois, là, une liberté orgasmique La liberté de sexpression Une liberté fondamentale trop longtemps spoliée Mais je ne serai jamais assez libre et c 'est ce pourquoi je continue. Je travaille à libérer et maîtriser mon "ti mons " et avec lui ma langue intérieure orpheline "kréyol la", "lang a ti neg la" Ma langue agile, sans filtre, mais si poétique et musicale Ma langue charnelle Mais langue jugée trop dure Ma langue "siwo myel", ma langue "rèd doubout", "red bandé". Je travaille. Pour le moment je flirte avec sa maîtresse, celle de Molière, jouissant de la liberté qu 'elle m'inspire, car l'amante est belle Mais je travaille à me libérer de son monopole J'ai, cependant, le sentiment qu'il me faut d'abord aller plus loin avec elle Aller plus profondément en moi avec cette femme si compliquée à mes côtés. Ainsi je saurai mieux composer avec ma langue chérie Ma langue fleurie Plus j'écris, plus je me sens libre dans chacune des fibres de mon être Plus j'écris, plus je vibre avec chaque facette de moi même Je me sens comme un steelband. Clair. Chaud. En résonance. Ne plus pouvoir écrire, c 'est être forcé de partir en exil, sans bagage, s ' en souvenir C'est l'asphyxie de l'âme ! La putréfaction de l'homme C'est jouir sans plaisir Encore et encore À cor et à cri, et gémir sans un son Un non sens Je pense à ceux qui sont privés de ce plaisir nécessaire. Soit par un régime pourri, soit par manque de force ou de moyen Je crie pour vous !

Je n ’ai plus le droit d’outrepasser ce que je suis aux yeux de la société. Je n 'ai plus le droit de vivre sans me préoccuper de ce racisme. Je suis papa maintenant. GEORGES NICOLAS

J'AI GRANDI PARMI TOUT TYPE DE FORCE IDENTITAIRE

11 juillet 2022, 23ème acte raciste de l’année remarqué Il va donc falloir encore recadrer tout cela Dans un milieu où l’ascenseur social est plus que possible, tu devras forcément prouver pourquoi et pour quoi tu es là, devant eux, à donner des directives, tandis que ton collègue, au pigment identique que le leur, est lui bien évidemment à sa place. Dans tout ça, ces individus qui te regardent ou qui t’ignorent parce que tu es Noir et hiérarchiquement au dessus d’eux ne sont que minime. D'ailleurs, il n’existe plus de pureté du pigment. Il va donc falloir recadrer tout cela.

A ce moment là, le mode « an ké pété kad a w » se met tout naturellement en route. En France, on est obligé d’en arriver là pour vivre en tant qu’homme noir. Par le passé j’ai frappé, étranglé, menacé ce genre d’individus ; ce qui m’a coûté bien des problèmes. Je n’arrivais pas à comprendre, parce que j’ai grandi parmi tout type de forces identitaires. Ou abitié avè sentwa la, ayisyen la, moun sèn klod, moun zabitan, moun Duzèr ! Tout moun la an armoni san babié ! On s’est toujours accepté l’un l’autre, mais sans se rendre compte...

qu’il y avait cette présence qu’on ne perçoit pas lorsque l’on a 12 ans Par exemple, certains professeurs mé tropolitains débarquaient déjà avec cette mentalité de dominateur blanc : ils t’instruisent à minima sur ton île, et les week ends, ils vivent entre eux à vomir sur toi, moi, nous ! On ne s’en rend pas compte de ça lorsqu’on a 12 ans. Et nos parents sont tellement en paix dans leur monde qu’ils ne nous y préparent pas ! Ils nous protègent de ce monde ! Ils l’ont vécu, encore et encore, mais ils sont passés outre et ils sont retournés en paix chez eux. Chez eux ? Une île, là où tout a commencé, ma Guadeloupe. Maintenant, c’est mon tour. Je contemple mes enfants et je me dis : « sont ils prêts ? » Dans un petit village du sud de la France, un garçon, une fille, des yeux émerveillés, des sourires à faire tomber les étoiles. Mes enfants. Ils ont cette force de caractère de leurs parents. C’est bien ! Je sais d’ores et déjà qu'ils auront des problèmes à l’école, car, peau caramel ou non, pour les autres, tu restes un Noir. Derrière, silhouette athlétique, fier, se tient un individu à la peau noire recouverte de tatouages. Moi. Papa.

GEORGES NICOLAS

Et là, tu observes, sous tes lunettes de soleil, le monde dans lequel tes enfants grandissent Certains passent et regardent indignés, genre « y’en a aussi ici, des Noirs ! » D’autres, sourires larges, font abstraction de cette peau Jamais mon fils ne m’a demandé « Pourquoi il ou elle est d’une autre couleur ? » Puisqu’un enfant ça reste l’inno cence A son âge, il ne voit que des êtres humains Papa sera là pour vous, mes amours, quand vous constaterez que le monde fait de vous des gens différents Je les éduquerai en con séquence, ils auront toutes les armes pour affronter ce monde Mais j’ai conscience : leur père est Noir, forte ment tatoué, et Cadre de surcroit Dans les trois cas, je ne réponds pas au code d’une société qui n’accepte pas la différence Tout est dit dans l’ordre, comme si c’était le plus grave d’être Noir Je n’ai plus le droit d’outrepasser ce que je suis aux yeux de la société Je n'ai plus le droit de vivre sans me préoccuper de ce racisme. Je suis papa maintenant. Comment donc expliquer à mes enfants qu’ils ne sont pas invités chez les gens parce qu’ils sont noirs? Et non parce que les copains d’école ne le veulent pas, mais parce que les parents des copains ne le veulent pas ? Ces fameux adultes qui nourrissent le racisme conscient.

J’ai des amis d’enfance qui pensent qu’être un Noir en chemise cravate font d’eux un Noir différent Mais, un Noir qui répond au code d’une société basée sur du racisme est un Noir qui se vend Tu t’en rends compte ? Ils n’ont même plus besoin de te vendre, tu le fais tout seul ! Ils ont forcé mes ancêtres, ils ne me forceront pas ! Tu as face à toi des gens qui ne savent pas situer ton île sur le globe Tu ne t’es jamais demandé pourquoi ta culture antillaise est basé sur le respect ? Tu es issu d’un peuple qui a souffert et qui souffre ! Mais quand on ne souffres pas pour exister, on se convainc qu’il n’y a que soi qui a le droit d’exister

Moi, j’existe avec les miens. Ma culture est bien plus forte, mon identité est marquée sur ma peau et mon créole ne mourra jamais. Tout ce que mes ancêtres ont eu la force et l’intelligence de créer ne disparaitra jamais.

Juste une pilule

TEKS

M a r v i n L o n d i n f e r

ONA AVORTÉ

Après presque 10 ans, j'ai pour la première fois déposé ma femme à l'hôpital Oui Déposée, gestes barrières et pandémie mondiale oblige, je n'ai pas pu l'accompagner Heureux évènement ? J'aurai aimé, vraiment. J'ai à diverses occasions imaginé ma réaction, sa réaction. Nos joies, nos vies à ce moment-là.

L'annonce

Je me suis déçu. Pas de joie… Ah si ! La joie de finalement savoir ce qui a autant affaibli ma dame, ce qui fait qu'elle crache ses tripes et tord ses boyaux avec autant d'effroi depuis leur déconfinement.

Je n'avais jamais lu, ou entendu d'histoire d'homme dans cette situation, notre situation. Ma réaction était elle normale ? Ai je le droit d'avoir un avis ?

La gynéco lui avait dit qu'elle aurait du mal. Non, pire. Qu'elle ne pourrait pas.

On n'en avait pas spécialement reparlé depuis, il faut dire que ma dernière visite chez le médecin remonte déjà à 1 an et c'était dû à l'accident de moto

On est comme ça, la Santé c'est d'abord une succession de pensées bien alignées

Alors on laisse passer les “mauvaises” pensées et on se concentre sur celles qui attirent le dessein qui nous plait. “Et si c'était la seule chance ? On l'a manifesté, oui ? Est ce un signe ?” s'enchaînent mes pensées… Après un long silence, profond, comme le siège de céramique d'où Madame vient de balancer la boîte en carton, le bâton en plastique en main.

Marvin Londinfer

On s'est étreint, regardé… Contemplé je dirais, comme à chaque fois que je la vois d'aussi près J'attendais ses mots, je n'osais pas laisser les miens sortir, c'est son corps, sa décision. Je la respecte, je lui dois ceci. Silence.

À pleine vitesse, je fais des plans, mai, juin, juillet… Janvier. Capricorne, comme ma mère ? Ouhla!

Déjà, pourquoi je pense à ma mère à ce moment ? Bref On a virtuellement le temps d'arranger, de mettre en place, de gérer, s'adapter, grandir. Des mots ! Ah… À quoi je pense ? Beaucoup de choses, plein, trop…

"Je pense qu'on n'est pas prêt." m’a t elle dit Moi non plus Sur la même longueur d’onde, encore une fois. Égoïstes ? Peut être. J'avais envie de sauter de joie. De le vouloir dès le départ, avant même de tamiser la lumière ou de lancer la playlist. Décider… Décider.

Marvin Londinfer

Juste une pilule…

Avec un verre d'eau, et ça y est, les millions de problèmes qui se dessinaient en boucle dans mon esprit sont lavés. D'autres prennent place dans le même élan. Un ballet Les autres, les avis, la société, la norme, leurs attentes L'égo. L'incohérence…

Les gens. J'écris parce que je n'ai envie d'en parler à personne, du coup j'en parle à tout le monde L'ironie. Une pilule… C'est ironique parce que c'était à peu près sa taille…

Puis-je dire " J’ai " ? Non, c'est trop "On a" ? Je ne sais pas, je n'ai jamais entendu personne dire ça … On a avorté.

Marvin Londinfer

Tu souffres, je t'aime ?

La souffrance d’un homme est belle aux yeux de celles qui n’ont pas à la toucher. Aussi envoutante qu’une flamme, mais non moins brulante Entre vulnérabilité et faiblesse, il n’y a que le fragile pont de l’empathie Il n’y a que le plancher branlant de l’impératif d’un sentiment de sécurité, aux côtés de celui qui se doit d’être comme un arbre centenaire, imperturbé par l’extérieur Un appui sur lequel on peut déverser son insécurité

Un Homme, un vrai Il n’y a que l’attente d’un potentiel ultime, arboré par un humain qui ne demande que paix et amour Il n’y a qu’une liste toujours plus longue, de standards historiquement atteints par une minorité Il n’y a que la quête commerciale d’un produit masculin résolvant tous les problèmes d’un être féminin, fatiguée d’être forte, indé pendante et fière de son ethnicité

Un Homme, un vrai

Produit : RealMan

Ingrédients : Grand, fort, émotionnellement mature, financièrement abondant, mentalement stable, fais jouir avec sa langue, motive, attentionné, passablement distant, passablement physiquement indisponible, sexuellement disponible, intellectuel, drôle, spirituel, connecté avec son féminin sacré, aligné avec son masculin divin, coup de rein légendaire, beau à regarder, avec qui on ne s’ennuie jamais. Peut contenir des traces de voix profonde et suave, un pénis large et quelques tatouages.

Le tout vous est offert GRATUITEMENT ! N’attendez pas ! Vous le méritez !

But men are trash, anyway. Oui, les hommes sont dégueulasses La répétition construit la maitrise, et cela vaut autant pour l’apprentissage de compétences, que pour l’implantation d’une pensée Une pensée qui se répète devient une croyance, et les croyances sont par définition inconscientes Une croyance partagée devient un égrégore, et un égrégore n’a pour seul but que de ce manifester dans le réel Vous me suivez ?

Destructive masculinity is trash, but men can become better at being constructive Dans le programme source de la matrice, ça devrait ressembler à ça : boolean menAreTrash = false; do { lackOfEmpathy(); separation(); } while (menAreTrash == true) reconcile();

Chaque homme a le devoir de se construire pour devenir plus aimant, plus compatissant, plusmature émotionnellement, et il est clair que notre société actuelle ne nous apprend aucune de ces qualités Pourtant le vent change de sens, la roue tourne, l’hiver finit, le carême laisse place à la pluie, lagraine germe, l’atoumo bourgeonne en se multipliant Pourtant, la brise sursaute par ses rafales, la roue grince à cause de la rouille et se coince, le printemps amène la boue, il pleut si fort après le carême que la terre s’inonde, la graine ne donne rien et se mélange à la terre, l’atou mo ne porte pas. Entre la réalité, et la construction imaginaire d’un idéal utopique, il y a le caractère chao tique de toute chose dans ce monde Tout est parfaitement imparfait, y compris l’être mas culin Alors pourquoi, faut il parvenir à cet idéal ? Dans quel but ? Ne serait il pas contre nature de vouloir être parfait ? Ne serait il pas insensible de vouloir cette perfection exprimée chez un partenaire humain ?

Nous sommes, en 2022, si habitués à voir le beau, le parfait, l’idéal, sur des logiciels conçus pour que l’on s’entre vende du rêve, que nous avons oubliés que la merde fait partie intégrante de l’ordre des choses Que derrière l’écran, entre deux reels postés à 3 jours d’intervalles, il y a notre putain de vie

Tu souffres, je t'aime ?

Oui, entre la terre et le ciel, il y a beaucoup de choses qui existent, et la crotte, la bouse et les défécations en tout genre en font partie Alors pourquoi l’imperfection ne pourrait elle pas en faire partie aussi ?

Que l’on soit clair, il n’y a pas plus faible et dangereux qu’un individu ne pouvant parler qu’avec la violence Je ne parle pas ici de ce genre “d’imperfection”, non Je parle de tristesse, de dépression, de changement d’humeurs, de manque de confiance, de découragement, de solitude De ces émotions que l’on prétend accepter chez un homme Car les hommes pleurent aussi, dit on. Et les hommes doivent exprimer leurs émotions.

Mais comment parler de faiblesses, à quelqu’un qui ne veut voir, et expérimenter que ma force ? Comment parler de mes blessures à quelqu’un qui ne voit que mon potentiel ? Comment parler quand autrui est un mur d’utopies à mon égard ? Comment parler quand le cœur de celle qui m’écoute est sourd ? Comment me livrer à quelqu’un qui n’a pour intérêt que la version finale, complète, de ma personne ? Ma souffrance n’est qu’un fétiche moderne Je ne veux pas qu’on prenne ma peine, Je veux qu’on la comprenne. Qu’on l’observe, cette merde puante, dégageant des effluves irritants, Qu’on l’observe, les narines dilatées, les yeux grands ouverts. Je veux qu’on m’enlace lorsque je veux pleurer. Qu’on me fasse l’amour lorsque je suis triste Ma souffrance est un cri silencieux Une tempête discrète. Un brasier gelé. Mais à quoi bon ? Ma souffrance est invisible Je souffre, m’aimerais t ’elle ? Je n’y crois plus. Les seuls noms féminins qui m’accordent de l’amour inconditionnel, Sont Solitude et Paix Je souffre, et on s’en bas les ovaires, Fin.

I P Ò P K R É Y Ò L Titre : Kandas Mérwé (Anba Sab Soudan) Auteur : Mano D’iShango Année : 2009

Kandas, ou sé gran janr de fanm a gran klas, Fanm, ki ni kò, ki ni tèt, ki ni ras, Pa gen ni dout si ki koté ou sòti, Yo kriyé y jòdi Somali, Étyopi, Ou déplasé, enstalé, vin viv an Nibi, Sé dwèt dè w yo ka palé adan Holy Piby, Ou té la o komansman, avan tan konèt chanjman, Té rimèd kalman, avan menm zèb vin pansman !

On kréyati an armoni èvè lanati, On « puits » , on sous lénèrji, ki enfini, An pa té la ka mandé mwen ki jan an pé dékri, Kò ka mò, sé on dòt biten pou lèspri, Ou étèrnèl, kon lanmou matèwnèl, Bèl kon ritounèl, sé vou tou sèl, ki ni bra pou zèl, Ki rivé fè sa nonm pa ka rivé fè, Sinyé larmistis, mèt lapé an plas a lagè,

Refrain1

Sa ou fè an ba sab Soudan, Yo pa gen ka palé dè w pourtan, Sa ou fè tèlman bèl tèlman gran, Ou di Women : « zò pé ké ay pli douvan » (X2)

Couplet 2

Ou di Women zò pé ké ay pli lwen, Pa ni mwayen, la sé ta zòt é la sé tan mwen, Yo té ja rantré an Éjipt, Té ja kanté, chanjé, tout kilti, tout trip, Ou di yo awa an pa entérésé, Pwodui a zòt pa ni la kòt, a pa la penn éséyé ! Ou té ni lò, ou té ni bwa, tout kalité richès, Yo konpwann yo té vin pran yo kon sa san fè konmès, Ou té ni, labitid mès, té ka kenn lyon an lès ! Yo konpwann yo té’é vin ba w vyé manni vyé jès ! Kavo a w té piramid lè ta yo po té ko siman, Yo vin kon dé gran grèk, pa té sav jan grèk vin gran !

Yo vwè gran sivilizasyon pa fèt si kolonizasyon, Jan, enfliyans nasyon pa sinonim alyénasyon ! Kandas Mérwé, jòdi sé vou an ka lwé, On jou nou ké sav li témwanyaj ou lésé,

Refrain2

Sa ou fè an ba sab Soudan, Yo pa gen ka palé dè w pourtan, Sa ou fè tèlman bèl tèlman gran, Ou di Women : « zò pé ké ay pli douvan » (X4)

K A D A N S M E R W E
Couplet 1

Vizé zétwal opir ou ké trapé lalin, Mizé si vou, ouvè liv, planté rasin, Simé grenn, pété chenn, lè ni lahenn, Rété zen, sonjé sé menm san ka koulé an venn, I ni obstak, i ni éprèv, i ni tribilasyon, I ni kanpo, i ni mannèv, i ni sibi présyon, Pa fè sanblan, évité kankan, présyon fè dyanman, Pran tan, gran plan ka pran tan,

« Jeunes gens » , fòs a yo sé pawòl, Yo sav sali, yo sav détui èvè pawòl, Mové lèspri ka sèvi èvè kalomni, Pa lésé sa aji si w fè w fè ensomni, Konfyans adan vou sé klé la! Èvè lafwa ou pé fè mèrvèy kon Lalibela, Sa pé pran santan, pé pran désanzan, Èvè pasyans tan, san i ni san, pé ni gran chanjman, Gadé an lantou, chèché vwa, akonpli on misyon, Vansé pran kou, an tout doukou, kenbé pozisyon, Kon Lanati senbolizé rézistans, Sé zyé ki lach, ki ni imaj a distans, Sa ja fèt, nou sé ti moun Cham, yo sé ti moun Sem, Nou pa menm bèt, mè nou viv liv a Bethléem, Se menm tèm, pas menm pwoblèm ka méné menm aksyon, K V M , konésans vou menm, déterminasyon

Refrain1 (EmpressKemi)

You got to believe, believe in yourself, Never give up and free, free up your soul ! Keep your faith and your strength, You got to believe until the end, You got to believe, believe in yourself !

Couplet 2

Le génie se manifeste, évoque les choses qui existent, présentes en tout être, Sensations fortes de la terre mère Épopée de fils d'afro descendant, du tonnerre Art poétique, un si bel éphémère essentiel Next Level ! Atteindre le statut d’immortel Grains de poussière , devenant pépites de lumière Sillons d’étincelles divines dans cet univers, Quintessence, harmonisation des éléments de façon pérenne, Mic check ! Voici l’esprit protecteur des ancêtres, enseignant délices de réflexion à l’espèce humaine Grand genre de « Nèg » spécimen J’suis l’ultime révolutionnaire à dimension spirituel yo Médiateur de transcendance, galvanisé par l’axe ascendant qui élève le surnaturel sur le corps de chair, Qui donne vie à l’oeil de l’esprit, Inaccessible à tout profane du monde mystique Yeah !!!!

Refrain 2

K O N É S A N S V O U M E N M
Couplet 1

Refrain3(EmpressKemi)

You got to believe, believe in yourself, Never give up and free, free up your soul ! Keep your faith and your strength, You got to believe until the end, You got to believe, believe in yourself !

Couplet 3

Ka ki nou ? El Kourrou sé antikité, Désandans nèg bantou, ka viv an sité, Ki enmé libèté kon pèp Ashanti, Istratéji, kon Harriet Tubman, kon Nanni, Nou ni, onlo pou aprann si nou menm, Pil fénomenn, fout nou jenn, lèson pou routyenn, Pas si yo di : « lavi sé on gran lékòl » , Alòs nou pé di listwa sé liniversité, Sous inité, iniversalité, Adan séla ki lité béni pou léternité, Ka nou sav dè Prince Klaas a Antigua, Dè listwa a Barbad dè révòlt Bussa, Lis la long, i ka bo lenfini, Pli fò la adan tousa, konba poko fini, Nou té di a pa tout vi ki vi Étazini, Konésans nou menm, sé minimòm, pou nou pa pri !

Refrain3(EmpressKemi)

You got to believe, believe in yourself, Never give up and free, free up your soul ! Keep your faith and your strength, You got to believe until the end, You got to believe, believe in yourself !

K O N É S A N S V O U M E N M

RAP MIZIK

IPOPKREYOL
INFLUENCE

Musique : une clé imagée aux millions de pixels

« L’éducation est le passeport vers le futur, car demain appartient à ceux qui le préparent aujourd’hui »

Cette citation de Malcolm X est gravée en moi, tatouée dans ma chair. Moi, jeune guadeloupéen de la trentaine, fan de Hip hop, de Dancehall, de zouk passionné de toutes sortes de musiques, de l’émission Kromatik en 1992 présentée par Claudy Siar en passant par Big up, reyel attitude de brother Jimmy de 96 a 2000 ou encore Rap city de Bet avec Big Tigger de Bet dans les années 2000 Tout cela a forgé mon éducation musicale et a participé grandement à ce que je suis aujourd’hui

Cette culture de l’entertainment, du divertissement a changé à jamais la face du monde et la façon dont on aborde la musique aujourd’hui L’arrivée d’internet, de youtube puis des réseaux sociaux a certes contribué à déstabiliser ces programmes télévisés mais en même temps a ouvert le champ des possibles en participant d’une manière ou d’une autre à cette éducation musicale

Youssoupha disait que « le rap ne s ’est jamais mieux porté et n ’ a jamais été aussi riche qu ’aujourd’hui avec sa diversité » et cela pourrait s ’appliquer à la musique en générale, car aujourd’hui on a le choix, l’écoute toute nouvelle à portée de clique

Alors pourquoi a t on l’impression que notre musique antillaise régresse? Les programmes sont ils moins bons? Est ce la faute du public, des djs, des médias, des parents?

Et d’ailleurs régresse t elle réellement? Ou alors sommes nous assez curieux pour tenter d’écouter et d’apprécier autre chose que ce qui fonctionne? Nous avons le choix, et cette éducation se veut plus autonome

De nombreux programmes fleurissent et contribuent à cette éducation musicale: L’oxymore, Straight up sessions, Yootle, Kreyol Sat, ça filme prod, free talk et j’en passe Nous n ’ avons été jamais aussi riche tant au niveau beatmakers, réalisateurs, marketing Il faut continuer à transmettre, permettre aux générations futures d’emboîter le pas afin de faire rayonner notre musique, nos concepts.

Eduquer c ’est prendre des risques, c ’est aussi se tromper, mais c ’est avant tout forger une clé, celle qui permettra au monde de vous respecter

Merci et Big up Neg magazine. Straight.

W W W . F R A M E M A G . C O M | 2 0
A R T I C L E
" J’ai l’esprit beaucoup plus libre depuis que j’suis enfermé au placard "
NoelDaufour,plusconnusouslepseudonymeOneel, unartisterappeur,pèredequatreenfants, travailleurarcharné,activisteayantprispartauxmouvementssociauxquiontsecouélaGuadeloupe, estincarcérédepuisfin2021,pourl'affaireditedes"Grandsfrères" Iln'ajamaiscesséd'écriredepuissonincarcération
Noel Oneel Daufour

La méchanceté est humaine Même l’animal tue que pour s’nourrir Toi pour quelques « j’aime » Smartphone en main tu t’tapes un fou rire Devant la détresse d’un être Cher à un autre être Qui t’fera regretter ton geste Si jamais il croise tes fesses Il n’y a pas de descente en rappel Face à une escalade de violence La plupart de ces rappeurs Vous jouent d’la flute ou même du violon J’ai l’esprit beaucoup plus libre depuis que j’suis enfermé au placard Cagoule, gilet, glock, effectivement j’suis là pour braquage

On essaie de s’en sortir loin du train train d’la matrice Métro, boulot, dodo, pour moi il n’y a rien d’plus dramatique J’suis conscient qu’il faut des p’tites mains pour que leur manège tourne On vit avec peu, on sera moins perdant si on arrête tout Tu penses que ta voix compte lâchée dans une urne Incompris du public, enfermé dans une lampe mon génie hurle J’ouvrirai pas les yeux d’mon peuple avec un flow, avec des punchlines 99 contre 1% de békés, pas besoin d’être Einstein Dopé à la coke ma plume revient de Médéline A excitée ma franchise, plus besoin d’lire entre les lignes Les modèles des rappeurs FR sont des p’tits attardés d’Chicago Et moi je m’en bas les couilles, j’ai les yeux rivé sur mon magot…

Noel Oneel Daufour

NOEL ONEEL DAUFOUR
Avec des "si", on refait le monde tel qu ' on aurait voulu qu'il soit. Me restet-il assez de temps pour apposer mon empreinte sur l'histoire ?

Quand nos cœurs se lisent… Les yeux ignorent cette langue et réclament un traducteur, Les aprioris battent en retraite devant la mise à nue de la pudeur, Le temps fait front face à l’endurance de nos mots, à se lire jusqu’à plus d’heures, On visite nos passés, on savoure le présent, mais c’est du futur dont on a le plus peur.

Quand nos cœurs se lisent… Il se peut que plus rien ne compte, que rien n’ait de sens. Il faut parfois museler le verbe, taire ces mots moins impactants que nos silences. Nos âmes sont narrateurs, le langage de nos corps est ponctué par l’ivresse de nos sens... La culpabilité n’a jamais aussi bien épousé l’innocence,

Quand nos cœurs se lisent… C’est une audience à huit clos, les curieux sont à bout, Les « je t’aime » sont pris à témoins et l’égoïsme parle en faveur de l’amour. Même les défauts plaident à la barre, sans tabou, de ce vol par effraction de nos êtres, sans cagoule

Noel Oneel Daufour

Lajòl ? Ba yo tout oben ba pèsonn !

Les prisons de Guadeloupe se remplissent, dans le sillage du mouvement social en cours, mais la dynamique était déjà plus ancienne, non liée à une 'crise' particulière, et s'observe aussi en France: toujou ni plis moun ka rantré lajol.

La bonne société trouve sûrement tout cela très bien, sûre d'y voir une réponse pénale appropriée, parce que, dit on, on ne 'pent pas faire n'importe quoi". Pas d'impunité en somme, "chaque crime se paye'. Sauf que ce sont des foutaises Ce raisonnement repose sur un grand mensonge, on va y venir.

En Guadeloupe, avec le mouvement social, début décembre, on notait déjà plus d'une centaine d'arrestations et 64 condamnations allant jusqu'à 2 ans de prison ferme. Et puis, il y a l'arrestation des Grands frères ; affaire trouble, pour laquelle on peut être sûr de n'avoir jamais qu'une version qui épargnera les puissants. Qu'importe ce que chacun décide de croire ou ne pas croire, l'essentiel est là : toutes les têtes ne tombent pas dans ces situations. Pas besoin d'y voir un "complot, c'est le mécanisme des sociétés capitalistes: lajol pa fèt ba tout moun.

Oui, dans ces sociétés où nous vivons et qui ont vu l'émergence d'une nouvelle forme d'emprison nement, la prison pénale, dans le sillage de l'industrialisation. modèle en grande partie exporté par la colonisation, ce sont principalement les crimes et délits des classes populaires (particulièrement non blanches en occident) qui sont sanctionnés par la prison, qu'il s'agisse des périodes "normales" ou des moments de "crise" avec des mouvements sociaux, révoltes etc. Bon, le concept de crise est limité, mais c'est pour aller vile ici, (voir story Prison j'en ai déjà parlé, et pour qui veut creuser, cherchez les stats sur les catégories sociales des prisonniers, d'ailleurs très majoritairement des hommes).

Où sont tous ceux qui ont volé, magouillé, caché, profité de l'argent de l'eau en Guadeloupe pour se remplir les poches?

Où sont tous ceux qui ont exploité humains et terres dans le cadre d'un modèle économique aux for mes multiples dans notre histoire modèle qui finit toujours quoi qu'il arrive par détruire les corps et les ressources?

Où sont ceux qui profitent encore grassement par voie d'héritage ou de mécanismes plus récents, des fruits de ce saccage? Où sont tous ceux qui ont empoisonné, bénéficié de l'empoisonnement, demander des dérogations, signer ou ne serait ce que fermer les yeux sur lesdites dérogations?

Où sont tous ceux qui ont volé, magouillé, caché, profité de l'argent de l'eau en Guadeloupe pour se remplir les poches?

Où sont tous ceux qui bradent les terres, les littoraux, vendent les centrales, défont la cohésion du système de santé et laissent les richesses de nos sols sous la mainmise étatique ou à la merci des prédations du marché? Où sont tous ceux qui, en responsabilité, détournent l'argent pour se construire villas, piscines, ou qui le gaspillent pour se payer des billets d'avions, hotels, pour un tas de réunions inutiles?

Ici je vise tous les niveaux de responsabilité : des plus grands aux plus petits bénéficiaires, des com manditaires aux simples exécutants. Yo tout Pas qu'à Paris A kaz an nou osi, fan di yo lout, apa yenki béké !

Ola yo yé ? Poukisa yo pa rantré lajól? On y a déjà répondu : lajòl pa fèt ba tout moun.

Que ceux qui applaudissent des deux mains les vagues d'arrestation de gens sur les barrages liés aux violences urbaines, de même que celle des Grands frères, (avec quasi tous un profil sociologique simi laire), se demandent pourquoi elles arrivent à bien dormir alors que tous les autres cités dans la fiche précédente, et dont les actions sont bien plus lourdes de conséquences à un niveau macro, continuent de se la couler douce

Cela en dit long sur l'adhésion à un ordre social précis, aussi injuste soit il.

Mais, parce qu'hégémonique el normalisé, on n'en voit pas les aberrations et le questionner parait insensé aux yeux de beaucoup Ce n'est pas un jugement, je sais bien que c'est à quoi nous avons été éduqués: la police justice prison c'est pour faire le bien et enfermer les méchants. Manti a mante!

Pas la peine de dire « moi je suis pour que tout le monde paye ». Le problème n'est pas une question de morale individuelle mais de fonctionnement d'un système politique et économique à dénoncer et com battre.

Dans ce système, la prison remplit la fonction suivante: protéger les intérêts bourgeois, onlo moun ja téorizé sa. De quoi? Comment?

La prison c'est « la menace qui fait tourner leurs usines ». Ka sa vé di? La menace que fait peser la prison est une intériorisation, un truc incons cient qui fait que les gens iront bosser pour des salaires de merde, dans des conditions pourries, parce que si tu ne le fais pas. ou pé ké ni lajan, é ka ou ké fè? Ay volé ?

La prison contient les révoltes : on peut faire grève, mais on ne peut aller trop loin non plus, malgré la violence qui accompagne histori quement les mouvements sociaux, parce que la répression est là. Donc, bien qu'il y ait une quantité non négligeable de personnes sautant le pas, le spectre de la prison freine aussi d'autres à s'engager.

La prison régule l'activité des économies parallèles (drogue, pros titution, enfin, celles de rue où les acteurs sont les pauvres, les noirs car il y a celles des riches où là c'est pèpère...). Ces économies sont pourtant utiles au fonctionnement général du système (et d'ailleurs les passerelles sont nombreuses entre le légal et l'illégal, le légal ayant besoin de l'illégal )

Dans ce système, la prison remplit la fonction suivante: protéger les intérêts bourgeois

LAJOL PA FET BA TOUT MOUN

Joao

COLONIALE 2027 NOVEMBRE V E N E Z V I S I
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U M P
EXPOSITION
T E R L E
M O R T S D E L A R O
T E D
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O R T N E G R I E R D E S A I N T M A L O

Le marronnage : échappé à l'esclavage par l'établissement d'une société en rupture radicale.

L’imposition d’une condition servile à des individus va de pair avec la résistance à celle ci Les résistances durant la période esclavagiste furent de plusieurs ordres En effet, ces résistances furent de différent type : le refus de se laisser embarquer ou les révoltes à bord, sur la plantation certaines résistances étaient passives et se manifestaient par : les suicides, les sabotages, les empoisonnements, le ralentissement ou l’arrêt du travail servile Mais nous nous intéresserons ici aux insurrections c'est à dire aux révoltes de masse qui ont touché toutes les terres d’esclaves

L'ensemble de l'arc antillais est le théâtre d'insurrection presque permanente tout au long du XIXème siècle. Elle fut l'œuvre de femmes et d'hommes et déboucha parfois sur des communautés de marrons : des sociétés coupées de la société esclavagiste « On sait que plusieurs femmes ont été à la tête de telles communautés (Molly, Diana)[1] et Nanny est resté un nom générique pour les désigner Nanny

Les phénomènes de résistances à l’oppression esclavagistes : marronnage et lutte pour l'émancipation citoyenne.

town est l’un des territoires marrons les plus mythiques des caraïbes, en raison de son exceptionnelle longévité : la guerre qui opposa les colons et les marrons dura près de quatre vingts ans » Cependant, les revendications ne sont pas toujours les mêmes La comparaison de la « guerre de la Guadeloupe » de mai 1802 avec la résistance anti esclavagiste des mar rons des montagnes bleues en témoigne

En effet, ces derniers sont dans un autre de contexte plus proche de la cohabitation que du partage de valeur citoyenne

En 1654, quand les Anglais prennent le contrôle de l’île contre les Espagnols, ils ne se doutent pas qu’ils ne pourront pas pacifier l’île de façon absolue Cette difficulté résulte notamment du fait que les esclaves insurgés ont aidé les troupes anglaises à détruire les Espagnols, ce sont donc des populations armées En 1730, les « nègres marrons » se fortifièrent dans les « montagnes bleues », chaînes de montagnes situées à l’est de l’île Entre 1730 et 1738 il y eut un soulèvement

de ceux que l’on appela alors les « nègres bleues » contre les forces anglaises qui tentaient de les réduire au travail servile C’est par un traité de 1739 que le gouverneur Trelawney et le chef Marron Cudjoe mettent un terme à cette guerre Ce traité prévoyait la reconnaissance d’une « république marron » en Jamaïque en échange de l’assurance que les « nègres bleues » livrent tout marron cherchant refuge sur leur territoire La résistance des « nègres marrons » de Jamaïque comme celle de Guadeloupe fut également l’œuvre de femme

Ce traité montre en creux que les « nègres bleus » ne cherchent pas à assurer leur égalité d'homme en tant qu'acteur sociaux et aussi que les anglais n'étaient pas en mesure d'intégrer cette « république marron » à la couronne

L'acquisition de la citoyenneté anglaise n'est pas vu comme une possibilité d'atteindre une forme d'émancipation Il s'agit pour les marrons de garantir, pendant un certain temps, la pérennité de leur propre société Ici deux sociétés se font face alors que dans le cadre de la guerre de mai 1802,

EXTRAIT DU MEMOIRE DE MATHIEU BALAGNE

en dépit du racisme ambiant, l'insurrection ressemble plutôt à une « guerre des socii » dans la mesure où il s'agit de « vivre libre (dans légalité) ou mourir » au sein même de la république française Si dans les deux cas la lutte contre le retour de l'esclavage est une idée partagée, il semble que les moyens d'accès à la liberté et à l'égalité ne soient pas les mêmes Le marronnage fut un fléau pour le système esclavagiste qui n’a eu de cesse le combattre de le dénigrer ne serait ce que par l’étymologie utilisé pour désigner ce phé nomène de résistance Cimarron en espagnol désignant celui qui vie dans les cimes dans les bois Là où le terme voit juste c’est dans la mesure ou plus les territoires sont étendus et encore vierge plus ils sont propice à la résistance africaine Ce « fléau » est présent dans les iles de la caraïbe mais c'est surtout sur le continent (Amérique du Sud) qu'il aura le plus d'impact Cela s'explique prin cipalement par l'étendu des forêts qui permettent une rupture plus durable Nous pensons ici, au cas des quilombos au Brésil On voit qu'il y a des résistances qui s'ins crivent dans une posture de rupture radicale et totale vis à vis de la nation coloniale cependant d'autres résistances armées s'inscrivent dans une posture de lutte pour l'émancipation au sein même de la société co

loniale Les luttes internes à la société esclavagiste : échappée à l'esclavage et à l'inégalité par l'émancipation

Quand Bonaparte s’empare du pouvoir fran çais il décide de rétablir le 17 mai 1802 l’esclavage et de dégrader les hauts gradés de couleur de l’armée française « On doit désarmer tous les Nègres, de quelque partis qu’ils soient, et les remettre à la culture »

Cette politique entraîne des révoltes d’officiers réprimées de façon sanglante, mais quand il s’attaque à joseph Ignace l’un des officiers les plus populaires de l’île, la révolte des officiers de couleur est renforcée par des troupes populaires Ces derniers empri sonnent le général Lacrosse

Le colonel Pélage gouverne l'île et alors même que Lacrosse s’était opposé à sa nomination il reste fidèle à la France Néanmoins il nomma Louis Delgrès, chef de la place de Basse Terre Delgrès est un libre de couleur né en Martinique et qui a fait carrière dans l’armée française, il jouera un rôle fondamental, au côté d’Ignace, dans la résistance au rétablissement de l’esclavage en Guadeloupe en 1802 Pour Bonaparte, l’emprisonnement de Lacrosse est une mutinerie qui doit être réprimée ainsi il envoie le général Richepanse et 4000 hommes afin de rétablir l’esclavage en Guadeloupe

A l’opposé, Ignace et Delgrès désertent et tentent d’organiser l’insurrection Delgrès publie la « proclamation du 10 mai 1802», manuscrite par l’officier Monnereau ( ce dernier paiera de sa vie cet acte de la collaboration à la résistance contre l’esclavagisme)

C’est grâce à la diffusion de leurs idées de résistances que Delgrès et Ignace mobi liseront des centaines d’hommes, de femmes, en dépit de la méfiance des habitants vis à vis de l'armée suite aux brutalités de la dictature de Victor Hugues Ces êtres humains ont connu la liberté pendant huit ans et décide que la vie servile ne mérite pas d’être vécue Cette insurrection dura 18 jours et se solda par une répression brutale (10 % de la population de l'île aurait perdu la vie) et la « victoire » des troupes napoléoniennes

Néanmoins cette insurrection montre qu’aucune domination n’est absolue et qu’il exista des résistances à l’esclavage de la part des esclaves eux mêmes De plus l'accent mis sur le désarmement d'officier ayant lutté pour la république, notamment contre les Anglais, montre qu'au delà de la simple répression d'une mutinerie d'officier, il s'agit pour Napoléon Bonaparte de rétablir un ordre social, économique basé sur la racialisation des individus

C'est donc bien, un changement de conception de la citoyenneté française ou plutôt un retour à la conception promu par le code noir, à savoir d'une dichotomie de la citoyenneté pour les libres de couleurs qui perdent l'égalité de traitement et une déchéance com plète de citoyenneté pour ceux qui retourneront aux fers pour 46 ans Dès lors, on peut penser que les luttes des « libres de couleur » pour l'égalité et la plénitude de citoyenneté à la fin du XVIIIème siècle, comme la guerre de mai 1802 contre le rétablissement de l'esclavage s'inscrivent dans un con texte national par leur concomitance temporel avec la révolution française (1794 1804) et aussi sur le fond des revendications à savoir la garantie par un Etat de la plénitude de droit lié à la citoyenneté C'est en cela que réside l'aspect politique de ces révoltes En effet, tout au long de la période esclavagiste les libres de couleurs ont tenté d'obtenir une réelle citoyenneté Ces derniers avaient « la liberté sans l’égalité »

« Le concubinage des femmes noires avec les Blancs et des affranchissements successifs ont donné lieu à une classe de libres, différents du sang blanc, connue sous le nom de gens de couleur ou sang mêlés qui, quoique admis aux privilèges de la liberté, n'en jouissent cependant qu'avec des modifications qui consti tuent un état mitoyen entre les Blancs et les esclaves. »

Le métissage (viol ou mariage) et l'affranchissement sont les principales sources de construction de ce groupe « mitoyen » nommé libre de couleur, il se compose des mulâtres d'une part, et d'autre part des indiens (malabar ou lascar) de quelques africains, voir des chinois venus pour le travail non servile (surtout Mascareignes et ile bourbon) Cependant ces deux voies vers la liberté sont taries D'abord au XVIIe des mesures sont prise pour limiter le métissage entre colon et non blanc car cela nuirait à la mise au travail des « négresses » Puis au XVIIIe siècle, la « liberté totale que possèdent les maîtres d'affranchir [leurs esclaves] est restreinte progressivement » En 1711, « un règlement des iles du vent (les petites Antilles) défend de façon absolue aux propriétaires d'affranchir leurs esclaves sans autorisation, en raison de multiples abus observés Il est alors constaté que les esclaves volent ou se prostituent pour amasser l'argent nécessaire pour se racheter à

Le marronnage se définit comme phénomène de rupture avec la société esclavagiste.

leur maître » Les affranchissements sont le fait à 62 % de propriétaires blanc mais les libres de couleurs pèsent lourdement sur ce processus puisque 38 % des affranchissements sont de leur fait

On constate donc que ces deux voies vers la liberté sont limités pour assurer la pérennité du système esclavagiste et la stabilité social et politique des colonies

Ces limitations réglementaires se pour suivent tout au long du XVIII e siècle cependant « ces dispositions n'ont pas eu l'effet escompté, le nombre d'af franchissements continue d'augmenter surtout au bénéfice d'une majorité de femmes » Une autre forme d'affranchissement est aussi observée au XVIIIe celui de l'affranchissement pour fait de guerre : des esclaves ont pu se rapprocher de la citoyenneté en obtenant l'ensemble des « privilèges » liés à la liberté mais sans pour autant obtenir l'égalité Selon Frédéric Régent se fut le cas suite à la guerre de sept ans (1756 1763) et surtout suite à la guerre de l'Indépendance américaine (1778 1783) C'est par ce phénomène que Joseph Ignace « le premier rebelle »[1]24 de mai 1802

Cependant, un maître peut affranchir et remettre en esclavage le lendemain selon le mémoire de Parmentier sur la législation de la Guadeloupe Dès lors, il apparaît que l'accès à la liberté et a fortiori à la citoyenneté est marqué par l'instabilité, difficile dès lors de parler de véritable citoyenneté La liberté des

libres de couleurs n'est pas complète, ils doivent en permanence lutter pour la conserver : « Au XVIIe siècle, il n'y a pas de distinction entre les droits des libres qu'ils soient blancs ou de couleur [ ] Cependant l'égalité juridique entre l'affranchi et le Blanc n'est pas totale dans l'édit de 1685 En effet trois dispositions confèrent au premier un statut spécial et déjà infériorisant »

De plus, Frédéric Régent nous apprend également qu'au court du XVIIIe siècle, le processus d'affranchissement s'é tend jusqu'à dépasser « largement » celui du marronnage à partir de 1830 Et ce alors même que la traite atlan tique (illégale depuis 1815) connaît un pic en 1829

Ainsi, le marronnage se définit comme phénomène de rupture avec la société esclavagiste alors que l'affranchis sement permet un accès à la liberté (sans l'égalité) selon les règles juri diques et sociales de la société de plantation

VENEZ VISITER... LES SURVIVANTS DE LA CRISE KEPONE NOVEMBRE 2027 EDITION SPECIALE E X P O S I T I O N C O L O N I A L E D E S A N T I L L E S F R A N C A I S E S G W A D L O U P G W A D L O U P

SANDRO SORMAIN

Sandro Sormain, artiste, activiste, Secrétaire général adjoint de l'UTS UGTG s'impose comme une figure moderne des luttes anticolonialistes de Guadeloupe.

Mobilisé depuis 2020 contre les mesures liberticides appliquées aux Antilles durant la crise covid, il nous livre ici quelques mots sur son engagement.

MOUN KI....
L'ACTIVISTE KI

amènera

La loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire et donc à l’obligation vaccinale est une loi liberticide qui contredit d’autres lois, et bien évidemment, le droit au respect de ton corps et surtout le droit du travail. Les suspensions des personnels soignants du CHU n’ont pas été faites dans le respect de la réglementation et sont illégales. « Nou pa té rété la san goumé pou dwa an nou ». Cette obligation vaccinale a engendré un véritable conflit social soulevant de nombreuses souffrances en Guadeloupe En plus de l’obligation vaccinale, les collectifs en luttes ont aussi mis en lumière les problèmes de la Guadeloupe, c’est à dire les mêmes problématiques qu’en 2009 Une Guadeloupe en souffrance Et bien sûr, la contestation sociale a engendré des répressions. Malgré nos victoires administratives au tribunal, par rapport à la rétroactivité des suspensions, par rapport à l’absence de notifications de suspensions, (nous avons appris nos suspensions au tribunal), le CHU continue sa méprise avec l’approbation de l’état

«
Le premier combat est la conscientisation et la conscientisation
à l’union du peuple guadeloupéen contre toutes les problématiques du pays. »
TRIBUNE DE SANDRO

« Vous n’avez pas d’eau, le taux de chômage est élevé, la santé est en danger, la jeunesse quitte la Guadeloupe, ou sinon elle se retrouve en prison, la vie chère est un braquage en toute impunité….

Mais vous n’avez pas le droit de vous plaindre, d’aider les vôtres et de vous battre pour vos libertés. »

TRIBUNE DE SANDRO

J’ai intégré l’UTS UGTG, en 2014, un an après ma prise de fonction au CHU, parce qu’une cadre supérieure bafouait mes droits Quand on intègre le CHU, les gens nous conseillent de ne pas se syndicaliser, car c’est mal vu aux yeux des encadrements. Mais, en fait, c’est pour que tu souffres en silence, pou pé pa wouclé… ! En 2017, je suis parti en Afrique. J’ai visité le Bénin, le Togo, le Ghana et j’ai aussi découvert le Maroc à une autre période. De ses voyages, et surtout du Bénin, j’ai connu des membres de l’Urgence panafricaniste, avec qui j’ai pu participer à une mobilisation contre la Francafrique à Cotonou Là bas, j’ai rencontré Kemi seba et Hery Djehuty De retour en Guadeloupe, avec des camarades de luttes, nous avions organisé une conférence débat sur le système franc CFA et la vie chère (deux systèmes de pwofitasyon) en simultané avec les appels à mobilisation de Kemi Seba dans les capitales africaines et de la diaspora.

Kemi et Hery sont revenus pour nous donner leur soutien dans le combat contre l’obligation vaccinale et les problèmes de la Guadeloupe. Force à eux. Respect aux grands frères de L’UGTG qui sont Gaby Clavier et Eli Domota An té ka gadé an télé la san pansé an té milité koté

Il y eu aussi le combat contre l’occupation illégale des plages, les luttes syndicales, les grèves du CHU en 2015, en 2019 et en 2021 Aujourd’hui, le combat continue C’est la conscientisation qui fait d’un homme révolté un révolutionnaire. Et toute en modestie, j’estime être une voix qui s’élève parmi tant d’autres.

Nous avons des hommes issus des quartiers sensibles, des hommes salariés, des pères de familles insérés ou réinsérés dans la société, des hommes qui aident les jeunes en temps normal, des hommes interpellés par les politiques pour résoudre les problèmes de la jeunesse et qui ont acceptés d’aider les politiques dans ce chantier, des hommes piégés par ces mêmes politiques et qui, aujourd’hui, se retrouvent injustement emprisonnés sans preuve réelle.

La Guadeloupe doit soutenir les grands frères autant qu’elle l’a fait pour Klodo ( justement on attend encore l’inculpation des manblo assa ssins), pour la voiture à pains (sa ka fèt tou lè é ké ni dot biten kon sa enko é kon di gera lokel lenemi ka envayi nou) etc…Fo pa yo pwan pié si Gwadloupeyen….

L’Etat colonial bafoue les droits humains. Il envoie un message : « Vous n’avez pas d’eau, le taux de chômage est élevé, la santé est en danger, la jeunesse quitte la Guadeloupe, ou sinon elle se retrouve en prison, la vie chère est un braquage en toute impunité Mais vous n’avez pas le droit de vous plaindre, d’aider les vôtres et de vous battre pour vos libertés »

Nous avons aujourd’hui une existence con sentie, nous sommes dans un modernisme sans développement, des consommateurs sont arnaqués et pour l’instant, sans la conscien tisation nous resterons des jouisseurs du peu de vie et de dignité que l’on nous offre, car on accepte l’inacceptable

yo « C’est la conscientisation qui fait d’un homme révolté un révolutionnaire. Et toute en modestie, j’estime être une voix qui s’élève parmi tant d’autres. »

«

La femme a toute sa place dans la lutte. Les femmes sont beaucoup plus courageuses que les hommes. Elles ont tout mon respect. Elles devraient d’ailleurs être plus nombreuses à s’élever contre les injustices en Guadeloupe.

De la Reine Njinga Mbandi à Angela Davis, de Gerty archimede à Maite Mtoumo, et j’en passe, nous avons eu de grandes dames de la diaspora noire qui ont lutté et continue à lutter pour les nôtres. »

TRIBUNE DE SANDRO
KÉPONE Fashion www.negmagazine.art Toupatou Gwadloup Fashion new obsession N E G VENEZ VISITER LES SURVIVANTS DE LA CRISE KEPONE

Nous sommes un peuple résilient, cosmopolite et fier Il est coutumier, de par notre statut relatif à la loi n° 46 451 du 19 mars 1946 de départe mentalisation des Outremers, que nous nous interrogions sur nos acquis, notre citoyenneté et l’écart important entre ce qui aurait dû être garanti et ce qu’il nous est réellement offert Et pourtant, est ce le seul prisme de lecture pour aborder nos problématiques locales ? Problématiques que je ne prendrais pas le temps de rappeler, tant ces lignes sont précieuses pour nous !

Avant tout chose, il est toujours utile de définir correctement ce dont on s’entretient Pour se faire, je m’appuie rai sur le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales :

une île est une étendue de terre entièrement entourée d’eau, émer geant dans un océan, une mer, un lac ou un cours d’eau

un peuple est l’ensemble des humains vivant en société sur un territoire déterminé et qui, ayant parfois une communauté d’origine, présentent une homogénéité rela tive de civilisation et sont liés par un certain nombre de coutumes et d’institutions communes

une société est un État de vie collective ; un mode d’existence caractérisé par la vie en groupe ; milieu dans lequel se développent la culture et la civilisation

la politique est l’art de conduire les affaires de l’État, science et pratique du gouvernement de l’État

le sens commun est le sens central, faculté mettant en commun et co ordonnant les données de tous les sens en les rapportant à un même objet et permettant ainsi la percep tion de celui ci

une planification est une notion plus complexe qu’on peut com prendre sous deux sémantiques différentes En gestion, c’est une méthode consistant à choisir des objectifs et à proposer des moyens pour y parvenir, ex : planification économique, culturelle, de l’en seignement, régionale, sociale En économie, c’est une science qui a pour objet d’assurer, selon une

Le Arêventillais

progression croissante, la satisfaction des besoins du pays par une utilisation optimale de ses ressources, au moyen de documents prospectifs appelés plans

la responsabilité est l’obligation faite à une personne de répondre de ses actes du fait du rôle, et des charges qu’elle doit assumer, et d’en supporter toutes les conséquences

la coopération est l’action de participer (avec une ou plusieurs personnes) à une œuvre ou à une action commune Mais dans le cadre du discours actuel, je souhaiterais pondérer cette définition large en y ajoutant la notion d’intérêt Dès lors, il devient essentiel d’être plus précis en y ajoutant 2 champs supplémentaires En sociologie c’est une aide, entente entre les membres d’un groupe en vue d’un but commun En économie politique, c’est une méthode d’action par laquelle des personnes, ayant des intérêts communs, s’associent en vue d’un profit réparti au prorata de leur activité. La progression croissante, la satisfaction des besoins du pays par une utilisation optimale de ses ressources, au moyen de documents prospectifs appelés plans

la responsabilité est l’obligation faite à une personne de répondre de ses actes du fait du rôle, et des charges qu’elle doit assumer, et d’en supporter toutes les conséquences

la coopération est l’action de participer (avec une ou plusieurs personnes) à une œuvre ou à une action commune Mais dans le cadre du discours actuel, je souhaiterais pondérer cette définition large en y ajoutant la notion d’intérêt Dès lors, il devient essentiel d’être plus précis en y ajoutant 2 champs supplémentaires En sociologie c’est une aide, entente entre les membres d’un groupe en vue d’un but commun. En économie politique, c’est une méthode d’action par laquelle des personnes, ayant des intérêts communs, s’associent en vue d’un profit réparti au prorata de leur activité

l’amour (pour cette notion, il m’a été plus difficile de sélectionner une définition consensuelle tant ce concept est développé sous une myriade d’angles différents) c’est une attirance affective ou physique qu’en raison d’une certaine affinité un être éprouve pour un autre être (e choisis d’élargir au principe de matière, beaucoup plus universel) auquel il est uni ou qu’il cherche à s’unir par un lien généralement étroit L’amour s’appuie ensuite sur ce lien, ou ce lien s’appuie sur l’amour réalisant sa finalité sociale par l’intermédiaire d’une incarnation ou d’une symbo lisation du lien social (L’engagement ?)

À ce moment, l’être du départ, en miroir avec le début de ces définitions, par rapport à une île évolue et se transforme en patriote, c’est à dire celui, celle qui aime sa patrie, se met à son service, « prend les armes pour sa défense », finalité que je choisis de remplacer par : « utilise les outils pour sa défense et son amélioration continue »

KEVIN GUIMBA GRANDISSON

Maintenant que le vocabulaire est, à mon sens, défini par ces 9 notions fondamentales, il est temps de les utiliser pour délivrer mon message.

En m’adressant aux nombreux croyants dans nos lecteurs (à raison ou à tort, nous tâchons d’être neutres et rigoureux par ici), il est dit dans un livre bien connu que « l’Alpha est l’Oméga » ! Waouh, vous direz vous comment en est on arrivé là ? Je vous répondrais simplement que pour étudier les conséquences, il faut comprendre les causes et que, paradoxalement, il est judicieux d’observer que les mêmes causes non traitées emmènent irrémédiablement aux mêmes conséquences, l’Alpha est l’Oméga

Restez avec moi, il ne s’agit pas là d’une énième diatribe dithyrambique emplie de lamentations visant à faire le tour du pré sans y entrer, à prôner le salut extérieur ou quelconque déclic saugrenu Nous allons parler du travail

Je crois que la jeunesse, la justesse de la parole donnée et la transmission d’une sagesse intergénérationnelle seront les clés de notre émancipation Chacun doit faire sa part Quand la parole est donnée sans y avoir longuement pensé, l’Homme risque de perdre son honneur, sa dignité et sa liberté

Une île, habitée par son peuple, fonde une société structurée autour d’un projet politique qui s’appuie sur le sens commun d’une planification raisonnée en faisant appel à la responsabilité, la coopération et l’amour du pays de ces citoyens afin de produire un projet de société durable et viable On respire, on prend une tasse de thé, on relit, on interprète, on déconstruit, on raisonne, on saisit, on intègre Que c’est indigeste la réflexion et la philosophie ! Pourtant c’est de l’inconfort que nait le confort, un peu comme lorsque nous apprenons à nager

Cependant, l’amour appelant à une coopération du fait de la responsabilité imputable à la matière aimée, oblige à une planification fondée sur le sens commun afin d’édifier une politique fédérant la société et indiquant au peuple comment transformer son île Saperlipopette ! Il n’avait pas menti, j’ai lu, j’ai réfléchi et j’ai vérifié, l’Alpha est l’Oméga mais l’Oméga est l’Alpha

Une île, habitée par son peuple, fonde une société structurée autour d’un projet politique qui s ’appuie sur le sens commun d’une planification raisonnée en faisant appel à la responsabilité, la coopération et l’amour du pays de ces citoyens afin de produire un projet de société durable et viable.

Dès lors, pourquoi avons nous pris la fâcheuse habitude d’attraper le problème uniquement par un seul bout ? Si nous souhaitons changer profondément les choses, nous devons revenir dans le réel, privilégier le présentiel au distanciel et, plutôt que de nous inquiéter de ce que nous ignorions, interroger toutes nos certitudes qui sont possiblement erronées pour embrasser la diversité des méthodes et des possibilités Il n’est pas hasardeux que ce pamphlet se nomme « le rêve antillais » Un rêve est une suite d’images, de représentations qui traversent l’esprit, avec la carac téristique d’une conscience illusoire telle que l’on est conscient de son rêve, sans être conscient que l’on rêve Vous vous direz qu’un concept aussi banal et connu de tous ne peut être logiquement en lien avec un projet de société Pourtant, j’affirme que si On nous a volé la capacité de rêver collectivement, pour la remplacer par un livre vide à couverture d’or centré autour d’une pensée unique : « le développement personnel construit autour de l’individualisme et l’égoïsme est l’unique chemin ambitieux pour s’élever dans un monde capitaliste, ultralibéraliste » Sacrifiant le collectif sur l’autel de l’individualisme autour de sophismes tels que « l’homme est un loup pour l’homme », « le monde est mauvais », « donne leur la main, ils prendront le bras » et tant d’autres calembours usagers qui font briller et admirer la méchanceté en société Vous réalisez la puissance d’une idée, et quelques lignes plus haut, vous vous gaussiez de la notion de rêve Nous sommes notre propre voleur La suggestion, la tentation, la vengeance, la cupidité, l’avarice sont nos maux, mais ce sont les maux de bien des sociétés, et je dirais même plus de l’humanité, pourtant ce sont les Africains et par extension les Antillais et par extension tous les Afro descendants qui en pâtissent le plus sur la planète

Qui sommes nous ?

Où sont passés « sé on lanmen ka lavé lot » (une main en lave une autre, il faut s’entraider), « jod la sé ta w, dèmen sé tou an mwen » (aujourd’hui je te mets bien, demain ce sera à ton tour), « lanmou a pa zaboka » (l’amour n’est pas un avocat, il ne meurt pas) , « chien paka fè chat » (les chiens ne font pas des chats, tel père, tel fils) et bien d’autres perles linguistiques encore ? Pourquoi avons nous cessé de rêver en grand et laissons nous inexorablement nos enfants se confondre et se perdre dans les valeurs d’un empire plus grand ? Est ce là notre seule fierté, l’héritage que nous avons retenu des Fanon, Césaire et consorts ? Ça a l’air d’une leçon de morale, ça ressemble à une leçon de morale, ça a la forme d’une leçon de morale mais ça n’en est pas une, je ne fais que poser des questions à notre conscience collective Seul, je suis comme vous, je ne peux rien

Bien, nous nous enlisons par l’absence de rêves mais du fait de nos certitudes limitantes, sommes convaincus que nous avons encore le temps, ou pire parfois « i bon kon sa » (c’est bon comme ça, le statu quo) Le monde évolue malheureusement à une vitesse folle vers son déclin Montée des extrêmes, crises énergétiques, virtualisation des rapports humains, inversion des valeurs, impuissance, réchauffement climatique, disparition de 69 % des espèces, guerres, montée des eaux, émergence de nouvelles maladies, érosions, empoisonnements Hé, ho ! On n’en est plus aux cris d’orfraies, notre survie est déjà dans la balance. Dès lors vous vous direz : « tu parles, tu parles mais que faire ? » Je ne sais pas globalement mais j’ai des pistes et, dans un dialogue social chaotique, je crois que c’est précieux

Guadeloupe, terre de champions ! L’antillais est fondamentalement compétitif, pas toujours sur les bons enjeux malheureusement, je salue chaleureusement nos lecteurs de Martinique, Guyane, la Réunion et même toute la diaspora, on est ensemble et pour de vrai ! L’antillais est très compétitif et chauvin de ses alcools, qui ne sont pas toujours réellement à lui mais passons, et en tant que « bon antillais », nous aimons nous challenger, nous lancer des défis Je crois qu’un aspect incontournable de cet attrait positif est, quel que soit le défi, la nécessité de fixer un objectif, de comprendre pourquoi nous le faisons pour rester motivés, de faire un bilan complet de nos forces et nos faiblesses, puis de nous entrainer au travers du « travail » afin d’harmoniser nos forces et nos faiblesses et de tendre vers le challenger/rookie le plus polyvalent qu’il soit En général, cette recette porte ses fruits, et nous arrivons à réaliser des performances honorables si tant est que nous n'aban

donnons pas en cours de route Rêvons ensemble d’un Archipel caribéen fort, un minimum autonome et jouissant d’une certaine indépendance politique d’ici 20 ans Pourquoi 20 ans ? J’ai 27 ans au moment où j’écris ces mots et quand j’examine les 20 dernières années que j’ai pu vivre en pleine conscience, il n’y a pas eu beaucoup de changements mélioratifs, je ne citerais pas les défaillances, en ôtant vos œillères et si vous lisez ceci, c’est que vous les connaissez déjà Pratiquons le bwiti qui est poétiquement « l’art de trouver la beauté cachée en toute chose » !

Si sauver notre patrie était le nouveau défi, collectivement et individuel lement, quelles seraient les deadlines à 1 an, 3 ans, 5 ans, 7 ans, 10 ans, 15 ans, 20 ans, 30 ans pour espérer nous en sortir avec la mention passable au baccalauréat de la vie ?! Je ne mets pas la barre trop haute ! Dans nos champs de maitrises singuliers, quel est l’état des lieux ? Que pourrions nous rêver ? Quels seraient les partenaires, les moyens, les outils, les méthodes, les relais qui nous permettraient d’attein dre la quintessence de notre art et d’impulser en pleine conscience de notre responsabilité et de notre fini tude, la transmission aux plus jeunes afin de permettre l’avancement de notre projet de société ?!

Cette méthode se structure autour de la visualisation qui est simplement un concept performatif dérivé du rêve, qui le perfectionne pour le rendre tangible dans la réalité Sa manifestation à partir du rêve

Si nous devions définir neufs piliers, quelles pourrait être en tant que patriote et citoyen notre contribution à une coopération visant à améliorer notre planification en fonction du sens com mun pour notre peuple et pour notre île ?

Voici mes propositions non exclusives et leur justification « a pa tou di palé, fò ou ekspliké » Car je souhaite que vous soyez en mesure de raisonner et de vérifier le bien fondé de ces propositions :

La foi, notre égrégore commun et notre confiance en nous doivent surpasser ce que l’on nous a fait et que l’on continue de nous faire pour atteindre le niveau d’éveil qui nous permettra de définir, ce que nous souhaitons faire de nous

La politique. Dépasser les querelles partisanes, chronophages qui font le jeu des personnes qui ne défendent pas nos intérêts pour bâtir un projet de société viable et durable même si cela signifie parfois être un tra vailleur de l’ombre PTOM

L’économie Avoir assez d’ambition pour surpasser les entraves techni ques et logistiques sur le terrain et collectivement œuvrer pour réin dustrialiser nos îles et sortir du « tout importé » qui nous est délétère au travers de la profitation

L’éducation Porter et partager fièrement notre histoire afin que nos enfants ne soient pas aussi manipulables que nous, inonder les fonctions administratives de pou voir de candidats pour qu’au mo ment de l’apogée de la vision, nous puissions travailler entre antillais

L’amour de notre culture, pour retrouver l’imagination nécessaire lui permettant d’être le fer de lance de notre soft power dans le monde L’amour de nos familles, de ce que nous sommes, de notre gastro nomie, de nos danses, de nos tradi tions orales, de notre langue

La santé, au travers de la valo risation de notre pharmacopée mais plus encore, le développement d’une éthique professionnelle im placable afin d’être dans l’amour véritable qu’importe le manque de moyen, envers nos semblables, un dévouement et un respect de l’en semble des acteurs de la chaine de soin

L’énergie, une prise de conscience de tout notre potentiel, une diver sification des acteurs, autour de la géothermie, l’énergie maré motrice, le solaire, la disponibilité et la filtration de l’eau, l’optimisation des transports au travers d’un télé phérique Il n’y a pas de limites aux rêves alors :

« GO BIG OR GO HOME » (voyez grand ou restez à la maison) !

La défense, pas au sens guerrier du terme, mais dans l’autodéfense in tellectuelle Redonner leurs lettres de noblesse au journalisme, aux lanceurs d’alertes, aux militants, à la littérature, à l'informatique, au sec

teur bancaire, face aux lobbys poli tiques Nous devons avoir le courage de libérer la parole afin que la parole se libère La corruption est une colline que l’on veut faire passer pour une montagne, si nous nous organisons en banc de poissons compactes et soudés, les requins ne nous apprendront jamais à nager

L’environnement, dans la préser vation et l’exploitation censée de nos ressources, de notre faune et de notre flore, de notre espace, la récupération de la gestion de notre fiscalité douanière à travers la responsabilité radicale de l’exploi tation de nos zones économiques exclusives, résister à l’appât du gain face à la dépossession de nos terres, endiguer la pollution sur notre île et œuvrer à l’assaini ssement et la propreté de nos contrées

9 définitions, pour 9 piliers au travers d’un seul objectif. Ma tirade ne sera pas trop longue, l’essentiel est dit Nous sommes capables, nous sommes courageux, nous sommes vaillants, nous sommes susceptibles de nous réunir pour marcher sur une ville pour commémorer Prouvons nous à nous même que nous nous aimons assez pour reprendre le travail et bâtir un projet de société qui nous correspond (Inception est un film qui m’aura marqué au travers de la scénarisation de la puissance d’une idée ) Nous devons redresser la tête, sortir de la Matrix, revenir des limbes du défai tisme et de la résignation, car l’avenir nous appartient et c’est avant toute chose ce que l’on en fait maintenant

Vous me direz : « tu parles, tu parles mais par où commencer ? » Le travail ! Faire un bilan, quitter notre fanfaronnade d’adultes accomplis et accepter de redevenir apprentis, regagner les bancs de l’école en utilisant les outils des dieux offerts par les hommes, les livres des mentors du passé On a tendance à dire par chez nous : « ou poko ni expérience, ou ké nonm lè dé boul a w ké ka tchenbé an dé men a w » mais au final, discutons peu, discutons bien, pourquoi attendre de vivre pour agir ? S’inspirer de l’expérience et des erreurs des autres n’est ce pas une valeur ajoutée ? Sommes nous le seul peuple à avoir été colonisé ? Comment font les autres

communautés ? Le travail et l’orien tation professionnelle seront les deux jokers qui nous ouvriront les portes de nos rêves et qui sait s’ils ne permettront pas d’améliorer nos rap ports humains quotidiens en ravivant notre sagesse, notre amour et notre bon sens Ne laissez pas les borgnes être des rois au pays des aveugles Acceptez l’inconfort du travail et offrez vos rêves aux jeunes générations, le travail vous récompensera et cette fois ci, partager avec votre prochain ne vous appauvrira pas Vous n’avez pas à me croire sur parole, vous devez juste essayer et constamment vérifier ce que l’on vous dit

« Le chemin est la clé. Ouvrez la 7ème porte à la recherche des vérités cachées, détruisez les liens hypnotiques qui entravent votre discernement et étudiez le réel. Voici mon testament. Mon histoire, mon intimité, que les outils célestes issus du génie des Dieux retrouvent leur fonction d’éclairer l’humanité. Le choix est vôtre. Le temps passe, les lois demeurent. »

Je vous remercie du temps que vous m’avez consacré et j’espère qu’à défaut de perdre votre estime, ou de gagner votre admiration, j’aurais réussi, même d’un millimètre à vous transformer

À bientôt sur les routes de l’humanité

LEHIP-HOP QUINESESOUMETPAS ÀL’OPPRESSION SOCIALE

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E G N E G M A G A Z I N E A R

FOUR YEARS OF NON-STOP STREET PROTEST IN HAITI

LE FEU DE LA RÉSISTANCE

Déportés d’une terre à l’autre, enchaînés avec des fers rouillés, fouettés sans relâche jusqu’au dernier râle, et liquidés comme des meubles sans valeur sur les ports miteux, notre dignité s’est envolée et nos espoirs ont été anéantis par ces êtres infâmes

Au fond des cales ténébreuses et poussiéreuses des bateaux négriers, qui voguent vers des terres, emprisonnés dans la nuit, notre destin s’est s’assombri. Personne ne parle, personne ne rit Les visages sont tous endoloris et creusés par l’inévitable lassitude, la peur et la famine. Dur labeur, canne coton café, du matin au soir jusqu’au glas des cloches annonçant la fin du labeur éreintant, Avant d’y revenir demain et après demain, encore et encore; canne coton café. Levons nous, réveillons nous, révoltons nous et luttons sans scrupule contre les oppresseurs, qui ont souillé notre dignité, bafoué notre liberté Émeutes d’Hommes, tensions asphyxiantes dans les habitations où maîtres aux abois ne contrôlent plus leurs navires dorés Ô misère ! Ô désespoir !

La répression ne peut ni refréner ni renverser un peuple résolu à changer le cours de sa destinée Lévé gawoulé ! Poté ganm pou pep la vwè bout a chimen la! Inévitablement, le sang est versé, les corps sans vie gisent sur les sols, l’odeur de la poudre mêlée à la mort virevolte au dessus de nos terres envahies et terrassées et empoisonnés

Ô mon peuple! Peuple de résilience! Peuple de vaillants! Il faut combattre pacifiquement quoiqu’il nous en coûte, avec nos mots, nos actions et notre inébranlable détermination. Figures emblématiques noires et afrodescendantes Innocentes, engagées, protectrices et audacieuses, Font un travail remarquable pour mobiliser et conscientiser, déconstruire et reconstruire Héros et héroïnes de terres décimées par un crime contre l’humanité, ont péri pour un monde meilleur, ont péri au nom de la liberté !

L’esclavage est aboli, la liberté est aussi jouissive qu’amère à bien des égards pour l’homme noir, À grand balan et subrepticement, le néocolonialisme a vu le jour malgré nous Personne n’est dupe, l’intelligence qui nous habite les irrite, sa ka fè yo mal!

Au sommet, les manigances douteuses se multiplient à travers des rictus hypocrites, qui se propagent même au sein des nôtres, c’est qu’on appelle un manjé kochon Où chacun veut être au bon endroit, sucer l’os d’or jusqu’à la substantifique moelle comme dirait Rabelais

Ne nous perdons pas, ne soyons pas égoïstes et carriéristes! Les gens meurent, l’argent et les terres demeurent, arété fè kouyon! Nous sommes sur le même bateau, faisons en sorte de l’amener à bon port, ensemble

LUDVIK JEAN DENIS

Tribune : après la crise

DIDIER DESTOUCHES

Tribune : après la Crise

PAR DIDIER DESTOUCHES

Personne ne peut plus se voiler la face La crise guadeloupéenne est sans précédent par sa nature, son déroulement et ses conséquences Cette crise est une crise hybride, une véritable hydre insurrec tionnelle avec des têtes multiples qui a surgi des profondeurs de rancœurs accumulées par les guadeloupéens au fil d’années marquées par une distanciation politique de plus en plus forte entre la représentation étatique et ses gouvernements et nos élus. La crise sanitaire qui véhiculait depuis des mois des demandes d’abrogation ou d’exemption de la loi portant sur l’obligation vaccinale de certains personnels du secteur public, est devenue tout à tour sociale, économique, sécuritaire et surtout politique. Crise sociale parce que des syndicats et organisations de la société civile regroupés autour de la vieille bannière du LKP, ont étendu les revendications, pour rendre les barrages et manifestations moins impo pulaires, aux anciennes et surtout irrésolues problématiques Des sujets qui taraudent notre société sans qu’aucune décision n’ait pu faire avancer les choses : hausse régulière des prix et vie chère, formation des jeunes, empoisonnement des terres et des eaux au Chlordécone, irrégularités pro fessionnelles, déliquescence du service public La crise est enfin profondément politique avec l’absence avérée et dénoncée par le président de région de toute communication entre élus locaux et agents de l’état en Guadeloupe et entre élus principaux de la Guadeloupe et le gouvernement. Ce qui est certain c’est que jamais la population n’avait été aussi divisée, et pas uniquement entre vaccinés et non vaccinés. Une division qui se manifeste con

crètement par des conflits dans les familles, au travail, devant les barrages où dans les parkings d’hôpitaux. Une division qui se manifeste par de la violence, des agressions, des insultes, des dénon ciations, et surtout la peur Une peur lancinante, éprouvante et désespérante qui est venue s’ajouter au deuil immense de trop nombreuses familles guadeloupéennes, aux angoisses pour nos enfants privés de régularité scolaire depuis bientôt trois années, au manque de relations humaines et familiales compte tenu de la distanciation, à la colère et au sentiment d’injustice de toutes celles et ceux qui ont perdu leur travail ou le fruit de leur labeur et investissements. Cette souffrance là, qui la guérira ? Il n’y a guère que du néant en termes de propositions politiques efficaces. Pleurs et grincements de dents sont hélas notre quotidien, et puisque nous sommes plongés dans l’impasse par tous ceux qui devraient œuvrer, surtout en contexte d’épidémie virale, à construire ponts et passerelles, à dialoguer, à montrer l’exemple ; il faudra que nos nouveaux représentants au sein de la nation française aillent beaucoup plus loin que le simple ralliement sous une bannière communautaire ou ultra marine Il leur faudra trouver les voies et moyens de proposer une réforme complète de la relation. Entre la Guadeloupe et la République, fondée sur de nouvelles politiques publiques ou nos élus locaux pourront eux mêmes prendre des décisions sur les nombreux sujets qui nous concernent directement et spécifi quement Et s’il y a un prochain congrès des élus, ils devront aux aussi se montrer audacieux, lucides et entreprenants

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Une seule Terre

Es tu fier Humain, de ton œuvre ici bas ? As tu façonné le monde à ton image Où as tu façonné le monde en images Où tes choix t’ont ils conduit ? Hors de la nuit de ton cœur

Où dans les abîmes de ton esprit As tu trouvé l’ultime valeur ? Celle qui se cache dans leur regard Ce regard des autres qui ne sont pas toi Qui ne vivent avec toi que grâce à des lois Entends tu la voix des victimes de cette haine Qui se propage sur les réseaux d’hystérie Qui fait des différences une source de peines Le regard que tu dévies face à une couleur Qui ne sera jamais celle de ton épiderme

Poésie 30
DIDIER DESTOUCHES

« Au 16e siècle, le bouddhisme tibétain commença à se répandre en Mongolie, sous la direction de la dynastie Qing, fondée par les Mandchous, qui avait dominé le pays au 17e siècle Au début des années 1900, près du tiers de la population masculine adulte était constituée de moines bouddhistes [ 14] [15] Après l’effondrement de la dynastie Qing en 1911, la Mongolie a déclaré son indépendance de la dynastie Qing et, en 1921, a acquis son indépendance de fait vis à vis la République de Chine

Le voile que tu jettes sur ton propre cœur En faisant grandir ce mal qui en toi germe Car tu ne supportes pas ce qui n’est pas toi Du racisme on ne triomphe pas par la loi Mais par un éveil de tous et un acte de foi

Vois : tu es humanité native d’une seule Terre Et sur cette terre il n’y a qu’une seule lumière C’est la même qui parcourt l’immense univers Celle qui est blottie en chacun de tes matins Pour t’offrir les plus beaux lendemains D’une humanité qui verra enfin son unité Dans les reflets du cristal de sa diversité

Peu de temps après, le pays passa sous le contrôle de l'Union Soviétique, qui avait contribué à son indépendance vis à vis de la Chine En 1924, la République populaire mongole a été déclarée État satellite soviétique [ 16] Après les révolutions anticommunistes de 1989, la Mongolie a mené sa propre révolution démocratique et pacifique au début des années 1990

« Source : https://fr wikipedia org/wiki/Mongolie

DIDIER DESTOUCHES

C’est au goût des en allées Dans une floraison de cannes Que je découvre mes pensées Dans ce désert privé de manne Ô esprits des terres sauvages Et vous sirènes des eaux vierges Délivrez moi de ces rives sans âges Et je vous y brûlerai des cierges De nos jours empêtrés dans la fange Des mensonges et des sourires étranges Je ne vois nulle promesse d’humanité À chaque seconde me guette l’offense Et à chacune de mes rencontres la fausseté Mais pourquoi donc faut il quitter l’enfance ?

DIDIER DESTOUCHES

EXHIBITION DES CORPS COLONISÉS

N E G
G A Z I N E . A R T
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M A
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NOUS SOUHAITONS A TOUTE LA GÉNÉRATION 90 UN JOYEUX ANNIVERSAIRE D'INTOXICATION AU CHLORDÉCONE ! DÉJÀ 30 ANS !

Ce jeudi 24 novembre 2022, malgré les conséquences de l'utilisation massive de ce pesticide nocif, le parquet de Paris a demandé un non lieu dans l'affaire du chlordécone aux Antilles.

Être libre pour la liberté : le Poète

ESSAI POÉTIQUE

Être libre pour la liberté : le Poète

Par moments en lonbraj, le vent s’apaise et filtré par un micro peuple de bananiers, j’écoute ce que dit l’invisible Parle t il dedans moi ? Ou parle t il dedans plus grand que moi, d’où je suis moimême Toujours une parole qui dit quelque part en une langue d’existence, dans l’intuition, ce que je comprends dans l’instant, d’être poète libre d’écrire ce que j’entends et que par conséquent j’écoute, est un art Car l’art est ce qui se produit de ce qui se libère, de ce qui se vit libre, de ce qui est tout bonnement libre Car l’art amène mon corps à l’endroit où est mon esprit libre, qui me réclame d’emmener ce premier, là où est mon âme libre où, elle vibre d’harmonie avec lui En un geste d’où je suis, le geste d’écrire m’emmène sur la scène d’une vibrante vie sacrée Et j’écris de mon oraliture, une histoire aux mille ratures, une calligraphie de poème hiéroglyphe d’une vie en perpétuelle résilience J’y écris des histoires amoureuses, des histoires d’amour, mes amours d’histoires vécues en écho d’un soir, en une pièce de théâtre de rencontres en profondeur humaine

Mon corps uni vers est un papyrus au texte cheminement libre d’une Yole céleste, traçant dans le bleu du ciel, aux remous de cumulus blancs en pleine nuit, des lettres de mots libres pour une parole libérée J’écris des traces de neg mawon toujours libre dans l’esprit Je me sens de tous ces lieux, où l’on prononce mon nom, aux souvenirs de ces mots dans la sym bolique de l’échange, d’une économie bienveillante du dialogue sincère À ce moment où énergie je suis, une fré quence vibratoire qui n’est plus la peine de représenter en matière Le corps tout entier écoute et le corps tout entier vibre une paw l libéré, lorsqu’investi par l’inspiration, le lâcher prise donne guise à une révolution D’où s’effondre tout rapport dominant dominé

Artiste je l’entends

Quand la virtuosité est là dans l’atteinte de l’état de création, ouvert aux flux de libation, de l’ensemble par nous, un temps de psyché unie Soi là maintenant au rendez vous de partout en même temps, écris Nous, nous ré

parons le monde, d’ici sur notre île, nous nous fondons un monde mangrove qui refondera le monde humain. Là où tout moun sé moun

Et nous ferons voir au monde ce que notre kiltifondalnatal relie la vie à la nature, relit le paysage du péyisaj L’esprit et le corps en relativité, reliés par la santé, se fait âme libre Dans un grand conte merveilleux qui raconte l’histoire des lignées qui ont survécu ici, il y a un moment où s’effondrera totalement l’illusion capitaliste et colonialiste L’inspiration humaine à la création d’humanisme est ici fruc tueuse. Comme des îles sous une pluie de comètes idées Ici la nature est luxuriante, foisonne alors la poésie des hommes qui renaissent de toutes les métamorphoses de l’oppression Ici où, les éléments se déchaînent par moment, aucun attachement ne tient Naissent alors des sentiments sans attachement. Car ici, la cyclicité est irrégulière, comme un conte chanté n’est jamais le même Il est l’art qui a vu ici le monde de phénoménaux aléas La nature qui raconte ici en ses deux saisons à chaque fois différemment, ce que tropique implique

Alors j’ai rêvé éveillé d’une vaste mangrove à la géographie Caraïbe

Quand ma négritude m’a sorti des habitudes néfastes du libéralisme, ma créolisation a ouvert tous les mondes comme des res sources d’où plongent mes racines, ma créolité m’a mené à accepter la sommes de particuliers lélé en moi même de ma chair à ma métaphysique unifiée, le raggamuffinsme a consolidé ma culture mawon face aux temples du consumérisme Car ici, la nature défie de son vivant, la science de l’homme qui vise soi disant à sa maitrise de la mère Cette science a tué son père alchimiste Nait alors au coeur des êtres endémiques, amoureux d’ici par émerveillement, une séyans de l’écoute, de l’observance, du dialogue, une Mistik de la relation Le socle du « comment nous sommes » est une somme de l’épistémologie poétique, éructée de la pensée du renouvellement générationnel Assemblée en continuum, s’aperçoit le vaste chantier de l’évolution d’une écologie humaine en processus de décolonisation et d’écologie En faim, avant l’idée même de décolonisation, c’est une propension vitale qui a certainement vu le jour dans les tripes des moun mawonaj ki divini zabitan à l’école de la Morne logie

Alors j’ai rêvé éveillé d’une vaste mangrove à la géographie Caraïbe Elle semée de palétuviers imaginaires, où trônent de grands fromagers, y palabrent les esprits du grand passage du bout du jaden et les esprits en corps vivant De leur dialogue vibre une mémoire de survivance et de résilience Et c’est dans l’actuelle inspiration qu’une quête de simplicité en simplicité, s’ouvre une voie d’humilité qui mène au pays rêvé Je prierai les arbres où logent les dieux, les divinités et les ancêtres faisant de nos îles un grand sanctuaire à la refondation du monde vivant, honorant les ancêtres, ceux qui sont passés et partis avant nous pour l’autre bord du visible Au pays royaume de l’invisible où, l’autre expérience du vivant est, je relierai et relirai ce qui illustre la paw l des anciens, au Faya burn des fausses rivalités, pour libérer leur sens Et je m’emparerai de leurs abyssales inspirations Que leurs mots et gestes en moi, œuvrent à la guérison toujours des maladies de l’égarement humain, tentant de s’extraire de l’univers de la nature par domination Je me sentirai donc élémentaire à la matrice zayann qui me répare pour que je répare à mon tour Tel est le don nègre à l’existence Quoi de plus vivifiant que le symbole d’arbres manguiers plantés au dessus de la tombe des fers de l’asservissement des ancêtres, fers empêtrés en symbole dans les racines de ce

qui nous nourrit, en la vie Nous racontait le frère Gillou Cela mis en relation avec la pratique symbolique que d’enterrer les lombrics au pied d’un arbre, nous dit le frère Yanis La poésie est là Un lombric enterré, emmêlé, mêlé dans ce qui s’élève vers Papa Solèy Réparer l’histoire, remettant à Toussaint ce qui est à Toussaint, Prince Arada qui ouvre à la libération Ici promulguons que ce qui est à Césaire est à Césaire et est à nous, lui qui longtemps a été notre bouche, racontant ce qui de la nature de l’île est la force de notre syncrétisme qui, de refonder à réparer, fait ce qui nous lie à la vie Refonder notre art de vivre malgré la métamorphose du système d’exploitation aux valeurs inhumai nes crues et bues dans l’ivresse de l’assimilé Ainsi, je me pose la question liée à l’idée de réparation qui souvent se base sur une perception historique du passé Ceci dit, il semblerait que l’histoire s’hérite d’une grande tradition de falsification et d’instrumen talisation D’où, je me pose la question de savoir de quoi procède l’histoire et à quelles fins Cette réparation qui, pour moi, signerait un pacte d’acceptation de leur système qui, à maintes reprises, à prouvé sa propension à la barbarie

Alors j’ai rêvé éveillé d’une vaste mangrove à la géographie Caraïbe

Quel cheminement de pensées peut mener à tout repenser de ce qui parait établi ?

Quel cheminement de pensée peut mener à tout repenser de ce qui parait établi Cela concernant l’histoire, son placement épistémologique et son usa ge politique C’est un domaine où la falsification et/ou l’illusion ont biaisé les faits, phénomènes et savoirs et connaissances Une chose est assez troublante, c’est le rôle que joue les religions dans cette procédure d’en fermement, en cadenassant notre foi en une réaction face à la paranoïa et l’angoisse de l’autre. D’où je préfère l’être spirituel à l’être religieux Je prie que la religion devienne un espace temps ouvert et non une geôle à brebis converties Un espace temps libre où l’état de nature nous déshabille des obscènes vêtements de la hiérarchie dans l’humanité, dessinée par la modernité sans manman, sans papa à l’habitus désincarné

Lui, le poète est celui qui se sauve, son art est un Sèbi allumé à la flamme de sa passion pour son humanité. Il veut tout bonnement aimer justement la voie qui mène à la liberté, la voix de libération, celle de l’homme inventeur de l’art de vivre, au fondement de l’art d’aimer Le patrimoine de verbiages et d’adages est sa boite à outils, de laquelle il métamorphose la paw l de la tradition pour que naissent, par l’inspiration, des idéologies culturelles en l’actuel L’aspiration, l’inspiration qu’il expire en révélation de mots guérisseurs, le fait chantre du merveilleux de la nature et de la sensualité de l’être Je vous le dis, le poète est l’amoureux qui, des ténèbres, voit la lumière qui sauve Sa poésie est l’incantation mystique qui réveille en chacun, l’inspiration de faire soi libre Il a en lui le don qui nait, en œuvre libre d’être, parce qu’il est libre d’écrire

Aucun temps de palabres ne s’amoin drit La passion est l’art du verbiage et l’adage, toute parole l’est en cri, même en chuchotement La passion est là par foi, dans le silence qui dit la patience de l’amour et, attend le moment opportun du dialogue sur des sujets, des thèmes, des manifestations phénoménales qui poursuivent le grand temps de la création La force d’être est dans la force de s’écrire soi même, aux jeux du destin des collusions, des attirances, des répulsions, des fusions, au gré des phénomènes mouvements qui de la vie entraînent choses qui

Le poète est l’amoureux qui, des ténèbres, voit la lumière qui sauve

s’enchaînent en gestes volontaires ou involontaires, en gestes inspirés ou gestes tout bonnement inconscient, aux pas maculant de nouveaux sentiers, des lieux inexplorés en soi même, le soi qui d’un « S » majuscule appartient à l’ensemble de l’humanité en une expérience en particulier, qui se révèle par le partage dans une wivivans qui vibre des mots qui s’enchaînent en poème, amènent le merveilleux à l’éclat de lumière, au contraste des ombres, à l’acceptation du Tout, aux quatre éléments de la psyché alignés, à toutes ses représentations de l’être en neuf étages, en quatre morceaux, en quatre coins, en autant de chiffres pour représenter ici les segments qui ensembles alignés, font l’unité

L’unité d’un geste qui écrit un texte parcellaire, un texte inachevé, un texte à peaufiner, un texte à relire, un texte à corriger, ou un texte à interroger de ses erreurs et ses ratures, la curiosité du savoir ce qui ici est retenu, assis sur la monture d’un poème jument enragée, d’être séparée de son poulin, un poème en naissance à l’écho d’une première paw l, un dialogue artistique pour un dialogue culturel, la machinerie de la réalisation d’une culture de vivre ensemble, en somme de tous les particuliers de l’échelle de la famille, à celle du couple, à celle du groupe, à celle du quartier, à celle du péyi, de celle du continent, ou à celle de toutes les îles, de toutes vies qui dansent la mer mère De la douleur de la posture qui ici habite ce corps, elle se laisse combattre au gré des mouvements de respiration, à l’aise de voir le message

passer sans hésitation et au fur à mesure, sentir le geste d’écrire qu’est le geste chorégraphique d’une danse invisible au lecteur, mais discible par son intuition en imagination du plaisir ou de la plaisance, d’écrire des mots à partager, une traversée des terribles tréfonds de l’homme à l’endroit le plus lumineux au sommet de Sahasrara sa couronne, au milieu de Ajna de son troisième œil, perçant dans le coeur du chakra Anahata une vibration au chakra Vshuda, qui ici va jusqu’à la main, réclame à Swadhistana la libido la force de le faire et chakra Muladhara racine ancré dans la terre du lieu, nous voilà à chanter avec une chaleur au Manipura, un poème en chorégraphie de main qui trace sur une feuille arbre ce que les arbres racontent eux mêmes de nous, de ce qu'ils savent depuis des millénaires Car il n’y a pas que le corps (racine tronc et cime) de l’arbre qui est mémoire, sa graine l’est tout autant Elle ne retient pas le trauma, elle ne retient pas l’événement du feu dans les branches, elle ne retient pas l’évè nement de l’éclair, elle ne retient pas le chant macabre de tronçonneuse, elle ne retient pas la voracité des termites, elle retient la résilience de ce qu’elle est Pour qu’à la reproduction de cela, cela dit le malheur, ne la touche pas en corps plus profondément que la première fois, mais qu’elle progresse au fur et à mesure de ses générations, à supporter les frasques de l’environ nement, qu’on ne saurait traduire au trement, que de nous y sentir fragiles et vulnérables Voilà la force du Poète libre d’être libre d’écrire Nou Nou Ka

pasé dèyè é i vin sizé si mwen Sizé i sizé i té ja ka rimé Nou toutouni an vwati-la ka koké Kon dé jenn moun ki sòti jwennKou-lasa i pa ban mwen pon chans ERAUSS
An

Sèks san konplèks

DÉCOUVREZ MAINTENANT ERAUSS

sèks san konplèks

ERAUSS

Dé zyé an mwen plonjé andidan ta w Palé an nou arèsté Souf an nou akséléré, Bouch an mwen an bouch a w É lang an mwen ka niché ta w, Dé tété a vou an men an mwen Toupannan men a w si kòk an mwen Ou enmé kòk la É ou anvi an koké koukoun la tout fondè a y, Fè w jwi kon chyenn, koké w an tout pozisyon kon salòp, kon malpwòp ! Santi rèd an mwen andidan koukoun la! Lang an mwen si tété a w, asi tout kò a vou Défonsé w é gran kòk an mwen la, Kòkòt la ja an sòs, É ka koulé an bouch an mwen Dé lèv a bouch an mwen ka sousé dé lèv a koukoun a w Dé men a w ka chiré dra a kabann, Kòkòt la ka mandé kiki Zòtèy rèd, é talon a w ka fè va é vyen si dra la An fouwé kòk cho la adan on rivyè, Zyé a négrès la ka touné alanvè, On rivyè cho ka bavé Lésé mwen bouwé kòk la, Lésé mwen koké w salòp!

Santi jwi a w koulé, Souf an mwen an kou a w Men an mwen ka ouvè fès a w É karésé titou a y Kiki la rèd é koukoun la ka viv ! An viré w pa dèyè, Kanbré a w fè parèt kòkòt la gonflé, Kiki an mwen ka tranblé ! An niché tou a fès a w, Rété la pou an sousé w salòp!

Pa kouwi, an dèyè a vou kon chyen, Fouwé kòk la an koukoun a w Tout fondè a y Swè mélanjé é sòs a kòkòt Ja mounyé tout kouch la, An santi ou santi jwi la an bout a kòk la, I gonflé paré pou pété, Rimé, rimé an ba a y Dansé pou fè y pléré Nou ka hélé ansanm Vou é mwen fanm An bouch a w i ka fin dégouté, Ti doudou chéri Karès a vou, karès an mwen Ka jwenn pou nou pran souf Doudouuu Kòk la ja rèd ankò

Sizé an té sizé i té ja koumansé Karésé Kòk an mwen I té ja katrèd maten avè on ti nwèsè a vis.

ERAUSS

I té tini on paréyo san ayen an ba a y An fè y désann é kowé y owa kanmiyon la An koumansé niché bouch a y É pijé dé tété a y Souf a y mété y ka pwan fòs É an désann pou nannan koukoun a y I bésé on titak pou ouvè dé janm a y An koumansé pa niché bò a lèv la I mété y ka tranblé é kenbé sa i té ka trapé Lè ou vwè an niché tou a kòkòt a y I hanni kon moun posédé pa on démon Lang an mwen mété y ka monté é désann si tou a y

Drapo la té blan mè a fòs i pran san i vin wouj

AWNO AWNO

AWNO

yéla pèp solèy nèg babò, tribò é lòtbò ! mi on van lévé, èvè on nouvo lokans apa on kri ki sòti an fon a gòj sé on kri ki sòti lwen, lwen, lwen ! an fon zantray a zansèt ki té ka fann kann pou rézoné an nanm aw jòdi jou !

É menm si kò aw ni pwa a listwa, sékèl a plizyè jénérasyon fòw sav té ni on tan, pa té ni mirwa ki té ka montréw jan nèg té bèl sé zyé a bouwo la ki té ka fè lalwa bouch ay ki té jij É volonté ay tousèl ki té bondyé alò démouné moun vin endistriyèl kon lizin lèw gadé byen é apa yè sa fèt ! ou rènyé kilti aw menm jan ou vin ray papaw a fòs i bat manmanw mè ou fè kòlè épi manmanw davwa i pa fè sa i fo pou pa pran kou an men a papaw é ou vwè manman w vin bon é mi ! on pikèt divini potomitan ! Ofinaldikont si pou vou sé kon sa lanmou dwètèt woulé alò sé kon sa ou konnèt enmé pa palé kréyòl ! byen palé fransé ! menm lèw pran sonmèy lang a molyè ka pèrsékitéw chè, pa lésé sa fèt ! nou ja palé endèmnité a tout èsklavajis nou sav ! mè ka nou fè nou ki sav ?

tanbou o lwen ni bon son davwa sé son a libèté ! Tout koté nèg dépoté tanbou ka sonné ! kongné a vélo po fin travèsé lèspastan ou sav tann li an mawkaj a jèn moun jodi jou

fo nou sizé ansanm pou palé fèmé lawonn sé nou menm nou menm

yo awmé nou pa pawné, an nou arété èvè sa osi kilti la nou ni la pli fò ki tout fizi nou pé dépann pou ripòsté douvan mépri kolonyal tout manblo ka santiy an nannan ay a chak kou bas chak toumblak menm on graj gramatikal pé fè yo mal tout wòch nou ja voyé po finn rikoché si nou menm Alò sé fè kabòch é konprinèt sèvi kwédé sé ki pou mémwa ki lèspwa pon mou pé déchoukéw si apa vou menm aw ! sa ki sèvi yè pou baw lyann pé pa rédéw jòdi pou byen doubout Sé pétèt pou sa nou antravè ?!

Drapo la té blan mè a fòs i pran san i vin wouj Alò isé drapo la kanmenm sa Davwa fo yo sav poukwa nou bon Fo Sé la ki adan nou osi pa oubliyé sé mésyé méchan é san wont Doubout. Yo kenbé rèd douvan misyé la ki kenbé fwèt la Alò doubout ! kenbé rèd douvan sistèm la ka kenbé lwa la Frè é sè kenbé rèd douvan misyé la ka kenbé fizi la kwédé sé chivé gréné, é fout zò bèl nèg !

AWNO / Kwédé lokans

Je vis dans une ville ou mes douleurs Sont assiégés de sang. Je sombre dans le regard inhumain de Ces mangeurs de rêve. Dans ma fenêtre, de la rue d’Oswald Durand je les vois

Tout nu, des « san manman », des « kokorat » Victimes d’un système « zombifié3» Les pluies de sang, inondent ma ville Puis je ... tombe Dans l’abîme. minwi

minwi

Je porte ces images Sur mon dos, marqués de sang La nuit rit sous ce ciel bleu Le temps submergé par tes désirs Joue de nous Je te revois encore Défilant sous mes yeux Obsédé j’en deviens accroc Accroc à ces souvenirs qui me Hantent.

J’éjacule une rime délabrée, dans ces verres des dieux Je bois le temps, des souvenirs intrépides de la lune sur ce tas De fatras.

Une cruauté omni présente de ma ville

Sang, sang, coule, coule ! Dans ces impasses Assiégé de bandit. minwi

minwi

Dérèglé à longueur de journée les vies passe sous mes yeux passe sous mes yeux en noir et blanc ....Les mots ont bien crié par manque d’oxygène, leurs poumons carbonisés par la douleur que nous les infligeons. Mise à l’écart, je te revois au fin fond de mes nuits visage anéanti par ces beaux parleurs, la vie est un âne nul sans queue ni tête ...et voilà tu en ris jusqu’à pisser des mots. Les mots reviennent à longueur de journée, certains sortent du coma, d’autres en désintoxication. Pour y dire, y a tellement de mots que j’aurai voulu te dire, tellement de mots qui me reviennent, tellement de mots sans sens ...allongé sur cette route la vie en sous vêtement défile et les voilàmes phrases : je deviens de plus en plus fou de toi et les voilà mes mots... ces mots qui ne sortent jamais... qui s’avalent par peur.

Je t’aime.

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