LATITUDES 2.1 FRENCH VERSION Low

Page 1


Latitudes

AVENTURES EN BLEUS

EQntre ciel et roi, la couleur éternelle de la reine Sirikit donne le ton de cet éditorial, azuré à l’heure bleue qui sied aux bouclages. Pertinemment, le bleu, couleur du cérébral et de la communication, porte également la symbolique de con ance, de abilité et de résilience.

Ce numéro 1 de la nouvelle série de Latitudes, avatar mook rayonné entre livres et magazines, par une étrange synchronicité s’en va justement s’incarner chez notre imprimeur siamois un vendredi, jour céruléen qui vit venir au monde celle que tout le Siam pleure, la reine mère de Thaïlande.

En cette période de deuil national, l’ambiance se trouve plutôt au blues et notre phœnix de papier s’ouvre donc sur une œuvre d’art colorée de bleus gris, en respectueux hommage. Mais les émouvantes notes bleues siéent aussi élégamment à la renaissance…

Peu d’ouvrages illustrent aussi parfaitement que le château de Fontainebleau Monarchie et Renaissance. François 1er, roi des galeristes, y exposait notamment sur ses épais murs des chefs d’œuvres de maîtres italiens. Parmi eux gurait l’énigmatique sourire de Mona Lisa, autoportrait transgenre de son protégé Léonard de Vinci.

Dans ce cadre royalement artistique, le regretté monarque Rama 9 t en 1947 la rencontre de SA princesse : Sirikit, lle de l’ambassadeur de Thaïlande en France et arrière-petite- lle du roi Chulalongkorn.

Or, c’est sous le règne de ce dernier que démarra la modernisation du Siam.

Rama V ne se contenta pas de réformer la gouvernance, les lois ou l’administration, il assura également l’indépendance de son pays face aux velléités coloniales et abolit l’esclavage…

Son sincère intérêt pour les arts et son obsession du modernisme le poussèrent à introduire en son royaume la perspective, le réalisme et les techniques européennes. Premier souverain thaï à comprendre le pouvoir de l’imprimé, il fut un pionnier du soft power royal, lançant le concept de publication d’images iconiques dans les journaux, à commencer par son altier visage.

Cette période correspond d’ailleurs à la naissance de la presse moderne en Thaïlande. De bons auspices ?

SOMMAIRE

06 DESIGN

Enter Projects Asia

14 VIRGINIE BROQUET in The Groove

32

GALLERIES’ NIGHTS 2025

12 ans d’art tard

40

FARANG & THAI

Je t’aime, moi non plus !

52

LES AVENTURES D’ASTÉRIX dans la BD thaïlandaise

60 FRITES

Françaises ou belges, alors ?

62 TINTIN EN THAÏLANDE

Histoires siamoises de Farangs...

69 JAPON

Plongée en culture nippone

116

ASTEROÏDES

Le Scrutateur dégagé

ARTISTES SAUVETEURS

Solidarité en Thaïlande 138

PASSE TON BACC Steph s’expose 144

PHOTO, MON POTO

Flash sur Naghasch

154

QUI VA PIANO CLARA & Christian

160 WONDERFRUIT 2025

9 légendes + 1

184

MIXE Les légendes de DJ Deep

192 THE GROOVE FESTIVAL

Retour vers le futur 198

ART URBAIN Un Éléphant rose...

UNE DOUCE RÉBELLION

Enter Projects Asia a été créé comme une douce rébellion contre les méthodes modernes de conception et de construction qui ont conduit à une perte de détails dans l’architecture et à une préférence pour des matériaux non durables. En réponse, Patrick Keane a fondé son cabinet sur la volonté de mettre en valeur une conception architecturale artisanale, durable et originale, à l’échelle commerciale.

Sur le plan esthétique, Enter Projects Asia s’inspire de la géométrie et du mouvement naturels, évitant les lignes angulaires dictées par les matériaux de construction produits en série, et optant plutôt pour des formes curvilignes et sculpturales. Les principes du design biophilique guident leurs décisions dans le but de créer une di érence, un sujet de conversation, un caractère et un sentiment que tous les utilisateurs adoptent.

Déjà présenté dans Latitudes en 2018, Enter Projects Asia a depuis, malgré un contexte mondial di cile, décuplé son activité !

« Je pense que notre travail est contemporain et qu’il touche les gens, » résume son dirigeant, Patrick Keane.

« Nos créations font écho à un moment présent très intense, tout en restant respectueuses du passé et attentives à l’avenir et aux générations qui le vivront.

Chaque projet est analysé individuellement a n d’en comprendre les caractéristiques, l’impact et la progression de la lumière naturelle. Des ux de mouvement directionnels uides et intuitifs sont minutieusement conçus pour garantir des espaces faciles et agréables à parcourir.

Nous prenons le temps de connaître les aspirations de nos clients et la personnalité de leur marque, et nous concevons toujours nos projets en pensant à l’utilisateur nal. »

 www.enterprojects.net

 https://issuu.com/magazinelatitudes/docs/latitudes_12_def/68

SIÈGE SOCIAL INSPIRÉ DE LA NATURE POUR VIKASA, BANGKOK

Enter Projects Asia Design

« Nous avons cherché à créer un espace qui imite le monde naturel et re ète le cycle sans n de la vie. Le résultat est un espace d’un calme captivant, enveloppé d’une satisfaction tranquille, une oasis de tranquillité au milieu du chaos de Bangkok. » Patrick Keane, directeur de la conception chez Enter Projects Le bâtiment phare de la marque de yoga leader à Bangkok symbolise les idéaux de Vikasa en matière de santé, de bien-être et d’évolution. En utilisant ses géométries caractéristiques, Enter Projects Asia a facilité la fusion des technologies 3D avec l’artisanat thaïlandais local a n d’apporter la nature dans un contexte urbain. Tous les éléments du projet ont été fabriqués à partir de matériaux naturels locaux : bois dur thaïlandais, rotin, feuilles de palmier et ardoise noire locale.

 www.enterprojects.net/projects/chiang-mai-gallery

 Photography by Ed Sumner / www.edmundsumner.co.uk

VACHERON CONSTANTIN, BANGKOK

Art, artisanat et technologie

Enter Projects Asia inaugure une nouvelle ère d’expériences de vente au détail à Bangkok avec une boutique à Siam Paragon, qui abrite les montres Vacheron Constantin. Ce projet allie tradition intemporelle et innovation contemporaine, célébrant l’héritage de l’horlogerie tout en repoussant les limites du design, de l’artisanat et de la durabilité. Chaque tissage de la boutique raconte une histoire : le processus méticuleux de tissage du rotin s’inspire du guilloché, chaque ligne étant conçue pour incarner le dévouement qui caractérise les montres complexes de Vacheron Constantin. Avec sa superbe collection de sculptures en rotin, la boutique crée une harmonie dans tout l’espace. Les tons naturels du rotin, rehaussés par des techniques de coloration uniques, invitent les visiteurs à s’intéresser à l’art.

 www.enterprojects.net/projects/vacheron-constantin

SPICE & BARLEY, BANGKOK

« La forme et la fonction doivent ne faire qu’un, unies dans une union spirituelle. »

Spice & Barley Bangkok est un salon gastronomique servant une cuisine d’Asie du Sud-Est préparée par le célèbre chef Sam Leong, accompagnée de bières artisanales belges exclusives.

Le site surplombe la rivière Chao Priya et les structures naturelles en rotin font o ce de tours jumelles, faisant référence aux gratte-ciel en arrière-plan.

Les vastes géométries en rotin inondent le plafond d’une balustrade ininterrompue de torsions et de courbes qui re ètent la lumière et deviennent un phare visible de loin…

En mars 2020, alors que le pays était con né, Enter Projects Asia a achevé l’installation du design, conformément au cahier des charges initial. Le design du Spice and Barley est intrinsèquement asiatique, un mariage phénoménal d’idées, créant un espace dans lequel on sent instinctivement que le client et l’architecte se sont parfaitement compris : introduire l’innovation et la conscience écologique au niveau commercial de la construction.

 www.enterprojects.net/projects/spice-barley

 Photographie : William Barrington-Binns / www.wbbandco.com

ORGANIQUE

SOUTH PALMS RESORT & SPA

Découvrez une série d’expériences architecturales qui brouillent les frontières entre l’art, la durabilité et la nature, au cœur de Bohol, sur les côtes de Panglao, aux Philippines.

La commande demandait à Enter Projects Asia plus que du luxe : elle exigeait une responsabilité écologique, une forme organique et un dialogue avec le paysage côtier.

La vision d’EPA était de redé nir l’architecture hôtelière comme une extension vivante de son environnement. « Avec le rotin, nous concevons des installations sculpturales qui évoquent l’élégance de la nature », explique Patrick Keane, directeur d’Enter Projects Asia. « Ces pièces créent un lien harmonieux et subliminal entre les humains et leur environnement naturel. »

Panglao Shores est désormais une nouvelle référence en matière de luxe côtier, un lieu où les matériaux durables, le savoir-faire artisanal de pointe et l’art local convergent pour créer une destination à la fois époustou ante et respectueuse de l’environnement. Plus qu’un simple complexe hôtelier, il cherche à donner aux Philippines une nouvelle identité sur la scène mondiale : progressiste, avant-gardiste et porte-drapeau d’une nouvelle ère dans la conception hôtelière durable.

 www.enterprojects.net/projects/panglao-shores

KEMPEGOWDA INTERNATIONAL AIRPORT

Enter Project Asia a réussi à créer un contraste saisissant avec les super aéroports emblématiques, mais impersonnels du passé et sert de nouveau modèle pour l’utilisation des principes et des matériaux associés à la conception du bien-être à l’échelle industrielle.

Enter Projects Asia a conçu, livré et construit les intérieurs de la zone de départ post-sécurité de 12 000 m2 de l’aéroport international de Bengaluru.

L’espace, qui comprend des zones de vente au détail, d’accueil et de détente, a été conçu à l’aide de plus de 9 km de rotin et présente des techniques de fabrication artisanale à une échelle jusqu’alors inimaginable.

« Quand on pense aux structures en rotin, aux charpentes en bambou, aux éléments faits main, au bois, on pense à un lieu de bien-être, quelque part au bout du monde. Mais maintenant, on les voit dans un aéroport qui accueille 20 millions de visiteurs par an, alors on se dit : “Mais qu’est-ce qui se passe ?” Le bien-être est devenu mainstream. Quand on touche une capsule, on a l’impression de toucher un arbre. On n’a pas l’impression de toucher un mur. EPA redé nit ces matériaux et leurs applications. » Patrick Keane.

 www.enterprojects.net/projects/kempegowda-international-airport

CHIANG MAI GALLERY

Idéologies contemporaines du design : espace uide, techniques de travail paramétriques et formes dynamiques qui ne peuvent être observées d’un seul point de vue.

Enter Projects Asia a été chargé de concevoir une galerie pour un collectionneur d’art à Chiang Mai, composée de plusieurs pavillons intérieurs entourés de jardins complexes avec des sculptures extérieures et des jeux d’eau décoratifs. Le propriétaire, collectionneur passionné, souhaitait concrétiser son ambition de toute une vie : exposer les trésors qu’il avait rassemblés pendant 50 ans. La galerie expose des œuvres d’art sur mesure, utilisant des matériaux entièrement naturels, et sa collection internationale d’argenterie, de porcelaine ne et de porcelaine comprend la plus grande collection Wedgwood d’Asie du Sud-Est.

« Nous avons cherché à créer une expérience immersive, en donnant à l’espace une chaleur et une profondeur inhabituelles dans les galeries d’art conventionnelles », déclare Patrick Keane. « Les designers doivent rechercher des formes alternatives de présentation de l’art, di érentes des expositions cliniques et aseptisées que nous connaissons tous. Les galeries d’art du futur seront des organismes vivants et des expériences multidimensionnelles, plus étroitement liées aux environnements dans lesquels nous vivons. L’art est une représentation de la vie ! »

 www.enterprojects.net/projects/chiang-mai-gallery

De New York à Tokyo, de Saint-Louis du Sénégal à Shanghai, l’artiste française

Virginie Broquet, voyage, dessine, observe le monde. Munie en permanence d’un carnet et d’un stylo, elle capture des scènes au détour d’une rue, des instantanés qui racontent sa curiosité d’ailleurs et des autres. Chaque image, comme un tableau, devient alors une aventure!

VIRGINIE BROQUET in The

Groove

Artiste, dessinatrice et scénariste de BD,Virginie Broquet, née le 5 février 1968, à Nice, réalise également des illustrations pour l’édition, la presse, la publicité et la mode. Pour cette insatiable globe-trotteuse, chaque périple est l’occasion de ramener dans ses valises des carnets de voyage illustrés des scènes de la vie de tous les jours, des instantanés qui racontent le quotidien. De ses carnets de voyage naissent ensuite de grandes toiles peintes en techniques mixtes composées de dessin au trait, aquarelle et collage. En septembre 2016, Virginie Broquet présentait ses œuvres dans la capitale thaïlandaise, à l’occasion de deux expositions simultanées : « Bangkok Mon Amour » à l’Alliance française et «Les caprices de Maggie» au

Maggie Choo’s, avec des illustrations du célèbre club qui plonge ses invités dans le Shanghai des années 1930. À travers ses dessins, l’artiste exprime sa passion pour le Pays du Sourire. Pour elle : « Bangkok, c’est à la fois la Chine, le Vietnam, l’Inde… c’est beau, c’est magique, c’est un voyage dans l’espace et dans le temps»

Virginie, raconte-nous un peu la genèse de ta nouvelle expo à Bangkok

J’ai suivi la première édition du Groove festival l’an dernier grâce à l’équipe, qui m’a proposé de venir croquer l’événement dans mes carnets et de réaliser donc sur le vif The Groove sketchbook.

J’ai tout de suite était enchantée à l’idée de suivre un festival électro, a fortiori en Thaïlande, de Bangkok à Koh Phangan et Koh Tao! J’adore depuis toujours cette musique cérébrale et sensitive. J’ai déjà voyagé dans des festivals comme le « Sonar » à Barcelone ou en Hollande. Ce fut une expérience incroyable et passionnante, quasi hors du temps, entourée de personnes adorables, avec des couchers de soleil et des lieux magiques!

Quel beau souvenir, un chouette carnet également où j’ai retranscrit chaque ambiance au sein des di érents décors. Le festival m’avait fait porter à Koh Tao une toile de 10 mètres, que j’ai commencée sur le Serene pendant la boat party et terminée sur place sur la plage de Saï Tong !

Un vrai bonheur pour une artiste qui aime croquer en Live. Et je suis vraiment très heureuse que ce travail participe aux Galleries’ Nights à Bangkok le 21 novembre prochain, a n de partager ces beaux moments vécus intensément.

Tu as des affinités particulières avec la Thaïlande…

Cela fait déjà une vingtaine d’années que je voyage en Thaïlande. C’est le pays d’Asie où je suis allée le plus ! J’aime beaucoup voyager et croquer l’Asie. Bangkok reste ma ville favorite avec sa Chao Phraya si inspirante. En résultent plusieurs carnets croqués à di érentes époques que j’aimerais bien exposer un de ces jours.

J’ai eu la chance de dessiner la sublime résidence de France sur les bords du euve dans le cadre de mon ouvrage Sur la route des ambassades de France aux éditions de La Martinière en collaboration avec les archives du Quai d’Orsay.

À la librairie française de l’Alliance se trouvent deux de mes ouvrages : Suzie Wong et les esprits et Sur la route des ambassades de France.

J’ai également eu le privilège d’exposer au Peninsula, à l’Alliance française, au Maggie Choo’s, de réaliser des « head beds» pour le groupe Accor, de créer une série limitée de foulards Jim Thompson et de dessiner une ligne de make up pour une marque locale : Vie.

Latitudes a rencontré Khun May de Vie Cosmetics afin de comprendre pourquoi et comment une marque de make-up
thaïlandaise se retrouve à travailler avec une artiste globe-trotteuse…

Pourquoi avoir choisi Virginie Broquet pour votre marque?

Notre collaboration avec Virginie a débuté en 2018. À l’époque, nous avions été profondément impressionnés par son style artistique unique. Sa manière de capturer les eurs grâce à sa technique de colorisation délicate et de représenter les personnes avec une telle individualité et un tel sens moderne. Ses œuvres sont vraiment uniques en leur genre.

Nous avons présenté ses œuvres pour la première fois dans notre collection «Blossom in the City» et, depuis, nous continuons à suivre son parcours créatif avec admiration.

L’art de Virginie, inspiré par ses voyages à travers le monde, notamment en Thaïlande et en Asie, exprime magnifiquement la diversité de la beauté féminine. Chaque femme, quelle que soit sa culture, est belle à sa manière.

Compte tenu de son lien profond avec l’Asie, qui représente également notre marché principal, Virginie est devenue la partenaire idéale pour nous.

Sa vision correspond parfaitement au concept de notre marque : « La beauté est universelle ». Cette année, nous sommes ravis de présenter à nouveau ses œuvres sur nos emballages.

Comment avez-vous travaillé ensemble?

Travailler avec Virginie est toujours très facile. Elle reste dèle à elle-même et crée avec son cœur. Nous ne lui avons jamais donné de consignes strictes. Au lieu de cela, nous avons sélectionné parmi ses œuvres existantes celles qui correspondaient le mieux à nos produits.

Les artistes créent leurs meilleures œuvres lorsqu’ils sont libres, et c’est exactement ainsi que cette collaboration s’est épanouie. C’est une combinaison parfaite! Une harmonie naturelle entre créativité et beauté.

Comment les domaines de l’art et de la beauté se rencontrent-ils et quelle importance cette relation a-t-elle pour vous?

Sur le marché actuel de la beauté, les consommateurs se connectent visuellement à une marque, souvent avant même d’avoir entendu son histoire. Ils interprètent l’identité de la marque à travers son emballage, son design et son langage artistique. Parfois, un simple coup d’œil su t.

C’est pourquoi l’art joue un rôle si important dans notre communication. Une œuvre d’art ou un style visuel distinctif peut instantanément créer une résonance émo-

tionnelle, donnant aux clients l’impression que la marque a été créée spécialement pour eux. C’est cette connexion instantanée, ce sentiment de reconnaissance et d’appartenance qui dé nit la véritable identité d’une marque.

Parlez-nous un peu de votre marque?

Vie Cosmetics est disponible depuis 2009 en Thaïlande et en Malaisie, et s’est forgé une réputation auprès des consommateurs haut de gamme qui font leurs achats chez Watsons.

La marque s’inspire de l’élégance et de la créativité de la France, un pays où la mode, la couleur et la beauté font tout simplement partie du mode de vie.

En français, «Vie » signi e « vie ». Pour certains, la beauté est l’un des aspects les plus importants de la vie. Elle apporte con ance, bonheur et amour-propre.

Vie Cosmetics est née de cette conviction : créer des produits de maquillage qui non seulement rehaussent la beauté, mais aussi élèvent l’esprit, aidant les gens à retomber amoureux d’eux-mêmes.

 www.viecosmetics.co.th

Autre moyen de tomber amoureux de soi et des autres, la mode! Un domaine que Virginie Broquet fréquente également entre un festival de Jazz ou de Cannes, un hôtel de rêve ou une ambassade de France dans un pays exotique, de préférence à au moins 10000 bornes de l’hiver.

UP & FUNKY

Xuly.Bët

En 1995,Virginie rencontre Lamine Badian Kouyaté à l’hôpital éphémère, dans son studio d’où une horde de japonaises surexcitées sont en train de s’extraire en s’escla ant, avec le stock de la boutique… « Il ne restait rien ! raconte-t-elle en éclatant de rire. Lamine a tout de suite apprécié mon travail, mon trait, mes collages… Nous sommes devenus amis et au l des ans nous sommes croisés et recroisés. En 2004, nous sommes partis ensemble à Dakar et à Saint-Louis du Sénégal, où j’ai croqué cette maison que Richard Bohringer voulait acheter… Magie des voyages, j’ai même eu la chance de le rencontrer à l’aéroport en partant! Cette belle séquence m’a inspiré Carnet du Sénégal toujours en vente aux éditions Arthaud. Nous nous sommes encore retrouvés à la dernière Fashion Week, j’y ai rempli quelques pages… »

XULY.Bët appartient à cette espèce rare de labels qui refusent la neutralité. Lamine Kouyaté, son fondateur, n’a jamais considéré le vêtement comme un simple accessoire : pour lui, c’est une arme de transformation sociale, un manifeste textile.

Son parcours, qui commence dans le tumulte du Paris alternatif des années 1990, croise celui d’un lieu aujourd’hui légendaire : l’Hôpital Éphémère, friche artistique qui incuba une génération entière de créateurs rebelles.

UN NOM COMME UN APPEL À L’ÉVEIL

XULY.Bët signi e en wolof «ouvre grand les yeux ». Le ton est donné.

Lamine Badian Kouyaté, né à Bamako en 1962, grandit entre le Mali, le Sénégal et la France. Son père, l’écrivain et homme politique Seydou Badian Kouyaté, incarne une gure de la conscience africaine postcoloniale; sa mère, médecin militante, fut l’une des premières à s’opposer publiquement aux mutilations génitales féminines.

De ce double héritage – intellectuel et combatif –Lamine tirera une conviction : créer, c’est déjà résister. Arrivé en France pour étudier l’architecture à Strasbourg, il se détourne rapidement des maquettes et des plans pour s’intéresser aux corps et aux tissus. L’architecture, dit-il souvent, lui a appris la structure; la mode, elle, lui a o ert la liberté. Dans les années 1980, il rejoint Paris, en pleine mutation culturelle : le punk s’essou e, la techno underground pointe, la banlieue s’exprime, la mode cherche à se réinventer.

ÉPHÉMÈRE…

C’est au début des années 1990 que la légende commence, dans un bâtiment oublié du 18e arrondissement : l’Hôpital Bretonneau, transformé en Éphémère. Ce lieu est un ovni institutionnel : ni squat anarchique ni galerie conventionnelle. Sous l’impulsion du ministère de la Culture, il devient un laboratoire d’art contemporain où plasticiens, performers, musiciens et créateurs de mode se côtoient dans un chaos poétique assumé. Les murs décrépits servent d’ateliers, les couloirs deviennent des podiums improvisés. Dans ce capharnaüm contrôlé, XULY.Bët voit le jour. Kouyaté récupère des vêtements d’occasion, souvent trouvés dans les marchés parisiens, les démonte, les recoud, les électrise de ls rouges apparents. Le geste n’est pas seulement esthétique : c’est un acte de chirurgie textile. Chaque couture visible, chaque reprise est la cicatrice d’une transformation.

Le choix du lieu n’a rien d’anodin. L’Hôpital Éphémère, espace voué à la démolition, devient métaphore parfaite de son travail : ressusciter ce que la société déclare mort. La mode, pour lui, n’est pas un hôpital psychiatrique pour riches capricieuses : c’est un bloc opératoire où l’on soigne les blessures du monde.

Les premières collections dé lent là, sans podium o ciel, sans sponsors. Les modèles arrivent en bus, les DJs posent leurs platines sur des brancards récupérés, les ashs crépitent sous des néons d’hôpital encore suspendus. Paris découvre une autre manière de faire la mode : brute, libre, radicale, vivante.

LA COUTURE COMME RECYCLAGE DE SOI

XULY.Bët s’impose vite comme pionnier de l’upcycling, bien avant que le mot ne devienne un argument marketing. Kouyaté parle plutôt de reconstruction. Il transforme des vêtements usés, des robes de friperie, des survêtements oubliés en silhouettes sculpturales et sexy. Il garde les étiquettes originales, les logos, les traces de leur première vie. Là où d’autres e acent, lui souligne. Le fameux l rouge – signature visuelle de la marque –devient symbole : cicatrice, cordon ombilical, l de résistance. « Je ne cache pas les blessures », dit-il souvent. Ses créations rappellent que le luxe peut naître de la récupération, que la beauté se niche dans la survie.

Cette philosophie vient d’Afrique autant que de la rue parisienne. Dans beaucoup de cultures africaines, rien ne se perd; on répare, on réinvente. Kouyaté y ajoute une conscience politique : revaloriser l’existant, c’est refuser le gaspillage culturel imposé par la fast-fashion occidentale.

LES ANNÉES FULGURANTES

Entre 1991 et 1996, XULY.Bët devient le secret le mieux gardé du Paris alternatif. La presse internationale s’en amme : The New York Times le consacre « Designer of the Year », Vogue parle d’une «fashion guerrilla», et les grands magasins américains s’arrachent ses pièces. En 1994, il signe l’une des premières collaborations entre un créateur indépendant et une marque de sport : Puma. L’accord fera école. À l’époque, mélanger couture et streetwear paraît hérétique; aujourd’hui, c’est la norme. En 1996, il reçoit le prix ANDAM, la plus haute distinction française pour un jeune créateur. Et pourtant, il garde le pied sur terre : ses collections continuent d’être pensées dans la même logique artisanale, avec les mêmes machines, les mêmes amis, les mêmes convictions.

LA MODE, LE FUNK ET LA POLITIQUE

Kouyaté se dé nit lui-même comme «architecte du corps ». Mais il pourrait aussi se dire DJ : ses dé lés sont des mix. Hip-hop, Afrobeat, Funk, Punk, tout s’y croise. Il parle d’ailleurs de Funkin’ Fashion : une mode qui danse, qui groove, qui respire. Ses mannequins ne dé lent pas, ils avancent comme dans la rue; ses vêtements ne prêchent pas la perfection, ils prônent l’attitude. C’est cette énergie qui séduira une génération entière de créateurs, de Vivienne Westwood à Jean-Paul Gaultier, en passant par les stylistes afroaméricains de la scène new-yorkaise. Pour Kouyaté, le vêtement est un manifeste politique autant qu’un accessoire de fête. Il célèbre les corps noirs, féminins, métissés, athlétiques, souvent absents des podiums d’alors. Il dénonce le racisme structurel de la mode, mais sans slogans : par le simple fait d’exister, d’occuper l’espace, ses dé lés étaient déjà des actes de résistance.

ENTRE LUMIÈRE ET OUBLI

Comme beaucoup d’artistes radicaux, XULY.Bët a connu une traversée du désert. À la n des années 1990, la mode se nanciarise; les maisons deviennent des multinationales, la créativité se dilue dans la rentabilité. Le discours du recyclage, trop subversif, devient inaudible. Kouyaté continue de créer, parfois dans l’ombre. Il retourne au Mali, travaille avec des ateliers locaux, explore les tissus africains. La mode mondiale le redécouvre lentement : expositions, rétrospectives, collaborations éphémères. Dans les années 2010, l’industrie se pique d’éthique : on reparle d’upcycling, de diversité, de slow fashion. Et là, surprise : tout ce que XULY.Bët faisait depuis trente ans revient à la mode.

RETOUR À PARIS, RETOUR AUX SOURCES

Les dernières collections, présentées lors de la Paris Fashion Week, renouent avec cette énergie des débuts. Le fil rouge est toujours là, les vêtements recyclés aussi, mais le ton s’est adouci : plus de nesse dans les coupes, plus de dialogue entre l’Afrique et l’Occident. Lors d’une récente interview, Kouyaté déclarait : « Je viens d’un lieu où tout le monde se débrouille. À Bamako, les couturières font de la haute couture sans le savoir. À Paris, on croit inventer le recyclage; en Afrique, c’est la base.» Les mannequins dansent, sourient, vivent. Le vestiaire est nomade : robes-tuniques, vestes taillées dans des survêtements Adidas, corsets bricolés dans des tissus wax, trenchs hybrides mêlant jean et kente. Tout semble cousu à la main, avec la précision d’un chirurgien, et la liberté d’un enfant. ■

 www.instagram.com/xulybeto cial

Créées en Thaïlande en 2013 et inspirées par «La Nuit Blanche» à Paris, les Nuits des Galeries sont devenues un des sommets de la saison culturelle siamoise, réunissant toujours plus de lieux d’exposition, pour un public de plus en plus large.

L’édition 2024 a rassemblé plus de 30000 visiteurs dans 100 galeries!

L’ART EST LA SOLUTION

Galleries’ Nights 12 ans!

Courant 2012, à la recherche d’un nouveau concept d’événement pour incarner le soft power culturel à la française au sein de la capitale siamoise, le Conseiller de Coopération et d’Action Culturelle de l’ambassade, COCAC pour les familiers de la rue de Brest, décide de reprendre l’idée de la nuit blanche parisienne : des galeries restant ouvertes tard la nuit et recevant un inhabituel grand-public itinérant, en l’adaptant au style local avec un service de tuk-tuk gratuit pour rallier les multiples lieux d’exposition.

« Nous avons passé quelques jours ensemble à sillonner Bangkok de galerie en galerie pour les convaincre du projet, raconte Arnaud Nazare Aga, pilier de la communauté culturelle bangkokienne. Ça n’était pas évident... Mais une fois tous en n réunis à la résidence de l’ambassadeur, mi-mai 2013, les choses se sont un peu éclaircies et la Nuit des Galeries a vraiment commencé à prendre forme. »

L’édition 2025 illustrera le dialogue entre l’héritage culturel thaïlandais et la création contemporaine, rendant hommage à la Reine mère Sirikit pour son rôle dans la valorisation des savoir-faire artisanaux et des artistes locaux.

C’est ainsi qu’en que le 1er juin 2013 naquit la Nuit des Galeries, s’étirant ensuite sur 2 jours, puis essaimant en province au l des ans et des équipes qui lui apportèrent toutes un soin particulier et un style sans cesse renouvelé.

UN PHARE DANS LA NUIT

« Nous nous inscrivons clairement dans la continuité de nos prédécesseurs que je ne saurai trop remercier de ce bel héritage. Il se trouve que je suis ami avec nombre d’entre eux et que je tiens à transmettre leur leg , » nous précisait d’ailleurs l’attaché culturel à l’époque en poste Thierry Bayle, lors de l’entretien qu’il accorda à Latitudes pour notre édition spéciale Galleries’ Nights de 2021.

Rapidement, l’événement est devenu un moment phare de la saison culturelle à Big Mango, métamorphosant la capitale en un vaste parcours artistique et festif, Sanuk !

« J’aimerais que les visiteurs regardent attentivement les propositions des galeries, poursuivait Thierry Bayle, car il est bon de se perdre au cours de ces nuits et de découvrir des artistes peut-être moins connus, mais tout aussi passionnants, dans les nombreuses galeries qui nous accompagnent.»

L’édition 2025 réunit plus de 200 artistes dans une centaine galeries à Bangkok et Chiang Mai.

Un grand raout de l’art, au cours duquel les lieux d’expositions rivalisent de vernissages arrosés et de performances visuelles et musicales.

«Un aspect qui m’amuse énormément dans cet événement, commentait Fabian Forni, COCAC aux manettes du projet en 2018, c’est l’incroyable diversité de styles au sein des galeries qu’on visite dans cette sorte de voyage, où des lieux d’exposition disposant de peu de moyens réussissent à rivaliser de créativité avec les plus installés et à attirer des artistes de haut niveau.»

L’objectif a ché par l’ambassade est bien de créer une nouvelle dynamique en soutenant la scène artistique locale et en promouvant l’art contemporain auprès d’un public plus large, convaincue que celui-ci possède un fort potentiel de développement à Bangkok.

«Galeries’ Nights est un réseau, détaillait Fabian Forni dans nos colonnes, un réseau qu’il faut entretenir, enrichir. Le principal apport de la France réside dans l’ingénierie culturelle.

Nous accompagnons ces galeries, qui gardent la main sur leur propre programmation, en les incitant à travailler ensemble, à dialoguer. Nous travaillons en ce moment avec le Docteur Apinan pour que la prochaine édition soit intégrée à la Bangkok Art Biennale, dont il est le directeur artistique. Ce qui l’intéresse le plus, justement, c’est tout ce maillage que nous avons réussi à construire à Bangkok et la manière dont les publics se mélangent à l’occasion des Nuits des Galeries.»

«Plus que jamais, nous visons à rendre l’art accessible à tous, sans distinction de sexe, d’âge ou de statut social, renchérit Astrid Renoux, Attachée culturelle depuis septembre 2024. Galleries’ Nights met en avant le rôle de l’art comme source d’inspiration, moyen de ré exion sociale et vecteur de lien entre les cultures. L’Ambassade ambitionne d’ailleurs d’étendre cet événement à d’autres régions de Thaïlande, a n d’ancrer l’art contemporain dans un développement culturel durable.»

UNE AMBITION RENOUVELÉE

2025 illustrera le dialogue entre l’héritage culturel thaïlandais et la création contemporaine, rendant hommage à la Reine mère Sirikit pour son rôle dans la valorisation des savoir-faire artisanaux et des artistes locaux.

Galleries’ Nights 2025 mettra particulièrement en avant le thème de l’égalité femmes-hommes dans le secteur artistique, grâce au soutien de l’organisation française AWARE (Archives of Women Artists, Research & Exhibitions). Les galeries exposant des artistes féminines arboreront un symbole distinctif pour souligner leur contribution. AWARE, en partenariat avec Asia Art Archive, lancera à cette occasion le projet “The Flow of History: Southeast Asian Women Artists” lors de la clôture de l’événement au Jim Thompson Art Center le 23 novembre.

Les dèles partenaires privés seront naturellement au rendez-vous, en particulier MuvMi qui proposera un service gratuit de tuk-tuks électriques sur 28 itinéraires à Bangkok. À Chiang Mai, les visiteurs pourront utiliser les songthaews rouges pour se déplacer entre les galeries.

Le vendredi 21, une afterparty organisée au Café des Stagiaires par Latitudes Media & Events constituera également l’occasion du vernissage de l’exposition de Virginie Broquet, qui t la couverture du premier numéro de Latitudes en 2017 et qui a accompagné l’équipe en mai 2024 pendant toute l’aventure de la première édition de notre festival The Groove.

www.sawasdeefrance.com www.galleriesnights.com.

La conférence de presse de Galleries’ Nights 2025 s’est tenue à Bangkok Kunsthalle.
Virginie Broquet in the Groove

Dans sa préface du livre de Jean Michel Kauffmann France-Thaïlande, une longue histoire, sorti récemment aux éditions Soukha (et que nous avons pillé sans vergogne avec l’aimable accord de l’auteur, obtenu autour d’un petit verre de blanc à la Résidence de France), l’ambassadeur de France en Thaïlande, Monsieur Jean-Claude Poimbœuf, fait judicieusement remarquer à quel point la Thaïlande et la France possèdent de similitudes.

FARANG & THAI

Je t’aime, moi non plus !

On dit souvent que la Thaïlande et la France ont, en dépit de leur éloignement, beaucoup en commun, a rme le diplomate, une taille et une population assez comparables, une diversité de paysages, un mode de vie et un art culinaire réputés, qui en font des pays attrayants et des destinations touristiques de première importance.

Nos deux nations sont également ères de leur culture et attachées à leur indépendance. Ce que l’on sait moins, c’est qu’il y a très longtemps qu’elles ont été amenées à se rencontrer. C’était il y a 340 ans. À l’époque, quand bien même elles ignoraient encore presque tout l’une de l’autre, chacune était déjà convaincue de l’avantage qu’elles trouveraient à se connaître et à s’entendre. Louis XIV ambitionnait d’ouvrir le Siam à la foi chrétienne et au commerce avec la France. Le

roi Naraï cherchait lui, dans un souci d’équilibre, à diversi er ses échanges avec les puissances extérieures. »

Il est indéniable que nos deux nations se montrent particulièrement portées sur l’Art de vivre, en particulier la bonne chère et la dive bouteille. À l’inverse, au hasard, de nos amis anglo-saxons, Gaulois et Siamois aiment converser sur la nourriture en mangeant et apprécient les interminables ripailles autour d’innombrables plaisirs culinaires partagés entre amis. Nous ajouterons malicieusement que nos peuples se révèlent également très amateurs de congés, ponts et rattrapages et possèdent un rapport similaire au travail, globalement plus épicurien que stakhanoviste. Par ailleurs, les Thaïlandais, bien que généralement peu adeptes du pastaga, sont les seuls au monde à rivaliser sérieusement avec les Français à la pétanque. En n, marque d’une aimable insouciance,

les ménages de nos pays ne redoutent nullement le surendettement pour assurer leur confort et leur amour de la belle vie.

LE SIAM AU COIN DE LA RUE

L’Oiseau et la Maligne arrivent en rade de Brest le 18 juin 1686. Parmi les passagers, les membres de l’ambassade française du chevalier de Chaumont, envoyés par Louis XIV en 1685 auprès du roi de Siam Phra Narai. Ils sont de retour en France après un voyage d’à peine plus de 6 mois. À bord du vaisseau et de la frégate, a également embarqué une très importante ambassade siamoise dirigée par Kosa Pan, frère de lait du roi Narai, venant rendre visite au souverain français. Le journal de Kosa Pan relate les multiples visites consacrées aux plus beaux navires, à l’arsenal, à une fonderie de canons, mais aussi aux deux forts qui dominent la rade. Au XVIIe siècle, Brest est à peine une ville, une bourgade avec ses remparts construits par Vauban, son château et quelques rues du riche quartier où se concentre toute la vie commerçante. Une petite voie tracée par l’architecte militaire en 1694, qui traverse le quartier des Sept-Saints, n’a pas encore de nom o ciel et par habitude orale le

nom de Siam lui a été dévolu après l’épisode de la visite des ambassadeurs qui avait vivement marqué les esprits brestois. En 1742 une délibération adoptera ce nom.

En 1986, 300 ans après le passage des ambassadeurs siamois, Son Altesse Royale la Princesse Galyani Vaddhana, sœur du roi de Thaïlande Rama IX et fondatrice de l’Association thaïlandaise des Professeurs de français (ATPF) favorisa l’établissement d’une coopération linguistique et culturelle bilatérale entre la ville de Brest et la Thaïlande. Plus récemment, pour commémorer le 333e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Thaïlande, l’ATPF, sous le haut patronage de Son Altesse Royale la Princesse Maha Chakri Sirindhorn, a o ert à la ville de Brest un buste de l’ambassadeur Kosa Pan.

Il existe, non pas une rue de Siam, mais au moins quatre sur l’ensemble du territoire français. On trouve une rue de Siam à Marseille en hommage au chevalier Claude de Forbin, celui-là même qui fut nommé major de la première ambassade française au Siam en 1685. Il fut au reste appelé par le roi Narai pour commander ses armées. En mémoire, le nom de Siam fut attribué en 1771 à la rue sur laquelle la maison familiale des Forbin

L’audience solennelle accordée par le roi Narai au chevalier de Chaumont, le 18 octobre 1685
Le roi Louis XIV et Kosa Pan
Le voyage fluvial de l'ambassade du chevalier de Chaumont sur le Chao Phraya

avait une façade. On mentionnera aussi une rue de Siam à Saint-Malo, une autre à Lorient et même à Plougastel, pour des motifs moins évidents.

Côté siamois, c’est Gildas Le Lidec, ambassadeur de France en Thaïlande de 2009 à 2012, qui décida de « revendiquer la stricte bien que tardive réciprocité de ce que nous avions accordé aux Thaïlandais et à demander de débaptiser le Charoenkrung Soi 36 qui dessert notre ambassade à Bangkok et de le renommer rue de Brest ».

Le diplomate entreprit alors, avec dit-il, l’aide discrète d’un descendant de Kosa Pan, de tenter de convaincre le gouverneur de la capitale thaïlandaise. L’a aire mit du temps à intéresser et c’est alors qu’il la croyait dénitivement vouée à l’échec qu’il apprit d’un habitant de la rue qu’une discrète consultation par la municipalité était en cours auprès des résidents du quartier, a n de déterminer s’ils accepteraient qu’un nom étranger fût

La rue de Siam avant-guerre

donné à leur rue. Ils agréèrent sans ciller. C’est en n sous le ministère du successeur de M. Le Lidec,Thierry Viteau, qu’eut lieu en 2013 le baptême o ciel de la rue de Brest, en lieu et place de Charoen Krung Soi 36 à Bangkok.

LE SIAM AUX EXPOSITIONS

UNIVERSELLES DE PARIS

LE GRAND ÉLÉPHANT BLANC, ATTRACTION DE L’EXPOSITION

UNIVERSELLE DE 1867

L’Exposition universelle de 1867 à Paris marqua la première participation du royaume de Siam à une grande manifestation publique internationale. Sa participation, sous l’autorité d’Amédée Gréhan, consul du Siam en France, permit de faire connaître le royaume aux yeux du monde occidental. Le roi Rama IV avait accepté l’invitation o cielle de la France pour cette participation et l’événement inaugura ainsi toute une série de manifestations mettant en lumière l’art, l’artisanat et la culture du royaume siamois, encore très largement inconnus du public français.

Notons que les Expositions universelles, symboles de la modernité triomphante, sont nées au milieu du XIXe siècle avec d’abord Londres en 1851, puis sous l’impulsion de Napoléon III, les expositions de Paris en 1855 et 1867. Elles furent suivies par trois autres en

DÉCOUVERTES

1878, 1889 et 1900, où les pays industriels rivalisèrent en exhibant leurs meilleures inventions techniques et leurs créations artistiques. Pour la France, on retiendra les bateaux-mouches (1867), l’éclairage électrique (1889), le métro (1900) et plusieurs monuments prestigieux en premier lieu desquels triompha, la tour Ei el, devenue le symbole de Paris.

Le pavillon siamois associé à celui du Japon charma le public pour son architecture traditionnelle exotique et les nombreux objets envoyés par le roi de Siam.

On y remarqua des bijoux, des vases en émaux cloisonnés, de l’orfèvrerie d’argent et des plateaux de bois nacré ainsi qu’une collection très curieuse pour le public occidental d’objets du culte bouddhiste mêlé à des pratiques brahmanistes, voire animistes, propres à la culture religieuse siamoise. Parmi tous ces objets d’art, les plus remarquables étaient les magni ques barges royales longues de neuf mètres, en partie dorées et décorées de couleurs vives. Ces barques e lées reçurent une médaille d’honneur du jury ; mais la principale attraction fut sans nul doute le grand éléphant blanc en carton-pierre, portant un palanquin d’or avec des harnais en argent massif, créé par le commissaire de l’exposition, Amédée Gréhan. N’oublions pas l’importance de l’éléphant blanc dans la culture thaïe, symbole du royaume et animal sacré objet de vénération.

Onze ans plus tard, le Siam fut également invité à participer à la troisième exposition universelle de Paris en 1878.

Le pavillon siamois à l'Exposition universelle de 1867
Le grand éléphant blanc, attraction de l'Exposition universelle de 1867

Récit du voyage du roi de Siam Chulalongkorn à Paris en 1897, paru dans L'illustration

Comme en 1867, le royaume put s’enorgueillir des nombreux prix qui lui furent décernés : deux grands prix pour les soies et l’habillement, une médaille d’or pour divers instruments de chasse et de pêche et une médaille d’argent pour les instruments de musique. On retrouvera le royaume siamois aux Expositions de 1889 et 1900 où le pavillon du Siam jouxtait la tour du bâtiment du Panorama du Tour du Monde, au champ de Mars.

CHULALONGKORN ÉBLOUI

PAR LA VILLE LUMIÈRE

Le long voyage privé en Europe du roi Chulalongkorn en 1907, dont l’objectif majeur était de rendre visite à ses ls étudiants en Angleterre, engloba plusieurs séjours en France, totalisant 36 jours. Il visita Strasbourg, la Côte d’Azur et bien sûr Paris qui, pour lui, était la plus belle ville d’Europe.

C’est un bonheur de parcourir les lettres écrites par Chulalongkorn durant ses trois séjours à Paris. Ces lettres ne se contentaient pas de constituer un échange a ectif d’un père avec sa lle, comportant certes, des descriptions de lieux singuliers, mais il revêtait un caractère presque ethnographique avec des remarques sur les manifestations de l’activité humaine, sur les mœurs et les coutumes. Le souverain donnait assez souvent son point

de vue, ne s’interdisant pas des observations critiques, comme son peu d’attrait pour la peinture moderne alors qu’il visitait le Salon de l’Art au Grand Palais.

Le roi Rama V marque un profond intérêt pour la gastronomie française qu’il apprécia beaucoup, et notamment lors de son passage au restaurant la Tour d’Argent. Fin gourmet, il ne vanta pas seulement les qualités du «canard laqué», mais il put faire des comparaisons avec d’autres tables, notamment le restaurant Valentin à Strasbourg où il avait apprécié le célèbre foie gras et le restaurant parisien Henri, notant que si la décoration du lieu ne payait pas de mine, en revanche les plats

Photographies instantanées de la loge présidentielle pendant la revue de

Le roi de Siam Chulalongkorn à Rambouillet, le 20 août 1907
Saint-Quentin
Gallica

présentés étaient délicieux. Le souverain se permit par ailleurs de donner son avis sur les autres cuisines européennes et l’on ne s’étonnera pas de sa préférence pour celle de France.

La légation dans les années 1910

La légation française en 1894

La surprise vient de l’analogie avec la cuisine siamoise : « Quant aux Français, l’originalité repose dans l’utilisation de nombreux ingrédients. Et comme les Siamois, ils mettent les ingrédients avant la cuisson, c’est meilleur ! ».

BANGKOK, LA FRANCE EN RÉSIDENCE

Lors de la signature du traité d’amitié et de commerce entre le Siam et la France, le 15 août 1856, il fut établi la nomination d’un consul de France à Bangkok, devant prendre e et sitôt l’échange des rati cations accompli. Il fallut pourtant attendre le 21 octobre 1858 pour voir arriver M. de Castelnau à ce poste. Un terrain en bordure du Menam Chao Phraya, occupé par une maison des douanes siamoises vacante dans le district de Bangrak, fut mis à la disposition du représentant de la France. Ce bâtiment de deux étages assez vaste, de style colonial et comptant de belles ouvertures, était naturellement orienté vers le euve, voie de communication naturelle à l’époque.

L’établissement définitif du consulat à Bangrak fut con rmé lorsque le roi du Siam t don du terrain et de l’immeuble à la République française le 10 juin 1875, traduisant ainsi sa volonté de se concilier l’amitié des Français qui pour lors, menaçaient les marges du

royaume siamois. Cette décision ne pouvait que ravir le responsable de la représentation française, car le maintien sur ce terrain en bord de euve était stratégique.

À cet avantage s’ajoutait celui d’être situé au voisinage d’autres consulats étrangers et surtout, d’être à proximité de la mission catholique française dont on pouvait escompter l’assistance linguistique et culturelle par le biais des prêtres des Missions étrangères. C’est ainsi que se créa une manière de quartier français dans cette partie de Bangrak, entre l’Oriental Hotel, l’école de l’Assomption, la Banque d’Indochine et l’Hôpital Saint-Louis-des-Français.

La résidence est aujourd’hui inscrite sur la liste des Monuments historiques nationaux de Thaïlande. Avec l’actuel développement des berges de la Chao Phraya, l’avenir de cette belle et grande demeure est assuré. La dernière mutation que connut le campus diplomatique français de Bangkok remonte à 2015. À la suite d’une consultation lancée en 2011, la société Jean Dubus architecte, alliée à ADPI (la liale d’ingénierie et d’architecture de la société Aéroports de Paris), sortit lauréate pour la construction de la nouvelle chancellerie. D’emblée, elle était soumise à des contraintes diverses notamment dues à l’exiguïté de la parcelle, mais aussi à des contraintes de hauteur. Il ne fallait pas non plus écraser visuellement la résidence de l’ambassadeur.

À cela s’ajoutait, bien sûr l’impératif de sécurité propre aux emprises diplomatiques. L’agence choisit de conserver le corps arrière du bâtiment principal préexistant et de le réhabiliter après lui avoir adjoint une nouvelle construction. Le pro l de l’édi ce, tout en angles vifs, revendique l’inspiration des grandes toitures des maisons aux pentes vives et aux débords généreux qui répondent aux codes traditionnels thaïlandais. Une autre originalité de l’édi ce fut l’emploi d’un revêtement composé de

krion, un matériau de dernière génération ici utilisé dans un blanc lumineux apportant ainsi un aspect poli comme le marbre. C’est ainsi que ce polyèdre à six niveaux, digne des réalisations les plus audacieuses du XXIe siècle, contraste assurément avec la noble résidence de l’ambassadeur, dépositaire de la mémoire.

Les trois pionniers de l'aviation siamoise, de gauche à droite : major Luang Sakdi Sanlayawut, capitaine Luang Arwut Sikikorn et lieutenant Thip Ketuthap.

LES PIONNIERS DE L’AVIATION THAÏLANDAISE FORMÉS EN FRANCE

Les débuts de l’aviation, n XIXe et début XXe, ont eu pour théâtre la France et les États-Unis, avec pour ces derniers les succès des frères Wright et pour la France la traversée de la Manche par Louis Blériot. Surtout, cette aviation naissante allait susciter l’intérêt des forces armées françaises de telle façon qu’à la n de 1909 l’idée d’une utilisation militaire des avions s’imposa. C’est ainsi que naquit l’aviation militaire française avec l’achat des premiers aéroplanes de construction nationale par le ministère de la Guerre et l’organisation de l’aéronautique militaire. En corollaire, Sa Majesté le roi Wajirawudh, prenant conscience du besoin de protéger son royaume des

L'ambassade de France
La résidence de France de nos jours

menaces qui pesaient sur lui, demanda au ministère de la Guerre de fonder la section aviation de l’armée royale siamoise. Trois o ciers quali és (le major Luang Sakdi Sanlayawut, le capitaine Luang Arwut Sikikorn et le lieutenant Thip Ketuthap) furent quali és pour suivre des cours d’aviation en France.

Après l’apprentissage de la langue, ils commencèrent l’entraînement au pilotage, l’un à l’aéroport de Villacoublay tandis que les deux autres furent formés à Mourmelon-le-Grand.

Les trois o ciers achevèrent leur formation en août 1912. Avant leur départ de France, ils testèrent les huit appareils commandés par le ministère de la Guerre (quatre monoplans Nieuport et quatre biplans Breguet).

Les aéronefs furent démontés puis remontés à Bangkok.

Le 13 janvier 1913, les trois pilotes e ectuèrent la première démonstration de vol à l’hippodrome de Sra Pathum devant Sa Majesté le roi Wajirawudh.

L’unité d’aviation de l’armée fut transférée l’année suivante sur le nouvel aérodrome de Don Muang.

GARUDA À PARIS

On ne saurait parler de la Thaïlande en France sans mentionner l’ambassade du royaume, située au 8, rue Greuze dans le seizième arrondissement.

Le portail d’entrée de l’ambassade est surmonté d’un superbe bas-relief en forme de blason représentant Garuda, l’oiseau mythique de l’hindouisme, emblème de la dynastie Chakri, qui règne depuis 1782. Créature mi-homme mi-oiseau, Garuda est présenté comme le vahana (le véhicule, la monture) du dieu Vishnou. Ce symbole se retrouve sur les billets, les documents gouvernementaux, les drapeaux o ciels, ainsi que sur la façade des services gouvernementaux et privés du royaume thaïlandais.

La légation du Siam n’était pas initialement située rue Greuze, mais… rue de Siam, une petite voie du 16e arrondissement de Paris qui porte opportunément ce nom en raison de la présence de la première représentation o cielle du royaume siamois. Cette dénomination fut adoptée par un arrêté du préfet de la Seine, Eugène Poubelle, en date du 27 février 1886. Néanmoins dans les années 1900, la légation s’était installée pour une courte période 14 rue d’Eylau dans le 8e arrondissement avant de s’établir dé nitivement rue Greuze.

ROYALE ROMANCE EN FRANCE

C’est en e et au château de Fontainebleau que le roi Bhumibol Adulyadej rencontra en 1947 la princesse Sirikit Kitiyakorn, lle de l’ambassadeur de Thaïlande en France et arrière-petite- lle du roi Chulalongkorn (Rama V). Après de discrètes ançailles, qui eurent lieu à Lausanne, le roi regagna le royaume pour célébrer son mariage, le 25 avril 1950, puis son couronnement une semaine après.

La façade de l'ambassade de Thaïlande à Paris
Un détail de la façade

LES ENTREPRISES FRANÇAISES IMPLANTÉES EN THAÏLANDE

Fort d’un bon taux de croissance, d’infrastructures solides (routes, ports, aéroports, zones industrielles), d’un savoirfaire reconnu et d’une classe moyenne entreprenante, la Thaïlande, qui occupe une position géographique idéale en Asie du Sud-Est, constitue en matière d’investissement une terre d’élection pour les eurons français de l’industrie et du luxe. Le royaume accueille en e et environ 290 liales de grands groupes français ou de PME, employant approximativement 45000 personnes. Si en 2018, avec 4 % de croissance la Thaïlande apparaissait comme particulièrement privilégiée, on aura noté une légère baisse de son attractivité dans les années post-COVID, car malgré les opportunités d’a aires qu’o re le royaume dans divers secteurs porteurs, la Thaïlande sou re de certains maux anciens et nouveaux comme les lourdeurs administratives ou encore le faible niveau de compétences dans certaines tranches de la population, qui peuvent décourager les investisseurs, particulièrement dans un contexte économique moins vigoureux. Les entreprises françaises font toutefois preuve d’une forte résilience et le pays compte de nombreux secteurs où elles se portent bien : agroalimentaire, construction automobile, transports, numérisation, biotechnologies, santé et bienêtre... La Thaïlande reste donc une destination attractive.

GRANDES ENTREPRISES HEXAGONALES INSTALLÉES

EN TERRE DE SIAM

 Airbus, dont les appareils équipent une bonne partie de la otte de Thai Airways, béné cie depuis les années 2000 d’une base à Bangkok pour l’entretien des avions, complétée d’une nouvelle structure destinée aux hélicoptères. On observera que la Thaïlande prend une part très importante dans la production de biocarburants durables destinés à l’aviation (SAF – Sustainable Aviation fuel), domaine dans lequel Airbus joue un rôle clé. À titre d’illustration, le 10 octobre 2024, le ministère thaïlandais des Ressources naturelles et de l’Environnement (MNRE) a pris livraison de son premier hélicoptère Airbus H130, propulsé par un mélange de 39 % de carburant d’aviation durable. Cet appareil était exploité conjointement par Airbus, MNRE, Safran Helicopter Engines et Thai Aviation Industries.

 Essilor, l’inventeur français du premier verre progressif et leader mondial de l’optique depuis son alliance avec l’italien Luxottica, est présent en Thaïlande à travers plusieurs de ses marques, comme Varilux.

 Accor, le leader européen de l’hôtellerie, gère plus de 80 hôtels à travers le royaume.

 Michelin, dont la liale thaïlandaise Michelin Siam Group fut créée il y a plus de trois décennies, ne compte aujourd’hui pas moins de six sites dont trois usines de fabrication : Michelin Siam à Laemchabang et à Hat Yai et Siam Michelin Company Limited à Rayong.

 L’Oréal s’est établi en Thaïlande en 2000 et emploie aujourd’hui environ 630 employés. Avec un marché national représentant près de 6,5 milliards de dollars en 2023, l’industrie des cosmétiques est un secteur clé de l’économie locale, en augmentation constante. Bien que la concurrence soit rude, l’ambition du leader mondial est de devenir également le numéro 1 dans le pays.

 Mazars, petite société française dans les années 1970, est devenue un géant de l’audit, aujourd’hui présent dans 89 pays.

 Décathlon a fait son trou sur le marché thaïlandais avec dix magasins sur l’ensemble du territoire.

 Le groupe Bolloré est présent depuis vingt ans sur le sol thaïlandais. Alliée à un grand transporteur local, l’entreprise emploie plus de 200 personnes sur di érents sites. La dernière ouverture en date est un centre logistique ultramoderne à Bang Phli, dans la province de Samut Prakan, au sud-ouest de Bangkok.

 Diageo Moët Hennessy Thailand Ltd (Groupe LVMH), est la première entreprise thaïlandaise d’alcool importé de qualité... ■

Sa majesté le roi Bhumibol Adulyadej, en septembre 1949, deux mois après ses fiancailles avec Sirikit Kitiyakara, .

CULTURE

Chargé de cours à la Faculté des Arts de la Communication de l’Université Chulalongkorn à Bangkok, Nicolas Verstappen est un spécialiste de la bande dessinée thaïlandaise.

Il nous en narre l’histoire à travers l’influence que les aventures des Gaulois les plus célèbres au monde y ont exercé.

Astérix

le Siamois

Àquelques heures de tapis volant près, Astérix et Obélix auraient pu atteindre les portes de l’Asie du Sud-Est. Les deux Gaulois, accompagnés d’Idé x et Assurancetourix, n’iront hélas pas au-delà du Gange dans l’aventure intitulée Astérix chez Rahàzade. Le contenu de leurs albums, en revanche, parviendra bien en Thaïlande via la revue éducative anglaise Look and Learn, distribuée à Bangkok dans les années 1960.

Look and Learn proposait alors les planches d’Astérix et Cléopâtre traduites dans la langue de Shakespeare. Les deux héros y avaient été renommés Beric et Doric, car, dans cette version de 1966, ils n’étaient pas présentés comme des Gaulois, mais étaient devenus des Bretons insulaires pour satisfaire le lectorat d’outre-Manche. Quand leurs aventures seront en n traduites en langue thaïe dans les années 1970, les Gaulois se verront assimilés à un autre peuple européen, désormais d’origine

© Les Editions
Albert René / Goscinny-Uderzo

scandinave. Astérix sera en e et introduit aux lecteurs thaïlandais sous le titre de « YotWaiking » qui signi e… « Super Viking »!

L’accroche, certes trompeuse, mais compréhensible, met l’accent sur la gure familière du guerrier nordique, mais aussi sur celle du superhéros. Depuis le début des années 1950, marqué par l’alliance économique et militaire entre les États-Unis et la Thaïlande pour contrer la menace communiste, les comics américains connaissent un grand succès dans le royaume, d’où l’emphase portée sur la force herculéenne d’Astérix. Pour être exact, les superhéros ne sont pas les premiers personnages américains aux pouvoirs surhumains à avoir fait irruption dans la région. Dans les années 1920 et donc bien avant l’arrivée des buveurs de potion magique et des justiciers masqués, c’est un mangeur d’épinards qui inspira les premiers dessinateurs d’un pays encore connu à l’époque sous le nom de Royaume de Siam.

EMBALLÉ PAR POPEYE

Créées par l’auteur américain E. C. Segar, les aventures de Popeye arrivent à Bangkok dans les pages de vieux journaux envoyés depuis Singapour pour être transformés en papier d’emballage sur les marchés siamois. C’est dans ces feuilles de récupération que plusieurs enfants découvrent avec fascination les «comic strips» américains qui leur serviront de modèle quand ils deviendront dessinateurs professionnels. Jusqu’en 1932, la bande dessinée reste une forme graphique assez peu explorée dans les journaux siamois à l’inverse du dessin de presse particulièrement virulent à l’encontre de l’élite autocratique du pays. Caisse de résonnance du mécontentement d’une nouvelle classe ayant béné cié du système éducatif mis en place au début du 20e siècle, le dessin de presse participa activement au déclenchement de la Révolution Siamoise qui mena à l’abolition de la monarchie absolue au pro t d’une monarchie constitutionnelle en 1932.

Le changement de régime ne fut pas hélas l’avènement d’une nouvelle ère de liberté, bien au contraire. La censure de la presse est renforcée. De nombreux journaux sont interdits et les arrestations sommaires d’éditeurs se multiplient. Les caricaturistes craignent de subir le même sort et décident d’abandonner le dessin de presse pour un autre format. Par bandes de quatre cases publiées quotidiennement, de longs récits de bande dessinée envahissent les journaux.

Le jeune dessinateur Sawas Jutharop est le premier à se lancer avec un récit en six épisodes qui met en scène les aventures rocambolesques du reporter Jon qui tente de démanteler un réseau de prostitution à Bangkok. De manière très surprenante, mais entièrement fortuite, ce

© Sawas Jutharop, 1932

récit évoque les aventures d’un autre jeune reporter d’origine belge qui, à la même époque, combattait le crime organisé dans la ville de Chicago… En 1932 toujours, Sawas Jutharop crée le personnage de Khun Muen qui deviendra le premier héros local de bande dessinée à connaître un succès national.

Khun Muen est directement inspiré du personnage de Popeye avec son menton proéminent, sa bouche grimaçante, ses sourcils constamment froncés et ses avant-bras démesurés. Khun Muen n’est cependant pas un marin, mais bien un coursier royal chargé de transmettre aux princes célibataires une invitation à se présenter auprès de la princesse Rojana qui n’a pas encore trouvé de prétendant digne de ce nom. Adaptation du célèbre conte populaire SangThong, le récit de Sawas Jutharop se déroule à l’époque du Royaume d’Ayutthaya qui fut établi en 1350 et prit n en 1767 avec le sac de la capitale par les troupes birmanes. De Popeye, Khun Muen ne garde donc que quelques traits physiques, étant entièrement repensé dans un contexte local pour devenir un personnage humoristique qui utilise sa malice plutôt que ses poings pour aider les princes dans leurs quêtes.

De 1932 jusqu’au décès de Sawas Jutharop en 1950, Khun Muen devint un personnage récurrent dans de nombreuses adaptations de contes populaires en bande dessinée. Ses brèves apparitions drolatiques étaient attendues avec autant d’impatience par les lecteurs siamois que celles des Dupondt dans les aventures de Tintin à l’autre bout du monde.

Khun Muen, dont l’e gie fut utilisée pour promouvoir de nombreux produits commerciaux, inspira un jeune dessinateur du nom de Prayoon Chanyawongse qui sera plus tard considéré comme le «roi de la bande dessinée thaïlandaise». En 1938, Prayoon Chanyawongse crée le personnage de Sooklek dans son adaptation en bande dessinée du conte populaire Chanthakorop. Comme Sawas Jutharop, Prayoon conserve un personnage humoristique récurrent d’une adaptation de conte à une autre, mais il ajoute cependant un élément novateur. Sooklek n’est pas un simple personnage de conte, mais bien un acteur de Likay, une forme d’opérette très populaire en Thaïlande au milieu du siècle passé. Au travers d’une mise en abyme savamment construite, les bandes des-

© Prayoon Chanyawongse Foundation, 1948

sinées de Prayoon Chanyawongse nous donnent donc à lire – et à voir – les aventures de Sooklek et de sa troupe de théâtre qui interprètent un conte populaire dont ils improvisent une partie de l’intrigue devant un large public.

Dans ces «Katun Likay» ou «pièces de Likay en bandes dessinées », Sooklek apparaît d’abord sur scène, présente sa troupe et la pièce qu’ils vont jouer, et en le son costume pour débuter l’interprétation. Comme dans toute performance de Likay où la pièce peut être interrompue à tout moment par le public, Sooklek et sa troupe sont constamment interpellés par leurs spectateurs qui leur suggèrent des idées pour rendre l’intrigue du conte plus intéressante, pour o rir des guirlandes de eurs aux acteurs fétiches ou pour exiger qu’un acteur soit remplacé, car il n’est pas à la hauteur de son rôle.

Dans ce théâtre de l’interruption qui fait songer aux pièces du dramaturge Bertold Brecht, acteurs et actrices s’amusent à introduire des commentaires sur les problèmes sociaux qui frappent la Thaïlande contemporaine bien que les contes interprétés prennent place à l’époque du Royaume d’Ayutthaya. Dessinateur de presse et homme engagé, Prayoon Chanyawongse pro ta donc de cette liberté o erte par le Likay pour introduire moult critiques à l’encontre du gouvernement militaire dans ses bandes dessinées durant plusieurs décennies. L’engouement des lecteurs pour les commentaires politiques de Prayoon, souvent introduits par Sooklek au travers de jeux de mots subtils, fut immense au point de devenir un phénomène éditorial comparable à celui des aventures d’Astérix et Obélix. La comparaison ne s’arrête d’ailleurs pas là.

LE GLAIVE BRISÉ DE PHRAYA PHICHAI

Avec son amour des jeux de mots, ses personnages récurrents aussi drôles qu’attachants, ses récits mettant en scène une époque révolue, mais tru és de références populaires contemporaines ainsi que sa maîtrise certaine de la théâtralité, Prayoon Chanyawongse est à la bande dessinée thaïlandaise ce que René Goscinny et Albert Uderzo sont à la bande dessinée franco-belge. Une di érence est à noter cependant: l’engagement politique de Prayoon Chanyawongse contre la dictature militaire lui valut les a res du régime et de nombreuses menaces auxquelles le dessinateur tenta toujours de tenir tête. Lorsque le gouvernement décida de s’en prendre aux collègues de Prayoon si ce dernier ne mettait pas un terme immédiat à ses récits engagés, l’auteur nit par céder, mais dessina désormais son personnage de Sooklek avec les lèvres cousues pour gurer la censure dont il était victime.

© Prayoon Chanyawongse Foundation, 1950

The Art of Thai Comics: A Century of Strips and Stripes de Nicolas Verstappen, 2020, River Books

Tandis que le régime muselait les dessinateurs séditieux et publiait des bandes dessinées de propagande anticommuniste, le neuvième art thaïlandais fut également la cible de vives critiques émises par des associations de parents, des professeurs et des universitaires. Durant les années 1970 et après deux décennies de modernisation intensive et de bouleversements culturels et politiques, le pays tente de se retrouver et opte pour des discours passéistes et nationalistes. La bande dessinée, principalement à destination des enfants, est donc entièrement repensée pour promouvoir de manière divertissante la culture thaïlandaise. Lancée en 1970 et menée par son responsable éditorial Rong Prasanobol, la revue mensuelle de bande dessinée éducative Chaiyapruek Katun rencontre alors un vif succès grâce à la qualité de son contenu en phase avec les discours conservateurs. Traditions, valeurs locales, et classiques littéraires y sont introduits sous la plume des plus talentueux dessinateurs de l’époque. Au l des numéros de Chaiyapruek Katun, Rong Prasanobol développe sa série PrawatSat Katun où il propose l’histoire de la nation thaïlandaise en bande dessinée. Dans l’épisode intitulé Phraya Phichai DapHak, publié en octobre 1971, Rong relate les exploits de Phraya Pichai, un jeune boxeur de Muay Thai qui suivit le roi Taksin lors de ses combats contre les Birmans à la n du 18e siècle. Utilisant deux épées et des techniques de Muay Thai, le jeune guerrier ne cessa de se battre même si l’une de ses lames fut brisée lors d’un assaut. Il obtint le nom de Phraya Phichai DapHak, ou «Phraya Phichai à l’épée brisée », et son exploit devint l’un des symboles nationalistes de la résistance contre toute forme d’invasion territoriale.

Gaulois contre les Romains et celle des Siamois contre les Birmans. Les Siamois prennent ainsi le visage d’irréductibles combattants face à l’envahisseur venu du nordouest. Comme pour Khun Muen inspiré par Popeye, mais repensé dans un contexte purement siamois, Rong Prasanobol se réapproprie donc des éléments visuels étrangers pour peu qu’ils renforcent son message de lutte contre l’invasion d’in uences étrangères et pour un retour à des valeurs ancestrales. Bien que cette approche semble paradoxale, cette forme de « bricolage » graphique et idéologique est au cœur de l’art thaïlandais, et du neuvième art en particulier comme nous l’a montré l’amalgamation étonnante des «pièces de Likay en bandes dessinées» de Prayoon Chanyawongse. Ce « don d’adaptation pragmatique», pour citer l’anthropologue Niels Mulder ( Inside Thai Society: Religion - Everyday

D'après Astérix © Les Editions Albert René / Goscinny-Uderzo

D'après Astérix © Les Editions Albert René / Goscinny-Uderzo

« UN VILLAGE D’IRRÉDUCTIBLES SIAMOIS RÉSISTE ENCORE ET TOUJOURS… »

Le lecteur attentif remarquera que cette planche de Rong Prasanobol, parmi bien d’autres, emprunte des éléments visuels issus d’une autre série mettant en scène de fameux résistants. Souvenez-vous de cette fameuse introduction aux albums d’Astérix et Obélix : « Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ.Toute la Gaule est occupée par les Romains… Toute? Non. Un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur ». Reprenant directement le style d’Albert Uderzo pour dessiner ses chevaux ou ses compositions dynamiques de scène de mêlée, Rong Prasanobol e ectue un transfert à la fois graphique et idéologique entre la résistance des

Life – Change ; Silkworm Books, 2000), permet aussi à la culture thaïlandaise de rester au goût du jour et de prouver ainsi sa pertinence et sa résilience au-delà des modes venues des États-Unis, d’Europe ou du Japon. Par une série d’emprunts formels aux comics, à la bande dessinée franco-belge ou au manga, la bande dessinée thaïlandaise n’a ainsi eu de cesse de suivre les tendances internationales a n de transmettre d’une génération à l’autre une identité nationale et culturelle établie avec fermeté durant la première moitié du siècle passé. Dé ant également les a res du temps de par la qualité de ses personnages et de leurs relations à l’autre et au monde, la série Astérix aura ainsi exercé de son in uence jusqu’en Thaïlande. Notons cependant un grand bémol. Lorsque les aventures d’Astérix seront publiées pour la première fois en langue thaïe en 1975, elles ne reprendront pas les planches originales d’Albert Uderzo, mais des décalquages des planches en noir et blanc par un artiste local. Entièrement redessinée et perdant ainsi énormément du trait dynamique d’Uderzo, cette première édition thaïlandaise était en e et une contrefaçon de l’album Astérix légionnaire. Si nos deux Gaulois auront fait couler par le fond quelques bateaux corsaires, ils ne l’ont pas emporté contre les pirates thaïlandais… ■

En Thaïlande, les frites sont appelées man farang thot (มันฝรั่งทอด ; littéralement «pomme de terre frite»), mais sont également connues sous le nom de fren frai/ เฟรนซ์ฟรายด์. Elles sont de plus en plus populaires dans les bars et les lieux de vie nocturne thaïlandais, essentiellement comme snack ou comme en-cas.

GAULOISES FRITES

En se plongeant dans le neuvième art, nous apprécierons la théorie selon laquelle la frite serait née en 50 avant Jésus-Christ dans un village peuplé d’irréductibles Gaulois résistant encore et toujours à l’envahisseur... Mais si l’origine des frites se révèle bien gauloise, sont-elles françaises ou belges ? Les frites et la BD, voilà bien deux spécialités dans lesquelles Belges et Français n’ont cessé de rivaliser...

Selon Cyril Pingant, auteur de Ripaille, Histoire(s) de la gastronomie française, la vraie frite est née sur le PontNeuf, à Paris, « entre les vendeuses de beignets, les camelots braillards et les théâtres de boulevard : au tournant des années 1780, les marchandes ambulantes installent leurs braseros sur les dalles du Pont-Neuf, le plus vieux pont de la capitale. Dans la graisse bouillante, elles plongent des rondelles de pomme de terre, parfois enrobées d’une pâte légère. À la sortie des spectacles, on se presse pour croquer ces disques dorés servis dans du papier. Le succès est fulgurant. Très vite, pour éviter qu’elles ne collent entre elles, les rondelles deviennent bâtonnets. On les taille entre neuf et onze millimètres, ni plus ni moins.

Et comme elles proviennent du Pont-Neuf, on les baptise… pommes Pont-Neuf. La frite est née. En 1844, un forain bavarois installe un stand à Bruxelles et y vend des pommes de terre frites à la manière de Paris. Le succès est tel que deux gardes municipaux sont requis pour canaliser la foule autour des trois poêles en ébullition. Baudelaire luimême, mange ses frites avec les doigts, la méthode classique indiquée par Brillat-Savarin. Alors belge, la frite? Que nenni. Le nom a voyagé, l’art est resté. Les French fries des Américains, n’en déplaise aux gourmands d’outre-Quiévrain, con rment ce que tout le monde savait déjà : la frite est Française… même s’il faut le dire, entre nous, que personne ne la cuit aujourd’hui mieux qu’un belge dans sa baraque à frites.»

Les Belges sont si frito & bédéphiles qu’en 2007, l’Union Nationale des Frituristes a même publié l’œuvre de deux gures du mileu, Pierre Bochmans et son épouse Marie-Louise Van Dorst : La baraque brinquebalante , une bande dessinée de 28 pages distribuée via le réseau des friteries! ■

Allan Thompson

Le premier album de Tintin en thaïlandais fut publié en 1993 par Duang Kamol, puis les deux suivants en 1996 par TNG-Publishing, enfin les plus recents, de 2004 à 2009, par Nation-Casterman, correspondant de son éditeur belge.

Mais il circule également en Thaïlande une série pirate de 21 albums mesurant 21 cm x 14 cm, publiés durant les années 80 par Samnakpim Bangkok San. Ces albums sont de claires contrefaçons, désormais très difficiles à dénicher.

D’un tout autre calibre est l’histoire de l’album mythique Tintin en Thaïlande…

Le Trésor de Bud E. Weyzer

Alors que son auteur Baudoin de Duve vient de raccrocher dé nitivement ses crayons et pinceaux dans un hôpital de Chiang Mai, sa ville d’adoption, son œuvre lui survit à travers des éditions plus ou moins légitimes, du canal historique des ses proches aux discrètes Éditions Ziedaneky à celui plus fétide des Éditions Farang. Ce Belge né en 1950 s’était installé au pays du Sourire dans les années 1980, après avoir e ectué son service militaire chez les parachutistes et exercé, déjà, une belle

variété de métiers, avant de goûter malgré lui aux délices aigres-doux de la notoriété que lui apporta un pastiche bien tassé : Tintin en Thaïlande

Cette version loufoque de l’œuvre d’Hergé, publiée en 1999 sous le pseudo alambiqué de Bud E. Weyser avait défrayé la chronique lors de la visite à Bangkok en 2003 d’une délégation belge conduite par le prince Philippe. Son Altesse s’o usquait alors du détournement jugé scabreux des aventures d’une gloire nationale : le plus célèbre héros de la bande dessinée mondiale, Tintin!

L’histoire ? Tintin et le capitaine Haddock s’ennuient ferme à Moulinsart après la mort de Hergé. La femme de Séraphin Lampion leur demande de retrouver son mari disparu en Thaïlande. En compagnie du professeur Tournesol et de Milou, nos héros s’envolent pour le Siam. Et c’est parti pour le choc culturel. Le résultat est assez irrespectueux et un peu sexuel. Mais Stéphane Steeman, tintinophile notoire, ne voyait pas en quoi Tintin en Thaïlande pouvait choquer.

L’AFFAIRE BUD E. WEYSER

Au départ l’œuvre sulfureuse n’est qu’une bonne déconnade de plus, imaginée par un facétieux Belge 100 % pur malt, qui commence par quelques crobards commis sur un coin de table pour une coterie de joyeux drilles francophones à l’ébriété avancée. Enfant terrible d’une bonne famille francophone d’Anvers qui compte un Prix Nobel de médecine, Baudouin de Duve est à l’époque un avenant quinquagénaire à la silhouette dégingandée, du genre qui n’a jamais totalement grandi. Des Buck Danny de son enfance, il a gardé la passion des avions. Dès qu’il a quelques bahts de côté il s’en va survoler les collines du Lanna avec Chris, son vieux pote pilote anglais. Là-haut il rêve. D’un monde où l’humour serait la règle, l’art celui de vivre. Sur terre, il est d’abord artiste touche-àtout. ll peint, dessine, manuscrite, compose et enregistre un CD à Bruxelles…

Bien sûr, comme de nombreux artistes, il ne possède aucun talent commercial. Le riz frit et la soupe aux nouilles, il se les paye en se faisant tour à tour accompagnateur touristique, professeur de cinéma, reporter ou antiquaire.

« Au départ, racontait-il à Gavroche en 2002, je n’avais pas l’idée de faire un album, juste quelques planches que j’envoyais par fax à des amis. Mais j’ai vite été pris à mon propre piège, la blague nous amusait tous et j’ai continué au jour le jour sous peine de décevoir les copains».

Les copains ne seront pas déçus quand en 1999 Bud fait imprimer pour eux des albums, numérotés de 1 à 100 et crédités aux Éditions Syldavie.

Mais déjà l’œuvre commence à lui échapper. Dans les milieux francophones de Bangkok, ses planches circulent…

LE CRABE AUX PINCES D’OR

Un véritable pillage s’organise, ourdi par deux demi-sels, vagues mercenaires étrangers qui eurent leurs heures et horreurs de gloire en Birmanie, au Laos, en Bosnie et sous d’autres latitudes… Les lou as ont airé le bon coup. lls o rent au papa de Tintin en Thaïlande la biographie de l’un d’eux en échange d’un album original. Ensuite, prétendant partout qu’ils ont racheté les droits exclusifs de l’album, ils la font scanner et en impriment quelques milliers d’exemplaires, écoulés dans les bars interlopes de Pat Pong, Patong et autre Pattaya.

« J’étais sous le choc, raconte de Duve, je trouvais minable que quelqu’un de la petite communauté francophone de Thaïlande me fasse un coup pareil ».

Un des pieds nickelés va faire le tour des librairies à Paris. Manque de chance, il tente d’écouler au prix fort plusieurs exemplaires de l’album chez un libraire ami de de Duve…

Les pillards s’avèrent de piètres businessmen. L’un d’eux, endetté jusqu’au cou, revend les « droits » à un autre Français, propriétaire d’un petit groupe de presse à Pattaya, qui décuple le tirage.

D’autres ne s’embarrassent pas de « droits » et piratent à leur tour les pirates. Le patron britannique d’un gogobar de Soi Nana, fait traduire et publier le livre en anglais, « sans rien comprendre aux jeux de mots originaux » sanctionne Baudouin, les yeux au ciel.

À la n de l’année 2000, lassé par la tournure des événements, il rentre s’installer à Anvers, où il veut tout oublier. Un soir bien lugubre de février 2001, deux policiers en armes lui rafraîchissent la mémoire en débarquant chez lui comme s’ils pistaient un tra quant de drogue ou un tueur en série. Ils retournent les matelas, ouvrent les tiroirs, sondent les faux plafonds, puis se livrent à la saisie o cielle du stock restant de 650 albums et 45 planches originales. « lls m’accusaient d’être l’auteur d’une contrefaçon. Je leur ai répondu que jamais je n’avais signé Hergé et prétendu qu’il s’agissait d’un vrai Tintin, que tout ce que j’avais réalisé était une parodie! »

COKE EN STOCK

Mais quelques mois plus tôt, le correspondant en Thaïlande des Éditions Moulinsart, éditeur et représentant des ayants droit de l’œuvre d’Hergé avait alerté son employeur de l’existence de l’album. « Moulinsart avait trouvé cela très grave, car un album conçu comme tel – je rappelle qu’il n’y a que 23 albums o ciels de Tintin, pas un de plus – cela touchait directement à l’essence, au cœur du personnage. Et imaginez, le lendemain de la saisie j’étais dans le journal à la même page que Dutroux!»

Dans les couloirs du Parquet de Bruxelles, de Duve constate en glissant un œil par des portes entrouvertes

que beaucoup de policiers sont en train de lire Tintin en Thaïlande. Il apprend de l’un deux que la maréchaussée a obtenu son adresse auprès de deux apprentis escrocs qui tentaient de faire chanter Moulinsart, exigeant un million de francs belges et menaçant de révéler à la presse le nom de l’auteur de l’album.

Or, les héritiers d’Hergé sont réputés pour le zèle extrême et l’in exibilité avec lesquels ils protègent l’image de leur héros et encadrent rigoureusement son exploitation commerciale.

Coïncidence extraordinaire, le jour de la saisie à Anvers, à neuf mille kilomètres de là… en Thaïlande, le prince héritier Philippe et son épouse Mathilde accompagnent une importante délégation d’hommes d’a aires belges. Lors de la conférence de presse nale, les journalistes s’intéressent surtout à ce Tintin en Thaïlande

Le Bangkok Post publie en Une une photo de la princesse à côté d’un article sur la saisie à Anvers… Le porte-parole de la délégation, Huberl Cooreman, quali e la bande dessinée de « dégoûtante et insultante ». En feignant d’ignorer que plusieurs membres éminents de sa délégation se sont déjà discrètement fait livrer des copies pirates de l’iconoclaste parodie.

THAICRAYON

Dans Thaï-Crayons, paru en 2012 aux Éditions Soukha, Baudouin retraçait son parcours au pays du Sourire à travers la compilation de dessins publiés à l’époque dans les journaux locaux. Il y croquait les déboires des touristes en mal d’exotisme et des expatriés un peu tropicalisés, savamment caricaturés sous son coup de crayon affûté.

L’auteur a nalement pu faire prévaloir auprès du parquet que le procédé ne relevait pas du faux, mais de la parodie et du pastiche « ne dépassant pas les usages honnêtes ». La SA Moulinsart, qui défend les droits a érant à l’œuvre de Hergé, n’a pas insisté et a renoncé à se constituer partie civile. Les albums et les planches originales saisis en 2001 pour contrefaçon par le parquet de Bruxelles furent restitués à l’auteur et l’a aire fut clôturée, sans poursuite judiciaire ni condamnation. SA Moulinsart ne souhaita faire aucun commentaire. La société saisit régulièrement la justice, mais se verra encore à plusieurs reprises déboutée, jusqu’à ce que la justice française reconnaisse en n l’exception de parodie. ■

© Éditons
Soukha

JAPON

Initiation à la culture nipponne

Destination très prisée des voyageurs occidentaux, la terre des shoguns, des samouraïs et des geishas scintille de mille facettes et se déguste à petites gorgées dans une perte totale de repères. Ici, on plonge dans l’inconnu, tout y est différent et chaque kilomètre est un prétexte au voyage et au retour sur soi. Visiter le Japon en 9 jours c’est comme faire le tour du monde en 2 mois mais offre un avant-goût de cet archipel mystérieux parsemé de contrastes, que l’on soit féru d’histoire et de culture, amateur de paysages zen et de cérémonies de thé ou habité de frénésie vestimentaire et technologique.

Photos : Stella Thipsak & Caroline Laleta-Ballini

TOKYO

Avec une superficie 20 fois supérieure à celle de Paris et une population de 35 millions d’habitants, Tokyo a pourtant de quoi séduire les plus sceptiques. Une ville propre, calme, sans violence, sans embouteillages, parfaitement organisée et adaptée aux personnes âgées et handicapées. Tous les quartiers diffèrent les uns des autres et offrent des atmosphères uniques entre modernisme et tradition.

Shimokitazawa, le quartier bohème et branché de Tokyo regorge de magasins vintage, friperies, café-théâtre,

boîtes de jazz et salles de concert.

PLONGÉE PROFONDE AU CŒUR DE LA MÉGALOPOLE

Dans les années 20, les écrivains en panne d’inspiration et les intellectuels s’installent à Shimokitazawa, entourés de nombreuses librairies.

Mais dans les années 50, les férus de mode investissent les lieux avec des surplus américains et des marchés aux puces. La vie du quartier se rythme alors par les dernières tendances en matière d’habillement. Aujourd’hui, jeunes branchés, artistes et musiciens s’y côtoient dans une ambiance décontractée loin de l’agitation des gratte-ciel.

Le quartier s’éveille lentement au déjeuner, on âne dans les petites ruelles bordées de maisons basses, de petites galeries, de magasins de vinyles et de terrasses de cafés, à la recherche de la perle rare, pour y savourer les meilleurs pancakes moelleux à la fraise, ou simplement pour observer le ballet tranquille des passants.

À quelques stations de métro, Harajuku est le cœur névralgique de la mode excentrique et avant-gardiste japonaise et le berceau de la culture du kawaii. Tous les jours, au milieu d’un bain de foule, on peut y croiser d’élégantes lolitas en robes, des gothiques aux cheveux longs et piercings ou des amateurs de « decora-kei » coi és de perruques colorées. La rue piétonne Takeshita regorge de boutiques bons marché et de street food, la Cat Street mêle petites boutiques de créateurs et grandes marques inter-

nationales et l’avenue Omotesandô, les boutiques de luxe au design ultra-soigné.

Si vous avez besoin de faire une pause, le parc de Yoyogi et son célèbre sanctuaire Meiji-Jingû est à quelques minutes à pied seulement. Après avoir rechargé vos batteries et si vous n’avez pas encore votre dose, direction Shibuya, avec ses gratte-ciel ou défilent panneaux publicitaires et enseignes lumineuses, son célèbre carrefour Shibuya Crossing (le plus grand passage piéton du monde) où toutes les minutes, la foule de passants se déverse dans tous les sens dans une chorégraphie improvisée mais parfaitement huilée. C’est un quartier foisonnant de restaurants, bars et bistros pour toutes les bourses où il est bon de se restaurer.

JAPAN EXPERIENCE

Premier voyagiste européen dédié au Japon, Japan

Experience propose de vivre le Japon au-delà du simple séjour touristique. Oubliez les tracas des réservations d’hôtels, des billets de train et des problèmes de connexions internet… avec ses circuits en liberté, Japan

Experience s’occupe de tout à partir du moment où vous posez le pied au Japon pour vous permettre de jouir d’une totale liberté pendant votre séjour. Transfert aéroport à l’aller et au retour, réservation d’hôtels, trains régionaux avec le pass de 3 jours Kansai Area, billet de train Shikanzen pour Tokyo-Osaka, carte de prépaiement des transports en commun préchargée, le Tokyo Metro pass pour 3 jours, un boîtier 4G avec internet illimité pour tout votre séjour avec kit de prise car le Japon est en 120 volts, les billets d’entrée pour certains musées comme le TeamLab Planets à Tokyo. www.japan-experience.com/fr

© Souka Kinmei
Le musée architectural Edo-Tokyo rassemble sur 7 hectares des bâtiments datant du XVIIe au XXe siècle offrant
un aperçu fascinant du passé de Tokyo, afin de garder un témoignage de l’histoire architecturale du Japon.

VOYAGE DANS LE TEMPS ET PROMENADE CHAMPÊTRE

Pour une balade plus bucolique, le musée architectural en plein air d’Edo-Tokyo est situé dans l’immense parc Koganei à l’ouest de Tokyo. L’histoire architecturale du Japon ayant été presque complètement perdue suite aux nombreux incendies, tremblements de terre, bombardements et réaménagements des villes, ces 30 maisons et bâtiments historiques, tous authentiques ont été déplacés de leur lieu d’origine pour être préservés sur place. Le musée est divisé en trois zones à visiter en totale liberté comme si l’on faisait une balade dans un parc. On explore les allées et on pénètre dans les bâtiments pour se rendre compte du mode de vie de l’époque, de l’agencement des pièces et de leur fonction, ainsi que du degré d’équipements et de modernisme des cuisines et salles de bain. Les bâtiments exposés comprennent d’anciens salons de thé et bains publics, d’anciennes fermes familiales à toit de chaume et ateliers d’artisans traditionnels, d’un bar izakaya (l’équivalent de nos bars à vins), d’une épicerie ou encore d’auberges ainsi que des résidences privées d’aristocrates. À titre d’exemple, la maison traditionnelle de la famille Yoshino qui date de la n de l’époque Edo

(1603-1868), la superbe résidence de Korekiyo Takahashi, un homme politique de la n de l’ère Meiji (1868-1912) entourée de son jardin japonais, la luxueuse villa de Hachirouemon Mitsui, qui avait été construite dans le quartier de Nishi-Azabu à Tokyo en 1952 et le studio photo rétro Tokiwadai… Avant d’attaquer la zone Est, un déjeuner au restaurant Kuna s’impose pour déguster les nouilles Musashino Udon, en bouillon ou sautées aux légumes. Dans la zone ouest, une petite pause rafraîchissante vous attend au café Musashino Sabo, directement dans la maison de style occidental de Georg de Lalande, un architecte allemand installé à Shinjuku en 1910. Si vous e ectuez votre voyage en avril, le parc Koganei est l’un des endroits les plus prisés de Tokyo pour apprécier les 1400 cerisiers sakura en eurs du parc.

 www.tatemonoen.jp/english

Les onsens sont des sources thermales naturelles au Japon, connues pour leurs eaux riches en minéraux aux propriétés relaxantes et bienfaisantes pour le corps. Ils se déclinent

sous plusieurs formes en fonction des établissements qui les proposent, extérieurs ou intérieurs.

À l’inverse, les bains publics sento qui utilisent de l’eau chauffée non thermale

sont plus souvent proposés dans les villes et les hôtels. Dans les deux versions, il faut savoir qu’on ne peut pénétrer dans ces bains que totalement nu, sans maillot de bains. En effet, tout le monde

est censé être au même niveau, . De même, les tatouages sont interdits dans les onsen et les sento car ils ont été associés aux yakuza, la mafia japonaise dans le passé. Vous pouvez toutefois les camoufler

avec des sparadrap couleur chair, vendus sur Internet ou dans certains hôtels, si votre tatouage ne dépasse pas 10-15 centimètres.

Onsen ou Sento

TOYOSU FISH MARKET

Pour succomber à la fraîcheur des sushis, direction le Fish Market de Toyosu ouvert en 2018 le plus grand marché aux poissons du monde pour la vente de poissons en gros et fruits et légumes. Mais on y trouve d’excellents restaurants de sushi recommandés par le Guide Michelin, ainsi qu’une célèbre vente aux enchères de thon qui débute aux alentours de 5 h du matin. La galerie marchande Uogashi Yokocho offre une grande variété de produits locaux, souvenirs et ustensiles de cuisine comme les couteaux japonais de la coutellerie Aritsugu, dont les méthodes se rapprochent de celles utilisées pour la fabrication des épées.

Le TeamLab Planets est bien plus qu’un simple musée, cette expérience qui fait appel à tous les sens combine l’art, la technologie et l’interaction humaine.

On démarre cette dernière journée dans la capitale en immersion totale pour ne faire qu’un avec le monde. Le TeamLab Planets fait appel à tous les sens et combine l’art, la technologie et l’interaction humaine. À travers trois zones distinctes, on y découvre la salle des ballons géants qui changent de couleur au contact des visiteurs, l’univers de cristal, un parcours au sein d’un labyrinthe de lumière composé de colonnes de guirlandes lumineuses se ré échissant à l’in ni grâce à une multitude de miroirs, le Soft Black Hole, un espace où l’on déambule sur des surfaces molles et instables qui transforme les mouvements en une expérience ludique et l’installation spectaculaire Cascade of Light Particles, une cascade lumineuse où des particules de lumière semblent s’écouler et réagir à la présence des visiteurs. Avec Drawing on the Water Surface, l’eau, les lumières et les sons se combinent pour créer une immersion totale.Vous marchez pieds nus dans l’eau où des carpes koï de toutes les couleurs nagent à la surface. Leur mou-

vement est in uencé par la présence des personnes dans l’eau ainsi que par celle des autres carpes. Lorsqu’elles entrent en collision avec les visiteurs, elles se transforment en eurs et se dispersent. Au l des saisons, les eurs qui éclosent changent.

Asakusa, le long de la rivière Sumida, est le centre de la capitale nipponne, le shitamachi en japonais,
où survit l’ambiance qui y régnait autrefois.

Durant de nombreux siècles, Asakusa était considéré comme le principal quartier de divertissement de Tokyo, point de rencontre des amoureux du théâtre kabuki au cours de la période Edo jusqu’au début des années 1900 où les studios de cinéma y ont fait leur apparition. Même si une grande partie du quartier a été détruit dans les raids aériens de la Deuxième Guerre mondiale, Asakusa reste un quartier très animé invitant à se promener dans les charmantes petites ruelles au bord de la rivière Sumida. C’est aussi le cœur artisanal de Tokyo, où on trouve nombre de musées et ateliers intéressants, comme Mokuhankan, l’atelier-boutique de David Bull, spécialisé dans les estampes ukiyo-e gravées sur bois, proposant des séances d’initiation. Asakusa peut facilement être exploré à pied mais vous pouvez envisager une visite guidée sur un pousse-pousse jinrikisha pour éviter la foule. Ce mode de transport très populaire durant l’Empire japonais était essentiellement utilisé par les familles japonaises aisées et par les geishas. Prévoyez un tour de 30 à 60 minutes.

Le temple Sensō-ji est l’un des temples bouddhistes les plus anciens et les plus vénérés du Japon, fondé au 7e siècle et dédié à la déesse bouddhiste de la miséricorde Kannon. Une longue allée marchande Nakamise-dori, joint la majestueuse porte aminarimon et son immense lanterne au bâtiment principal du temple. Une centaine de boutiques de souvenirs et stands de nourriture s’y déploient jusqu’en soirée.

KESAKO : WAGYU OU KOBE

Wagyu signifie « bœuf japonais » donc chaque bœuf de Kobe est un bœuf Wagyu, mais tous les bœufs Wagyu ne sont pas des bœufs de Kobe. Mais c’est de Kobe que proviennent les meilleurs bœufs Wagyu du monde. On vous recommande le gyukatsu, un steak de bœuf wagyu pané, croustillant à l’extérieur et tendre à l’intérieur, coupé en tranches pour révéler le cœur saignant et fondant.

IYOSHI COLA

Iyoshi Cola est le premier cola artisanal au monde à utiliser des plantes médicinales chinoises. Fort d’une recette vieille de 135 ans et de recherches approfondies, le fondateur de la marque, M. Kobayashi, a élaboré une boisson rafraîchissante à la fois saine et délicieuse! Il utilise des noix de kola importées d’Afrique de l’Ouest et plus de 12 épices différentes, dont la cardamome et la noix de muscade. Des agrumes, à la fois doux et acidulés, viennent compléter le tout pour lui conférer une saveur délicate.

KYOTO LA BELLE

Ancienne capitale impériale pendant plus de dix siècles, Kyoto abrite 2000 temples bouddhistes et sanctuaires, véritables oasis au cœur de la ville moderne et 34 musées regroupant 20 % des trésors nationaux. Elle offre un contraste saisissant entre la tranquillité de ses temples, ses jardins zen de pierre et de sable ratissé disposés en de véritables tableaux, la vitalité de ses marchés et des quartiers emblématiques tels que Gion, le quartier des geishas avec ses petites maisons de bois clair et ses échoppes sombres.

Gion héberge deux des 5 hanamachi “villes de fleurs” les quartiers de Geisha de Kyoto, baptisés Gion Kobu et Gion Higashi, ses célèbres maisons de thé et ses constructions traditionnelles comme les machiya.

C’est l’opportunité de passer la journée dans ce quartier historique intimiste. La plus emblématique rue Hanamikoji est située dans le cœur sud du quartier : entre Shijo, le théâtre de Gion Kobu

Kaburenjo et le temple Kennin-ji. Sur 1 kilomètre, elle concentre dans une architecture traditionnelle typique de nombreux artisans, restaurants et boutiques et haut de gamme.

Promenez-vous sur les collines de Gion pour découvrir le temple Kodai-ji, construit au 17e siècle par l’épouse endeuillée de Toyotomi Hideyoshi, l’un des uni cateurs du Japon, en l’honneur de son mari. Entouré de vastes jardins, parsemés de pavillons de thé, Kodai-ji doit gurer sur votre liste des temples à visiter. Il est idéalement situé près de certaines des plus belles rues de Gion, dont l’allée Ishibei-koji ainsi que les rues Ninen-zaka et Sannen-zaka.

Le début de la visite débute par un grand escalier de pierre ombragé qui débouche devant le grand bâtiment central, son grand jardin zen et son gravier blanc. Les jardins du temple sont ravissants, avec des étangs bordés d’érables, des passerelles couvertes conçues pour représenter la courbure du

dos d’un dragon, une bambouseraie et des jardins paysagers secs, des maisons de thé dont une dessinée par le célèbre maître de thé Sen no Rikyu (1522-1591).

Vous aurez de multiples occasions de découvrir Kodaiji en soirée. Des illuminations nocturnes spéciales sont proposées au printemps, en été et en automne. et traverser la bambouseraie de nuit est un moment romantique et magique. On y découvre une statue de la déesse Kannon, la déesse bouddhique de la compassion. Dans le mausolée où reposent Hideyoshi et son épouse, vous pouvez voir de splendides exemples de maki-e, une technique consistant à décorer des objets en laque en les saupoudrant délicatement d’or.

GEISHAS EN VEUXTU , EN VOILÀ !

Chaque année, le 1er aout est marqué par le festival Hassaku à Gion, lorsque les geishas (geiko en japonais) et les maiko (apprenties geishas) visitent les maisons de thé pour exprimer leur gratitude, généralement vêtues de leurs kimonos noirs formels. Une occasion unique de jouer les paparazzis et d’observer furtivement des geishas dans un contexte traditionnel, bien qu’il ne s’agisse pas d’un festival public avec des défilés ou des spectacles ouverts au public.

À une demi-heure de Kyoto en train, la capitale du thé vert, cultivé dans la région depuis le 12e siècle, est une petite ville de campagne très calme, traversée par la rivière Ujigawa.

UNE JOURNÉE EN VERT FLUO ET ROUGE VERMILLON

Le thé matcha d’Uji est quali é par les Japonais comme étant le meilleur du monde. Ici, il se décline à toutes les sauces : thé, latte, glaces italiennes, parfait, éclair, le Kit-kat, curry et même des nouilles soba. La rue piétonne d’Uji mène au temple Byodo-in, les amateurs de matcha seront donc servis.

Je recommande cependant le Nakamura Tokishi Byodoin Branch, dans le ryokan historique magniquement restauré, pour déguster un parfait au matcha en surplombant la rivière.

En longeant la rivière, à quelques centaines de mètres de là, le temple Byōdō-in est un magnique complexe de bâtiments rouges centrés sur une petite île où s’élève le pavillon du Phénix : le Hôô dô, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO et trésor national du Japon. Depuis que la secte amidiste a investi le Byōdō-in, l’ensemble a pour vocation de recréer le Paradis bouddhiste de la Terre pure. Depuis plus de 1000 ans les visiteurs s’invitent à la sérénité dans ce joyau architectural. Au printemps, les eurs de cerisiers parent le jardin de leurs couleurs délicates dès le début de la

saison, puis laissent place aux glycines à partir de la mi-avril. Le salon de thé Toka permet de pro ter pleinement de ce cadre enchanteur en dégustant un délicieux thé vert face au jardin.

Quitter Uji vers 16 heures pour vous aller admirer le coucher de soleil au Fushimi Inari Taisha, le sanctuaire shinto aux milliers de torii rouge vermillon. Le chemin formé par ces milliers de portails japonais traditionnels mènent au sommet de la colline et o re une vue à couper le sou e au crépuscule. Il y a 2 parcours de niveau pour atteindre le sommet et sur le chemin, vous croiserez des centaines de renards espiègles bordant des petits temples. Ce sont les gardiens d’Inari, la déesse de la fertilité, du riz, du saké et du thé dans la mythologie shinto.

Pour les amateurs de matcha

A-t-on encore besoin de présenter le thé matcha ? Ce thé vert japonais, brisé jusqu’à devenir une fine poudre verte pleine d’arômes et d’énergie, a déjà séduit des milliers de Français. Au Japon, cela fait des siècles qu’il est consommé en boisson,

dans la plus pure tradition et suivant un rituel très protocolaire. Aujourd’hui, on le retrouve partout. Pour notre plus grand bonheur.

Le thé a été introduit au Japon autour du 8e siècle par des moines bouddhistes venus

de Chine. D’abord consommé par le clergé pour ses vertus stimulantes lors des longues méditations, il fut très rapidement adopté par les puissants puis par les petites gens. Le thé japonais se démarqua alors du modèle chinois

pour développer son goût unique à la délicieuse amertume. Contrairement au thé noir dont les feuilles, récoltées à maturité, sont séchées naturellement et s’oxydent, pour obtenir du thé vert (sencha en japonais), il faut

les sécher à la vapeur pendant 30 secondes après la récolte pour arrêter l’oxydation et ainsi conserver à la feuille sa belle couleur verte.

Situé à l’ouest de Kyoto, Arashiyama est un petit bout de nature rafraîchissant sur les rives de la rivière Hozu, à arpenter sans modération durant un séjour à Kyoto.

ENTRE BAMBOUS ET KIMONOS

Jadis, les empereurs et les membres de la noblesse se pressaient à Arashiyama pour célébrer le hanami, coutume traditionnelle japonaise pour apprécier la beauté des fleurs, principalement celles des cerisiers.

Démarrez la journée avec la célèbre forêt de bambous de Sagano, une bambouseraie avec plusieurs chemins qui serpentent entre les géants verts, ses petits temples et sanctuaires qui parcellent le trajet.

Lorsque les rayons du soleil traversent cette forêt dense, la magie opère. Il est recommandé d’arriver très tôt le matin bien que la bambouseraie soit ouverte 24h/24.

Un peu plus loin se trouve le temple Tenryu-ji « le temple du dragon céleste » avec son sublime parc, son jardin zen sec et son étang ouvert sur la forêt de pins.

Une balade dans les ruelles d’Arashiyama avec ses maisons typiques vous donnera l’embarras du choix pour déjeuner et faire un peu de shopping.

On poursuit la visite sur la rive nord, beaucoup moins fréquentée avec le Adashino Nenbutsuji construit sur un ancien cimetière, ses 8 000 statues bouddhiques érigées en l’honneur des défunts, et

sa petite forêt de bambous totalement déserte traversée par un escalier. Un peu plus bas dans la rue se trouve le temple Otagi Nenbutsuji. Il accueille un peu plus d’un millier de statues de pierre de rakan, le plus grand disciple de Bouddha. Chacune d’entre elles est unique.

En n de journée, direction la gare de tramways d’Arashiyama Randen, sur la plate-forme centrale, pour vous o rir une séance de bain de pieds ashiyu gratuite et tremper vos pieds fatigués après une journée de marche et de visites.

Si l’emblématique forêt de bambous est sans conteste la principale attraction des visiteurs, il existe une autre « forêt » moins connue, la Forêt des Kimonos, qui o re une perspective unique et enchanteresse sur les textiles et l’artisanat japonais traditionnels surtout en soirée.

La forêt de kimonos

L'idée de la forêt de kimonos est née du désir de transformer la gare d'Arashiyama en une attraction nocturne qui encouragerait les visiteurs à explorer la région même après la tombée de la nuit. Hiroyuki Suzuki, qui a supervisé la rénovation de la gare, souhaitait créer un espace qui mette en

valeur la beauté et l'élégance des textiles japonais traditionnels tout en offrant une expérience unique et mémorable aux voyageurs. Si l'emblématique forêt de bambous est sans conteste la principale attraction des visiteurs, il existe une autre "forêt" moins connue, la Forêt des Kimonos,

qui offre une perspective unique et enchanteresse sur les textiles et l'artisanat japonais traditionnels. Cette étonnante installation artistique présente des centaines de piliers colorés de 2 m de haut, enveloppés de tissus de kimono traditionnels, créant une atmosphère hypnotique et enchanteresse.

L'installation a été conçue par le célèbre architecte d'intérieur Yasumichi Morita, qui a soigneusement sélectionné 32 motifs traditionnels différents Kyo-yuzen, style de teinture de tissu originaire de Kyoto pendant la période Edo. Bien que la forêt de kimonos soit ouverte 24 heures

sur 24, c'est la nuit que la magie opère, lorsque des lumières LED illuminent les piliers de l'intérieur, rendant les couleurs plus riches et plus vibrantes. La plus grande concentration se trouvent du côté sud. L'illumination s'éteint à 21 heures.

© Basile Morin

OSAKA

Petite sœur rebelle de Tokyo, Osaka, que l’on surnomme

“la cuisine du Japon” est aussi réputée pour sa vie nocturne animée qui contraste avec l’atmosphère plus détendue de Kyoto. 3e ville du Japon, c’est pourtant elle que l’on a choisi pour accueillir l’exposition universelle de 2025.

Sa longue histoire de 1400 ans fait d’Horyu-ji le plus

vieux sanctuaire bouddhiste du Japon abritant les plus anciennes structures en bois encore existantes au monde.

ÎLE, ROSE ET PATRIMOINE

Le temple Horyuji est situé dans la ville d’Ikaruga entre Osaka et Nara. Il est préférable de prévoir au moins 3 heures pour le visiter. Premier site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, le vaste domaine du temple Horyuji s’étend sur 18 hectares et se divise en deux zones principales. En entrant dans le temple par la grande porte sud, on découvre l’enceinte occidentale centrée sur la pagode à cinq étages et le hall principal, ainsi que sur d’autres structures importantes comme la porte centrale, une salle de conférence et un corridor couvert reliant les bâtiments. Ces chefs-d’œuvre de l’architecture en bois re ètent de l’incroyable habileté et précision des anciens charpentiers japonais, utilisant des techniques si sophistiquées qu’elles ont su résister à des siècles d’intempéries et d’activité sismique. Une courte promenade vers l’est mène à l’enceinte orientale qui s’articule autour de la salle octogonale des rêves. Cette salle, dédiée au prince Shotoku a été construite sur l’ancien site de son palais pour aider à apaiser son esprit. Entre les deux enceintes se trouve la galerie des trésors du temple qui abrite une incroyable collection d’art bouddhique ancien, dont beaucoup sont classés Trésors nationaux. Son histoire est fascinante et regorge de légendes. Horyu- Ji fut fondé par le prince Shotoku en l’en 607 afin d’accomplir le vœu de son père, l’empereur Yomei, de construire un temple et

une statue de Bouddha en guise de prière pour la guérison d’une maladie. Si l’empereur est décédé avant l’achèvement du temple, l’impératrice Suiko et le prince Shotoku ont réalisé son dernier vœu. Bien que Horyu-ji ait été dévasté par un incendie en 670, le complexe du temple a été rapidement reconstruit et achevé au début du VIIIe siècle. Le prince Shotoku est une gure vénérée de l’histoire japonaise, connue pour sa sagesse et ses réformes progressistes qui ont contribué à façonner la société japonaise à ses débuts. Les récits légendaires lui attribuent de nombreux miracles et compétences incroyables, comme le fait d’être capable de parler dès la naissance ou de pouvoir donner des audiences à dix hommes simultanément. Cependant il est à l’origine de la première constitution du Japon, de la centralisation du gouvernement et de l’envoi d’ambassades ocielles en Chine pour renforcer les liens culturels et l’échange de connaissances. Ensuite, retour dans le centre-ville et l’île Nakanoshima coincée entre les rivières Dôjima et Tosabori au pied d’une myriade de gratte-ciel. Le Nakanoshima kôen, l’oasis d’Osaka, a été le premier parc public de la ville en 1891, célèbre pour son jardin de roses aux trois cents espèces di érentes qui invite à une promenade de 3 kilomètres attant tous les sens.

© KimonBerlin
© Nekosuki
© 66Highland

Nara est une destination de premier choix dans la région et un ravissement pour les yeux. Il y a tant à voir qu’il faudrait y rester au moins 3 jours pour profiter de tout
son patrimoine culturel, de ses parcs et forêts.

ENTRE TEMPLES ET BICHES ET JARDINS ZEN

La vie s’y écoule paisible malgré l’a ux de touristes dans certains temples mais en alternant temples et jardins, cette journée restera mémorable.

L’une des principales attractions sont les cerfs Sika en totale liberté dans le grand parc de Nara, dans la ville ou au milieu de la route. Désignés trésors nationaux, leur population a atteint un record historique de 1465 en 2025, dont 315 mâles, 816 femelles et 334 faons.

On démarre avec le temple du 7e siècle Kôfuku-ji et sa ravissante pagode de 50 m de haut. Étroitement lié au puissant clan Fujiwara, il était autrefois un complexe tentaculaire de plus de 150 bâtiments.

Aujourd’hui, Kofukuji reste une attraction touristique majeure en tant que site du patrimoine mondial de l’UNESCO, réputé pour sa collection inestimable d’art bouddhique exposée dans le musée du Trésor national.

Pour un déjeuner traditionnel sur tatami, on vous recommande Yanagi Chaya. Cet établissement historique, fondé au début de l’ère Meiji, est réputé pour ses menus et pâtisseries qui témoignent du riche héritage du restaurant.

Vous pouvez vous rendre à pied au Jardin Isuien sur le chemin du temple Tôdai-ji. Ici le temps s’arrête et se découvre le long d’un parcours alliant eau, bois et pierre en suivant des petits ruisseaux. Cette enclave secrète de verdure allie deux jardins de style di érent. L’un date de la période Edo avec un aménagement paysager autour de son étang symbolisant

la longévité et l’autre de l’ère Meiji privilégiant la perspective, avec en toile de fond l’horizon des monts Wakakusa et Kasuga. Une active maison de thé o re un moment de plénitude dans ce tableau. L’histoire du Todai-ji remonte au VIIIe siècle, une époque charnière pour le Japon. À l’entrée principale du temple siège une porte monumentale (nandaimon) gardée par deux statues en bois de 8 mètres. Au cœur du Daibutsu-den trône la raison d'être du Todai-ji : le Grand Bouddha de Nara, statue colossale en bronze de 15 mètres.

O rez-vous une promenade en pousse-pousse pour vous rendre ensuite à l’étang de Sagi (Sagi-ike) en traversant une partie du parc de Nara sans touristes où les cerfs sont bien plus tranquilles. Cet endroit est magni que avec son pavillon hexagonal en bois Ukimedo qui semble otter au-dessus de l’étang.

Sa ré exion sur la surface de l’eau lui confère un attrait magique.

Faites-vous ensuite déposer dans le quartier traditionnel Naramachi, caractérisé par ces ruelles étroites et ses machiya, d’anciennes maisons en bois qui ont su conserver leur charme d’antan. Certaines sont ouvertes au public. Dans ce quartier foisonnent d’anciennes résidences, petits musées, boutiques d’artisanat, échoppes et restaurants. Terminez cette journée au bord de l’étang Sarusawa qui dévoile surtout ses charmes à la nuit tombée, quand les lumières qui le bordent éclairent les arbres redevenus maîtres des lieux.

LES TAMPONS SACRÉS À COLLECTIONNER

Le goshuinchô « honorable cahier de sceaux rouges » est bien plus qu’un simple carnet de collection car il possède également des vertus protectrices ! Livre de pages blanches plié en accordéon, il permet de collectionner les sceaux officiels « goshuin » des temples ou des sanctuaires que vous visitez. Ils sont composés d’un tampon rouge et d’une calligraphie propres à chaque lieu, réalisés par un moine ou un employé du temple à l’encre de Chine, qui indique le nom du lieu, la date de la visite et une petite bénédiction porte-bonheur. On peut se procurer ces livres-accordéon à l’entrée des temples ou dans les papeteries japonaises. Pensez à le garder en permanence dans votre sac à main.

L’Exposition universelle d’Osaka a accueilli pendant six mois plus de 27 millions de visiteurs venus admirer les pavillons de 160 pays et régions dans un parc
architectural désormais voué à être démantelé.

CONCEVOIR LA SOCIÉTÉ DU FUTUR, IMAGINER NOTRE VIE DE DEMAIN

L’Expo 2025 se tenait sur l’île artificielle de Yumeshima avec pour emblème un imposant « Grand Anneau » de bois de 2 km de circonférence et 20 m de haut entourant les pavillons. Imaginé par l’architecte contemporain japonais Sou Fujimoto, il symbolisait la connexion et la communion des cultures du monde sous un seul ciel et servait également de passerelle panoramique pour se promener au sein du site de l’exposition. Les pays ont redoublé d’ingéniosité et de prouesse technologique pour dévoiler leur architecture, leur technologie et leur savoir-faire autour du thème principal : « Concevoir la société du futur, imaginer notre vie de demain ». Parmi les trois sous-thèmes, Sauver les vies se concentrait sur la santé, le bien-être et les solutions aux dé s mondiaux avec notamment le pavillon Pasona Natureverse qui présentait un cœur articiel battant cultivé via des cellules souches. Le magni que pavillon de Belgique était construit autour des thèmes de l’eau et des cellules, ainsi que des vaccins rappelant sa position en tant que premier exportateur mondial. Le pavillon de Thaïlande intitulé « Immunité », entendue non seulement au sens biologique, mais aussi comme un concept holistique de résilience, englobant la

santé physique, le bien-être mental et l’harmonie sociale, présentait ses prothèses de membres sur mesure en silicone de haute qualité.

Renforcer les vies explorait l’innovation, l’éthique de l’IA et la mobilité urbaine. Une des attractions vedettes étaient le gigantesque pavillon Future City pour répondre à 3 questions essentielles sur comment surmonter les divers problèmes environnementaux et sociaux auxquels nous sommes confrontés, comment résoudre les problèmes liés à notre mode de vie, et quel type de bonheur pouvons-nous créer ? La Ville du Futur imaginée par la Société 5.0 avec 12 coorganisateurs proposait des programmes immersifs étonnants mettant à pro t leurs connaissances et leurs idées. Les visiteurs étaient invités à voter pour des solutions sur notre mode d’habitat urbain, notre type de nourriture idéal, nos futurs moyens de transport et la place que prendrait notre travail dans notre nouveau mode de vie.

Connecter les vies mettait l’accent sur la durabilité et les échanges interculturels. Le pavillon du Japon présentait une météorite martienne car elle représente un lien avec la vie sur une échelle cosmique et la thématique de l’expo de concevoir une société future pour nos vies.

LE PAVILLON FRANÇAIS

Sur le l rouge de « l’hymne à l’Amour », Le pavillon français avait choisi de mettre à l’honneur son savoir-faire en matière d’artisanat d’art, en abritant des sculptures de Rodin, une tapisserie d’Aubusson inspirée du lm d’animation Princesse Mononoké et une gargouille de Notre-Dame de Paris. Au cœur de l’exposition permanente, Louis Vuitton et Dior étaient présents avec deux installations exceptionnelles, Dior a dévoilé son célébrissime tailleur Bar en trois couleurs (bleu, blanc, rouge) avec plus de 400 toiles blanches emblématiques révélées au cœur d’une installation monumentale, aux côtés de acons des parfums réinterprétés en impression 3D. Louis Vuitton a rendu hommage au savoir-faire de la Maison avec une bibliothèque composée de 85 malles, portée par une création musicale créée par l’IRCAM reprenant les sons de l’atelier d’Asnières. Une seconde salle, onirique, présentait une installation immersive où une « géode de malles » de Shohei Shigematsu-OMA s’animait au cœur d’une œuvre vidéo de l’artiste japonais

Daito Manabe.

Le pavillon français a reçu la visite de 4,6 millions de visiteurs avec sa structure cubique drapée de blanc et sa montée sinueuse menant à un jardin de toiture, conçue par Coldefy & Associés et Carlo Ratti Associati. Il a coûté 58 millions d’euros dont 42,5 millions d’euros nancés par l’État et co nancé par plusieurs partenaires, comme le géant du luxe LVMH, les Vins d’Alsace, Ninapharm ou encore l’assureur Axa.

ASTÉROÏDES

Design, créativité, concept, stratégie, JCV met son talent multidisciplinaire au service d’une approche globale et harmonieuse du développement d’acteurs majeurs, en architecture, arts visuels & plastiques, design industriel et intérieur, mode, graphisme, communication ou nouvelles technologies.

Jean Christophe se révèle également, très discrètement, un incroyable artiste.

JE SCRUTE DONC JE SUIS

Jean Christophe Vilain

Ses missions, s’il les accepte, en tant que consultant ou directeur créatif, se succèdent depuis un quart de siècle. Elles partagent des enjeux communs, pour toutes les marques et tous les secteurs : créer, renforcer, étendre ou rénover leur propre univers et leur image.

Jean Christophe les aide à mettre en œuvre des stratégies cohérentes et des processus créatifs dans le cadre d’une vision claire, originale et durable, spéci que à chaque marque.

Mais, architecte de formation, Jean Christophe Vilain étudiant s’intéressait déjà autant à la mode qu’à l’architecture. Pas obnubilé par les projets à long terme, il aimait aussi la légèreté… À ses débuts à Paris, il a la chance de se voir tout de suite engagé dans des agences qui comptent : chez Archistudio ou chez Jean Nouvel, à l’époque où il livre l’Institut du Monde arabe…

En même temps, il monte avec des potes un studio de création. Un de ses associés est photographe, l’autre vidéaste. Jean Christophe travaille plutôt sur les concepts de campagne. Il y ajoute une troisième activité qui, rapidement, se concrétise : il rencontre Chantal Thomass à Paris. Il n’avait encore jamais bossé dans la mode, mais elle voit son book et sa manière de travailler et elle lui propose tout de suite de dessiner de la lingerie pour les Japonaises…

Suivent de nombreux eurons, tels Loewe à l’époque de son acquisition par LVMH, Bally, Clergerie, Pininfarina… jusqu’à Jim Thompson, grâce à qui Latitudes t sa connaissance, quelque temps à peine avant la révolution covidienne. La traversée de cette parenthèse uchronique lui a o ert quelques aventures improbables, un espace d’introspection inespéré et de nouvelles inspirations.

Christophe Chommeloux

AS2307-M “Under The Radar” (detail)

PASSAGE EN HYPERESPACE

Sa série des astéroïdes démarre n 2022 début 2023 à Madrid, où Jean Christophe s’est réfugié pendant la crise sanitaire. Elle procède d’une autre série de tableaux initiée à Bordeaux 10 ans plus tôt : «La solitude des corps ». En fait, Jean Christophe observe la solitude de tout être, de tout objet, il collectionne, capte, isole, étudie, comme le ferait un chercheur ou un enquêteur : «J’accumule.» le mot claque dans sa bouche comme le pêne d’une serrure s’ouvrant vers un monde parallèle.

Pour quoi accumuler, es-tu atteint du syndrome de Diogène, ou as-tu une âme d’encyclopédiste?

Pour essayer de relier les choses. Pour chercher à comprendre. Où s’insinue, où peut apparaître la trace d’un lien (avec ce qui nous précède), d’un chemin (pour comprendre ce qui nous arrive, ce qui nous pousse), où s’immisce l’existence d’une écriture, de signes universels, peut-être gorgés de sens (mais selon quels critères?) hors du théâtre de nos vies intimes.

J’observe l’époque dans laquelle je vis. L’appréhension d’échelles spatiales et temporelles sans commune mesure avec celle qui rythme nos vies, notre quotidien, notre histoire, m’incite à plonger dans l’imagerie scienti que

pour y traquer la présence et les manifestations d’un bouillonnement, d’un rayonnement, d’un relais à notre propre histoire, mais aussi d’un puissant remède à notre insouciance, ou à notre inconfortable «su sance ». Pour aller chercher la beauté ailleurs, hors des contours immédiats du décor, hors des apparences. Dans d’autres réalités. La beauté d’un monde, d’un ordre qui nous dépasse.

Les astéroïdes voyagent silencieusement, projectiles lancés à très grande vitesse. Ils ne ottent pas. Matière brute, masse, densité. Ils traversent l’espace. Ils volent comme un contrepoids idéal à la légèreté. Ils ne cessent de représenter pour nous une menace réelle, hypothétique, mais réelle. Le danger qu’ils trimballent est d’une consistante et imposante beauté, capable de refroidir le plus astucieux des artilleurs, de calmer le plus e réné des jouisseurs sur Terre.

Fragiles que nous sommes, ces énormes cailloux peuvent nous aider à progresser dans l’art de relativiser (nous replacer physiquement au cœur – rien de plus – du fourmillement tellurique qu’est la vie).

C’est la raison pour laquelle je les utilise dans cette série de travaux, a n qu’ils interagissent avec le rythme frénétique qui baigne nos existences éphémères et la production incessante d’images et de constructions tout aussi éphémères.

AS2307-M “Under The Radar”
© Jean-Christophe
Vilain
D2302-M “Lutetia & The Fantastic Odyssey of Life”
© Jean-Christophe
Vilain

« L’actualité et la fréquence des informations nous absorbent, et à l’essor des nouvelles technologies, des progrès de l’IA, correspond une accélération dantesque de l’évolution des comportements. Par mon travail j’essaie aussi de m’interroger sur notre rapport au temps, à notre manière de passer d’une époque, d’une configuration, à une autre.

Garder un œil sur ce qui me dépasse m’oblige à rester éveillé, et à ne pas m’emballer. C’est presque un acte de sagesse… »

Téléportons-nous in moment dans ton atelier…

Les images d’astéroïdes sur lesquelles je travaille sont capturées en basse dé nition sur la toile. Elles me fascinent. Parallèlement à l’accumulation continue de travaux photographiques personnels – sur une myriade de sujets qui constituent mon petit aria privé, j’aime voler des images sur le Net puis les classer, les observer, les décortiquer.

Les images d’astéroïdes sont des images chargées de mystère, comme la matière qui les compose. Ces images nous incitent à cultiver ce mystère, à vouloir le percer, à vriller notre imagination au cœur d’une sorte de métaréalité. Métaréalisme, c’est comme ça que j’appellerais l’observation du réel au-delà de l’apparence du visible. La charnière entre le réel et le grand chaos environnant.

Comment essayes-tu de percer ce mystère?

Dans l’analyse et la représentation d’un sol caillouteux, poussiéreux, parsemé de brindilles, ou dans le pelage d’un chien, l’iris d’un œil, le fouillis des herbes libres et entremêlées dans un champ, les rides d’une peau, les fractures de la glace… peuvent apparaître des mondes parcellaires, des systèmes abstraits à l’architecture dif-

fuse, aléatoire, ou au contraire extrêmement organisée, et la guration devient alors un déchi rage de ce qui prolifère dans le visible, de ce qui organise le visible, le construit.

Dans leur nudité, leur dépouillement sidéral, sur des toiles où ils sont à l’arrêt, les astéroïdes s’imposent comme de puissants symboles d’un milieu en constante agitation et parcouru d’accidents extrêmement violents. Ils soulignent notre fragilité. Leur magnétisme, leur xité dans l’image, leur silence, leur corpulence, leur signalement dans la lumière blanche, accompagnent, perpétuent la fascination exercée par les corps célestes, et le respect des distances, le mystère des signaux émis dans des contrées inaccessibles aux humains.

La science nous permet de nous en approcher un peu…

L’imagerie scienti que contemporaine, la prolifération de ces images, leur circulation libre et massive, amènent en e et à élargir notre approche du réel. Ou à prendre un peu de distance, peut-être pour contrecarrer ou simplement calmer la frénésie de l’époque, son accélération perturbante, quelquefois aveuglante.

Grâce aux techniques d’observation de plus en plus sophistiquées, le visible donne plus à voir que jamais, c’est vrai. Cela peut nous ralentir et nous enrichir en s’éloignant du prisme et des limites de l’œil.

AS2306-M “lnhabited Psyche”
AS2305-M “67P/CG-I I & Three Enigmatic Lines”
© Jean-Christophe Vilain
« À dater de ce jour, je sus ce que c’était que la solitude ; tout objet, toute chose vivante, coute chose mène sa vie à soi. »

Cormac Mc Carthy

La science et les technologies nous rapprochent d’autres objets, d’autres corps solitaires, lâchés à la dérive et susceptibles de nous frôler à la poursuite de leurs propres destinées. Qui sait s’ils ne transportent pas autre chose que la matière inerte… C’est cette matière « silencieuse » qui se métabolise dans la peinture que je veux produire, en frôlant, en questionnant (paci quement) le monde vivant, malléable et instable au sein duquel nous évoluons. N’étant pas un scienti que, il y a sans doute quelque chose de méditatif, voire d’un peu mystique dans cette démarche. Mais là je décroche et j’en ris, parce qu’en réalité tout nous dépasse, non?

Nous cherchons juste des repères. Pour avancer, pour évoluer. En restant bien conscients de notre solitude, de notre fragilité…

Alors revenons un peu au concret. Que fais-tu en premier quand une image médiocre de caillasse intergalactique chourrée sur le ouèbe déclenche improbablement l’inspiration artistique?

Je la scrute! ■

Astéroïdes est une série d’acryliques sur toiles (non montées) de 2x2 m. Elles se basent sur des images basse résolution retravaillées et parfois mixées à d’autres éléments symboliques ou simplement signifiants. Elles sont ensuite peintes au blanc lumineux sur une toile noire comme les tréfonds de l’infini. Avec la volonté primale d’échapper à l’hyperréalisme, Jean Christophe Vilain crée ses visuels résolument conceptuels en se tenant, grâce à la la Low-résolution systématiquement à distance.

SOLIDARITÉ EN THAÏLANDE

28 mars 2025, 13h20… Bangkok est frappée par une secousse brutale dont l’épicentre se situe à plus de 1000 kilomètre, au cœur de la Birmanie.

Le nouveau bâtiment de la cour des Comptes, en cours de construction dans le quartier de Chatuchak, s’effondre en quelques secondes, emportant avec lui des vies, des espoirs et quelques illusions.

ARTISTES SECOURISTES

Sébastien Husson & Doytibet Duchanee

Je suis arrivé sur le site le lendemain de l’e ondrement, nous raconte Seb avec, déjà, un in me tremblement de la voix révélant l’intensité de l’expérience. Comme beaucoup, je ne pouvais pas rester chez moi à regarder les images dé ler sur l’ensemble des chaînes thaïes. Je voulais aider. Ancien sapeur-pompier volontaire, j’avais l’habitude des situations d’urgence. Je savais comment réagir, comment me rendre utile. Mais très vite, la réalité administrative m’a rattrapé. En tant qu’étranger, je ne pouvais pas intégrer o ciellement une équipe de secours. C’était frustrant, parce que je savais que j’aurais pu apporter quelque chose. Alors j’ai fait ce que je savais faire. J’ai pris mon appareil, et j’ai commencé à photographier...»

Sébastien va passer 29 jours sur le terrain aux côtés des équipes de secours, des bénévoles, des militaires et des pompiers. À travers ses photos, il tente de saisir la réalité, la poussière, la peur, mais aussi la force et la solidarité qui émergent alors des décombres. Ce prof de français, photographe plus qu’amateur à qui Latitudes doit de nombreux clichés marquants, apporte un témoignage visuel non seulement sur un e ondrement, mais également sur la résilience d’une cité qui se fait lentement mais sûrement face au drame et à l’adversité, portée par ceux qui ne cessent de creuser, d’espérer, de sauver.

L’exposition et le livre que prépare Seb ne se voudront ni un reportage technique, ni une analyse, mais simplement l’essence de ce qu’il a vécu. Ce qu’il a vu et ressenti et qu’il veut partager, pour que le souvenir de ces semaines aussi inspirantes que dramatiques ne s’évanouisse jamais.

« En me rendant sur le site de l’e ondrement, j’ai trouvé des visages, des gestes, des silences. J’y ai vu l’épuisement, la dignité, l’entraide, et aussi la beauté dans les regards harassés.

Et encore plus que jamais ce fascinant sourire que peuvent arborer les Thaïs, quand même le pire se produit.

De mon côté, je me sentais franchement inutile. Alors j’ai fait ce que je sais faire : j’ai pris des photos.

Je suis resté 29 jours.Vingt-neuf jours à arpenter le bitume, à respirer la poussière, à voir les gens bosser sans relâche, à capter ces instants qui me collent toujours à la peau. »

« Le livre et l’exposition que je prépare pour le premier anniversaire du drame, en mars 2026, sont dédiés à celles et ceux qui n’ont pas eu le temps de fuir. À ceux qu’on n’oubliera pas, à ceux qui ont tout donné sans compter, à ceux qui ont creusé, porté, couru, prié. À celles et ceux qui ont œuvré chaque jour dans l’ombre ou en plein soleil, s’acharnant à sauver tout ce qui pouvait l’être.

Toutes les vies fauchées ce jour-là seront parmi nous, dans chacune des images.

Merci à ceux qui m’ont laissé capter ces instants… »

DOYTIBET DUCHANEE – L’ART DE SAUVER

Beaucoup le connaissent comme le fils de Thawan Duchanee, immense gure de l’art thaïlandais, fondateur du musée Baan Dam à Chiang Rai. Doytibet a repris le ambeau culturel, gère la préservation de ce lieu unique, organise des expositions et fait vivre l’héritage de son père. Mais ce que peu de gens savent, c’est qu’en parallèle, il s’engage dans les secours. Quand il y a une catastrophe, il répond présent et il agit. Il mène des équipes, il sauve des vies. Il a également répondu présent lorsqu’en 2018, 13 personnes se sont retrouvées bloquées dans la grotte de Thai Luang dans le nord de la Thaïlande. Un vrai meneur d’hommes.

Il y a une trentaine d’années, Doytibet a survécu à un grave accident de la route. Ce jour-là, tout aurait pu s’arrêter. Mais au lieu de se refermer sur lui-même, il a choisi de se tourner vers les autres.

C’est à ce moment-là qu’il a décidé de consacrer sa vie à aider. Chaque intervention, chaque geste de secours est devenu une manière de rendre cette seconde chance utile.

Je l’ai rencontré lui et son équipe au cœur des décombres la nuit tombée.

Il ne portait ni costume, ni pinceau. Ce jour-là, il portait sa tenue complète d’intervention avec son casque, genouillères, coudières, talkie-walkie et sa fameuse barre Komando Tactical Survivor Hammer, l’outil par excellence lors d’un sauvetage de ce type.

Grâce à elle, il a pu se mouvoir dans les moindres recoins de cette montagne e ondrée, là où chaque faux pas pouvait être fatal. « Sans elle », dit-il, « je nissais embroché, comme une brochette de barbecue »

Une image brutale, mais dèle à la réalité du terrain

Ce n’était pas juste un outil, c’était comme une extension de son engagement.

Il dirigeait une section de recherche et de sauvetage de nuit.

ils formaient l’équipe fantôme, celle qu’on ne voit pas.

Doytibet m’a confié qu’entre eux ils l’appellent la Yansawang Team, autrement dit « l’équipe jusqu’au matin ». Ils travaillaient quand tout le monde dormait. Silencieux et précis. Personne ne les voyait, lls étaient là quand le monde fermait les yeux.

C’est comme ça que je l’ai connu.

LA SAGA DES 13

L’ODYSSEE DE THAM LUANG

Ce jour-là, je me souviens de son allure : le treillis RKU, les mains gantées, le visage concentré.Cette double facette, je l’ai vue chez lui comme chez beaucoup d’autres sur le terrain. Des gens qui ont une vie bien remplie ailleurs : artiste, ingénieur, commerçant, enseignant… Et qui, quand tout s’e ondre, littéralement, deviennent des volontaires sauveteurs ou héros silencieux.

Doytibet m’a marqué par son calme, son charisme et sa bienveillance envers les autres, même au plus fort de la crise. Je savais qu’il avait une histoire, mais sur place, ce qui comptait, c’était les vies à retrouver, les gestes à faire, les gens à soutenir.

Ce contraste, entre l’art ra né de Chiang Rai et la boue des décombres de Bangkok, n’est pas une contradiction. C’est la preuve qu’on peut être à la fois créateur et protecteur, un homme de culture et homme d’action. À mes yeux, c’est ça un vrai visage de la Thaïlande d’aujourd’hui : ancré dans ses racines, mais surtout tourné vers les autres.

Le 23 juin 2018, douze enfants âgés de 11 à 16 ans et leur entraîneur de football de 25 ans, sont entrés dans la grotte de Tham Luang Nang Non. La montée soudaine des eaux d’une rivière souterraine a contraint le groupe à s’enfoncer plus profondément dans la caverne jusqu’à se retrouver piégé à quatre kilomètres de l’entrée.

Le soir même, l’alerte a été donnée et les opérations de recherche ont commencé. Après 18 jours passés dans l’obscurité d’une caverne inondée, les douze « Petits sangliers » et leur entraîneur ont pu sortir sains et saufs grâce à une opération de sauvetage extraordinaire. En tant que membre des équipes de sauvetage, Doytibet a publié un message sur les réseaux sociaux pour célébrer cette n heureuse :

Tout au long de notre travail à Tham Luang, nous avons vécu une expérience qui a changé notre vie et qui restera à jamais gravée dans nos mémoires, car nous avons pu constater le dévouement et les e orts inébranlables de chacun, qui a travaillé de toutes ses forces.

Nous avons également pu constater l’unité et la solidarité des personnes venues du monde entier, qui se sont rassemblées dans un même élan. Nous sommes ers d’être nés sur le sol thaïlandais sous la grâce royale du roi Rama IX et du roi Rama X. Les repas qui nous ont nourris provenait des cuisines royales.Tout ce dont nous avions besoin pour accomplir notre devoir nous a été gracieusement fourni par Sa Majesté. C’est une bienveillance royale incommensurable. En tant qu’association de secours de la province de Chiang Rai, Saengtham Public Welfare Association, nous ne sommes que de petits rouages dans un grand mécanisme. Notre bonheur vient de l’accomplissement de nos tâches, du service, de l’aide, du soulagement de la sou rance et de notre participation à de telles missions. Notre récompense est le sourire de tous ceux qui rentrent chez eux sains et saufs, et notre force est chaque mot de gratitude, chaque commentaire, chaque « j’aime ».

Je m’excuse sincèrement de ne pas pouvoir répondre à tous les messages envoyés. Cependant, je suis conscient et profondément reconnaissant de tout le soutien et les encouragements que chacun m’a apporté.

Que toutes les bonnes choses que vous avez données vous soient rendues au centuple.

Avec ma sincère gratitude, Doytibet Duchanee Light of Dharma Public Charity

20/7/2018 – avec Rattanaphorn Thupbumrung à Tham Luang-Khun Nam Nang Non National Park, dans la province de Chiang Rai.

Sorte d’obsédé textuel occupé à faire l’humour sur des planches à dessein, Stephff le journaliste cartooniste ne se limite pas à délivrer ses coups de patte graphiques jubilatoires et sarcastiques dans les pages de quotidiens ou sur les écrans du net. L’artiste sort des livres collectors désopilants sur les travers des Farangs en terre de Siam et s’adonne sans transition à la peinture contemporaine d’inspiration tribale...

STEPHFF PASSE LE BACC

Du Mékong à Gavroche, du Bangkok Post à The Nation, en passant par Courrier International ou le Paris Phuket , puis Latitudes , les corrosifs dessins de Steph portent depuis lurette un regard cruel et rigolard, empli de dérision, de révolte et de distance, sur la vie politique et les biais de la société. Installé au beau milieu de son impressionnante collection d’art tribal, l’artiste journaliste peint également des œuvres contemporaines gra tto-ethniques, entre deux critiques acerbes du pouvoir en place ou des travers de ses contemporains.

Ce dernier thème se retrouve sous forme de livres Farang A airs, dont le tome 2 est pratiquement sold-out.

On y trouve un ensemble de dessins soit inédits, soit revisités, réunis au sein d’une édition collector au tirage très limité de 1500 exemplaires, uniquement disponible auprès de l’auteur via sa page Facebook. Steph le promet, une fois cette édition épuisée, il n’y aura pas de retirage, alors ne ratez pas cette rareté contenant quelques perles politiquement incorrectes qui ne seront jamais republiées. Quand aux graphismes d'inspiration tribales, ils font non seulement le bohneur des communiquants de The Groove festival, mais ils se retrouvent également accrochés aux murs expert d'un temple bangkokien de l'art contemporain : le Bangkok Art and Culture Center.

« Cette expo correspond à une nouvelle étape de mon cheminement personnel, de plus en plus tourné vers le spirituel et le mystique, en espérant que cela donne plus de maturité à ma peinture. Le choix du titre “L’Univers est un artiste” vient d’une longue ré exion dont la conclusion se révèle une profonde conviction que l’Univers entier constitue une sorte de matrice créatrice in nie à laquelle on doit se connecter pour soi-même créer.

La preuve en est – pour moi – que les enfants, les peuples primitifs ou les artistes dits “bruts” savent très bien instinctivement puiser dans cette ressource gratuite. En même temps que j’essaye de me connecter à ma part “divine” pour mon bien-être spirituel, j’essaye également de me brancher au génie divin intérieur, présent en chacun de nous, pour évoluer artistiquement. J’espère que mes peintures récentes re ètent une forme de gratitude à l’Univers pour tout ce qu’il m’apporte en tant qu’artiste. » ■

 www.instagram.com/steph _art

 www.bacc.or.th

BACC IN BANGKOK CITY

La photographie de Pavel V. Khon mêle la franchise de la rue, le symbolisme rituel et la narration interculturelle. Son travail explore les gestes générationnels, les contrastes mythiques et les textures émotionnelles de la vie quotidienne.

L’ŒIL DU NAGHASCH

Créatif d’origine russe et coréenne, vivant à Bangkok depuis 2010, Pavel concilie son poste chez LSG Sky Chefs Thailand avec une vie artistique orissante. Le jour, il est responsable grands comptes et coordonne les services de restauration aérienne. La nuit et le week-end, il est documentariste et curateur de l’âme urbaine de Bangkok. Pavel considère la photographie comme une forme de méditation, un moyen de rester présent et de se connecter profondément à son environnement. Bien connu dans le domaine de l’événementiel musical et des festivals pour ses clichés saisissants et ses portraits funky d’artistes et de ravers, traités avec sa touche unique et ra née, Pavel est également réputé pour organiser des rencontres photo #fridaybushesbkk et pour mettre en place des expositions photo internationales, en permanence à la recherche active de talents photographiques de genres et d’horizons divers.

Pavel V. Khon - Photographe, curateur et connecteur culturel basé à Bangkok.

Expositions individuelles :

* Urban Bangkok

* The Feast for the Eyes

* Diverses expositions éphémères à travers Bangkok

Ses collaborations dynamiques en tant que commissaire d’exposition comprennent ::

* Road to Mango Festival

* Lens & Street

* Wandering Frames

* The Lead to Minimal

* Brushlight Mirage: Impressionism

Pavel participe également régulièrement à des expositions artistiques collaboratives, favorisant le dialogue entre les créatifs locaux et internationaux.

 www.instagram.com/naghasch

© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch
© Naghasch

ART CULINAIRE

Autrefois dédié aux peintres, designers et sculpteurs, CLARA est aujourd’hui le temple de l’art gastronomique. À sa tête, le couple symbiotique formé par Clara et Christian a trouvé la recette gagnante : l’accueil chaleureux, l’hospitalité authentique et l’élégance simple de Clara, associés à la passion palpable du chef Christian et à son savoir-faire magistral.

BRAVA CLARA

Notre équipe a une histoire particulière avec cet endroit et peu de gens connaissent le bâtiment aussi bien que nous, à commencer par le manguier caché, que l’on ne peut admirer que depuis le bureau à l’arrière. Ses fruits sont tout simplement délicieux, un bon présage pour un futur restaurant. Autrefois siège d’une entreprise de conserves de poisson tombée dans l’oubli, il était devenu l’une des plus belles galeries d’art de Bangkok :YenakArt Villa. Pendant cinq ans, elle a accueilli de nombreux artistes et ses vernissages furent très prisés des mondains de Big Mango. C’est là que nous avons rencontré Soichiro Shimizu, Maitree Siriboon, Rasmee, Val… et que nous avons fêté les 4 ans de notre ancien magazine Le Paris Bangkok. Puis, lorsque nous avons lancé Latitudes, un partenariat avec le propriétaire de la galerie nous a permis de partager l’espace et d’installer nos bureaux dans cette

impressionnante propriété de style Bauhaus. Nous avons même ni par gérer les expositions pendant environ un an, pro tant du décor pour des interviews et des séances photo. Pour l’anecdote, c’est aussi là que notre rédacteur en chef a rencontré sa future épouse…

AVENTURES GASTRONOMIQUES

Douze ans après avoir donné naissance au sensationnel restaurant italien Sensi, le chef Christian Martena et la maître d’hôtel Clara Del Corso-Martena cherchaient un endroit spécial où se lancer dans une nouvelle aventure culinaire. Nichée dans le paisible quartier résidentiel de Yen Akart, tout en étant située en plein cœur du district de Sathorn, la villa se révéla l’endroit idéal pour CLARA et ils l’ont donc reprise.

Après la période de transformation nécessaire, qui a permis de métamorphoser cet immense espace en un restaurant gastronomique à la fois intime et grandiose, CLARA a ouvert ses portes à la n de l’année 2019.

Notre première bonne surprise a été de découvrir que malgré le réaménagement de l’espace, la villa restait dèle à ses racines artistiques et que les murs de cinq mètres de haut continuaient à mettre en valeur des œuvres d’art sélectionnées avec soin, qui se renouvellent régulièrement. En ce moment, CLARA expose par exemple les œuvres de l’artiste thaïlandaise Aimi Kaiya et de l’artiste français Rudy Meyer.

Les baies vitrées o rent toujours une vue sur le jardin luxuriant, désormais enrichi d’un ensemble de sculptures monumentales et épurées de VAL. Au coucher du soleil, l’éclairage chaleureux et expert de Matteo Masservy donne vie à la façade grand blanc de la villa et à la nature environnante, créant une entrée fascinante évoquant la grande époque des vernissages.

Cet espace remarquable s’adapte à toutes les occasions et à toutes les ambiances grâce à ses multiples espaces. Pour une rencontre intime avec les artisans, vous pouvez choisir l’un des 10 sièges confortables de la Chef’s Table, conçue par le célèbre designer P.Tendercool et tatouée de manière unique par Tantai, un artiste thaïlandais renommé. Vous pouvez vous percher sur les chaises hautes du comptoir de la cuisine pour vous sentir au cœur de l’action.Vous pouvez également monter sur la mezzanine semi-privée pour pro ter d’une vue imprenable.

Après le dîner, pourquoi ne pas vous installer confortablement dans le salon de jardin de P. Tendercool pour déguster une sélection de liqueurs?

GASTRO GIRO

Depuis sa cuisine ouverte, le chef Christian vous embarque dans un voyage culinaire inattendu à travers l’Italie et ses provinces, en réinterprétant ses spécialités avec une touche d’originalité.

Christian mélange en e et sa cuisine natale avec des techniques créatives et modernes, mettant à pro t des produits importés de haute qualité ainsi que de délicieux ingrédients locaux.

Au cours des dernières années, le duo a bouclé une vaste tournée régionale a n de s’imprégner de nouvelles saveurs, techniques et inspirations. Ils ont d’abord fait rouvrir les cuisines de l’emblématique Strand à Yangon, au Myanmar. Ensuite, le chef Christian a rejoint Six Senses Koh Samui en tant que chef exécutif et a perfectionné ses compétences en matière de cuisine gastronomique durable. Plus qu’une simple ode aux saveurs italiennes, CLARA constitue également un hommage à l’épouse adorée, meilleure amie et partenaire commerciale du chef Christian. Elle y exerce sa magie autour des tables avec grâce et partage sa passion pour la cuisine ra née, avec, toujours un profond sens de l’humanité.

CLARA propose désormais un voyage culinaire concocté par le chef Christian, en 6 ou 8 plats, avec des changements saisonniers et l’opportunité d’un accord mets-vins délicat, élaboré par le sommelier passionné Pong, en collaboration avec Edouard Marquis.

Nous avons eu la chance de dîner deux fois chez CLARA. La première fois, nous étions accompagnés de DJ Franck Roger, à la n de sa tournée asiatique en 2021. L’artiste français a ni au bord des larmes, de joie et de satisfaction. Puis Patrizia, notre responsable des relations publiques et de la communication, a déclaré que c’était le meilleur repas de sa vie! La deuxième fois, il y a environ un an, le menu s’est révélé totalement di érent, mais une fête des sens tout aussi exceptionnelle. Une fois de plus, nous sommes repartis en nous demandant pourquoi ce restaurant unique n’avait pas encore obtenu d’étoile Michelin… Même sans cette étoile bien méritée, CLARA gure dans le Guide Michelin Thaïlande depuis 2021. Il a également été récompensé par 50 TOP ITALY comme «23e meilleur restaurant italien au monde en 2025». CLARA a par ailleurs reçu en juin 2025 les «Tre Forchette» du Gambero Rosso, qui lui a aussi récemment décerné à Rome le titre très convoité de «Meilleur restaurant italien hors d’Italie 2026 ».

Le chef Christian Martena a reçu le prix du «Plat de l’année 2023» pour ses spaghettis bruschetta, tandis que Clara Del Corso-Martena a reçu le prix du «Maître de l’année 2024» par 50 TOP ITALY. ■

www.clarabangkok.com

The Fields, tels que les conçoit Bow, « sont comme un monde imaginaire où les arts prendraient le dessus », expliquait-elle à Prestige en 2019. En tant que conservatrice artistique pour Wonderfruit, Bow considère le festival comme avant tout une « célébration éthique des arts, de la gastronomie, de la musique et de l’hédonisme débridé ».

L’ART DU WONDER

Bow Nikan Wasinondh

Formée aux arts visuels, au design et à l’histoire de l’art Bow a débuté sa carrière de conservatrice en 2010 à la BKK Arthouse, au troisième étage du BACC. Elle y a organisé des expositions d’art, de design et d’art performatif, avec un intérêt marqué pour les œuvres tactiles et textuelles. Puis sont venus des projets indépendants avec divers artistes et institutions culturelles, et en 2014 : Wonderfruit ! Pour Bow, organiser un festival en plein air plutôt que dans un cube de béton est totalement di érent : « Lorsque vous créez en plein air, il n’y a plus aucune limite, c’est une expérience qui rend très humble, con ait-elle à Prestige dans

une interview publiée dans l’article “4 Leading Female Art Curators in Thailand you Need to Know”, chacune des architectures et installations de Wonderfruit devient intrinsèquement égale à la nature, à la terre, au climat, aux créatures vivantes... Vous n’aurez jamais le contrôle ultime de l’œuvre, et ce n’est qu’une fois que cela est reconnu et accepté que l’art peut vraiment exceller.

L’art n’est pas dé ni par un moyen ou une forme de présentation, mais plutôt par son intention et le langage créatif utilisé pour interagir avec le monde. »

 www.instagram.com/bow_wasinondh

ART & COMMUNAUTÉ

De nombreuses installations (permanentes, semi-permanentes ou éphémères) servent également d’espaces de rassemblement, que ce soit pour se reposer ou pour pratiquer des rituels.

Dans la forêt ancestrale, de toutes nouvelles installations « Gathering Tables Wonderfruit » ont été créées par Pinaree Sanpitak a n d’être utilisées dans le cadre de programmes axés sur la nature visant à connecter les Wonderers au monde naturel, à travers des rituels de

ART & NATURE

repas, des ateliers botaniques et bien plus encore. Les bases en pierre naturelle sont directement reliées au sol et soutiennent des plateaux en acier inoxydable sur lesquels les gravures réalisées à la main par l’artiste racontent des histoires à plusieurs niveaux.

En revanche, « Embrace: Voices Above and Below » de Hear & Found vous invite à découvrir le monde tel qu’il est vécu par les peuples autochtones qui vivent en profonde communion avec la Terre.

La terre est le plus grand collaborateur et la plus grande source d’inspiration du festival. La nature se révèle de manière inattendue dans les œuvres, influençant et guidant leur évolution. Lorsqu’elles ont été présentées en 2018, les installations de « Island » de Ruangsak Anuwatwimon étaient coupées de l’espace tropical qui les entourait. Les excroissances au sein des structures sculpturales recueillent l’humidité libérée par le sol, créant ainsi des micro-écosystèmes à l’intérieur. Au l du temps, l’œuvre de Ruangsak s’est e cacement reconnectée à la nature. L’année dernière, l’un des arbres qui avait poussé à l’intérieur de l’œuvre a vu ses branches se briser lors d’une tempête tropicale, détruisant une

partie de la structure et laissant une ouverture pour que la branche puisse repousser. Par ailleurs, les mosaïques en miroir de « Mindfulness Amidst Changes » de Sanitas Studio se rapprochent davantage de la nature. En 2022, un arbre de bois de santal brun a poussé à côté. Sanitas l’a intégré à l’œuvre et ajouté un mur de terre a n d’inviter d’autres espèces végétales locales à s’y installer. Dans « The Grower » de Dusadee Huntrakul, la vie se cache toujours dans les recoins et les plis organiques de la sculpture. Une multitude de créatures et d’insectes construisent des cocons dans le bronze, tissant des toiles et laissant des traces colorées parmi les champignons en forme de trompette qui poussent sur tout son corps.

ART & ESPACE

L’art à Wonderfruit questionne : peut-il constituer un moyen d’approfondir notre perception et notre ressenti du monde ? Bien qu’ino ensive, une variation d’altitude a un e et sur notre comportement et nos sensations.

Les formes modulaires et courbes de « The Walk » de Boonserm Premthada sont devenues un repère emblématique. Cette passerelle ottante aux couleurs vives encourage à la fois le mouvement et l’immobilité, attirant des personnes de tous âges à di érents moments de la journée.

ART & ÉVOLUTION

“« Les artistes qui reviennent évoluent dans leur participation, explique Bow. Leurs pratiques changent avec le temps et se re ètent dans leur travail continu sur le site. »

La série de sculptures en acier de Tawatchai Puntusawasdi, « Contour Distort », a commencé comme un projet cérébral et métaphysique.

En traçant une section autour du vide du corps, Tawatchai a déformé le contour guratif en formes presque méconnaissables. Aujourd’hui, avec le parcours spirituel de l’artiste, qui est passé de l’abstrait à l’humaniste, on peut presque voir le changement des sculptures et de leurs ombres, car la dernière addition se rapproche d’une forme corporelle plus identi able.

Elle recadre l’herbe et les cocotiers qui l’entourent, nous permettant de voir The Fields sous un nouvel angle.

Parallèlement, les minces parois de « Microtopia » de TeaRoom créent un petit espace zen sous un groupe d’arbres. Ses barrières érigées s’inspirent de l’architecture japonaise, qui vise davantage à donner un contexte à un espace qu’à empêcher la nature d’y pénétrer, encourageant la concentration et le respect de l’espace rituel.

Cette année, l’œuvre « Singing in My Mind » (anciennement « A Singing Sea ») de Satit Raksasri a également évolué.

Autrefois, cette pièce évoquait la pollution de nos océans, recouverte de matériaux jetés collectés sur les plages et dans les mers de Thaïlande.

En décembre, la structure en forme de dôme s’adoucit, accueillant les Wonderers dans sa structure en forme de cocon. Remplaçant les déchets plastiques par des chutes de tissu et des matériaux trouvés, l’artiste forme un tableau patchwork de gures humaines et non humaines.

 https://wonderfruit.co

9 LEGENDES À

Au cours de la dernière décennie, le festival a résonné de sensations musicales venues des quatre coins du monde. Les festivaliers ont pu découvrirr des artistes thaïlandais mélangeant sons classiques et musique électronique, lo-fi et hip-hop, un collectif de musiciens touaregs, un groupe folk de kirtan népalais traditionnel, des fanfares et toutes sortes de Molam, ainsi que le meilleur de la scène électro, certains lors de levers de soleil inoubliables, d’autres dans l’obscurité profonde de The Quarry, d’autres encore sous une boule à façettes géante ou même à 360° au Polygon... Pour célébrer ces 10 ans, nous ne manquerons pas 9 artistes légendaires !

A Guy Called Gerald

LIVE @ THE QUARRY

Dans l’histoire de la musique électronique britannique, certains noms résonnent avec la force tranquille de ceux qui ont changé la donne sans faire de bruit. A Guy Called Gerald appartient à cette catégorie rare. Gerald Simpson n’est pas seulement un producteur ou un interprète. Il est l’un des architectes fondateurs d’un langage sonore qui s’est propagé des entrepôts de Manchester aux dance oors internationaux, évoluant au l de quatre décennies avec une vitalité qui lui permet de rester incontestablement pertinent.

En 1988, un morceau change tout : « Voodoo Ray ». Il n’est pas exagéré de quali er ce morceau d’hymne, l’un des premiers disques acid house britanniques à avoir acquis une aura quasi mythique. Sa ligne hypnotique 303, ses extraits vocaux spectraux et son intensité minimaliste forment un manifeste. Mais Gerald refuse de se cantonner à un seul succès. Au début des années 1990, alors que de nombreux artistes restent attachés aux formules acid house ou se lancent pleinement dans l’explosion rave, il emprunte une voie di érente. Il se tourne vers la complexité et la profondeur, explorant la conception sonore et la fragmentation rythmique qui annoncent l’essor du breakbeat et de la jungle.

Au l des décennies, il continue à se réinventer. Ses performances live sont particulièrement révélatrices. Peu d’artistes électroniques se produisent avec un tel degré de risque improvisé.

Pour Gerald, la scène n’est pas un endroit où l’on joue des sets préétablis. C’est un laboratoire vivant. Il manipule le matériel en temps réel, construit des séquences, déconstruit des rythmes et remodèle spontanément des morceaux entiers. Ses performances semblent organiques, vivantes, animées par le dialogue homme-machine qu’il défend depuis ses débuts. Cette philosophie explique pourquoi il critique souvent l’obsession de l’industrie pour la perfection polie et préemballée. Pour Gerald, la musique électronique est un art performatif, pas un produit. Farouchement indépendant (vous ne trouverez pas ses morceaux sur Spotify), il préfère réserver sa musique pour une expérience live complète.La beauté réside dans la fragilité de l’improvisation live, dans la possibilité qu’une séquence change de manière inattendue, qu’une machine se comporte de manière erronée, mais d’une façon qui devient magique.

Au-delà de sa propre production, Gerald est devenu une gure mentor, une source d’inspiration pour les producteurs de jungle, de drum & bass et de techno. Son empreinte sur l’explosion rave britannique est plus profonde qu’une simple chronologie. Il représente une façon de créer : indépendante, exploratoire, fondée à la fois sur l’intuition et le savoir-faire. Sa carrière prend encore plus d’importance à mesure que le public contemporain redécouvre les racines de la musique dance.

 https://www.instagram.com/aguycalledgerald

Colleen Cosmo Murphy

@ FORBIDDEN FRUIT

Colleen “Cosmo” Murphy st l’une des voix les plus respectées et les plus singulières de la culture musicale contemporaine. DJ, productrice, animatrice de radio, conservatrice, elle occupe une position unique à la croisée de la culture club, de l’écoute haute délité et de la narration musicale. Dans un monde obsédé par la vitesse et la consommation instantanée, elle incarne une façon plus lente et plus attentive de vivre la musique : écouter pour comprendre, comprendre pour partager.

Elle fait ses premiers pas de DJ à New York à la n des années 80 et au début des années 90, une époque encore imprégnée de l’héritage des block parties et du Paradise Garage. C’est là qu’elle rencontre François Kevorkian, le légendaire DJ et producteur qui devient son mentor. Il lui apprend une vérité fondamentale : un DJ n’est pas seulement quelqu’un qui passe des disques, mais quelqu’un qui raconte une histoire. Cette philosophie imprègne son travail. Le style de Colleen n’est pas dé ni par un genre, mais par une intention. Elle crée des récits en utilisant le jazz-funk, la deep house, le cosmic disco, la soul, les rare grooves et les ballades sophistiquées. Ce qui unit ses sets, c’est une chaleur humaine indéniable. Elle joue pour toucher les cœurs, pas seulement pour dynamiser les corps. Sa fascination pour l’objet sonore l’amène à créer Classic Album Sundays en 2010. Frustrée par les habitudes d’écoute distraites et compressées de l’ère numérique, elle conçoit des sessions où le public écoute des albums cultes sur des systèmes audio haut de gamme, en silence,

du début à la n. Pas de conversation. Pas de multitâche. Juste une écoute profonde et concentrée. Alors que son travail de conservatrice suscite l’admiration, Colleen continue à se produire dans le monde entier. Ses sets, riches en groove et en narration, font le pont entre les époques et les styles. Même dans les moments les plus énergiques, elle conserve son élégance et sa profondeur émotionnelle. Sa connaissance encyclopédique de la musique, acquise au l de décennies de collecte, d’étude et de documentation, alimente sa capacité instinctive à créer un lien avec le public. Colleen est également une ardente défenseuse des femmes dans la musique, non pas par des slogans, mais par l’exemple. Sa carrière contredit discrètement l’idée selon laquelle la musique électronique est un domaine masculin. Elle a tracé son chemin avec indépendance et intégrité, devenant un modèle sans chercher à se mettre en avant. Au l des ans, elle est devenue une médiatrice culturelle, quelqu’un qui jette des ponts entre les générations et les genres. Elle invite les fans de jazz à découvrir la house music, initie le public rock à la disco et montre aux audiophiles la beauté de la culture DJ. Pour elle, la musique est une carte du monde où tout est connecté. À une époque où l’attention est fragmentée, le travail de Colleen semble essentiel. Elle nous rappelle que l’écoute est un acte d’attention. Ses projets (conférences, ateliers, résidences, séances d’écoute) continuent d’approfondir cette philosophie.

 https://linktr.ee/ColleenCosmoMurphy

Howie B & Hitaki Sawa

4 STICKS (LIVE) @ BAAN BARDO

La collaboration entre Howie B et Hiraki Sawa n’a rien d’accidentel. Elle représente un moment précis où la musique électronique dépasse le domaine du son pur pour devenir une expérience audiovisuelle complète. 4 Sticks, leur performance live, n’est pas un concert, plutôt une proposition sensorielle, un dialogue entre les textures électroniques minimalistes de l’un et les univers visuels énigmatiques de l’autre. Howie B, né Howard Bernstein à Glasgow, est depuis longtemps une gure clé de la musique électronique britannique. Producteur, ingénieur du son, compositeur et expérimentateur, il a collaboré avec certains des artistes les plus in uents comme Björk, U2, Tricky ou Massive Attack. Son univers sonore mêle dub expérimental, ambient abstrait, atmosphères trip-hop et une douceur particulière qui transperce même ses morceaux les plus sombres. Pour sa génération le studio n’ést pas seulement un espace de travail, mais un instrument à part entière. Hiraki Sawa apporte un langage visuel profondément ancré dans la mémoire et la poésie tranquille. Ses vidéos mettent en scène des pièces où des gurines miniatures marchent sur des tables de cuisine, des avions glissent silencieusement dans des appartements, des objets se multiplient comme des hallucinations et le familier devient étrange. Les œuvres de Sawa suivent rarement des récits linéaires ; elles évoquent plutôt des états d’esprit, des impressions ambiguës, des fragments de rêves. 4 Sticks est la rencontre entre ces deux sensibilités. Le projet repose sur une idée simple mais radicale : créer une œuvre dans laquelle le son n’illustre pas l’image et l’image n’accompagne pas simplement le son. Au contraire, les deux formes évoluent indépendamment,

parfois en se croisant, parfois en s’éloignant, mais toujours en tension. La performance explore précisément cet espace fertile où les médiums coexistent sans hiérarchie. Sur scène, Howie B manipule des textures, des samples, des fragments de bruit, des échos dub et des patterns percussifs. De nombreux éléments sont construits en temps réel grâce à une improvisation contrôlée, plus concentrée sur les nuances que sur le spectacle. Les sons émergent lentement, comme des souvenirs qui refont surface. La performance tend vers l’immersion : une atmosphère plutôt qu’une démonstration de virtuosité. Les images projetées sur plusieurs surfaces, forment un univers parallèle. Les objets bougent d’eux-mêmes, les gens apparaissent et disparaissent, les espaces se dilatent et se contractent. Ses visuels évoquent la fragilité, la répétition, les boucles méditatives et le sentiment de suspention entre deux mondes. La puissance de 4 Sticks réside dans l’interaction des temporalités. La musique de Howie B évolue par couches, s’étendant et se contractant, tandis que les images de Sawa fonctionnent avec un rythme hypnotique qui résiste au développement linéaire. Il en résulte une sensation de temps suspendu. Le public est invité à entrer dans un espace mental ralenti, rare dans le paysage surstimulé d’aujourd’hui. La mémoire est un thème central. Les deux artistes travaillent avec des fragments : des sons fragmentés, des images fragmentées, des gestes fragmentés. La performance donne souvent l’impression de reconstruire un rêve dont on se souvient imparfaitement. Ce caractère incomplet est le but recherché : 4 Sticks ne vise pas la clarté, mais l’évocation.  www.howie-b.com

Mark de Clive-Lowe

Mark de Clive-Lowe est l’un des rares artistes capables de faire le pont entre l’histoire du Jazz, la culture club et les possibilités o ertes par les performances électroniques live. Pianiste, producteur, compositeur, improvisateur, il a développé une méthode singulière qu’il appelle le « live remix ». Sur scène, il utilise un piano, des synthétiseurs, des échantillonneurs, des boîtes à rythmes et des techniques de boucles pour construire, transformer et déconstruire la musique en temps réel. Rien n’est préenregistré, tout est live.

Né à Auckland d’une mère japonaise et d’un père néo-zélandais, Mark a grandi dans une famille où le piano occupait une place centrale. Il a étudié le Jazz avec une grande dévotion, s’imprégnant des in uences d’Art Tatum, Herbie Hancock, McCoy Tyner et autres géants. Mais il est également tombé amoureux de la musique électronique : Drum & Bass, Broken beat, House. Ce double héritage est devenu son ADN artistique. Le live remix est le prolongement naturel de son éducation hybride. De nombreux artistes électroniques construisent des structures en couches statiques. Mark travaille par vagues. Il peut commencer par un solo de piano méditatif, le transformer en un groove Broken beat, puis le faire évoluer vers une House profonde et soul, le tout en une seule improvisation. Cette élasticité n’est pas une confusion stylistique. C’est une cohérence née de la liberté. Ce qui distingue Mark, c’est sa uidité. La technique est impressionnante, mais jamais le but. Le live remix consiste à créer dans l’instant présent.

Mark utilise les machines non pas comme des béquilles, mais comme des collaborateurs. Il transpose l’esprit de l’improvisation jazz dans un contexte électronique, où la spontanéité devient le principe fondamental. Chaque performance est di érente, car chaque instant est différent. Dans TRIO, Mark revient à l’instrument non pas comme un accessoire, mais comme une force fondamentale, un espace où la mélodie, le phrasé et l’improvisation restent centraux.

Ses in uences sont claires : la profondeur harmonique de Herbie Hancock, la puissance modale de McCoy Tyner, l’élégance lyrique de Bill Evans et l’esprit explorateur de Keith Jarrett. Pourtant, rien de tout cela ne semble emprunté. Mark traite ces in uences à travers son propre vocabulaire, façonné à parts égales par l’histoire du Jazz et par ses années passées sur la scène Broken beat londonienne, qui ont façonné son imagination rythmique. Entouré d’innovateurs tels que Bugz in the Attic, Kaidi Tatham et 4hero, Mark a absorbé une culture qui traitait le rythme comme une entité vivante : polyrythmique, syncopé, soul, futuriste. Cette sensibilité reste audible dans son travail aujourd’hui.

En n a communauté est au cœur de la philosophie de Mark. Ses projets CHURCH, Live Remix Sessions et Hikaru Monogatari servent souvent de lien entre musiciens, danseurs, DJs et public. Il crée des environnements où l’improvisation est partagée, communautaire et rituelle. Pour Mark, la musique est un lieu de rencontre.

 https://bio.site/mdcl

DJ KRUSH

@ MOLAM WORLD

Pionnier du trip-hop et du hip-hop abstrait, connu pour ses rythmes lourds et spatiaux et ses productions qui dé ent les genres, DJ Krush s’est produit dans plus de 60 pays et 350 villes, de Glastonbury au Sonar en passant par Coachella.

Depuis le début de sa carrière solo au début des années 90, il reste l’un des artistes japonais les plus respectés à l’échelle internationale, célèbre pour avoir fait connaître le hip-hop japonais et pour ses sorties sur le label britannique Mo’Wax. Son in uence dépasse largement les frontières du genre, touchant les producteurs, les cinéastes, les artistes expérimentaux et tous ceux qui sont attirés par l’intensité tranquille des atmosphères rythmées. Plutôt que de se laisser séduire par l’énergie débordante du rap, Krush a vu dans le DJing une forme de calligraphie sonore avec la platine comme pinceau. Ses premiers albums : Krush, Strictly Turntablized, Meiso, MILIGHT ont posé les bases de ce qui allait devenir son style caractéristique : des beats minimalistes, des basses profondes, des atmosphères cinématographiques et une utilisation presque méditative du silence.

Là où de nombreux producteurs recherchent la densité, Krush recherche l’espace. Dans sa musique, le silence est vivant. Il est chargé. Il vibre entre les beats comme une ombre.

Le sens du timing de Krush est l’une de ses grandes forces. Ses beats progressent lentement, prudemment, comme de l’encre qui s’étale sur du papier.

Ses compositions ne se précipitent jamais vers une résolution ; elles planent dans la tension, permettant à l’auditeur de se laisser tomber dans l’espace entre les sons. Cette retenue donne à sa musique une gravité émotionnelle. Les auditeurs décrivent souvent ses morceaux comme nocturnes : une musique qui vit dans les ruelles, dans le calme urbain, dans les paysages intérieurs.

En live, DJ Krush est un modèle de précision. Il se produit sans spectacle, sans théâtralité, sans posture. Il aborde son équipement avec une intensité calme, façonnant le son avec des gestes petits et décisifs. Ses sets évoluent comme des récits qui se déroulent lentement. Le public est absorbé dans un monde qui semble à la fois intime et vaste.

L’in uence de Krush est énorme. Il a montré que la production hip-hop pouvait être subtile, atmosphérique, introspective. Son travail a ouvert la voie au downtempo, aux rythmes left- eld, aux mouvements hip-hop instrumentaux et à la conception sonore cinématographique que l’on trouve dans la musique électronique moderne. Les artistes des scènes trip-hop, ambient, beat science et expérimentale le citent encore comme référence. Ce qui rend DJ Krush intemporel, c’est son refus de suivre les tendances. Il continue d’évoluer, explorant des collaborations avec des musiciens traditionnels japonais, des instrumentistes de jazz, des artistes de spoken word et des performers expérimentaux.

Nous attendons avec impatience de découvrir les merveilleux fruits de sa rencontre avec le Molam.

 http://djkrush.jp/jp

Trojan Sound System

DJ SET @ FORBIDDEN FRUIT

Institution de la culture Sound System, refondée par le selecta Daddy Ad en 2004, Trojan Sound System di use son message d’amour et d’unité depuis plus de deux décennies. Cette année, Daddy Ad concocte un DJ set Reggae Disco.

Trojan Sound System est l’incarnation vivante d’un héritage musical et culturel qui a façonné la GrandeBretagne pendant plus d’un demi-siècle. Né du légendaire label Trojan Records, le collectif se pose en ambassadeur de la culture reggae, ska et dub, perpétuant les traditions des sound systems jamaïcains tout en les adaptant au public contemporain.

Fondé à Londres en 1968, Trojan Records a joué un rôle central dans l’introduction de la musique jamaïcaine auprès du public britannique. Grâce à son catalogue, des générations entières ont découvert le ska, le rocksteady, les débuts du reggae et le dub. Ces sons ont profondément in uencé les sous-cultures britanniques : les mods, les suedeheads, les punks, puis plus tard les scènes sound system émergentes. La création de Trojan Sound System est née d’un objectif clair : maintenir la culture vivante sous sa forme la plus communautaire et la plus festive.Trojan Sound System réunit des sélecteurs, des MC et des chanteurs. Leurs performances recréent la chaleur et la puissance des sound systems jamaïcains traditionnels : basses profondes, riddims hypnotiques, longues transitions, versions dub et énergie participative.

La scène devient un espace communautaire plutôt qu’une simple plateforme et les sets s’articulent de manière uide autour de décennies de classiques issus du catalogue Trojan : Desmond Dekker, The Pioneers, Toots & The Maytals, Ken Boothe, Lee « Scratch » Perry et bien d’autres. Mais il ne s’agit pas de nostalgie.Trojan Sound System remodèle ces morceaux grâce à des mixages dub en direct, des versions longues, des toasts et des improvisations hypnotiques. L’authenticité est leur pierre angulaire. Chaque membre est profondément ancré dans la culture reggae, non pas en tant qu’outsider adoptant une esthétique, mais en tant que participant qui comprend la signi cation culturelle, historique et sociale de la musique qu’il représente. Trojan Sound System séduit plusieurs générations. Les fans plus âgés renouent avec des sons formateurs ; le public plus jeune découvre la profondeur émotionnelle et sociale de la musique jamaïcaine. Le collectif crée un espace rare où les barrières s’estompent et où l’unité émerge à travers le rythme.

À une époque où la culture dance recherche souvent l’intensité et le spectacle, Trojan Sound System nous rappelle que le cœur de la musique réside dans la chaleur, la patience, le groove et la connexion. Leur mission est simple et durable : honorer les racines, en ammer la piste de danse et maintenir vivant l’esprit du sound system.

 https://www.facebook.com/trojansoundsystem

Theo Parrish

Theo Parrish est un DJ, producteur, sélectionneur, arrangeur, écrivain, sculpteur, amateur de voitures, artiste visuel, conférencier et père, né à Washington, D.C. mais élevé à Chicago. Influence majeure sur la scène musicale de Detroit depuis 1995, Parrish continue de s’engager, de dé er et de redé nir les limites de la black dance music, montrant l’exemple d’une inoxydable indépendance créative, mélangeant magistralement la soul et les techniques les plus évoluées.

Il est l’une des gures emblématiques de la house de Detroit, un artiste dont les mixes et les productions ont redé ni les attentes en matière de dance music. Il aborde le DJing et la production non pas comme un divertissement, mais comme une forme d’art expressive, ancrée dans les traditions musicales noires, la conscience communautaire et un engagement sans faille en faveur de l’expérimentation.

Élevé au sein d’une riche tradition musicale, entre Jazz, Motown, Gospel et heavy Funk, Theo développe très tôt sens du rythme et sensibilité soul. Ses études en arts visuels façonnent sa compréhension de la composition. Il commence à voir les DJ sets comme des collages, où chaque fragment porte un sens et une histoire.

Dans les années 90, Theo s’installe à Detroit, ville dont l’énergie artistique résonne avec sa sensibilité. Entouré de musiciens, de DJ, de danseurs et d’artistes visuels, il développe une approche unique de la musique house : plus longue, plus profonde, plus brute, plus imprévisible. Ses sets sont célèbres pour leur longueur, leur rythme

narratif et leur palette émotionnelle. Il peut passer un disque de Jazz des années 70, enchaîner avec un morceau de batterie distordu, puis glisser sans crier gare vers une House soulful.

Le genre n’a pas d’importance. La vérité, si.

Les productions de Theo sur son label, Sound Signature, reflètent cette philosophie. Des morceaux comme « Sweet Sticky », « Solitary Flight » et « Be in Yo Self » témoignent d’un style caractéristique : des grooves qui semblent faits à la main, des textures qui semblent sculptées plutôt que programmées, des rythmes qui s’étirent et se déforment. Sa musique semble souvent vivante, presque respirante, avec des imperfections qui servent d’outils expressifs.

Un set de Theo Parrish est une expérience. Pas toujours facile. Pas toujours uide. Mais toujours transformatrice. Il met le dance oor au dé , pousse les auditeurs à l’introspection, les invite à s’abandonner à l’inattendu. La récompense est un sentiment d’unité, de profondeur et de libération que peu de DJ peuvent égaler.

Au-delà de la musique,Theo contribue activement à la vie culturelle de Detroit. Il organise des ateliers, soutient les jeunes artistes et utilise la musique comme un outil d’émancipation. Il défend une vision de la culture dance fondée sur la communauté et le respect.

Theo Parrish reste une force vitale. Alors que le paysage électronique mondial tend souvent vers l’uniformité, il reste dèle à sa propre tradition : expérimentale, soul, politique, profondément humaine.

 www.instagram.com/soundsignature

Tama Sumo & Lakuti

DJ SET @ FORBIDDEN FRUIT

Tama Sumo a commencé à mixer en 93 à Berlin, optenant rapidement des résidences dans la ville. Amoureuse proli que du vinyle, elle partage sa passion pour la musique et l’amour de la vie avec sa partenaire Lakuti.

Curatrice musicale expérimentée, productrice, directrice de l’agence artistique et du label Uzuri, Lakuti a façonné sa carrière en valorisant sa scène et sa communauté.

Tama Sumo & Lakuti font partie des duos les plus respectés de la culture club contemporaine, non seulement pour leur excellence musicale, mais aussi pour les valeurs qu’elles défendent. Ensemble, elles incarnent une vision de la vie nocturne fondée sur l’inclusivité, l’empathie et l’intégrité artistique.

Tama Sumo, DJ résidente de longue date au Panorama Bar de Berlin, est connue pour sa uidité entre House, Techno, Disco, Soul et rythmes afro. Ses sets sont chaleureux, émotionnellement articulés et toujours humains avant tout, privilégiant aux sélections choquantes de sgrooves lents qui instaurent la con ance et l’intimité. Lakuti, fondatrice du label Uzuri, apporte sa propre vision artistique et sociale aux platines. Elle est une force dans la défense des artistes sous-représentés, l’organisation d’événements et la création d’espaces de danse plus sûrs et axés sur la communauté.

Ensemble, leurs sets de DJ se constituent comme des dialogues. L’une introduit une élévation soul, l’autre suit avec un contrepoint profond et rythmique. Le duo tisse des histoires, façonne l’énergie avec patience.

Elles jouent pour la salle, pas pour leur ego et leur alchimie se traduit par une honnêteté émotionnelle rare. Leur set au Solar Stage en 2023 restera pour nous aussi mythique dans l’histoire de Wonderfruit que le nal de 2019 avec La Mamie’s et Camion Bazar.

Leur in uence va au-delà de la musique.Tama Sumo & Lakuti militent pour des environnements de club plus sûrs, représentent les voix marginalisées et remettent en question les inégalités structurelles de l’industrie, montrant que la vie nocturne peut se révéler à la fois joyeuse, politique et compassionnelle.

Leur son est riche : classiques disco, perles de la deep House, trésors africains, tracks techno bruts, surprises soul. Chaque sélection est porteuse d’intention. Leurs sets trouvent un écho auprès du public car ils re ètent des expériences vécues : joie, lutte, communauté, erté. Dans les festivals, les clubs et les institutions culturelles,Tama Sumo & Lakuti laissent une impression durable : la danse comme soin, la musique comme lien, la vie nocturne comme un espace où chacun(e) mérite de trouver sa place.

 www.instagram.com/tama_sumo

3 nuances de Molam

MAFT SAI AND THE ISAN CLAN @ MOLAM WORLD

PARADISE BANGKOK MOLAM INTERNATIONAL BAND @ SOLAR VILLAGE

PARADISE BANGKOK MOLAM “NATIONAL” PROJECT @ MOLAM WORLD

Maft Sai, le visionnaire derrière Zudrangma

Records et le Paradise Bangkok Molam International Band, est célèbre pour sa connaissance approfondie des sons vintage et des traditions musicales mondiales.

Nat est un archiviste. Grâce à des rééditions et à la documentation culturelle, il a contribué à préserver des enregistrements Molam rares, à sauver des artistes oubliés et à restaurer une partie de l’identité thaïlandaise souvent négligée dans la culture dominante.

Aujourd’hui, Paradise Bangkok est un symbole du dynamisme culturel de la Thaïlande, un pont entre tradition et modernité, entre mémoire locale et curiosité mondiale. Leur musique raconte des histoires de rizières, de migration, de célébration, de résilience et de erté. Elle prouve que le patrimoine culturel n’est pas statique ; il grandit, évolue et danse. De retour à Wonderfruit avec un tout nouveau projet, Maft Sai & The Isan Clan réinventent le Molam en mélangeant percussions thaïlandaises,et instruments traditionnels d’Isan au son profond du didgeridoo, des cors, du tambour rummana et autres sons indigènes. Ensemble, ces éléments repoussent les limites du Molam vers de nouveaux horizons.

Au Solar Village, se produit l’original Paradise Bangkok Molam International Band, un ensemble captivant qui mélange harmonieusement la musique traditionnelle thaïlandaise et les in uences modernes. Inspiré par l’atmosphère vibrante et éclectique du club Studio Lam de Nat, le processus créatif du groupe a été in uencé par des jam sessions nocturnes avec des musiciens et des DJ locaux et internationaux. S’inspirant du riche héritage du Molam, le groupe insu e à sa musique des éléments contemporains de funk, de rock, de musique électronique et psychédélique.

Maft Sai est une gure centrale dans la renaissance et la reconnaissance internationale du Molam et du Luk Thung, deux genres traditionnels de la région d’Isan, dans le nord-est de la Thaïlande. Il a réintroduit la musique folk psychédélique thaïlandaise auprès du public mondial tout en préservant ses racines. Le Molam, construit autour du phin (luth), du kaen (harmonica en bambou) et de motifs vocaux hypnotiques, a longtemps été considéré comme un folklore rural, mais en mettant en avant ses rythmes hypnotiques, ses nuances psychédéliques et son énergie dansante contagieuse, il a démontré que le Molam n’est pas une relique, mais une tradition vivante et en constante évolution. Paradise Bangkok incarne cette vision. Réunissant des musiciens virtuoses d’Isan et des instrumentistes internationaux, le groupe crée un son à la fois profondément enraciné et résolument contemporain. Le phin devient électrique. Les rythmes s’intensi ent. Les arrangements irtent avec le Funk, le Dub et le Rock psyché. Pourtant, la musique reste indéniablement molam dans son essence. Leurs concerts sont des célébrations joyeuses. Le public, thaïlandais et international, danse sur des rythmes qui transcendent les frontières. Le groupe apporte l’esprit villageois sur les scènes modernes : énergie communautaire, improvisations ludiques et sens de la cérémonie enveloppés dans un son électrisant. En 2025, le groupe revient aussi in the Fields pour un concert spécial unique sous le nom de Paradise Bangkok Molam « National » Project, a n de revisiter leurs morceaux emblématiques dans un format intimiste, uniquement acoustique, intégrant des instruments uniques tels que la guitare à chevalet en caoutchouc et un phin acoustique fabriqué à partir de câbles de frein de vélo!

 https://linktr.ee/paradisebangkok

Avec une tournée Asie 2025 passée par Hong Kong, Tokyo, Séoul et Bangkok, où nous avons eu le plaisir de l’écouter sur le fantastique sound system du Beam Cube; un retour très attendu sur l’emblématique label techno Tresor avec l’EP Fosph et une soirée déjà légendaire au Rex avec rien moins qu’Alex from Tokyo, Moodyman et le très rare St Germain, DJ Deep disposait de la légitimité pour glisser un subreptice «Wake Up, Bangkok!»

LÉGENDES

DJ Deep

Mais ça n’est guère le genre de Cyril aka DJ Deep. Pour nous il est une légende vivante, mais lui se vit comme un passionné passeur, guère plus.

Circa 1988, l’électrochoc que lui in ige un morceau des Jungle Brothers pousse Cyril à fréquenter les rares soirées house de Paris. Il y fait rapidement la connaissance d’un jeune DJ déjà bien en place : Laurent Garnier, qui l’invite à mixer à ses côtés au Boy et la Luna. Il arrive suffisamment tôt dans l’histoire de cette musique pour s’approprier le pseudo de DJ Deep, il restera toujours dèle à cette profondeur en devenant successivement résident aux soirées Wake Up, puis aux Legends du Rex Club, des événements fondateurs pour la scène électronique parisienne naissante.Viennent des

résidences au Queen, pour les soirées Respect, et une présence sur la FM adolescente, sur Radio FG aux commandes de A Deep Groove, puis sur Radio Nova…

DEEPLY ROOTED

En n, il se coi e de la casquette de producteur, collaborant sous di érents pseudonymes avec Ludovic Navarre aka St Germain sur le label pionnier Fnac Music Dance Division, à qui l’ont doit aussi les premiers disques de Laurent Garnier et qui deviendra F-Com. On le retrouve en duo avec Julien Jabre, sur le mythique label Straight Up avec Olivier Portal ou Franck Roger, qui étrennera bientôt le premier label de Cyril : le fameux Deeply Rooted House.

Cyril se décrit volontiers comme un « ltre », il consacre des heures de son précieux temps à digger chez les disquaires du monde entier à à la recherche de pépites à partager.

Son amour des racines House, Disco, Jazz ou Soul se mélange à son goût de l’avant-garde, de l’Underground, du Raw! Il alterne avec uidité les grooveries acidulées de la bonne vieille House et la Techno la plus radicalement abstraite.

Deep est de ces DJs dont les esthètes quali ent les performances de très « musicales », très Body & Soul, basées sur des rythmiques à danser, mais à travers des mixes racontant toujours une histoire, un trip. Dans ses récentes interviews, il répète souvent à quel point il vient « d’une époque où la musique était d’abord… la musique!»

DJ MODE

Après le casque et la clé USB (le bac de skeudes pour les plus courageux), le t-shirt est l’accessoire le plus indispensable au DJ, un mode d’expression, parfois un motif de erté… De nombreux collectionneurs de t-shirts vintage viennent chiner à Bangkok et Latitudes s’est laissé dire que des confrères que Cyril connaît bien s’adonnent à cette passion, comme DJs Gregory et Yellow. Notre équipe a même accompagné aux con ns de Chatutchak notre invité d’alors DJ Gwen, a n de checker, hélas sans trouver le moindre label House à arborer.

La collection de t-shirts de DJ Deep est (presque) aussi célèbre que sa collection de 60000 vinyles, également glanées aux quatre coins du globe et souvent o erts par les artistes et les labels eux-mêmes. Il en a même fait un livre : Chaotic Harmony, édité par Ed Bangers. Les 500 exemplaires se retrouvèrent en rupture de stock avant même la sortie officielle et il faut désormais quelques centaines de dollars et beaucoup d’heures de chasse pour mettre la main sur le trésor, dont le contenu n’existe bien sûr pas en numérique.

LÉGENDES

Les soirées Legends, lancées par DJ Deep au Rex Club à Paris dès 1994, rendaient déjà hommage aux pionniers de la House et de la Techno de Chicago, Detroit et New York.Véritables passerelles culturelles, elles ont accueilli pour la première fois en France des gures comme Kerri Chandler, Joe Claussell ou Ron Trent. Fidèle à sa vision « music rst», DJ Deep y privilégiait la transmission et la mémoire plutôt que la mode. Relancées pour les 25 ans du Rex en 2013 puis célébrées en 2025 pour leurs 30 ans, ces nuits incarnent l’ADN du club : respect, groove et continuité entre les générations de danseurs. En conclusion d’une année 2025 au cours de laquelle 30 Years of Legends a accueilli au Rex Jeff Mills et Laurent Garnier, puis Lil’ Louis et Ron Trent, l’édition du 9 novembre 2025 se retrouva en rupture de stock en quelques jours. Rien d’étonnant avec un line-up à donner envie de se taper 20000 bornes : le très rare St Germain (son dernier gig à Paname remontait à 2018, déjà au Rex), l’imprévisible Moodymann et la réunion des deux compères Cyril et Alex (from Tokyo).

DJS TO DJS

Chacun leur tour, les protagonistes nous racontent une tranche de leurs vies croisées, à commencer par DJ Deep s’adressant à Ludovic Navarre à l’occasion d’un « entretien avec St Germain», le 25 août 2025.

Cyril: je suis absolument ravi que tu aies accepté de participer à cette nouvelle édition de mes soirées Re-Set… Cela réveille tant de souvenirs du début des années 90, une époque qui résonne aussi avec un autre invité de cette nuit-là : Moodymann.

À l’époque, je faisais mes pèlerinages réguliers chez les disquaires parisiens : Bonus Beat, Rough Trade ou Karamel avec Bétino, à la recherche des derniers imports américains ou anglais. Tu m’accompagnais souvent pour ces longues sessions d’écoute, et parfois j’achetais les disques en double : « Celui-là, Ludo, il est pour toi, tu vas adorer!»

Un jour, en 1994, je rentre avec un disque mystérieux : Mr. Kenny Dixon Jr. – Moody Trax EP, deuxième sortie du label KDJ. Il faisait sensation à BPM ! Tout le monde parlait de ce jeune producteur de Detroit. Tu avais immédiatement été séduit par cette combinaison de Soul et de Funk, mêlée à une esthétique brute et personnelle, la marque de fabrique du jeune Moodymann. Les morceaux «U Got Me Burnin’ Up» et «U Got Me Blunted Up» t’avaient particulièrement marqué, ils évoquaient un peu ton «Sexy & Smooth.»

On n’en revenait pas! En 1994, sans internet, Detroit restait un mythe, et savoir qu’un jeune producteur là-bas avait entendu et apprécié ta musique, c’était incroyable. Tu m’avais encouragé à appeler le numéro imprimé sur le disque, « juste pour dire bonjour ». J’ai tenté le coup : cette voix si reconnaissable a décroché, d’abord mé ante, puis chaleureuse quand on a expliqué notre enthousiasme. Ce fut un moment de pure connexion, la preuve que la musique abolit toutes les distances.

Cette même année, Kenny sortit « Do You Know » sur Grassroots, un disque de chevet pour toi, et «I Like It » sur KDJ, qui imposera son nom pour de bon. Et puis, il y a la fameuse « Ludotape », ce mix que tu avais enregistré pour Radio Nova au début des années 90, où tu mélangeais Jovonn, Reggae, Soul et House. Je l’ai numérisée, c’est, pour moi, l’un des meilleurs sets jamais enregistrés.

St Germain : Oui, je m’en souviens parfaitement. On était fous de ce morceau de Kenny Dope avec son in uence Parliament/Funkadelic. Jovonn, lui, avait ce côté dub qui rendait la transition évidente. Ses boucles étaient hypnotiques, magiques. C’était l’âge d’or de Mental Instrum et Smack, ce son New Jersey qu’on aimait tant, une époque bénie où tout se mélangeait naturellement. Il n’y avait pas de frontières, juste la liberté créative.

Alex from Tokyo passa à son tour à la question 9 septembre 2025…

Alex : En 1994, avec Cyril et Gregory, nous avons fondé le collectif A Deep Groove. Notre émission quotidienne sur FG 98.2 (du lundi au samedi, de midi à 14 h) était dédiée à la véritable musique underground. Lors d’une soirée Wake Up au Rex, Cyril m’a présenté Ludovic Navarre, dont je connaissais déjà certains des premiers travaux sous le nom de Sub System, et j’ai ensuite découvert toutes ses autres productions.

Avec Cyril et Gregory, nous avons aussi découvert les premiers disques de Kenny Dixon Jr. à Paris chez BPM. Son «U Got Me Blunted Up» nous a immédiatement captivés, tout comme KDJ 2 : «I Like It», qui samplait Leon Neal et Visual, une révolution sonore, contemporaine des débuts de St Germain avec Motherland et Mezzotinto.

Puis vint « Do You Know » avec Norma Jean Bell, un morceau d’une profondeur et d’une élégance rares. Je me souviens que Ludovic le jouait sans arrêt. En 1995, «The Day We Lost The Soul,» hommage à Marvin Gaye, a con rmé le génie de Moodymann.

En 1996, de retour à Tokyo, j’ai coordonné la sortie japonaise de Boulevard sur P-Vine Records et organisé deux dates au Yellow Club, les premières de St Germain au Japon. Cette même année, Norma Jean Bell sortait « I’m The Baddest Bitch » remixé par Moodymann, devenu un classique instantané à New York comme à Tokyo. En 1998, j’ai sorti mon mix CD Deep Atmosphere sur P-Vine, avec deux titres de KDJ : «Sunday Morning » et «Long Hot Sexy Nights.» Kenny restait introuvable, un véritable mystère. Quand nous avons tenté d’obtenir les droits, il nous a répondu un matin par fax avec un énorme dessin! On était aux anges.

En n, en 2001, il est venu pour la première fois au Japon, accompagné de Norma Jean Bell. J’ai eu l’honneur d’ouvrir pour lui au Yellow. C’était groovy, funky, magique, inoubliable…

Enfin Moodymann, le 15 octobre 2025, à quelques jours de la soirée :

Je suis honoré de jouer avec St Germain., un génie que nous adorions à Detroit. Il était connu ici bien avant même de le savoir. Le rencontrer a été un privilège il est tout simplement légendaire.

Et Cyril, DJ Deep, il a probablement été l’un des premiers en Europe à reconnaître ma musique. Quand je suis arrivé à Paris, c’est lui qui m’a dit : «Hé, les gens jouent tes disques ici.» Je n’en avais aucune idée. Cyril a été l’un des premiers hors d’Amérique à me montrer de l’amour, à m’ouvrir les yeux sur ce qui se passait en Europe. Notre amitié est profonde.

Et puis il y a Alex, mon frère de Tokyo. Il illumine cette planète depuis des années. Quand tu l’écoutes, prépare ton Shazam, il va te faire découvrir des perles.

St Germain, DJ Deep, Alex from Tokyo… le plaisir est pour moi!

 https://linktr.ee/cyrildeep

Festival de musique , d’art et de nature conçu par Latitudes Media & Events, The Groove se déroule entre Bangkok, Koh Phangan et Koh Tao. Le festival constitue littéralement un voyage, un périple à travers le temps et l’espace, de la jungle urbaine de Big Mango aux plus beaux hâvres marins, aux confins de Tao... Première en 2024, rendez-vous en 2026 !

Le Godfather

«Balance», de l’artiste britannique Francoisgotbuffed, explore l’intersection entre le folklore, le symbolisme et l’urgente nécessité d’harmonie entre nature et humanité.

Balance ton éléphant rose !

Dans le sillage du défunt festival d’Art urbain Bukruk (2016), l’ambassade de France en Thaïlande a créé en septembre dernier une nouvelle sensation artistique avec Krung Thep Creative Streets, une initiative culturelle organisée avec le soutien du British Council et de nombreux partenaires européens et thaïlandais.

Du lundi 15 au vendredi 19 septembre 2025, 15 artistes thaïlandais et internationaux ont peint de gigantesques fresques murales dans di érents quartiers historiques de la capitale. Elles viennent s’ajouter au parcours créé par Bukruk dans les quartiers de Charoen Krung,Talat Noi, Song Wat, South Sathorn, Surawong et Lumphini.

Vous trouverez une carte des œuvres sur le linktree de Latitudes : QR

Inspiré par la culture thaïlandaise, l’éléphant rose apparaît comme une gure centrale dans cette œuvre, non seulement comme une créature fantaisiste ou mythique, mais aussi comme un symbole profondément ancré de chance, de prospérité et de protection spirituelle. Dans la tradition thaïlandaise, l’apparition d’un éléphant rose est considérée comme un signe annonciateur de

changements positifs, de bénédictions et d’abondance. Il est à la fois vénéré et célébré, souvent consacré dans les temples comme un symbole de bonne fortune.

En incorporant ce symbole culturellement significatif, la fresque invite les passants de Charoen Krung Road à entrer dans un espace de ré exion et d’espoir. Pourtant, sous sa surface légère se cache un récit plus profond, qui évoque l’équilibre fragile de nos écosystèmes. Même la plus petite perturbation peut déclencher une série de déséquilibres, soulignant le besoin urgent de coexistence et de protection.

Cette œuvre constitue en n de compte un appel à la pleine conscience, un rappel que la prospérité symbolisée par l’éléphant rose ne peut être pleinement réalisée que lorsque l’équilibre est respecté. À une époque de tensions environnementales et d’impact humain croissant, « Balance » devient à la fois un hommage culturel et un manifeste visuel pour un monde plus harmonieux. ■

 www.fgbworld.co.uk  instagram.com/francoisgotbu ed

Latitudes

QRÉDACTEUR EN CHEF

Christophe Chommeloux +66 (0)918 233 500 chris.choms@gmail.com

COFONDATRICE

Caroline Laleta Ballini +66 (0)869 504 961 carolinelaleta@gmail.com

CONTRIBUTEURS

Christophe Chommeloux, Jean Michel Kau mann, Jean-Christophe Vilain, Allan Thompson, René Mafritte, Nicolas Verstappen, Claude Openeye, Chom’s, Mister Diver, Chris Coda, Jaz E See, Gad Fezer & Caroline Laleta Ballini

IMAGES & ILLUSTRATIONS

Design de la couverture : Enter Project Asia Enter Project Asia, Sawasdee France, Guillaume Tavernier, Wonderfuit, CLARA, Steph , Cartier, Marc Geo roy, Arnaud Nazare Aga,Virginie Broquet,Vie Cosmetics, WikimediaCommons, Istock by Getty Images, Ray Bonner, Gwenaël Louise, Stella Thipsak, Jean-Christophe Vilain, IsoPixel, Naghasch, Christophe Chom’s & C. Laleta Ballini

MAGBOOK INDÉPENDANT EN FRANÇAIS & ANGLAIS

STUDIO SO WHAT CO., LTD. 2/2 Moo 10, T. Chalong, A. Mueang, Phuket 83130 Thailand redaction@magazinelatitudes.com - www.magazinelatitudes.com - www.studiosowhat.com

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.