La Plume des Avocats Parisiens

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(c)GREGOS

#1 JANVIER - MARS 2014 L ’ AV O C AT D A N S L A C I T É ~ D U P R O B L È M E P O L I T I Q U E ET J U R I D I Q U E D E L A L ÉG A L I T É D E S ÉCO U T E S D I T E S F O RT U I T E S ~ J O U R N É E I N T E R N AT I O N A L E D E L A F E M M E ~ C N A ’ RT ~ L ’ AV O C AT LO B BY I ST E ~ J E A N - LO U I S A U B E RT C H A N T E H O U E L L E B EC Q « L E S PA R A G E S D U V I D E »


Directrice de la publication ANNE-KATEL MARTINEAU, PRÉSIDENTE DE LA CNA - PARIS Directeur de la rédaction BERTRAND PAVLIK Rédacteur en chef PHILIPPE GIRARD-FOLEY Rédacteur en chef adjoint JULIEN BOUTIRON Membres du comité de rédaction Serge BAKOA Marie-Claude EDJANG Christian-Claude GUILLOT Thibault HALMENSCHLAGER Vincent LEJEUNE Michel PASOTTI Heidi RANÇON - CAVENEL Dimitri SONIER Ont participé à de numéro Luis Alberto GIMENEZ Betty NADJARIAN Clémence PHILIPPE Jacqueline SOCQUET-CLERC LAFONT Tum THACH

Editeur Association La Plume et la Voix des Avocats Parisiens La Maison des associations du 6ème arrondissement 60-62, rue Saint-André des Arts 75006 PARIS Imprimeur FORTIN LE PROGRES 33, rue Médéric 92582 CLICHY Cedex Tél : 01 41 06 89 38 - Fax : 01 41 06 18 35 votrecontact@fortinleprogres.fr En partenariat avec la section parisienne de la Confédération Nationale des Avocats (CNA - PARIS) Adresse de correspondance : Anne-Katel MARTINEAU, Présidente de la CNA - PARIS Avocat à la Cour 49, rue de Richelieu 75001 PARIS Pour contacter la rédaction et proposer vos articles, nous informer de vos actualités, d’événements organisés par les avocats et / ou pour les avocats, vous pouvez adresser un courriel à : contact@laplumedesavocatsparisiens.org Pour participer à l’émission de radio La Voix des Avocats Parisiens, vous pouvez contacter l’association La Plume et la Voix des Avocats Parisiens par courriel à : contact@laplumeetlavoixdesavocatsparisiens.org

Remerciements à la section parisienne de la CNA qui a soutenu ce projet « La Plume et la Voix des Avocats Parisiens » lors du vote de l’Assemblée Générale Ordinaire du 26 mars 2014. à nos fans de la première heure : Jean-Louis AUBERT pour son enthousiasme lors du lancement de notre magazine. GREGOS qui a photographié une de ses œuvres, en couverture, réalisée pour la journée internationale de la femme dans le 11ème arrondissement de Paris, rue des blancs manteaux. Arya PHOUANGSAVATH pour sa créativité dans le graphisme du magazine et la réalisation de la couverture. FORTIN LE PROGRESS pour la réalisation de la version papier du magazine.

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Le prochain numéro paraîtra mardi 8 juillet 2014 - La Plume des Avocats Parisiens est diffusé en version numérique et en version papier. www.laplumeetlavoixdesavocatsparisiens.org


SOMMAIRE 4 5

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ÉDITORIAL POLITIQUE L’AVOCAT DANS LA CITÉ

ACTUALITÉ DROIT PENAL DU PROBLÈME POLITIQUE ET JURIDIQUE DE LA LÉGALITÉ DES ÉCOUTES DITES FORTUITES

RETOUR SUR UN ÉVÉNEMENT DE LA CNA - PARIS 2013 COMPTE-RENDU DE LA CONFÉRENCE ORGANISÉE PAR LA CNA - PARIS SUR L’AVOCAT LOBBYISTE

ÉVÉNEMENTS DU PREMIER TRIMESTRE 2014

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CAMPUS ASIE 2014 - CAMBODGE

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JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME 8 MARS 2014 ENTRETIEN AVEC JACQUELINE SOCQUET-CLERC LAFONT : UNE FEMME ADMIRABLE !

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LES PROJETS DU BARREAU DE PARIS LES ASSISES DE LA fiSCALITÉ : QUELS ENJEUX POUR LES AVOCATS ?

EUROPE & INTERNATIONAL

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PATAGONIE QUELQUES MOTS POUR PERCER LES MYSTÈRES DE LA PATAGONIE INTERVIEW D’UN JUGE FÉDÉRAL, LUIS ALBERTO GIMENEZ

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CAMBODGE - SIEM REAP CONFÉRENCE « PEOPLE ARTS TECHNOLOGIES » 2014

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LES ÉLÈVES - AVOCATS QUELQUES QUESTIONS À UNE ÉLÈVE-AVOCATE, AYANT REJOINT LA CNA

CULTURE LA VOIX DES AVOCATS PARISIENS PROGRAMME DE LA WEBRADIO DTC

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MUSIQUE JEAN-LOUIS AUBERT CHANTE HOUELLEBECQ « LES PARAGES DU VIDE »

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ART CONTEMPORAIN CNA’RT DEUXIÈME ÉDITION À LA MAISON DU BARREAU

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LIVRES 59 SECONDES POUR PRENDRE LES BONNES DÉCISIONS DE RICHARD WISEMAN

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SCI, POURQUOI ? QUAND ? COMMENT ? DE FABRICE DE LONGEVIALLE

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LES IMAGES QUI ONT FAIT SCANDALE DE EMMANUEL PIERRAT, MCO

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ÉDITO

Le numéro que vous avez sous les yeux est né d’un désir d’avocats et d’une passion pour notre profession. Passion qui nous pousse à la défendre, à rejoindre un syndicat, la Confédération Nationale des Avocats. Passion qui nous amène à vouloir améliorer son image, mise à mal trop fréquemment, et donc à lui donner une meilleure visibilité auprès du grand public. Désir qui nous fait reprendre le flambeau d’un magazine, « les Avocats à Paris », créé à l’initiative de Bertrand Hohl à qui je souhaite rendre hommage. L’écho de ce nouveau magazine sera celui d’une radio, pour lancer la Plume et la Voix des Avocats Parisiens. Vous m’avez encouragée et soutenue à poursuivre et concrétiser ce projet en venant travailler à mes côtés, en m’apportant votre énergie, vos compétences, votre enthousiasme et même jusqu’à votre bienveillance. Je tiens à remercier particulièrement Geneviève Augendre, Jacqueline Socquet-Clerc Lafont, Vincent Lejeune, Guillaume Le Foyer de Costil, et Bertrand Pavlik. Je ne peux pas tous vous citer mais vous vous reconnaîtrez si vous faites partie de ceux qui veulent que la Confédération Nationale des Avocats rayonne au XXIème, et pour bien longtemps encore, sans avoir peur des changements et de la nouveauté. « La Plume des Avocats Parisiens » sera votre magazine, au service des avocats qui voudront bien mettre en avant leur savoir-faire, leur expertise, leurs actions, leurs rencontres pour que notre image soit mieux perçue, et portée dans le monde, encore et toujours. La CNA et sa section parisienne, dans la lignée des actions du Barreau de Paris, ont toujours œuvré pour redonner à notre droit civiliste, né en France d’une tradition romano - germanique, le rayonnement international qu’ il mérite. «La Plume des Avocats Parisiens» sera aussi celui des avocats friands de culture, de littérature, de peinture, de musique, après tout, ne sommes-nous pas tous des artistes... ceux du droit ? La Voix des Avocats Parisiens sera celle de chacun de ceux qui voudront participer à promouvoir la place de l’ avocat dans la Cité. Chaque mois, l’émission sera organisée pour que la voix des avocats retentisse sur les ondes et sur Internet avec celle de femmes et d’hommes politiques, d’économistes, d’écrivains et de philosophes pour qu’ils apportent leur éclairage à nos côtés. La Plume et la Voix des Avocats Parisiens, c’est avec vous et pour vous !

(c)Studio Saint-Honoré

Alors rejoignez-nous et faites que bientôt, nous puissions écrire « Nous partîmes 500 mais par un prompt renfort, nous nous vîmes 3000 en arrivant au port. » !

Anne-Katel MARTINEAU Présidente de la CNA - PARIS

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Longtemps, les pouvoirs publics ont cru qu’ils allaient pouvoir endormir de bonne heure les avocats à coups de promesses et de réformes qui n’ont jamais été tenues. Bien au contraire, nous avons dû supporter, il y a un an des accusations du type les avocats d’affaires sont des voyous, et, aujourd’hui, nous apprenons que, non seulement, un de nos Confrères a été mis sur écoute dans le cadre de conversations qu’il aurait eues avec un des ses clients !!! Mais, ne reculant devant rien, nous sommes informés par notre Bâtonnier, Pierre-Olivier SUR, dont je salue la pugnacité, que notre Ordre risque une perquisition pour déterminer si notre ancien Bâtonnier n’aurait pas informé un Confrère qu’il était mis sur écoute ??? Tout cela vient s’ajouter à notre départ programmé du Palais de Justice situé depuis toujours sur l’Ile de la Cité, c’est-à-dire au centre de la cité, pour nous excentrer et nous exiler quasiment en périphérie de Paris. On m’a toujours dit qu’il fallait anticiper en Droit mais, franchement, anticiper le Grand Paris en nous exilant dans un quartier, pas désagréable - mais là n’est pas le problème – pour combler le vide laissé par tous les terrains abandonnés par ces Jeux Olympiques de 2012 que nous avons perdus !!! J’ai toujours pensé que du Droit « Ordo ab Chaos » mais jamais que nous ne pourrions servir de bouche-trous !!! En effet, quand j’ai voulu devenir avocat, j’avais une très haute opinion de cette profession - je vous rassure, je l’aie toujours - non pas par prétention, mais pour tout ce qu’elle impliquait ! Pour moi, que ce soit lors de mes études de Droit à l’Université ou à l’EFB, rue de Charenton, lors des cours de déontologie, ou, enfin, à la lecture du « Damien », il me semblait que le rôle de l’avocat dans la Cité était de participer à la paix sociale en étant au service de l’apaisement des tensions. Il me semblait également que l’avocat était le défenseur des libertés et, souvent, le dernier rempart, voire le dernier recours contre l’ injustice !!!

POLITIQUE

L’ AVOCAT DANS LA CITÉ

D’ailleurs, étant très souvent jury au Grand oral de l’examen d’entrée à l’ EFB pour l’Institut d’Etudes Judiciaires de l’Université de Paris I, je suis conforté puisque le programme porte sur les droits et libertés fondamentaux. On y apprend, notamment, en application de la Convention de l’Article 6-1 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, dite Convention Européenne des Droits de l’Homme (Oui – je l’avoue, j’en ai marre d’entendre ce barbarisme « CEDH » !) que l’accès à la justice doit être garanti, que le procès doit être équitable, que l’égalité des armes doit être respectée et que c’est la procédure qui est garante des droits du justiciable !!! Si je ne me trompe pas, cela signifie que l’un des « organes » qui permet « tout cela » eh bien… c’est l’ avocat ! Or, les derniers événements semblent démontrer que les pouvoirs publics malmènent quelque peu cet « organe » ! Comment interpréter autrement tous ces actes nous concernant, quand on constate que la justice, élément essentiel de la paix sociale, vertu cardinale également, est obligée de quitter l’axis mundi d’une Cité comme Paris pour nous décentrer en quasi périphérie de Paris ? Quel symbole ! Pascal estimait que le centre était partout et la circonférence nulle part ! Demain, exilés, nous serons en circonférence et donc nulle part !!! Cet exil reflète bien l’opinion que les différentes sphères du pouvoir ont des empêcheurs de tourner en rond que nous sommes ! Cela vient se greffer également à toutes les différentes atteintes que nous subissons dans l’exercice de la défense des droits de ceux qui sont des justiciables avant d’être des clients ! Dois-je rappeler l’enfer que constitue l’accès aux centres de rétention des étrangers ? Toutes ces constatations m’amènent donc à me poser cette question : aujourd’hui, quel est le rôle de l’avocat dans la Cité ? Nous aurons l’occasion d’en débattre lors de la première émission de radio réalisée par des avocats « La Voix des Avocats Parisiens », que la section parisienne de la CNA va lancer le 16 mai prochain.

Je vous rassure, je le pense toujours ! 5


Je ferai donc pour l’instant une réponse toute simple: il reste le même et il n’a pas changé ! En revanche, ce qui a changé, ce sont les moyens de toutes sortes dont nous disposons pour l’exercer au service du justiciable mais aussi notre image.

C’est pour cette raison qu’il faut saluer la remarquable initiative du Barreau de Paris qu’est « L’avocat dans la Cité » !

Notre image ?

De plus, si le Juge est le garant de nos libertés, nous sommes celui qui permet au Juge de pouvoir exercer cette garantie en le saisissant.

Un exemple simple pour l’illustrer et qui constituera une réponse à ceux, notamment un Ministre, qui accusent les avocats, notamment d’affaires, qui ne pensent qu’à faire de l’argent ! Nous sommes tous sollicités tous les jours pour des conseils gratuits. Je le suis. En plus, étant élu à la Mairie de Paris, en qualité de conseiller du 6ème arrondissement, on me demande des conseils lors de mes permanences d’élu. Je donne, bien volontiers ces conseils, parfois, eut égard à l’enjeu ou à la nature du problème qui m’est posé, en recommandant à la personne de saisir un confrère. Souvent, on me demande combien on me doit. Je réponds « rien ». En réplique, je reçois « Comment ? Les avocats, vous ne pensez pas qu’à l’argent ?» ou bien « Merci, vous êtes sympa pour un avocat ! ». Toutes ces personnes ont du mal à penser que nous laissons les métaux à la porte du Palais de Justice ou de notre cabinet ! Elles ne savent pas que nous sommes des auxiliaires de justice sensibles aux intérêts des justiciables, aveuglés par certains propos sur notre soif de l’or ou, encore, par certaines séries télévisées, dans lesquelles nous ne penserions qu’au stupre ou au lucre ! Les pouvoirs publics devraient s’en souvenir ! Ils ne devraient pas oublier également que nous sommes garants d’une certaine autorité puisque nous sommes le premier gardien de la Loi en la représentant auprès du justiciable. Ainsi, en tant qu’ avocat, nous pouvons prévenir d’éventuels délits en conseillant utilement nos clients ! L’avocat est également indispensable pour s’assurer que les droits des justiciables seront respectés et quoi de plus apaisant pour des justiciables d’être certains que leurs droits seront respectés ?

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C’est également pour cela qu’il faut se battre pour préserver l’aide juridictionnelle, voire l’améliorer !

C’est pourquoi, la relation entre le Juge et l’avocat est importante et vitale. Elle doit se faire dans un respect et une confiance mutuels ! Le Juge, qui a une fonction difficile, trancher, doit continuer à nous voir comme un auxiliaire de justice qui lui demande de rendre justice, en l’éclairant, en rétablissant – en quelque sorte - un équilibre social rompu par un délit, un quasi-délit ou une « difficulté » d’ordre contractuel ! Cela signifie que le combat pour la Justice est commun à l’avocat et au Juge ! Ils doivent s’assurer que la justice est rendue dans de bonnes conditions. Cela a été le cas à Paris, par exemple, avec l’instauration de e-barreau, où il y a eu une réelle coopération entre les magistrats et les avocats, notamment pour corriger les quelques erreurs matérielles résultant de la mise en place de ce système informatique. Tout cela montre bien qu’il existe une volonté commune d’aboutir à une bonne justice au service du justiciable ! Alors de quoi se plaignent les avocats ? Bien sûr, nous ne sommes pas dans un pays totalitaire, du moins peu respectueux des droits de la Défense ! Nous restons quand même privilégiés en France. Mais – il y a toujours un mais – le sentiment existe que les droits de la défense sont, petits à petits, rognés, sous couvert d’anti-terrorisme, de luttes contre l’exil fiscal, contre le trafic de stupéfiants, etc … , que ce soit par différents textes ou que ce soit, par de simples moyens physiques qui rendent difficiles nos conditions de travail (Palais de Justice excentré, écoutes téléphoniques trop « faciles », accès direct aux ordinateurs sous couvert d’antiterrorisme, difficultés d’accès aux justiciables, loi sur les lanceurs d’alerte, etc … ).


POLITIQUE

Nous devons donc restés vigilants, même dans un pays démocratique, comme nous le rappelle chacun des rapports annuels d’Amnesty International, à ce que l’Etat de droit ne recule pas ! Là est le rôle de l’avocat dans la Cité : s’assurer que la paix de la cité est maintenue ! Cela implique que d’une justice quasiment sacerdotale, notre beau métier ne devienne pas un sacerdoce du fait de la multiplication d’entraves pour nous permettre de l’exercer en toute plénitude ! L’avocat doit rester libre dans une cité de femmes et d’hommes libres !

(c)D.R

C’est pourquoi, j’ai adhéré à la C.N.A, pour être un Confrère Non Asservi !

Bertrand PAVLIK Secrétaire Général de la CNA - PARIS

(C) A-K Martineau

Nous félicitons Bertrand Pavlik pour sa réélection au siège de conseiller d’arrondissement à la Mairie du 6ème arrondissement de Paris. Le 23 mars 2014, la liste d’Union UMP-UDIMODEM dont Bertrand PAVLIK faisait partie a remporté 52,61% des suffrages exprimés.

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DU PROBLÈME POLITIQUE ET JURIDIQUE DE LA LÉGALITÉ DES ÉCOUTES DITES FORTUITES Le contexte de l’affaire Depuis plus d’une semaine, c’est l’émoi et la révolte pour certains grands avocats pénalistes de la Place. Un de nos éminents confrères pénalistes Thierry Herzog, conseil de l’ancien Président de la République Nicolas Sarkozy, est présumé suspect de participation à une infraction pénale, suspicion qui viendrait des «écoutes par ricochet ou des interceptions fortuites», dont il aurait été l’objet. En effet, émoi et révolte relayée par le Bâtonnier de Paris depuis que Maître Thierry Herzog a subi, le 5 mars dernier, des perquisitions et s’est vu saisir ses téléphones portables, en raison même de ces écoutes «indirectes». D’après les informations données par la presse, ces perquisitions interviendraient dans le cadre d’une information ouverte le 26 février 2014 par le nouveau procureur financier Eliane Houlette, pour des faits «de violation du secret de l’instruction, trafic d’influence passif, complicité et recel ». Un Haut Magistrat, Monsieur Gilbert Azibert, a aussi fait l’objet de perquisitions du fait d’être soupçonné pour avoir aidé Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog dans la perspective de l’audience du 11 mars dernier de la Cour de cassation, qui devait valider ou non la saisie des agendas de l’ancien Président dans l’affaire Bettencourt. En échange de ces faveurs, Gilbert Azibert aurait fait part à Maître Herzog de son souhait d’être nommé au Conseil d’Etat de Monaco. Nicolas Sarkozy lui aurait alors assuré qu’il l’aiderait dans ce projet, en rétribution de « ce que tu fais »… Nous ne détaillerons pas plus cette affaire qui, nous le rappelons, reste couverte par le secret de l’instruction. Le cœur de la problématique qui nous intéressera dans le présent article est que l’instruction ouverte à l’encontre de notre Confrère l’aurait été à la suite de la suspicion provoquée par des «écoutes fortuites» de ses conversations téléphoniques avec son client Nicolas Sarkozy.

D’après les informations données par les médias, Nicolas Sarkozy serait en effet placé sur écoute depuis plus d’un an dans le cadre de l’affaire du financement de sa campagne présidentielle, les conversations avec son avocat n’auraient été interceptées que « par ricochet », la cible principale des écoutes étant et restant l’ancien Président. Mais de quoi parle-t-on lorsque l’on parle «d’écoutes par ricochet ou d’écoutes fortuites» ? Est-ce un jeu de langage des journalistes ? Ou, existe-t-il un régime juridique de ces écoutes indirectes ? S’il existe un tel régime, est-il satisfaisant pour veiller à la parfaite protection de la confidentialité des échanges entre avocats et clients ? Telles sont les questions ouvertes par cette affaire, et auxquelles tentera de répondre cet article.

Le régime légal des écoutes indirectes des avocats : l’absence de disposition légale relative à l’interdiction des écoutes par ricochet. Que nous disent les textes sur cette situation exceptionnelle ? Malheureusement rien ; ou pas grand-chose. En effet, les dispositions du Code de procédure pénale qui traitent « Des interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications », sont les seuls articles 100 à 100-71. Seulement sept courts articles pour s’assurer de la protection du secret et deux articles seulement qui sont essentiels et malheureusement, comme on le verra, insuffisants. En effet, l’article 100 prévoit la possibilité de l’interception des communications dans le cadre de la poursuite d’infractions dont la peine est égale ou supérieure à deux ans d’emprisonnement : « En matière criminelle et en matière correctionnelle, si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d’emprisonnement, le juge d’instruction peut, lorsque les nécessités de l’information l’exigent, prescrire l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications. Ces opérations sont effectuées sous son autorité et son contrôle. La décision d’interception est écrite. Elle n’a pas de caractère juridictionnel et n’est susceptible d’aucun recours ». 1- Issues de la loi n°91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des télécommunications.

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« Le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire commis par lui transcrit la correspondance utile à la manifestation de la vérité. Il en est dressé procès-verbal. Cette transcription est versée au dossier.

Les correspondances en langue étrangère sont transcrites en français avec l’assistance d’un interprète requis à cette fin. A peine de nullité, ne peuvent être transcrites les correspondances avec un avocat relevant de l’exercice des droits de la défense. A peine de nullité, ne peuvent être transcrites les correspondances avec un journaliste permettant d’identifier une source en violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ». Et enfin l’article 100-7 vise la formalité, sous peine de nullité, du placement sous écoute d’un avocat : « (…) Aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d’un avocat ou de son domicile sans que le bâtonnier en soit informé par le juge d’instruction.

(…) Les formalités prévues par le présent article sont prescrites à peine de nullité ». En conséquence, la lecture du Code de procédure pénale permet de constater qu’aucune disposition légale n’empêche l’écoute indirecte, par ricochet ou fortuite d’un avocat dont un de ses clients serait placé sous écoute. Sans autre formalité d’autorisation préalable quelconque. A l’heure actuelle, les écoutes par ricochet, c’est-à-dire de facto et en réalité les écoutes des confidences d’un client à son avocat, comme on va le voir, peuvent faire l’objet d’écoutes et de retranscriptions dans certaines circonstances précisées et « encadrées » par la seule jurisprudence.

La jurisprudence a, tout d’abord, posé une interdiction de principe de l’écoute des confidences des avocats avec leurs clients. Pour veiller néanmoins au respect du principe de la libre défense, de la confidentialité des échanges et au respect des droits de la Défense, la Cour de cassation a toujours considéré comme nulle une commission rogatoire prescrivant l’écoute téléphonique, professionnelle et personnelle de l’avocat de la personne mise en examen.2 Cependant, par une interprétation stricte du principe de la confidentialité, la Cour de Cassation a pu admettre que le principe de la liberté de communication entre la personne mise en examen et son avocat ne faisait pas obstacle à ce qu’un juge d’instruction, ayant placé sous écoutes la ligne téléphonique d’un proche de la personne mise en examen, intercepte les communications de ce proche avec l’avocat de la personne poursuivie. 3

ACTUALITÉ DROIT PÉNAL

L’article 100-5 précise la protection « relative » de la confidentialité :

C’est un arrêt du 15 janvier 1997 qui a ouvert une exception à l’écoute, en précisant que l’écoute d’un avocat est possible s’il existe contre l’avocat des indices de participation à une infraction pénale, il peut être justifié à titre exceptionnel une dérogation au principe de la confidentialité des correspondances téléphoniques : « Il ne peut être dérogé au principe de la confidentialité des correspondances téléphoniques de l’avocat désigné par la personne mise en examen qu’à titre exceptionnel, s’il existe contre l’avocat des indices de participation à une infraction. En l’espèce, c’est à tort que la chambre d’accusation a refusé d’annuler les écoutes litigieuses au motif que l’avocat avait participé à un déjeuner réunissant avec la personne mise en examen plusieurs fournisseurs habituels de voitures volées. Ces seuls motifs n’établissent pas que le juge d’instruction ait été, à la date où il a prescrit l’interception, en possession d’indices de participation de l’avocat à une activité délictueuse ». 4 La possibilité de l’écoute est ouverte, et la question de la transcription de l’écoute devient alors un enjeu.

La question de la régularité de la L’écoute possible des échanges transcription des échanges qui présument une participation La jurisprudence pose le principe de l’interdiction de la de l’avocat à une éventuelle in- transcription, comme pour l’écoute. fraction En effet, elle précise que bien que la prescription de l’interception des correspondances échangées sur la ligne de la personne mise en examen ne soit pas critiquable en elle-même, 2-Cass. crim., 15 janv. 1997 : Bull. crim. 1997, n° 14 ; Dr : pén. 1997, comm. 55, obs. A. Maron et précédement Cass. crim., 12 mars 1992 : Bull. crim. 1992, n° 112. 3-Cass. crim., 10 mai 1994 : Bull. crim. 1994, n° 180. - Cass. crim., 8 oct. 1997 : Procédures 1998, comm. 46, obs. Buisson. - Cass. crim., 30 sept. 1998 : Bull. crim. 1998, n° 243 ; JCP G 1999, I, 126, chron. R. Martin ; Procédures 1999, comm. 42, obs. Buisson. 4-Ce qu’avait déjà admis la Cour d’appel de Paris - CA Paris, 27 juin 1984 : D. 1985, p. 93, note J. Pradel.

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La Cour de Cassation a jugé que, même si elle est surprise à l’occasion d’une mesure d’instruction régulière, la conversation entre un avocat et son client ne peut être transcrite et versée au dossier de la procédure.5 La Cour de Cassation pose ensuite une exception : la retranscription d’une conversation téléphonique entre un avocat et son client doit être annulée si son contenu n’apparaît pas de nature à faire présumer la participation de cet avocat à une infraction. Lorsque le contenu d’une telle conversation, retranscrite, a permis de localiser le client concerné et constitue le support nécessaire de son interpellation, de son placement en garde à vue et de ses auditions au cours de cette mesure, l’annulation subséquente de ces actes est justifiée.6

pas une atteinte injustifiée aux droits de la défense ou au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance de toute personne ; qu’il en est également ainsi du simple fait qu’une conversation non enregistrée ni retranscrite ou dont l’enregistrement et la retranscription sont annulés ait pu être simplement entendue par l’agent chargé d’exécuter la commission rogatoire ; (…)

« En ce que l’arrêt attaqué a refusé d’annuler la transcription des écoutes téléphoniques entre Christian X... et son conseil, Me L... ;

(…) le pouvoir conféré par l’article 100 du Code de procédure pénale par le juge d’instruction (…) trouve sa limite dans le respect des droits de la défense qui commande notamment la confidentialité des correspondances entre la personne mise en examen et l’avocat qu’elle a désigné ; qu’une conversation téléphonique intervenant entre eux ne peut être transcrite et versée au dossier que si son contenu et sa nature sont propres à faire présumer la participation de cet avocat à une infraction ; que le magistrat instructeur a saisi la cour afin qu’elle statue sur la régularité de la transcription de conversations téléphoniques enregistrées les 24 et 28 janvier 2003 entre Christian X... et Me L... versées au dossier où elles sont cotées D. 786, D. 787 et D. 791 ».

Aux motifs que «les interceptions de conversations téléphoniques sont, sous certaines conditions,expressément autorisées par la loi ; qu’en l’espèce les surveillances téléphoniques de la ligne de Christian X... ont été régulièrement effectuées en vertu d’une commission rogatoire du juge d’instruction qui a agi conformément aux dispositions du Code de procédure pénale (…)

Il est d’ailleurs intéressant de constater que la lettre en date du 26 février 2014 de Philippe Lagauche, avocat général près la Cour d’appel de Paris, adressée à Christiane Taubira et publiée par le Journal le Monde à la suite de la conférence de presse du Garde des Sceaux, fasse explicitement référence à cette jurisprudence phare de la Cour de cassation :

qu’en l’occurrence, ces surveillances ne portaient pas sur une ligne dépendant du cabinet d’un avocat ou de son domicile, de sorte qu’il n’était pas nécessaire que le bâtonnier en fût informé par le juge d’instruction ; que les personnes ayant le statut de mis en examen ne bénéficient d’aucune dérogation ou immunité relative à l’application des articles 100 et suivants susvisés, et ont d’ailleurs le moyen de contrôler la légalité des interceptions dont leurs conversations ont été l’objet et obtenir, le cas échéant, la suppression de la transcription des écoutes irrégulières ; que les interceptions autorisées par le Code de procédure pénale ne portent, dans les conditions prévues par la loi,

« Après examen de la jurisprudence relative à l’interception et à la retranscription de conversations entre une personne et son avocat, il apparaît que la validité de celles-ci, même si elle peut donner lieu à des contestations, peut se soutenir, le contenu des conversations et l’usage d’une ligne ouverte sous une identité d’emprunt étant de nature à faire présumer la participation de cet avocat à des faits constitutifs d’une infraction au sens de l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er octobre 2003.

Elle énonce dans un autre arrêt très important du 1er Octobre 2003 que la transcription est possible même lorsque les faits constitutifs d’une infraction révélée par les écoutes seraient étrangers à la saisine du juge d’instruction.6 L’attendu de principe de cet arrêt mérite d’être cité dans son intégralité :

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(c)D.R

elle ne peut justifier qu’il soit procédé à la transcription des conversations échangées entre la personne mise en examen et son avocat et que soit ainsi méconnue la confidentialité de ces conversations.

5-Cass. crim., 8 nov. 2000 : Juris-Data n° 2000-007515 ; Bull. crim. 2000, n° 335. 6-Cass. crim., 17 sept. 2008, n° 08-85.229 : JurisData n° 2008-045172 ; Bull. crim. 2008, n° 191 ; AJP 2008, p. 467, note S. Lavric. 7-Cass. crim., 1er. oct. 2003 : Juris-Data n° 2003-020541 ; Bull. crim. 2003, n° 177.

La nécessité de faire procéder à des investigations ne pouvant être ordonnées que par un magistrat instructeur


La jurisprudence indique enfin la nécessité d’une sorte de « présomption réelle » de participation à une éventuelle infraction8… … Mais c’est reconnaître à quel point le système actuel est laissé à l’appréciation de la seule présomption, c’està-dire à la seule appréciation subjective des enquêteurs : nous sommes actuellement soumis au « flou de la simple suspicion ».

Prospective : une situation actuelle qui ne préserve pas le secret des écoutes indirectes Nous sommes dans une situation juridique qui permet à un enquêteur sans aucun contrôle particulier autre que celui mis en place par la jurisprudence de la Cour de Cassation : - d’écouter les conversations d’une personne avec son avocat, - d’apprécier seul s’il convient ou non de retranscrire ces conversations. Cette possibilité d’écoute fortuite des confidences et cette marge d’appréciation laissée aux enquêteurs est-elle acceptable ? Quand commence la suspicion de l’enquêteur ? Combien de temps peut durer l’écoute jusqu’au début d’un « commencement » de suspicion d’un avocat ? Cette situation n’est-elle pas le révélateur d’un système de la suspicion à laquelle est soumis notre Barreau ? De plus et surtout, même si la transcription est quelque peu encadrée par la seule jurisprudence, notre Barreau et nos clients peuvent-ils se satisfaire de cette possibilité laissée aux enquêteurs d’écouter fortuitement, d’écouter par ricochet leurs confidences, et ce sans aucune formalité de contrôle au préalable ? C’est-à-dire : - sans aucune information du Bâtonnier ; - sans l’intervention d’un juge ou d’un collège de juge susceptible de vérifier en amont (avant de poursuivre plus avant les écoutes et de les retranscrire) la solidité et la matérialité du soupçon ; - et ce sans aucun contrôle sur la durée de ces écoutes fortuites.

Du moment où elle est fortuite, indirecte l’écoute se passe actuellement de tout contrôle.

Il est pourtant contestable que ce type d’écoute puisse se passer de la formalité substantielle de l’article 100-7 du Code de procédure pénale. En effet, il est tout à fait possible et raisonnable de soutenir que ces écoutes par ricochet sont, en réalité et de facto, des écoutes d’un avocat qui auraient dû satisfaire, a minima, aux dispositions des articles 100 et suivants du Code de procédure pénale, et plus précisément aux dispositions de l’article 100-7 qui édicte la formalité, sous peine de nullité, du placement sous écoute d’un avocat :

ACTUALITÉ DROIT PÉNAL

– notamment de nouvelles écoutes – a conduit le procureur de la République financier à requérir l’ouverture d’une information distincte des chefs visés en objet, ces faits n’ayant pas de rapport direct avec le dossier initial ».

« Aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d’un avocat ou de son domicile sans que le bâtonnier en soit informé par le juge d’instruction ». Le texte du Code de procédure pénale, matière légaliste s’il en est, tenue au respect du principe stricte de la légalité, ne précise pas la qualification de l’interception : directe, fortuite, par ricochet ou directe. L’article 100-7 est limpide : « Aucune interception ». Et cet article ne prévoit aucune exception. Le Bâtonnier devrait, a minima, faire l’objet d’une information lorsqu’un de nos confrères est écouté incidemment, sous peine de nullité.

De plus et enfin, il serait tout autant possible de défendre l’idée selon laquelle notre système législatif n’a pas prévu l’ingérence que constitue l’écoute fortuite, et serait donc en violation de l’article 8 de la CEDH. En effet, la prévisibilité de la loi occupe une place prépondérante dans la jurisprudence actuelle de la Cour Européenne au regard de l’article 8. Selon la jurisprudence constante de la Cour, une norme est « prévisible », lorsqu’elle est rédigée avec assez de précision pour permettre à toute personne, en s’entourant au besoin de conseils éclairés, de régler sa conduite.9

8-Cass. crim., 8 nov. 2000, cité supra n° 89. 9-CEDH 2 août 1984, Malone, série A, no 82, p. 31, § 66.

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ACTUALITÉ DROIT PÉNAL

Comme sauvegardes minimales, nécessaires pour éviter les abus, qui doivent figurer dans la loi, les arrêts Kruslin et Huvig prévoient : « la définition des catégories de personnes susceptibles d’être mises sur écoute judiciaire ; […] la nature des infractions pouvant y donner lieu ; […] la fixation d’une limite à la durée de l’exécution de la mesure ; […] les conditions d’établissement des procès-verbaux de synthèse consignant les conversations interceptées ; […] les précautions à prendre pour communiquer, intacts et complets, les enregistrements réalisés, aux fins de contrôle éventuel par le juge et par la défense ; […] les circonstances dans lesquelles peut ou doit s’opérer l’effacement ou la destruction desdites bandes, notamment après un non-lieu ou une relaxe 10».

Le caractère fortuit (direct ou indirect) de l’écoute doit devenir inopérant, il n’est pas précisé par le texte : aucune interception d’une conversation entre un avocat et son client ne devrait pouvoir avoir lieu sans que le bâtonnier en soit informé par le juge d’instruction. Il est surtout à espérer que cette affaire offre aux pouvoirs publics l’opportunité de restaurer le lien de confiance des clients envers leurs conseils, en menant une réflexion sur une meilleure protection de la confidentialité et une réforme des articles 100 à 100-7 du Code de procédure pénale qui ne sont pas, en l’état, satisfaisants. La confiance n’est pas l’impunité, mais la recherche de la vérité n’est pas la seule suspicion ; et il est à souhaiter que cette affaire reste exceptionnelle et que notre Barreau, Auxiliaire de justice, placé sous l’autorité du Judiciaire, ne puisse plus être placé sous son écoute fortuite.

Or, la loi fédérale sur la procédure pénale suisse visait avant tout la surveillance des personnes suspectées ou inculpées d’un crime ou d’un délit, voire des tiers présumés recevoir ou transmettre des informations à ces dernières, mais ne réglementait pas de façon détaillée ni ne précisait les précautions à prendre dans le cas d’interlocuteurs écoutés « par hasard », en qualité de « participants nécessaires » à une conversation téléphonique enregistrée par les autorités en application de ces dispositions. En particulier, la loi ne précise pas les précautions à prendre à leur égard. (c)D.R

La Cour en conclut que l’ingérence ne pouvait passer pour « prévue par la loi » puisque le droit suisse n’indiquait pas avec assez de clarté l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités dans le domaine considéré 11.

Thibault HALMENSCHLAGER

Dès lors que l’ingérence n’était pas « prévue par la loi », la Cour constate une violation de l’article 8 sans avoir à vérifier que l’ingérence était « nécessaire dans une société démocratique ». Or, comme on l’a vu, le cas des écoutes fortuites, indirectes, par hasard n’est pas prévu avec précision par notre arsenal législatif. La France pourrait donc se voir condamnée par la Cour au titre de ces écoutes par ricochet. En conclusion, la Chambre de l’instruction pourrait éventuellement annuler les écoutes dont a pu faire l’objet notre Confrère, et l’ensemble de la procédure subséquente, en raison de la simple et seule violation de l’article 100-7 du Code de procédure pénale.

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(c)D.R

10-CEDH 24 avr. 1990, Kruslin et Huvig, respectivement série A, no 176-A, p. 24, § 35, et no 176-B, p. 56, § 34. 11-CEDH 16 févr. 2000, Amann,Rec. 2000-II, p. 224, § 62.


(c)D.R

La Section Parisienne de la CNA a organisé le 1er octobre dernier une conférence sur le thème de « L’avocat lobbyiste ».

gauche à droite: Cyril FERGON, Jean-Luc LAFFINEUR, Anne-Katel MARTINEAU, Stéphane DESSELAS, Philippe PORTIER

L’avocat du XXI ème siècle a de nombreux défis à relever, dont celui de s’impliquer de manière croissante dans le lobbying et le conseil en stratégie des entreprises. La CNA - Paris avait invité Stéphane Desselas, Philippe Portier, Jean-Luc Raffineur et Cyril Fergon pour en débattre. Ils ont à tour de rôle présenté des exemples très concrets du lobbying qu’ils pratiquent au quotidien, illustrant ainsi les différentes facettes de l’avocat lobbyiste qui sont autant d’opportunités pour nos activités de conseil. Pour les lecteurs de « La Plume des Avocats Parisiens » qui n’ont pas pu assister à cette conférence, nous avons sélectionné quelques points importants des brillantes interventions de nos invités. Stéphane Desselas 1 a, tout d’abord, pris la parole afin de définir plus précisément la notion de lobbyiste et la place de l’avocat dans la pratique du lobbying. Le lobbying se définit, selon lui, comme étant « une technique de communication visant à influencer les pouvoirs publics. Le lobbying est partie prenante du jeu démocratique ». Selon Stéphane Desselas, il existe quatre types de lobbyistes : les « perroquets » qui sont les spécialistes des relations publiques et de la communication reposant à 100% sur la forme et à 0% sur le fond, « ce sont des machines à faire du lobbying ». Viennent ensuite les « ouvreurs de portes », anciens ministres, parlementaires ou commissaires européens, très utiles pour être connecté aux bonnes personnes. Il distingue aussi les « animateurs de coalition » qui consistent au sein de fédérations et organisations à mettre en relation les unes avec les autres.

Viennent enfin, les « experts pédagogues » disposant d’une très bonne connaissance du fond des dossiers. Stéphane Desselas considère que les avocats ont toute leur place dans cette quatrième catégorie du fait de leurs connaissances juridiques et leur véritable valeur ajoutée d’expertise et de rédaction. Stéphane Desselas identifie deux étapes où l’avocat lobbyiste pourrait intervenir : en amont dans ses qualités rédactionnelles très utiles pour la rédaction des projets d’amendements mais également, en aval, par la menace de l’engagement de contentieux afin de faire pression sur les pouvoirs publics notamment par des actions telles que les QPC en France ou celles qui peuvent être engagées devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Pour être un bon lobbyiste, l’avocat se doit de bien connaître les institutions communautaires qui ne fonctionnent pas comme les institutions françaises 2. A Bruxelles, Stéphane Desselas précise qu’il est important d’identifier les bonnes personnes, c’est-à-dire les personnes travaillant dans l’ombre comme le personnel administratif, les « shadow rapporteurs » et les rapporteurs qui disposent d’un réel pouvoir d’influence. Contrairement aux idées reçues, avoir un bon carnet d’adresses n’est donc pas suffisant.

RETOUR SUR UN ÉVÉNEMENT DE LA CNA - PARIS 2013

COMPTE-RENDU DE LA CONFÉRENCE ORGANISÉE PAR LA CNA - PARIS SUR L’AVOCAT LOBBYISTE

L’approche ascendante dite « bottom-up » est meilleure que l’approche descendante dite « top-down ». Il faut aussi prendre en compte l’approche consensuelle européenne qui réside dans la culture de l’anticipation et du consensus, en opposition avec l’approche conflictuelle à la française. Philippe Portier 3 est ensuite intervenu sur le thème de « l’avocat lobbyiste et la déontologie ». Au préalable, il a précisé que la notion d’avocat lobbyiste n’est pas encore évidente pour les avocats. Il a souhaité rappeler qu’une association, l’Association des Avocats Lobbyistes 4 a été créée en 2011. Elle a pour mission, d’une part, de promouvoir l’activité de lobbyiste auprès des avocats et le lobbying par les avocats auprès des clients et, d’autre part, de véhiculer la nécessité d’être dans les processus de transparence notamment dans les modes de facturation des prestations de lobbying. Ces prestations peuvent constituer à : > réaliser une veille avec la définition des stratégies de réaction, > intervenir lors du processus législatif avec l’entrée en contact avec les bonnes personnes, > préparer l’argumentaire et la défense.

1-Avocat de formation, Fondateur et Président du cabinet de lobbying ATHENORA Consulting Bruxelles, Président du Groupe des Nouveaux lobbyistes. 2- « Les règles d’or du lobbying » par Stéphane Desselas et Natacha Clarac - Etude Parue aux Editions du Palio en 2012.

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Jean-Luc Laffineur 5 a ensuite pris la parole pour expliquer la pratique du lobbying par les avocats à Bruxelles où le lobbying n’est pas diabolisé mais institutionnalisé car faisant partie du processus démocratique. Les avocats lobbyistes interviennent à trois stades différents : > en incitant des législateurs à légiférer sur des sujets particuliers avec rédaction des projets de textes communautaires, > en déposant des amendements par la rédaction de « position papers », > en utilisant la voie du contentieux comme indiqué précédemment par Stéphane Desselas. L’avocat peut également intervenir en tant que consultant expert de lobbyiste nécessitant son expertise juridique. Enfin, Cyril Fergon 6 est intervenu sur la pratique du lobbying par un avocat en France et devant les institutions françaises. Le schéma des institutions communautaires n’est pas du tout le même que celui des institutions françaises. Le critère est celui de « l’hyper-stress » et les amendements sont souvent passés lors des cessions parlementaires de nuit. Cyril Fergon a souligné que pour exercer des activités de lobbyistes, il est très important de bien connaître le système de l’intérieur et les modes de fonctionnement des parlementaires et des institutions, Assemblée Nationale, Sénat, établissements publics, administrations décentralisées… Selon lui, « l’avocat est le seul à avoir la capacité de pédagogie dans un monde éclaté car l’avocat apporte du professionnalisme ». Il a rappelé, en conclusion, qu’il existe un registre des lobbyistes tenu par l’Assemblée Nationale mais un seul avocat sera inscrit non pas pour défendre les intérêts de ses clients mais l’intérêt de la profession. S’il est incontestable que le lobbying exercé par l’avocat est un nouveau métier de l’avocat qui ne cesse de se dé-

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velopper, il semble que ce ne soit pourtant pas acquis, à en lire le récent sondage réalisé par la SOFRES en juillet 2013, auprès des décideurs publics français . En effet, les décideurs publics n’associent pas automatiquement l’avocat au lobbying. Les cabinets d’avocats sont cités après les cabinets spécialisés en affaires publiques, les organisations professionnelles, les fédérations professionnelles, les entreprises .

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RETOUR SUR UN ÉVÉNEMENT DE LA CNA - PARIS 2013

Aujourd’hui, les avocats sont confrontés à deux débats. Le premier débat consiste dans la compatibilité entre les avocats ayant des mandats parlementaires et les activités de lobbying, du fait du trafic d’influence. Le second débat consiste dans l’existence d’un registre auprès de la Commission Européenne des lobbyistes. L’inscription à ce registre oblige les avocats à dévoiler le nom de leurs clients et le montant du chiffre d’affaires des clients, ce qui nécessite d’obtenir leur accord souvent refusé.

Quelques participants et adhérents de la CNA - PARIS.

Il nous semble donc impératif de multiplier les actions et initiatives, telles que celles de l’AAL, mais aussi de promouvoir, via notamment une communication ciblée, le rôle de l’avocat en qualité de lobbyiste comme un personnage clef dans la prise de décision publique. Notre déontologie et notre expertise doivent être mises en avant afin de rassurer les décideurs quant au manque de transparence et d’objectivité, souvent évoqués. A l’issue de l’intervention de nos invités, des échanges entre confrères, nous sommes convaincus que l’avocat du XXIème siècle sera le lobbyiste efficace, pertinent et incontournable de demain à condition de pouvoir l’identifier facilement… Anne-Katel MARTINEAU et Clémence PHILIPPE

Vous pouvez contacter l’Association des Avocats Lobbyistes (AAL) pour toute information complémentaire : Site Internet : http://www.avocats-lobbyistes.com Adresse de correspondance : La Maison du Barreau A l’attention de Maître Philippe PORTIER, Président de l’AAL 2, rue de Harlay 75001 PARIS contact@avocats-lobbying.com


il vient de « son camp » se réjouir et souhaiter y apporter sa contribution. Messianique ? Le terme attire parfois la moquerie, pourtant il vient de mission, qui est un mot empreint de dignité et osons le dire, de grandeur.

Ce deuxième Campus International en Asie était mon premier, puisque des circonstances m’ont empêché de participer à celui de l’année précédente au Vietnam. Ceci m’a permis de ressentir immédiatement cette fameuse « première impression » qui selon Talleyrand est la bonne. Tout d’abord solidarité d’un groupe pourtant éphémère, celui des participants de 2013, manifestement heureux de se retrouver, et d’accueillir de nouveaux membres. Professionnalisme ensuite, dans l’organisation dont on imagine aisément le travail en amont (un grand merci notamment à Scarlett Cramer- Chevallier et à son équipe) enfin et surtout, richesse du contenu.

La mission ici n’est rien moins que de replacer le droit français, la profession juridique française, à la place qui leur revient légitimement sur la scène internationale.

Les participants méritent bien les 20 heures de formation continue attachées à la conférence, non pas parce que les sujets sont trop ardus pour être appréciés, mais parce qu’ils sont choisis et traités comme on l’attend d’une manifestation de ce niveau. Dans la diversité toutefois, entre le choc du film projeté sur la tragédie cambodgienne, l’introduction à l’environnement institutionnel et juridique cambodgien, une plongée érudite dans les fondamentaux historiques de la culture des institutions, les éléments de droit comparé entre le Cambodge et la France et une perspective économique étendue à l’ASEAN. Il a été répondu aussi à des préoccupations plus prosaïques émanant de membres du Barreau de Paris exerçant en Asie tels que moi-même quant à la déontologie, la formation continue, le mode d’exercice et autres sujets. Cette réaffirmation d’une appartenance commune via le Campus est la bienvenue dans notre situation, des conversations entre confrères m’ont amplement démontré que je ne suis pas le seul à l’avoir apprécié. Amateurs de formation qualifiante aisément acquise à l’occasion d’un séjour exotique s’abstenir, il se passe beaucoup de choses entre les petits fours ! Ce qui n’empêche nullement les contacts informels et confraternels durant les entractes, différents de ce dont j’ai pu avoir l’expérience dans d’autres forums. La création progressive d’un groupe de personnes rassemblées par un intérêt commun pour l’international en sus de l’appartenance au même barreau est perceptible.

On revient de loin. Que n’a-t-on entendu qu’il fallait adopter le mode d’exercice de la profession de nos confrères de pays anglo-saxons, et reconnaître la primauté apparemment indiscutable de la common law ? Non pas que l’un et l’autre ne soient éminemment respectables, mais modèle unique ? Certes non, et Madame le Bâtonnier Christiane Féral-Schuhl, elle-même inspirée par Monsieur le Bâtonnier Yves Repiquet, a lancé l’idée du CAMPUS, avant que l’étendard ne soit repris avec brio par Monsieur le Bâtonnier Pierre-Olivier Sur et Monsieur le Vice-Bâtonnier Laurent Martinet. Avec brio n’est pas une figure de style, ce qui est remarquable est que l’on y croit et que l’enthousiasme de nos confrères du Conseil de l’Ordre est contagieux.

ÉVÉNEMENTS DU PREMIER TRIMESTRE 2014

CAMPUS ASIE 2014 : CAMBODGE

Ce projet est louable, certes, mais est-il réaliste ? Des échanges de vue ont replacé la question du droit français, ou civiliste, dans le contexte plus général encore de la langue française et de sa culture. C’est à dessein que je mentionne ici la culture de la langue française, non pas la seule culture de la France, car si l’on sait que la pensée se structure autour de la langue, ce qui n’est pas sans lien avec le droit. Parlant d’abord du droit, Monsieur le Vice-Bâtonnier a opportunément souligné dans l’une de ses interventions les avantages spécifiques et souvent négligés du droit civiliste : prévisible, lisible, équilibré, favorisant la sécurité juridique des transactions, et conséquence de tout cela sans être négligeable, moins coûteux à mettre en œuvre. Ayant à plusieurs reprises sur l’estrade de conférences organisées par des institutions françaises devant des investisseurs asiatiques, vanté les mérites du droit civiliste comme un jardin à la française qui déroule son plan devant les yeux du promeneur, à l’inverse du jardin à l’anglaise dont les courbes nécessitent un plan pour ne pas se perdre, je ne peux que souscrire…

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Et puis, il y a une dimension messianique clairement affirmée et assumée dans cette initiative. En ces temps de fadeur, de précaution, de soumission aux idées dominantes, on ne peut qu’admirer le courage et lorsque par surcroit, 15


De même, à propos du droit, l’angle de la promotion du droit civiliste ne devrait-il pas consister à faire reconnaître la coexistence avec la common law plutôt que de tenter de faire accepter le système civiliste comme le seul en vigueur dans un pays ? Les pays dualistes existent, le Vietnam où s’est déroulé le précédent Campus mais d’autres comme par exemple Mauritius / Maurice où le Code Civil est d’inspiration française et rédigé en français tandis que d’autres textes sont d’inspiration anglo-saxonne et rédigés en anglais avec parfois même d’étonnants mélanges, comme le Trusts Act 2001, contenant six articles en français sur la fiducie en milieu du texte anglais ! Sous ce rapport, et assurément il le prendra avec le même humour qui nous amène à lui faire cette réflexion, notre confrère et intervenant au Campus François Roux, chef du Bureau de la Défense au sein du Tribunal Spécial pour le Liban et co-avocat de l’accusé Duch lors du procès 001 devant les CETC, a techniquement raison mais « politiquement tort » lorsqu’il se réfère au « droit romano-germanique ». Lorsque Angela Merkel incite le continent africain (en particulier francophone) à apprendre l’allemand et venir étudier en Allemagne (28 avril 2014), n’est-ce pas plutôt le moment de s’en tenir à l’expression « droit civiliste » qui renvoie à notre droit civil ? Le droit de racine romaine contemporain est bien issu du droit français et de nul autre, ayons la fierté, sinon de le proclamer du moins de ne pas le cacher.

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Un sujet de débat pour un prochain Campus ?

Entretien avec Jacqueline SOCQUET - CLERC LAFONT Une femme admirable ! Bertrand PAVLIK (BP) : Votre parcours d’Avocat est celui d’une femme engagée : quels ont été vos moteurs ? Jacqueline SOCQUET-CLERC LAFONT (JSCL) : Ceux de tout engagement : me battre pour faire « bouger les choses » ou comme le disait plus joliment Marguerite de Valois, Reine de Navarre, ne pas me contenter de « suivre les facilités mineures ». BP : Y a-t-il eu des rencontres déterminantes ? JSCL : Oui, celle de notre confrère Alain TINAYRE, qui m’a amenée au syndicalisme professionnel. Il avait été, bien avant moi, avocat stagiaire dans la même Etude d’Agréé près le Tribunal de Commerce de PARIS et il est demeuré mon exemple : un grand Avocat, très cultivé et un syndicaliste engagé dans la défense de notre profession. Je me suis donc très vite inscrite à l’ANA, Association Nationale des Avocats (créée en 1921), devenue CSA, puis CNA. BP : Que diriez-vous aux jeunes pour leur donner envie de s’investir pour la défense de la profession et quels ont été vos combats ?

Philippe GIRARD - FOLEY

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JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME 8 MARS 2014

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Quant à la langue, elle sera un élément déterminant du succès à venir. Je vous invite à voir l’analyse de NATEXIS relayée par le magazine américain FORBES (21 mars 2014) selon laquelle le français sera la langue la plus parlée dans le monde en 2050, devant l’anglais et le mandarin. Mais avec une réserve importante : dans la réalité, cette prévision tenant en compte la langue officielle des pays considérés doit être tempérée par la coexistence sur le terrain avec l’anglais. Être l’une des deux langues de l’avenir n’est-ce pas un motif suffisant de fierté et un argument suffisant pour convaincre que l’apprentissage et la continuation de l’usage du français sont tout sauf du temps perdu ?

JSCL : Je ne crois pas utile de raconter tous ces combats, car il sont passés, mais il y a eu beaucoup d’Austerlitz et peu de Waterloo !


Je les engage d’ailleurs à lire (ou à relire) La Charte du Consommateur de Droit, que nous avons votée en 1989 et qui devrait être remise à tout jeune Avocat qui va prêter serment. BP : Pensez-vous qu’il est plus compliqué pour une femme de s’engager et quels conseils donneriez-vous aux jeunes femmes ? JSCL : Oui, les femmes le savent bien, c’est encore plus difficile pour elles, mais elles sont maintenant la majorité au Barreau de PARIS, ce qui prouve que la jeune génération a gagné la bataille.

JSCL : Oui et cela a été pour moi une extraordinaire expérience. Le CESE, 3ème Assemblée constitutionnelle de la France, est un lieu de réflexions et de propositions exceptionnel : le gouvernement le consulte, mais il se saisit lui-même d’autres sujets et rend de remarquables avis, que tout le monde peut consulter sur le site Internet à l’adresse suivante : http://www.lecese.fr/ Là aussi, j’ai travaillé avec passion, entourée de membres issus de toute la société française, syndicalistes patronaux et salariés, de tous bords et de toutes formations : je garde un souvenir très précieux de ces rencontres et de nos travaux. Je crois d’ailleurs que dans nos Assemblées constitutionnelles, les Avocats ont un rôle important à jouer (le nº359 du BARREAU de FRANCE a publié une interview de Claude BARTOLONE, Président de l’Assemblée Nationale, consultable en ligne sur les sites de la CNA et de l’ANASED aux adresses suivantes : www.cna-avocats.fr et www.anased.fr).

Pensez que mes parents ne souhaitaient pas que je fasse des études, encore moins que je m’engage dans une activité professionnelle et moins encore dans une activité libérale ! Bien sûr, malgré les difficultés de toutes sortes, je n’ai jamais regretté mes choix, ni mes engagements syndicaux.

BP : Que pensez-vous de la Commission égalité professionnelle mise en place sous le Bâtonnat de Christiane FERAL-SCHUHL, au sein de laquelle la Présidente de la section parisienne de la CNA, Anne-Katel MARTINEAU, travaille depuis sa création ?

Avant même mon élection à la présidence de notre syndicat, j’avais fondé l’ANASED (Association Nationale des Avocats pour la Sauvegarde des Entreprises et leur Développement, unie à la CNA par un lien confédéral) avec l’aide du Bâtonnier Hubert DURON (NIORT).

JSCL : Le Barreau de PARIS, dans toute sa longue histoire a élu d’excellents Bâtonniers, mais je tiens à souligner combien ses choix ont été judicieux lorsqu’il a élu des femmes, Dominique de la GARANDERIE et Christiane FERAL-SCHUHL, toutes deux très exceptionnelles.

C’était un homme exceptionnel, remarquable commercialiste, Avocat et Administrateur Judiciaire, très fin lettré et également syndicaliste passionné.

La Commission égalité professionnelle est une remarquable initiative et je me suis évidemment réjouie que la Présidente de la CNA - PARIS, Anne-Katel MARTINEAU y participe, avec l’énergie et la créativité que nous lui connaissons. Je tiens d’ailleurs à féliciter Anne-Katel MARTINEAU pour sa première année de présidence de la CNA - PARIS : elle a été très efficace, les manifestations qu’elle a organisées ont toutes été réussies, démontrant une fois de plus la place importante de la CNA au sein de la profession d’Avocat.

C’était en 1987 et nous voulions mettre en avant l’Avocat conseil de l’entreprise : j’avais proposé pour le titre de l’association le mot «sauvegarde» pour montrer que les Avocats se préoccupaient fortement du sauvetage des activités productives de notre pays. Comme vous le savez, le législateur s’en est inspiré, puisqu’en 2005 sera votée la loi portant le beau nom de « sauvegarde ». Vous voyez que les Avocats sont utiles, lorsqu’ils ont du vocabulaire ! BP : Vous avez siégé au Conseil Economique, Social et Environnemental : en qualité de syndicaliste ?

ÉVÉNEMENTS DU PREMIER TRIMESTRE 2014

Ce que je peux dire à nos jeunes confrères (et à cet égard, je veux souligner combien je les trouve intelligents et imaginatifs !) c’est qu’il n’y a pas d’avancées sans luttes sévères, ni de réussites sans engagements, mais ils le savent, en tout cas ceux qui sont à nos côtés à la CNA et à l’ANASED.

À ce sujet, cela m’amuse d’évoquer avec vous ma présidence de la section parisienne, il y a bien longtemps. J’organisais alors des petits déjeuners-débats avec des personnalités politiques : ils étaient très courus. Celui avec Jacques CHIRAC, alors Maire de PARIS, avait recueilli plus de 300 inscriptions et il m’avait fallu, dans l’urgence, changer le lieu de réunion !

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ÉVÉNEMENTS DU PREMIER TRIMESTRE 2014

J’ai toujours pensé qu’il fallait que notre profession sache se tourner vers l’extérieur et poursuive le « colloque singulier » destiné à nos clients, avec les politiques, les professeurs, les économistes, les philosophes, les chefs d’entreprise, et même les artistes : il ne faut pas se cantonner aux prétoires... C’est cette même conviction qui m’a amenée à créer la rubrique « trois questions à... » en ma qualité de Directrice de la rédaction du BARREAU de FRANCE. Lorsque l’on relit la longue et prestigieuse liste des personnalités de tous bords qui ont accepté de nous répondre, nous avons la confirmation que notre Syndicat a bien joué son rôle, dans l’intérêt de notre profession comme de la Justice – et puisque vous avez l’amabilité de m’interroger, je veux ici remercier tous les confrères qui m’ont témoigné leur pleine approbation. BP : Vous avez aussi présidé l’UNAPL (Union Nationale des Professions Libérales) dont la CNA est membre fondateur : pour d’autres combats ?

Biographie de Jacqueline SOCQUET-CLERC LAFONT : Prestation de serment : 1961 Ancien membre du Conseil de l’Ordre des Avocats à la Cour de Paris : 2009 à 2011 Ancien membre du Conseil National des Barreaux (CNB) : 1992 à 1996 Président de la CSA (CNA) : 1988- 1989

JSCL : Le combat à ce haut niveau est toujours le même : défendre les professions libérales dont font partie les Avocats, c’est défendre « les métiers de la vie », indispensables et essentiels. Je dois souligner que deux Avocats de notre Syndicat m’ont précédée à la présidence de l’UNAPL : Alain TINAYRE (PARIS) et Claude CHAMBONNAUD (BORDEAUX). Nous devons poursuivre notre engagement pour tout ce que notre Syndicat a créé et pour tout ce qu’il a constamment soutenu : l’UNAPL en est une des forces symboliques. BP : L’on dit que votre énergie s’appuie sur une devise : quelle est-elle ? JSCL : Celle d’EURIPIDE, tout simplement... Avec lui et avec tous ceux qui ont su l’écouter, je clame : « C’est une honte de se taire et de laisser parler les Barbares ! ».

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Président de l’Union Nationale des Professions Libérales (UNAPL) : 2001 à 2004 Ancien Président des Clubs Présence et Promotion de la Femme Française (PPFF) : 1991 Membre de l’Union Européenne des Femmes Françaises depuis 1980 Membre de l’Union des Femmes Décorées de la Légion d’Honneur (UFDLH) depuis 2001 (membre de l’assemblée constitutive et Vice-Présidente Paris Région) Commandeur dans l’Ordre National du Mérite : 1999 Commandeur de l’Ordre National de la Légion d’Honneur : 2011


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LES PROJETS DU BARREAU DE PARIS

ASSISES DE LA FISCALITÉ : QUELS ENJEUX POUR LES AVOCATS ? À la suite de l’annonce du Pacte de responsabilité le 14 janvier 2014, le gouvernement a lancé le 29 février 2014 les Assises de la Fiscalité des entreprises, et installé le 31 février 2014 le Groupe de travail sur la remise à plat de la fiscalité des ménages. Dans un contexte de réduction des marges budgétaires, l’objectif final est, semble-t-il, d’arriver à une baisse ciblée des impôts des contribuables, afin de doper la croissance et diminuer durablement le chômage.

Ensuite, en matière de technique fiscale, l’utilisation quotidienne par les avocats de la panoplie d’outils fiscaux adoptés par le législateur en fait des interlocuteurs de choix pour les réformes fiscales envisagées. De plus, on se souvient du fait que Brigitte LONGUET, avocate, a été chargée d’une mission sur l’amélioration de la compétitivité des professions libérales. Elle a remis au gouvernement un rapport contenant 33 propositions qui pourraient utilement inspirer les participants aux Assises de la Fiscalité. Enfin, les avocats sont eux-mêmes des acteurs économiques dont l’importance est de notoriété publique, notamment en matière de chiffre d’affaires, de recrutement, de prescription d’activités pour divers corps de métiers.

Concernant les entreprises, il s’agit de réduire le taux de l’impôt sur les sociétés, de simplifier et réduire les impôts sur la production, d’améliorer les relations avec l’Administration fiscale et de refondre la fiscalité locale.

La participation des avocats aux Assises de la Fiscalité est aussi dans la logique de défense de leurs propres intérêts. A titre d’exemple, le développement des cabinets à l’international est l’un des axes majeurs du Bâtonnier Pierre-Olivier SUR et du Vice-Bâtonnier Laurent MARTINET.

Concernant les personnes physiques, il est question de poser tous les sujets sur la table, notamment la baisse ciblée des tranches de l’impôt sur le revenu, la déductibilité de la CSG de l’impôt sur le revenu, la question de la retenue à la source ou la réforme de la prime pour l’emploi et du RSA.

À ce titre, plaider auprès des Pouvoirs Publics l’extension aux personnes physiques exerçant une profession à titre individuel du bénéfice du crédit d’impôt prospection commerciale à l’étranger s’inscrit indiscutablement dans ce sens.

Le calendrier des travaux est très serré et le gouvernement compte prendre les premières décisions fin Avril, en vue du budget 2015. Ces annonces gouvernementales ont été saluées par la Profession. Le CNB et l’Ordre des Avocats de Paris ont très tôt manifesté leur intention de participer à ces travaux, et pris des contacts avec Bercy. Cette participation se justifie à plusieurs titres. Tout d’abord, les Assises de la fiscalité posent la question de la politique fiscale que le gouvernement compte définir et mener dans le contexte économique actuel que nous connaissons.

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(c)Cédric Roussel

Tout cela exige une analyse sans complaisance des faits et la mobilisation de tous les acteurs concernés. Les avocats qui accompagnent leurs clients nationaux ou internationaux ne peuvent que plaider pour un tel consensus.

(c)D.R

Un consensus semble se dégager sur quelques idées essentielles: la définition d’un socle de principes fiscaux stables et cohérents pour tous, l’identification et le choix de mesures fiscales en fonction de leurs effets et non par idéologie, la mise en œuvre d’actions énergiques en faveur de la croissance, de la compétitivité et de l’attractivité de la France.

Serge BAKOA membre du Conseil de l’Ordre


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QUELQUES MOTS POUR PERCER LES MYSTÈRES DE LA PATAGONIE Pour l’imaginaire populaire, la Patagonie est un vaste territoire, d’une beauté époustouflante, situé en Argentine et au Chili constitué de légendes et de mystères. En décembre 2013, je me suis rendue en Patagonie argentine, au Sud du pays, sur cette terre du bout du monde. Pour certains, elle évoque l’émission de Nicolas HULOT « Ushuaia Nature », pour d’autres, c’est la terre qui a inspiré l’écriture de nombreux romans à Jean RASPAIL, ce dernier ayant relié dans les années 50 la Terre de feu à l’Alaska. La Patagonie, c’est aussi, la terre d’origine et d’adoption des deux derniers Présidents argentins, l’ex-président Nestor KIRCHNER et son épouse, Cristina FERNANDEZ de KIRCHNER qui est née dans la province de Buenos Aires mais qui a fait sa carrière politique dans la province de Santa Cruz. Mais il faut savoir qu’avant de voir surgir de cette terre lointaine des dirigeants, la Patagonie a connu une très lente intégration en Argentine. Les événements historiques l’expliquent. Le coup d’Etat militaire de 1955 a mis entre parenthèses la provincialisation et ce n’est qu’en 1957 que les constitutions provinciales ont commencé à être instaurées. Vingt ans plus tard, un fabuleux destin s’ouvre à elle… Elle devait devenir le territoire de la capitale du pays mais le projet de loi voté en 1987 n’a finalement pas abouti pour des raisons politiques. Malgré des difficultés économiques et sociales importantes dans les années 90, la Patagonie est aujourd’hui au centre de la politique nationale et ce, dès l’arrivée au pouvoir du Président Nestor KRISNER.

Anne-Katel MARTINEAU

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(c)AK MARTINEAU

Qu’en est-il de sa situation sur le plan judiciaire et plus exactement pénal ?


LAG : L’enquête est ouverte uniquement lorsque le procureur le décide. Le juge d’instruction ne peut pas y procéder d’of fice 1 . Après l’ouverture de l’enquête préliminaire décidée par le procureur, l’enquête est sous la responsabilité du juge d’instruction. Néanmoins, il n’y a pas une homogénéité dans tout le territoire, cela peut dif férer d’une province à une autre, car chaque province a son propre code de procédure pénale, et même au niveau fédéral.

(c)D.R

La décision d’ouvrir l’enquête est initiée par une dénonciation auprès d’un juge, du cabinet du procureur, de la police ou des actions préventives des forces de sécurité.

Monsieur Luis Alberto Giménez Avocat de formation (Etudes à l’Université de Buenos Aires, 1985). Spécialiste en Droit Pénal et Docteur en Droit (Université de Belgrano). Procureur pendant 11 ans à Rio Grande au Nord de la Terre de feu. Juge d’un tribunal fédéral à Ushuaia depuis 2008.

Interview par Anne-Katel MARTINEAU Présidente de la section parisienne de la Confédération Nationale des Avocats. Anne-Katel MARTINEAU (AKM) : Quel était votre rôle en qualité de Procureur ? Y a-t-il un partage d’attribution entre le Procureur d’une province telle que Rio Grande et d’une région toute entière telle que la Patagonie ? Luis Alberto GIMÉNEZ (LAG) : Le procureur est le fonctionnaire chargé principalement de la poursuite pénale des délits criminels. Il est amené également à donner un avis sur des sujets de droit lorsque l’intérêt public est en jeu. Chaque procureur agit dans sa propre juridiction et n’a pas le droit de le faire dans d’autres. Il doit demander une autorisation afin de mener des mesures procédurales en dehors de sa propre juridiction. AKM : Quel était l’étendue de vos pouvoirs ? A quel moment pouviez-vous décider d’ouvrir une enquête ?

EUROPE & INTERNATIONAL

Interview d’un juge fédéral, en Patagonie, Luis Alberto GIMÉNEZ

Il est également possible d’ouvrir une enquête de la propre initiative du procureur motivée par la connaissance d’un fait criminel potentiel, par exemple, dont il a pris connaissance par la presse. Une fois l’enquête achevée, le procureur décide au regard des éléments et preuves en sa possession s’il est opportun de poursuivre. Si tel est le cas, il en informe le juge qui présente le dossier au « Tribunal Oral Criminal ». Le terme « oral » est utilisé pour le différencier de l’instruction qui, elle, est menée par écrit et est secrète. En Tierra del Fuego2 le même procureur peut également former un recours devant la Cour Suprême de la province. AKM : Un procureur en Patagonie, est-il guidé par le principe de légalité des poursuites ou par celui de l’opportunité des poursuites ? LAG : Le principe général est celui de la « legalidad procesal », légalité des poursuites. Toutefois, on commence à voir des exceptions liées à la suspension du procès pénal, appelé en Argentine «probation», bien qu’il s’agisse d’un concept différent de celui américain3 , et à la médiation pénale, qui permet de cesser la poursuite. De manière générale, il y a un mouvement important aspirant à l’intégration du principe d’opportunité. Ceci fait partie de presque tous les projets de réforme procédurale discutés actuellement, ils tendent vers une procédure accusatoire. AKM : Quelles sont les relations entretenues avec les régions et les pays tiers au niveau mondial ? De manière plus générale, existe-t-il une réelle coopération internationale ?

1 - iudex nec procedat offici. 2 - Terre de Feu en Espagnol. Il s’agit du nom donné à l’archipel qui se trouve à l’extrême Sud du continent Sud américain. Il est composé de la grande île de la Terre de Feu communément appelé la “Terre de Feu” et d’une grande qualité d’ îles plus petites que sont les îles Dawson, Navarino, Hoste et les îles des Etats. 3 - Aux Etats-Unis, la “probation” est la libération conditionnelle.

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LAG : Il y a de nombreux traités de coopération au niveau international, principalement avec les pays de la région, en particulier ceux du Mercosur. Ces traités permettent des démarches simplifiées, bien que les procédures d’extradition restent toujours complexes.

Selon moi, le véritable problème est le manque d’approfondissement de l’enquête sur les organisations criminelles qui financent et blanchissent l’argent de ces trafics. En général, la criminalisation a été centrée sur des petits trafiquants, sauf rares exceptions.

La coopération existe à chaque niveau de l’enquête et elle s’est beaucoup développée ces dernières années dans des domaines comme la lutte contre le trafic de drogues et la traite des personnes.

AKM : On assiste en France à une déjudiciarisation. Qu’en est-il en Argentine ?

AKM : Vous êtes aujourd’hui juge fédéral, depuis 2008, quel est votre quotidien ? Siégez-vous avec d’autres magistrats ? LAG : Je suis juge dans un « Tribunal Oral en lo Criminal Federal », Tribunal Criminel Fédéral. Le tribunal est composé de trois juges assistés par des greffiers. La principale fonction est de mener à bien le jugement des délits dans les affaires apportées par le procureur. Les affaires concernent principalement les trafics de drogues, la traite des personnes, la contrefaçon de documents fédéraux (par exemple : les pièces d’identité), l’évasion fiscale, la contrebande, et depuis ces dernières années, des crimes contre l’humanité commis durant la dernière dictature militaire. Chaque juge suit individuellement l’exécution de la peine des condamnés jusqu’à sa fin.

Il existe actuellement une tendance chez les hommes politiques argentins à utiliser les dénonciations pénales comme un outil contre leur opposition, en particulier si les personnes se trouvent en poste au gouvernement. Ce phénomène affecte de manière négative le climat politique et se traduit par une pression supplémentaire et non nécessaire sur le système judiciaire qui finit par être contraint de résoudre des conflits de nature politique. AKM : Quel point souhaiteriez-vous aborder pour terminer cette interview ? LAG : Je crois qu’il est intéressant d’attirer l’attention de vos lecteurs sur la complexité de l’Argentine de par sa diversité géographique et culturelle. En matière pénale, nous assistons à un phénomène d’inflation législative que l’on essaye de contenir. Le Parlement a une tendance à voter des nouvelles lois afin de démontrer que les politiques s’occupent des problèmes, et créé ainsi une sorte de « droit pénal symbolique », au lieu d’utiliser les ressources réelles dont ils disposent déjà. Il existe également des tensions préoccupantes entre le pouvoir judiciaire et les médias, mais ce sujet serait trop long à développer dans ce cadre...

Est-ce que vous êtes confrontés à ce nouveau fléau ? Quelles sont les sanctions les plus souvent prononcées en cas de délits impliquant des trafiquants de drogues ?

Remerciements à Monsieur le Juge, Luis Alberto Giménez au nom de la Confédération Nationale des Avocats.

Les sanctions sont très sévères. Pour du transport ou de la possession de drogue afin de la commercialiser, les peines sont de quatre ans minimum et dix ans maximum.

(c)AK MARTINEAU

AKM : Il y a quelques jours, un juge fédéral, José Luis Villede, basé à Salta, province Nord Argentin, frontalière de la Bolivie, expliquait dans le magazine d’actualité hebdomadaire français l’Express que l’Argentine était, depuis plusieurs années, un lieu de transit de la drogue, produite dans la Cordillière des Andes qui sépare l’Argentine du Chili, mais qu’elle était devenue plus récemment un lieu de fabrication où des laboratoires de cocaïne se multiplient.

LAG : Chaque région en Argentine est différente. La production est principalement un problème au centre et au Nord du pays.

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LAG : Il y a également une nouvelle tendance générale à la médiation afin d’éviter le litige. Dans le domaine pénal, le sujet génère des controverses.


CONFERENCE « PEOPLE ARTS TECHNOLOGIES » La semaine suivant le Campus Asie, orchestré par le Barreau de Paris à Phnom Penh1 avec succès, j’ai organisé une journée de conférences autour du droit de la propriété intellectuelle, plus particulièrement du droit des marques et du droit des brevets, à SIEM REAP. Pourquoi un tel choix ? J’ai voulu, tout d’abord, sensibiliser les cambodgiens au droit de la propriété intellectuelle. Il faut savoir que le patrimoine du Cambodge est très riche mais la technique n’a pas encore suivi... Le droit d’auteur existe dans le droit cambodgien mais le droit des brevets n’existe pas. Il convient d’enrichir nos règles et nos codes. Aujourd’hui il y a trois ministères au Cambodge qui ont des départements spécialisés dans la propriété intellectuelle.

Lieu important d’échanges économiques, culturels et politiques entre la Chine et l’Inde, les Khmers ont su adopter et faire coexister en harmonie les civilisations indienne et chinoise pour développer et faire émerger au fil des siècles une civilisation khmère, à l’instar de l’Empire romain qui s’est inspiré des civilisations grecque et égyptienne. Le développement économique de l’Empire Khmer était basé non seulement sur les connaissances scientifiques importées de l’Inde et de la Chine, aussi sur leur ingéniosité et créativité.

(c)AK MARTINEAU

J’ai voulu, ensuite, faire découvrir à mes Confrères, aux participants venus d’Europe et du monde entier, les temples proches de cette ville et particulièrement Angkor Wat. Angkor Wat, qui signifie « Cité », est l’ancienne capitale de l’empire Khmer qui étendit son hégémonie pendant plus de six siècles sur tout le bassin du Mékong, en Asie

du Sud-Est de la frontière chinoise à la frontière birmane. Du VIIème au XVème siècle, les rois successifs installèrent leur capitale à Angkor où des majestueux monuments et temples religieux furent édifiés. Du XIIème au XIVème siècle, la cité d’Angkor concentrait une population qui approchait les trois millions pour en faire la troisième mégalopole du monde après Pékin et Bagdad.

EUROPE & INTERNATIONAL

CAMBODGE - SIEM REAP

1-Carnet de notes de Philippe GIRARD-FOLEY en page 15 de ce numéro.

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EUROPE & INTERNATIONAL

Situé au carrefour de l’Inde et de la Chine, le Royaume du Cambodge hérite d’une riche civilisation khmère mais aussi d’un patrimoine culturel et artistique inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le dynamisme de la région a contribué à son développement économique et a porté sa croissance entre 1999 et 2008 à plus de 10%, soit juste derrière la Chine. La crise de 2008 a impacté sa croissance mais elle est maintenant repartie avec une prévision de 7,5% pour 2014. La capitale actuelle du Cambodge, Phnom Penh est située au confluent du Mékong, le plus grand fleuve de l’Asie du Sud-Est, et du Tonlé Sap, le plus grand fleuve-lac d’eau douce d’Asie du Sud-Est. Le Tonlé Sap est reconnu et protégé en tant que Biosphère de l’UNESCO.

(C) A-K Martineau

L’ASEAN, dont fait partie le Cambodge, regroupe neuf autres pays de l’Asie du Sud-Est à savoir : le Sultanat de Brunei, l’Indonésie, le Laos, la Malaisie, la Birmanie, les Philippes, la République de Singapour, la Thaïlande et le Vietnam. C’est une organisation politique, économique et culturelle. Initialement fondée en 1967 dans le contexte de la guerre froide pour faire barrage aux mouvements communistes, la coopération des Etats membres s’est renforcée depuis ces dix dernières années suivant le modèle de l’Union Européenne pour mettre en place des structures d’une communauté économique qui verra le jour en 2015. J’espère que ces conférences « People Arts Technologies » contribueront à ce nouvel élan et favorisera la découverte ou la re-découverte du Royaume du Cambodge par les avocats parisiens que j’aurai le plaisir d’accueillir plus nombreux, je l’espère, l’an prochain, en février.

Enfin, je souhaite faire connaître le Royaume du Cambodge à mes Confrères qui pourraient trouver des opportunités de développement pour leur activité à l’international. Le Cambodge a tourné la page d’un récent passé chargé d’histoires tumultueuses pour se focaliser sur son développement économique.

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(c)D.R

Tum THACH (c)D.R

En effet, il faut savoir que le Cambodge est actuellement membre de l’Association of South Est Asian Nations (ASEAN), de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et prochainement de l’Asia Pacific Economic Cooperation (APEC).


Betty NADJARIAN Betty Nadjarian est âgée de 28 ans. Elle est diplômée d’un Master II en droit du commerce international (Université de Paris X Nanterre), et d’une maîtrise en droit des affaires internationales (Université Paris 1- Panthéon-Sorbonne). Elève-avocate, stage final au sein du département arbitrage du cabinet Hughes Hubbard & Reed LLP.

Julien BOUTIRON (JB) : Vous avez adhéré à la Confédération Nationale des Avocats, lors de l’élection à la présidence de la section parisienne de Anne-Katel MARTINEAU, en janvier 2013? Pourquoi et qu’attendez-vous d’un syndicat ? Betty NADJARIAN (BN) : J’ai découvert la CNA lors d’une soirée « Vins et Fromages » organisée par le bureau de la CNA - PARIS à l’occasion de l’élection de Anne-Katel MARTINEAU au sein du cabinet SCHERMANN et MASSELIN. Cette soirée a été l’occasion d’échanger avec des avocats de toutes les générations. La Présidente proposait notamment de mettre en place en 2014, après sa première année de mandat, un système de référents pour accompagner les jeunes élèvesavocats dans la profession. J’ai considéré que l’idée était excellente et indispensable pour compléter la formation qui nous est dispensée à l’école d’avocats. J’ai donc adhéré comme de nombreux autres élèves-avocats, ce jour-là. Nous avons ainsi notamment pu suivre l’actualité de la section parisienne sur les réseaux sociaux et nous familiariser avec nos futures problématiques.

Concernant les actions d’un syndicat d’avocats, a priori, je dirais que s’agissant d’une profession libérale il est nécessaire que de telles structures existent pour la défense de la profession et il est aussi bienvenu de proposer des services ainsi que des rencontres conviviales telles que cette soirée pour se connaître entre Confrères. JB : Souhaitez-vous participer à ce projet référent en 2014 avec la section parisienne de la CNA?

LES ÉLÈVES - AVOCATS

(c)D.R

QUELQUES QUESTIONS À UNE ÉLÈVE-AVOCATE AYANT REJOINT LA CNA

BN : Oui, c’est attrayant ! Il semble en effet rassurant de pouvoir faire appel à un avocat (dans quelques semaines confrère) plus expérimenté lorsque nous devrons faire face à des problématiques inconnues jusqu’alors. Nous ne connaissons pas ou mal l’organisation de la profession. Il peut être utile d’obtenir des conseils pratiques pour bien débuter mais aussi pour répondre à nos questions en matière de déontologie par exemple. Mes amis, déjà avocats, m’ayant indiqué que le temps manque parfois au sein de son propre cabinet pour questionner les autres et parfois, on n’ose tout simplement pas… JB : Vous avez pu partir en stage en Malaisie ? Pourquoi ce choix ? BN : J’ai effectivement eu la chance d’intégrer un cabinet d’avocats situé à Kuala Lumpur. J’avais déjà eu une première expérience dans ce cabinet à l’occasion d’un stage « découverte » d’un mois lorsque j’effectuais mon échange universitaire au Japon à l’Université de Kobe dans le cadre de mon Master II. Je m’y suis plu, les dossiers étaient intéressants, les avocats et le personnel administratif étaient accueillants, respectueux et dynamiques. De plus, le cabinet était en pleine expansion. Lors de ma recherche de PPI, j’ai concentré mes efforts sur l’étranger. Me destinant à une carrière d’avocate en droit des affaires internationales je désirais avoir une expérience à long terme de la profession dans un environnement et une culture différente où je pourrais travailler en anglais. J’ai donc envisagé la Malaisie pour plusieurs raisons tenant principalement à la tradition juridique de ce pays : un mélange entre le droit de la Common Law et celui de la Shariah, de la langue de travail : l’anglais (surtout dans le département Corporate où j’étais rattachée), et enfin de la richesse culturelle de ce pays qui, coeur économique de l’Asie du Sud-Est, présente un mélange de civilisations et de cultures incroyables sans compter la très forte croissance de son économie ces dernières années. Tous ces éléments m’ont décidé dans mon choix, une expérience là-bas serait des plus judicieuse pour mes perspectives professionnelles, ai-je alors pensé. Tout me porte à croire en effet que l’Asie du Sud-Est est en plein boom économi que 27


LES ÉLÈVES - AVOCATS

et qu’elle concentrera très bientôt une grande partie des flux commerciaux asiatiques. D’ailleurs, le Barreau de Paris a organisé ces deux dernières années un Campus Asie, Philippe Girard-Foley a partagé son carnet de notes dans ce premier numéro. J’ai cru comprendre que le Bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier SUR allait poursuivre les Campus en Asie mais aussi en Afrique et au Brésil, ce sont de formidables opportunités de visibilité pour les avocats français, qu’il faut saisir !

Soirée vins et fromages de la CNA - PARIS.

JB : Que tirez-vous de cette expérience ?

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BN : Cette expérience a été au-delà de mes attentes et ce, tant sur le plan professionnel que personnel. J’ai tout de suite été intégrée dans le cabinet, impliquée dans des dossiers d’une certaine importance, n’hésitant pas à me confier des responsabilités et à m’emmener en meeting en Assemblée Générale ou en data room par exemple, ce qui m’a permis de découvrir l’approche asiatique de la négociation contractuelle et la pratique du droit anglosaxon. J’ai pu côtoyer des personnes issues de cultures différentes (chinois, malais, indiens) et de confessions très variées (chrétienne, musulmane, bouddhiste, hindouiste). De plus, je n’étais pas la seule stagiaire d’origine étrangère. En effet, le cabinet dispose d’un « Japan desk » qui accueille aussi des élèves-avocats japonais. Ce fut pour moi l’occasion rêvée de pratiquer mon japonais, voire de travailler en relation avec la clientèle japonaise.

Quelques élèves-avocats...

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Betty Nadjarian recherche une première collaboration dans un cabinet de taille moyenne ayant une activité tournée vers l’international avec des dossiers impliquant des problématiques de contrats internationaux, de droit international privé et si possible une activité de contentieux et des MARC (Modes Alternatifs de Résolutions des Conflits), tels que des dossiers d’arbitrage. Vous pouvez adresser vos offres de collaboration à l’adresse du bureau parisien de la CNA : bureau@cna-avocats-paris.fr

Quelques invités...

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Jean-Louis SCHERMANN

Heidi RANÇON-CAVENEL

Président d’honneur de la CNA : 2008 - 2009

Président d’honneur de la CNA 2012 - 2013

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Anne-Katel MARTINEAU, entourée des Présidents d’honneur de la CNA et de la CNA - PARIS

Jacqueline SOCQUET-CLERC LAFONT

Vincent LEJEUNE

Président d’honneur de la CNA - PARIS et de la CNA 1988 - 1989

Président de la CNA - PARIS : 2009 - 2013


CULTURE VENDREDI 16 MAI 2014 DE 20 HEURES À 22 HEURES en podcast sur notre site Internet : www.laplumeetlavoixdesavocatsparisiens.org Première partie : L’avocat dans la cité Nawel OUMER, Elue dans le 11ème arrondissement de Paris, Conseillère déléguée à la petite enfance et à la protection de l’enfance. Co-animateurs: Anne-Katel MARTINEAU et Bertrand PAVLIK Deuxième partie : Le secret professionnel Guillaume LE FOYER DE COSTIL, Président de la Commission des Règles et usages du Conseil National des Barreaux (CNB) Président d’honneur de la CNA et d’autres invités...

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MUSIQUE : JEAN - LOUIS AUBERT CHANTE HOUELLEBECQ « LES PARAGES DU VIDE » Il est des instants privilégiés et rares ! L’écoute du dernier disque de Jean-Louis AUBERT en est un. C’est un Grand OEuvre musical et Jean-Louis AUBERT est un alchimiste qui a trouvé la Musique Philosophale ! C’est tout simplement un chef-d’oeuvre ! Que dire de plus des textes de Michel HOUELLEBECQ qu’il chante ? Ils sont magnifiques et leur musicalité est parfaitement mise en valeur par Jean-Louis AUBERT. La musique de Jean-Louis AUBERT nous fait ressentir l’émotion du poète. En effet, chacun des mots de ses textes est ciselé par le chant et la musique de Jean-Louis AUBERT, tel un tailleur de pierres, pour nous construire une magnifique cathédrale musicale. Les seize chansons de cet opus majeur, tout en étant, chacune, une invitation au voyage, au sens « baudelairien » du terme, constituent un univers cohérent.

Je ne peux que vous inviter à courir vous le procurer dès sa sortie prévue pour le 14 avril prochain pour vous embarquer dans un magnifique voyage à la recherche du second secret ! Bertrand PAVLIK

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(c) Barbara d’Alessandri

La pochette est également somptueuse. Elle est illustrée par de splendides photographies de Barbara d’ALESSANDRI qui subliment encore d’avantage cet album, ce qui est très fort ! Par ses photographies, qui constituent de véritables tableaux, Barbara d’ALESSANDRI a su reproduire parfaitement la lumière générée par la rencontre de deux grands esprits et artistes de notre temps. Il faut profiter de ces oeuvres qui vous permettent de vous élever !

Parlophone Music France. A Warner Music Group Company. Sortie le 14 avril 2014 - Prix: 15,99 euros


CULTURE

L’ART CONTEMPORAIN À LA MAISON DU BARREAU DE PARIS : CNA’RT 2ÈME ÉDITION

en bronze ou en cristal illuminant ainsi le salon de l’Horloge. Les empreintes des roues de véhicule fixées et sublimées grâce au photographe Gérard Tordjman, nous firent voyager à travers les continents : en Amérique du Sud avec les empreintes en Patagonie, en Afrique avec celles laissées au Sénégal, en Amérique du Nord avec celles du Canada etc…

oeuvres de Gregos

Géraldine Banier s’était absentée de sa jolie galerie au 54 de la rue Jacob pour nous présenter une oeuvre spectaculaire d’Helder Batista, Napalm, qui symbolise la pollution, l’empreinte que l’homme ne devrait pas laisser.

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Pour la deuxième édition de CNA’RT, j’endossais le rôle de curatrice en organisant l’exposition sur le thème «Empreintes», celle que l’artiste laisse, celle que l’Homme laisse... Les Confrères étaient nombreux pour cette deuxième édition à venir admirer les oeuvres des artistes représentés par des Galeries prestigieuses : Georges-Philippe et Nathalie Vallois, Géraldine Banier et Lélia Mordoch, pour la seconde année consécutive.

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Le 24 octobre 2013, l’art contemporain envahissait à nouveau la Maison du Barreau en parallèle de la Foire Internationale d’Art Contemporain au Grand Palais grâce à la section parisienne de la Confédération Nationale des Avocats.

Nous avons eu la chance de pouvoir présenter aux spectateurs les mains en résine de Gilles Barbier 1, oeuvres prêtées pour la première fois par la Galerie Georges- Philippe et Nathalie Vallois. Ces mains hyperréalistes, empreintes des mains de l’artiste, formaient une superbe forêt de signes dans le salon de Harlay. Le Street Art quittait les rues ce soir-là grâce à la célèbre MissTic et à l’artiste Gregos qui exposait les empreintes de son visage teintées de bleu Klein, de rouge ou réalisées en

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Salons de la Maison du Barreau

oeuvre de Helder Batista - Courtesy Galerie Géraldine Banier

Si la technique de l’empreinte artistique était bien illustrée par cette exposition, il était tentant de s’interroger sur un art qui ne s’intéresserait plus à une forme concrète mais à un concept, celui de l’empreinte du mouvement, par exemple, avec la toupie de Laura Nillni, afin d’envisager ainsi un art dématérialisé et laisser vagabonder notre imagination pour être l’artiste d’un soir.

1-L’artiste exposait en parallèle de CNA’RT à la FIAC et au Musée d’Histoire Naturelle de Paris.

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Un Confrère intrigué, devant l’oeuvre de Laura Nillni, m’interpella en me disant que si l’on pouvait considérer que l’oeuvre de cette artiste représente une empreinte alors, selon lui, tout pouvait l’être. Son interrogation me ravit puisqu’elle prouve que l’art contemporain suscite à chaque fois des polémiques et des réactions diverses. L’angle de réflexion choisi pour cette exposition est que l’empreinte n’est pas seulement celle que l’on constate à l’oeil nu et qui reste gravée dans la matière choisie ou non par l’artiste, il s’agit aussi de l’empreinte légère et éphémère, celle qui s’évapore tel un parfum. L’importance de l’immédiateté était soulignée en faisant un hommage à Marcel Duchamp et à l’Erratum musical 2, son empreinte musicale. Il y a un peu plus d’un siècle, en 1913, il composa, en effet, une petite chanson, qu’il chanta avec

ses deux soeurs, sur l’empreinte « Faire une empreinte, marquer des traits, une figure sur une surface, imprimer un sceau sur cire… ». L’année 1913 est rappelons-le l’année qui marque l’invention du ready-made 3, Marcel Duchamp introduit pour la première fois dans la composition musicale le hasard afin de se libérer d’une part, de l’intentionnalité dans l’acte créateur de l’artiste et d’autre part, de la notion de goût par l’indifférence esthétique. Les discussions lors du cocktail CNA’RT autour de l’esthétique de l’empreinte et de l’existence même de l’empreinte, qu’elle fusse musicale, lumineuse ou fugace tel le mouvement d’une oeuvre, se poursuivirent tard entre artistes et confrères. Nous espérons vous surprendre pour la 3ème édition en octobre prochain de CNA’RT et vous y retrouver encore plus nombreux !

(c)Iéna Rosaria de Assis

Anne -Katel MARTINEAU

oeuvre de Laura Nillni - Courtesy Galerie Lélia Mordoch 2 - « Le texte d’Erratum Musical qui est la définition du verbe imprimer, doit se répéter 3 fois par 3 personnes, sur 3 partitions différentes composées de notes tirées au sort dans un chapeau. L’idée est, pour Duchamp, de découper des cartes et d’y inscrire, sur chacune d’entre elles, une note de musique ; elles seront ensuite disposées dans un chapeau puis mélangées et sélectionnées au hasard. Une fois tirée au sort, chaque note est reportée sur du papier musique et réintroduite dans le chapeau. Duchamp reproduit ce processus vingt-cinq fois » Images Re-vues, Paysages sonores, 7-2009. 3 - André Breton définit le ready- made comme un « objet usuel promu à la dignité d’objet d’art par le simple choix de l’artiste». La définition dans Wikipédia est la suivante : « L’attitude du ready-made consiste, initialement, à simplement choisir un objet manufacturé et le désigner comme œuvre d’art. Initiée par Marcel Duchamp, cette démarche a donné naissance à une grande partie des pratiques artistiques actuelles, qu’elles s’en réclament ou s’en défendent. Le ready-made a remis en question un certain nombre de certitudes sur lesquelles reposait l’art, comme les notions de virtuosité et de savoir-faire ou encore d’œuvre, conçue désormais comme résultante de l’exposition et de l’acte de nommer. Effectivement, les ready-made sont des œuvres d’art qui n’ont pas été réalisées par l’artiste, ce dernier n’intervient en effet que pour les sélectionner, changer leur contexte et leur statut par la désignation (l’affirmation « ceci est une œuvre d’art », entonnée par Marcel Duchamp faisant dès lors acte de redéfinition) ».

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L’auteur de cet ouvrage est Richard Wiseman un psychologue anglais auteur de nombreux ouvrage notamment sur la chance dont un best seller : « notre capital chance ».

- n’hésitez pas à offrir du café à vos clients, les personnes qui viennent de consommer de la caféine se laisseraient plus facilement convaincre.

CULTURE

LIVRES : 59 SECONDES POUR PRENDRE LES BONNES DÉCISIONS DE RICHARD WISEMAN

Alors méfiez-vous lorsque l’on vous offre un café ! 59 secondes pour prendre les bonnes décisions Ecrit par Richard Wiseman Edité par Marabout Nombre de pages 288 Prix 5,90 € Dépôt légal août 2012 (2ème édition) ISBN 9782-50106-819-2

Loin d’être un exposé théorique interminable, s’inspirant d’études émanant principalement d’université américaines, ce livre dévoile certains des secrets de nos comportements, de nos pensées et de nos actions. La plupart des chapitres sont courts. A la fin de chacun d’entre eux se trouve une rubrique intitulée : « 59 secondes chronos » qui donne les idées forces à retenir. Les thèmes abordés sont très nombreux comme par exemple : le persuasion, le bonheur, le régime, la créativité, la séduction, le couple, les enfants. (c)D.R

Des idées diverses et variées y sont développées :

Julien BOUTIRON

- le fait de demander un service à quelqu’un est un moyen de se faire apprécier ; - en cas de perte de son portefeuille, vous avez plus de chance que celui-ci vous soit restitué, s’il contient la photo d’un bébé ; - lors d’une réunion le fait de se placer au centre de la table permet de faire meilleure impression. Sur une photo, il est recommandé de se mettre au centre également dans le même but ; - le fait de disposer des plantes dans son bureau ou la vue sur une pelouse ou un espace vert est moyen de stimuler sa créativité ; - il faut se méfier des personnes qui commencent par une requête modeste et qui escaladent progressivement en demandant le doigt, puis la main puis le bras ; - comment établir un plan d’action pour lutter contre la procrastination qui est la faculté de l’être humain à remettre au lendemain ce qui peut être fait le jour même ; 33


LIVRES : SCI - POURQUOI? QUAND? COMMENT? EVITER LES PIĂˆGES, PROďŹ TER DES AVANTAGES Le comitĂŠ de rĂŠdaction de la Plume des Avocats Parisiens a aimĂŠ ce guide ĂŠcrit par l’un des plus grands spĂŠcialistes de la fiscalitĂŠ du patrimoine, Fabrice de Longevialle Faut-il vraiment choisir la SCI ? VoilĂ bien une question au coeur des prĂŠoccupations des investisseurs immobiliers. . . et de leurs conseils. Cet ouvrage traite le sujet très Ă fond. En dĂŠtaillant les avantages susceptibles d’être retirĂŠs de l’utilisation de cette formule sur le plan juridique, fiscal et financier, mais sans omettre de signaler certaines contre-indications.

ine e patrimo Gestion d

Le livre-bilan sur la SCI qui permet d’aller droit à l’essentiel.

Ecrit par Fabrice de Longevialle Editions Eyrolles Nombre de pages 152 Prix 20 euros 34


CULTURE

LIVRES : 100 IMAGES QUI ONT FAIT SCANDALE Après le succès de la première édition sortie en 2011, une nouvelle version, composée d’images du XXème siècle, est désormais disponible. L’auteur de ce livre, notre Confrère, Emmanuel Pierrat, qui se dit atteint de « collectionnite aiguë de choses interdites et censurées » depuis plus de 20 ans, a choisi de nouvelles images de l’actualité récente. Elles ont toutes fait l’objet de condamnations, d’anathèmes, d’autodafés, de manifestations ou de débats. Emmanuel Pierrat a su mettre en exergue notre patrimoine culturel composé en partie de ces images qui ont contribué à bousculer les idées et les préjugés, voire les pouvoirs en place, en abordant des sujets aussi divers que la religion, le racisme, la maladie, la science et la pornographie. Si l’époque actuelle semble plus libérale du fait de la profusion d’images, il semblerait que nous allions vers plus d’interdictions. Cette sélection illustre bien le fait que l’appréciation du caractère scandaleux d’une image est à géométrie variable. A vous d’en juger en redécouvrant les affiches de cinéma, les pochettes de disque, les publicités ou encore les dessins de presse, oubliés ou à jamais gravés dans nos mémoires, qui composent ce livre.

(c)Cédric Roussel

(c)Cédric Roussel

Anne -Katel MARTINEAU

Écrit par Emmanuel Pierrat Édité par Hoëbeke, Paris Nombre de pages 178 Prix 15€ Dépôt légal octobre 2013 (2ème édition) ISBN 9782-84230-484-3

Anne-Katel MARTINEAU et Emmanuel PIERRAT lors d’une séance de dédicaces à la librairie Picard et Epona.

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MÉMOIRE DES COULEURS Un voyage à travers le monde des couleurs et trÊsors culturels une oeuvre de Jaime Ocampo - Rangel

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Parce que saisir les images des dernières ethnies authentiques de ce monde est primordial, MĂŠmoire des Couleurs ĂŠcrit l’histoire de l’humanitĂŠ en dĂŠcomposant le prisme de la lumière en un ÂŤ arc-en-ciel des cultures humaines Âť. C’est un tĂŠmoignage responsable qui incite Ă une très sĂŠrieuse prise de conscience sur l’Êtat du monde, l’Êvolution des hommes et de leur culture, ainsi que la prĂŠservation de leur patrimoine, de leur BeautĂŠ tout simplement. Contact : jaimeocamporangel@me.com - site web : www.memoiredescouleurs.com =V\Z WV\]La WHY[PJPWLY n SÂťH]LU[\YL L[ UV\Z HPKLY n Ă„UHUJLY JL WYVQL[

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BULLETIN D’ADHÉSION 2014 A retourner accompagné de votre chèque libellé à l’ordre de l’Association La Plume et la Voix des Avocats Parisiens à : La Maison des Associations du 6ème arrondissement A l’attention du bureau de l’association La Plume et la Voix des Avocats Parisiens 60-62, rue Saint-André des Arts 75006 PARIS Vous souhaitez participer au projet de la Plume et la Voix des Avocats Parisiens à travers notre magazine et notre émission de radio, rejoignez-nous en adhérant à l’association! C’est à vous! COORDONNÉES : Madame

Monsieur

Nom: Prénom : Adresse postale : Adresse email : Tél. fixe : Tél. portable : Barreau : Domaine d’interventions : Spécialisations : Cotisations : cotisation avocat au Barreau de Paris 120 euros - cotisation élève-avocat 20 euros Date: Signature:


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C O N F E D E R AT I O N N AT I O N AL E D E S AV O C AT S COTISATIONS ANNÉE 2014 La cotisation donne droit à une assurance groupe * CNA au titre de l’année 2014. L'adhésion emporte adhésion au CNAE (Centre National des Avocats Employeurs) pour ceux qui ne sont pas avocats salariés non associés.

- Cotisation normale ………………………………............................ ou cotisation de soutien à partir de ... ... - Avocats 5 premières années d'exercice …………………………... - Avocats Honoraires et Correspondants étrangers (pas d'assurance) - Elèves avocats (pas d'assurance) .………………………………… total …………………………….. En cas d'adhésion de plusieurs avocats associés de la même structure d'exercice, ajoutez à la première cotisation (normale ou de soutien) 200 € par avocat supplémentaire, soit 200 € x = TOTAL PAYÉ …………………………………………………………..

360 € * 500 € * 150 € * 80 € gratuit -------------€

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Joindre le chèque correspondant à l'ordre de la CNA

Nom : ………………………………… Prénom …………………………………………. Barreau de : ……………………………………………………………………………….. Adresse : …………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………….. Tél. : ……………………………………… Télécopie : ………………………………….. E. mail : (merci d'écrire lisiblement) Date de prestation de serment : …………………………………………………………. Activités dominantes (facultatif)…………………………………………………………….. ……………………………………………………………………………………………….. Spécialisations : …………………………………………………………………………… STATUT : avocat libéral

individuel

ou associé **

ou collaborateur

ou avocat collaborateur salarié En cas d'adhésion de plusieurs associés de la même structure d'exercice, merci de préciser les noms, coordonnées et autres données pour chacun d'eux et préciser le type et nom de la structure d’exercice (sur une feuille supplémentaire si nécessaire). * Seuls sont assurables les avocats en exercice et à condition de ne pas avoir 70 ans et plus en cours d’année civile, voir sur notre site les conditions de cette assurance. ** dont avocat associé salarié de sa structure

Siège social : 120, RUE D'ASSAS - 75006 PARIS

Téléphone 01.43.54.65.48 http://www.cna-avocats.fr

Télécopieur 01.43.54.75.09 ˃ E-mail : cna-anased@wanadoo.fr


La Maison des Associations du 6ème arrondissement 60-62, rue Saint-AndrÊ des Arts 75006 PARIS

www.laplumeetlavoixdesavocatsparisiens.org


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