BasketNews 575

Page 14

14

FRÉDÉRIC BOLOTNY (ÉCONOMISTE DU SPORT)

« IL EST TEMPS DE RÉAGIR » Il est l’économiste du sport de référence, souvent sollicité par les médias, notamment pour le football. Mais par éducation et formation, Frédéric Bolotny reste avant tout un passionné de basket. Et comme tous les vrais amoureux, ses déclarations sont sans concession. Propos recueillis par Pascal LEGENDRE, à Limoges

V

ous êtes arrivé à la ligue, ou plutôt au GIE Basket Pro en 1993, lorsqu’elle était au sommet de la

courbe ?

On avait l’ensemble des cartes en mains. Il a fallu attendre 18 ans pour se retrouver aujourd’hui dans une situation similaire, donc autant de retard pris dans le développement économique et la compétitivité sportive. À cette époque on avait l’impression de pouvoir rêver, on a peut-être trop rêvé d’ailleurs. C’était la Dream Team de Barcelone, les 800.000 licenciés de l’an 2000, le basket des playgrounds, tout un buzz, mais on n’avait pas encore réalisé qu’il n’y avait pas de sport avec une telle dualité entre un championnat, la NBA, et le reste du monde. On pensait que la médiatisation de la NBA allait permettre au basket de se développer de façon incroyable, d’être le sport de l’an 2000. Et si je compare au rugby, on se l’est joué facile. Quand il a décidé de devenir professionnel, quelques années plus tard, le rugby n’avait pas le choix. Quand tu as 35 bouches à nourrir, que tu ne peux jouer qu’une fois par semaine, et que tu veux petit à petit supprimer les situations de pluriactivités qui sont complexes, il faut que tu sois bon. Le rugby est parti de 2M€ de budget moyen dans la deuxième moitié des années 90. Je travaillais à Castres à cette époque et j’avais

été stupéfait de constater qu’il y avait 100 bulletins de salaire, 35 pour l’équipe première, autant pour les espoirs qui n’étaient pas forcément des gamins, et tout le monde autour. Vous avez connu la lente descente aux enfers médiatiques, le décrochage avec France Télévisions, qui correspond à l’année 1996. Vous avez d’ailleurs fait une étude là-dessus ?

Le fait que le basket ne soit plus sur France Télévisions était inéluctable. Si ça n’avait pas été à ce moment-là, c’était deux ou trois ans plus tard. Sinon peut-être aujourd’hui avec la TNT, France 4, il n’y a plus de modèles pour offrir une fenêtre hebdomadaire en clair à un sport comme le basket. La mauvaise décision n’a pas été d’aller sur Canal, c’est de ne pas avoir tout fait pour offrir le meilleur programme qui soit ; il y avait des clubs, notamment les gros, qui ne voulaient pas jouer à 14h car ils perdaient de la billetterie et ce n’était pas super, disaient-ils, pour les sponsors. Il aurait fallu, je pense, réfléchir à une péréquation différente. C’est un problème de stratégie, on a l’impression que la ligue a tout fait par à-coups. Il faut une économie solidaire pour se développer à moyen et long terme. C’est un problème de gouvernance qui se pose à toutes les ligues professionnelles. C’est un peu la


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.