Mayotte Hebdo n°1008

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IVèmes trophées de l’environnement présente les Vous êtes une ASSOCIATION, ENTREPRISE, COLLECTIVITÉ ou une INITIATIVE SCOLAIRE ou CITOYENNE Vous avez mené des ACTIONS en FAVEUR de l’ENVIRONNEMENT au cours des 12 derniers mois. Contactez-nous avant le : 31 août 2022 pour faire connaître VOS engagements. Un JURY se réunira pour désigner CINQ NOMMÉS par catégorie. Pour répondre à l’appel : Veuillez remplir le formulaire ici www.mayottehebdo.com 2022

SORTIR L’URGENCEDE

3 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 LE MOT DE LA RÉDACTION

Comme à chaque fois que l’île au lagon accueille des personnalités politiques nationales, ce fut l’évènement. De dimanche à mardi, en effet, étaient de passage Gérald Darmanin, notre sulfureux ministre de l’Intérieur, Jean-François Carenco, son délégué aux Outre-mer, et Charlotte Caubel, secrétaire d’État à l’Enfance auprès de la Première ministre. Ce genre de délégation devrait être une aubaine pour le peuple mahorais, qui ne demande qu’à ce que le gouvernement comprenne les maux dont il souffre. Malheureusement, la profusion d’annonces et de promesses non tenues lors de ces visites éclairs ont fait perdre espoir à Mayotte. C’était sans compter sur M. Darmanin. Parfois juste, d’autres fois moins, comme lorsqu’il accuse les supporters anglais d’être responsables d’un fiasco footballistique à Saint-Denis, le premier flic de France a le mérite d’être toujours ferme dans ses décisions. Les deux nouveaux intercepteurs en mer de la police aux frontières et de la gendarmerie peuvent en témoigner. L’insécurité, obsession – parfois déraisonnable – du résident de la place Beauvau, impacte en effet toutes les couches de la société mahoraise, qui a grand besoin de retrouver sa paix d’antan pour pouvoir se développer. Avec les incivilités et violences dont souffre le territoire, comment attirer investisseurs et touristes ? Dans sa dernière étude, l’agence d’attractivité et de développement touristique de Mayotte souligne que les clientèles réunionnaise et métropolitaine, cœurs du tourisme “ étranger ” de l’île, sont en baisse de plus de 30%. Mayotte ne doit plus vivre dans l’urgence. Bonne lecture à toutes et à tous. Axel Nodinot

Cette phrase, prononcée par Ben Issa Ousseni, intervient à la suite du classement du mawlida shenge au patrimoine culturel immatériel national du ministère de la Culture. C’est la première fois qu’un élément du patrimoine culturel de Mayotte intègre cette liste, suite au travail volontaire du Musée de Mayotte, porteur du dossier de demande. L’établissement consacrera d’ailleurs le samedi 26 novembre 2022 à cette inscription, avec la présence de professionnels et praticiens du shenge. “ C'est une vraie reconnaissance de ce travail de qualité ”, a abondé le président du Conseil départemental de Mayotte. Le mawlida shenge, alliant danse, chant et musique, est une tradition locale qui aura de grandes chances de perdurer suite à cette initiative.

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Il était l’un des plus sérieux et appliqués de nos confrères. Le 13 août dernier, Faïd Souhaïli, journaliste de Mayotte la 1ère, nous quittait prématurément. Ancien rédacteur en chef de Mayotte Hebdo et initiateur des Trophées des sportifs mahorais de l’année que nous perpétuons depuis, il aura laissé sa trace – et son encre – dans la vie quotidienne des habitants de l’île. Compétent dans de nombreux domaines, il s’employait notamment à écrire et parler à propos du sport, de la politique ou de la société mahoraise. Âgé de seulement 42 ans, Faïd Souhaïli ne manquait pas de projets pour l’avenir, et il manquera sans aucun doute à la scène médiatique locale.

UZURI WA MWENDRO, POUR DÉCOUVRIR L’OUEST

L’office de tourisme du centre-ouest a lancé la quatrième édition d’Uzuri wa mwendro, son programme de randonnées et de découvertes au sein des cinq communes du centre-ouest.

FAÏD SOUHAÏLI NOUS A QUITTÉS

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4% C’est le montant de la revalorisation des prestations sociales en France, après le vote de la loi sur le pouvoir d’achat au début du mois. Ainsi, à Mayotte, les allocations familiales, le complément familial, l’allocation de rentrée scolaire, la prime d’activité, le RSA, l’allocation adulte handicapé et l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé sont revalorisés. La même hausse s’applique aux prestations vieillesse, à la pension d’invalidité et aux rentes d’accident du travail ou de maladie professionnelle. En vigueur depuis le 1er juillet 2022 et rétroactives, ces revalorisations ne nécessitent aucune démarche supplémentaire de la part des bénéficiaires. DE MAYOTTE

“ La mémoire est essentielle ”

Samedi 27 août à 7h : Randonnée au départ de la mosquée de DimancheTsingoni28 août à 8h30 : Visite de l’exploitation de vanille de Foundi Madi à Tsingoni Samedi 3 septembre à 7h : Randonnée au départ de la place Sicotram de Chiconi Dimanche 4 septembre à 8h30 : Randonnée VTT au départ du terrain de Bahédja et visite de l’exploitation de Dani Salime à SamediKahani10 septembre à 7h : Randonnée au départ de la maison de l’artisanat de Sada Dimanche 11 septembre à 8h30 : Visite de l’exploitation Maora Land à Kahani, initiation à la pêche au djarifa à Chiconi et kayak à Tanaraki Samedi 17 septembre à 7h : Randonnée au départ du pôle d’excellence rurale de Coconi Dimanche 18 septembre : Immersion et exposition au pôle d’excellence rurale de Coconi.

“ Si l’on schématise, plus les cousins comoriens arrivent, plus les Mahorais demandent des protections institutionnelles aux autorités françaises ”, résume le démographe Claude-Valentin Marie.

MAYOTTE : QUATRE DATES-CLÉS POUR COMPRENDRE

Décembre 1974 : Mayotte se sépare du reste des Comores D’abord colonie française, les îles formant l’archipel des Comores constituent un seul et même territoire d’outre-mer rattaché à la France de 1946 à 1975. Leurs liens sont anciens : des familles sont dispersées sur les quatre îles, les unions à travers l’archipel sont fréquentes, les échanges culturels et commerciaux, multiples. L’année 1974 marque un moment de bascule : l’archipel souhaitant accéder à son indépendance, une consultation d’autodétermination y est organisée. Les habitants d’Anjouan, de Mohéli et de Grande Comore se prononcent pour l’indépendance ; seule Mayotte vote pour le maintien au sein de la République française. La France, qui souhaite maintenir sa présence stratégique dans l’océan Indien, décide de prendre en compte ces résultats séparément. Et ce, en dépit du droit international : quelques jours avant le scrutin, l’Organisation des Nations unies demandait à la France de respecter l’unité et l’intégrité territoriale de l’archipel. “ Cet événement est un coup de force juridique ”, estime Claude-Valentin Marie, expert de l’outre-mer à l’Institut national d’études Tandisdémographiques.queMayotte

“ Il s’agit d’une rupture majeure dans le code de la nationalité. Il est d’autant plus important de la comprendre qu’elle a une suite politique ”, insiste Claude-Valentin Marie. Dans un long entretien au Journal du dimanche, le 21 août, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est en effet prononcé en faveur d’un nouveau durcissement du droit du sol et propose de conditionner la nationalité française d’un enfant à un séjour régulier d’au moins un an à Mayotte, et non plus trois mois, pour au moins un des deux parents.

LES TENSIONS MIGRATOIRES SUR L’ARCHIPEL

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale Mayotte

Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

LU DANS LA PRESSE

obtient un statut hybride et provisoire de “ collectivité territoriale ”, en 1976, l’Etat comorien naissant, composé des trois autres îles, conteste cette souveraineté française et obtient à plusieurs reprises le soutien de l’assemblée générale des Nations unies et de l’Union africaine.

Dans ce contexte, en 1995, le gouvernement français met en place une procédure de visa, inexistante jusque-là, pour les Comoriens souhaitant se rendre sur l’île de Mayotte.

A partir de là, les élites mahoraises s’inquiètent d’un éventuel retour dans l’ensemble comorien et revendiquent de plus en plus vivement un statut de département d’outre-mer pour Mayotte.

L’obtention de ce “ visa Balladur ” étant ardue, les traversées, qui étaient jusqu’alors habituelles, commencent à se faire de manière clandestine.

Septembre 2018 : le droit du sol est modifié à Mayotte Au fil des ans, la réponse politique prend la forme d’un durcissement de l’accès à la nationalité française sur le sol mahorais. Si les dispositions s’accumulent progressivement, 2018 représente un changement de cap majeur : le code de la nationalité française est revu dans le cadre de la “ loi pour une immigration maîtrisée ”, et le droit du sol y est spécifiquement restreint pour les enfants nés à Mayotte de parents étrangers. Pour qu’ils bénéficient du droit du sol et qu’ils accèdent à la nationalité française dans les mêmes conditions que sur le reste du territoire français, les parents doivent désormais prouver un séjour régulier de trois mois avant la naissance de l’enfant.

Après le référendum sur l’indépendance, les relations et flux de populations entre les îles, à commencer par Mayotte et Anjouan, se complexifient. Mayotte gagne en attractivité, tandis que l’instabilité politique abîme le reste des Comores.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a achevé, mardi 23 août, une visite de trois jours à Mayotte afin d’y montrer la détermination de l’Etat à lutter contre l’immigration clandestine. Peuplé de près de 350 000 à 400 000 habitants, l’archipel a vu sa population quadrupler entre 1985 et 2017, selon l’Insee, sous l’effet conjugué d’une forte natalité et des phénomènes migratoires. Mayotte compte désormais 50 % d’étrangers, majoritairement en provenance des Comores Pourvoisines.comprendre les tensions migratoires qui caractérisent aujourd’hui Mayotte, il est utile d’élargir la focale. Mayotte appartient historiquement à un archipel composé de trois autres îles : Anjouan (située à moins de 70 kilomètres), Mohéli à 130 kilomètres et Grande Comore à 190 kilomètres. La fragmentation progressive de cet espace situé à l’est de l’Afrique explique en grande partie les difficultés actuelles.

Janvier 1995 : fin de la libre circulation entre Mayotte et les Comores

Entre 1975 et 1997, la population de Mayotte passe, d’après l’Insee, de 45 000 à 131 000 personnes.

Le 24 août 2022, par Iris Derœux pour Le Monde.

Quelques moments de l’histoire récente du 101e département français éclairent sur la difficulté actuelle de juguler l’immigration clandestine.

Mars 2011 : Mayotte devient un département d’outre-mer Après le vote des Mahorais en 2009, la revendication ancienne de la départementalisation est finalement satisfaite. Le 31 mars 2011, Mayotte devient le 101e département français, et le 5e français d’outre-mer. Mais ce nouveau statut fait entrer Mayotte dans une période de grandes tensions sociales : les attentes en matière de développement économique et d’amélioration des droits sociaux étant très fortes, la population est déçue. Quantité d’indicateurs continuent d’être au rouge dans ce nouveau département, du plus fort taux de chômage des jeunes au plus fort taux d’illettrisme en LesFrance.conséquences sont doubles. Sur l’île, les flux migratoires en provenance des îles proches se poursuivent, et le ressentiment des Mahorais à l’égard de leurs voisins comoriens s’accentue. En parallèle, les départs de Mayotte augmentent. Comme le soulignent les recherches d’Antoine Math, économiste à l’Institut de recherches économiques et sociales, l’île devient une terre d’émigration. Ce sont avant tout les jeunes qui quittent l’île, en premier lieu vers La Réunion et, dans une moindre mesure, vers la métropole.

“ Le durcissement des politiques migratoires engendre des conditions de traversée de plus en plus difficiles et provoque un nombre important de décès en mer qui restent très mal documentés, confirme la sociologue Nina Sahraoui, qui a mené une enquête de terrain sur les femmes enceintes à Mayotte. En outre, ces politiques produisent de l’immobilisation : des personnes qui feraient très probablement des allers-retours, notamment pour visiter des familles dispersées, se trouvent piégées du fait de leur irrégularité. ”

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Surnommé affectueusement par ses amis et collaborateurs “ Ali Combo de Combani ”, le corse Alain Colombani a marqué de son emprunte le sport et la culture à Mayotte à la fin des années 80, différents événements ayant été initiés sous son impulsion. Parent de deux enfants qui enseignent sur l’île, il revient de temps à autres sur le territoire qu’il a appris à aimer et à chérir et qui le lui rend bien. Il revient sur ces moments significatifs de l’histoire récente de notre île à travers cet entretien.

6 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

L’ENTRETIEN MAHORAISEPOUR“COLOMBANIALAINUNPLANMARSHALLLAJEUNESSE”

Propos recueillis par SIAK

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PORTRAIT8•MayotteHebdo•N°1008•26/08/2022

A.C. : Autre chose qui me tenait à cœur, nous avions organisé à Mayotte entre 1987 et 1991 un chantier international du sport, le premier pour le service de la jeunesse et des sports, avec des mahorais, des malgaches, des comoriens et un jeune homme de 25 ans membre des “ compagnons du tour France ” . Ces moments ont constitué pour moi une image ultra positive de la France. Les compagnons du tour de France sont des gens qui connaissent tous les corps de métiers et sont les meilleurs dans leurs domaines, ils ont fait plein de choses, notamment des cathédrales… Et là, ce jeune m’a géré ce chantier de mains de maître,

ces dernières années, Monsieur Soibahaddine Ibrahim Ramadani, et qui m’a initié aux danses mahoraises. Pour la partie sport, j’ai senti en observant les pratiques locales, surtout au football que les jeunes mahorais pouvaient progresser et être à meilleur niveau en jouant à la brésilienne. De ce fait, j’ai adopté avec eux un schéma brésilien, c'est-à-dire, un schéma à bloc équipe qui monte avec un soutien et cela tombait bien puisqu’en 1987 se mettaient en place les 1 ers jeux des îles de l’Océan indien sur l’île de La Réunion et Mayotte y était invitée, avec beaucoup de problèmes d’ailleurs parce qu’à l’époque déjà, les Comores s’opposaient à la participation des équipes locales à cet événement. Avec l’intervention du Président du conseil général, Monsieur Younoussa Bamana, nous avons réussi à imposer la présence des sportifs mahorais bien évidemment. Aux jeux des îles, je monte avec mes collaborateurs au terme d’un tournoi inter-villages une équipe composée des meilleurs footballeurs de mahorais et nous arrivons à La Réunion. Contre toutes attentes, cette sélection bât celle de Madagascar considérée alors très très grand espoir régional. Sur le coup, nous n’avions pas réalisé la portée réelle de cette victoire pendant que les malgaches la vivaient eux de leur côté comme une catastrophe nationale. C'est-à-dire que Mayotte avec 150.000 habitants à l’époque bât Madagascar 3 buts à 0. La Réunion nous avait un peu arnaqué en nous faisant jouer dans les hauteurs à Salazy, dans le froid, et nous avaient balayé. Mais je retiens de cette histoire que notre sélection a fait un match nul face à l’île de Maurice et que la victoire contre le grand voisin malgache avait été perçue à Mayotte comme un événement majeur. Aujourd’hui encore lorsque je reviens dans l’île, les gamins qui étaient à l’époque cadets me reconnaissent et ça me va droit au cœur.

M.H. : A l’époque vous avez initié d’autres événements sportifs marquant, comme la traversée à la nage de Dzaoudzi-Mamoudzou, quels sont ceux qui vous tenez le plus à cœur ?

9 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

Mayotte Hebdo : Vous êtes une figure locale pour tous ceux qui ont connu Mayotte à la fin des années 80, quels souvenirs évoquent en vous ce retour momentané dans l’île ?

Alain Colombani : Je suis arrivé à Mayotte en 1987 (à 1991) en provenance du Ministère de la Jeunesse et des Sports à Paris et je n’avais aucune expérience de terrain auparavant. Mais j’ai très vite constaté qu’ici la société était en fait constituée de beaucoup de villages et étant moi-moi issu d’un village en Corse, j’y ai vite retrouvé des similitudes et des ressemblances entre les villages mahorais et les villages corses, par conséquent, mon insertion n’a pas été très difficile, quelque part j’étais un peu chez moi, mis à part l’Islam bien sûr qui n’était pas ma religion. J’ai donc retrouvé sur l’île cette ambiance de village et je l’ai aimé. Je suis arrivé à Mayotte que je ne connaissais pas du tout, sans aucun apriori, et dans un premier temps j’ai juste eu envie d’observer ce que les gens faisaient et quelles étaient les choses qui tenaient à cœur aux Mahorais. Je me suis très vite aperçu dans le domaine qui est le mien, la culture, la jeunesse et les sports, que beaucoup de choses m’interpelaient et en même temps, j’ai eu envie de valoriser rapidement. Ma démarche a été à ce moment-là d’essayer de valoriser ce que je trouvais moi quelque part d’exemplaire, de singulier et d’original et les faire partager finalement à mes frères “ mzoungou ” (européens) qui m’avaient nommé mais en aucun cas je n’ai voulu imposer le chemin à suivre. Dans mon observation, j’ai été interpelé par énormément de choses notamment des pratiques traditionnelles, en particulier les danses et une capacité sportive que j’ai très vite perçu étant moi-même un vieux sportif.

M.H. : On vous connaît la prouesse d’avoir su préparer avec brio l’équipe de Mayotte aux premiers Jeux des Îles de l’océan Indien à La Réunion, mais aussi la première participation de danseurs à un événement culturel international en Métropole. Comment vous y êtes-vous pris à l’époque ?

Donc il nous fallait former au football, au handball et au volleyball, à la natation, à l’audiovisuelle, mais aussi former des directeurs de Maisons de jeunes. J’avais un éventail de choses qui me permettaient de balayer un petit peu de tout.

A.C. : Très rapidement j’ai d’abord observé les danses, c’est leur originalité et leur singularité qui m’avait le plus frappé, je pense bien évidemment au “ débah ” , “ mchogoro ” , “ mgodro ” , “ chirondrowa ” , “ chigoma ” , le “ wadaha ” et bien d’autres encore. Je remercie au passage un ami lequel s’est retiré de la vie politique

chantier qui s’est déroulé dans la commune de Koungou dont le maire de l’époque, feu Monsieur Fréderic d’Achery, en était hyper enthousiasmé et nous a apporté tout son soutien. Il y a eu aussi un autre projet remarquable que nous avons pu réaliser, la traversée de Dzaoudzi-Mamoudzou à la nage. Ayant personnellement proposé l’idée, je me suis retrouvé coincé et à nager avec les participants, mais je l’ai fait très volontiers, avec une anecdote très sympathique à retenir, c’est que je me suis retrouvé agrippé à une grosse tortue pendant un petit moment, et dès qu’elle m’a senti a cherché à m’entrainer dans les fonds et je me suis empressé de remonter bien évidemment pour finir la compétition. Et je suis malheureusement étonné que cet événement n’ait pas été reconduit depuis.

D’ailleurs, je me rappelle avoir eu un petit problème avec feue Mme Zaïna Meresse dont je m’en excuse aujourd’hui, car nous ne pouvions pas balancer 5 heures de danse non stop alors que nous n’avions qu’une plage de 15 minutes maximum. Ce qui nous intéressait avant tout dans cette affaire c’était de faire connaître Mayotte à l’extérieur. Nous avons donc été obligés de faire une synthèse de toutes les danses mahoraises, très singulières à mes yeux pour attirer les “ mzoungou ” à Mayotte. Nous avons réussi à relever le challenge puisque notre troupe est sortie 3 ème dans un festival mondial de folklore à Gana en Auvergne. Les retombées ont été au rendezvous puisque cela a beaucoup fait parler de Mayotte en Métropole et nous en avons tous été contents. Sur le plan culturel toujours, j’avais été très impressionné par la broderie “ récélé ” (Richelieu), une technique de fabrication des draps que les femmes mahoraises avaient hérité des sœurs de Madagascar. Des filles que coachait Mme Faouzia Kordjee, la femme du commandant Boina que je salue au passage si elle lit ce document ou en entend parler, avaient mis 4 mois de boulot pour réaliser un travail formidable mais elles avaient un petit problème de débouchée. Nous avions réussi à les aider à promotionner leur travail en négociant un emplacement à côté de l’ancien CMAM (Centre Mahorais d’Animation Culturelle) pour écouler leur production qui était pour moi une réalisation formidable. Je repense aussi au BAFA, un diplôme d’animation organisé et validé, lequel a permis à beaucoup d’instituteurs d’ailleurs de compléter leur formation, de pouvoir intervenir dans le domaine de l’animation et à d’autres d’avancer dans d’autres domaines d’activité.

Habituellement, les services de la Jeunesse et des Sports n’organisait pas ces sessions mais là nous étions obligés de le faire parceque les CEMEA n’existaient pas encore à Mayotte. Ils sont venus un peu plus tard après sous l’impulsion d’Archimède Saïd que veux saluer ici, de même que tous les animateurs de Jeunesse et Sport que je m’excuse de ne pas pouvoir tous citer là, je pense notamment à Nazariou, Colo, Abdouroihamane, à Jean-Claude Novou, à Darouèche Dini, j’ai une mémoire visuelle d’eux mais les noms m’échappent pour certains mais je sais qu’ils sont tous là, qu’ils m’ont accepté et permis de pouvoir mettre en place et faire aboutir l’ensemble de ces projets et je tiens à les remercier, comme également un directeur de service en particulier, Henri Lecorno, sachant qu’ils n’ont pas tous été bons, pour le dire clairement. J’ai retrouvé M. Lecorno en Guyane un peu plus tard. Voilà l’ensemble de choses dont je me souviens de mon séjour professionnel sur le territoire et bien évidemment la découverte de tous les villages mahorais étant donné que j’ai fait l’effort d’aller voir l’ensemble des villages de cette île, du nord au sud, sauf un, Kani Bé. Je regrette d’ailleurs parce que

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M.H. : Avec votre équipe d’animateurs, vous avez mis en place pas de choses dans le domaine culturel, quelles sont les réussites les plus significatives pour vous ? A.C. : Dans le domaine culturel, notre première action a porté sur la création d’une troupe de danse avec, évidemment, un casting de toutes les belles filles de Mayotte et surtout avec un Monsieur qui à mon avis n’a pas été perçu à sa juste valeur, Monsieur Colo Mangara. C’est avec lui que j’ai pu monter un programme des plus beaux moments de danse de Mayotte.

10 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

M.H. : D’aucuns déplorent le peu d’investissements publics consentis en faveur du développement du sport à Mayotte, est-ce votre avis ?

A.C. : Par rapport au développement du sport, le problème n’est pas que mahorais. Il y a une volonté politique en France visant à gommer le sport, la culture et l’éducation populaire, malheureusement, le sport n’est plus un ministère à part entière, ce n’est plus une priorité gouvernementale. Mais ça ne signifie pas que ça ne puisse pas être aujourd’hui une priorité mahoraise. Ça veut dire que les élus locaux peuvent se mobiliser en faveur de la jeunesse et faire du sport un complément véritable d’un dispositif de formation professionnelle, avec la culture comme 3ème volet. L’originalité d’un tel concept sera qu’il s’agira justement d’un dispositif mahorais, adapté aux attentes de la population locale qui s’y reconnaîtra encore plus. Ce n’est pas un travail facile à faire, il faut l’inscrire dans le cadre d’un plan Marshall pour les jeunes à Mayotte, il importe que les élus en aient conscience, ils sont acteurs prioritaires ce plan, les jeunes arrivent en aval. Il ne faut pas voir le sport et la culture seulement en termes de loisirs, il y a également des métiers spécifiques à la clé. Peutêtre faudra-t-il développer des formations en plus pour que les jeunes mahorais puissent s’intégrer et adhérer afin de devenir par la suite eux-mêmes des encadrants sportifs. n

A.C : Ce n’est pas un potentiel, c’est une urgence, il faut faire quelque chose ! Le potentiel est là évidemment, la vie est là et il faut qu’elle puisse s’épanouir dans les meilleures conditions et que donc intégrer ces jeunes non pas dans des conflits mais dans un devenir professionnel, culturel et sportif de Mayotte afin qu’ils se sentent chez eux et qu’ils soient reconnus quelque part comme des acteurs potentiels réels. C’est ce que je pense. C’est clair ! Ceci dit, ce n’est pas le sport qui réglera tout. Il ne peut être qu’un complément de formation. Il faut en priorité que ces jeunes-là se sentent impliqués dans l’avenir de Mayotte et que donc là ça passe par le travail, par des formations de métiers afin qu’ils deviennent des acteurs réels et professionnels. Le sport et la culture viendront dans un 2ème temps, la priorité c’est une capacité à leur donner du travail. Je voudrai ici saluer le travail fait par le RSMA qui, à mon époque déjà, a été un acteur important du développement de l’île et qui aujourd’hui encore, à mon avis, n’est pas reconnu à sa juste valeur. Il faut les encourager et les aider à augmenter leurs possibilités d’intervention. Je les voie comme des acteurs privilégiés d’un nouveau dispositif de formation des jeunes à mettre en place sur ce territoire. Il faudra fixer des objectifs à atteindre après recensement du nombre réel des jeunes nécessitant une prise en charge et surtout les moyens disponibles pour les former. Un chiffre de 250 000 jeunes est avancé actuellement, il est impossible ou extrêmement difficile d’envisager de former autant d’individus en si peu de temps, il faudra sans doute envisager des plans quinquennaux ou décennaux pour y parvenir. A la fin de la période choisie on verra les résultats et on saura si on poursuit dans la même trajectoire ou s’il faut changer, voir même stopper le programme.

11 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

c’est le village de mon ami Younoussa Bamana. Je n’ai pas pu y aller, je ne sais pas pourquoi. J’ai aimé plus spécialement Combani parce qu’il y avait un peu mon nom dedans et que les gens m’appelaient affectueusement “ Ali Combo de Combani ” MH : La jeunesse est source de beaucoup de problèmes à Mayotte actuellement, bagarres intervillageoises, révoltes contre les forces de l’ordre, contre l’autorité parentale, et j’en passe, quelle est votre opinion sur ce sujet ? A.C : Ce que je voie m’inquiète un peu, je voie des embouteillages que j’ai connu moi aussi dans les autres DOM mais là dans des proportions impressionnantes à Mayotte, le nombre d’habitants qui a décuplé d’une façon complètement inattendue et les problèmes de la jeunesse qui me tiennent particulièrement à cœur et je voie que Mayotte est malheureusement en train de se couper de sa jeunesse. Ce n’est pas bon pour son avenir et j’espère très vivement qu’il y ait une prise en compte de gérer ce problème et que ces jeunes deviennent des acteurs positifs et de l’avenir et du devenir de Mayotte, qu’on les intègre dans des dispositifs de métiers y compris minoritaires sur l’île, mais qu’en tout cas il y ait un plan Marshall qui soit mis en place pour intégrer réellement ces jeunes, qu’ils aiment leur île et qu’ils aient envie de participer de façon positive à son développement et non pas toute cette violence qu’on connait aujourd’hui.

M.H. : Selon vous, le sport peut-il être une des solutions pour endiguer ce fléau ? Y a-t-il vraiment un potentiel pour faire décoller ce secteur pour longtemps ?

DEMAYOTTEL’INTÉRIEUR

VISITE MINISTÉRIELLE 12 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 DOSSIER

Ce fut leur tournée annuelle. Du dimanche 21 au mardi 23 août, Gérald Darmanin, renouvelé au ministère de l’Intérieur – et glanant au passage celui des Outre-mer –, Jean-François Carenco, ministre délégué aux Outremer, et Charlotte Caubel, secrétaire d’État chargée de l’enfance auprès de la Première ministre, ont sillonné l’île d’est en ouest, multipliant les visites et les annonces. Tour d’horizon de ces trois jours augurant de nombreux espoirs pour les Mahoraises et les Mahorais.

13 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

IL EST L’HOMME DE CETTE RENTRÉE POLITIQUE 2022. DURANT TOUT L’ÉTÉ, GÉRALD DARMANIN A MULTIPLIÉ

LES ANNONCES DANS LE DOMAINE DE LA SÉCURITÉ. PRÉSENT SUR TOUS LES FRONTS, LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR L’ÉTAIT AUSSI À MAYOTTE, DU 21 AU 23 AOÛT. POINT NÉ DE LA DERNIÈRE PLUIE, LE PREMIER FLIC DE FRANCE A PROFITÉ DE CETTE VISITE POUR RAVIVER LES ESPOIRS DU PEUPLE MAHORAIS, EN PROIE À UNE INCESSANTE DÉLINQUANCE, EN TÉMOIGNENT LES ÉVÈNEMENTS DE LA SEMAINE DERNIÈRE. VOICI LES PRINCIPALES PROMESSES QUE BEAUVAU A FAITES À MAYOTTE. POLITIQUE

LES ETDEENDECOMMANDEMENTS7DARMANINMATIÈRESÉCURITÉD’IMMIGRATION

L’ARMÉE POUR “ RÉÉDUQUER ” LES MINEURS DÉLINQUANTS

14 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 Axel NodinotDOSSIER

Durant sa pérégrination mahoraise, Gérald Darmanin a ressorti du placard une proposition de campagne d’Emmanuel Macron : des centres d’encadrement militaire. Lors du débat de l’entre-deux tours, le président de la République avait en effet évoqué la possibilité d’une “ rétention dans un environnement militaire, ce qui est une de mes propositions ” . Le pensionnaire de l’Élysée n’a cependant rien inventé. Le colonel Michel Goya, désormais écrivain et chroniqueur, a rappelé sur Twitter que les “ Jeunes en équipe de travail ” , des stages encadrés par l’armée et la gendarmerie, avaient été déployés en France de 1984 à 2004. Dans la même phrase, Emmanuel Macron avait également évoqué la possibilité de travaux d’intérêt général pour les mineurs délinquants. Une solution prônée par les patrons mahorais, qui déplorent l’impact de la délinquance sur le tourisme ou l’investissement : “ Votre dernier passage signe d’espoir nous a laissés un sentiment amer que la situation empirait plutôt que s’améliorait ” , écrit dans une lettre publique Carla Baltus, présidente du MEDEF Mayotte. 1

32 Au 1er juillet 2022, 72 067

pour 61 010

président

15 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

” 4

opérationnelles

Outre cette idée, le ministre de l’Intérieur a ressassé le besoin d’une seconde prison à Mayotte, sans néanmoins faire d’annonce concrète en ce sens. Il a cependant soutenu, à l’instar du député Kamardine, le projet d’Éric Dupond-Moretti concernant un centre éducatif fermé d’ici la fin de l’année 2024. Ce dernier aura pour objectif le “ réapprentissage de la vie quotidienne, en collectivité, s’appuyant sur la responsabilisation quant à l’acte commis, la prévention des conduites à risques et la sociabilisation pour une meilleure réinsertion ” , selon le communiqué du ministère de la Justice.

familiales

carcérale : 118 ,1% *données trimestrielles d’avril 2019 à octobre 2020. Source : Administration pénitentiaire. PRISONS LA POPULATION CARCÉRALE 80000700006000050000400003000020000100000 2014 2017 2018 2019* 2020* 2021 20222015 2016 52 681 condamnés 19 386 prévenus Juil. 2014 68 295 Juil. 2020 58 621 Avril 2019 71 828 Avril 2017 70 230 UNESCADRONQUATRIÈMEDEGENDARMES MOBILES L’augmentation des effectifs de police et de gendarmerie à Mayotte est l’une des grandes fiertés du camp présidentiel, qui ne cesse d’avancer ses chiffres, à l’image du ministre de l’Intérieur. Quarante agents supplémentaires sont d’ores et déjà présents sur

proximité,

Mayotte,

UNE MEILLEURE COOPÉRATION POLICE-JUSTICE

UN CENTRE ÉDUCATIF FERMÉ EN 2024

Elles sont loin, les images de Gérald Darmanin au cœur des manifestations policières devant l’Assemblée nationale, symboles de la fracture entre police et justice. Les membres du gouvernement font tout pour rabibocher les deux corps, à l’image de ce centre éducatif fermé réclamé à l’unisson. Sur l’île au lagon, la coopération est cependant loin d’être optimale, avec une justice quasiment impuissante face à la jeunesse des délinquants, parfois récidivistes, et le sentiment prégnant des forces de l’ordre d’être inutiles. personnes détenues places Densité le Couplés à une meilleure organisation des groupes de sécurité de ils permettront un meilleur déploiement des unités de police. n’est toutefois pas assez pour les qui ambitionnent une “ reconquête de non-droit Nizary, de l’union départementale associations de qui réclamait le classement du département en d’urgence sécuritaire absolue

territoire.

” . Ni pour Ali

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syndicats,

des

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des zones

16 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 DOSSIER

UN DROIT DU SOL PLUS FERME

Le texte sera présenté dans les toutes prochaines semaines. M. Darmanin souhaite restreindre le droit du sol à Mayotte, comme il l’a déclaré en début de semaine : “ Tant que les deux parents ne sont pas régulièrement sur le territoire mahorais, […] et s’ils n’y sont pas depuis au moins un an, il n’y a aucune chance que leur enfant devienne français ou que les parents soient régularisés ” . Actuellement, un enfant est français si l’un de ses deux parents est à Mayotte depuis plus de trois mois. Si ce texte est adopté par le Parlement, cette durée sera donc de plus d’un an. Une mesure saluée par les uns, inadaptée pour les autres, à l’image de Saïd Omar Oili, qui soulève le problème des enfants “ qui n’auront pas de nationalité ” et dont Mayotte devra s’occuper. La lutte contre l’immigration clandestine (LIC), l’un des chevaux de bataille du ministre de l’Intérieur, pousse ce dernier à “ lutter contre l’attractivité sociale ” de Mayotte. Polémique, cette formule a immédiatement été pondérée lors de sa visite au Centre hospitalier de Mamoudzou, en assurant que tout le monde serait soigné, étrangers sans papiers compris.

5

Pour prouver son action dans les domaines de la sécurité et de l’immigration, Gérald Darmanin a débuté sa visite par des rencontres avec les différents organes de la LIC. Il a notamment promis deux nouveaux radars à terre, et le remplacement de quatre autres. Sur le volet matériel, difficile d’être sceptique : les deux bateaux intercepteurs dont le garde des Sceaux avait parlé en août 2021 sillonnent bel et bien les eaux mahoraises. Les syndicats policiers en réclament cependant un de plus, et plus d’effectifs en mer.

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UN CONTRÔLE DES RECONNAISSANCES DE PATERNITÉ

Lors d’un récent entretien au JDD, Gérald Darmanin a évoqué des “ reconnaissances frauduleuses de paternité ” de la part d’hommes en règle à Mayotte, envers des enfants immigrés des Comores, de Madagascar, ou des côtes d’Afrique de l’est. “ Ces pères doivent prouver qu’ils entretiennent l’enfant pendant trois ans et non plus seulement deux ” , a déclaré l’ancien maire de Tourcoing. La protection de l’enfance, indissociable des biais de l’immigration, a notamment été abordée par Charlotte Caubel durant ces trois jours.

PLUS DE MATÉRIEL POUR LA SURVEILLANCE DES CÔTES

17 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

LA DEÀPROFESSIONNELLEPÊCHEMAYOTTEABESOINRENOUVEAU

18 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 Raïnat AliloiffaDOSSIER

ÉCONOMIE

LE MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DES OUTRE-MER S’EST RENDU SUR LE TERRAIN POUR S’IMPRÉGNER DES CONDITIONS DE TRAVAIL PRÉCAIRES DANS LESQUELLES ÉVOLUENT LES PROFESSIONNELS. C’ÉTAIT ÉGALEMENT L’OCCASION POUR LES PÊCHEURS DE LUI FAIRE PART DE LEURS NOMBREUX PROBLÈMES, QUI PERSISTENT MALGRÉ LES DEMANDES RÉPÉTÉES POUR UNE AMÉLIORATION. JEAN-FRANÇOIS CARENCO A ANNONCÉ QU’À PARTIR DU 1ER JANVIER 2023, IL Y AURA UNE DIRECTION DES AFFAIRES MARITIMES, AUTONOME À MAYOTTE, UNE PETITE VICTOIRE POUR CE CORPS DE MÉTIER.

Pirogues délabrées, brouettes, couteaux… En 2022 les pêcheurs de Mayotte travaillent encore de manière très artisanale et l’heure est au changement pour ces professionnels qui sont confrontés à de multiples problématiques. “ Tous nos problèmes viennent du fait que Mayotte dépend des affaires maritimes de La Réunion. Ce sont les Réunionnais qui nous surveillent et nous sanctionnent ” , se plaint Charif Abdallah, le président de la coopérative de pêche de M’tsapéré et 1er vice-président de la chambre de l’agriculture de la pêche et aquaculture de Mayotte. Et après des années de réclamations, le gouvernement semble avoir saisi l’importance de cette demande puisque le ministre délégué chargé des Outre-mer a annoncé qu’à partir du 1er janvier 2023, le 101ème département aura sa propre direction des affaires maritimes. Une satisfaction pour les pêcheurs qui ne sont pourtant pas dupes. Tous leurs soucis ne disparaîtront pas avec ce changement. D’autant plus qu’ils sont ancrés depuis des années et malgré la succession des différents gouvernements, rien n’a été fait pour les résoudre. Leur principale difficulté est la concurrence. Les petits pêcheurs mahorais se trouvent face à de gros bateaux d’usine appelés des “ thoniers senneurs ” européens basés aux Seychelles. “ Ils sont 25 à être autorisés dans un parc marin, donc que l’on m’explique comment peut-on avoir un parc marin avec 25 thoniers qui ont la possibilité de prendre tout ce qui est à prendre. C’est un gâchis écologique, ils sont responsables de la disparition de la ressource, pas nous ! ” S’indigne Pierre Baubet, le directeur de la Copemay. Ces navires ont une capacité beaucoup plus grande que ceux des Mahorais. On peut compter jusqu’à 8000 tonnes de capacité sur neuf mois. “ Ils rejettent 15% des prises et nous on ramasse les miettes ” , précise Pierre Baubet. Conséquence, les deux tiers des poissons vendus sur l’île sont importés. Le comble pour une île où “ à 300 mètres de la plage, on a du poisson ” , ajoute Charif Abdallah. Le ministre a pris note et a promis d’en parler lors de sa prochaine réunion à Bruxelles au mois de septembre.

LES PÊCHEURS L’ATTENDAIENT DE PIED FERME AU PORT DE PÊCHE DE M’TSAPÉRÉ CE MARDI MATIN.

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INVALIDATION DES ACQUIS, UNE INCOMPRÉHENSION QUI PERDURE

À Mayotte, les pêcheurs professionnels ont dû faire une formation pour pouvoir exercer. Problème, ils sont confrontés à un frein majeur. “ Il s’agit du CAC PP, un diplôme français, mais depuis que nous sommes devenus une région ultrapériphérique on nous dit que ça n’a aucune valeur et ils ne peuvent pas valider leurs acquis ”, dénonce le président de la coopérative de pêche de M’tsapéré. Alors que visiblement, tout le monde ne serait pas logé à la même enseigne, notamment en Guyane. “ Là-bas, les Brésiliens et Haïtiens ont emmené les diplômes de leurs pays et on leur permet de valider les acquis. Cela n’a aucun sens ”, réitère Charif Abdallah. Autant de problèmes qui ne seront pas tous solutionnés par le ministre délégué chargé des Outre-mer. Il l’affirme lui-même, il y a des sujets dont il ne veut pas s’occuper car c’est du ressort des autorités locales. Mais il promet de porter la voix des pêcheurs mahorais. Un discours qui a déjà été tenu par ces prédécesseurs… n VIE CHÈRE : MANSOUR KAMARDINE SOUHAITE UN ENGAGEMENT DE L’ÉTAT

Dans un communiqué, le député de la seconde circonscription de Mayotte a appelé le gouvernement, et plus particulièrement Jean-François Carenco, à une “ co-construction ” d’une loi spécifique à Mayotte concernant notamment l’alignement des prestations sociales. “ Droits et prestations réduits en nombre et montant, SMIC inférieur à 20% au droit commun, pension de retraite moyenne de 270€, dépenses par élève scolarisé moitié moindre que la moyenne nationale et 3 fois moindre en matière de santé, infrastructures collectives sous dimensionnées… ”, énumère M. Kamardine. Ce dernier affirme également qu’il défendra cette idée face à Emmanuel Macron, lors de la réception des élus ultramarins à l’Élysée, le 7 septembre prochain.

LES PIROGUES, ASPECT CULTUREL OU DÉSUET ?

Rares sont les pêcheurs professionnels mahorais qui possèdent des bateaux dignes de ce nom pour aller pêcher en dehors du lagon. Selon les principaux concernés, certains bateaux ont plus de trente ans ; le renouvellement de la flotte est donc nécessaire. Ces embarcations sont souvent des pirogues équipées seulement d’un moteur. Cela ne permet pas aux pêcheurs de travailler en dehors du lagon puisqu’une pirogue est considérée comme un “ engin de plage ” et ne doit pas aller au-delà de 500 mètres des côtes. Le membre du gouvernement a assuré aux professionnels qu’ils vont progresser. “ On va trouver la solution pour que vous ne soyez plus des engins de plage mais des pêcheurs ”, promet-il. Cela étant, cette évolution doit prendre en considération l’aspect culturel que représentent les pirogues. Selon Masséaux Régis, le gérant de l’entreprise Captain Alandor, “ il s’agit d’un outil professionnel pour aller chercher du poisson mais c’est aussi un produit touristique. Comment faire le lagon de Mayotte sans toutes ces pirogues en mer ? Les touristes adorent rencontrer les pêcheurs dans leurs pirogues, ils font des photos avec. Si on les enlève on aura un lagon vide, donc il faut les conserver. ”

20 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 Axel NodinotDOSSIER AVEC PLUS DE 60 000 INSCRIPTIONS À LA RENTRÉE RIEN QUE DANS LE PREMIER DEGRÉ, MAYOTTE DOIT FAIRE FACE À UNE INCESSANTE ET GALOPANTE CROISSANCE DES EFFECTIFS SCOLAIRES. LA VISITE MINISTÉRIELLE DE CETTE SEMAINE, SI ELLE N’A ACCOUCHÉ D’AUCUNE PROPOSITION CONCRÈTE, A AINSI ÉTÉ L’OCCASION D’ÉVOQUER LES BESOINS DE L’ÉDUCATION NATIONALE À MAYOTTE. L’INSÉCURITÉ AUX ABORDS DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES, OMNIPRÉSENTE DEPUIS DES ANNÉES, S’EST ÉVIDEMMENT INVITÉE AUXÉDUCATIONDÉBATS. LES LESAUGMENTENT,ÉLÈVESBESOINSAUSSI

bien que les classes surchargées constituent l’une des principales inquiétudes de la société mahoraise.

21 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

SOUS LES PAVÉS, LA CLASSE

La surpopulation scolaire laisse souvent des jeunes à la marge de la société et qui n’ont d’autres possibilités que de s’adonner à des actes douteux ”, a ajouté quant à elle la fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) de Mayotte lors de la visite ministérielle. Le sujet des agressions, incivilités et autres caillassages, inévitable, suscite en effet de nombreuses requêtes de la part du corps enseignant, des parents d’élèves et des associations. La FCPE a ainsi formulé de nombreuses doléances, parmi lesquelles un

“ Le collège de Ouangani accueille plus de 1000 élèves, comment absorber les masses d’inscriptions des années futures ? ”, s’indigne par exemple la présidente de l’association Espoir des enfants de Ouangani. “ Le collège est passé en rotation, avec des cours les samedis matin. Les parcours individualisés n’existent pas, tellement il manque de moyens humains, et les résultats des 6èmes aux évaluations nationales sont loin d’être satisfaisants ”, continue-t-elle, intarissable sur les écoles fermées et autres enseignants non remplacés sur le territoire de sa commune.

Chaque année, c’est la même chose pour l’académie de Mayotte, véritable Sisyphe de l’éducation. Si son sommet serait la pleine scolarisation, la natalité et l’immigration pèseraient sur son rocher, qui redescendrait la pente à chaque rentrée scolaire. Il suffit de regarder les chiffres communiquées par le réseau de bus Halo’ pour se rendre compte de la masse d’élèves sur l’île. Ce sont en effet 300 cars qui transportent quelque 30 000 jeunes par jour, bien plus que ce que ne peuvent accueillir les écoles, collèges et autres lycées mahorais. C’est par exemple le cas du lycée de polyvalent de Dembéni, situé à Tsararano, prévu pour recevoir 1100 élèves mais en comptant 2300. C’est d’ailleurs ce lycée que Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, et Charlotte Caubel, secrétaire d’État chargée de l’enfance, ont visité durant leur passage à Mayotte, où leur a d’ailleurs été remis un exemplaire de Chab’, le magazine des jeunes. Tout cela en compagnie du recteur Gilles Halbout et de la députée Estelle Youssouffa. “ En métropole, [les étudiants] souffrent souvent d’un isolement et d’un décalage culturel engendrant une souffrance psychique nuisible à leur réussite ”, a regretté cette dernière, déplorant le manque de filières au centre universitaire de Mayotte, lui aussi situé dans la commune de Dembéni. Aucune annonce n’a cependant émané des membres du gouvernement,

Transdev a annoncé que “ la totalité du parc de bus scolaires opérant dans le réseau sera équipé de vidéoprotection ” d’ici le mois de septembre 2022. Cette mesure, prise conjointement par le Conseil départemental, l’État, les opérateurs

- Le 27 février 2012, un jeune de 17 ans est poignardé à mort devant le lycée Bamana de Mamoudzou.

5 LYCÉENS MORTS EN 10 ANS

- Le 4 septembre 2019, un jeune de 19 ans est mortellement blessé sur le parking du lycée de Sada.

- Le 25 février 2022, un jeune de 15 ans est agressé au lycée de Chirongui. Il décède le 10 mars.

- Le 9 avril 2021, un jeune de 17 ans est tué sur le parking du lycée du Nord, à -Mtsangadoua.Le15avril2021, un jeune de 17 ans est tué à son retour du lycée Bamana.

contrôle accru des arrêts de bus aux abords des établissements, ou des points fixes de gendarmes ou de policiers : “ Nous demandons une présence permanente de 05h00 jusqu’à 18h00 devant les établissements suivants : le lycée de Kahani, le lycée Bamana, le lycée de Dzoumogné, le lycée de Chirongui, le lycée de Petite Terre et le collège de Mroalé ”. Les représentants des parents d’élèves veulent aussi un suivi psychologique des élèves touchés directement ou indirectement par des agressions, une accentuation de l’éducation civique et morale, et plus de moyens humains et matériels. Du côté des transporteurs, plusieurs fois en droit de retrait ces derniers mois à la suite de caillassages, on s’adapte aussi à la situation.

22 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 DOSSIER

N’OUBLIEZ PAS LA CARTE DE TRANSPORT !

AU RSMA, MIEUX VAUT PRÉVENIR QUE GUÉRIR Outre la punition, on peut aussi éviter que les jeunes de l’île ne sombrent dans la délinquance. C’est notamment le rôle du régiment du service militaire adapté (RSMA) de Mayotte, qui accueillait mardi un plateau d’invités des plus prestigieux. Thierry Suquet, Mansour Kamardine ou encore Ben Issa Ousseni entouraient ainsi les trois membres du gouvernement. Charlotte Caubel et Gérald Darmanin ont ainsi pu tester le simulateur de conduite d’engins de chantier du RSMA, apprécier les travaux en cours au sein du régiment, ou les réalisations des apprentis soudeurs et menuisiers, fiers d’être présents pour l’occasion. Tout cela accompagnés de Jean-François Carenco, ministre délégué aux Outre-mer, qui est revenu sur le rôle du SMA à Mayotte : “ La vérité, c’est que tout se règle dans le développement : l’activité, la formation. Si vous avez un avenir, vous n’êtes pas délinquant. Et évidemment que le RSMA constitue un socle social de cette île. J’ai confiance. ” En effet, plus de trois quarts des jeunes Mahorais y étant formés trouvent un emploi ou une autre formation à leur sortie. Et ce n’est pas près de s’arrêter, puisque même sans annonces de la part des membres du gouvernement, le plan SMA 2025, annoncé l’année dernière par Sébastien Lecornu, dernier ministre des Outre-mer, est en bonne voie. Pour rappel, ce programme prévoit 7 millions d’euros d’investissements supplémentaires, pour passer de 600 à 1000 jeunes accueillis par an d’ici 2025, et leur proposer toujours plus de formations. “ Le RSMA de Mayotte change des vies, s’est gargarisé le Colonel Guillaume Larabi devant Mme Caubel et MM Darmanin et Carenco. Nos jeunes, parfois sans logement, restaient majoritairement ici pendant la crise Covid parce qu'ils y sont bien, ils sont fiers d’appartenir à une institution qui transforme le regard qu'ils ont sur eux-mêmes. ”

23 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 de transports et les syndicats, devrait permettre de mieux punir les délinquants.

Entre la carotte et le bâton, Mayotte semble donc aller vers le bon équilibre pour sa jeunesse. Reste désormais à mettre les moyens nécessaires pour que ces méthodes puissent être appliquées au plus grand nombre. n

Le réseau de bus Halo’ rappelle que tout élève souhaitant bénéficier du transport scolaire doit faire l’acquisition d’une carte scolaire dans l’un des 4 points de vente suivants : Dembéni – Kawéni – Longoni –Coconi. Des contrôles seront effectués dès le 19 septembre et donneront lieu à une amende de 15€ en cas de défaut de carte.

24 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 Axel NodinotDOSSIER S’ÉMANCIPANT QUELQUE PEU DE SON MINISTRE DE TUTELLE, JEAN-FRANÇOIS CARENCO, MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DES OUTRE-MER, A MENÉ SEUL CERTAINES VISITES. LE PROCHE DE JEAN-LOUIS BORLOO S’EST AINSI ENTHOUSIASMÉ POUR LES INVESTISSEMENTS FUTURS DU SYNDICAT DES EAUX OU LE RÉSEAU DE TRANSPORTS EN COMMUN À VENIR. AMÉNAGEMENT DE L’EAU ET DES CARS POUR MAYOTTE

25 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

UNE PROMESSE D’UN DEMI-MILLION POUR LE SMEAM C’est par exemple le cas de la troisième retenue collinaire, marronnier malheureusement bien connu de la population. “ La balle est dans le camp des autorités locales ” , a déclaré à ce sujet JeanFrançois Carenco, lors de la signature du nouveau contrat de progrès du service public de l’eau potable et des eaux usées de Mayotte. Au total, ce sont 411 millions d’euros que le syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte (SMEAM) ramasse sur la période 2022-2026. Un beau petit pactole qui assurera notamment à ce dernier une remise à flots financière, et des investissements plus conséquents et plus rapides, comme l’a laissé entrevoir Fahardine Ahamada, président du SMEAM : “ les ouvrages des dix prochaines années sont en étude très avancée ” Mais ce nouveau contrat permettra aussi et surtout de proposer aux Mahoraises et aux Mahorais de meilleurs services concernant la production d’eau potable et le traitement des eaux usées. Un impératif dans notre département, où de nombreux foyers n’ont pas accès à l’eau, et dans lequel les coupures sévissent encore tous les ans. Enfin, la somme soulevée par le SMEAM sera vectrice d’emploi et de développement, comme l’a très justement remarqué Jean-François Carenco. Enthousiaste, ce dernier a tout de même quitté l’île au lagon avec une promesse : obtenir 100 millions d’euros supplémentaires pour le syndicat des eaux une fois de retour à Paris. Chiche. n

Outre la lutte contre l’insécurité et l’immigration, il convient pour Mayotte d’avoir d’autres chevaux de bataille pour galoper sur la voie du développement.

Le ministre délégué aux Outre-mer a notamment visité le chantier du Caribus, qui reliera Dembéni à Mamoudzou d’ici 2023-2024, constituant le premier réseau de transports en commun sur route de l’île.

Les autres départements ont mis 120 ans pour avoir un réseau de transport collectif, vous, treize ans ” , a-til lancé. Sans avoir tort, Mayotte peut-elle encore entendre ces paroles, alors que certains “ grands projets ” mettent des années – voire des décennies – à se concrétiser ?

En ce sens, la harde ministérielle a répondu présente, et notamment Jean-François Carenco.

Le Caribus constitue, au même titre que la tant attendue voie de contournement par les hauts de Mamoudzou, un projet essentiel pour fluidifier le trafic sur le territoire de la commune. Dans cette même optique, Jean-François Carenco, accompagné de Rachadi Saindou, président de la Cadema, a d’ailleurs rappelé la nécessité de construire d’autres zones économiques sur le territoire. “ Il faut que le développement de cette île ne soit pas seulement fait sur Mamoudzou, a-t-il lancé. Nous ne pouvons pas tout concentrer ici. ” Le ministre délégué a ensuite félicité la communauté d’agglomérations pour la rapidité des travaux, dont on peut déjà voir l’avancement entre Mtsapéré et Tsoundzou après quelques mois. “

L’ancien préfet de Paris a soutenu la Communauté d’agglomérations Dembéni – Mamoudzou (Cadema), porteuse du projet, après avoir visionné une vidéo montrant ce que sera cette voie de bus, sans oublier la piste cyclable qui l’accompagnera.

“ Nous n’avons pas le droit de faire comme si nous étions satisfaits. J’ai demandé aux associations de faire des propositions claires, nettes et précises.

En effet, le lagon de Mayotte est considéré comme l’un des plus beaux au monde, mais il risque de se dégrader s’il n’est pas plus préservé. C’est le cri d’alerte qu’ont lancé les acteurs environnementaux présents ce jourlà. L’île aux parfums est sujet à de nombreux problèmes environnementaux : braconnage, envasement du lagon, déforestation, pollution des rivières… La liste est longue et peu de solutions pérennes ont été envisagées.

Lors des visites ministérielles, l’environnement est souvent relégué sur le banc de touche, mais pas cette fois. Dès son arrivée à Mayotte ce 21 août, le ministre délégué chargé des Outre-mer s’est rendu à la plage de Moya pour rencontrer certaines associations environnementales, ainsi que les représentants du parc naturel marin et de l’office français de la biodiversité. Un moment qui a permis à Jean-François Carenco de prendre la température et de découvrir les problèmes liés à la biodiversité mahoraise.

La balle n’est pas dans mon camp mais dans la leur et celle des élus locaux ” , rappelle le membre du gouvernement. Il assure que si les problèmes et solutions lui sont remontés, il prendra les décisions requises.

Cela étant, ce travail de protection de l’environnement doit également passer par la sensibilisation des plus jeunes. “ Il faut mettre en place des moyens d’éducation. Il faut que la biodiversité de cet archipel soit enseignée aux enfants pour qu’ils en soient fiers et qu’ils la défendent à tel point que l’on ait plus besoin de policiers, ni d’agents ” , insiste-t-il. Nous en sommes encore loin, et en attendant, il faut envisager d’autres possibilités.

Les photos des tortues et des autres espèces sous-marines l’ont définitivement conquis.

La couleur de la mer, le sable, et la vue imprenable sur le lagon de la plage de Moya en Petite Terre ont séduit Jean-François Carenco.

“ La biodiversité mahoraise est une richesse pour la France ! ” a-t-il lancé avec enthousiasme.

Raïnat Aliloiffa 26 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

FRANCERICHESSEMAHORAISE“CARENCOJEAN-FRANÇOIS:LABIODIVERSITÉESTUNEPOURLA”

Lors des échanges entre le ministre et les associations, celles-ci lui ont fait part de leur manque de personnel pour surveiller les plages et le parc marin. Du monde, c’est ce qu’il faut pour que les membres d’Oulanga na Nyamba et les agents du Conseil départemental puissent assurer une surveillance optimale. “ Notre présence est dissuasive mais nous ne sommes pas assez nombreux pour être sur toutes les plages. Les endroits où nous ne sommes pas, les tortues se font braconner ”, regrette Oriane Bouichet, responsable administrative et financière de la structure qui protège les tortues. Et parfois, certains patrouilleurs se font agresser, alors le président de l’association des maires, Madi Madi Souf, demande à l’État et au Département de “ mettre l’accent pour que ces gardiens soient équipés et en sécurité. ” En ce sens, le pacte de sauvegarde des tortues signé en décembre 2020 entre l’État, le Conseil départemental, les intercommunalités du sud, de Petite-Terre et certaines associations, va être Lerenouvelé.braconnage

Donc on peut se demander si la préfecture n’invite que ceux qui sont contre l’aéroport… chaque problème, sa solution

“ Nous n’avons pas été invités. On ne peut pas venir à Mayotte, parler environnement et ne pas rencontrer une fédération qui a une trentaine d’associations adhérentes et une soixantaine d’associations sympathisantes. Il y a un problème ”, se plaint-il. Il se souvient de la visite d’une délégation sénatoriale il y a quelques mois, venue parler de la gestion des déchets, et là encore, la FMAE n’était pas de la partie. “ La préfecture convie toujours ses amis, au même endroit, avec les mêmes associations, pour parler environnement ”, selon lui. Il dénonce le traitement de faveur accordé à certains. Il estime qu’il s’agit d’un choix politique. “ Par exemple les Naturalistes sont contre l’allongement de la piste longue de l’aéroport alors que la FMAE est favorable.

La FMAE indignée de ne pas avoir rencontré le ministre Ce 21 août 2022, Jean François Carenco n’a rencontré que quelques associations environnementales (Les Naturalistes et Oulanga na Nyamba). Une situation qui a mis en colère Ali Madi, le président de la FMAE.

n’est pas le seul fléau de Mayotte. Le lagon est également menacé par l’envasement que l’on constate à chaque saison de pluie. “ La déforestation et les constructions sauvages dans les lits des rivières sont l’une des raisons. Mais si la terre se déverse dans la mer, c’est aussi à cause des entreprises qui se permettent de faire des pistes sauvages ”, explique Ali Madi, le président de la fédération mahoraise des associations environnementales. Pour lui, la solution est simple, il faut sanctionner ceux qui ne respectent pas les règles. “ L’éducation passe aussi par la sanction. La police et la justice doivent faire leur boulot. Il faut lutter contre les occupations illégales des terrains domaniaux. Que ce soit les mangroves, les rivières, les forêts. Et avoir une justice exemplaire, des sanctions dignes de ce nom envers les personnes physiques ou morales. ” Mais en parallèle, il est nécessaire d’accompagner financièrement les propriétaires puisqu’ “ on ne peut pas demander à quelqu’un de ne pas construire sans rien lui proposer ”, souligne-t-il. Le président de la FMAE préconise aussi une “ vraie ” politique de reforestation sur tout le territoire, ainsi que la protection des rivières en gardant la végétation autour. Reste à savoir si lorsque toutes ces propositions seront remontées, les autorités gouvernementales y donneront suite. n

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LITTÉRATURE LISEZ QUANDMAYOTTE LES BARGEAIENTZÉBUS

Nassur Attoumani n’est pas vraiment à l’initiative de ce livre puisqu’il s’agit pour lui d’écrire un texte qui accompagne les photographies de Franck Hick. La posture de l’écrivain de Mayotte est déjà celle qui se fait jour plus nettement encore dans Mayotte identité bafouée (2003), celle du connaisseur intime de l’île affichée en quatrième de couverture : “ Afin d’aider le lecteur étranger à mieux épouser la culture comorienne de Mayotte, pour la première fois, un autochtone dévoile la véritable face cachée des coutumes de son pays. Ni psychologue, ni anthropologue, ni ethnologue, Nassur Attoumani connaît, cependant, la mentalité maoraise [sic] de l’intérieur. Dans cet essai, l’auteur de La Fille du polygame nous livre Nassur Attoumani, Franck Hick et Gérard Forat, Mayotte, l’île hippocampe,Jacaranda,éditions1993.

UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE. Mayotte

Celuimomentanément.quihabiteMayotte depuis longtemps se souvient alors avec nostalgie qu’avant les voitures officielles et les gens portant costume et cravate, des figures plus humbles, aux vêtements parfois colorés et souvent déchirés, plaçaient dans la barge leur récolte – régimes de bananes et sacs de manioc – au moyen de brouettes. Le deuxième livre publié par l’écrivain francophone Nassur Attoumani s’intitule Mayotte : l’île hippocampe (1993) et dit quelque chose de cette époque : “ Autrefois, la barge autorisait le transfert d’animaux tels les zébus ou autres. Aujourd’hui, outre les nombreux passagers, l’on charge principalement les véhicules (camion – voitures – motocyclettes). Les engins sont garés en ordre serré sur le pont à l’avant tandis que leurs conducteurs prennent place sur les bancs passagers à l’arrière et l’abri des ardeurs du soleil. ” (p. 112)

AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT

C’est avec joie que nous avons répondu favorablement à l’invitation du journal Mayotte Hebdo de continuer notre rubrique littéraire. Pour cette deuxième année, nous continuerons donc à explorer, par séries, des livres de Mayotte, que nous rassemblons par formes ou par thèmes. Nous souscrivons à nouveau à notre double quête, celle du savoir et celle du plaisir. Et nous proposons, sans plus tarder, d’inaugurer cette nouvelle saison avec l’un des objets les plus emblématiques de Mayotte, un moyen de transport maritime : la barge. Qui ne sait, à Mayotte, que les barges sont une flotte de bateaux métalliques bleus et blancs servant à relier la Petite à la Grande Terre - et vice-versa -, toutes les demi-heures, sauf en cas de problème, et parfois de grève de la STM. Au fil des années, la barge grandit et devient amphidrome, bateau de taille plus impressionnante encore, capable de transporter un nombre non négligeable de passagers, de scooters et de voitures sur une île en plein développement. Désormais, lorsque la barge arrive à Dzaoudzi ou Mamoudzou, ce n’est plus seulement l’effervescence, mais un véritable embouteillage qui se créé

Les noms des barges sont en effet révélateurs de la culture (politique) de Mayotte mais ce qui, dans la citation de Nassur Attoumani, retient notre attention est ce qui permet une transition de l’objectif vers le subjectif. En effet, la description mécanique de la barge et son itinéraire géographique laissent alors la place à l’environnement que le moyen de transport permet de savourer. En effet, celui qui prend la barge assiste au lever et/ou au coucher du soleil dans l’hémisphère sud ; il profite des teintes du ciel au-dessus de la terre. Selon les saisons, il peut admirer les dauphins ou croiser une baleine. Rêvant sur l’azur du lagon, il jettera un coup d’œil vers la passe en S au sud ou vers les îlots appelés les Quatre frères au nord. Mais la traversée n’est pas un moment de solitude romantique ; c’est plutôt un moment social et convivial permettant de discuter avec un cercle d’amis habituels ou un voisin nouveau. Tout le monde se croise dans la barge et échange sur des sujets futiles ou importants, le temps d’une traversée, comme si la barge permettait un sas. C’est sans doute pour l’ensemble de ces raisons, et bien d’autres encore, que la barge est, à Mayotte, l’expérience de tous et, pour les écrivains, un lieu commun simplement évoqué ou plus longuement développé.

Mais le discours de Nassur Attoumani n’est pas, à ce stade, polémique, mais consensuel voire touristique. L’auteur noue, avec les images du photographe, un dialogue interculturel entre Mayotte et la Métropole. Après un abrégé de l’histoire de l’île aux parfums, le livre progresse par thèmes : la côte puis l’intérieur de l’île, les bangas et l’habitat, la population et la capitale et enfin Mayotte vue d’avion. C’est logiquement dans la partie sur Mamoudzou que la barge est évoquée. Mais Nassur Attoumani, au lieu de décrire les clichés de Franck Hick, préfère rappeler l’importance du moyen de transport emblématique : “ La barge est un trait d’union entre les deux terres. Jusqu’en 1975, pinasses, barques, boutres à voiles ou pirogues ont tour à tour contribué à transporter la population entre les deux îles. Voie incontournable pour tous les habitants de l’île, de 5 heures à 2 heures 30, la barge relie constamment Dzaoudzi à Mamoudzou. C’est le “ car-ferry ” de la Mer du Nord, made in Mayotte. Durant les quinze minutes de la traversée, le passager est plongé dans une micro-société multiraciale sympathique où la conversation est agréable et l’ambiance bon enfant. Pour la maintenance des barges, une cale sèche visible du boulevard des Crabes (la route reliant l’îlot de Dzaoudzi à celui de Pamandzi) est construite à proximité de la subdivision de l’Équipement à Foungoujou. Au temps de la splendeur de Dzaoudzi, alors capitale des Comores, une seule pinasse assurait la liaison quotidienne entre les deux terres de 6 h. à 17 h. 30. Aujourd’hui, les barges ont pour noms “ La Mahorais ” ou la ‘Salama Djéma’ (bon voyage). ” (p. 112-113)

29 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22 un témoignage inédit sur la richesse culturelle d’un peuple en pleine mutation socioculturelle. ”

Christophe Cosker

JournéeRégionalFOOTBALLRégionalFOOTBALLCalendriersSPORT-classements-résultats1211 Bandrélé FC 0–2 Jumeaux de Mzouazia ASC Abeilles de Mtsamboro 0–0 Diables noirs de TchangaCombaniSC 0–0 ASC Kawéni AS Rosador de Passamainty 0–0 USCP Anteou AJ Kani Kéli 1–1 FC Mtsapéré AS Bandraboua – AS Sada Journée 12 – Samedi 17 septembre à 15 heures AS Rosador de Passamainty – Diables noirs de ASCombaniSada– USCP Anteou AS Bandraboua – AJ Kani Kéli ASC Abeilles – Jumeaux de Mzouazia Bandrélé FC – ASC Kawéni Tchanga SC – FC Mtsapéré Journée 11 AS Neige de Malamani 2–1 FC Kani Bé US Kavani 3–1 AJ Mtsahara Foudre 2000 1–2 Olympique Miréréni USCJ Koungou 0–0 FC Chiconi ASJ Moinatrindri 0–2 FC Dembéni FC Majicavo 2–2 UCS de Sada Journée 12 – Samedi 17 septembre à 15 heures FC Majicavo – AS Neige de Malamani UCS de Sada – AJ Mtsahara US Kavani – FC Chiconi Foudre 2000 – FC Kani Bé ASJ Moinatrindri – Olympique Miréréni USCJ Koungou – FC Dembéni Equipe Pts J G N P Dif 1 FC Mtsapéré 26 11 8 2 1 +17 2 ASC Kawéni 25 11 8 1 2 +12 3 Jumeaux Mzouaziade 23 11 7 2 2 +13 4 AJ Kani Kéli 20 11 6 2 3 +3 5 Diables noirs de Combani 16 10 4 4 2 +2 6 AS Bandraboua 11 10 2 3 5 -11 7 ASC Abeilles de Mtsamboro 11 11 3 2 6 -12 8 AS Rosador Passamaintyde 10 11 3 1 7 -3 9 Bandrélé FC 10 10 3 1 6 -6 10 Tchanga SC 10 11 2 4 5 -4 11 USCP Anteou 9 11 2 3 6 -4 12 AS Sada 9 10 3 0 7 -7 Equipe Pts J G N P Dif 1 US Kavani 21 11 6 3 2 +7 2 Foudre 2000 20 11 6 2 3 +4 3 AS Neige Malamanide 19 11 5 4 2 +6 4 FC Majicavo 19 11 5 4 2 +7 5 FC Dembéni 17 11 4 5 2 +2 6 AJ Mtsahara 16 5 1 5 2 +2 7 UCS de Sada 15 11 4 3 4 -4 8 FC Chiconi 15 11 3 4 3 0 9 MiréréniOlympique 13 11 3 4 4 -4 10 USCJ Koungou 12 11 3 3 5 -7 11 FC Kani Bé 8 11 2 2 7 -8 12 MoinatrindriASJ 6 11 2 0 9 -5 30 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

JournéeRégionalFOOTBALL1féminines10 Olympique de Sada 0–5 AS Jumelles de EntenteMzouaziaMiréréni / Tsingoni 2–1 ASO Espoir ASJChiconiHandréma 1–1 Club Unicornis USC Labattoir – Wahadi ASC Devils Pamandzi 2–2 FC Mtsapéré Exemptées : US Kavani Journée 11 – Dimanche 28 août à 15h30 ASO Espoir Chiconi – ASJ Handréma Club Unicornis – Devils Pamandzi AS Jumelles de Mzouazia – US Kavani FC Mtsapéré – USC Labattoir Wahadi ASC – Olympique de Sada Exemptées : Entente Miréréni / Tsingoni Equipe Pts J G N P Dif 1 AS Jumelles de Mzouazia 27 9 9 0 0 +38 2 Club Unicornis 19 8 6 1 1 +18 3 FC Mtsapéré 19 8 6 1 1 +16 4 Wahadi ASC 15 8 5 0 3 +3 5 PamandziDevils 15 9 4 3 2 +4 6 ASJ Handréma 11 9 3 2 4 -15 7 MiréréniEntente / Tsingoni 11 10 3 2 5 -6 8 USC Labattoir 10 8 3 1 4 -10 9 Olympique de Sada 8 9 2 2 5 -8 10 ASO Espoir de Chiconi 3 9 1 0 8 -12 11 US Kavani 0 9 0 0 9 -28 31 • Mayotte Hebdo • N°1008 • 26/08/20 22

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