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jeudi 24 juin 2010
Tempo Souiri
“A Essaouira, j’ai profité des jours comptés pour voir mon pays de plus près et l’entendre respirer.” Mohamed Ennaji, historien, sociologue et économiste
Au-delà de la musique, les danses fusionnent à Essaouira
C
ela ne vous aura peut-être pas échappé à la lecture du programme de cet opus 2010 du Festival gnaoua et musiques du monde d'Essaouira, cette année en effet la danse sera particulièrement à l'honneur lors des résidences et fusions musicales. Focus sur les artistes présents et zoom sur la place de la danse dans la fusion musicale à Essaouira. Mouvement. La danse et la musique sont deux expressions artistiques différentes, mais elles n'en sont pas moins complémentaires. La musique, en effet, revêt une autre profondeur lorsqu'elle s'accompagne de danse; cette dernière quant à elle ne saurait vraiment se déployer sans musique. La musique gnaoua, de son côté, porte en elle tout le mysticisme des pouvoirs qu'on lui confère, en tant que fruit béni de croyances ancestrales puisque -comme le disait le célèbre danseur et chorégraphe français décédé en 2007 Maurice Béjart: “la danse, mieux qu'aucun autre des arts, peut nous livrer l'essentiel des mythes”. Ainsi, en matière de musique gnaoua et de fusions nées de cette même musique, la danse occupe une place particulière.
Georgian National Ballet, les guerriers de la danse
Lors de ce Festival, la danse sera donc à l'honneur, et ce dès ce soir avec le concert d'ouverture: le public est convié à un concert fusion né d'une résidence artistique réunissant les maâlems et frères Mohamed et Saïd Kouyou, ainsi que l'Armenian Navy Band et le Georgian national ballet. Ce dernier, le Ballet national de Géor-
,Quelques danseurs de Step Afrika qui se produira à Essaouira.
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gie, est en fait la première compagnie de danse nationale folklorique de ce pays. Il a été fondé en 1945 par Iliko Sukhishvili et Nina Ramishvili, lui chorégraphe doué, elle grande danseuse. Après avoir débuté leurs carrières dans le Théâtre d'Opéra et Ballet de Tbilissi, c'est pour réaliser leur rêve commun qu'ils créent un ballet national basé sur le folklore géorgien tout en élevant la danse populaire à un niveau classique.
10.000 spectacles
Le ballet national de Géorgie a donné plus de 10.000 représentations dans le monde dans plus de 90 pays et enchanté de fait quelque 50 millions de spectateurs au cours d'environ 200 tournées sur les cinq continents. Le Ballet, au cours de son histoire, a ainsi rempli des lieux et salles prestigieux tels que l'Albert Hall, le Colisée, le Metropolitan Opera, la Scala de Milan (où ils sont le seul groupe folklorique à s'être produit pour l'heure) ou encore le Madison Square Garden de New York. La compagnie compte actuellement quelque 70 danseurs dont dix seront présents à Essaouira, ainsi qu'un petit orchestre; elle réalise aujourd'hui des chorégraphies plus modernes inspirées du folklore des Balkans et à l'allure guerrière. Ce Ballet de renom sera ainsi amené durant le Festival à fusionner sa danse de là-bas avec les rythmes d'ici pour une résidence artistique qui, selon les organisateurs, “aura un goût d'ailleurs”. Un goût d'ailleurs, et peut être un goût d'universel, où la danse et la musique permettent de transcender les espaces et les frontières.
,Le Georgian national Ballet se produira ce soir à 20h00, place Moulay Hassan (voir article en page 2).
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Step Afrika, ou la musique et la danse “2 en 1” Le samedi 26 juin, ce sera au tour de la danse stepping d'être à l'honneur au côté de la musique gnaoua lors d'un concert fusion né d'une résidence artistique avec le maâlem Mustapha Bakkou et les douze danseurs de l'ensemble Step Afrika. La célèbre troupe américaine Step Afrika, créée en 1994, est en fait la toute première compagnie professionnelle au monde dédiée à la tradition du stepping. Cette compagnie s'est illustrée dans de nombreuses scènes en Amérique du Nord, Amérique latine, en Europe, en Afrique ou encore aux Caraïbes. Le stepping est une danse rituelle issue des confréries afro-américaines et de la Boot dance africaine dans laquelle les danseurs utilisent le corps comme instrument. Un film, intitulé “Steppin” (du réalisateur Sylvain White), est même sorti sur les écrans en 2007 où cette danse occupe le devant de la scène, et ce faisant va à la rencontre d'un plus large public. Le stepping est de fait une des incarnations de la fusion qui peut exister entre la danse et la musique puisque dans cet exemple précis l'outil est le même, à savoir le corps. Ainsi, au-delà de la danse gnaoua (vous trouverez là-dessus un dossier dans l'édition de demain, partie arabophone) les danses du monde seront donc à l'honneur dans les fusions musicales du Festival Gnaoua d'Essaouira. Une occasion de pousser plus loin encore le dialogue entre les cultures, au-delà de la bouche (des mots) et des oreilles (des sons), mais dans le corps tout entier. ■■Muriel Tancrez
À ne pas rater • Concert d'ouverture: jeudi 24 juin à la scène Moulay Hassan à 20h00 Résidence artistique Georgian national ballet, maâlems Mohamed Kouyou et Said Kouyou et l'Armenian Navy Band. • Résidence maâlem Mustapha Bakbou et Step Afrika à la scène Mpulay Hassan le samedi 26 juin à 21h00.